Bush régne à Damas
                 
 par Gari John                    
  Interceptés sur leur route vers l’Irak par                 la Syrie, qui donne des gages aux USA, des djihadistes sont                 renvoyés à…Tunis
 
 
                 Les geôles de Ben Ali en Tunisie sont pleines à craquer… et les                 700 islamistes qui peuplent les prisons de Tunis ne sont pas des                 plus tendres. Ce sont des activistes violents qui ont été livrés                 aux autorités tunisiennes par les pays « amis » que sont                 l’Algérie et la Syrie. Et le tout avec la bénédiction des                 Américains.                                  Première surprise, le syrien Assad voué hier aux gémonies par                 Bush a donné depuis des gages. Les combattants d’Allah, qui                 espèrent rejoindre les maquis irakiens via Damas sont capturés                 par la police syrienne et renvoyés via leurs pays d’origine.                 Bush est peut-être sur la défensive à Washington, mais il a                 réussi une Sainte Alliance, de Damas à Tunis et Alger, contre le                 péril terroriste.                                  Deuxième surprise, les tunisiens sont particulièrement nombreux                 parmi les « combattants » qui partent pour la guerre Sainte à                 Bagdad. « Un tiers de djihadistes d’Irak viennent de Tunisie »                 estime un expert français. Ce sont ces Tunisiens qui s’attaquent                 en 2006 à la mosquée Najafou ceux-là encore qui firent exploser                 les locaux de l’Onu à Bagdad où le secrétaire général adjoint                 trouvait la mort le 29 août 2003.                                  Les fusillades à Tunis à la fin de 2006 entre la police et les                 groupes armés ont été le signe évident de la montée des périls.                                  Autant dire qu’à Tunis l’accueil est plutôt frisquet pour ces                 soldats perdus à la cause intégriste. Quatre chambres                 criminelles les jugent sans précaution particulière. Vingt                 affaires sont jugées à chaque audience… avec, à la clé, des                 peines qui vont de trente à quarante ans d’emprisonnement.                                  Peu ou pas de peines de mort à Tunis, afin de ne pas heurter                 l’opinion internationale pourtant Ben Ali ne se vante pas trop                 des 700 activistes détenus à Tunis. Après tout, ses amis à Paris                 croient encore avec ce sot de Denis Jeanbar, ancien patron de                 l’Express que « mieux vaut Ben Ali que Ben Laden ».                                  Aujourd’hui, on écope des deux !                                  (Source : « Bakchich » (hebdomadaire                 Satirique – France), N° 20 du 6 février 2007)                 Lien :                 http://www.bakchich.info/article743.html
 
Les hommes clefs du                 pouvoir en Tunisie
                 
 Mokhtar YAHYAOUI                                  Si l’étude du pouvoir se fait à travers l’observation du                 fonctionnement des institutions et de leurs mécanismes de prise                 de décisions ainsi que la gestion de leurs conflits de                 compétences et de pouvoirs qu’ils sont amenés à gérer. Dans                 certains pays intermédiaires comme le notre le pouvoir se                 manifeste et se définit essentiellement par les hommes qui ont                 la charge de l’exercer. Ainsi tout changement dans le groupe des                 hommes au pouvoir peut se répercuter par un changement politique                 et refléter la stabilité, l’homogénéité et la force ou                 l’effritement du pouvoir entant qu’autorité.                                   De ce point de vue, le dernier remaniement effectué par le                 président Ben Ali sur le gouvernement ressemble plutôt à un                 simple réajustement de la formation gouvernementale qu’a un                 ajustement rependant à un changement d’orientation. Le                 remaniement attendu que prédit certains pour annoncer un                 redéploiement politique profond qui repend aux défis des                 événements du début de l’année, à l’entrée en application du                 11ème plan, à l’ouverture du marché sur l’UE et au lancement                 prématuré de la campagne d’investiture pour un cinquième mandat                 présidentiel sans parler d’ouverture politique et des droit de                 l’homme ne semble pas être encore prêt.                                  A son 20ème année de pouvoir le président a déjà procédé à 74                 remaniements. Malgré cette forte cadence d’un remaniement tous                 les trois mois, ces changements n’ont pas laissés d’effet sur                 l’orientation politique hésitante et crispée du gouvernement, ni                 donner le sentiment de parvenir à une formation complètement                 libérée du poids de la crise intérieure qui l’a amené [1].                                  En fait plus de la moitié de ces remaniements n’ont concerné                 qu’un seul membre du gouvernement, alors que 80% ont affecté                 moins de quatre membres du gouvernement. Cette méthode a                 conforté un sentiment d’immobilisme auquel le pouvoir est en                 train de s’identifier. Un aspect qui de plus est en totale                 contradiction avec les virages à 180° auxquels son prédécesseur                 le président Bourguiba a habitué le pays avec chaque nouveau                 gouvernement [2]                                  L’actuel Gouvernement est présidé par le premier ministre                 Mohammed Ghannouchi depuis le 17 novembre 1999. Il continu dans                 la même voie suivie par son prédécesseur H Karoui qui à présider                 le gouvernement pendant dix ans de 1989 à 1999 après une                 éphémère période transitoire du gouvernement présidé par Hadi                 Baccouch au lendemain du 7 Novembre 1987.                                  Aujourd’hui, un sentiment d’impatience prévaut partout dans le                 pays de voir les choses en fin changer et emprunter un ascendant                 d’évolution politique concret. Ce sentiment ne tient pas                 particulièrement à la personne du président, beaucoup ne                 reconnaissent plus à la majorité de ses collaborateurs une                 légitimité qui leurs donnent le droit d’hypothéquer le pouvoir                 qu’ils détiennent à perpétuité. Cette longévité au pouvoir est                 en train de devenir synonyme de blocage et d’inefficacité de                 leur part. Ce sentiment de désenchantement se fond sur une                 croyance dominante qu’un changement de décors ne peut plus être                 que pour le meilleur et dans le sens de l’ouverture politique et                 d’une gestion plus propre et plus transparente des affaires                 publiques.                                  En réalité les choses ne sont pas aussi simples qu’ils                 semblaient. Les événements qui sont entrain de se passer au                 moyen orient nous enseigne que le pire n’a pas de fond et les                 derniers affrontements armés qu’a connus le pays en ce début                 d’année sont venus nous le rappeler. La possibilité d’un                 raidissement du pouvoir encore est aussi plausible qu’elle                 semblait constituer dans la logique de son évolution respecter                 le sens qu’il a adapté jusqu ‘a présent.                                  Une telle évolution, si elle se confirmait, aura besoin d’un                 nouveau discours de mobilisation pour un nouveau combat que le                 pouvoir est sensé appeler le pays à engager. L’ennemi semble                 déjà désigné, les salafistes jihadistes n’auront qu’a occuper la                 position que les islamistes d’Ennahdha ont tenu jusqu’à présent.                 La réunion du prochain comité centrale du parti RCD à l’appel du                 président au milieu de ce mois doit permettre de rependre à la                 question de savoir si le pays essoufflé des séquelles non encore                 guéries de la précédente confrontation intérieure peut                 aujourd’hui se prêter à la nécessité d’une telle mobilisation.                                  
*          *          *                                  D’un autre coté les indices d’une prise de conscience au sommet                 du pouvoir de la nécessité d’une remise en question des choix et                 des priorités de sa politique antérieure ne sont pas moins                 insistantes. La façon par laquelle à été gérée la dernière                 surprise du début d’année des affrontements armés, malgré tous                 les critiques qui lui ont été faites, a démontré que les va-en                 guerre n’ont pas trouvé libre voie à leur discours de surenchère                 et qu’une volonté d’apaisement peut se cacher derrière la                 confuse gestion de l’événement. On peut aussi détecter dans les                 échos que les chefs des partis qui on rencontrer le président                 ont donné de leurs entretiens avec lui une volonté d’attirer                 l’attention sur un autre aspect de la situation que présente la                 fracture qui est entrain de s’opérer dans notre société et dont                 le processus dominant est cette marginalisation des jeunes                 générations qui est entrain de mettre notre jeunesse totalement                 au banc de la société. Les donnés publiés dernièrement des                 résultats d’une enquête nationale sur la jeunesse semblent                 corroborer cette prise de conscience de la gravité de la                 situation et des véritable défis quelle mettait en avant, des                 défis qui ne peuvent plus être résolu que par une politique de                 participation à l’opposé de toute nouvelle confrontation. Une                 jeunesse ne peut qu’occuper l’avant-garde d’une société et                 constituer la dynamo de son progrès. Le pire des drames qui peut                 arriver aujourd’hui à notre pays est de cataloguer sa jeunesse                 au chapitre du terrorisme et de l’identifier en ennemi.                                  À l’examen de la situation, peut-on espérer qu’un changement                 peut cacher un autre plus important ? Beaucoup de haine et de                 mépris se sont accumulés ces derniers temps instaurant des                 rapports aigris et un climat malsain dont seule la retraite de                 ses symboles des deux coter peut permettre de le dépasser. La                 république en son cinquantième anniversaire à peut être besoin,                 avant toute autre chose, d’un nouveaux gouvernement.                                  Aujourd’hui avec le premier ministre Mohammed Ghannouchi trois                 autres aussi ont fait partie du gouvernement depuis le 7                 Novembre 1987. Il s’agit de Abdelwahab Abdallah actuel ministre                 des affaires etrangéres, Mondher Znaidi ministre du commerce et                 Abderrahim Zouari ministre du transport. A coté de ces quatre                 doyens du gouvernement, Trois autres membres du premier                 gouvernement occupent les plus hautes responsabilités. Hamed el                 Karoui ancien premier ministre est vice président du parti,                 Fouad Mbazzaa est président de la chambre des députés et                 abdallah Kallal est président de la chambre des conseillers. La                 palme de longévité de tous les temps revient au ministre                 conseillé porte parole du président. Abdelaziz Ben Dhia fait                 partie du pouvoir depuis le gouvernement Hédi Nuira des années                 70 et à travaillé avec tous les premiers ministre depuis.                                  Avec le président ben Ali le pouvoir est partagé entre huit                 hommes clefs auxquels il s’identifie aussi bien qu’a lui et perd                 par là son unité que le président doit seul symboliser. Cette                 fidélité que personne ne croit plus qu’elle bénéficie à la                 Tunisie est devenue le véritable handicap face au président pour                 exprimer pleinement sa politique à lui et réussir à la faire                 percevoir en tant que tel par le pays.                                  
Yahyaoui Mkhtar – Tunis                 le 05 Février 2007 [1] – En 1989 le remplacement du premier                 ministre Hédi Baccouch par Hamed karoui s’est produit dans la                 foulée de la crise avec les islamistes et annonçait la politique                 d’éradication du mouvement Ennahdha.                                  [2] – le président Bourguiba dont la présidence a durée 31 ans                 (1956-1987) a changé de l’expérience  du coopérativisme au                 libéralisme économique avec le gouvernement Hédi Nouira pour                 changer ensuite de la tendance pro-occidentale de ce dernier à                 l’expérience panarabe avec le gouvernement M. M’zali et de                 l’ouverture politique avec ce dernier à la politique sécuritaire                 avec les gouvernement R. Sfar et Z. Ben Ali.                                  (
Source : le blog « TunisiaWatch », le 5                 février 2007 à 16h00) Lien :                                http://tunisiawatch.rsfblog.org/ 
  
 Inégalité dans l’héritage,                 
héritage d’une préférence divine*
 
                 
 Raja Ben Slama                                  Avant la réforme de 2001 en France, l’enfant « adultérin »                 voyait sa part successorale amputée de moitié. En application du                 verset coranique « Au mâle, portion semblable à celle de deux                 filles » (VI/11), une fille tunisienne « légitime » subit                 actuellement le même sort, c’est-à-dire la même réduction à la                 moitié. La réforme qui accorderait les mêmes droits successoraux                 aux héritiers sans distinction de genre ou de nature de la                 parenté n’a pas eu lieu en Tunisie. Mais ce qui est à  souligner                 toutefois, c’est que l’enfant « adultérin » d’un système                 équivaut à la fille légitime d’un autre.                                  Cet amalgame de deux systèmes juridiques différents peut                 paraître incongru, mais il est une sorte de traduction qui nous                 révélerait d’abord un aspect indicible du dispositif d’exclusion                 sur lequel reposent les systèmes successoraux traditionnels. La                 réduction des droits successoraux se fondant sur le sexe et                 celle qui se base sur la nature de la parenté ont un point                 commun :  elles résultent de la même crainte d’un certain                 trouble de la filiation et de la transmission des biens du père                 de la famille. L’enfant adultérin est le rejeton issu  de                 l’étrangère, quant à la fille, et même si elle est légitime,                 elle demeure l’étrangère qui ne portera pas le nom du père et                 qui épousera l’étranger, cet étranger qui s’immiscera                 indirectement dans l’héritage du père. La femme introduit                 l’étranger dans le clan ou transmets les biens du clan à un                 étranger tout en étant, paradoxalement la gardienne de                 l’identité. Un même culte du propre et de la propriété privée                 agnatique, de la patrilinéarité et du patronyme semble présider                 à cette discrimination successorale.                                  Cette « traduction » met aussi en valeur la violence douce et                 froide   émanant de la discrimination institutionnalisée. Le                 partage de l’héritage est ce moment mystérieux où se                 cristallisent l’être et l’avoir et où l’on peut se dire en                 secret : « on a ce qu’on est », femme ou enfant illégitime, on a                 la moitié parce qu’on n’est qu’une moitié… Et c’est dans les                 moments cruciaux du deuil, de la séparation et du partage que                 ces deux exclus auront vécu ce qui leur marque comme des êtres                 hybrides,  compromettant la lignée et la transmission des biens.                                  Mais l’étrangeté de la femme est encore plus fondamentale que                 celle de l’enfant adultère, puisqu’elle ne résulte pas des faits                 contingents de la vie des parents, mais est inhérente à son                 identité sexuelle même, c’est-à-dire à son être de femme. Il est                 d’ailleurs hautement significatif que l’interdit successoral est                 aujourd’hui  organisé autour de la femme, puisqu’un enfant                 illégitime tunisien peut être traité comme ses frères légitimes                 si le père le veut, alors que l’égalité successorale entre les                 sexes fait l’objet d’une opposition virulente et accrue. Or                 l’équivalence qu’on vient d’établir entre l’enfant illégitime et                 la femme, même si elle révèle la nature et la gravité d’une                 maltraitance juridique, ne rend pas compte de l’interdit qui la                 maintient et la pérennise quand il s’agit des femmes musulmanes.                 La théorie lévi-straussienne de l’échange des femmes telle                 qu’elle a été reprise par Simone de Beauvoir peut-elle présenter                 un fondement anthropologique à cet interdit successoral qui pèse                 sur les femmes musulmanes?                                  « Le lien de réciprocité qui fonde le mariage n’est pas établi                 entre des hommes et des femmes, mais entre des hommes au moyen                 de femmes qui en sont seulement la principale occasion. » écrit                  Lévi-Strauss. La conséquence en est que « les femmes font partie                 des biens que ceux-ci (les hommes) possèdent et qui sont entre                 eux un instrument d’échange », écrit Simone de Beauvoir[1].                 Cette institution avait représenté une avancée vers la culture                 et la pacification des relations entre les hordes humaines,                 puisqu’elle avait nécessité l’interdit de l’inceste et permis                 l’exogamie et l’alliance entre les groupes. Selon la logique en                 découlant, la femme, à priori, ne devrait pas hériter                 puisqu’elle est un bien qu’on hérite, que les maîtres héritent.                                  Mais l’échange des femmes et leur déshéritement total semble                 appartenir à une époque plus reculée et n’existe déjà plus à                 l’état pur quand l’Islam est apparu. Certes, la femme de                 condition libre était souvent « vendue » contre une dot, et elle                 appartenait au mari et à son clan. Elle était vendue contre du                 bétail ou comme des esclaves, mais elle n’était pas un simple                 bien et ne faisait pas l’objet des opérations qui découlaient de                 l’esclavage total (vente, donation, louage… ) Très souvent même,                 c’était elle qui endossait le prix de sa vente. Elle avait le                 pouvoir d’engendrer, mais elle disposait aussi d’un autre                 pouvoir :  elle parlait et se défendait d’être une chose,                 réclamait des droits, déclamait parfois des poèmes et tombait                 amoureuse au lieu d’épouser l’homme choisi par les clans. Disons                 que son activité de sujet humain, parlant et désirant, ce dont                 le schéma abstrait de l’échange des femmes ne rend pas compte,                 ni même celui de la domination masculine chez Bourdieu, créait                 des résidus qui grignotaient sans cesse le système de l’échange                 des femmes dans sa logique implacable qui fait de la femme une                 propriété du père léguée au mari.                                  L’historienne tunisienne Latifa Lakhdhar a montré que le                 prophète avait privilégié la tradition mecquoise en légiférant                 en matière d’héritage : « …Dans cette ville de négoce vers                 laquelle revient le prophète, et contrairement à la tradition                 médinoise où les femmes étaient exhérédées au même titre que les                 enfants, à la Mecque la femme avait droit à l’héritage (comment                 d’ailleurs sinon Khadija la première femme du prophète                 aurait-elle eu sa richesse si connue ?), voilà pourquoi pour                 beaucoup d’orientalistes, ces nouveaux acquis prescrits aux                 femmes par le Coran au niveau de la possession des biens par                 l’héritage étaient inspirés par le régime successoral mecquois.                 » Mais Latifa Lakhdhar a montré aussi que « l’attitude                 revendicative des femmes qui étaient dans l’entourage du                 prophète » avait joué un rôle considérable dans cette décision.                 Autrement dit, l’égalité successorale n’était pas de l’ordre de                 l’impensable, malgré la loi de l’échange des femmes. N’ayant pas                 droit au butin remporté des conquêtes prophétiques, les femmes                 voulaient avoir leur part successorale, réclamaient parfois même                 une part égale à celle de l’homme. On rapporte qu’Oum Salama,                 une des épouses du prophète avait dit au prophète « Ô prophète                  : on ne nous donne pas d’héritage et on ne nous permet pas de                 participer à la guerre Sainte !? Dieu a alors fait descendre le                 Verset »[2]. Le verset dont il est question rétablit l’ordre                 statutaire duquel dépend le régime successoral : « N’aspirez pas                 à ce dont Dieu avantage les uns sur les autres. Les hommes                 auront une part de ce qu’ils se seront acquis, les femmes une                 part de ce qu’elles se seront acquis ».(IV/ 32)                                  La donnée anthropologique de l’échange des femmes ne suffit donc                 pas à rendre compte des régimes successoraux, puisque les femmes                 pouvaient être échangée sans être héritées ou déshéritées. On                 pourrait même avancer que le principe de l’échange des femmes,                 avec comme corrélat l’interdit de l’inceste peut s’exercer selon                 une modalité qui ne contrevient pas aux principes égalitaires,                 comme dans les sociétés démocratiques modernes. Le facteur                 déterminant dans l’inégalité successorale islamique est bien la                 suprématie des  hommes qui n’était ni implicite, ni sans                 conséquence juridique. Elle était clairement proclamée par le                 Coran, rappelée par le verset 34 de la même Sourate : “Les                 hommes ont autorité sur les femmes du fait qu’Allah a préféré                 certains d’entre vous à certains d’autres, et du fait que [les                 hommes] font dépense sur leurs biens [en faveur de leurs                 femmes]….” (VI, 34, Blachère II, 935).[3] Ce verset  institue                 donc le principe religieux et juridique de l’autorité et de la                 prévalence des hommes sur les femmes, en réponse à la                 revendication de ces femmes.                                  Cheikh Mohamed Tahar Ben Achour, qui compte parmi les plus                 illustres exégètes de la première moitié du XXe siècle, est                 peut-être l’un des derniers savants musulmans à avoir reconnu                 l’importance capitale du principe de l’autorité des hommes sur                 les femmes, sans nier le présupposé sur lequel il repose, à                 savoir la prévalence des hommes sur les femmes : « Quant au                 verset « Les hommes ont autorité sur les femmes », il constitue                 un fondement juridique dont se ramifient les jugements des                 versets suivants. C’est comme un préambule […] La préférence                 émane des privilèges innés qui font que la femme a besoin de                 l’homme pour sa défense, pour sa protection, sa survie […] Les                 signes de cette préférence se sont manifestés à travers les âges                 et elle est devenue un droit acquis pour les hommes. Cela                 constitue une preuve éclatante de ce que les hommes ont autorité                 sur les femmes. Le besoin des femmes pour les hommes de ce point                 de vue perdure, bien que son intensité soit plus ou moins forte.                 »[4]                                  La première musulmane aurait donc gagné la moitié de la bataille                 : elle ne serait pas totalement déshéritée comme les médinoises,                 mais elle ne pouvait être l’égale de l’homme dans un régime qui                 reposait sur ce principe religieux et juridique. Par la suite,                 avant d’en arriver au déni moderne dont nous essaierons de                 rendre compte, nous trouverons des rationalisations du système                 successoral chez des penseurs comme les Frères de la Pureté qui,                 au IVe siècle de l’Hégire voulaient défendre la justice divine                 en arguant que la dot est l’équivalent de la moitié de la part                 successorale dont les femmes sont privées et qu’elle est une                 récompense équitable aux femmes[5]. Mais ce qui échappait à ces                 théologiens qui n’avaient pas les mêmes réflexes que les                 docteurs de la loi, c’est que tout d’abord la dot n’est pas                 l’équivalent de l’héritage, puisqu’elle est, « juridiquement »                 parlant, le prix payé pour la possession sexuelle du corps des                 femmes dans l’échange matrimonial et que l’inégalité                 successorale est strictement liée à la hiérarchie des statuts                 juridiques telle qu’elle a été posée par le Coran et affinée par                 le droit musulman. Les musulmans étaient supérieurs aux non-                 musulmans, les hommes et les femmes de condition libre étaient                 supérieurs aux esclaves, mais les hommes étaient supérieurs aux                 femmes. Les « hermaphrodites avérés » étaient même supérieurs                 aux femmes eu égard à leur moitié masculine supposée. Cette                 hiérarchie conditionnée par les différentes inégalités n’est que                 reproduite par le système successoral.  Vue sous cet angle, la                 société se composait des héritiers à part entière (les hommes                 libres), de ceux qui héritaient l’équivalent de la moitié de la                 part des femmes et de la moitié de la part des hommes (les «                 hermaphrodites »), des demi-déshérités (les femmes donc), des                 déshérités (les femmes non musulmanes qui ont épousé des                 musulmans, les enfants adultérins et les criminels), ceux dont                 on hérite pas (les apostats et les non-musulmans) et ceux qui                 étaient hérités mais qui n’héritaient pas (les esclaves). Si la                 part successorale de la femme est réduite à la moitié, c’est                 bien parce qu’une femme valait la moitié d’un homme. C’est ce                 que révèle le droit pénal qui considère que le prix du sang                 d’une femme vaut la moitié de celui d’un homme. C’est la raison                 pour laquelle aussi le témoignage de deux femmes vaut celui d’un                 seul homme. Nous retrouvons là une modalité de l’échange des                 femmes qui considère que la femme n’est pas un simple bien                 échangé et c’est ce qui fait qu’elle hérite. Mais le principe de                 l’autorité des hommes et de leur prévalence est à l’œuvre dans                 cette modalité, puisque la femme, tout en n’étant pas un simple                 bien, est la propriété d’un père qui la cède à un mari auquel                 elle appartiendra et obéira. Le contrat de mariage est                 d’ailleurs conçu comme un contrat de vente et le mariage comme                 une sorte d’esclavage[6]. Bref, si l’esclave participait de la                 chose et de la personne humaine, la femme participait de                 l’esclave et  la personne libre à la fois. La conséquence en est                 que la femme valait la moitié d’un homme et héritait de la                 moitié de la part d’un homme.                                  Le système de l’autorité des hommes et de leur prévalence sur                 les femmes est aujourd’hui mis à mal par la modernisation                 sociale et ce, pour plusieurs raisons :  1/ la femme se prend en                 charge et prend la famille en charge par son travail.                 L’obligation de dépense par laquelle on justifiait le principe                 de l’autorité des hommes n’est donc plus valable. L’autorité                 parentale se substitue ainsi à l’autorité paternelle. De plus,                 la dot est devenue une affaire symbolique, en Tunisie du moins,                 car lors de la rédaction du contrat de mariage par un officier                 d’Etat civil ou un huissier de justice, le mari tunisien est                 tenu de donner à sa future épouse un dinar (à peu près 0,7                 euro). Ce dinar très symbolique est souvent gardé jalousement                 dans l’album photo des jeunes mariés. En souvenir de la                 cérémonie, mais peut-être aussi en souvenir de l’époque                 lointaine où les femmes étaient en quelques sortes vendues au                 clan du mari. 2/ l’institution du voile est abolie, puisque les                 femmes sont sortis de leurs gynécées et que le voile islamique                 vestimentaire, même s’il est une relique de ces temps                 immémoriaux, n’empêche pas cette sortie. 3/ le postulat de                 l’infériorité statutaire des femmes ne tient plus puisque la                 constitution du pays et les conventions ratifiées par l’Etat                 proclament l’égalité des sexes.                                  Les femmes tunisiennes ont eu la chance de vivre sous le régime                 qui s’est le plus démarqué du principe de l’autorité des hommes                 sur les femmes qui porte plus loin que la simple loi de                 l’échange des femmes. Elles ont aussi bénéficié  des allégements                 apportés par le Code du Statut Personnel (CSP) tunisien                 concernant les filles uniques et la prise en compte de l’agnat                 dans certains cas. Mais l’ombre de ce système de l’autorité et                 de la prévalence des hommes continue à peser sur leurs destinées                 et le passé de l’avilissement des femmes continue à hanter leur                 présent. Ce système, bien que mis à mal, tient encore, et                 l’inégalité successorale en est un résidu. Ce résidu étant à la                 fois « mystique » et matériel, il touche la destinée des femmes                 en profondeur. Le plaidoyer édité par l’Association Tunisienne                 des Femmes Démocrates (ATFD) et l’Association Tunisienne des                 femmes pour la recherche sur le Développement (AFTURD) [7], le                 montre bien par des données réelles et des arguments                 diversifiés.                                  La brèche est ouverte par les acquis précédents et les                 revendications actuelles, puisque les revendications donnent                 cours à ce qu’on a appelé « la marche providentielle de                 l’égalité ». Mais l’on peut être sceptique quant au déroulement                 de cette marche. Fellag, l’humoriste algérien, avait dit un jour                 : “Quand on est au fond du trou, on ne peut que remonter. Les                 Algériens, quand ils sont au fond du trou, continuent de                 creuser…” On est tenté  de le paraphraser en disant que, quand                 une brèche est ouverte par l’impératif égalitaire, généralement,                 la réforme qui apaise et répare l’injustice suit. Les algériens,                 les tunisiens et les musulmans actuels, lorsqu’une brèche est                 ouverte, ils la rebouchent,  ils la colmatent en édifiant à la                 place une masse de conjurations et d’impostures de toutes                 sortes, en oubliant même les possibles qui ont été écartés pour                 qu’une version de l’origine s’impose. La brèche s’ouvre mais la                 réforme tarde à venir.                                  Entre les revendications des femmes qui négociaient avec le                 prophète et celle de Taher Hadded, premier réformiste moderne à                 avoir aspiré, en 1930, à une égalité successorale, treize                 siècles se sont déjà écoulés. Quarante quatre ans après Hadded,                 Bourguiba a tenté une réforme en 1974 mais a été très vite                 dissuadé, suite à une fatwa l’incriminant, promulguée par Ibn                 Baz, le mufti saoudien officiel à l’époque[8]. Actuellement,                 cette réforme est appelée par la Ligue tunisienne des droits de                 l’homme, les deux Associations citées plus haut (ATFD et                 AFTURD), quelques intellectuels comme Mohammed Charfi et  Afif                 Lakhdhar. Mais un amendement du CSP dans ce sens  ne semble pas                 à l’ordre du jour, puisque les décideurs politiques, le parti au                 pouvoir (Rassemblement Constitutionnel Démocratique), l’Union                 Nationale des Femmes tunisiennes ainsi que les partis                 d’opposition gardent le silence. Les islamistes, quant à eux,                 ont fini par reconnaître la valeur du CSP mais récusent                 l’égalité successorale. Une campagne contre la réforme                 successorale a même vu le jour dans des tribunes comme Assabeh                 et Tunisnews, avant même la publication du Plaidoyer en Août                 2006.                                  Quels sont les arguments avancés contre cette réforme ? Je ne                 reprendrai pas l’argument tactique qui se fonde sur la                 traditionnelle logique des priorités, car il a été bien                 développé par le Plaidoyer.                 Ce que l’on peut constater, c’est qu’il ne s’agit pas de                 véritables arguments, mais  de  mécanismes de défense qui                 tentent d’imposer des lignes rouges et de dérober des regards                 les idées devenues insupportables à notre époque.                                  Nous retrouvons d’abord cette stratégie discursive qui installe                 l’interdit de toucher au cœur de la pensée. L’égalité dans                 l’héritage serait une atteinte à la sensibilité religieuse des                 musulmans[9], une atteinte aussi à ce qu’on appelle vaguement «                 les intangibilités de l’islam ». Ainsi les femmes qui ont plaidé                 pour l’égalité successorale ne seraient même pas des femmes,                 mais des monstres asexués et des « extrémistes ». Elle ne sont                 pas habilitées à parler de la science des « Fara’idh » (droit                 successoral en Islam), car il y a des spécialistes de la                 question, formés par la Faculté de théologie.                 L’interdit de toucher touche évidemment aux versets coraniques                 ayant trait à l’héritage et qui, nous dit-on, sont « clairs et                 catégoriques ». Pourtant que de versets clairs et catégoriques                 ne sont pas appliqués ni en Tunisie ni parfois ailleurs : ceux                 qui recommandent la loi du talion et les châtiments corporels,                 ceux qui interdisent l’usure (riba), ceux qui concernent les                 esclaves et qui sont simplement tombées en désuétude, tous ceux                 qui concernent les domaines de la législation autres que le                 statut personnel… ![10] Ce que protège l’interdit de toucher                 aux versets coraniques ne me semble pas se réduire aux versets                 coraniques.                                  La crainte de la non- application des versets coraniques masque                 d’autres craintes et d’autres objets qui semblent s’emboîter les                 uns dans les autres. Ce qu’on interdit de toucher est à priori                 le verset coranique. Mais ce que protège le verset coranique et                 porte en son sein, c’est le privilège masculin, c’est                 précisément l’institution familiale qui garantit l’héritage                 religieux donnant lieu au pouvoir temporel des hommes. Mais ce                 que le privilège masculin protège, dérobe et préserve, c’est la                 prédilection divine pour les hommes exprimée de la manière la                 plus claire dans le Coran.                                  Nous en arrivons à la deuxième série d’arguments qui sont,                 curieusement, partagés par les détracteurs et la plupart des                 défenseurs de l’égalité des sexes. Ces arguments reposent sur                 l’oubli organisé et le déni dont fait l’objet la chose la plus                 précieuse qui se trouve dans la plus petite des boîtes gigognes,                 c’est-à-dire le  présupposé majeur de la prédilection divine                 pour les hommes. D’un côté, cette préférence est sciemment ou                 inconsciemment isolée de la question de l’égalité des sexes. On                 n’évoque pas la question des anciens statuts juridiques, on                 évite de citer les versets qui proclament la supériorité des                 hommes, on tord le cou à la langue arabe pour réinterpréter le                 principe de l’autorité des hommes. De l’autre côté, on déclare                 que l’islam a révéré la femme, pas seulement à l’époque du                 prophète qui a tenu compte malgré tout de la revendication des                 femmes, mais dans l’absolu, puisque le prophète est à la fois et                 paradoxalement le chef politique qui n’échappait pas aux                 contingences historiques et le chef exemplaire supposé y                 échapper. On affirme que la femme est l’égale de l’homme même si                 ses droits successoraux sont réduits à la moitié. On cultive                 l’art de loger à la même enseigne l’égalité et l’inégalité et on                 confond la logique de l’équité ou de la complémentarité et celle                 de l’égalité.[11] On affirme que la femme hérite dans la plupart                 des cas plus que l’homme, en donnant des exemples où la fille                 hérite plus que son oncle, c’est-à-dire en interférant le degré                 de parenté et le sexe.                                  Par ces cafouillages et ce déni, l’amnésie est produite et                 entretenue, l’inégalité est maintenue active, comme un spectre                 revenant. Or c’est là où il y a oubli qu’il faut se remémorer.                 Se remémorer pour pouvoir inventer un autre oubli. Ce dont on                 produit l’amnésie est toujours essentiel, et l’essentiel qu’on                 essaie de recouvrir en récusant l’égalité des sexes ou parfois                 même en la défendant obscurément, c’est la lésion de la                 préférence divine, c’est la blessure du prix du sang de la femme                 qui ne vaut qu’une moitié de vie.                                  La question de l’héritage égalitaire se heurte donc à cet                 héritage impossible où l’histoire d’une femme croise l’histoire                 de l’origine dans un effarement  muet qui fait que l’avenir                 tarde à s’ouvrir.                                                   * Texte présenté lors d’un débat organisé                 par L’Association du Manifeste des Libertés (Paris, 26 Janvier                 2007). [1] -Simone de Beauvoir, Le Deuxième sexe,                 Paris, Gallimard, 1976, éd. , p122.                 [2] – Latifa Lakhdhar, «La femme et la question successorale en                 Islam : la vérité divine n’est-elle pas aussi contextuelle ?»,                  Alternatives Citoyennes, n° 3, 10 Juillet 2001, www.                 Alternatives-citoyennes.sgdg.org.                                                                                                                      [3]-Voir aussi II/228 : « Quant à elles, elles ont des droits                 équivalents à leurs obligations, conformément à la bienséance.                 Mais les hommes ont cependant une prédominance sur elles. Et                 Allah est Puissant et Sage. »                                   [4]- Ben Achour Mohamed Tahar : Exégèse Tahrir wa Tanwir, Dar                 Sahnoun, Tunis, III/39.                 Ce paragraphe est à comparer aux textes récents qui affirment                 symptomatiquement la chose et son contraire. Dans le chapitre «                 La Femme en islam » publié dans l’élégante Encyclopédie arabe                 internationale,  on peut lire : «La femme a obtenu ses droits                 naturels en islam, la charia lui a confié les responsabilités                 qui conviennent à sa nature et à son rôle dans la vie et l’a                 mise sur le même pied d’égalité que l’homme en matière de droits                 publics. Dieu dit : «« Quant à elles, elles ont des droits                 équivalents à leurs obligations, conformément à la bienséance.                 Mais les hommes ont cependant une prédominance sur elles » (La                 Génisse, 228). Au chapitre « La femme dans la jurisprudence                 musulmane », on peut lire : « Dieu a fait que les hommes ont                 autorité sur les  femmes : « Les hommes ont autorité sur les                 femmes du fait qu’Allah a préféré certains d’entre vous à                 certains d’autres, et du fait que [les hommes] font dépense sur                 leurs biens [en faveur de leurs femmes] » (Les Femmes, 34). Mais                 cette caractéristique de l’homme ne signifie pas une préférence                 absolue des hommes, conformément à ce que la nature même de la                 vie l’exige sans aucun doute. Le prophète que la paix soit sur                 lui dit « les femmes sont les sœurs des hommes » (hadith                 rapporté par Ahmed, Abu Daoud et Muslim) ». L’Encyclopédie arabe                 universelle, Riadh. XXIII/68-69.                                  [5]-Epîtres des Frères de la Pureté, p 629, www. al warraq. com.                 [6] -“Le mariage est une forme d’esclavage dans lequel la femme                 est esclave et doit obéissance totale et don de soi, en quoi il                 n’y a pas désobéissance à Dieu …”, dit Ghazali (Revivification                 des sciences de la religion, Beyrouth, 1986, II/62sqq.                                  [7] -Cf. le site du Manifeste des Libertés :                 www.manifeste.org/rubrique.                   [8] – Lotfi Hajji, Bourguiba et l’Islam (en arabe) , Tunis,                 Maison du Sud, 2004, pp191-224.                 [9] -Voir à titre d’exemple : Maître Abdessalem Haj Kassim : «L’                 Association des Hommes démocrates (Jam’iyyat an-Nisa’                 ad-Dimoqratiyyoun) et la polémique sur l’égalité dans l’héritage                 », As-Sabeh du 11 Août 2006.                 [10]-Des textes sacrés ont  été au contraire inventés et                 appliqués, comme le verset inexistant dans la vulgate actuelle,                 celui qui prévoit la lapidation des adultères et qui, nous                 dit-on, a été dévoré par une chèvre ou un mouton. C’est ce                 verset fictif qui a abrogé le verset réel recommandant seulement                 la flagellation. (XXIV/2).                                  [11]-Voir à titre d’exemple : Abderrazek Chaabani :                 “Contrairement à ce que prétendent les Femmes démocrates :                 L’Islam a rendu justice à la femme en matière d’héritage et lui                 a accordé des privilèges », Assabeh du 10 Août 2006.
POUVONS-NOUS ETRE FIERS?
                 
 BALHA BOUJADI                                  Pouvons nous, un jour, être fiers de nous même et regarder nos                 enfants dans les yeux et leur dire : «Voilà notre œuvre, à vous                 de continuer maintenant» ? Personnellement, moi qui suis le                 dernier optimiste sur terre, j’en doute fort.                                  J’ai honte de voir que la dite « œuvre » qu’on va transmettre à                 nos enfants n’est qu’un monstre bâtard sans tête ni pieds, prêt                 à cracher le feu pour détruire tout ce qui bouge. Exemple à                 l’appui : les évènements de Soliman.                                  Ces incidents terrifiants d’une guerre déclarées par notre                 armée, nos gendarmes et nos policiers contre une trentaine de                 gosses ont dû nous faire réfléchir, même un petit peu, sur                 l’amère réalité de notre système et de nos institutions, mais                 nous n’avons rien fait, comme d’habitude après chaque secousse,                 sauf, comme les autruches, nous avons caché nos têtes entre nos                 cuisses charnues à la Botero.                                  Une trentaine des jeunes garçons de 19 à 30 ans se sont «                 suicidés » pour nous montrer à quel point ce pays est                 vulnérable, à quel point cette société est fragile, à quel point                 ce système est caduque.                                  Une trentaine de jeunes venus de nulle part,  armés jusqu’aux                 dents, se sont barricadés dans les montagnes de l’Atlas pour                 préparer leur « révolution islamique » qu’ils ont étudiée chez                 les « intellectuels » de cette nation, les barbus abrutis                 d’Afghanistan, d’Algérie, d’Egypte, du Soudan, et mêmes ceux de                 Londres et de Paris (Ghannouchi and Co).                                  Ces jeunes, nos enfants, ont vécu, pourtant, chez nous dans nos                 familles, ils se sont formés dans nos écoles, ils ont regardé                 notre télévision, ils ont lu nos journaux et ils ont pratiqué                 leur religion dans nos mosquées.                                  Malheureusement la famille est sans repères ni racines ni idéaux                 ; cette école où l’on apprend tout sauf à devenir des citoyens                 libres, autonomes, avertis et émancipé des dogmes et des                 doctrines ; cette télévision qui déverse des tonnes de                 médiocrité et de connerie fabriquées dans les bas fonds de la                 culture des esclaves et des lâches en Orient et en Occident ;                 ces journaux écris par les flics et lèches bottes ; ces mosquées                 gouvernées par les gourous de la haine et présidées par les                 momies et les gens des cavernes.                                  Le résultat est là, une génération perdue dans les montagnes                 prête à tuer et à se faire massacrer pour défendre des pseudo                 idéaux sur le Califat ou le Panislamisme ou le Djihad ou                 n’importe quelle idéologie qui préconise la violence comme                 unique chemin vers la « justice » divine et la nirvana spirituel                 sacro sacrée.                                  Une trentaine des pauvres gosses ont mis à nu un régime qui                 prétend avoir tout sous contrôle, ils se sont baladés du nord au                 sud avec leurs kalachnikovs et leurs RPG, sans que les 130                 milles flics ni les 500 milles mouchards s’en rendent compte. Un                 régime qui n’a pas osé ni donner une conférence de presse pour                 expliquer ce qui s’est passé aux pauvres sujets-citoyens.                 Ceux-ci, d’ailleurs, depuis longtemps, n’attendent plus rien de                 ce régime au niveau de l’information sauf pour rigoler des mises                 en scène ridicules et grotesques de nos ministres de l’Intérieur                 telles que les bombonnes à gaz de Djerba ou les plans des                 ambassades de Soliman.                                  Peut-on être fiers ? Nous qui allons léguer à la génération                 future un système corrompu et sanguinaire ; une famille                 disloquée qui ne jure que par le dinar ; une école sans âme ni                 saveur qui fabrique des incultes aux têtes bourrés des formules                 et de axiomes mais sans attaches ni amour à cette terre ; une                 société sans culture, ni citoyenneté, ni justice, ni principes,                 ni idéaux ; une élite « intellectuelle » qui théorise sur le                 culte des dictateurs et des démagogues, qui mâche sans cesse des                 discours sur le sexe des anges et les féeriques paradis                 célestes, qui glorifient un passé plein des guerres et du sang ;                 une nation qui a perdu toutes les batailles contre l’ennemi                 physique, Israël, et l’ennemi qui nous habite : la pauvreté,                 l’ignorance, l’analphabétisme, la dictature des militaires et                 des prêtres, le terrorisme intellectuelle, l’esclavage des                 femmes et des enfants, la discrimination des minorités, la                 haine, le dédain, l’arrogance, le mépris des autres, le                 narcissisme idiot, les bas instincts, la culture de la mort et                 des kamikazes…                                  Au lieu de réfléchir, débattre, discuter… pour sauver ce pays et                 ce qui reste de cette œuvre de modernité que la génération                 Bourguiba nous a légué, cette œuvre qui a donné les bases d’une                 société tunisienne avant-gardiste et qui se trouve aujourd’hui                 mise en question par les polygames, les charlatans, les auteurs                 des livres jaunes, les sourciers qui soignent le cancer par les                 versets du livre saint dilués dans l’eau et bu à jeun… au lieu                 de ça, on cache nos têtes dans nos cuisses charnus, et on                 continue à psalmodier et à dansotter à la gloire des sauveurs                 qui ont réservé déjà leurs sièges dans le palais au-delà de                 2009.                                  BALHA BOUJADI, le 6 / 2 / 2007 balhaboujadi@yahoo.es
 
 
 Anvers braque les immigrés en voulant interdire                 le foulard au guichet
 AFP, le 6 février 2007 à 11h44
 Par Philippe SIUBERSKI ANVERS (Belgique), 6 fév 2007 (AFP) –                 La nouvelle majorité municipale d’Anvers, qui a bénéficié du                 vote immigré pour battre l’extrême droite, veut interdire à ses                 employées musulmanes de porter le foulard au guichet, suscitant                 l’incompréhension dans les quartiers où Turcs et Marocains sont                 nombreux. Le bourgmestre (maire) socialiste d’Anvers, le très                 populaire Patrick Janssens, a bâti sa victoire sur le parti                 d’extrême droite Vlaams Belang aux municipales d’octobre dernier                 autour du slogan: “Anvers est à tout le monde”.
                                 “Patrick Janssens a fait le tour des mosquées. Beaucoup ont voté                 pour lui en pensant qu’il allait prendre en compte les demandes                 des musulmans. Aujourd’hui, il veut interdire le foulard aux                 guichets.                 C’est une véritable gifle”, affirme Laila Ekchouchou, de                 l’association “Laisse mon foulard en paix!”. Alors que                 l’autorisation du port du voile dans les administrations ou les                 écoles fait débat dans d’autres pays, parfois                 au niveau national comme en France avec la loi sur les signes                 religieux à l’école, la Belgique considère que la question                 relève des autorités directement concernées (direction d’école,                 communes, etc…).                 Quelques communes flamandes et bruxelloises interdisent ainsi le                 voile intégral dans les rues. La capitale, Bruxelles, proscrit                 depuis plusieurs années le port du foulard à tous ses                 fonctionnaires.
                                 “Nous engageons très régulièrement des femmes voilées. Mais nous                 leur demandons d’enlever leur voile sur leur lieu de travail. Et                 cela n’a jamais posé le moindre problème ni la moindre plainte”,                 assure l’échevin (adjoint au maire) bruxellois Philippe Close. A                 Anvers, deuxième ville de Belgique avec 460.000 habitants, le                 conseil municipal est décidé à approuver bientôt, probablement                 en mars, une interdiction du voile et de tout autre signe                 religieux pour les seuls “fonctionnaires qui ont des contacts                 avec le public”, explique l’échevin chargé du personnel, le                 chrétien-démocrate Marc Van Peel.
                                 Cette mesure était prévue dans l’accord négocié entre                 socialistes, libéraux et chrétiens-démocrates après les                 élections d’octobre, pour former une coalition excluant                 l’extrême droite, arrivée deuxième juste derrière les                 socialistes lors du scrutin. “Nous voulons un personnel                 d’origines les plus diverses possibles, mais lorsque l’autorité                 locale se manifeste –dans l’enseignement, les centres                 culturels, au guichet d’une                 administration–, il faut que l’on soit neutre”, explique M. Van                 Peel.
                                 La question est surtout symbolique puisque seules trois ou                 quatre fonctionnaires musulmanes servant le public portent                 actuellement le foulard. “Mais il y a eu des plaintes” du                 public, affirme l’échevin.                 “Soit elles retirent leur foulard, soit on leur trouve un autre                 poste, mais elles ne perdront pas leur boulot”, assure-t-il. Le                 15 janvier, quelque 200 personnes, en majorité des femmes, ont                 protesté contre la future interdiction en formant une chaîne                 humaine autour de l’Hôtel de ville d’Anvers, à l’appel                 d’associations de musulmans ou d’immigrés, mais aussi de                 mouvements féministes.
                                 “On nous parle de neutralité, mais ce qui compte, c’est la façon                 de travailler. Ces femmes ont toujours bien rempli leurs                 missions”, explique Saida El Fekri, responsable d’une                 association de femmes                 musulmanes. “Aller travailler, c’est une étape importante vers                 l’émancipation. Si on leur interdit de porter le foulard au                 boulot, on balaie tout ça. Elles vont penser qu’il vaut mieux                 rester à la maison”, assure la jeune femme, qui porte elle-même                 le foulard depuis quelques années. “Si cela continue,                 regrette-t-elle, les musulmans vont vouloir ouvrir leurs propres                 crèches, leurs propres écoles. Je ne veux pas de ça pour notre                 ville mais j’ai peur qu’on aille dans cette direction”.                                  AFP
 
 USA: relance de la plainte contre le refus de                 visa opposé à Tariq Ramadan
                 
                AFP, le 5 février 2007 à 00h36                                  WASHINGTON, 5 fév 2007 (AFP) – Des                 associations américaines ont relancé lundi devant un tribunal                 fédéral américain leur plainte contre le gouvernement pour son                 refus d’accorder un visa à l’universitaire musulman suisse                 controversé Tariq Ramadan.                                  Fin 2004, M. Ramadan avait dû renoncer à venir enseigner à                 l’Université Notre-Dame (Indiana, nord-est). Depuis, les                 autorités ne sont pas revenues sur leur décision, et M. Ramadan                 n’a pas pu honorer plusieurs invitations aux Etats-Unis.                                  Saisi par plusieurs associations, parmi lesquelles le puissant                 groupe de défense des libertés civiles ACLU ou l’Association                 américaine des professeurs d’université (AAUP), un juge de New                 York avait ordonné en juin au gouvernement de justifier son                 refus.                                  En septembre, le gouvernement avait expliqué que sa décision                 était motivée par le fait que M. Ramadan a versé 600 euros au                “Comité de bienfaisance et de secours aux                 Palestiniens”, placé en 2003 par Washington sur une liste                 noire.                                  Lundi, les mêmes associations ont relancé leur plainte: “le                 gouvernement utilise les lois sur l’immigration comme un moyen                 de censurer le débat académique et politique à l’intérieur des                 Etats-Unis”, a expliqué l’ACLU dans un communiqué.                                  Selon l’ACLU, de nombreux autres intellectuels ont été empêchés                 de se rendre aux Etats-Unis ces derniers mois, parmi lesquels un                 professeur sud-africain pacifiste, un historien bolivien                 défenseur                 des peuples indigènes, un professeur grec marxiste et un                 historien militant de la cause basque.                                  Intellectuel controversé, petit-fils du fondateur des Frères                 musulmans égyptiens, Tariq Ramadan vit à Genève et enseigne                 notamment à l’Université britannique d’Oxford.                                  AFP 
 
Les services de                     renseignement attentifs à l’hypothèse d’un attentat pendant                     la campagne électorale
 
                                          
                    Le facteur “T” peut-il chambouler la campagne électorale                     française ? Derrière cette lettre, issue du mot                     “terrorisme”, se concentrent les craintes des services de                     renseignement français. Le souvenir du scénario espagnol –                     en mars 2004, les attentats de Madrid avaient bouleversé les                     élections législatives et précipité la chute de José Maria                     Aznar – est dans tous les esprits. Pour l’heure, les                     policiers ne disposent d’aucune information sur des                     préparatifs concrets d’attentat. Toutefois, les récentes                     synthèses, classées “confidentiel-défense”, dont 
Le Monde                     a eu connaissance, témoignent de l’attention soutenue portée                     au Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC),                     organisation algérienne revendiquant son affiliation à                     Al-Qaida.                    
 
Rassemblant des informations des Renseignements généraux                     (RG), de la direction de la surveillance du territoire (DST)                     et de la direction générale de la sécurité extérieure                     (DGSE), ces notes ont été signées, le 15 janvier, à                     l’occasion du comité interministériel du renseignement,                     réuni autour du premier ministre, Dominique de Villepin.                     Deux alertes y sont citées. La première, apparue en décembre                     2005, concerne des menaces d’attentat liées à “des cadres                     d’Al-Qaida en zone pakistano-afghane“, sans plus de                     précision ; la seconde est surnommée “ menace d’automne”.
Mise au jour en mai 2006, elle supposerait “la                     planification, depuis le Moyen-Orient, d’une vague                     d’attentats-suicides contre un pays européen non identifié,                     entre septembre 2006 et avril 2007”. Cette dernière                     hypothèse serait “particulièrement représentative des                     connexions et de la démultiplication des capacités entre le                     Maghreb, le théâtre irakien et les réseaux implantés en                     Europe.”
Selon les services français – qui ont arrêté 140                     personnes en 2006, dont 17 ont été écrouées -, la menace ne                     viendrait pas forcément d’une éventuelle cellule du GSPC                     installée en Europe. Deux évolutions sont redoutées,                     compliquant la surveillance policière : la transformation de                     structures consacrées au soutien logistique en vrais groupes                     opérationnels ; le passage à l’acte d’individus isolés ou de                     groupes très hétéroclites, influencés par la propagande du                     GSPC, notamment via Internet.
Tous les services ont constaté un usage de plus en plus                     assidu des forums islamistes, même si certains ont décidé                     d’en restreindre l’accès, se privant d’une partie de leurs                     abonnés. Preuve du succès grandissant : un site francophone                     a triplé le nombre d’inscrits en six mois. Les policiers ont                     remarqué une diffusion fréquente de vues satellites,                     obtenues par le moteur de recherche Google Earth. Ainsi, le                     groupe islamiste démantelé en Tunisie, en janvier,                     “disposait de vues des ambassades britannique et américaine                     à Tunis et des images de l’ambassade de France à Rabat”,                     mises en ligne le 26 décembre 2006.
 
“PACTE DU MAL”
 
Un autre site, connu pour la diffusion de données                     opérationnelles – aide à la fabrication d’explosifs… -, a                     même mis à disposition de ses “adeptes” un documentaire sur                     les égouts de Paris, cible ou moyen de fuite possibles.                     Enfin, le Global Islamic Media Front, organe proche                     d’Al-Qaida, a annoncé, sur plusieurs forums, “la sortie                     imminente du premier logiciel de chiffrement islamique”,                     pour sécuriser les échanges en ligne.
Depuis que le GSPC a été officiellement reconnu comme                     affilié à Al-Qaida, sa volonté d’internationaliser ses                     actions a été confirmée. Le numéro deux d’Al-Qaida, Ayman                     Al-Zawahiri, a explicitement désigné la France comme une                     cible dans sa vidéo du 31 décembre 2006. Le 3 janvier, le                     chef du GSPC, Abdelmalek Droukdal, a dénoncé le “pacte du                     mal” liant les Etats-Unis et la France. “Nos services                     estiment surtout que Droukdal, en rappelant la guerre                     d’indépendance contre la “France croisée” puis en                     s’attribuant, pour la première fois, l’héritage du GIA,                     s’approprie une stratégie qui avait conduit à frapper les                     ressortissants français, aussi bien en Algérie qu’en France”,                     note la synthèse.
A en croire la police algérienne, le GSPC accentuerait                     son déploiement vers l’étranger en raison de la pression, en                     Algérie, des services de sécurité et de la charte de                     réconciliation nationale : l’amnistie a officiellement pris                     fin le 28 août 2006, mais elle se poursuivrait discrètement.                     Les services français suivent avec attention la rivalité au                     sein du GSPC entre Droukdal et Mokhtar Belmokhtar, qui                     dirige sa branche sahélienne. La conduite d’un attentat à                     l’étranger pourrait donner un avantage décisif à l’un des                     deux. Selon la synthèse, Belmokhtar aurait été chargé par                     l’état-major du GSPC “de fabriquer, à partir de 20 litres                     d’acide nitrique, un explosif qui pourrait être du TATP”,                     à l’usage non précisé.
Pour l’heure, le GSPC essaie surtout d’étendre son champ                     d’action dans le Maghreb. En Tunisie, deux opérations                     conduites entre le 23 décembre 2006 et le 3 janvier dans la                     région de Tunis ont causé la mort d’au moins 12 activistes                     et permis l’arrestation d’une quinzaine d’autres, selon la                     synthèse française. Ces individus “très déterminés et                     d’un niveau intellectuel élevé” étaient de nationalités                     algérienne et mauritanienne. Au Maroc, fin décembre, une                     cellule islamiste souhaitant viser des cibles étrangères                     dans le pays et implanter un camp d’entraînement en Algérie                     a été démantelée.                  
  
                     
 Explosion d’une lettre piégée à Londres
Une femme a été légèrement blessée à la                   main, lundi 5 février, par l’explosion d’une lettre piégée                   dans le centre de Londres. Les faits ont eu lieu dans les                   bureaux de la société Capita, qui contrôle la mise en oeuvre                   du système de péage imposé aux automobilistes londoniens.                   Cette compagnie, qui emploie 26 000 personnes dans le monde,                   gère aussi la base de données des archives de la police                   britannique. L’immeuble qu’elle occupe se trouve sur Victoria                   Street, une rue qui relie la gare de Victoria à l’abbaye de                   Westminster, et à quelque 200 mètres du quartier général de                   Scotland Yard.
L’attentat n’a pas été revendiqué. La                   victime, employée de la compagnie, a été hospitalisée avec des                   blessures mineures.
Les lettres piégées sont une technique à                   laquelle l’Armée républicaine irlandaise (IRA) avait recouru                   dans les années 1970, et qui n’a jamais provoqué de mort                   d’homme. La poste britannique est normalement équipée pour                   détecter ce type d’explosifs. – (Corresp.)  
 (Source: Le Monde l’édition du                     07.02.07)     
 
 
 
                 
Le choc des ignorances:                 entretien avec Bruno Etienne Propos recueillis par Irane                 Belkhedim
  
 
                 
 Bruno Etienne                  «Arabes et Européens sont les enfants de la même civilisation» Pourquoi rejetez vous la théorie du choc                 des civilisations?                                   Je ne crois pas au choc des civilisations. Le slogan Islam                 contre Occident masque les véritables enjeux des problèmes                 géopolitiques stratégiques qui concernent le contrôle du                 Proche-Orient, des intérêts purement énergétiques et qui sont                 légitimés des deux côtés par des références culturelles et                 religieuses.                                   Mais cette théorie met en évidence les                 différences culturelles et religieuses qui sont une réalité,                 non?                                   Oui, je ne renie pas ces différences, mais je dis seulement que                 les Arabes et les Européens sont les enfants d’une même                 civilisation, ils partagent beaucoup de choses communes.                 D’abord, la bible, le coran et l’évangile. Savez- vous que dans                 le Coran, il y a 180 occurrences qui renvoient aux textes                 bibliques et évangéliques ? Dans le coran, il existe un verset                 qui énonce que le prophète Mohamed est venu confirmer ce qu’ont                 révélé les autres messies, Abraham, Moise… ..Il n’efface pas ce                 qui a été dit mais le complète. Musulmans et Chrétiens croient                 aussi à la prophétie. Secundo, leur mode de raisonnement a comme                 base le raisonnement grec. Agnostiques, athées, juifs,                 musulmans, pratiquant ou pas, chrétiens, raisonnent par                 analogie, par déduction et induction, par la chaîne de                 légitimité de ceux qui ont écrit. Nous appartenons donc à une                 seule civilisation, nous dire Islam contre Occident, c’est nous                 prendre pour des idiots!                                   Comment expliquez-vous que ce slogan                 déstabilise alors les ces deux mondes?                                   Ce slogan fonctionne sur la méconnaissance réciproque. Certains                 Européens et peut-être Arabes aussi, construisent leur                 imaginaire sur ce qu’est l’Islam et sur ce qu’il devrait être.                 Ce sont les fantasmes qui définissent l’Islam car ce qui est                 important ce n’est pas ce qui est vrai mais c’est ce que les                 gens croient et ce n’est pas du tout la même chose. La                 quasi-totalité de ceux qui craignent l’Islam comme ceux qui le                 défendent dit que l’Islam est un. Ainsi, dans la tête de ceux                 qui ont peur, les musulmans se ressemblent, qu’ils soient de                 Samarkand, de Casablanca ou de la banlieue parisienne, dès                 qu’ils ont attrapé l’Islam ou que l’Islam les a attrapés, ils                 ont les mêmes comportements : ils violent les femmes, égorgent                 les gens… Ce sont des fantasmes! Un jour une dame me dit que                 les Européens ne connaissent pas l’Islam, j’ai répondu: Que                 connaissent les musulmans sur le christianisme et le judaïsme?                 Ils disent aussi n’importe quoi! Les illusions sociales                 produisent des effets sociaux!                                   Comment voyez vous certains incidents qui                 ont provoqué la colère des musulmans, par exemple, ceux de                 l’aéroport de Roissy?                                   Il ne faut pas céder à l’événementiel. Cette histoire présente                 des faits cohérents et logiques, il est normal que la police                 surveille de près des bagagistes qui ont été dans des camps                 d’entraînement en Afghanistan et au Pakistan et qu’elle renforce                 les mesures de sécurité! Et ce n’est pas contre l’Islam. C’est                 une information qui n’a pas d’intérêt, par contre, pourquoi on                 ne parle jamais des 85% des musulmans en France qui se disent                 laïcs, républicains et qui veulent vivre tranquillement,                 travailler et emmener leurs enfants à l’école?! Je n’invente                 rien, ce sont des enquêtes qui l’attestent.                                   Comment analyser vous le discours du pape                 Benoît XVI qui a provoqué la colère du monde musulman?                                                  Je n’ai pas pu obtenir son discours traduit de l’allemand au                 Français que quatre jours plus tard. Et je parie que la plupart                 des gens qui ont protesté à Munich ce jour-là ne l’avaient pas                 lu ! C’est l’exemple même de l’immédiateté de l’information qui                 a poussé ces personnes à manifester sur des fantasmes! Pourtant,                 dans son discours Benoît XVI a posé un véritable problème, le                 débat qui secoue actuellement la société européenne, celui de la                 compatibilité de la foi et de la raison. L’archéologie de la                 culture européenne et la nécessité de la modernité: l’Europe                 a-t-elle une culture judéo-chrétienne, laïque ou moderne? Le                 pape a adressé un discours virulent envers l’Europe en affirmant                 que les Européens n’arrivent plus à assumer leur chrétienté car                 l’Europe a égaré ses valeurs centrales de cohésions.                                   Le pape s’est alors adressé aux Européens                 avant tout?                                   Oui. Disons que le pape a décidé de faire de la Daâwa                 (prédication) auprès des chrétiens européens car son                 prédécesseur les a abandonnés pour s’intéresser au monde entier.                 Son intervention est une stratégie politico-religieuse du                 Vatican qui croit que l’Europe doit se replier sur elle-même et                 oublier le reste de la planète. Il y a aussi une autre raison                 qui explique ce discours, le catholicisme est désormais                 majoritaire en Amérique latine et en Afrique, le prochain Pape                 sera vraisemblablement de ces deux régions, mais la vieille                 Europe résiste! Il faut comprendre ces enjeux! Dire que l’Islam                 n’a pas fréquenté la rationalité universelle grecque est une                 erreur, une bêtise car nulle n’ignore que les Chrétiens ont                 connu la pensée et la philosophie grecque grâce aux traductions                 des savants arabes.                                   Que doit-on faire pour instaurer des                 rapports plus confiants et solides entre les deux rives?                                                  La relation Islam Occident se base sur l’ignorance. Les mœurs                 des uns et des autres ont des cohérences anthropologiques. Au                 nom de quoi je vais dire à quelqu’un qu’il n’a pas le droit de                 faire la circoncision ou de manger le cochon!? Je veux dire que                 celui qui n’est pas dans la même culture devrait essayer de                 comprendre pourquoi il est cohérent pour l’Autre de manger du                 cochon et de ne pas être circoncis. C’est important de                 comprendre car la méconnaissance favorise les fantasmes.                 Cependant, la connaissance n’est pas non plus facile. Il existe                 des mécanismes très complexes des deux côtés pour expliquer                 exactement ce qu’est la culture ou la civilisation. Il faut donc                 travailler, animer des rencontres, lire des livres des deux                 rives et former des gens. Toute ma gloire est d’avoir formée des                 chercheurs qui sont capables d’écouter l’Autre et d’avoir réussi                 à les déconstruire sur leurs propres préjugés. Il y a aussi la                 question historique, l’histoire n’est pas écrite de la même                 façon. En France, un manuel d’histoire franco-allemand vient                 d’être édité et de signer ainsi la réconciliation entre les deux                 pays après trois guerres et des millions de morts. Quand est-ce                 l’Algérie et la France feront pareille?                                   Irane Belkhedim                  (02/02/2007)                                    (*) Bruno Etienne est membre de l’Institut                 universitaire de France, directeur de l’Observatoire du                 religieux à l’Institut d’études politiques d’Aix-en-Provence. (Source : www.babelmed.net , le 6 février                 2007) Lien :                 http://www.babelmed.net/index.php?menu=31&cont=2470&lingua=fr