30 novembre 2011

TUNISNEWS
11 ème année, N°4171 du 30.11.2011


Romandie: Tunisie: manifestation pour le port du niqab à l’université

Le Temps: Abdessalem Jerad témoigne devant le juge d’instruction

La Presse: Pour un jugement équitable des policiers arrêtés

Business News: Tunisie : Défaite d’Ennahdha lors des premiers votes sur l’organisation des pouvoirs

Le Point: Tunisie : « Si rien ne change, on va brûler Gafsa »

Webdo: R. Ghannouchi à Washington pour les «Top 100 Global Thinkers of 2011» du magazine Foreign Policy

Webmanager Center: Tunisie: Béji Caid Essebsi est-il sorti avec les honneurs?

Le Temps: Martyrs de la Révolution – Le temps des promesses

Tunisia IT: Tunisie : visite de 30 hommes d’affaires allemands

Liberte Algerie: Le modèle turc va-t-il s’imposer en Afrique du Nord ?

RTBF: Tunisie et Egypte, principales victimes touristiques des révoltes arabes

Kapitalis: Tunisie. Pour combattre le chômage, supprimons l’impôt sur les sociétés !

Le Nouvel Observateur: Fin ou renouveau de l’islam politique (1/3)


Tunisie: manifestation pour le port du niqab à l’université


LA Manouba (Tunisie) – Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées à la Faculté des lettres de la Manouba, à 25 km à l’ouest de Tunis pour réclamer le droit des étudiants en niqab de suivre les cours et de passer leurs examens, a constaté une journaliste de l’AFP.
Les manifestants, en niqab pour les filles, en Kamis (tuniques) et barbes pour les garçons criaient Allah Akbar devant les bureaux de l’administration. Quelques échauffourées se sont produites avec d’autres étudiants qui lançaient: islamiste, dégage!
Les manifestants, dont certains étaient là depuis la veille, réclament le droit des filles en niqab à passer leurs examens et une salle de prières dans l’enceinte du campus. Selon le doyen de la faculté Habib Kazdaghli, ils veulent aussi la non mixité des cours et l’interdiction pour des professeurs hommes ou femmes d’enseigner au sexe opposé.
Réunis dans un amphithéâtre du campus, les enseignants et représentants syndicaux universitaires, réunis en assemblée générale, ont voté le principe d’une grève jeudi pour protester contre ces incidents.
Plusieurs étudiants et enseignants ont estimé que les manifestants étaient étrangers à la faculté, certains n’étant pas des étudiants mais des agitateurs venus des quartiers populaires proches du campus de la Manouba.
Un dirigeant et un élu du parti islamiste Ennahda, vainqueur des élections du 23 octobre, s’étaient déplacés sur place pour tenter de trouver une solution.
Les partisans du port du niqab ont démenti être des salafistes et nié avoir demandé la non-mixité des classes à l’université.
Le ministère de l’Enseignement supérieur avait condamné fermement la manifestation lundi soir.
Interrogé par l’AFP sur le port du niqab –voile cachant le visage et le corps de pied en cap– le ministère considère que selon les dispositions régulières en vigueur chaque étudiant doit pouvoir être identifié avant l’accès à l’université, pour des raisons pédagogique et sécuritaire.
En l’absence d’un texte juridique spécifique sur le port du niqab, phénomène nouveau en Tunisie, les doyens de facultés peuvent s’appuyer sur une circulaire de 2005 obligeant à l’identification des étudiants.
(Source : « Romandie News » le 29.11.2011)

Abdessalem Jerad témoigne devant le juge d’instruction


Le secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) Abdessalem Jerad a comparu, hier, devant le juge d’instruction du troisième bureau au Tribunal de première instance de Tunis en qualité de témoin concernant notamment des avantages douaniers relatifs aux voitures de l’UGTT.
M. Jerad est entendu également comme témoin au sujet du reliquat des factures téléphoniques de l’Union syndicale des travailleurs du Maghreb arabe pour la période allant de 1989 à 2003, apprend la TAP de source informée auprès de l’UGTT.
Cette période couvre les années durant lesquelles MM. Ismail Sahbani et Habib Besbès étaient responsables en qualité de secrétaires généraux de l’organisation syndicale maghrébine, précise-t-on de même source.
(Source: « Le Temps » (Quotidien – Tunis), le 29.11.2011)‏

Pour un jugement équitable des policiers arrêtés


A l’ouverture du procès d’agents de police au Tribunal militaire, des agents en civil, d’autres portant des uniformes et un brassard rouge, des membres de familles de victimes, tous se sont rassemblés hier à Bab Saâdoun et à La Kasbah, à l’initiative de l’Union des syndicats des forces de sécurité intérieure pour un sit-in d’une heure. Ils protestent contre la responsabilité excessive qui leur est attribuée en ce qui concerne la mort des victimes de la révolution et réclament discrétion et procès équitable à leurs collègues qui s’avèreraient coupables. «Non au jugement populaire, non aux campagnes de dénigrement et à l’atteinte injustifiée à la réputation des agents de police», a-t-on écrit sur des pancartes et des banderoles. «Il y avait des martyrs et des blessés également dans les rangs des forces de l’ordre, il faudra aussi enquêter sur les tireurs qui les ont exécutés de sang-froid, certains d’entre eux avaient neuf balles dans le dos…», s’indigne-t-on ici et là parmi les manifestants. Une responsable syndicale rencontrée sur place, Mme Olfa Ayari, membre du bureau exécutif du syndicat national, affirme que «contrairement à ce qui a été dit dans les médias, les policiers présents ici n’ont pas quitté leurs postes, ce sont uniquement des agents qui ne sont pas de service ou des cadres de l’administration. Nous sommes tunisiens comme vous, nous sommes conscients que la responsabilité d’assurer la sécurité est indispensable, voire vitale pour toutes les activités du pays et nous sommes contre la grève et l’arrêt du travail, mais nous sommes également opposés à ce que la police paye toute seule la facture, ne serait-ce que par l’image véhiculée par les médias !»
A l’écoute de ces propos se pose une question évidente : si les policiers arrêtés sont innocents, qui a donc tiré sur les manifestants en décembre et janvier derniers ? Mme Ayari précise: «Nous n’avons pas prétendu que tout le corps de la police est innocent. Si quelqu’un est reconnu coupable, nous voulons qu’il puisse bénéficier d’un procès équitable, loin de la vengeance, des préjugés et des règlements de comptes… Il faut que cela soit basé sur des preuves».
Et la réponse à cette question d’en entraîner d’autres. Un agent en civil rencontré devant le Tribunal de première instance évoque la nécessité de tenir compte de la légitime défense. «Imaginez vingt ou même trente agents retranchés dans un poste de police et attaqués par trois ou quatre mille manifestants dont l’intention est de mettre le feu et tout incendier ; allez-vous tirer en l’air et sur les pieds ou allez-vous vous enfuir et laisser les manifestants s’emparer du poste et des armes rangées dedans ? Et puis, si la police décide de tirer sur les manifestants, y aura-t-il un seul mort ou des dizaines de morts par manifestation ? Enfin, regardez les gens qui sont morts d’une balle dans la tête ou dans des endroits précis du corps : est-ce que ce sont les policiers qui leur auraient tiré dessus avec un simple pistolet, sachant que tous les policiers ont été désarmés dès le 13 janvier ?»
Bref, on en a gros sur le cœur. Dès qu’un journaliste est «repéré », les protestataires sont nombreux autour de lui. Chacun a des choses à révéler. «La sécurité est importante. Regardez ce qui s’est passé lorsque la police a été désarmée. C’était la dérive», clament certains agents portant des brassards rouges.
Quelle image ?
Il n’y a pas le moindre doute qu’avant la révolution, l’appareil sécuritaire faisait partie des principaux piliers du système de Ben Ali, dans le bon sens comme dans le mauvais. Il y avait un combat contre le crime et une veille pour assurer la sécurité des Tunisiens, des touristes et des investisseurs. Il y avait aussi, c’est vrai, une répression considérable contre les opposants et les journalistes qui dérangent. Ce n’est donc pas tout le corps sécuritaire qui est impliqué. «Il ne faut pas généraliser», insiste-t-on lors de cette manifestation. Et si nous voulons être justes, nous serions dans l’obligation de rappeler une thèse très partagée depuis les premiers jours de la fuite de Ben Ali, c’est que tous les Tunisiens sont responsables du développement de l’ancien système, évidemment à des degrés différents, mais c’est la police qui a été attaquée en premier, étant donné qu’elle représente le symbole de l’exercice du pouvoir. «Maintenant, avec un certain recul, il n’est pas logique donc que l’on fasse porter le chapeau uniquement aux forces de sécurité. La loi doit être appliquée à tous les coupables…», réclame-t-on.
«Nous sommes pour la réconciliation nationale. Nous demandons à l’Assemblée constituante de tourner cette page et de pardonner ce qui pourrait être pardonné. Notre religion recommande la tolérance», rappelle Mohamed Zitouni Mnafqi, secrétaire général adjoint de l’Union nationale des syndicats tunisiens de sécurité , tout en précisant : «Nous sommes conscients de l’importance de notre rôle dans les élections passées et nous voulons contribuer à la construction de la nouvelle Tunisie. Nous demandons au nouveau gouvernement de se poser les vraies questions: entre autres, à qui profitent l’anarchie, les perturbations et la dérive. Certainement pas aux Tunisiens dont nous faisons partie».
Auteur : Lassaâd BEN AHMED
(Source: «La Presse» (Quotidien – Tunis), le 29.11.2011)‏

Tunisie : Défaite d’Ennahdha lors des premiers votes sur l’organisation des pouvoirs


Nous venons d’apprendre, selon des sources concordantes, qu’aujourd’hui, lors de la réunion de la commission d’organisation des pouvoir, les votes pour les articles 5 et 8 de la loi d’organisation provisoire des pouvoirs ont dévoilé la défaite d’Ennahdha. En effet, concernant l’article 5 relatif à l’organisation provisoire des pouvoirs et qui concerne le texte proposé quant à la majorité nécessaire pour adopter la constitution, 9 ont voté pour tandis que 13 se sont prononcés contre.
Pour ce qui concerne l’article 8, relatif à l’organisation provisoire des pouvoirs et qui touche la question des pouvoirs législatifs du Premier ministre. , 9 ont voté pour, 12 contre et 1 abstention.
Les pourparlers au sein de la commission se poursuivront, au sein de la commission, ce mardi 29 novembre 2011, à partir de 15 heures
(Source : «Business News», le 29.11.2011)

Tunisie : « Si rien ne change, on va brûler Gafsa »


Un an après la révolution du Jasmin, les contestations sociales se multiplient. L’emploi est au centre de toutes les revendications.
Des pneus brûlés jonchent le bitume de la rue Habib Bourguiba, avenue principale de M’dhilla. Dans cette petite ville du centre de la Tunisie, près du local de l’UGTT, le principal syndicat tunisien, des chaises, brûlées également, sont disposées sur les trottoirs. Les fenêtres du bâtiment ont été brisées, tout comme celles de la municipalité qui date de l’empire colonial.
« En plus de nos emplois, c’est notre patrimoine qui est parti en fumée », regrette Hossein, 30 ans d’ancienneté à la Compagnie de phosphate de Gafsa (CPG), détenue à 99 % par l’État tunisien et numéro cinq mondial du secteur. Dans la nuit du 23 au 24 novembre, M’dhilla mais aussi Moularès, située à une trentaine de kilomètres, ont été le théâtre de violences. Les manifestants contestaient les résultats, annoncés le 23 novembre, du concours de recrutement de la CPG.
40 % de chômeurs
« Ils n’ont pas respecté les critères de sélection (basés essentiellement sur des critères sociaux, NDLR). Certains ont été pris alors qu’ils avaient déjà un emploi », assure Néji Yacoubi, les dents noircies à cause de la pollution engendrée par le phosphate. Fragilité des os, perte des cheveux, cancer, les effets sur la population locale de l’extraction de cette ressource sont nombreux, pourtant, tout le monde veut travailler dans cette entreprise. Alors que le taux de chômage flirte avec les 40 % dans le gouvernorat de Gafsa, contre 18 % pour la moyenne nationale, l’emploi reste plus que jamais au coeur des préoccupations. Et la CPG, le principal employeur.
Des salaires alléchants (environ 500 dinars -250 euros- pour un chauffeur, alors que le salaire moyen est de 120 à 150 dinars), une retraite juteuse, des avantages sociaux et une sécurité sociale sont les nombreux avantages qu’elle offre. Cette année, elle a reçu plus de 16 000 candidatures pour 2 600 postes au sein de l’entreprise et 1 200 autres à pourvoir dans sa société de préservation de l’environnement. Mais les résultats annoncés le 23 novembre, peu avant la démission du gouvernement, n’étaient que partiels et manquaient de transparence. « Nous avions demandé au ministère de l’Emploi d’attendre et d’afficher les scores de chaque candidat. Mais certaines personnes au sein du gouvernement n’ont pas voulu », regrette Kaïs Daly, le P-DG du groupe, tout en refusant de nommer qui que ce soit. Devant le siège du Groupe chimique tunisien, à Tunis, des militaires sécurisent la zone. Une centaine de personnes, venues du gouvernorat de Gafsa, se sont réunies le 28 novembre, pour dénoncer ces résultats.
Une impression de déjà-vu
Les dents jaunies, un manteau visiblement trop grand pour lui, Hossein, ancien chauffeur de poids lourds, s’avance dans la cour de la compagnie de phosphate, à M’dhilla. À quelques mètres de là, une grue a été la proie des flammes. Derrière, c’est un camion. Plus loin, des carcasses de bus carbonisés trônent. La plaque de marbre qui indiquait l’entrée de la compagnie est en morceaux. Les murs blancs du laboratoire ont été noircis par la fumée. Même vision du côté du bâtiment administratif, construit en 1923, où le plafond d’une aile menace de s’effondrer. Les dégâts matériels s’élèvent à plus de 5 millions de dinars (2,5 millions d’euros), « mais ce n’est rien comparé au manque à gagner – 3 millions de dinars par jour – dû à l’arrêt de la production », souligne Kaïs Daly.
Depuis le 24 novembre, un couvre-feu a été instauré dans tout le gouvernorat. À M’dhilla, quatre blindés de l’armée et de la gendarmerie patrouillent toute la journée.
Cette situation n’est pas sans rappeler celle de 2008. À l’époque, Redeyef, une ville minière située à la frontière algérienne, s’était enflammée. Les manifestants dénonçaient alors la corruption et leurs mauvaises conditions de vie. Pendant plus de six mois, ils ont affronté les forces de l’ordre de Ben Ali. Une contestation violemment réprimée qui a fait deux morts. « Nous avons commencé la révolution à ce moment-là », rappelle Moktar Charfi, le directeur de la maison de la culture de M’dhilla.
Promesses
Pour calmer les tensions, les résultats du concours sont suspendus. Les habitants souhaitent leur révision, mais surtout des investissements. À M’dhilla, il n’y a ni banque, ni station-service. « Ce sont nos richesses qu’ils exploitent. Ils gagnent beaucoup d’argent, mais le gouvernorat n’en bénéficie pas », déplore Belgacem Mabrouki, employé à l’université de Gafsa.
Difficile d’attirer des investisseurs dans ce bassin minier, dont l’accès se fait essentiellement via des routes défoncées. Il faut plus de cinq heures pour y arriver depuis Tunis. « Nous avons présenté un programme de 400 millions de dinars – 200 millions d’euros – au gouvernement pour développer et créer des emplois dans la région », soutient Kaïs Daly. « Beaucoup de promesses ont été faites, mais rien ne se passe », regrette de son côté le gouverneur, Moncef El Héni.
« Si rien n’est fait, on va brûler Gafsa »
« Rien n’a changé depuis 2008. Les pratiques restent les mêmes. Et la corruption est toujours là », constate Rim Ammar, jeune avocate de Gafsa, alors que l’impatience sociale se fait sentir. Devant le siège du gouverneur, des chauffeurs de taxi ont planté une tente. Ils souhaitent recevoir des autorisations pour travailler. Au loin, une épaisse fumée noircit le ciel de Gafsa. Devant la gare, des hommes brûlent un pneu de poids lourd. Moatassim Karam, 50 ans, est au chômage. Comme la cinquantaine de personnes présentes sur place, il souhaite que le gouvernement s’occupe d’eux. « Le local de réparation des wagons a été transféré à Sfax. Huit cents personnes se sont retrouvées au chômage, alors que les installations sont toujours là. (…) Si rien n’est fait rapidement, on va brûler Gafsa », lance-t-il, reconnaissant que ce n’est peut-être pas la solution, « mais j’ai besoin de manger et de faire manger ma famille ».
Certaines entreprises, comme la société de câblage Yazaki ou encore Benetton, se sont depuis installées à Gafsa grâce au pôle de compétitivité voulu par la CPG, mais cela n’est pas suffisant. « On ne cherche pas des salaires importants, on veut juste travailler. Toutes ces destructions et ces contestations ne sont pas une bonne chose, mais que faire ? On ne connaît pas la démocratie, analyse, tel un sage, Hossein, alors qu’il fume son narguilé. C’est la mission des intellectuels de nous l’enseigner. »
(Source : « Le Point.fr» (Quotidien – France), le 29.11.2011)

R. Ghannouchi à Washington pour les «Top 100 Global Thinkers of 2011» du magazine Foreign Policy


Publié par Neil le 29 novembre 2011 à 16:49
Le magazine Foreign Policy a choisi Rached Ghannouchi, leader du mouvement Ennahdha, pour figurer dans sa liste des cent meilleurs penseurs globaux 2011 (Top 100 Global Thinkers of 2011).
FP a souhaité récompenser les travaux de Ghannouchi qui ont transformé la «perception globale» durant les 12 derniers mois. Ces travaux seront mentionnés dans un numéro spécial de la troisième édition de la revue Global Thinkers.
La cérémonie, à laquelle il sera présent, se déroulera ce jeudi 1er décembre au Meridian International Center à Washington, DC.
Dans la liste 2011 des « Top 100 Global Thinkers of the year », outre les dirigeants américain et français, les inspirateurs du Printemps arabe se sont vus attribuer les premières places. L’Égyptien cybermilitant Wael Ghonim et le dessinateur syrien Ali Ferzat, pour ne citer qu’eux, figureront dans la fameuse revue FP.
Durant ce voyage dans la capitale fédérale américaine, Ghannouchi fera, vendredi 2 décembre, un speech au prestigieux Woodrow Wilson Center sur invitation de Jane Harman, une ancienne congresswoman (députée) de Californie. Harman était en Tunisie en octobre dernier en tant qu’observatrice des élections.
(Source : « webdo.tn » le 29.11.2011)

Tunisie: Béji Caid Essebsi est-il sorti avec les honneurs?


Par Imededdine Boulaâba
Dès la proclamation des résultats partiels des élections de l’Assemblée constituante, l’excitation de certains partis politiques était perceptible. Des tractations ont commencé. Des rumeurs ont filtré. Des claquements de pupitre ont sonné. Des rapports de force se sont établis. Des conquérants ont émergé. Des équipes ministérielles sont échafaudées. Des langues ont salivé. Des ambitions se sont embrasées. Des listes de ministres ont circulé. Des noms sont proposés aux postes de souveraineté. Aux ambassades. Aux futurs cabinets. Aux consulats. Aux administrations. A la tête des sociétés publiques… Bref, la lutte des places était à son zénith. Dans un contexte économique des plus précaires… Besognons, Dieu besognera, disait Jeanne d’Arc.
Eh oui, le jeu des dupes, nous dit-on, tout au long de la campagne électorale, des candidats aux promesses démagogiques, a contribué à battre le rappel des lésés, des parias et des démunis des régions du sud-ouest du pays et des quartiers périphérisés de la capitale, outrés de voir le personnel politique, qui se présente en vainqueur, s’empêtrer dans des considérations électoralistes et des attitudes triomphalistes alors que l’ensauvagement de la misère continuait de plus belle à l’intérieur du pays. En somme, nous revoilà comme Perette et son lait renversé.
En fait, nous dit un observateur de la scène politique locale, une répétition du régime parlementaire en gestation s’est déroulée sous nos yeux. Au sein des alcôves, des demeures privées et des antichambres du pouvoir. Ce qui a mis les nerfs des Tunisiens à rude épreuve. Ceux du gouvernement de Béji Caïd Essebsi aussi. Dont les membres s’attendaient quand même à plus de responsabilité. De retenue. D’humilité. De respect des règles démocratiques. Car, affirme une source au Palais de La Kasbah, rien ne rehausse l’autorité mieux que le silence, splendeur des forts et refuge des faibles puisque seuls les élus de l’Assemblée constituante, insiste-t-il, dont la principale vocation est de rédiger une nouvelle Constitution pour le pays, disposent du mandat du peuple pour organiser la vie politique nationale durant la nouvelle période transitoire. En attendant les échéances futures, liées aux législatives et à la présidentielle.
Apparemment, afin de contenir l’opinion, de mettre le mouvement Ennahdha et ses alliés face à leurs nouvelles responsabilités, d’empêcher la confusion entre les autorités et d’accélérer la passation des pouvoirs, Béji Caid Essebsi, un monument d’audace et de souveraineté, après avoir sondé son équipe ministérielle, qui a réussi, globalement, à mener le pays à bon port, a décidé de présenter au président de la République la démission de son gouvernement. D’arrêter le jeu de leurre.
Le dépit était flagrant. La cérémonie… On ne peut plus grave. Mais le sentiment du devoir accompli se lisait sur les visages.
D’ailleurs, dans son allocution, au Palais de Carthage, le locataire de La Kasbah, un homme qui sait des choses et sait les taire, dont les crocs contiennent encore quelques ultimes doses de venin, n’a pas hésité à tacler les uns et les autres et à dénoncer implicitement le double langage des islamistes nahdhaouis, la réorientation idéologique du calendrier politique, faisant ainsi fi du consensus et la mauvaise foi de l’alliance tripartite (Ennahdha-Ettakatol-CPR) qui, à l’image de Rastignac, affamée par des années de jeûne politique, gonflée de son égo de vainqueur, fait un virage bord sur bord, érige la flatterie comme instrument de recrutement, promeut leurs intérêts partisans, forge des projets utopiques, dupe admirablement, affiche l’arrogance des victorieux, se croit le deus ex machina de ces journées historiques et donne ainsi le coup de grâce aux derniers bastions d’illusions.
En fait, pour Béji Caïd Essebsi, les maîtres du mouvement islamiste nahdhaoui et leurs compagnons de route, qui n’ont pas daigné impliquer l’UGTT, épine dorsale de la révolution du Jasmin, dans leurs tractations, ont pris la décision, durant une période encore transitoire, d’investir les rouages de l’Etat à la faveur des résultats de la Constituante. Alors que le mandat populaire est orienté essentiellement vers l’écriture de la nouvelle Constitution.
Finalement, dans un contexte révolutionnaire, champ magnétique d’exigences sociales, la lecture partisane de la réalité politique et des rapports de forces relève, affirment plusieurs experts, de la gageure. De l’aventurisme. Seulement, apprendre à des nouveaux venus à se contraindre et à prévoir… Autant essayer de discipliner les oiseaux, disait De Gaulle.
(Source : «webmanagercenter» le 29.11.2011)

Martyrs de la Révolution

Le temps des promesses


Enquête réalisée par Melek LAKDAR – On n’apporta point l’encens à l’autel où résident les sacrifiés de la liberté.
Au moment où la majorité des partis politiques se trouve happée par le désir de trôner et d’occuper un bon nombre de sièges à la Constituante, les familles des martyrs, totalement délaissées à leur sort, n’arrivent pas à faire leur deuil. Comble de l’inhumanité et d’indifférence ou sacrilège envers des êtres emportés pour une cause qui semblait noble ?
Course vers le pouvoir, au diable les martyrs !
Pendant que le paysage politique tunisien actuel est en ébullition et que la course vers le pouvoir semble être le seul et unique sujet de prédilection de nos chefs de partis politiques, les familles de nos martyrs qui se morfondent dans l’oubli sont abandonnées à leur triste sort. Ces jeunes, qui ont balisé le chemin à ceux qui aujourd’hui semblent détenir le pouvoir pour décider du notre destinée, ont été doublement ensevelis.
Dans les coulisses, ces anciens exilés pourchassés par la dictature, s’entre-tuent, et se guerroient entre eux. Ils font fi des vraies causes qui tenaillent les entrailles de la société tunisienne et sont plutôt préoccupés par le nombre de sièges, la présidence et que sais-je encore !
Médusées, choquées et totalement déboussolées, les familles des sacrifiés de la Révolution, font face, en solitude, à leur désarroi. Aucun soutien psychique ni assistance juridique sérieuse. Ballottés d’un tribunal à un autre, les dossiers des martyrs sont trimballés et trainent encore. On se demande où est passée la Société civile ? Qu’attend le Tribunal militaire pour lancer la première audience, pour que les parents des martyrs sentent que les choses évoluent et que justice sera enfin rendue ? Dix mois plus tard, rien n’est encore clair, hormis quelques dons, beaucoup de promesses non tenues jusqu’à présent et surtout une précarité hallucinante et un silence gouvernemental outrancier.
Mme Najet Namoussi (Hammam-Lif, mère du martyr Mohamed Nasser Talbi, tué par balle le 13 janvier)
«Depuis, la propriétaire de la maison que je loue menace de nous mettre à la rue. J’ai perdu le fils et le soutien.»
«Trois ans que je ne l’ai pas vu. Il était rentré de l’Italie depuis une semaine pour quelques jours de vacances. Un retour définitif et fatal. Il devait avoir 23 ans au mois de juin dernier. Une balle a traversé la vitre de la fenêtre et lui a transpercé le cou par derrière. Mohammed était allongé au salon regardant la télé qui diffusait les manifestations. Juste en face de notre appartement, situé au second étage, il y avait la circonscription de Hamam Lif…
Parents divorcés, il était l’aîné. Il était mon unique soutien et espoir. Seule source de revenu pour son frère et moi, il nous payait le loyer et assurait mes soins. Depuis, la propriétaire de la maison menace de nous mettre à la rue. J’ai perdu le fils et le pilier. Maintenant, je vis dans une totale précarité. A tout moment je risque de me trouver sans foyer. Aucun effort de la part de notre municipalité. J’ai demandé à ce que l’on nous répare la fenêtre du salon bousillée par la balle. Toutes les intempéries laissent leurs traces dans la chambre, qu’il pleuve ou qu’il vente. Rien ! On nous fait la sourde oreille malgré toutes les promesses.
J’ai eu d’abord affaire à un avocat qui m’a demandé 300d pour prendre en charge le dossier de mon fils. Mais, je viens d’être contactée par une avocate qui se porte volontaire à défendre la cause de Mohamed gratuitement ».
Rappelons qu’au moment où l’on écrit ces lignes, Mme Najet Namoussi n’a pas de quoi payer son loyer et qu’à tout moment, elle peut être, elle et son fils dans la rue. Aucune assistance psychologique ni morale…
Mme Saida Manaï (Lafayette, mère de Helmi Manaï tué par balle le 13 janvier lors des émeutes)
«Le président a refusé de me recevoir dans son bureau. Il a préféré me parler dans l’escalier…»
«Je garde encore la vidéo qui filmait l’assassinat de mon fils Helmi. Le cortège de son enterrement a passé devant le ministère de l’Intérieur le 14 janvier et a bouleversé plus d’un !
Il n’avait que 23 ans et vibrait de vie. On l’a tué parce qu’il manifestait contre le dictateur. Aujourd’hui, où tout cela nous a menés ? Rien ! Un second fils, qui, sous le choc, a eu une dépression et qui se fait enseigner à l’hôpital psychiatrique de la Manouba, une propriétaire de maison qui a porté plainte contre moi pour le loyer, un dossier qui traîne encore… Je me demande où sont passés la Société civile, la commission d’investigation, le gouvernement ? Quand je suis allée à la Ligue des droits de l’homme, le président a refusé de me recevoir dans son bureau. Il a préféré me parler dans l’escalier devant la porte des toilettes, prétextant une réunion en cours !!! Drôle de respect et de considération envers une mère qui a perdu son fils dans des circonstances pareilles ! Depuis, plus rien. ..Le dossier traîne encore et on ne sait plus à quel saint se vouer… »
Chéfia Ali (avocate du martyr Slim Zantouti)
«J’ai reçu le dossier de Slim Zantouti de la part de la commission d’investigation. Je me suis proposé de m’en occuper bénévolement. C’est la moindre des choses à faire avec ces gens qui ont perdu ce qu’ils ont de plus cher et dans des conditions tragiques. Ces enfants ont ramené ce vent de liberté. On leur doit bien ça.
En ce qui concerne le dossier de mon client, il est au tribunal militaire de Tunis après avoir été au tribunal de l’Ariana. Malheureusement, l’audience n’a toujours pas été fixée. Si au tribunal permanent de la ville du Kef, le procès a commencé portant sur les meurtres à Kasserine et Thala, celui des villes de Tunis, Nabeul et Bizerte n’a pas encore été fixé.
Il faudrait que les familles soient encadrées et mises au courant. La procédure est longue et compliquée et c’est tout à fait normal. Les familles des martyrs devront s’armer de patience même si c’est trop leur demander. »
Hammouda Zantouti (parent de Slim Zantouti, tué par balle le 14 janvier)
«On a instrumentalisé notre cause à des fins politiques !»
«C’est mon fils unique. Il avait 28 ans. On lui a tiré dessus le 14 janvier quand il était allé porter secours à ses amis coincés devant le rond point de la Cité El Ghazella et pris de court par l’annonce soudaine du couvre-feu de 17h. Un quart d’heure plus tard, il décéda. Une balle en plein cœur lui a ôté la vie en lui transperçant la poitrine. Voilà bientôt un an que l’on attend. J’ai tout de suite porté plainte auprès du poste de police. Le dossier a été trimballé entre le procureur de la république de l’Ariana, à la brigade criminelle au Gorjéni, pour échoir enfin au tribunal militaire de Tunis. J’ai été contacté au mois de mars par la Commission d’investigation qui a pris mon témoignage et m’a proposé une avocate qui se chargera gratuitement du dossier de mon fils. Comme la procédure juridique est assez compliquée, la période transitionnelle aidant, on attend toujours et encore que le procès commence. Entre temps, le Gouvernorat nous a avancé 20 mille dinars comme première partie.
Par contre, ce qui est aberrant et humiliant c’était le comportement de certains chefs de partis politiques qui se la jouant anciennes victimes de Ben Ali, ont joué de notre cause. Ils ont instrumentalisé notre deuil pour faire leurs propres propagandes électorales lors des meetings qu’ils organisaient. On nous a promis des châteaux en Espagne. Vendeurs de paroles, ils ont pris la poudre d’escampette une fois la campagne électorale terminée. La preuve en est, on n’a plus jamais entendu parler d’eux depuis. L’humiliation atteint son comble à travers ces déclarations télévisées, ces décrets de loi qui ne sont qu’une pure mascarade humaine. Néanmoins, l’ISIE a tenu à nous rendre hommage à la Coupole la semaine dernière mais ça a mal tourné. Aigris, déçus et terriblement affligés, les familles de martyrs ont manifesté leur colère et frustration en semant le désordre. Il ne faut pas leur en vouloir. On aurait dû leur expliquer depuis bien longtemps que les choses traînent non pas par négligence mais plutôt par soucis de transparence et surtout par ce que la loi est très compliquée. Dans toute cette folie, j’ai pu récupérer la médaille où y était gravée le nom de mon fils, une médaille offerte par l’ISIE à toutes les familles de martyrs, une médaille que je garde jalousement, le temps que justice soit faite !
Maintenant, livrés à notre sort, on était depuis le mois de mars que le tribunal militaire fixe la date de la première audience ! Il est temps tout de même que ça ait lieu !»
Radhia Nasraoui (avocate et militante pour les droits de l’Homme)
«Les parents des martyrs ne font pas de la marche »
Nous nous sommes adressé à Maître Radhia Nasraoui, fervente militante pour les droits de l’Homme et activiste connue pour sa lutte effrénée contre toute forme de tyrannie et pour avoir été durant deux décennies persécutée par la police politique du président déchu. Nous nous sommes entretenues avec elle quant à la situation assez critique de la cause des martyrs.
Le Temps : Comment expliquez-vous l’absence de la Société civile et du silence gouvernemental pour ce qui est du traitement des familles des martyrs et de leurs dossiers? Sachant que certains d’entre eux accusent les partis politiques d’avoir abusé de leur cause en en faisant un produit de marketing, un coup de pub la veille des élections du 23 octobre…
Radhia Nasraoui : Je trouve que c’est anormal que l’on ignore les familles des martyrs. On devrait au contraire les traiter plus humainement et de manière plus respectable. Juridiquement parlant, les choses stagnent. Les parents qui ont perdu leurs enfants sont très déçus à cause des procès qui traînent. Il faut activer la procédure pour que les familles puissent constater que ceux qui ont tué injustement leurs enfants ne vont pas bénéficier d’une impunité, comme du temps de Ben Ali ! Car, il n’y a pas pire pour des parents que de voir que les coupables soient toujours en liberté alors que l’on a enlevé sauvagement la vie à son propre enfant ! La justice doit être rendue et le plus tôt serait le mieux.
Que pensez-vous de cette kyrielle de décrets de loi qui sont sortis et dans lesquels il s’agit de la gratuité des soins et de transport pour les familles des martyrs ? Est-ce équitable ?
Les parents de martyrs qui sont venus me voir considèrent ce décret comme une humiliation. Ces gens ne font pas la manche ! Ils demandent à ce que justice soit faite et que les criminels soient jugés. Ces parents revendiquent un minimum de respect et d’être traités humainement. J’ai vu des citoyens très déçus et terriblement déçus et affligés. Inconsolables, ils ne conçoivent pas le silence voulu par les autorités à leur égard. La moindre des choses, aurait été de les inviter pour les honorer officiellement. Pourquoi pas les convier à la première réunion de l’Assemblée Constituante au lieu de cette ribambelle d’anciens vassaux de Ben Ali…
Dix mois plus tard, on a l’impression que les martyrs qui ont été derrière le retour de l’exil des détendeurs actuel du pouvoir, ont été totalement ignorés, une fois que les jeux sont faits. Actuellement, c’est plutôt la course vers le pouvoir qui prime. N’est-ce pas perfide et déloyal ?
Effectivement, les véritables causes qui ont animé le peuple tunisien ont été totalement ignorées après les élections. On ne doit pas être ingrats avec les familles de martyrs car c’est justement grâce à ces jeunes vaillants et intrépides que les hommes politiques tunisiens les plus influents et puissants ont pu rentrer de leur exil ! Ils devraient leur être reconnaissants et non ingrats, du moins envers les familles qui ont perdu l’un des leurs. C’est un minimum !
Ces martyrs nous ont donné cet espoir d’émancipation, ont mis fin à la dictature d’un tyran. C’est grâce à eux que l’on a pu ouvrir une nouvelle page dans notre Histoire, des élections libres, la préparation de la Constituante et le processus démocratique. Sans eux, on serait encore sous le joug du despotisme !
Une cause qui se métamorphose en propagande électorale et instrumentalisée à des fins politiques, en somme. Comment y remédier ? Rappelant, que le lendemain de l’inauguration de l’Assemblée constituante, familles de martyrs et blessés de la Révolution sont allés, une fois encore, manifester devant le Tribunal militaire…
Il faut une solution radicale à ses citoyens inconsolables. Le gouvernement doit assumer sa responsabilité. La société civile ne peut qu’aider, en parler mais c’est à l’Etat d’appliquer la justice car il est le seul corps responsable de ces pertes. Il faut que ce dernier active la procédure et entame les procès dans les plus brefs délais! Une fois que c’est fait, les gens se sentiront mieux et croiraient que l’on ne laisse pas les choses traîner. Le pire c’est que certaines familles connaissent parfaitement le nom, le prénom et l’adresse du sniper qui a tué leurs fils. Ils ont divulgué ça aux forces de l’ordre qui font la sourde oreille. Voir l’assassin de son propre enfant se balader tranquillement sans qu’il y ait même d’arrestation est le comble de l’injustice ! Estimons-nous heureux que l’on ne soit pas passé aux vendettas sans merci !
Où sont donc les dossiers des martyrs ?? Pourquoi il n’y aurait-il pas un encadrement juridique de la part d’un groupe d’avocats qui défendraient ensemble et gratuitement la cause des martyrs ? Un groupe qui travaillerait en équipe et ferait le suivi du procès jusqu’au bout ?
Les procès sont encore à la cour de Cassation. Il faut activer les choses et que le procès ait lieu. Les gens seraient mieux rassurés ! Quant aux avocats, vous savez, on a nos traditions et on travaille toujours dans la solidarité. Là, tous les avocats qui se sont chargé des dossiers des martyrs le font bénévolement. Parce que nous sommes profondément reconnaissants envers ces héros de la Nation. C’est grâce à eux que nous sommes maintenant libres. C’est donc pour nous un devoir de défendre leur mémoire et de les honorer. Le jour de l’audience, une kyrielle d’avocats sera là. Pourvu que ça commence déjà ! On n’attend que ça ! »
Hier, la première audience portant sur les meurtres des jeunes martyrs tunisiens a bien commencé. Pour l’instant, elle concerne juste les villes de Kasserine et Thala. Le procès dont les accusés sont au nombre de 22, a vu la parution de l’ex ministre de l’Intérieur Rafiq Haj Kacem.
Un soupçon d’espoir est désormais permis…
Affaire à suivre.
(Source: « Le Temps » (Quotidien – Tunis), le 29.11.2011)‏

Tunisie : visite de 30 hommes d’affaires allemands


29.11.11
Les entreprises allemandes réitèrent leur confiance à l’égard de la Tunisie et la Chambre tuniso-allemande de l’Industrie et du Commerce (AHK Tunisie) a enregistré, depuis le 14 janvier 2011, l’adhésion de 104 nouveaux membres, a fait savoir Mme Dagmar Ossenbrink, Directrice Générale de l’AHK Tunisie, lors du 1er forum économique tuniso-allemand organisé hier à Gammarth.
Elle a ajouté que la Tunisie offre aux investisseurs allemands un marché facile à cerner, une industrie diversifiée en plus d’une situation géostratégique facilitant l’accès aux marchés arabe et africain.
Evoquant les relations économiques tuniso-allemandes, elle a affirmé que la Tunisie est le premier partenaire commercial de l’Allemagne au Maghreb, pour l’année 2010, et que l’Allemagne est un partenaire fiable ayant des intérêts à long terme.
Les entreprises allemandes sont, a-t-elle dit, intéressées par les secteurs de l’industrie, de l’infrastructure, des services, de la santé, de l’agriculture et l’agroalimentaire, des énergies renouvelables et des technologies de l’environnement.
Martin Wansleben, Directeur Général de l’Association des Chambres de Commerces Allemandes (DIHK) a exprimé, au cours d’une conférence de presse, tenue en marge de ce forum, son admiration pour la révolution tunisienne, ajoutant que la Tunisie est sur le bon chemin vers la démocratie et la liberté. « Le nouveau gouvernement est appelé à présenter ses stratégies pour la prochaine période afin d’encourager les hommes d’affaires à investir davantage en Tunisie », a-t-il dit.
Raouf Ben Debba, Président de l’AHK Tunisie, a indiqué, de son coté, que cette structure a établi des contacts avec 700 entreprises, relevant des chambres de commerces et d’industries allemandes, afin de les inciter à investir en Tunisie, précisant que trois entreprises ont déjà exprimé leur engagement à s’implanter en Tunisie.
Il a rappelé qu’une délégation allemande composée de 30 hommes d’affaires actifs dans les secteurs de l’énergie, des industries électroniques et chimiques, de la mécanique et du bâtiment, visite actuellement la Tunisie, dans le cadre de ce forum, afin de prendre connaissance des nouvelles opportunités à même d’encourager les entreprises allemandes à investir en Tunisie.
Intervenant à la conférence plénière de ce forum économique, Noureddine Zekri, Directeur Général de la l’Agence de promotion de l’investissement extérieur (FIPA), a mis l’accent sur l’environnement sain de l’investissement que la Tunisie offre aux entreprises allemandes.
Celui-ci, a-t-il encore précisé, se caractérise également par une infrastructure en plein essor (10 pôles de compétitivité, 13 cyberparcs, des zones industrielles, 9 aéroports et ports maritimes de commerce) et un cadre réglementaire favorable à l’investissement.
Des rencontres B2B entre les opérateurs allemands et tunisiens sont au programme de ce forum économique tuniso-allemand, manifestation organisée conjointement par la FIPA, l’AHK Tunisie et la DIHK et devant permettre de présenter le nouveau contexte de la Tunisie post-révolution et les nouvelles mesures destinées à promouvoir les investissements directs étrangers (IDE).
(Source : «Tunisia IT » le 29.11.2011)

Les islamistes vainquers en tunisie et au maroc et donnés favoris en égypte

Le modèle turc va-t-il s’imposer en Afrique du Nord ?


Par : Djamel Bouatta
Avec la victoire du PJD au Maroc, le Maghreb prend la couleur verte. Les islamistes vont gouverner en Tunisie, au Maroc et en Lybie puisque les vainqueurs de Kadhafi ont annoncé appliquer la charia.
Avec la victoire attendue du PLJ (Frères musulmans) en Égypte, ça sera toute l’Afrique du Nord qui sera passée à l’islamisme. Ne reste plus que l’Algérie qui doit, en théorie, attendre 2014, échéance du troisième mandat de Bouteflika. Il n’y aura pas de changement dans l’édifice constitutionnel puisque la révision de la Constitution, annoncée en mai dernier par le président de la République, se fera par voie parlementaire et on ne sait pas encore si c’est avant ou après les législatives de 2012. La question est d’importance car il est entendu que la législature actuelle a été entachée d’irrégularités donc pas suffisamment crédible. Malgré cela, c’est elle qui vote les nouvelles lois de l’Algérie de l’ouverture promise par Bouteflika. Pour les autres pays du Maghreb, le Printemps arabe les a poussés à adopter un régime parlementaire.
Au Maroc, la Constitution de juillet préconise le choix du Chef du gouvernement au sein du parti de la majorité. En Tunisie, la Constituante de novembre est en elle-même sous la même égide, peut-être avec davantage de prérogatives pour le Chef du gouvernement. Avec 47% des sièges à l’Assemblée constituante, Ennahda, qui a ouvert le bal de l’islamisme au pouvoir dans la région, a formé un gouvernement d’union où les postes ont été distribués aux membres de la coalition.
El-Ghannouchi, l’homme du succès foudroyant de l’islamisme dans une société que l’on présentait comme sécularisée, a décliné les postes à la tête de la Tunisie. Ennahda a pris la tête du gouvernement laissant la présidence de la République de la transition à un républicain et celle de l’Assemblée constituante à un démocrate. Le gage d’Ennahda va se diluer dans la démocratie parlementaire. Son alter ego marocain, le PJD, est la seconde formation islamiste modérée à arriver en tête d’une élection depuis le déclenchement du processus de changement, en donnant l’impression qu’ils se sont fondus dans la démocratie, allant jusqu’à s’interdire, verbalement pour l’heure, de toucher aux acquis démocratiques ou, comme en Tunisie, au statut des femmes, le plus avancé dans le monde arabe.
Dans les courants arabes républicains et démocratiques, c’est une ouverture de propagandes. Et de rappeler les engagements de l’ayatollah iranien Khomeiny qui, en 1979, a transformé la révolution iranienne en “mollarchie”. Depuis, la République islamique tient le pouvoir à Téhéran d’une main de fer. Ça sera néanmoins plus difficile pour Ennahda, le PJD et les Frères musulmans. Le contexte a changé et les sociétés sont assez sécularisées, du moins en ce qui concerne les libertés fondamentales.
Reste que ces islamistes affublés de qualificatif modérés savent qu’ils ne doivent surtout pas affoler les Occidentaux. La question est de savoir si ces islamistes au pouvoir avanceront encore masqués ou feront leur aggiornamento. Pour l’heure, ils se réclament tous du modèle turc. Les islamistes de l’AKP, reconduits par trois fois par des élections au standard européen, ont effectivement fait basculer la Turquie dans le camp des pays émergeants, mais leur respect de la démocratie n’est pas endogène à leur propre idéologie. Ceux qui s’ébahissent devant ce modèle ont oublié le legs d’Atatürk, la proximité de l’Europe dont la Turquie est toujours candidate et surtout la sécularisation de très larges pans de la société, attachés à la laïcité. Reste également la question de l’Algérie. Sera-t-elle contaminée par la vague verte ? Mais ces formations islamistes institutionnelles sont-elles en mesure d’emprunter la voie de leurs homologues de l’Afrique du Nord ? Sont-elles autant crédibles ? Et puis, on ne sait pas encore si la décennie noire a vacciné l’électorat algérien. L’Algérie saura-t-elle préserver ses particularités ? Dans la dernière résolution, qui va vraiment isoler Bachar al-Assad, le boucher de Damas, Alger ne s’est pas abstenu et n’a pas fait de réserves. Les lignes ont-elles bougé à El-Mouradia concernant le Printemps arabe ?
D. Bouatta
(Source : «liberte-algerie » le 29.11.2011)

Tunisie et Egypte, principales victimes touristiques des révoltes arabes


| Mis à jour le mardi 29 novembre 2011 à 17h06
Illustration : des touristes à proximité des pyramides du Caire
Le printemps arabe a eu des conséquences sur le secteur du tourisme en Belgique. Principales victimes: la Tunisie et l’Egypte, qui ont vu leurs réservations plonger de respectivement 19 et 17%, selon les résultats d’une enquête de l’ABTO, l’association belge des tours-opérateurs.
L’an passé, ces derniers ont vendu quelque 3 048 000 voyages, un chiffre comparable à celui de l’année précédente. Dans le détail, le nombre de séjours a reculé de 0,5%, à 2 719 941, tandis que le nombre de citytrips a progressé de 0,6%, à 328 746.
Par ailleurs, si la Tunisie (-19,1%) et l’Egypte (-17,4%) ont subi les conséquences du Printemps arabe, d’autres destinations ont profité de la situation internationale. La Grèce a ainsi vu ses réservations bondir de 13,9%; l’Espagne et le Portugal enregistrant une progression de 10%. Malte (+13,2% ) et Chypre (+6,7%) ont également tiré leur épingle du jeu.
« En règle générale, on peut dire que les vacanciers se sont tournés vers les vacances en avion en Europe alors que les vacances en voiture ont à peine progressé, en raison principalement du mauvais temps qui a affecté l’Europe occidentale en été », a expliqué Veerle De Boeck, la secrétaire générale de l’ABTO.
Citytrips: Barcelone à la cote
Au rayon des citytrips, Londres (-8,7%) et Paris (-8,5%) ont particulièrement souffert alors qu’à l’autre bout du classement, Barcelone a vu ses réservations bondir de 32,2%.
Enfin, en ce qui concerne la saison hivernale à venir, l’ABTO enregistre pour l’instant une baisse de 5,3%. Fin octobre, 384 825 vacances avaient déjà été réservées, ce qui représente environ 60% du volume total de l’an passé.
« Les réservations pour l’hiver reflètent le malaise qui prévaut à l’heure actuelle et qui affecte encore la confiance des consommateurs. Quant aux destinations, nous constatons que la situation dans le monde arabe n’est pas encore stabilisée », a conclu la secrétaire générale de l’ABTO.
(Source : «rtbf.be/info/economie » le 29.11.2011)

Tunisie. Pour combattre le chômage, supprimons l’impôt sur les sociétés !


Mardi, 29 Novembre 2011 07:51
Le législateur doit prendre la responsabilité de décisions créatives et courageuses pour endiguer le fléau du chômage, qui commence à menacer la cohésion même de la société.
Par Samir Tlili
Le chômage est aujourd’hui un problème planétaire qui touche tous les pays du monde sans exception, qu’ils soient riches et industrialisés ou pauvres en voie de développement. Ceci est dû essentiellement aux avancées technologiques réalisées par notre civilisation qui nous permettent désormais de produire de plus en plus de biens avec de moins en moins d’intervention humaine.
La rareté du travail
L’introduction généralisée de la mécanisation et de la robotisation aussi bien dans le domaine agricole qu’industriel a commencé par laminer une bonne partie des emplois offerts à la classe ouvrière et l’explosion informatique et des technologies de l’information et de la communication a fini, elle, par détruire une bonne partie des emplois bureautiques et administratifs qui occupaient une bonne partie de la population.
En effet, l’économie des emplois générée par le recours aux techniques modernes a été plusieurs fois plus importante que les emplois supplémentaires créés pour faire face à la croissance de l’économie mondiale. Ainsi, des tâches qui, hier encore, nécessitaient pour leur réalisation une équipe d’une dizaine de personnes peuvent aujourd’hui être accomplies par une seule, confortablement postée derrière une console informatisée le plus souvent connectée à la toile.
La rareté du travail devient de plus en plus une réalité qui s’impose à nos sociétés qui doivent ainsi se rendre à l’évidence que les économies modernes ne seront plus en mesure de produire suffisamment de travail pour répondre aux demandes de toute la population active surtout quand celle-ci ne cesse de s’accroître d’année en année.
Devant ce constat évident que certains refusent toujours de regarder en face, chaque pays est allé de sa propre créativité pour enrayer ce phénomène.
Réduction du temps de travail
Ainsi la France a jugé utile de réduire le temps de travail imposé à ses employés pour créer un besoin supplémentaire d’emplois qui viendrait résorber une partie de la demande de travail. La solution Française consistait à faire en sorte qu’une tâche nécessitant par exemple 90 heures de travail par semaine, soit accomplie par 3 personnes travaillant chacune 30 heures par semaine plutôt que 2 personnes seulement travaillant chacune 45 heures. Ceci revient en fait à partager la même quantité de travail entre le plus grand nombre de travailleurs possibles. Le risque d’une telle mesure est de grever les charges des entreprises françaises et réduire leur compétitivité ; mais qu’à cela ne tienne, les Français ont jugé qu’il vaut mieux avoir le maximum de personnes employées, quitte à lâcher du leste sur la sacrosainte contrainte de la compétitivité économique.
Journalistes au chômage, au siège de leur syndicat à Tunis, le 7 avril
Les Allemands et les pays scandinaves, quant à eux, sont allés chacun à sa façon dans leur politique d’encouragement à la limitation de travail des mères de famille en proposant toutes sortes d’aides et mesures sociales pour les encourager à limiter leur présence sur les lieux de travail élargissant ainsi le champ d’opportunités pour le reste des demandeurs d’emplois.
Une urgence nationale
Nous autres, en Tunisie, sommes loin d’être à l’abri de ce phénomène. En effet, les statistiques se concordent de plus en plus aujourd’hui pour nous prédire un nombre de chômeurs avoisinant les 800.000 personnes d’ici la fin de l’année. Avec un tel chiffre, le problème du chômage devient d’une importance telle que, s’il n’est pas correctement et rapidement maîtrisé, il risque de devenir un sérieux facteur d’implosion sociale surtout en cette période post révolutionnaire où une bonne partie de la population est toujours minée par le sentiment de rancœur d’avoir été tant marginalisée voire même flouée dans ses droits les plus élémentaires pendant toute la durée du règne de l’ancien régime.
Faut-il rappeler que le chômage a été l’un des plus importants catalyseurs qui a abouti au déclenchement de la révolution du 14 janvier ? Ce qui est sûr néanmoins, c’est qu’il reste la question la plus épineuse à résoudre pour les nouveaux maîtres du pays.
Avec son ampleur actuelle, la crise du chômage en Tunisie mérite d’être déclarée urgence nationale à l’échelle du pays, car nul gouvernement ne peut aujourd’hui remettre le pays en marche ni assurer la paix sociale sans apporter ne serait-ce qu’un début de réponse à ce problème et ce, quel que soit le niveau de croissance réalisé par l’économie qui ne pourra en tout état de cause dépasser ses performances historiques.
Nous avons bien vu en effet le pays s’embraser quand les responsables de l’époque se targuaient d’afficher une croissance moyenne de 5% pendant les vingt dernières années. Car cette croissance factice, basée sur l’explosion du chiffre d’affaires des sociétés du clan mafieux qui s’accaparaient à elles seules plus de 30% de l’économie nationale, n’a pas évité l’embrasement du pays, confirmant au passage la règle désormais éprouvée que le progrès n’a de véritable valeur que s’il est partagé par toutes les couches sociales.
Or s’il est un consensus sur lequel s’accorde la majorité des économistes aujourd’hui c’est que la réponse au problème du chômage ne peut venir que de la part des entreprises qui ont toujours été à l’origine de la création d’emploi et de richesses. L’Etat, lui, est déjà tellement surchargé en effectif qu’il lui est impossible aujourd’hui de jouer au recruteur. Et de toute manière, même les emplois de complaisance qu’il peut créer durant cette période post révolutionnaire pour calmer un peu les esprits ne sont nullement producteurs de richesse et sont ainsi condamnés à disparaitre à plus ou moins long terme.
La fiscalité : une piste à explorer
La lecture conjuguée des statistiques de la distribution des emplois par taille d’entreprise et de la configuration de nos recettes fiscales, laisse entendre qu’il peut y avoir dans ces chiffres une piste à explorer.
En effet, les dernières statistiques font apparaitre qu’il y a, à fin 2010, à peu près 597.000 entreprises répertoriées en Tunisie sur lesquelles plus de 578.000 sont classées comme employant cinq personnes ou moins. Il s’agit dans leur grande majorité de micro-entreprises familiales n’employant que très peu de personnel. L’idée est de créer un mécanisme qui encouragerait ces entreprises à recruter plus et le levier de cet encouragement est à rechercher du côté de la fiscalité.
On peut en effet imaginer que l’Etat, eu égard à la gravité de la crise du chômage et des conséquences qu’elle peut engendrer dans ces circonstances d’instabilité, accorderait aux entreprises qui emploient désormais au moins six personnes une exonération totale de l’impôt sur les sociétés.
Bien entendu, cette mesure ne concernerait que les sociétés soumises à un taux d’impôt sur les sociétés de 30% ou 10% c’est-à-dire l’essentiel de cette masse d’entreprises.
Les autres sociétés à fortes marges de rentabilité soumises au taux d’impôt sur les sociétés de 35% à savoir les établissements de crédit et les banques offshore, les sociétés de recouvrement de créance, les sociétés d’investissement, les assurances, les opérateurs de réseaux télécom, les sociétés de services pétroliers, les sociétés exerçant dans le secteur de production et de transport des hydrocarbures ainsi que celles travaillant dans le secteur de raffinage et de vente des produits pétroliers ne doivent pas elles être concernées par une telle mesure et ne pourront jouir de cet avantage.
En effet, si cette mesure réussit à convaincre les 578.000 entreprises qui emploient entre 0 et 5 employés de basculer de l’autre côté du seuil minimal de 6 employés pour pouvoir bénéficier de l’exonération totale de l’impôt sur les sociétés, ceci permettrait de créer d’un coup plus d’un million d’emplois.
Cette mesure a aussi un avantage manifeste sur les recrutements de complaisance que peut faire l’Etat en ces circonstances, c’est qu’elle incite les entreprises à produire plus ou, du moins, à améliorer la qualité de leurs produits et services ; ce qui ne peut que contribuer à la dynamique économique du pays dans son ensemble.
Désamorcer une situation de crise
Une telle mesure qui favorise le recrutement des chômeurs au détriment des recettes fiscales n’est pas une novation en elle même pour l’Etat. Celui-ci a en effet concédé, auparavant, à plusieurs reprises, des recettes fiscales pour l’encouragement ou le désamorçage d’une situation particulière de crise. Faut-il rappeler à cet égard qu’au lendemain de l’expérience collectiviste des années soixante, quand le pays décida de tourner définitivement la page du collectivisme à la soviétique initié par le gouvernement d’Ahmed Ben Salah et amorcer une économie libérale, le législateur de l’époque avait choisi d’arbitrer en faveur d’un accroissement de nos recettes en devises et du nombre d’opportunités d’emplois offerts au détriment du manque à gagner fiscal que représente l’impôt sur les bénéfices abandonné à ces entreprises totalement exportatrices qui décident de se délocaliser en Tunisie. Ce choix, qui reste à ce jour sujet à controverses, a néanmoins permis de contribuer un tant soi peu à l’amélioration du revenu moyen par habitant et à l’augmentation du pouvoir d’achat d’une grande partie des Tunisiens.
En d’autres circonstances, et comme mesure de dynamisation du marché financier, l’Etat a eu également à consentir aux entreprises qui se font introduire en bourse une baisse de l’impôt en le réduisant au taux de 20%.
On est ainsi en droit de se demander si l’Etat a été en mesure de concéder une partie de ses recettes fiscales pour des raisons parfois discutables, pourquoi ne le ferait-il pas pour un problème aussi sérieux que le chômage qui transcende aujourd’hui la simple dimension économique pour toucher à la dignité même de ses citoyens.
Les finances publiques ne seront pas affectées
Quant au prétendu manque à gagner des recettes fiscales de l’Etat en raison de l’introduction d’une telle mesure, il n’est pas aussi coûteux que l’on puisse imaginer. En effet, l’analyse de la configuration actuelle du budget de l’Etat montre que sur les 12.739 MTND de recettes fiscales prévues au titre du budget 2010, seulement 1.622 MTND viennent de l’impôt sur les sociétés en dehors des sociétés pétrolières ; ce qui ne représente que 12.7% des recettes fiscales totales. Or ce chiffre inclut l’impôt payé par les sociétés soumises au taux de 35% qui ne seront pas concernées par cette mesure et qui, de ce fait, continueront de payer la même contribution. Quand on sait que celles-ci, de part l’importance de leur poids dans l’économie nationale, constituent les plus grands contributeurs en termes d’impôt sur les sociétés, l’abandon de la part de l’impôt payée par la masse restante des micro-entreprises qui emploient 5 personnes ou moins ne dépassera peut être pas les 30% des recettes totales de ce chapitre, c’est-à-dire 487 MTND.
Sauf que d’un autre côté, l’Etat pourra récupérer une part importante de ce chiffre par les impôts directs et indirects générés par la mise en circuit du travail de tous ces nouveaux travailleurs-consommateurs.
En effet, l’Etat verra ses recettes fiscales s’accroître de l’impôt sur le revenu dû sur les salaires de cette masse de nouvelles recrues en plus de tous les impôts indirects tels que Tva, droits de consommation et droits de douane induits par l’accroissement de la consommation observée suite à l’amélioration du pouvoir d’achat de tous ces nouveaux travailleurs qui, auparavant privés d’un revenu régulier, ne pouvaient faire partie de la société de consommation ni contribuer à la croissance de l’économie nationale.
Avec un taux moyen d’impôt sur le revenu des personnes physiques se situant entre 15% et 20% pour les travailleurs, et une Tva généraliste de 18% sur la quasi-totalité des produits mis à la vente, l’Etat pourra ainsi très rapidement récupérer entre 33% et 38% des salaires distribués à ces nouveaux travailleurs sans compter l’impact des droits de douane et des droits de consommation ; ce qui est, à mon avis, loin de constituer une mauvaise affaire pour les finances publiques considérées dans leur ensemble.
Ainsi, à l’instar du législateur des années soixante-dix qui n’avait d’autre choix pour négocier le virage libéral de l’économie que d’arbitrer en faveur d’un accroissement de nos recettes en devises et du nombre d’opportunités d’emplois offerts au détriment d’un surplus de recettes fiscales, par l’encouragement de l’installation des sociétés totalement exportatrices et du tourisme de masse, le législateur d’aujourd’hui doit prendre à son tour la responsabilité de décisions créatives et courageuses pour endiguer le fléau du chômage, qui commence à menacer la cohésion même de notre société, d’autant plus que toutes les politiques d’incitation aux emplois des jeunes adoptées ces cinq dernières années sont loin de donner les résultats escomptés.
* Expert comptable.
(Source : «kapitalis.com » le 29.11.2011)

Fin ou renouveau de l’islam politique (1/3)


Publié le 28-11-11 à 18:18 Modifié le 29-11-11 à 17:17 par Le Nouvel Observateur
Par Jean Daniel.
C’est encore un fait que ceux que l’on appelle islamistes et qui se veulent islamistes sont en train de vaincre dans tous les pays ou la révolution a émergé comme un printemps de la liberté, et où l’on a cru apercevoir un modernisme areligieux sinon laïc. En Tunisie, le parti Ennahda fondé par le leader Rached Ghannouchi n’était pas dans la révolution. C’est cependant en majorité pour ce mouvement que se sont prononcés librement les Tunisiens. En Egypte, les frères musulmans se sont savamment mêlés aux jeunes révoltés soixante-huitards pour abattre le tyran. En Libye, l’acte de foi dans l’islamisme a paru être le ciment unitaire pour toutes les tribus en insurrection contre Kadhafi. Aujourd’hui, le Maroc vient d’élire une assemblée où les islamistes sont plus nombreux que l’on ne l’avait prévu et qu’on ne l’avait négocié. La question se pose donc de savoir comment les islamistes vont confisquer les idéaux révolutionnaires de toute une jeunesse, qui a déclenché elle et elle seule un soulèvement partout contagieux.
Transgression, délinquance, exil
Pour essayer de comprendre l’islamisme, je me suis constamment référé à deux livres. Le premier est d’Olivier Roy, « L’échec de l’islam politique », paru en 1992. Le second de Gilles Kepel, « Jihad, expansion et déclin de l’islamisme », paru en 2000. Comme on le voit par le titre de leurs ouvrages, ces deux experts, éminents s’il en est, ne semblent pas avoir prévu les conquêtes actuelles de l’islamisme. En fait, ces deux islamisants ont une conception particulière de l’échec et de la réussite. D’abord, lorsqu’ils parlent de l’islamisme, ils entendent islam politique. Sans avoir sous-estimé la permanence, pendant quatorze siècles, de l’ensemble géopolitique de peuples qui avaient en commun la religion, la langue et la tradition dans le continent arabe de l’islam, ils appellent islam politique une idéologie rassembleuse où le pouvoir se dissoudrait dans la foi, où la source de toutes les institutions et de l’esprit des lois se trouverait dans le Coran (la charia).
A la lumière de ces conceptions, ils observent qu’en dehors de la révolution iranienne, toutes les tentatives d’instituer un pouvoir religieux ont échoué sur des sociétés qui secrétaient la transgression, la délinquance et l’exil. Notons au passage que ces trois caractéristiques ont été celles de toutes les sociétés totalitaires.
Perversion
Pour Olivier Roy et Gilles Kepel, l’idée d’une pérennité possible pour l’islam politique n’a rien à voir avec la permanence des traditions, des rites et de l’observance des impératifs de la foi. L’islam politique peut, dans ses excès, se traduire dans le jihadisme, qui est dans l’histoire chaque fois un accident de courte durée. Exactement comme le terrorisme en occident, qui ne résume en rien la fidélité à l’islam : il n’en est pas une des manifestations mais une des perversions. L’islam politique, c’est le grand rêve : remplacer tous les leaders arabes qui ont capitulé devant l’occident ou manqué gravement à leur devoir de chef d’Etat par une gouvernance d’aspiration puritaine où la vertu et l’exemplarité rappelleraient la vie du prophète et en tous cas ne s’en éloigneraient pas.
Pas de projet de société
Nourris de leurs œuvres, j’attendais avec intérêt les réactions de nos auteurs devant les actuelles révolutions arabes. Ils ont d’abord eu la modestie de reconnaitre qu’ils n’avaient, pas plus que les autres, prévus ni la forme ni la date de cette explosion. Ils se sont ensuite inclinés devant la réalité des victoires de l’islamisme en réclamant, c’est le vœu d’Olivier Roy, qu’on distingue les sociétés islamiques des aspirations islamistes qui accompagnent l’islam politique ou radical. Mais ils établissent, en se référant à leurs travaux anciens, que les victoires actuelles des radicaux n’ont aucun avenir devant les nouvelles données géopolitiques de tous les Etats et devant les contraintes absolues de la modernité. L’islam politique, qu’on appelle islamique ou islamiste, n’a aucun projet de société. Ses leaders n’ont jamais d’imagination autre que la puissance et l’occupation du pouvoir. Dans le meilleur des cas, ce sont des prédicateurs dont l’archaïsme éclate au moindre problème.
Hypocrisie
Voici la conclusion d’Olivier Roy, elle vaut la peine d’une citation assez longue : « L’islamisme affadi en néo-fondamentalisme, n’est pas un facteur géostratégique : il n’unifiera pas le monde musulman. Il ne changera pas le rapport de force au Moyen et au Proche-Orient (…) sur le plan économique, on retrouvera dans les futurs régimes islamistes l’alternative déjà présente pour l’ensemble des gouvernements : étatisme socialisant à bout de souffle compensé par le marché noir, ou néo-conservatisme libéral contraint de suivre une recette du Fonds monétaire international sous le voile des « banques islamiques ». En résumé, l’islamisme est avant tout un mouvement socio-culturel incarnant la protestation et la frustration d’une jeunesse qui n’est pas intégrée socialement et politiquement. Les mouvements islamistes d’aujourd’hui n’apportent pas un nouveau modèle de société (…) Toute victoire islamiste sera un trompe l’œil mais l’apparence qu’elle mettra en place ne sera évidemment pas sans incidence (…) Que sera l’imposition de la charia ? L’hypocrisie.
Jean Daniel – Le Nouvel Observateur
(Source : «nouvelobs.com» le 29.11.2011)

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