TUNISNEWS
7 ème année, N° 2450 du 05.02.2007
CNLT: Les personnes arrêtées à l’occasion des affrontements armés ont été déférées en justice
LTDH: Communiqué
Kalima: 12 Tunisiens à Guantanamo
Kalima:Pas d’avocats dans les affaires « terroristes »
Kalima: Le FDTL dans la ligne de mire du pouvoir
Lotfi Hidouri:La sanction du divorce, une trouvaille des services de sécurité tunisiens
Conseil National pour les Libertés en Tunisie
Les personnes arrêtées à l’occasion des affrontements armés ont été déférées en justice
Torture, violations des garanties légales et mise à l’écart des avocats
Le Conseil National pour les Libertés en Tunisie informe l’opinion publique que les autorités ont déféré au cours du mois de janvier 2007 plus de cent citoyens devant le bureau de l’instruction en vertu de loi antiterroriste et au terme de gardes à vue au ministère de l’Intérieur d’une durée ayant dépassé de beaucoup le délai maximum légal.
Un groupe de trente citoyens a été déféré devant le doyen des juges d’instruction du Tribunal de Première Instance de Tunis, Omar Ben Mansour, dans le cadre de l’affaire 1/7717, les autorités les accusant d’être liés aux affrontements violents qui ont eu lieu dans la banlieue sud de la capitale entre le 23 décembre 2006 et le 3 janvier 2007 : Ali Ben Salah Sassi, Marouane Khlif, Mejdi Latrèche, Sahbi Naceri, Taoufik Houimdi, Zyed Essid, Mohammed Ben Latifa, Badreddine Ksouri, Imed Ben Boubaker Ben Ameur, Kamel Oum Heni, Saber Ragoubi, Fathi Salhi, Ali Arfaoui, Mohammed Amine Dhiab, Jaouher Slama, Jaouher Kassar, Mejdi Elhajj, Oussama Abadi, Moukhliss Ammar, Zouhaïr Jrid, Oua’il Amami, Mohammed Khlil Ben Mohsen, Ramzi Elifi, Mohammed Amine Jaziri, Jamel Mellakh, Mohammed Bakhtan, Ahmed Mrabet, Nafti Bennani, Hatem Riahi, Khlifa Koraoui,
Directives visant à écarter les avocats lors de l’instruction
Les séances d’instruction dans ces affaires se sont déroulées en l’absence de tout avocat, les autorités ayant publié des instructions précises en ce sens, en violation flagrante du Code de Procédure Pénale. Les services de la Sûreté de l’Etat ont falsifié les procès verbaux en changeant les dates de garde à vue pour ne pas dépasser la durée maximum de six jours, ce qui conforte l’hypothèse qu’ils aient été soumis à la torture, ainsi :
– Ahmed Souhaïl, qui a été déféré dans l’affaire instruite sous le numéro 8/7890, a été arrêté le 27 décembre 2006 et déféré pour l’instruction le 30 janvier 2007. Or le procès verbal mentionne que sa garde à vue a commencé le 28 janvier 2007.
– Farouk Benaïssa, qui a été déféré dans l’affaire instruite sous le numéro 4/7867, a été arrêté le 22 décembre 2006 et déféré le 26 janvier 2007. Le procès verbal de garde à vue mentionne que cette dernière a commencé le 24 janvier 2007. Or sa famille avait porté une plainte à ce sujet, enregistrée le 22 janvier auprès du Procureur de la République sous le numéro 07/7004316.
– Oualid Layouni, qui a été déféré dans l’affaire instruite sous le numéro 10/7790, a été arrêté le 11 décembre 2006 et a été déféré le 19 janvier 2007. L’administration de la prison de Mornaguia a empêché sa famille de lui rendre visite et elle a empêché également son avocat, Samir Ben Amor, de lui rendre visite alors qu’il avait un permis.
Le conseil a su que les personnes déférées dans l’affaire 01/7717 avaient été soumises à de nouvelles tortures après leur dépôt en prison. Elles ont été enchaînées par les pieds, les mains et le cou, comme les prisonniers de Guantanamo, privées de couverture, et obligées de dormir à même le sol. Le CNLT (…)
Pour le Conseil
La porte parole officielle
Sihem Ben Sedrine
(traduction d’extraits ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)
Ligue Tunisienne pour la défense des Droits de l’Homme
Tunis le, 01 février 2007 Communiqué (Traduit de l’arabe)
Le Comité Directeur de la Ligue Tunisienne pour la défense des Droits de l’Homme (LTDH) suit avec une grande préoccupation la vague d’arrestations, de violations de domiciles et de disparitions dont ont été victimes, ces derniers temps, plusieurs jeunes à travers toute la république. Cette vague s’est accentuée après les évènements sanglants, déroulés entre le 23 décembre 2006 et le 3 janvier 2007, dans la banlieue sud de la capitale et la ville de Soliman. Plusieurs familles ont alerté le Comité Directeur et les sections régionales de « la disparition » des leurs, suite à leur arrestation par des agents de la sûreté nationale généralement en tenue civile. Les services de sécurité nient avoir eu connaissance de telles arrestations allant jusqu’à menacer d’arrêter ceux qui viennent leur demander des nouvelles des « disparus ». Plusieurs correspondances de la Ligue au ministère de l’intérieur lui demandant de l’informer ainsi que les famille de ce qu’il en est de ces arrestations et du respect de la loi et des droits des personnes sont restées sans réponse. La disparition de plusieurs personnes arrêtées se poursuit depuis plusieurs semaines sans que leurs familles ne soient informées du lieu de leur arrestation ni des accusations portées contre elles, et sans que les délais de la garde à vue, fixés à un maximum de six jours, ne soient respectés. Les services de sécurité se refusent d’informer les familles au préalable avant la comparution des prévenus devant la justice, ce qui les empêche de mandater des avocats pour les défendre lors de leur audition par le juge d’instruction et les prive du droit de visite dans les prisons et la préparation des moyens de défense avec eux. Au même moment, les avocats mandatés pour défendre ces jeunes, jugés dans le cadre de la loi contre le terrorisme, continuent de subir des restrictions diverses. Ils ont des difficultés énormes à obtenir de la part des services du tribunal des informations concernant leurs clients. Plusieurs prévenus sont amenés sans que leurs noms ne figurent sur les registres. Les juges d’instruction refusent le mandat des avocats tant qu’ils ne connaissent pas le numéro de l’affaire, et ces avocats se voient ainsi privés d’assister à l’interrogatoire de leurs clients. Or, les services du Parquet refusent souvent d’informer les avocats de ce numéro. D’ autre part, ces services font comparaître certains prévenus devant le juge d’instruction à des heures tardives voire en dehors des heures de travail afin que leur interrogatoire se déroule en l’absence d’avocats. La Ligue rappelle sa position de principe sur la nécessité de respecter la loi et les droits de la personne, de ne jamais recourir à la torture, de respecter les droits de la défense, de ne procéder à aucune arrestation en dehors du cadre de la loi et de respecter en toute circonstance les délais de la garde à vue. La Ligue réitère sa demande pressante de faire comparaître d’urgence les prévenus devant la justice dans le stricte respect des conditions d’un procès équitable et de remettre en liberté tous ceux dont la culpabilité n’a pas été établie par des preuves irréfutables. La Ligue fait référence à son communiqué du 5 janvier 2006 qui a dénoncé le terrorisme affirmant que la lutte contre ce fléau ne peut s’appuyer sur une approche uniquement sécuritaire mais en associant toutes les composantes de la société et en respectant les libertés publiques et les droits fondamentaux des citoyens. Car, démocratie et droits humains sont les garants essentiels de la constitution d’une opinion publique opposée aux groupes terroristes et autres dangers menaçant le pays et ses acquis. La Ligue met en garde contre tout amalgame entre d’une part ceux qui portent les armes mettant en péril la sécurité des citoyens au nom de convictions extrémistes et intégristes et, d’autre part les autres citoyens quelles qu’en soient leurs orientations intellectuelles, leurs appartenances politiques ou leurs croyances religieuses. Pour le Comité Directeur Le Président Mokhtar TRIFI
21, rue Baudelaire – El Omrane – 1005 Tunis – Tél : 71.280596 – Fax : 71.892866 E-mail : ltdhcongres6@yahoo.fr
12 Tunisiens à Guantanamo
Sihem Bensedrine Dans un courrier adressé au Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT), l’ONG Reprieve a déclaré que douze citoyens tunisiens sont maintenus prisonniers à Guantanamo. Ils sont détenus sans jugement depuis 5 ans et ont été torturés. L’ONG Britannique qui travaille à leur libération, craint pour leur sécurité s’ils étaient livrés à la Tunisie. Il s’agit de Rafiq Ben Bachir Ben Jalloul Al Hammi ; Mohamed Abdelrahman ; Hédi Ben Hedhili Hammami ; Omar Ben Abdallah ; Adel Ben Ahmed Al Hakimi ; Hichem ben Ali Sliti ; Ridha Ben Salah al Yazidi ; Seif Ben Abdallah ; Adel Ben Hmida ; Abdallah Ben Mohamed Al Ourghi ; Riadh Ben Mohamed Tahar Nasri ; Lotfi Lagha. Nul ne sait si les autorités tunisiennes agissent pour leur libération. (Source : « Kalima » (Mensuel électronique – Tunis), N° 50 – Février 2007) Lien : http://www.kalimatunisie.com/article.php?id=454
Pas d’avocats dans les affaires « terroristes »
Sihem Bensedrine Non seulement l’opacité la plus totale continue d’entourer le devenir des membres du groupe armé qui avait ouvert le feu sur les forces armées en janvier dernier, mais les avocats eux-mêmes sont tenus à l’écart des dossiers de justice relatifs aux arrestations auxquelles ont procédé les services de sécurité suite à ces événements et qui ont touché des centaines de jeunes dans tout le pays. Le 23 janvier 2007, trois avocats, Maîtres Radhia Nasraoui, Raouf Ayadi et Samir Dilou ont saisi le bâtonnier d’une requête en vue de faire respecter leurs droits légaux d’accès aux dossiers de leurs clients impliqués dans les poursuites qui ont visé le mouvement Salafiste. Un refus leur a été opposé par le parquet qui leur demandait de fournir au préalable des détails contenus dans le dossier lui même (les références du dossier) pour pouvoir y accéder, et ceci contrairement aux usages. Un nouveau stratagème inventé par les autorités pour que ces prévenus ne soient pas assistés par leurs avocats. Les avocats déclarent dans leur lettre qu’ils « craignent que ces mesures ne visent à priver les prévenus de l’assistance de leur conseil conformément à la loi » ; les avocats signalent également « la présence de tireurs d’élite armés devant le bureau du doyen des juges d’instruction, ce qui empêche l’instruction de se dérouler dans des conditions normales ». Ainsi depuis une quinzaine de jours plus de 120 jeunes sont effectivement passés devant le juge d’instruction sans avocats! (Source : « Kalima » (Mensuel électronique – Tunis), N° 50 – Février 2007) Lien : http://www.kalimatunisie.com/article.php?id=451
Le FDTL dans la ligne de mire du pouvoir
Sihem Bensedrine Le Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés (FDTL) semble être dans la ligne de mire des autorités publiques ces derniers temps. Le 13 mars 2007, l’affaire opposant la direction du FDTL à un usurpateur (Moncef Louhichi) qui prétend être le SG légitime, sera examinée par le tribunal de première instance de Tunis. Bien entendu, comme dans l’affaire de la LTDH, le pouvoir « n’a rien à voir » avec cette affaire comique! On serait tenté de le croire s’il n’y avait ces nouvelles pièces versées au dossier par les avocats de Mustapha Ben Jaafar. Il s’agit des traditionnels vœux du nouvel an envoyés à Moncef Louhichi en sa qualité de «SG du FDTL» par… le directeur du protocole au nom du président de la République, le premier ministre Mohamed Ghannouchi, le ministre conseiller du président, Abdelaziz Ben Dhia, le président de la chambre des députés, Fouad Mbazaa! Par ailleurs, le journal du FDTL «Mouatinoun» n’a pu tenir la conférence internationale sur le «Rôle des sociétés civiles dans la construction du Maghreb» qu’il avait prévu d’organiser les 2 et 3 février, en collaboration avec la Fondation Friedrich Ebert. Les autorités tunisiennes avaient interdit à la Fondation Friedrich Ebert d’apporter son soutien financier à cette conférence, prétextant que le mandat de l’ONG allemande ne l’y autorisait pas ; Pourtant des précédents de ce genre de soutien existent, notamment avec le journal progouvernemental «Réalités» qui tient sa traditionnelle conférence annuelle grâce au soutien financier de la Ebert Stiftung. Le nouvel organe du FDTL ne bénéficie pas des subventions gouvernementales et le soutien étranger lui est interdit. S’agit-il d’une forme d’étranglement d’un journal qui vient à peine de naître ? (Source : « Kalima » (Mensuel électronique – Tunis), N° 50 – Février 2007) Lien : http://www.kalimatunisie.com/article.php?id=455
La sanction du divorce, une trouvaille des services de sécurité tunisiens.
Lotfi Hidouri Ces femmes qui combattent en silence Traduit de l’arabe (*) La Tunisie est célèbre pour son code de la famille qui comprend des dispositions légales en faveur de la femme de loin supérieures à toutes celles en vigueur dans le monde arabe. Ce code a permis à la femme tunisienne d’accéder depuis août 1956 à un statut d’égale de l’homme et de jouir de droits comme l’interdiction de la polygamie et de la répudiation et la validation du mariage par un acte civil, tout comme le divorce. Ce que l’on connaît moins, c’est la trouvaille des services de sécurité depuis le début des années 90 : le divorce forcé. Ces derniers ont utilisé la relation conjugale comme un moyen de pression sur les opposants en vue de briser leur résistance. Ainsi, le despotisme a réussi à produire les pratiques les plus cruelles et les plus rétrogrades contre les femmes, même dans un pays où la meilleure législation est en vigueur. C’est ainsi que le divorce a dégénéré, de procédure judicaire privée par laquelle un partenaire rompt une relation conjugale, en sanction à laquelle sont contraints les époux par l’Etat, au moment où celui-ci était sensé protéger leurs droits. Cinq jours après sa sortie de prison, Hatem Zarrouk a fêté ses fiançailles avec son ex femme, dont il a été divorcé au début des années 90. Il a été libéré le 5 novembre 2005, en vertu d’une libération conditionnelle et s’est naturellement dirigé vers l’ancien domicile conjugal où l’attendaient sa femme avec ses deux enfants, Balkis et Chouayeb. Cette fête du 10 novembre était singulière : deux divorcés qui fêtent leurs fiançailles et la liberté retrouvée avant leur re-mariage. C’était leur petite victoire sur cette longue séparation et ce divorce forcé. Hatem Zarrouk a vécu dans la clandestinité durant 14 ans dans une pièce sans ouvertures près du domicile de sa femme. Il était alors recherché par les services de sécurité, puis il a été condamné par contumace l’été 1992 à 12 ans de réclusion. Il avait alors fui les atrocités de la torture pratiquée à grande échelle par les services de sécurité et les rafles qui se multipliaient jour après jour. Hatem Zarrouk avait eu recours à ce truchement qu’il pensait alors provisoire : Il s’était construit une prison et s’y réfugia. Le jour de sa sortie de prison, Hatem m’a fait visiter son ancien géôle-refuge qui sert aujourd’hui d’arrière salle à une pâtisserie. Une pièce qui fait deux mètres sur trois avec pour ameublement, un lit, un coin cuisine et un coin toilettes. Il avait recouvert de peinture l’unique fenêtre de la pièce, laissant un petit angle dégagé d’où il pouvait suivre du regard ses enfants jouant dans le jardin qui le séparait de son foyer. Il demeura ainsi dans cette prison huit longues années. Pendant ce temps, sa femme, Sihem Najjar, était à la merci des «visiteurs de la nuit et du jour», les agents de la sécurité, qui l’emmenaient fréquemment au commissariat et la harcelaient pour qu’elle révèle où se cache son mari en cavale. Elle était désemparée et ne savait comment leur faire face, d’autant que ses véhémentes protestations et l’hypothèse de sa fuite à l’étranger qu’elle leur suggéra ne parvenaient pas à les convaincre. Elle fomenta alors avec son «prisonnier» une solution qui l’aida à alléger la pression qu’elle subissait afin d’éviter qu’il ne finisse par se rendre. Après quelques mois, elle s’adressa au poste de police le plus proche où elle déposa une demande de divorce pour abandon conjugal. Le tribunal prononça le divorce ; et la police cessa ses harcèlements, orientant ses recherches vers d’autres directions. Elle fut soulagée par ce divorce qui lui avait permis de sauvegarder la vie de son mari et d’être enfin libérée des visiteurs nocturnes et des interrogatoires diurnes. Six années durant, ni Balkis, ni Chouaib ne savaient que ce père qui leur manquait tant était leur voisin. Leur mère leur avait annoncé son départ en France. Mais les deux dernières années, elle les prépara à son retour et leur fit partager le secret de sa condamnation. Après avoir subi avec succès les épreuves de leur capacité à garder le secret, ils ont été autorisés à retrouver les bras de leur papa, partageant avec lui de temps à autre sa clandestinité. Jusqu’à ce qu’il se rendit aux autorités en janvier 2005. Durant le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) qui s’est déroulé à Tunis en novembre 2005, Sihem Najjar et sa fille ont entamé une grève de la faim pour la libération de Hatem; comme elles ont participé à la grève des familles de détenus politiques en novembre 2006 ; et nul ne soupçonnait, parmi ceux qui la soutenaient, que cette femme parlait d’un homme dont elle était divorcée et qu’elle cherchait ainsi à mettre fin à cette condition à laquelle elle avait été contrainte. Divorcer pour échapper aux persécutions La femme du prisonnier Tahar Harrathi(1) a été contrainte au divorce pour alléger la persécution dont elle faisait l’objet avec ses enfants. Et le plus cocasse est que la divorcée a continué à vivre dans la maison de ses beaux parents. En 1995, Om Abderrahman a été licenciée de sa fonction d’institutrice au lendemain de l’arrestation de son mari ; Elle alla vivre avec ses parents à Siliana (Nord ouest du pays), mais les harcèlements de la police politique l’ont rattrapée et son père a été privé d’une allocation sociale dont il bénéficiait. Elle alla vivre auprès de sa belle sœur à Tunis en 1995 ; Là aussi, la police l’attendait ; ils la convoquèrent au poste et lui reprochèrent de ne pas les informer de ses déplacements ; Ils lui « conseillèrent » de se séparer de son mari si elle voulait en éviter les conséquences. Elle se plia à cette contrainte et rendit visite à son mari à la prison de Borg Erroumi accompagnée de son avocat pour lui demander le divorce « provisoire ». Tahar Harrathi a été libéré le 25 février en vertu d’une libération conditionnelle et son premier acte fut le remariage avec son ex femme. Il en a été de même pour Khaled Kaouachi qui s’est remarié avec Mamia, son ancienne épouse, elle aussi contrainte au divorce, au lendemain de sa libération en février 2006. Ce fut également le cas de Abdellatif Oueslati, libéré à la même date. Ainsi, on a vu des grèves de la faim entamées par des prisonniers politiques, non pas pour améliorer leurs conditions ou exiger leur libération, mais juste pour exiger que cessent les pressions exercées par la police sur leurs femmes pour les amener à divorcer ; Ce fut le cas de Mahmoud Balti, qui fit en 1994 une grève de la faim sauvage de 15 jours afin que les services de Jendouba cessent leur pression sur sa femme pour l’amener à demander le divorce. On lit dans un témoignage publié dans le même ouvrage (2) : « La brigade des renseignements de Jendouba a exercé des pressions sur les femmes de prisonniers afin de les contraindre au divorce ; il en a été ainsi pour les femmes de Mahmoud Balti, Abdellatif Oueslati, Kamel Attafi…etc. Elles furent entre autre menacées d’aller elles mêmes en prison sous des charges préfabriquées. Certaines d’entre elles avaient cédé à la pression policière. Mais elles profitèrent des longs délais des procédures pour retirer leurs demandes de divorce ; elles furent punies de privation de visites à leurs maris ». Ridha Boukadi, condamné à perpétuité (peine commuée à 30 ans) raconte que sa femme a été arrêtée en 1991 et torturée dans les locaux de la sûreté de l’Etat en subissant le supplice de la suspension, nue, frappée sur les parties sensibles de son corps et menacée de viol. Et de novembre 1991 à septembre 1996 (date à laquelle il a été livré par les autorités libyennes), elle a subi des tortures et différentes formes de persécutions afin de l’obliger à demander le divorce et finalement, elle céda à la pression. La liste des femmes de prisonniers qui ont partagé ce sort est bien plus longue et l’on peut encore citer les cas des épouses de Kamel Besbes, Fraj al Jami, Maatoug Al Air, Mohamed Ayadi, Hassouna Nayli, Jallal Mezghiche, Habib Ellouz…etc. Les victimes de la torture et la contrainte tragique au divorce Il y a eu des cas extrêmes ayant une issue tragique consécutive à l’usage de la torture ; C’est l’histoire de deux époux victimes de tortures dont les liens conjugaux ont été définitivement détruits. Si Hatem Zarrouk, Tahar Harrthi, Khaled Kaouache ou Abdellatif Ouaslati ont réussi à mettre fin à la séparation forcée, ce ne fut pas le cas du prisonnier Fayçal Garbaa dont le divorce d’avec son épouse N fut, lui, définitif. Les pressions policières et le harcèlement judiciaire ne cessèrent que lorsqu’elle décida de se séparer de son mari en détention. Elle se remaria quelques années plus tard, tandis que Fayçal s’est enfermé dans sa maison à sa sortie de prison et refusa les appels pressants de ses amis à sortir dans la rue à la rencontre des gens ou même à traiter la dépression nerveuse dans laquelle il s’enfonça. Fayçal Garbaa a été arrêté en octobre 1991 au district de la Garde nationale à Nabeul avec un groupe de personnes accusées d’appartenir au parti Ennahdha interdit. Sa femme N figurait parmi eux. Tous les prisonniers ont été soumis à une torture sauvage. L’un des témoins, qui a tenu à garder l’anonymat, raconte l’horreur qu’ils y vécurent. Leurs tortionnaires les avaient maintenus dévêtus durant 15 jours. Ils étaient près de 90 détenus à avoir été témoins de la mort sous la torture de deux d’entre eux, Rachid Chamakhi et Fayçal Baraket (3). N était donc arrêtée et on usa de procédés ignobles contre son mari Fayçal qui avait résisté à la torture. Pour le faire parler, on conduisit N dans la salle où il était interrogé, elle fut dénudée et humiliée devant lui. Dans un deuxième temps, on a mis a nu Fayçal et on plaça un autre prisonnier sur lui en position de sodomisation ; et l’on fit entrer N pour assister à la scène. Elle en fut choquée et Fayçal entra dans une crise de nerfs qui évolua en dépression, puis en démence. N fut relâchée sans être poursuivie en justice, mais les agents de la garde nationale ont continué à la harceler jusqu’à ce qu’elle divorce. Elle ne fut soulagée définitivement qu’après s’être remariée. Elles ont résisté en silence La fin des années 80 et le début des années 90 ont vu l‘apogée de la lutte entre le mouvement islamiste Ennahdha et le régime tunisien. Durant les élections législatives d’avril 1989 qui se sont soldées par l’accaparement de tous les sièges du parlement par le parti au pouvoir, les listes indépendantes, soutenues par le parti Ennahdha avaient émergé comme une nouvelle force électorale. Et la décision de liquider cette mouvance et d’assécher les sources de tout concurrent potentiel a été prise. C’est ainsi qu’une large campagne de répression a été engagée au milieu de 1990 et s’est poursuivie jusqu’au milieu de l’année 95. Cette période s’est illustrée par les arrestations arbitraires, la torture jusqu’à la mort, les lourdes peines de prison, l’exil des opposants ou leur fuite dans la clandestinité. Elle ne fut pas une bataille seulement contre un adversaire politique, mais s’étendit à l’ensemble de la société. C’est ainsi que des femmes, des mères de prisonniers se sont retrouvées confrontées à la répression. Ce ne fut pas un choix de leur part et rares sont celles qui avaient prévu ce cours des choses. Elles ont payé le tribut de l’engagement politique d’un mari ou d’un fils. Elles devaient découvrir l’expérience amère des sinistres lieux de détention, des bureaux de la sûreté de l’Etat, en passant par les procédures judiciaires dans toutes leurs étapes. Et par la force des choses, le mouvement des femmes des détenus est devenu un facteur de lutte contre l’éloignement et l’étranglement financier, redonnant ainsi l’espoir aux prisonniers. Ceci n’échappa pas à la vigilance des agents de répression qui le combattit avec acharnement. Dans cette lutte, la femme apparaissait sans doute comme le maillon faible qu’il était aisé de réprimer sans qu’elle ait un grand espoir d’y échapper. Elle fit pourtant face, en silence, mais résista avec courage et patience. Ces femmes ont été humiliées, torturées, emprisonnées. Et le divorce se transforma en moyen de répression. On a pu ainsi voir que le divorce sous la contrainte signifiait que le désir de vengeance du pouvoir n’était pas assouvi. Ce dernier voulait avoir en permanence un adversaire à écraser, il s’en prit aux femmes, après avoir affaibli le prisonnier politique et coupé ses liens familiaux pour le priver d’un soutien matériel et moral. La terreur avait envahi le milieu familial du prisonnier avant de gagner le milieu social ; et la répression a dégénéré en étalage de force brute devant l’ensemble de la société. C’est ce qui arrive souvent quand on confie aux services de sécurité le soin de trancher les conflits politiques. _______________________________ (*) Enquête parue en langue arabe le 26 décembre 2006: http://www.kalimatunisie.com/article.php?id=423 (1) Témoignage paru dans l’ouvrage « Le calvaire des prisonniers politiques » – Paris 2003, Solidarité tunisienne. (2) Idem (3) cf Rapport du CNLT sur les procès jugés par le tribunal militaire de Baba Saadoun et Bouchoucha en août 1992 – Tunis 2002, p31. (Source : « Kalima » (Mensuel électronique – Tunis), N° 50 – Février 2007) Lien : http://www.kalimatunisie.com/article.php?id=450
Transfert – Santos, l’attaquant tunisien de Toulouse, prêté au FC Zurich
AFP, l e5 février 2007 à 10h11
TOULOUSE (France), 5 fév 2007 (AFP) – L’attaquant tunisien d’origine brésilienne de Toulouse (1re div. française de football), Francileudo Santos (1,72m, 68kg), a été prêté jusqu’à la fin de la saison au FC Zurich, leader du championnat Suisse, a-t-on appris lundi sur le site internet du club toulousain. Agé de 28 ans, l’international tunisien, qui n’entrait pas dans les plans de l’entraîneur de Toulouse Elie Baup arrivé en juin dernier, n’a joué que trois matchs depuis le début de la saison. Le club cherchait depuis plusieurs mois un moyen de se séparer de son plus gros salaire et c’est finalement en Suisse, où le mercato dure jusqu’au 15 février, que Santos espère donner un nouvel élan à sa carrière. Les modalités du prêt n’ont pas été communiquées par le club, 11e au classement du Championnat de France.