4 août 2008

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TUNISNEWS

8 ème année, N° 2995 du 04.08.2008

 archives : www.tunisnews.net  


Voix Libre :Le prisonnier politique Bouraoui MAKHLOUF Le péril de la cécité succèdera-t-il au calvaire de l’incarcération ? 

Liberté et Equité:Khaled Layouni est l’objet d’une destruction physique et morale préméditée

CNLT :Agression d’un avocat par un directeur de prison et déni du droit de visite pour d’autres avocats

FTCR :Communiqué
nawaat:Ordre protocolaire dans la République de Ben Ali

AFP:Lampedusa, le bout du rêve européen pour des milliers de clandestins

AFP:L’Italie déploie 3.000 soldats dans les villes pour « assurer la sécurité »

AFP:Turquie: un « faucon » en matière de laïcité prend la tête de l’état-major

AFP:Chine: 16 policiers tués dans une attaque au Xinjiang à quatre  jours des JO

AFP:Les Ouïghours de Chine veulent d’abord survivre au jour le jour
AFP:Le Xinjiang, un sixième de la Chine, aux confins de l’Asie centrale

AFP:Soljenitsyne, l’homme qui a révélé le Goulag au monde entier
AFP:L’auteur de l’Archipel du Goulag,  Alexandre Soljenitsyne, est décédé 

Reuters:Soljenitsyne,dissident puis chantre des valeurs morales

 

Paris, le : 03 août 2008

Le prisonnier politique Bouraoui MAKHLOUF
Le péril de la cécité succèdera-t-il au calvaire de l’incarcération ?

 
Après plus de dix – sept ans de calvaire dans les prisons tunisiennes ; et suite à une négligence médicale manifeste voire préméditée, de l’administration pénitentiaire, Monsieur Bouraoui MAKHLOUF est aujourd’hui victime d’un décollement de la rétine de son œil avec le risque corollaire d’une cécité totale.

Il importe de rappeler que Monsieur Bouraoui MAKHLOUF a été arrêté en avril 1991 et condamné à perpétuité pour appartenance au mouvement tunisien Ennahdha.

Depuis, il a entamé ainsi que plusieurs autres codétenus des grèves de la faim contestant les procès iniques dont ils sont victimes et les conditions inhumaines de leur incarcération.

Malheureusement, les autorités tunisiennes ont confronté leurs revendications par la politique de la sourde oreille et ont même opté pour plus d’humiliation et d’acharnement.

Par conséquence, et vu le caractère d’urgence absolue, Voix Libre :

·Réclame l’intervention immédiate des autorités tunisiennes afin de fournir les soins nécessaires et éviter la détérioration de la situation.

·Leur demande d’assumer l’entière responsabilité en cas de cécité ou tout autre handicap affectant la santé de Monsieur Bouraoui MAKHLOUF car incontestablement corollaire à leur négligence.

·Revendique sa libération immédiate et inconditionnelle ainsi que tous les autres prisonniers politiques en Tunisie.

· Sollicite l’intervention urgente des organisations humanitaires, nationales et internationales, auprès des autorités tunisiennes, afin de soigner Monsieur Bouraoui MAKHLOUF et mettre fin à son calvaire carcéral.

 
Voix Libre
ONG oeuvrant pour les droits de l’Homme
contact@voixlibre.org
Tel : 01 46 58 55 44 – Fax : 01 46 58 55 45
Port : 06 60 37 68 16  – www.voixlibre.org
 


Sauvez la vie du prisonnier politique et ingénieur Ridha Boukadi
Liberté et Equité
Organisation de droits de l’homme indépendante
33 rue Mokhtar Atya, 1001 Tunis
Tel/fax: 71 340 860
Adresse électronique: liberte.equite@gmail.com
Tunis, le 3 août 2008

Khaled Layouni est l’objet d’une destruction physique et morale préméditée

 
Nous avons été contactés par la mère du prisonnier d’opinion Khaled Layouni. Elle nous a informés qu’à la suite d’une sanction qui avait été infligée à ce dernier, en l’occurrence une privation de visites pendant un mois, elle avait rencontré le directeur de la prison de Mornaguia pour lui demander des explications.

Le directeur lui a affirmé qu’il avait été pardonné et qu’elle pouvait lui rendre visite. Mais lorsqu’elle s’est rendue à la prison de Mornaguia mercredi 30 juillet 2007, elle a appris que son fils avait été transféré à la prison d’El Haouareb et lors de sa visite jeudi 31 juillet, son fils lui a dit être en butte aux coups et à des actes d’une violence extrême.

Elle alerte l’opinion publique nationale et internationale que son fils fait l’objet d’une destruction physique et morale préméditée depuis son entrée en prison.

Pour le bureau exécutif de l’organisation
Le Secrétaire Général
Zouahaïer Makhlouf

(traduction ni revue ni corrigée par les auteurs de la version originale, LT)

 


CNLT
Tunis le 4 août 2008
Agression d’un avocat par un directeur de prison et déni du droit de visite pour d’autres avocats

 
Le 2 août courant, l’avocat Abderrouf Ayadi a été violemment agressé par le directeur de la prison de Mornagia, Ibrahim Mansour, alors qu’il terminait une visite de son client, le défenseur de droits humains, Mohamed Hédi Ben Said. Le directeur de la prison avait exigé de passer à la fouille sa serviette, ce que l’avocat a refusé. Il s’est alors jeté sur lui en le violentant avec l’aide de 3 de ses agents, lui a arraché de force sa serviette et confisqué son téléphone portable qui était éteint. Suite à ces violences, Maître Ayadi souffre d’une entorse du poignet droit ainsi que d’hématomes sur le corps constatés par un médecin. Il a porté plainte et le barreau a dénoncé cette agression dans un communiqué.
Cette agression s’inscrit dans le cadre de la multiplication des actes de harcèlements qui ont ciblé ces derniers jours les avocats défenseurs de droits humains, et dont la principale caractéristique a été le refus opposé à ces avocats par l’administration pénitentiaire de leur permettre de visiter leurs clients et notamment ceux impliqués dans les affaires liées aux protestations populaires du bassin minier de Gafsa, malgré les autorisations dûment signées par le parquet. Nous citerons notamment :
·Le 2 août 2008 La direction du pénitencier de Kasserine a interdit à maîtres Radhia Nasraoui et Ridha Reddaoui la visite de leurs clients, les syndicalistes Adnan Hajji et Béchir Labidi, sans même se donner la peine de fournir un prétexte.
· Le 1er’ août La direction de la prison de Kasserine avait dénié le droit de visite aux avocats R. Nasraoui, Zouari et Reddaoui en prétextant le dépassement des horaires administratifs, après les avoir fait attendre et en dépit du fait qu’ils se soient présentés à la prison avant la fermeture.
· Le 31 juillet, la même direction de la prison de Kasserine a interdit à maîtres Mohamed Abbou, Saida Garrach et Mondher Cherni de rendre visite à leurs clients ; et là encore, l’administration a usé du même stratagème du dépassement des horaires administratifs et fermeture des bureaux, après les avoir laisser poireauter.
Le même jour et sous un autre prétexte de date du permis de visite délivré par le procureur de la république non conforme, la direction de la prison de Kasserine a refusé la visite de leurs clients à  maîtres Ayachi Hammami, Khaled Krichi et Chokri Belaid.
Quand à la direction de la prison de Sidi Bouzid où se trouvent d’autres syndicalistes détenus, elle a imposé une condition saugrenue : qu’un seul avocat soit autorisé à visiter ses clients et que la personne choisie ne soit pas maître Radia Nasraoui !
Rappelons que le 28 juillet dernier, la police a imposé aux avocats, lors du procès du groupe de Bizerte, un contrôle d’identité pour avoir accès au bâtiment du palais de justice !
Face à ces violations graves aux droits de la défense, le Conseil des Libertés :
-exprime ses craintes de voir ces violations devenir la règle pour les avocats défenseurs de droits humains, d’autant qu’elles se sont répétées récemment pour des avocats qui plaident dans des affaires liées au terrorisme, comme maîtres Ayadi, Dilou ou Ben Amor.
-S’inquiète de cette tendance des autorités à limiter et même à nier complètement le rôle des avocats dans les affaires politiques en vue d’infléchir les décisions de justice.
– Appelle les autorités à se conformer aux articles premier et second de la loi sur le barreau qui énonce le rôle fondamental du barreau dans l’établissement d’un procès équitable. Comme il rappelle l’article 315 du code pénal qui punit d’une peine d’emprisonnement « toute personne qui ne se conforme pas aux prescriptions des règlements et arrêtés pris par l’autorité compétente. »
Et le CNLT exige :
– L’ouverture d’une enquête immédiate pour faire la lumière sur l’agression dont a été victime maître Ayadi et la sanction du directeur de la prison de Mornaguia.
– L’arrêt des actes de persécution qui ciblent les avocats dans l’exercice de leur profession.
– Donner au permis de visite délivré par le parquet une validité continue durant toute la période de détention du client, en attendant son annulation pure et simple et son remplacement par la carte professionnelle délivrée par le barreau qui sera présentée à l’administration carcérale pour la visite des clients, comme c’est l’usage dans les pays démocratiques.
Pour le Conseil
La porte paroleSihem Bensedrine


 
Communiqué
Tunisie : Mouvement de protestation à Redeyef
La répression s’étend et touche les
Tunisiens résidant en France
 
M. Ess’ghaier Belkhiri, 29 ans, originaire de Redeyef et résidant à Nantes, a été arrêté le vendredi 01 août 2008 à son arrivée au port de la Goulette en Tunisie.Il a, ensuite, été transféré à Gafsa où il a comparu, ce lundi 04 août 2008, devant le juge d’instruction près le Tribunal de première instance de Gafsa qui a ordonné son incarcération.
M.  Ess’ghaier Belkhiri, poursuivi pour sa solidarité avec la lutte des populations du Bassin minier, est accusé de « dégradation de biens d’autrui, atteinte aux bonnes mœurs, rébellion de la part de plus de dix personnes sans usage d’arme, atteinte à un fonctionnaire, jet de produits solides, troubles et perturbations sur la voie publique », soit des mêmes accusations que les détenus vivant en Tunisie alors qu’il réside en France. Ce nouvel acte de répression s’inscrit et élargit le cadre des simulacres de procès qui touchent les acteurs du mouvement de protestation pacifique que connaît la ville de Redeyef depuis le début de l’année, dont M. Adnane HAJJI, porte parole du mouvement. Ces accusations visent en fait à pénaliser M. Ess’ghaier Belkhiri pour avoir participé à des manifestations de soutien organisées à Nantes.
Il s’agit, en l’occurrence d’incriminer toute forme de solidarité avec les luttes des populations du Bassin minier y compris à l’étranger. En effet, Cette arrestation, intervient suite aux menaces à répétition de la part du régime tunisien à l’encontre des citoyens originaire de Redeyef, résidant à Nantes, qui ont manifesté à maintes reprises leur solidarité avec leurs proches au moment de la répression policière et de l’intervention de l’armée dans la ville.
La Fédération des Tunisiens Citoyens des Deux Rives (FTCR) :
– Exige la libération immédiate de M. Ess’ghaier Belkhiri et rappelle qu’il n’était pas présent en Tunisie lors des évènements de Redeyef.
– Demande l’arrêt des intimidations qui visent les ressortissants tunisiens, notamment ceux qui essayent d’apporter leur soutien aux populations du Bassin Minier en lutte pour la vie et la dignité.

– Dénonce, encore une fois, le contrôle policier exercé sur les citoyens tunisiens vivant à l’étranger visant à les maintenir dans la peur.

– Rappelle sa solidarité sans faille avec les citoyens tunisiens originaires de Redeyef résidant à Nantes et avec leurs actions et dénonce l’instauration, par les pouvoirs tunisiens, d’un véritable « délit de solidarité »

– Exige la libération de Adnane Hajji et de ses camarades détenus suite au mouvement de protestation pacifique et dénonce les simulacres de procès qui visent à criminaliser les luttes sociales en Tunisie.

Paris le 04 août 2008
Pour la FTCR
Le président
Mouhieddine CHERBIB

Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR)
3 rue de Nantes
Paris 75019
Tél: 01 46 07 54 04
Fax: 01 40 34 18 15
e-mail: ftcr2@wanadoo.fr
Site: www.ftcr.eu


 

Ordre protocolaire dans la République de Ben Ali

 
Malek Khadhraoui

Quelques jours avant de répondre positivement et en « toute fierté » à la demande qui lui a été faite (interdiction de rire) d’être Le Candidat du RCD pour l’élection présidentielle de 2009, « au milieu de youyous de femmes de son parti dans une salle archicomble décorée de drapeaux en rouge et blanc de la Tunisie. », notre « fier » président s’est invité, le vendredi 25 juillet, au siège de « l’honorable » chambre des députés à une réception organisée à l’occasion du 51e anniversaire de la proclamation de notre chère République nous dit-on sur le site officiel de la présidence. Il faut dire que cet anniversaire est assez symbolique pour Ben Ali puisque c’est le vingtième qu’il « célèbre » en tant que président de cette République après avoir célébré en grandes pompes le 20e anniversaire du « changement du 7 novembre », et fêter pour la vingtième fois l’indépendance de notre pays en étant à sa tête. Cela méritait bien une petite sauterie républicaine.

Il est vrai que pendant plus de 50 ans qu’on fait semblant de fêter la République, on n’est plus à une cérémonie pompeuse près. Pourtant à la lecture du compte rendu de cette joyeuse fête, une phrase étrange ferait dresser les cheveux sur les têtes des plus blasés d’entre nous. Je cite : « Le Président de la République a été accueilli, à son arrivée au palais du Bardo, par le premier vice-président du Rassemblement Constitutionnel Démocratique, le premier ministre, le président de la chambre des députés et les membres du bureau de la chambre des députés ». Oui vous avez bien lu…le président qui, rappelons-le, est en visite au palais de Bardo, siège des supposés représentants du peuple tunisien, pour célébrer le 51e anniversaire de la République, a été accueilli par…le premier vice-président du parti au pouvoir !

Commençons déjà par ce qui relève des bonnes manières, si j’ose dire. Le président de la chambre des députés n’est que troisième dans cet ordre protocolaire. La moindre des politesses aurait été qu’il soit le premier à souhaiter la bienvenue au président. Après tout, c’est le maitre des lieux en quelques sortes et c’est à lui d’accueillir son invité. Vous…vous vous imaginez inviter, chez vous, une personnalité de l’envergure de « notre président » et accepter que se soit « le premier vice-président » de son « fan club » qui la reçoive à votre place ? Je pense que personne n’accepterait. Détrompez-vous. Le président de notre chambre des députés, lui, accepte. Et il n’est pas le seul. Ses députés non plus ne semblent pas très regardants sur les convenances puisqu’à leur tour ils se sont faits reléguer presque à la dernière place, cette fois-ci derrière les membres du bureau politique du RCD !

S’il ne s’agissait que d’une question de bonnes manières cela ne mériterait certainement pas qu’on en fasse tout un plat. Surtout connaissant les manières de ceux qui nous gouvernent. Mais voilà, une République a ses règles et parmi celles-ci se trouve celle d’un ordre protocolaire bien établi qui classe les personnalités politiques selon l’importance de leurs fonctions au sein de cet édifice. Un ordre d’importance qui, dans une République, se défini en fonction des trois pouvoirs supposés indépendants sur lesquels se base celle-ci, à savoir le pouvoir exécutif, parlementaire et judiciaire.

Dans notre cas précis le protocole républicain aurait donc voulu que le président soit éventuellement accueilli en premier par son premier ministre, étant le chef du gouvernement, et représentant du pouvoir exécutif mais impérativement suivi par le président de la chambre des députés et celui de la chambre des conseillers, représentants du pouvoir législatif. Le président du conseil constitutionnel, s’il était présent (surement un oubli), suivrait et ainsi de suite. D’ailleurs, ce n’est pas pour rien que notre constitution désigne ces trois personnages comme les premiers garants de la continuité du pouvoir « en cas de vacance de la Présidence de la République pour cause de décès, de démission ou d’empêchement absolu ». Le président de la chambre des députés étant même le premier sur la liste des potentiels intérimaires.

Le plus grave, mais aussi le plus triste, c’est que ce mépris est perpétué par la tête de gondole de l’appareil de propagande du pouvoir en place, j’ai nommé la tristement célèbre Tunis7. Une petite recherche dans les archives des journaux télévisés de la chaine nationale nous permet de voir que cet ordre protocolaire est déjà de mise depuis quelques années, et plus particulièrement depuis le 20e anniversaire du « changement » comme l’atteste ce bref montage.

Il est vrai que le président de cette « chambre introuvable » n’a rien fait pour mériter un meilleur traitement. Ce n’est pas lui qui, à l’unisson avec le président de La chambre des conseillers, a accouché le premier d’une déclaration pour appeler Ben Ali à « renouveler sa candidature aux élections présidentielles de 2009 pour briguer un cinquième mandat de cinq ans » ? Permettant pour que cela puisse se faire qu’on massacre pour la énième fois la constitution tunisienne. Vu de cet angle là il ne mérite même pas d’être le président de cette chambre. Mais puisqu’on est dans cette recherche pathétique de sauver les apparences. Celle qui consiste à mettre en avant la place du pouvoir législatif et ses représentants et « le renforcement des acquis républicains », selon la formule officielle psalmodiée à tous les discours de Ben Ali, ne semble plus de mise. C’est ainsi que, dans la république de Ben Ali, un premier vice-président d’un parti politique peut reléguer au troisième rang de l’importance protocolaire le représentant des élus du peuple tunisien !

Ce manque cruel d’égards vis-à-vis des représentants de deux des trois pouvoirs sur lesquels repose notre République n’a rien de la simple faute de frappe sur une dépêche de la TAP ou de la faute de goût et encore moins d’une méconnaissance des ordres d’importances et des règles protocolaires. Il traduit en réalité, le vrai rapport de force au sein de la république de Ben Ali. Une république du parti unique avec à sa tête un homme…« unique » qui centralise à lui seul tous les pouvoirs, en théorie indépendants. Aucune institution n’échappe à cette mise aux pas de plus en plus ostentatoire. Le RCD ne se contente plus du rôle du Parti du président mais s’affiche clairement aujourd’hui comme la véritable antichambre du pouvoir du président et son unique successeur. Marginalisant ainsi nos institutions certes malmenés depuis 50 ans mais néanmoins existantes. En vingt et un ans de pouvoir Ben Ali aurait-il oublié que c’est par les règles de cette même République qu’il ne cesse de bafouer qu’il a pu, un jour de novembre 1987, en devenir le président ?

www.nawaat.org
http://stranger-paris.blogspot.com

(Source : www.nawaat.org et le blog « Stranger », le 3 août 2008)


AFP, le 4 août 2008 à 11h19
Lampedusa, le bout du rêve européen pour des milliers de clandestins

 
Par Françoise MICHEL

LAMPEDUSA (Italie), 4 août 2008 (AFP) – Un à un les clandestins récupérés au large descendent d’un pas mal assuré de la vedette des gardes-côtes sur le port de la petite île italienne de Lampedusa: 33 hommes sans bagages qui viennent de toucher au but après un voyage au péril de leur vie.
Après deux nuits et une journée en mer, leur barque était sur le point de sombrer lorsque les gardes-côtes sont arrivés, à une cinquantaine de km au sud de Lampedusa, la terre européenne la plus proche des côtes libyennes.
Débarrassés de leur gilet de sauvage, assis par terre sous une toile de tente qui les protège du soleil brûlant, ils reçoivent de l’eau et des biscuits, un accueil bien rodé dont est chargée l’ONG Médecins sans Frontières (MSF) Italie.
La scène peut se répéter jusqu’à une dizaine de fois en 24 heures si la mer est calme comme mercredi et jeudi derniers lorsque 1.200 clandestins africains sont arrivés sur l’île. « En général, ils ne savent pas nager et la plupart ont vu la mer pour la première fois lorsqu’ils ont embarqué en Libye », raconte l’un des gardes-côtes, Domenico (32 ans). « Lorsqu’ils nous voient arriver, ils font le V de la victoire. Ils sont heureux. Ce transbordement s’est bien passé, ils étaient calmes et peu nombreux. Ce n’est pas toujours le cas », ajoute le militaire.
Quelques jours avant, ils étaient 170 entassés sur un bateau de pêche. Cent vingt ont pris place à bord de la vedette tandis que Domenico a conduit les cinquante autres à bon port en prenant lui-même le gouvernail de la barque. Les passeurs fournissent une boussole aux clandestins, le numéro des secours et parfois un téléphone satellitaire qui leur permet de signaler leur position. Ils jetteront l’appareil à la mer dès l’arrivée des secours pour effacer toute trace qui permettrait de remonter la filière du trafic. Maillot de foot à la gloire du Brésilien Ronaldhino, en jeans et baskets, Alexis affirme avoir 15 ans. « J’ai cru que j’allais mourir, j’ai fait confiance à Dieu. On nous a dit que nous partions pour l’Europe. J’ai versé 1.100 dollars. Quand j’ai entendu les gardes-côtes parler, j’ai su que c’était l’Italie », assure dans un français hésitant le jeune
Ivoirien.
Son compatriote et compagnon de voyage, montre un ventre barré d’une grande cicatrice et affirme avoir reçu une balle lors des affrontements dans son pays. « Pour gagner l’argent de la traversée, j’ai travaillé plusieurs mois en Libye à récolter des tomates. Ca fait trois ans que je suis parti de Côte d’Ivoire », raconte le jeune homme, dépourvu comme tous les autres de papiers d’identité et dont le récit est invérifiable.
Trente minutes après son arrivée, le groupe monte en file indienne dans des camionnettes, direction le centre d’accueil d’urgence de Lampedusa.
Les dizaines de milliers d’estivants qui ont envahi la petite île aux allures d’Afrique avec ses palmiers et ses maisons basses colorées n’auront rien vu du débarquement. « Les traversées du Canal de Sicile (280 km environ entre les côtes libyennes et Lampedusa, NDR), sont toujours très périlleuses. Il y a des courants dangereux et les embarcations sont surchargées. C’est comme si 20 personnes montaient dans une voiture pour faire 2.000 km », souligne le lieutenant de vaisseau, Achille Selleri, qui        commande une quarantaine d’hommes, détachés des gardes-côtes de Palerme (Sicile).
Pourtant, les désespérés qui tentent le voyage pour l’Europe sont toujours plus nombreux: 11.949 ont débarqué en Italie au 1er semestre, dont 10.402 à Lampedusa, contre 5.387 en 2007. En majorité, ils se verront refuser l’entrée en Europe ce qui ne les empêchera pas pour une bonne part d’y demeurer illégalement. Selon MSF, 380 clandestins ont péri dans cette traversée entre la Libye et la Sicile ou au large de Malte sur les six premiers mois de cette année après 500 en 2007.

AFP


AFP, le 4 août 2008 à 09h44
L’Italie déploie 3.000 soldats dans les villes pour « assurer la sécurité »

 
ROME, 4 août 2008 (AFP) – Un décret controversé sur la sécurité adopté par le gouvernement de Silvio Berlusconi est entré en vigueur lundi matin en Italie avec le déploiement de 3.000 militaires dans
les grandes villes, ont rapporté les médias. Un millier de militaires sont affectés à la surveillance de « sites » sensibles comme les ambassades, un millier sont chargés de contrôler les centres où sont retenus les immigrés arrivés illégalement et un millier doivent effectuer des « patrouilles mixtes » dans les rues avec la police.
A Rome, 400 soldats ont été déployés dans une dizaine de stations de métro dont celle de la gare centrale Termini, devant des ambassades et dans un centre pour immigrés. En revanche le maire de Rome Gianni Alemanno a assuré qu’aucun militaire ne patrouillerait dans les rues du centre historique où se concentrent les milliers de touristes qui visitent la ville éternelle.
A Milan, 150 militaires sont notamment chargés de la protection
de la cathédrale et de la gare centrale.Sur l’île sicilienne de Lampedusa, point d’arrivée de nombreux candidats à l’immigration, 70 soldats de l’armée de l’air doivent remplacer les gendarmes qui assurent la sécurité à l’extérieur du centre de premier accueil où les clandestins sont hébergés. La gauche et des syndicats de policiers ont dénoncé ce recours à l’armée, accusant le gouvernement Berlusconi de « démagogie
sécuritaire » et de chercher à « militariser » les grandes villes. Le ministre de l’Intérieur Roberto Maroni a expliqué que cette mesure « naît de l’exigence de donner aux citoyens une meilleure perception de la sécurité ».

AFP
 


AFP, le 4 août 2008 à 12h08

Turquie: un « faucon » en matière de laïcité prend la tête de l’état-major

 
ANKARA, 4 août 2008 (AFP) – Le général qui commande actuellement les forces terrestres turques et est considéré comme un « faucon » dans la défense de la laïcité, a été nommé lundi nouveau chef d’état-major des armées, au terme d’une réunion du Haut conseil militaire (YAS), a annoncé l’armée sur son site internet.Le général Ilker Basbug prend pour deux ans la direction de la plus haute fonction militaire turque, en remplacement du général Yasar Büyükanit qui part à la retraite, la limite d’âge étant fixée à 65 ans dans la fonction publique en Turquie.
Le président Abdullah Gül a approuvé un décret gouvernemental nommant le général Basbug, 63 ans, à la tête de l’armée turque, la plus importante en nombre au sein de l’Otan après les Etats-Unis.
Les nominations à la tête de l’armée sont scrutées de près par les analystes en Turquie, où les militaires, qui se considèrent comme les gardiens du principe de laïcité de l’Etat turc, jouissent d’un grand soutien de l’opinion publique. Ils interviennent moins dans la vie politique ces dernières années en raison de réformes pro-européennes qui ont érodé leurs pouvoirs.
Cependant l’an dernier, l’armée n’avait pas hésité à publier en avril un communiqué mettant sévèrement en garde le gouvernement islamo-conservateur du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan à propos de la laïcité et de l’élection présidentielle, ce qui avait provoqué une grave crise institutionnelle.Le général Basbug est perçu comme un « faucon », déterminé à protéger les valeurs républicaines, dont le pilier est la laïcité.
Les militaires turcs ont dirigé trois coups d’Etat -en 1960, 1971 et 1980- et avaient poussé en 1997 à la démission le premier gouvernement islamiste de l’histoire de la Turquie.Le Parti de la justice et du développement (AKP), une formation
issue de la mouvance islamiste, au pouvoir depuis 2002 et dirigée par M. Erdogan, a échappé de justesse la semaine dernière à une interdiction par la justice pour « activités anti-laïques ».
   
 AFP

AFP, le 4 août 2008 à 13h51

Chine: 16 policiers tués dans une attaque au Xinjiang à quatre  jours des JO

 
URUMQI (Chine), 4 août 2008 (AFP) – A quatre jours du coup d’envoi des jeux Olympiques de Pékin, un attentat contre la police dans l’ouest musulman de la Chine a fait lundi 16 morts et 16 blessés.
L’attaque visant un poste de la police des frontières à Kashgar, qui serait de nature « terroriste » selon les autorités chinoises, a été perpétrée par deux assaillants à 08H00 (OOHOO GMT), a indiqué l’agence officielle Chine Nouvelle.
A bord d’un camion, les deux hommes ont foncé sur un groupe de policiers qui faisaient leur jogging matinal, a précisé l’agence officielle. Ils sont sortis du camion en lançant des engins explosifs artisanaux et ont poignardé des policiers.Quatorze policiers sont morts sur place et deux autres pendant leur transfert vers l’hôpital.Les débris de cinq engins explosifs ont été retrouvés sur les lieux.
Aucune précision n’a été fournie sur les assaillants qui ont été arrêtés.Siegfried Maurer, un Allemand qui était descendu avec son épouse dans un hôtel proche, a relaté avoir été réveillé par « deux énormes explosions », avant d’être consigné dans sa chambre quatre heures. »(Les policiers) ont vérifié nos appareils photo numériques pour voir si nous avions des photos de l’attaque », a précisé M. Maurer.Le porte-parole du Congrès mondial des Ouïghours, basé en Europe, a confirmé l’attaque auprès de l’AFP, en citant des sources locales.
Dilxat Raxit n’était cependant pas en mesure d’indiquer si les assaillants appartenaient à l’ethnie ouïghoure, des musulmans turcophones, qui, selon lui, ont souffert d’importantes discriminations en amont des JO « parce qu’ils sont systématiquement considérés comme des terroristes ».Les autorités chinoises n’ont pas établi pour l’instant si cette attaque non revendiquée, à plus de 4.000 km de Pékin, avait un lien avec les jeux Olympiques qui s’ouvrent vendredi dans la capitale chinoise.
« Nous devons vérifier », a déclaré à l’AFP Sun Weide, porte-parole du comité d’organisation des JO (Bocog).Le Comité international olympique (CIO) n’a pas souhaité commenter l’attaque, renouvelant sa confiance à la Chine pour « faire tout ce qui est humainement possible » pour assurer que les JO se dérouleront « en toute sécurité », selon sa porte-parole Giselle Davies.
« C’est un incident en Chine, nous ne devrions pas établir automatiquement un lien quelconque avec les jeux », a-t-elle déclaré à l’AFP.Les organisateurs des JO ont assuré ne pas avoir de crainte pour la sécurité de la flamme à Pékin, lors du relais de mercredi à vendredi.
« Les différents départements de la police de Pékin ont pris des précautions détaillées pour le relais », a déclaré Sun Xuecai, un des responsables du parcours à Pékin. »Nous avons mis en place un système de commandement et de contrôle efficace » pour les Jeux, a affirmé Sun Weide, le porte-parole du Bocog.
L’armée chinoise a notamment déployé plus de 34.000 soldats, 121 avions et hélicoptères et 33 navires.A Hong Kong où auront lieu les épreuves d’équitation, le dispositif de sécurité pourrait être revu à la hausse.
Pour Nicholas Bequelin, qui suit la Chine pour l’organisation de défense des droits de l’homme Human Rights Watch, « si les 16 morts sont confirmés, il s’agira du plus lourd bilan jamais enregistré dans une attaque » au Xinjiang.
En 1997, une série d’attentats à la bombe à Urumqi, capitale de la région, avait fait 9 morts et 74 blessés dans trois autobus.Ces derniers mois, les autorités chinoises ont affirmé faire face à des menaces terroristes visant les JO, en provenance notamment du Xinjiang.Selon Chine Nouvelle, les responsables régionaux de la sécurité ont récemment récolté des « éléments suggérant que le Parti islamique du Turkestan oriental (ETIM) prévoyait de mener des attaques entre le 1er et le 8 août ».Fin juillet, ce groupe séparatiste ouïghour, qui cherche à établir un Etat indépendant au Xinjiang, a revendiqué plusieurs attentats en Chine.
   
 AFP

AFP, le 4 août 2008 à 09h13
Les Ouïghours de Chine veulent d’abord survivre au jour le jour

 
Par DAN MARTIN
   
AKSU (Chine), 4 août 2008 (AFP) – Comme l’immense majorité des habitants ouïghours du Xinjiang, Yusup est davantage préoccupé par sa survie quotidienne que par les revendications séparatistes et les
tensions avec l’ethnie majoritaire chinoise han. »C’est dur d’être ouïghour. Ce n’est pas une question de politique ou de religion. Nous voulons seulement nous en sortir », affirme cet homme de 36 ans habitant Aksu, une bourgade perdue de cette province autonome qui s’étale sur un sixième du pays.Yusup conduit son véhicule sur une autoroute déserte, dans un paysage brûlé par le soleil. Contrairement à de nombreux locaux, il parle parfaitement le mandarin. Il est musulman, mais pas très pratiquant. D’ailleurs, il n’est pas coiffé de la calotte musulmane traditionnelle, largement utilisée ici.
Sa principale préoccupation, explique-t-il, est de trouver un moyen de subsistance pour lui, sa femme et leur fils âgé de 10 ans.Il touche donc un peu à tout, se livre à de petits négoces, donne dans la production de coton et, de temps à autre, conduit le taxi d’un ami pour arrondir ses fins de mois. Tout compris, il gagne environ 1.000 yuans (144 dollars) par mois.Son cas personnel met à mal certains clichés répandus à
l’étranger, selon lesquels les Ouïghours du Xinjiang, entre deux brochettes de mouton, ne penseraient qu’à l’insurrection islamique contre les forces « colonialistes » de Pékin et contre l’ethnie allogène han.
C’est dans cette région musulmane habituée aux rébellions qu’un attentat contre la police chinoise a fait 16 morts et 16 blessés lundi.
« Le Turkestan oriental ne verra jamais le jour », assure Yusup, en utilisant une appellation interdite par le gouvernement central. « La Chine ne l’accepterait jamais », ajoute-t-il en refusant par précaution de donner son nom de famille.Dans les campagnes autour d’Aksu, la fièvre des jeux Olympiques semble ne pas avoir pris. Rien ou très peu n’a changé depuis longtemps sur le plan économique. L’agriculture est vivrière. Les
villageois élèvent des bovins ou récoltent des fruits. L’inflation est source d’inquiétude.Ailleurs la situation est différente.
« Depuis 1997, on assiste (au Xinjiang) à un taux de croissance à deux chiffres et à un développement jamais vu », décrit James Millward, un spécialiste du Xinjiang de l’université de Georgetown.Certains en profitent indéniablement. Tel Abdulkerim, qui gère une agence de voyage. Ses revenus ont triplé en cinq ans grâce à l’afflux de touristes nationaux venus admirer les montagnes majestueuses de la région. « L’économie n’a jamais été aussi bonne », se félicite-t-il.
Mais d’autres se plaignent d’être tenus à l’écart de ces perspectives florissantes. « C’est comme si des personnes étaient dans un train à grande vitesse flambant neuf tandis que nous autres avancions en haletant », estime une jeune femme habitant Aksu.Elle accuse l’ethnie han de pratiquer des discriminations. « Si nous allons dans une banque, les Chinois qui y travaillent nous parlent très mal et se méfient de nous », dit-elle.
   
 AFP

AFP, le 4 août 2008 à 09h11
Le Xinjiang, un sixième de la Chine, aux confins de l’Asie centrale

 
PEKIN, 4 août 2008 (AFP) – Le Xinjiang, vaste région montagneuse et désertique, compte plus de 8 millions d’Ouïghours, des musulmans turcophones d’Asie centrale, dont certains sont accusés par Pékin de mener des actions indépendantistes violentes.Située dans le nord-ouest de la Chine, sur l’ancienne Route de la Soie, cette région couvre un sixième du territoire du pays avec une superficie de 1,66 million de km2.
Le Xinjiang compte près de 20 millions d’habitants, appartenant à 47 ethnies, dont la principale est l’ethnie ouïghoure.La région est frontalière notamment avec l’Afghanistan et les ex-républiques musulmanes de l’URSS – le Kazakhstan, le Tadjikistan et le Kirzhistan. C’est la plus occidentale des provinces chinoises, à plus de 3.000 km au nord-ouest de Pékin.
Une des plus pauvres de Chine, elle constitue cependant avec le bassin du Tarim la principale réserve d’hydrocarbures du pays.Depuis les années 1990, la politique de développement de Pékin s’accompagne, comme au Tibet, de l’envoi de nombreux Chinois d’ethnie Han.
Rattachée à l’empire chinois en 1884, cette région d’Asie centrale, dont la capitale est Urumqi, faisait partie du Turkestan avant son partage entre la Russie et la Chine au XVIIIe siècle.Devenue un champ clos de la rivalité sino-soviétique, elle a été connue initialement sous le nom de Turkestan chinois avant que Pékin ne lui donne le nom de Xinjiang (« Nouvelle frontière »).Le Xinjiang s’est manifesté par des velléités d’indépendance à l’égard de Pékin avant même la création de la République populaire de Chine en 1949.Une partie de la province a connu une période d’autonomie, sous le nom de Turkestan oriental, mais de manière très brève entre 1930 et 1949.
Les troubles se sont intensifiés en 1990, après le retrait des troupes soviétiques d’Afghanistan et l’indépendance des trois républiques musulmanes de l’ex-URSS. En avril 1990, des émeutes, près de Kashgar (ouest), avaient fait 22 morts (officiellement) et au moins 60, de source occidentale.
Depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, Pékin a renforcé la répression. Grâce au soutien américain, Pékin a obtenu qu’un mouvement ouïghour – le Parti islamique du Turkestan oriental (ETIM) – soit placé par l’ONU sur la liste des organisations terroristes liées au réseau al-Qaïda.
   
 AFP

AFP, le 4 août 2008 à 00h03
Soljenitsyne, l’homme qui a révélé le Goulag au monde entier

 
Par Michel VIATTEAU

MOSCOU, 4 août 2008 (AFP) – L’écrivain russe Alexandre Soljenitsyne, décédé dans la nuit de dimanche à lundi à l’âge de 89 ans, a joué un rôle historique en révélant aux Russes et au monde entier l’univers inhumain des camps soviétiques, auquel il a donné un nom, celui de l’Archipel du Goulag.
Patriote habité par une force prophétique et une détermination comparables à celle d’un Dostoïevski, certain d’être élu par le destin qui lui avait permis de vaincre un cancer, l’écrivain dont la longue barbe le faisait ressembler aux grands intellectuels du XIXe a consacré sa vie à lutter contre le totalitarisme communiste. Né le 11 décembre 1918 dans le Caucase, il adhère aux idéaux révolutionnaires du régime naissant et fait des études de mathématiques. Artilleur, il se bat courageusement contre les troupes allemandes qui attaquent l’URSS en 1941, mais il ne voit pas le danger de son côté du front. Ayant critiqué les compétences
guerrières de Staline dans une lettre à un ami, il est condamné à huit ans de camp en 1945.
L’expérience le marque à jamais et l’engage sur un chemin d’exception. Libéré en 1953, quelques semaines avant la mort de Staline, il est exilé en Asie centrale et commence à écrire, puis revient dans la partie européenne de l’immense pays pour devenir enseignant à Riazan, à 200 km de Moscou.
Le nouveau maître de l’URSS, Nikita Khrouchtchev, donne son feu vert à la publication, dans la revue littéraire non-conformiste Novy Mir, d' »Une Journée d’Ivan Denissovitch ». Le récit sur un détenu ordinaire du Goulag paraît le 18 novembre 1962.
Un tabou est brisé, une onde de choc parcourt l’URSS et secoue les milieux pro-soviétiques du monde entier, des millions de gens ayant séjourné dans les camps se sentent libérés une deuxième fois. Mais le dégel khrouchtchévien n’est pas fait pour durer, contrairement au Goulag, qui continue à exister. Soljenitsyne continue à écrire, mais ses livres, « Le Pavillon des Cancéreux », puis « Le Premier Cercle » ne sortent qu’en « samizdat », les éditions clandestines, et à l’étranger, où ils connaissent un grand succès. La stature de l’homme le protège encore, mais lorsqu’il reçoit le Prix Nobel de Littérature en 1970, il renonce à aller à
Stockholm, craignant ne pouvoir rentrer dans l’URSS de Léonid Brejnev. Entre les pressions du KGB et celle de sa mission, le caractère difficile de l’écrivain ne s’améliore pas et son premier mariage se termine par un divorce.
Soljenitsyne est en train de terminer l’oeuvre de sa vie, « l’Archipel du Goulag », une grande fresque historico-littéraire sur les camps, qui sera publiée à Paris dans les années 1970, suscitant mà nouveau un grand écho dans le monde entier. C’en est assez pour le Kremlin et l’URSS expulse le citoyen Soljenitsyne vers l’Occident. Il vit d’abord en Suisse, puis s’établit aux Etats-Unis, dans le Vermont. L’Occident découvre alors que l’homme qui avait fait trembler Moscou est un conservateur orthodoxe et slavophile, souvent très critique à l’égard de sa société de consommation. En 1994, il retourne triomphalement dans la nouvelle Russie,
mais là aussi, souvent pessimiste, il a du mal à trouver sa place dans la nouvelle réalité post-communiste, même s’il exprime des vues partagées par ses compatriotes, demandant la peine de mort pour les
terroristes ou approuvant l’intervention de l’armée en Tchétchénie. Il se rapprochera toutefois du président Vladimir Poutine, dont il loua les qualités, même s’il constatera par la suite que ce dernier ne suit pas les conseils qu’il lui prodigue. Il s’attaque alors à un autre sujet délicat, sinon tabou, les relations entre les Juifs et les Russes, déclarant vouloir favoriser leur compréhension mutuelle. Mais un responsable du Congrès juif russe critique vivement son ouvrage « Deux siècles ensemble », estimant que les antisémites peuvent y trouver de nouveaux arguments.
Grand historien et écrivain politique, son talent littéraire a fait l’objet de jugements divergents, certains critiques le croyant éminent sur ce plan aussi, d’autres, tel l’écrivain ex-dissident Vladimir Voïnovitch, affirmant que son génie est un « mythe ».

AFP


AFP, le 4 août 2008 à 02h37
L’auteur de l’Archipel du Goulag,  Alexandre Soljenitsyne, est décédé 

 

MOSCOU, 4 août 2008 (AFP) – L’écrivain russe Alexandre Soljenitsyne, 89 ans, grande figure de la dissidence en URSS et auteur de romans monumentaux sur les camps soviétiques tels « L’Archipel du Goulag », est décédé dans la nuit de dimanche à lundi à son domicile à Moscou.
Le prix Nobel de littérature est décédé « à la suite d’une insuffisance cardiaque aiguë » dimanche à 23H45 heure de Moscou (19H45 GMT), a déclaré son fils Stepan, cité par l’agence de presse Itar-Tass.
L’écrivain, très affaibli depuis plusieurs années, n’apparaissait plus que rarement en public. Des images télévisées le montraient alors recevant des hôtes dans sa maison de Troïtse-Lykovo, au nord-ouest de Moscou, en fauteuil roulant.
Alexandre Soljenitsyne a révélé au monde la réalité du système concentrationnaire soviétique dans ses ouvrages « Une journée d’Ivan Denissovitch », « Le premier cercle » et « L’Archipel du Goulag ». « A la fin de ma vie, je peux espérer que le matériel historique (…) que j’ai collecté entrera dans les consciences et la mémoire de mes compatriotes », avait-il dit en 2007 alors que le président Vladimir Poutine venait de lui remettre le prestigieux Prix d’Etat russe. Le président russe Dmitri Medvedev a exprimé ses condoléances à la famille de l’écrivain, a annoncé sa porte-parole Natalia Timakova. Le président français Nicolas Sarkozy a rendu hommage lundi à la mémoire d’Alexandre Soljenitsyne, « l’une des plus grandes consciences de la Russie du XXe siècle ».
« Son intransigeance, son idéal et sa vie longue et mouvementée, font d’Alexandre Soljenitsyne une figure romanesque, héritière de Dostoïevski. Il appartient au panthéon de la littérature mondiale. Je rends hommage à sa mémoire », a écrit M. Sarkozy. Né le 11 décembre 1918 à Kislovodsk, dans le Caucase, Soljenitsyne adhère aux idéaux révolutionnaires du régime naissant et fait des études de mathématiques. Artilleur durant la deuxième guerre mondiale, il est arrêté en 1945 et condamné à huit ans de camp pour avoir critiqué les compétences guerrières de Staline dans une lettre à un ami. Libéré en 1953, il publie en 1962 son récit sur un détenu ordinaire du Goulag, « Une Journée d’Ivan Denissovitch », avec l’autorisation du nouveau maître de l’URSS, Nikita Khrouchtchev. Pourtant d’autres livres de Soljenitsyne, « Le Pavillon des Cancéreux », puis « Le Premier Cercle » ne sortent qu’en « samizdat », les éditions clandestines, et à l’étranger, où ils connaissent un grand succès.
Prix Nobel de littérature en 1970, il a été privé de sa citoyenneté soviétique en 1974 et expulsé d’URSS. Il a alors vécu en Allemagne, en Suisse puis aux Etats-Unis, avant de revenir en Russie en 1994 après la chute de l’URSS. Depuis son retour sur sa terre natale, il s’était montré critique envers l’Occident et envers l’évolution de la Russie post-soviétique, appelant à un retour aux valeurs morales traditionnelles.
Il appréciait néanmoins le rôle de Vladimir Poutine, président (2000-2008) reconverti Premier ministre et partisan du retour d’une Russie forte et fière d’elle-même, malgré son passé d’officier du KGB.
« Poutine a reçu en héritage un pays pillé et à genoux, avec une majorité de la population démoralisée et tombée dans la misère. Et il a commencé sa reconstruction (…) petit à petit, lentement. Ces efforts n’ont pas été remarqués et appréciés tout de suite », déclarait-il en avril dans un album dédié au président. En 2006, Alexandre Soljenitsyne avait accusé l’OTAN de préparer « l’encerclement total de la Russie et la perte de sa souveraineté ». M. Poutine, qui lui avait rendu visite le 12 juin 2007 pour lui remettre le Prix d’Etat, avait alors loué celui qui a « dédié sa vie à la patrie ». « Des millions de gens dans le monde lient le nom et les œuvres d’Alexandre Issaevitch Soljenitsyne au sort de la Russie elle-même », avait-il dit.

AFP


Reuters, le 3 août 2008 à 23h46
Soljenitsyne,dissident puis chantre des valeurs morales

 

MOSCOU, 3 août (Reuters) – L’écrivain russe Alexandre Soljenitsyne est mort à l’âge de 89 ans des suites d’une attaque, a rapporté dimanche l’agence de presse russe Interfax. Son oeuvre monumentale, caractérisée par de volumineuses chroniques historiques et une dénonciation inlassable du système pénitentiaire soviétique, a ouvert les yeux du monde entier sur la réalité des bagnes staliniens, dès les années 1960 et surtout à partir de la parution de « L’Archipel du Goulag », en 1973. De paria, il est devenu héros, et de l’humiliation il est passé à la renommée littéraire au cours d’une vie dont les souffrances et les victoires reflètent à elles seules les heurs et malheurs de la Russie du XXe siècle.
Emblème de la dissidence tout au long de la guerre froide, il n’a pas caché dans le même temps ses opinions nationalistes panslaves, sa passion mystique pour la Russie et sa ferveur orthodoxe, tout en étant poursuivi par des accusations d’antisémitisme, lesquelles ont refleuri lors de la parution d’une de ses dernières oeuvres, « Deux cents ans ensemble », une histoire des Juifs de Russie.
Passé 80 ans, il n’a pas baissé la garde et a continué, après son retour au pays, à dénoncer la politique des nouveaux maîtres du Kremlin, la chute de la Maison Russie et la « décadence » morale et spirituelle qu’il prêtait à son pays. Toutes ces facettes ont composé un personnage complexe que ne peut en aucun cas embrasser le seul mot de « dissident ». En refusant une haute distinction que voulait lui décerner Boris Eltsine, il expliqua ne pas pouvoir accepter d’honneurs de la part d’un président qui avait, selon lui, plongé son peuple dans la misère.
A Vladimir Poutine, son successeur, il a reproché de ne pas s’être attaqué aux pouvoirs des hommes politiques corrompus. Et, position qui fit bondir les milieux progressistes, ce défenseur d’une renaissance morale et spirituelle de la Russie se disait favorable au rétablissement de la peine de mort pour mieux mater le séparatisme tchétchène.
Alexandre Issaïévitch Soljenitsyne naît à Kislovodsk le 11 décembre 1918, un an après la Révolution d’octobre. Orphelin de père, il est élevé par sa mère à Rostov-sur-le-Don dans le sud de la Russie; il étudie la physique et les mathématiques et se voit mobiliser en 1941 lorsque Hitler lance la Wehrmacht dans les plaines russes. Capitaine d’artillerie, il est décoré par deux fois pour son courage sur le front.

LES LECTEURS NE SONT PLUS CE QU’ILS ÉTAIENT

Mais en 1945, la censure militaire découvre, dans des lettres qu’il adresse à un ami, des critiques visant Staline. Cela lui coûtera huit ans de détention. Compte tenu de sa formation de mathématicien, il est affecté à un institut de recherche secret – évoqué dans son roman « Le Premier cercle » – puis, en 1950, dans des camps de travail de la steppe kazakhe. Libéré en 1953, il reste en relégation dans un village du sud du Kazakhstan, où il est atteint d’un cancer à l’estomac dont il se remet. En 1956, déstalinisation oblige, son exil intérieur prend fin et l’année suivante le voit réhabilité. Le contexte de « dégel » lui permet de devenir membre de l’Union des écrivains et, en 1962, de publier le roman « Une journée dans la vie d’Ivan Denissovitch », sur la réalité des bagnes staliniens. Les Russes découvrent que ce coup de tonnerre politico-littéraire, puisé dans l’expérience de son auteur, est l’oeuvre d’un professeur de mathématiques de 43 ans. Le dégel se poursuivant, Soljenitsyne publie dans la revue Novyi Mir plusieurs textes dont « La Maison de Matriona » (1963). Mais ce répit est de courte durée. En 1964, Nikita Khrouchtchev est écarté du pouvoir. Le KGB harcèle un Soljenitsyne dont le renom grandit déjà en Occident et les autorités interdisent la
publication de ses livres, dont « Le Pavillon des cancéreux ». Ses ouvrages sont retirés des bibliothèques publiques. En 1969, il est exclu de l’Union des écrivains et l’attribution du Nobel, l’année suivante, ne fait qu’accroître la colère du Kremlin.
La parution en France, en 1973, de « L’Archipel du Goulag », réquisitoire contre l’univers pénitentiaire soviétique dont le manuscrit a été exfiltré d’URSS au nez et à la barbe du KGB, est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Placé à bord de l’avion de l’exil, Soljenitsyne se retrouve en RFA. Seule sa stature internationale lui vaut d’échapper à la prison. Il s’installe en 1976 dans le Vermont, aux Etats-Unis, et reprend
un projet pharaonique entamé dans les années 1930: « La Roue rouge », saga sur la mise en place du système soviétique. Après la dislocation de l’URSS fin 1991, il attend de terminer ce cycle historique avant de mettre fin, en mai 1994, à 20 ans d’exil. Arrivé en « patriarche » à Magadan, port de l’Extrême-Orient russe qui fut longtemps une plaque tournante du goulag, il revient triomphalement à Moscou à bord du
transsibérien, lors d’un voyage qui dure plusieurs semaines.
La Russie qu’il retrouve n’est cependant pas celle qu’il avait quittée. Il n’est plus un paria, il n’est pas non plus le porte-voix d’une intelligentsia avide de changements. Les médias russes notent que ses livres se vendent nettement moins que dans les années Khrouchtchev. La télévision supprime rapidement une émission qu’il animait, faute d’audience suffisante. Dans les dernières années de sa vie, il n’en poursuivra pas moins un travail de titan, désormais inversement proportionnel à son audience.

REUTERS

 

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