Liberté et Equité: Des dizaines de prisonniers d’opinion poursuivent leur grève de la faim collective pour exiger une justice indépendante Liberté et Equité: Libération d’Ali Neffati et Othman Jemili de la prison de Bizerte OLPEC: La journaliste Sihem Bensedrine agressée à l’aéroport de Tunis Carthage et empêchée de quitter le territoire Reuters: EU trade deal offers mixed blessing for Tunisia APN: Slim boukhdhir “Je ne suis pas le premier journaliste tunisien à subir ce sort, mon espoir est d’être le dernier” Houcine Ghali: La grande misère des intellectuels tunisiens Sami BEN ABDALLAH: Polémique « Sahbi Amri, Borhene Bsais et Mezri Hadded, Opposition alimentaire… » Suite et fin APANEWS: Après les critiques, les éloges de la presse tunisienne pour Mellouli Jeune Afrique: RCD, voyage à l’intérieur du parti-État AFP: Algérie: 43 morts dans l’attentat le plus meurtrier depuis huit mois AFP: Algérie: l’ex-chef du GSPC appelle les islamistes armés à renoncer aux armes El Watan: Arrestation du commanditaire présumé de l’assassinat de Ali Mecili – Aït Ahmed craint que l’affaire n’aille pas jusqu’au bout Reuters: Dix parachutistes français tués en Afghanistan
Des dizaines de prisonniers d’opinion poursuivent leur grève de la faim collective pour exiger une justice indépendante
Libération d’Ali Neffati et Othman Jemili de la prison de Bizerte
Monsieur Othman Jemili, militant des droits de l’homme et membre de l’AISPP, et monsieur Ali Neffati, ex prisonnier politique, ont été libérés après avoir été condamnés à 6 mois d’emprisonnement ferme par le Tribunal cantonal de Bizerte (affaire n°31453) pour attroupement sur la voie publique et atteinte aux bonnes mœurs. Pour le bureau exécutif de l’organisation Le Président, Maître Mohammed Nouri (traduction ni revue ni corrigée par les auteurs de la version originale, LT)
La journaliste Sihem Bensedrine agressée à l’aéroport de Tunis Carthage et empêchée de quitter le territoire
ANALYSIS-EU trade deal offers mixed blessing for Tunisia
Je ne suis pas le premier journaliste tunisien à subir ce sort, mon espoir est d’être le dernier
LA GRANDE MISERE DES INTELLECTUELS TUNISIENS
Houcine Ghali, Genève
” Le rôle de l’intellectuel est de dire aussi pleinement, aussi honnêtement et aussi directement que possible la vérité. Cela implique qu’il ne se soucie ni de plaire ni de déplaire au pouvoir, ni de s’inscrire dans la logique d’un gouvernement, ni de répondre à un intérêt de carrière “.
Cette remarque d’Edouard Saïd, dans son livre intitulé Des intellectuels et du pouvoir ( Seuil, Paris, 1996 ), n’a guère trouvé d’échos auprès de la majorité des intellectuels tunisiens. En effet, jamais la production culturelle tunisienne objective n’a été aussi chétive et le rôle des intellectuels fâce aux problèmes urgents de leur société aussi effacé. Face à un événement aussi important dans l’histore récente de la Tunisie, à savoir le renversement de Bourguiba le 7 novembre 1987 et la confiscation du pouvoir par Ben Ali jusqu’à présent, les intellectuels tunisiens, du professeur d’université à l’ historien, en passant par le militant chevronné et le dirigeant de parti d’opposition, se sont distingués par un mutisme total. Les publications intéressantes concernant cet épisode capital du pays ont émané d’écrivains français ( Notre ami Ben Ali, de Nicolas Beau et Jean – Pierre Turquoi, Ed. La Découverte, Paris, 1999; Le syndrome autoritaire. Politique en Tunisie de Bourguiba à Ben Ali , de Michel Camau et Vincent Geisser, Ed. Presse de sciences po., Paris, 2003; La force de l’obéissance. Economie politique de la répression en Tunisie, Béatrice Hibou, Ed. La Découverte, Paris, 2006 ) tandis que les scribes au service du pouvoir n’en ont fait que dresser un tableau élogieux, suite à l’action salvatrice du général Bne Ali.
Il suffit de faire un tour dans les librairie des grandes villes tunisiennes pour constater l’absence de livres et de revues traitant des vraies problèmes qui se posent au pays. Les rayons regorgent plutôt d’ouvrages relatant l’épopée de Ben Ali, l’histoire passée des Arabes, les divers aspects de la religions musulmane et les bouquins de faits divers importés de France.
L’absence de vrais débats et écrits concernant les questions fondamentales comme celle de la femme dans la société, de la laïcité, de la liberté, des séparations des pouvoirs dans une République, des droits fondamentaux des citoyens, de la dimension idéologique que prend la religion musulmane, etc…s’avère patente.
Le règne de l’arbitraire, la reconduction d’un pouvoir autoritaire, la manipulation de la constitution et la pratique de la torture et de la répression sous toutes ses formes ne sont dénoncés que par une infime minorité d’intellectuels qui se sont engagés dans la politique militante dans un désert d’insouciance.
Dénoncer les injustices, se porter au secours de la vérité, défendre la dignité de l’homme, ce sont là des causes qui ne mobilisent nullement la majorité écrasante des intellectuels tunisiens. Ce lourd silence, cette passivité honteuse et cette démission complice donnent la nausée dans un pays assaillis d’innombrables problèmes et dont l’histoire de ces cinquante dernières années n’a jamais été réellement analysée.
Par peur et par lâcheté, les intellectuels tunisiens désapprouvent silencieusement, refusent la libération de leur imaginaire et se désintéressent de la chose publique. Le spectre de la répression et la peur de perdre les intérêts glanés par la position sociale occupée ( professeur, chercheur, ingénieur, médecins, cadre, avocat, magistrat, homme d’affaire, conseiller, etc…) les ont conduit à battre en retraite en masses. plusieurs d’entre eux tiennent le haut du pavé en tant que grands commis de l’Etat et se permettent même de défendre un régime oppressif qu’ ils honnissaient auparavant.
Des conseillers du chef de l’ Etat, des PDG de sociétés étatiques et des barrons de l’administration centrale sont des diplômés des grandes universités et même d’anciens marxistes qui ne juraient par le passé que par le peuple et ses couches exploitées. Les universitaires tunisiens gèrent leur carrière et certains d’entre eux se suffisent de militer de l’intérieur de leur discipline.. Leur participation active lors de manifestations et autres signes de ras-le-bol populaires face à l’absolutisme s’est aussi révélée infiniment limitée. Ils ne fréquentent pas le petit peuple. Ils ont leurs lieux à eux et se concentrent notamment dans la capitale Tunis et secondairement dans les autres grandes villes, exactement comme les leaders de l’opposition officielle et celle non reconnue qui ignorent tout des citoyens qu’ils prétendent défendre.
Certes, la répression qui caractérise le pouvoir tunisien avec son lot de torture, de confiscation de passeports, de perte d’emplois et de lourdes peines de prison n’ incite pas les intellectuels à tenir le haut du pavé de la contestation. Mais de là à démissionner en grandes masses devant toute autre forme de lutte, c’est d’une lâcheté qui n’honorent pas les privilégiés de ce pays et qui contredit les avancées positives de l’Histoire. Des intellectuels d’autres contrées du monde ont pu changer le cours de l’histoire de leurs peuples, suite à leur dévouement, leur sacrifice et leur engagement, sous des régimes aussi répressifs et aussi arbitraires que celui qui prévaut en Tunisie.
Polémique « Sahbi Amri, Borhene Bsais et Mezri Hadded, Opposition alimentaire… » :
Suite et fin
« Nos amis qui arrivaient, comme le docteur Mustapha en Jaafar, sont renvoyés à coups de rangers et de mots orduriers. Mes honorables soutiens sont giflés comme de gamins, leurs cigares et leurs chapeaux mous ne les ont pas impressionnés. Les Services Spéciaux sont aidés par la milice du quartier, les chômeurs, les petits délinquants, pendant que les costumes noirs dirigent les opérations du haut d’une tour imaginaire. Toutes les issues de la rue en étoile sont barrées par des barreaux humains. Trente armoires à glace pénètrent dans la maison et m’envoient en vol plané sur la caillasse. J’ai à peine le temps de voir le tés respectable vice-président de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH), M. Chaabouni, qui avec sa cravate tente de se donner une constance : « c’est ça, la démocratie ? ». Il est saisi au collet par un gros vicieux : « démocratie de mon z…, casse-toi, va niquer sinon je te nique. ». Récit de la grève de la faim de Taoufik BEN BRIK, p 121-122, Taoufik BEN BRIK, « Le rire de la Baleine ». Les Editions du SEUIL, Novembre 2000. Par Sami BEN ABDALLAH Sami_tunisie_soir@yahoo.fr J’ai reçu plusieurs réactions à mon dernier article «Du bon et du mauvais opposant. Du bon et du mauvais patriote ». Je vous prie de publier ces réponses puisque la majorité des «reproches », des «questions » et des «remarques » se ressemblent. En italique, le résumé des réactions reçues. Le premier point :A propos du parcours de Sahbi Amri, Mezri Hadded, Borhene Bsais « M.Sahbi Amri était un médecin qui a été appelé en urgence pour secourir M. Mansouri (l’officier le plus gradé qui appartenait au groupe sécuritaire qui projetait de commettre un Coup d’Etat le 8 Novembre 1987 et qui a été annulé par le MTI (ancienne appellation d’Ennahdha) suite au changement du 7 Novembre 1987. M. Sahbi Amri «aurait » assisté à la mort de M. Mansouri dans les locaux du Ministère de l’intérieur. Devenu un témoin gênant (y compris pour Ennahdha, qui suite à un arrangement politique avec le pouvoir, s’était désolidarisé du groupe Sécuritaire), il aurait été récupéré par la police politique et «aurait » été utilisé dans des règlements de compte entre des membres de la Présidence et des hauts responsables du Ministère de l’intérieur (luttes d’influence) ainsi que pour discréditer définitivement le Général Habib Ammar qui était le Ministre de l’intérieur lors de la mort du Commandant Mansouri. Ainsi il n’a rien d’un opposant. M. Borhener Bsais «serait » un Salarié de l’ATCE (L’Agence Tunisienne de la Communication Extérieure) et un proche de la présidence. Le boulot qu’il fait et les mensonges qu’il répète lors des émissions télévisées lui valent aujourd’hui de vivre dans un luxe qui contredit l’austérité que vous avez évoquée. Idem pour M. Mezri Hadded. Ils savent peut être bien communiquer, mais au niveau de la morale et l’éthique politique, ils «seraient » capables de tout faire afin de sauvegarder leurs intérêts ». S’il fallait lire le dossier sécuritaire de chaque personne qui s’exprimait, mieux vaut alors créer une police de pensée et puis, à ce jeu là, personne n’est irréprochable! Ce que j’ai écris, c’est que ces personnes ont essayé de changer des choses par le passé, elles ont pris des risques puis chacun a renié son parcours politique pour des raisons qui le regardent. Aujourd’hui, leur discours est clair et sans aucune ambiguïté. Il n’empêche qu’ils sont libres de dire et d’écrire ce qu’ils veulent. Ils ont pris des risques par le passé. Ils sont libres de ne plus évoquer la torture, les violences contre les dissidents, la corruption… Mais ils ne peuvent pas dire plus tard «on ne savait pas » ! L’opposition n’a pas le monopole du patriotisme, ni le Pouvoir d’ailleurs. Chacun est libre d’essayer de changer les choses à sa façon et de faire ce qu’il estime son devoir envers le pays. Ceci dit, il y a un réel problème de liberté d’expression en Tunisie. Cela est très visible du coté du pouvoir qui interdit toutes critiques. Il commence à être visible aussi parmi les rangs de la dissidence. Il y a une minorité qui se croit au dessus de toute critique et qui refuse de rendre des comptes… Il suffit de formuler une critique pour que vous devenez un flic, en mission commandée auteur d’une campagne de dénigrement ou d’un «complot » contre untel ou untelle…etc etc ! On n’est pas condamné dans notre pays à applaudir le pouvoir ou à applaudir untel ou untelle dissident(e) ! sinon on devient un traître pour le premier et un flic pour les seconds ! C’est quand même honteux et très bas que certain(e)s supposé(e)s “démocrates” passent leurs vies à téléphoner aux journalistes ou ONG étrangères pour dire tout le mal de ceux qui ont osé critiquer leurs parcours. C’est la stricte vérité que la majorité connait mais n’ose pas dire…On ne meurt pas de l’objectivité. Le second point: L’opposition alimentaire Une minorité de dissidents tunisiens est appelée «l’opposition alimentaire ». Ce qui lui vaut cette appellation, c’est le fait qu’elle vive des «subventions des ONG des Droits de l’Homme ». L’opposition alimentaire tunisienne est bien réelle. C’est devenu un commerce pour certains et certaines, de fonder des ONG « surmesure » et de déposer le lendemain des demandes de subventions. Ce n’est pas propre aux ONG, des Partis politiques souffrent du même phénomène. Les exclus de la générosité de la manne islamiste (qui n’ont pas eu la chance de créer des commerces à Paris ou à Londres grâce à l’argent du Zakat) n’hésitent pas à accuser leurs anciens «frères » de tous les maux en dénonçant la gestion clientéliste de leur ancien cheikh vénéré. Le RCD, parti au pouvoir n’a jamais publié le moindre rapport financier quant à l’origine de ces fonds perçus ni le nombre de ses permanents. Tous ces faits sont réels. Je ne les ai pas inventés. Ils sont connus de la majorité des dissidents. Le pouvoir es connaît aussi. Pourquoi ils ne sont pas évoqués publiquement ? Car beaucoup de dissidents ont peur d’être accusé de tous les maux s’ils les évoquaient. Et par conséquent, la majorité garde le silence. Par rapport à ce point, j’ai écris que les Tunisiens ne sont pas les premiers à souffrir de ces méfaits. Les Français ont connu cet épisode douloureux du financement occulte et jusqu’à aujourd’hui en France, les médias évoquent les commissions versées aux Hommes politiques ou des syndicats par des caisses noires. Mais ce qui nous sépare de la France, c’est que les Français ont posé le problème et ont essayé d y apporter des solutions. Pourquoi nous Tunisiens n’aurions pas ce courage ? Depuis des années, cette épineuse question des subventions et des financements est à l’origine de nombre d’interrogations. Il est tout à fait légitime que des personnes qui s’investissent dans le champ politique aient des subventions, car l’ère du bénévolat est révolue. Mais il doit y avoir des contre pouvoir et une certaine transparence. Car en l’absence de transparence, c’est la confusion totale ! En témoigne le déficit de légitimité qui marque depuis quelques années nombre d’ONG. Les responsables de ces dernières ne veulent plus quitter les ONG qu’ils ont participé à la création (il s’agit d’ONG en Tunisie et à l’étranger ). Par conséquent, ils sont devenus des Présidents et des Secrétaires généraux et des porte-parole «à vie » de leurs ONG. Il y a cette peur que d’autres personnes accèdent à des postes de direction et découvrent tout ce volet financier méconnu ! D’autant plus, qu’officiellement, ces dissidents répètent à volonté que leurs ONG ne perçoivent pas le moindre centime de subvention. Encore une fois, tous ces faits sont connus de la majorité des dissidents qui citent même des noms… Comment dénoncer la corruption qui mine le pouvoir en Tunisie (et cette corruption est bien réelle), comment dénoncer le système clientélisme et l’opacité qui marquent les privatisations en Tunisie qui sont sources d’enrichissement pour des proches du pouvoir…comment dénoncer toute cette opacité et ce clientélisme et se taire quand ce clientélisme et cette opacité sont présents dans les rangs de la dissidence ? C’est cela ce que j’ai voulu dire. Il y a aujourd’hui un malaise réel et il faut y apporter des solutions en instituant une sorte de transparence et des contre pouvoirs. Il y a même des dissidents qui ne veulent plus participer à des manifestations ou à des actions, car ils vous disent «on sait qu’ils organisent ce rassemblement ou impriment des tracts qu’ils ne distribuent même pas, pour justifier des demandes de subventions et des remboursements de frais. Alors, oui pour s’opposer au régime de M. Ben Ali, oui pour dénoncer la torture et la corruption, mais pas en laissant ces personnes s’enrichir sur notre dos ». Du coup, ils ne veulent plus participer à la moindre manifestation ou réunion qui au en moyenne réunissent une vingtaine de personnes. Les « contre-manifestations » organisées par le RCD en France ne réunissent plus personne aussi ! Même pas une vingtaine! (Souvent des fonctionnaires de l’Ambassade et quelques vieux analphabètes qui ne savent même pas ce qui est écrit dans les banderoles qu’ils tiennent). C’est ce malaise réel que tous osent dénoncer dans les coulisses que j’ai voulu évoquer. Il n y a pas de fatalité. Il faut apporter des solutions. Les Français l’ont fait. Pourquoi nous les Tunisiens ne trouvons pas de solutions ? A propos de l’hospitalisation de M. Sahbi Amri Il n y a aucune solidarité entre les dissidents. Ça fait mal au cœur, c’est triste, mais c’est la vérité. Le monde de la dissidence est un monde inhumain. Pourtant, beaucoup de dissidents pris séparément ont un sens exceptionnel de l’humain. Ce n’est pas une fatalité et c’est la responsabilité de tous d’instituer un autre système de valeurs. Il n’empêche que pour le cas de M. Sahbi Amri, la majorité ne savait pas du tout qu’il a été hospitalisé ni les conséquences que cette hospitalisation a eu (amputation de sa jambe). C’est humain qu’il ressente une certaine amertume et une certaine ingratitude et que cette dernière le pousse –peut-être- aujourd’hui à s’en prendre à tout le monde. Mais qu’il ait le courage d’admettre cette vérité froide qui fait mal : la majorité ne savait pas pour son hospitalisation, M. Ben Ali et son émissaire qu’il a remercié pour leur intervention, sont à remercier pour ce geste humain. Mais le budget de la présidence de la République, grâce auquel la facture de l’hôpital a été payée vient du budget de l’Etat qui vient à son tour de l’argent du contribuable tunisien. Que M. Sahbi Amri (M. Borhene Bsais,M. Mezri Hadded et bien d’autres) n’aient pas eu la reconnaissance dont s’il s’estimait digne, ce n’est pas une raison pour renier leurs parcours politique ou s’en prendre à tout le monde. Ce qu’ils ont fait par le passé mérite du respect. Le discours qu’ils tiennent aujourd’hui contredit tout ce qu’ils ont fait avant… Ils sont libres.
Cordialement
Sami BEN ABDALLAH Sami_tunisie_soir@yahoo.fr
Après les critiques, les éloges de la presse tunisienne pour Mellouli
Tunisie
Baptême du feu pour Sakhr Materi
Symbole du rajeunissement des cadres du RCD à l’occasion du congrès, Mohamed Sakhr Materi, homme d’affaires âgé de 28 ans et par ailleurs gendre du président Ben Ali, a été élu au comité central à l’unanimité par le comité de coordination de La Marsa (banlieue nord de Tunis). Et non pas à la faveur de la liste regroupant la centaine de personnalités désignées par le président.
(Source: « Jeune Afrique » (Magazine Hebdomadaire – France), N° 2481 du 27 juillet au 2 août 2008)
RCD : Vingt années d’existence
1988 Le PSD devient le RCD. De nouveaux partis sont légalisés (le Parti démocratique progressiste, PDP ; le Parti social libéral, PSL ; et l’Union démocratique unioniste, UDU) ; une plus grande tolérance à l’égard des islamistes est également instituée. Leur parti (non reconnu) change de nom pour se conformer à la loi interdisant l’utilisation de l’islam à des fins partisanes : le Mouvement de la tendance islamiste (MTI) devient Ennahdha (« Renaissance »).
1989 Zine el-Abidine Ben Ali est élu pour un premier mandat de cinq ans, selon les termes de la nouvelle révision constitutionnelle (qui abolit la présidence à vie et limite le nombre de mandats à un maximum de trois). Les partisans d’Ennahdha sont autorisés à se présenter aux législatives sur une liste d’« indépendants », mais ils n’obtiennent aucun siège. Depuis, ils ont été exclus de la scène politique. Leurs leaders sont partis à l’étranger, d’où ils animent leur opposition au régime.
1994 Des élus de l’opposition font, pour la première fois, leur entrée à l’Assemblée nationale (grâce à un système exceptionnel de quota).
1999 Première élection présidentielle pluraliste. Ben Ali l’emporte aisément pour un troisième et, théoriquement, dernier mandat.
2000 Décès de Habib Bourguiba.
2001 Campagne pour le maintien de Ben Ali au pouvoir.
2002 Révision de la Constitution par référendum. La limitation du nombre de mandats présidentiels est supprimée, mais une limite d’âge – 75 ans – est fixée pour exercer la fonction ; légalisation d’un nouveau parti de l’opposition, le Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL).
2004 Ben Ali est élu pour un quatrième mandat, avec 94,49 % des suffrages exprimés, face à trois rivaux. Avec 87,59 % des voix, le RCD obtient, à l’Assemblée nationale, la totalité des sièges attribués aux circonscriptions (152). Grâce à l’introduction d’un quota de 20 % des sièges réservés à l’opposition, cinq partis qui en sont issus se voient, eux, attribuer 37 sièges correspondant au score qu’ils ont réalisé au niveau national.
2006 Autorisation d’un neuvième parti politique, le Parti des verts pour le progrès (PVP).
2007 Lancement de la campagne en faveur de la candidature de Ben Ali à la présidentielle de 2009.
2008 Ben Ali y répond positivement.
(Source: « Jeune Afrique » (Magazine Hebdomadaire – France), N° 2481 du 27 juillet au 2 août 2008)
RCD, voyage à l’intérieur du parti-État
Samir Gharbi, envoyé spécial
Les dés sont jetés. À quinze mois de la prochaine présidentielle, la scène politique tunisienne s’apprête enfin à vivre sa campagne électorale. Zine el-Abidine Ben Ali, 71 ans, annoncera en effet, le 30 juillet, devant les quatre mille congressistes du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD, au pouvoir), qu’il accepte de se porter candidat à un cinquième mandat à la tête de son parti et de l’État – deux structures qui se confondent en Tunisie depuis 1956 – pour la période 2009-2014. Selon les termes de l’actuelle Constitution, qui limite l’âge du futur président à 75 ans lors du dépôt de sa candidature, il devrait s’agir de son dernier quinquennat. Une période au cours de laquelle certains ne devraient pas manquer de se positionner avec habileté dans la course à sa succession… Avec cette annonce, le chef de l’État répondra ainsi au souhait de tous les comités de femmes, de jeunes, de professionnels ou de sportifs qui, depuis deux ans, le prient de briguer à nouveau ces deux fonctions.
Le RCD réunira son 5e congrès du 30 juillet au 2 août, dans l’immense centre des expositions du Kram, à mi-chemin entre le centre-ville de Tunis et le palais présidentiel de Carthage. L’événement sera célébré en grande pompe, car il fêtera le vingtième anniversaire de la création du parti, en 1988. Un parti aujourd’hui plus puissant que jamais : avec plus de 2,2 millions d’adhérents (soit un adulte sur quatre) et près de 8 700 cellules de base réparties sur l’ensemble du territoire tunisien, il compte presque deux fois plus de militants qu’au soir du 7 novembre 1987, date du « Changement » à la tête de l’État et de l’accession de Ben Ali à la présidence de la République.
Cette puissance, le RCD la doit à l’effet d’attraction qu’il exerce sur les citoyens et les chefs d’entreprise tunisiens. Ceux-ci y adhèrent en masse pour se rapprocher du sommet de l’État, mais aussi militer contre tous les courants extrémistes (gauchistes ou islamistes) ou, de façon plus matérielle, faciliter leur vie quotidienne. Le possesseur de la carte du parti peut se voir ouvrir des portes, grandes ou petites (accès au monde des affaires, à l’aide humanitaire distribuée par les cellules du parti, etc.) qui lui resteraient fermées s’il ne disposait pas du précieux sésame. « Pour ceux qui n’ont aucun piston, le RCD est devenu le meilleur ascenseur social du pays », explique ainsi l’un de ses cadres, qui souhaite garder l’anonymat (*).
Coquille vide ou bloc uni ?
Si les contempteurs du RCD en fustigent les procédés, le système de parti unique et les moyens financiers (dont témoignerait son imposant siège de 17 étages qui trône au beau milieu de l’avenue Mohammed-V, à Tunis), force est toutefois de constater que cette formation est aussi une véritable machine de guerre qui travaille, inlassablement, à la conservation du pouvoir. Tout le pouvoir… « Du prix de la pomme de terre à la pénurie de beurre ou de riz, du plus petit incident à la moindre rumeur, rien ne nous échappe. L’information remonte. Elle est discutée dans les cellules, les comités, les fédérations, et jusqu’au siège du parti. Elle est analysée puis exploitée dans nos débats et dans les choix que nous faisons. S’il y a des débats au RCD, toute résolution adoptée devient celle de tous. Chez nous, il n’y a pas de courants officiels, comme à l’époque du Parti socialiste destourien (PSD). Nous constituons un bloc uni », explique un responsable. Le RCD ne serait donc pas la « coquille vide » que d’aucuns se plaisent à présenter comme le responsable de tous les maux qui touchent la démocratie tunisienne encore naissante. Elle serait, au contraire, « une coquille qui bouillonne de l’intérieur, mais pourvue d’une carapace opaque et solide comme un roc ».
Le RCD serait donc très différent du PSD (1964-1987), son ancêtre dirigé par le premier président de la République tunisienne, Habib Bourguiba. Héritier de la bataille pour l’indépendance et fort de la gloire de son principal animateur, le PSD avait fini par tout écraser. Parti unique de 1963 à 1981, il s’était enlisé, par la suite, dans l’adoption successive d’idées antinomiques, socialistes d’abord, libérales ensuite, saupoudrées d’une volonté d’ouverture démocratique à laquelle a répondu, plus tard, une intense répression autoritaire. Dirigé par un président charismatique, il n’a finalement pas su se sortir des luttes de clans internes qu’ont attisées d’abord les maladies de Bourguiba, dans les années 1970, puis ses sautes d’humeur, et enfin sa vieillesse, dans les années 1980. Le PSD est resté enfermé dans sa logorrhée stalinienne, son refus d’ouvrir le jeu politique aux voix discordantes et son aveuglement face à la montée du péril islamiste et à la contestation de la jeunesse. Quant à la répression policière et aux opérations de la milice du parti, elles n’ont fait qu’exacerber les tensions, jusqu’au sommet de l’État : le Premier ministre était à peine nommé qu’il ne pouvait exercer la moindre de ses prérogatives, à l’exception de celle consistant à sévir contre tous les opposants.
« Plus ‘‘benaliste’’ que moi, tu meurs ! »
Enfin, voulu par Bourguiba lui-même, un article de la Constitution permettait, à l’époque, au Premier ministre de succéder en toute légalité au président de la République, à condition que son incapacité à exercer pleinement ses fonctions ait été constatée. Contrairement à ses prédécesseurs, seul Ben Ali a eu le courage de lui dire qu’il n’avait plus les capacités requises pour être le maître absolu à Carthage…
Mais il faut véritablement attendre la mise à l’écart de Bourguiba pour que le PSD – devenu RCD en février 1988 – parvienne à faire son autocritique. Elle était alors devenue obligatoire… « La situation politique était dans l’impasse, la situation économique désastreuse et la situation sociale au bord de l’explosion. Les partisans de l’extrémisme religieux, de la violence et du terrorisme opéraient au grand jour. Le PSD, exsangue, malade de la sénilité de son président et de la vacance au sommet de l’État n’était plus qu’une machine essoufflée, qui avait perdu toute influence et toute crédibilité », peut-on lire aujourd’hui dans l’historique du parti au pouvoir, pour qui le PSD était aussi tombé dans « la paralysie » et connaissait un « dépérissement de ses valeurs morales, [un] déclin de son rayonnement », et souffrait de « l’opportunisme de ses militants ».
Dès sa création, le RCD se restructure de fond en comble, ses cadres se renouvellent, sa force de mobilisation se renforce par une démultiplication des « cellules de base », sa présence sur le plan intellectuel s’affirme (notamment par l’organisation de symposiums annuels et d’universités d’été régionales et nationales), et son action sociale – qui complète ou se substitue à celle du gouvernement – s’élargit (création de caravanes de la santé, d’aides scolaires et aux familles démunies). Bref, il devient un parti qui s’adresse aux masses populaires et non plus seulement aux élites, comme à l’époque de Bourguiba. Les femmes et les jeunes y trouvent une place plus grande et sont mieux accueillis. Toutes ces avancées sociales donnent naissance à un véritable culte de la personnalité de Ben Ali : tout émane du président et tout dépend de lui…
Reste que s’il consolide ses structures, le RCD a encore beaucoup à faire pour mettre la Tunisie sur la voie d’une démocratisation effective et irréversible. Au sein de l’administration comme du parti, la compétition se déroule davantage sur le champ de l’allégeance (« Plus “benaliste” que moi, tu meurs ! ») que sur celui des compétences, davantage sur celui de la propagande que sur celui de la communication ou de la vérité. Ses membres ne font que céder aux décisions d’un président qui, faute d’opposition forte, grignote le pouvoir de sa propre formation, en donnant plus de places à ses adversaires… à condition qu’ils ne contestent pas sa légitimité. Dans la nouvelle Assemblée nationale qui sera élue en octobre 2009 et dans les nouveaux conseils municipaux qui sortiront des urnes lors des municipales de 2010, l’opposition aura ainsi droit à 25 % des sièges, contre 20 % aujourd’hui, et les femmes à 30 % des sièges (contre 22 % actuellement).
Les risques de sclérose ne sont pas à écarter non plus. Dans un discours-bilan prononcé le 15 juillet dernier, le premier vice-président du RCD, Hamed Karoui, a déploré le rôle de son comité central, qui, selon lui, n’a pas suffisamment apporté d’idées neuves ces cinq dernières années. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le chef de l’État a décidé qu’une soixantaine de jeunes de moins de 30 ans l’intégreront lors du 5e congrès. Karoui s’est en outre inquiété de la démultiplication des structures du parti, au détriment de ses organes centraux, qui s’en trouveraient, du même coup, affaiblis.
Pour qu’elle soit complète, l’ouverture démocratique devrait enfin s’accompagner d’une plus grande libéralisation de la presse (un vœu souvent renouvelé par Ben Ali, mais non encore exaucé), d’une plus grande capacité à l’autocritique du RCD, et de sanctions publiques à l’encontre des auteurs de toute forme d’abus et d’injustices. Ainsi, le pays ne verrait pas son image « globalement positive » régulièrement ternie, comme ce fut encore le cas récemment à cause des événements du bassin minier de Gafsa. Au départ banale affaire de malversation dans le recrutement d’une entreprise publique de la région, l’affaire, relayée par Internet après plusieurs mois de mutisme et de mauvaise gestion du pouvoir, a fini par dégénérer en un conflit ouvert entre l’armée et la police d’un côté, des jeunes désœuvrés et des familles désemparées, de l’autre.
Les six années qui se profilent dans le ciel tunisien s’annoncent donc décisives pour le pays. Elles devront notamment répondre aux défis du pouvoir d’achat et de l’emploi par de nombreuses réformes : quelque 100 000 jeunes vont effectivement arriver chaque année sur le marché du travail pendant cette période. Réussies, elles permettront d’assurer une transition démocratique en douceur et de léguer à l’Histoire une image du RCD bien plus avantageuse que celle laissée par le défunt PSD… Ratées, elles donneront sans doute l’impression d’un véritable gâchis.
(*) Simple militant de base ou cadre bien introduit dans le parti, toutes les personnes interrogées pour la réalisation de cet article ont requis l’anonymat. Les autorités du RCD ont par ailleurs été sollicitées dès le mois de juin pour des entretiens officiels… En vain.
(Source: « Jeune Afrique » (Magazine Hebdomadaire – France), N° 2481 du 27 juillet au 2 août 2008)
Algérie: 43 morts dans l’attentat le plus meurtrier depuis huit mois
Algérie: l’ex-chef du GSPC appelle les islamistes armés à renoncer aux armes
Aït Ahmed craint que l’affaire n’aille pas jusqu’au bout
Par Nadjia Bouaricha
Les autorités algériennes demeurent sans réaction après l’arrestation puis la mise en examen en France du diplomate algérien, Mohamed Ziane Hassani, soupçonné d’être le commanditaire de l’assassinat du défenseur des droits de l’homme Ali Mecili.
Ce présumé commanditaire qui se trouve aujourd’hui à Paris sous l’interdiction de quitter la région parisienne, attend une convocation du juge d’instruction prévue pour la fin du mois en cours. Si des zones d’ombre entourent l’attitude silencieuse des autorités algériennes, Hocine Aït Ahmed, président du Front des forces socialistes et ami de Ali Mecili, dit redouter que l’affaire ne suive pas son cours jusqu’au bout.
Dans un entretien accordé au journal électronique Tout sur l’Algérie, Hocine Aït Ahmed qui exprime son « euphorie » pour « le réveil de la justice française après 21 ans de déni de justice », espère aussi que « les choses iront jusqu’au bout ». « Pour moi, il n’y a pas de justice sans éthique de la justice. Au lieu de se gargariser de droits de l’homme, il faut commencer par civiliser la politique et garantir l’indépendance de la justice des deux côtés de la Méditerranée », dit-il. Ce dernier n’exclut pas que Ziane Hassani quitte le territoire français avant la tenue de son procès. « cela pourrait évidemment bien se produire, sans exclure une planification préalable des deux côtés », précise Aït Ahmed.
Tout en affirmant faire confiance au juge Thouvenot, le leader politique qualifie cette affaire de « vrai polar barbouzo-totalitaire se déroulant derrière les murs de la raison d’Etat et des déraisons des contrats ». Aït Ahmed prend l’exemple de l’ex-ministre français de l’Intérieur Charles Pasqua « qui avait envoyé à Alger le tueur, alors que son implication ne faisait aucun doute puisqu’il était porteur d’un ordre de mission de la police politique signé précisément par le « sieur » Hassani qui vient d’être arrêté à Paris ». Le responsable du FFS estime que « la connivence entre Etats » a commencé lorsque dans cette affaire avec « le coup de téléphone de ce ministre de l’Intérieur français à l’ambassadeur d’Algérie à Paris rien que pour le rassurer sur le fait que l’Algérie n’avait rien à faire dans cette histoire ». Hocine Aït Ahmed estime que « l’élément qui a fondé la conviction du juge est le témoignage de Samraoui en 2003. Quand il a raconté comment il avait accompagné Hassani pour aller voir Amalou, le tueur, et le convaincre d’accepter 800 000 francs pour son « boulot » en attendant le reste ». Le même leader politique qui a toujours dénoncé un crime politique a indiqué que « le dossier a établi sans ambages la complicité d’autres personnes dans ce dossier » et « quant aux commanditaires politiques, c’est l’histoire d’une police politique qui a pris en otage la justice de notre pays depuis l’indépendance ».
La lenteur de la réaction de la justice française qui aura duré plus de vingt ans est qualifiée par l’invité de TSA de « lâcheté des deux Etats ». « Force est de constater que ce meurtre n’est pas une bavure ni un accident de parcours. C’est au contraire une constante depuis l’indépendance. C’est une volonté des tenants du régime de détruire le politique jusqu’à l’idée même de la politique.
Au besoin, par l’exécution de ceux qui menacent les fondements de leur régime. C’est-à-dire, des personnes capables de penser et de mener des combats politiques autonomes pour les droits de l’homme et la démocratie », note Aït Ahmed. Ce dernier ne voit pas de lien entre l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy et les nouveaux rebondissements dans le dossier Mecili. Il estime même que « les choses ont été menées à son insu ». « Je crois que les initiatives viennent du nouveau juge Thouvenot qui a repris le dossier au juge Bruguière. Ce dernier avait refusé de faire aboutir les choses. A mon avis, le pouvoir politique français n’a pas joué un rôle déterminant dans cette évolution du dossier. Je crois qu’il a même été dépassé par l’initiative du juge Thouvenot. C’est pour cela que nous craignons pour l’avenir », indique le leader historique en exprimant l’espoir que le succès sera du côté de la justice.
(Source: “El Watan”, (Quotidien – Algérie), le 19 août 2008)
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