TUNISNEWS
11 ème année, N°4024 du 30.05.2011
Communiqué des militant(e)s de l’immigration
AFP: Tunisie: deux grands partis n’excluent plus un report des élections
AP: Tunisie: un cadre de la sécurité « enlevé » sur la voie publique, selon son épouse
AFP: Tunisie: grève illimitée dans le transport routier de marchandises
AFP: Tunisie: quatre morts dans une collision entre un camion et un taxi
Reuters: Un Britannique rencontre le ministre libyen des A.E à Tunis
AFP: En Tunisie, le possible blocage des sites X ravive le spectre de la censure
AFP: Obama félicite la Pologne pour son engagement en Afrique du Nord
AFP: Le Maghreb ne peut faire l’impasse sur l’investissement étranger (Lellouche)
Abdo Maalaoui: Chefferies politiques tunisiennes et les objectifs de la Révolution : Foutaises !
les Echos: La Tunisie et la grand méchant loup islamiste
Slate Afrique: L’ombre de Ben Ali plane sur la presse tunisienne
AfricanManager: Appui budgétaire exceptionnel de 500 millions de dollars de la Banque africaine de développement pour la Tunisie
L’Expert: On payait des « imams » qui sont morts ou déchus
Kapitalis: La révolution tunisienne et l’émergence d’un rap réactionnaire
Réalités: Réponse de Habib Boularès au colonel Zoghlami et au lieutenant-colonel Mohamed Ahmed
Les Inrockuptibles: Exclusif: des frais de Gérard Longuet « pris en charge » par Ben Ali en 2006
AFP: Trente ans de Sida : Les grandes dates du Syndrome d’immunodéficience acquise
COMMUNIQUÉ DES MILITANT(E)S DE L’IMMIGRATION
Une association de l’immigration bien connue a pris l’initiative d’organiser, à son siège parisien, une rencontre politique qui a eu lieu samedi 28 mai 2011.
Les signataires du présent texte voudraient, à ce sujet —non sans avoir au préalable remercié les organisateurs— apporter les éclaircissements suivants :
Ladite rencontre a été unilatéralement décidée sans la moindre concertation. Ce qui n’incrimine bien évidemment en rien le droit de chacun d’organiser librement toutes sortes de manifestations et d’actions. Cependant, il ne faut pas escompter un résultat unitaire et rassembleur en continuant à employer les vieilles méthodes individualistes et exclusives. L’indulgence manifestée naguère à l’égard de certaines personnes ou associations de l’immigration qui avaient pris la fâcheuse habitude « d’entraîner » l’ensemble des acteurs dans des actions collectives, parfois improvisées au gré des humeurs, n’est plus admissible aujourd’hui. Les alibis invoqués hier (« faire le plein contre la dictature », taire nos divergences, et passer sous silence les critiques, par souci d’efficacité, etc.), ont totalement disparu après la fuite du dictateur et la victoire de la révolution.
La donne a, donc, radicalement changé. Ceux qui souhaitent véritablement contribuer au « chantier » démocratique tunisien à partir de l’immigration, doivent en prendre acte, se défaire une bonne fois pour toute des méthodes d’antan, et s’astreindre à respecter les règles et les exigences de l’action démocratique.
Les actions qui se rapportent aux questions d’intérêt commun, doivent, dorénavant, être le produit de la concertation et observer les impératifs de l’éthique du débat régissant les rapports entre acteurs égaux respectueux les uns des autres, si tant est que l’on souhaite sincèrement être rassembleurs ! La « politique du fait accompli » est inacceptable. L’imposition « d’office » de tel ou tel parti parmi les participants est, désormais, nulle et non avenue. Le choix de l’ordre du jour et des « thèmes » à débattre collectivement, tout comme les lieux qui doivent les abriter, ou l’heure à laquelle ils se tiennent doivent faire l’objet d’un accord préalable.
Enfin, il semblerait que certaines associations continuent à agir comme si elles étaient au dessus des partis politiques et supérieures à eux. Nous leur disons, encore une fois, que « les temps » ont changé, et que les partis jouent aujourd’hui en Tunisie (comme au sein des communautés tunisiennes établies à l’étranger) un rôle grandissant dans la transition et demain dans la construction de la démocratie. Le rôle de « tuteur des partis » que s’arroge telle association est caduc.
Les signataires du présent texte tiennent à réaffirmer, une fois de plus, leur attachement au travail collectif, et unitaire, et invitent avec insistance tous ceux que l’avenir démocratique, social et progressiste de la Tunisie post-dictatoriale, préoccupe, de conjuguer encore et toujours leurs efforts en vue de garantir davantage d’efficacité à nos actions communes.
SIGNATAIRES :
1. Hichem ABDESSAMAD (Historien, ex dirigeant de la FTCR)
2. Chadlia HAMMADI (Cadre, Militante associative, ex dirigeante de la FTCR)
3. Lakhdar LALA (Président de L’ATF)
4. Mourad GADHOUMI (Chef d’entreprise, Président de la Section France du PTT, ex dirigeant de la FTCR)
5. Hédi Ben Miled JILANI (Libraire, membre du Bureau politique du PTT)
6. Mourad ALLAL (Acteur de la société civile)
7. Houcine BARDI (Avocat, porte-parole du PTT-France, ex dirigeant de la FTCR)
8. Najet MIZOUNI (Universitaire, membre du PTT-France)
9. Jelloul BEN HAMIDA (Cadre, Militant associatif, ex Secrétaire Général de la FTCR)
10. Mohamed SMIDA (Espace Farabi)
11. Fatma BOUAMIED KSILA (Enseignante, militante associative)
12. Ezeddine BOUACHIR (ATF VAR)
13. Fitouri CHERIF (Entrepreneur, membre du PTT-France)
14. Nadia CHABANE (Militante féministe)
15. Abdessalam BEN BRAHIM (ETTAJDID France)
16. Wissem SOUISSI (Journaliste)
17. Kamel BARKAOUI (Universitaire, membre du PTT-France)
18. Saber MANSOURI (Universitaire)
19. Lazhar NECIRI (Ingénieur, membre du PTT-France)
20. Habib WARDA (Libraire, membre du PTT-France)
21. Azaiez NASR (Avocat, membre du PTT-France)
22. Khaled ABICHOU (ICI & LA)
23. Abderrahmane FRIHI (Militant associatif, membre du PTT-France)
24. Mohamed BARIRA (ATF 13)
25. Hatem BEDOUI (Médecin, membre du PTT-France)
26. Nasser JELLOUL (Cadre, membre du PTT-France)
27. Rabah ARFAOUI (ETTAJDID France)
28. Rachid Haddad (Membre du PTT-France)
29. Noureddine NAJJAR (Coordinateur, ATTAJDID – France)
30. Naila WARDI (Artiste, militante associative)
31. Kays JAZIRI (Militant associatif)
Tunisie: deux grands partis n’excluent plus un report des élections
AFP / 30 mai 2011 14h11
TUNIS – Deux grands partis politiques tunisiens, dont le mouvement islamiste Ennahda, favorables jusqu’ici au maintien des élections le 24 juillet, n’excluent plus un report du scrutin mais après concertation et consensus, ont affirmé leurs responsables lundi à l’AFP.
On ne peut plus parler de la date de 24 juillet pour l’élection de l’Assemblée constituante, a souligné Maya Jribi, secrétaire général du Parti démocrate progressiste (PDP).
L’essentiel maintenant est d’appeler à un consensus très large pour se mettre d’accord sur la meilleure manière d’arriver aux urnes, a-t-elle ajouté, plaidant pour une discussion entre le gouvernement et toutes les forces politiques.
Notre objectif n’est pas d’insister aveuglement sur la date de 24 juillet, mais nous voulons que cette date ne soit pas fixée par une seule partie mais après concertation et consensus, a renchéri Samir Dilou, un des responsables du mouvement Ennahda, crédité des meilleures intentions de vote aux prochaines élections.
Nous ne sommes pas convaincus par le calendrier électoral proposé par la Haute instance indépendante chargée des élections mais nous tenons à une démarche consensuelle, a-t-il ajouté.
Cette commission électorale avait annoncé jeudi le report du premier scrutin post Ben-Ali au 16 octobre, au lieu de 24 juillet, afin d’avoir suffisamment de temps pour l’organiser.
De son côté, le gouvernement tunisien de transition, qui plaidait jusqu’ici pour un maintien au 24 juillet, souhaite désormais parvenir à un consensus avec les partis politiques sur la date de l’élection avant d’accepter que celle-ci soit reportée, a indiqué samedi un de ses porte-parole.
Le président de la commission électorale, Kamel Jendoubi, s’est dit lundi très optimiste sur la possibilité d’aboutir à une décision finale cette semaine, en affirmant à l’AFP qu’une majorité des partis politiques ont été convaincus par les arguments de la commission la semaine dernière.
Des concertations ont été engagées par le gouvernement, on est dans une phase d’explication, a-t-il ajouté, en précisant que la commission était de son côté en train de développer (son) argumentaire.
Tunisie: un cadre de la sécurité « enlevé » sur la voie publique, selon son épouse
De The Associated Press – Le 30 mai 2011
TUNISIA, Tunisia — Un haut fonctionnaire de la police, Samir Feriani, a été interpellé dimanche sur la voie publique par « des collègues du ministère de l’Intérieur » après avoir dénoncé par voie de presse de « graves dysfonctionnements » au sein du département, a-t-on appris lundi auprès de son épouse Leïla.
Selon sa femme, « il était sorti tôt le matin dimanche pour acheter des cadeaux à l’occasion de la fête des mères, quand une voiture ayant à bord quatre personnes l’a percuté, l’obligeant à s’arrêter. Trois d’entre eux l’ont enlevé et conduit à la caserne militaire d’El Aouina (à Tunis) sans aucune explication et le quatrième a pris sa voiture ».
« Nous sommes restés sans nouvelles de Samir jusqu’au soir, quand nous avons appris par nos propres moyens qu’il a été arrêté », a ajouté Mme Feriani jointe au téléphone par l’Associated Press.
Selon cette dernière, les « collègues » qui l’ont enlevé sont des agents de la lutte antiterroriste. Ils faisaient partie du corps de la sûreté de l’Etat ou police politique, récemment dissout.
« Ce n’est que lundi matin vers 7h10 que j’ai été informée que mon mari était en état d’arrestation et que je pouvais le voir à la caserne d’El Aouina », a encore relaté Mme Feriani qui s’est élevée contre « la méthode arbitraire » avec laquelle son époux a été arrêté.
« C’est une opération planifiée, d’autant que son bureau a fait l’objet d’une effraction dimanche à la mi-journée et des documents y ont été dérobés », a-t-elle accusé en se référant à des témoignages de « collègues ». Elle a précisé qu' »aucune accusation ne lui (a) été signifiée ». « On ne sait pas quand il sera libéré et surtout de quoi il est coupable ».
La semaine écoulée, ce haut fonctionnaire de la sécurité avait publié dans le journal « L’Expert » deux lettres dans lesquelles il dénonçait de graves « dysfonctionnements » au sein du ministère. Il faisait notamment état de « la nomination à des postes sensibles au ministère de l’Intérieur de personnes impliquées dans des crimes à Kasserine (centre-ouest), avec preuves à l’appui ».
Selon le directeur de la publication, Abdellatif Ben Hdia, Samir Feriani a contacté « L’Expert » il y a deux semaines « pour attirer l’attention du grand public sur les dysfonctionnements au sein du ministère et la lenteur des procédures à l’encontre des policiers coupables ».
Une troisième lettre n’a pas pu être publiée en raison de « pressions » exercées sur l’imprimeur.
Intervenant sur la radio privée Chems FM, le responsable du journal a déclaré « craindre un retour des anciennes pratiques du ministère de l’Intérieur ».
Par ailleurs, l’hebdomadaire « L’Audace » fait état d’une lettre adressée le 12 mai par Samir Feriani au ministre de l’Intérieur lui demandant d’ouvrir une enquête sur la destruction « sur instructions » de responsables sécuritaires d’archives de ce département.
La missive disait enquêter sur les archives de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) « impliquant clairement (l’ancien président Zine El Abidine) Ben Ali avec le Mossad israélien ». Fuyant le siège de Beyrouth par l’armée israélienne, l’OLP s’était établie en Tunisie de 1982 à 1994.
Dans cette lettre, il demandait en outre « des rapports précis sur les opérations sales commanditées par les services tunisiens », citant notamment la tentative de meurtre du journaliste français de « Libération », Christophe Boltanski, le 12 novembre 2005 sur ordre de Ben Ali.
Contactée par l’AP, une source du ministère de l’Intérieur a nié la thèse de l’enlèvement, avançant que le prévenu a été arrêté sur réquisition du tribunal militaire.
« Après la réception de la lettre adressée au ministre de l’Intérieur qui contenait de graves accusations, Samir Feriani a été convoqué à l’inspection du ministère qui après son audition, a transféré l’affaire au tribunal militaire », a expliqué la source sécuritaire qui a requis l’anonymat. AP
AFP, le 30 mai 2011 à 09h54 GMT
Tunisie: grève illimitée dans le transport routier de marchandises
TUNIS, 30 Mai 2011 (AFP) – Les transporteurs routiers de marchandises tunisiens ont entamé une grève illimitée pour obtenir de meilleures conditions de travail et protester contre les licenciements abusifs, a indiqué lundi à l’AFP un responsable de l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT).
« La convention sectorielle des transports n’est pas appliquée » par les employeurs, a expliqué Mokhtar Hili, secrétaire général de la Fédération nationale des transports de l’UGTT.
Selon lui, la grève, entamée dimanche, est « suivie à 100% » dans le secteur, qui représente près de 700 entreprises et 14.000 employés en Tunisie.
« Les chauffeurs travaillent 12 à 13 heures par jour, et sont contraints, en plus de conduire, de charger, décharger les marchandises et de faire du gardiennage en dormant dans leur camion », a-t-il souligné.
En outre, « si un agent a un accident et qu’il y a un dégât, il doit payer la facture alors que le véhicule est assuré », a-t-il ajouté.
« Le patronat doit mettre fin aux abus. Avant la +révolution+ (ayant abouti en janvier à la chute du régime Ben Ali) ces pratiques étaient tolérées mais maintenant la dignité du chauffeur passe avant tout », a conclu M. Hili.
Vendredi, une réunion de concertation entre patronat et syndicalistes, organisée par le ministère des Affaires sociales, s’était soldée par un échec, selon l’agence officielle TAP.
Tunisie: quatre morts dans une collision entre un camion et un taxi
AFP le 30 Mai 2011
Tunis – Quatre personnes sont mortes et quatre ont été blessées lundi en Tunisie dans une collision entre un camion et un taxi, près de la ville de Mahrès, dans la région de Sfax (270 km au sud de Tunis), selon l’agence officielle TAP.
Le chauffeur du camion a quitté sa voie et percuté le taxi qui roulait dans le sens inverse, tuant quatre de ses occupants et en blessant quatre, selon une source sécuritaire interrogée par l’agence TAP.
L’accident serait dû à l’état de fatigue avancé du conducteur du poids-lourd, d’après cette source.
Trois blessés ont été admis au CHU Habib Bourguiba de la ville de Sfax, et le quatrième a été hospitalisé à Mahrès.
Reuters, le 29 mai 2011 à 13h04 GMT
Un Britannique rencontre le ministre libyen des A.E à Tunis
TUNIS, 29 mai (Reuters) – Un ancien responsable gouvernemental britannique, David Trefgarne, a eu un entretien avec le chef de la diplomatie libyenne Abdelati Obeïdi à Tunis, a déclaré dimanche à Reuters l’un des participants à la rencontre.
Le gouvernement britannique a démenti avoir été en contact avec des responsables du régime de Mouammar Kadhafi.
Lord David Trefgarne, qui fut secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères dans les années 1980 et préside aujourd’hui le Conseil britanno-libyen des affaires, organisme non gouvernemental, a vu Obeïdi samedi, a précisé le participant.
« Je peux confirmer la tenue de la rencontre. Elle a duré plus d’une heure », a déclaré Oliver Miles, ancien ambassadeur de Grande-Bretagne en Libye et vice-président du conseil britanno-libyen.
Il n’a pas donné de précisions sur la teneur de l’entretien, qui s’est tenu sur fond de pressions accrues de l’Occident pour que l’entourage de Kadhafi négocie une sortie du conflit libyen.
AFP, le 28 mai 2011 à 11h53 GMT
En Tunisie, le possible blocage des sites X ravive le spectre de la censure
Par Daphné BENOIT
TUNIS, 28 Mai 2011 (AFP) – La perspective du blocage en Tunisie de l’accès aux sites pornographiques, sur décision de justice, a provoqué une levée de boucliers sur la Toile, où nombre d’internautes tunisiens dénoncent un retour de la censure pratiquée sous le régime Ben Ali et l’avancée des islamistes.
Un tribunal a ordonné jeudi à l’Agence Tunisienne d’Internet (ATI) d’interdire l’accès à tous les sites X, à la suite d’une plainte déposée par trois avocats, pour lesquels ces pages présentent un danger pour la jeunesse et sont « contraires aux valeurs arabo-musulmanes ».
Depuis la levée de l’une des censures du net les plus sévères au monde, avec la chute en janvier du président Zine El Abidine Ben Ali, les Tunisiens peuvent librement surfer sur le web, sites X inclus. Sept d’entre eux figurent désormais parmi les 100 sites les plus visités en Tunisie.
La décision de justice a fait l’effet d’une bombe sur le Net, provoquant un vif débat entre ses partisans et détracteurs.
« Rendez-moi mon porno! », s’insurge Adam Jerbi sur la plate-forme de blogs Nawaat. « Je me demande de quel droit l’Etat peut décider pour moi, qui suis majeur et vacciné, des sites internet que je ne devrais pas consulter ».
« J’appelle mes concitoyens à la plus grande vigilance. Ceci est tout bonnement le retour en force de la censure. Ma liberté d’expression est en jeu », écrit-il.
« La question n’est pas porno ou pas! Mais plutôt censure ou pas », renchérit @bulletskan sur Twitter.
Pour une pléthore d’internautes, jaloux des libertés individuelles héritées de la révolution tunisienne, pas question de subir le « retour d’ammar404 », pseudonyme sous lequel les Tunisiens désignaient l’ex-censure sous Ben Ali.
« Nous avons vaincu l’une des plus sales dictatures du monde et même pas le temps de savourer notre bonheur d’être libres », déplore « Edicte ». « Ca commence par le net, après ça sera les boîtes de nuit, la plage, les sorties entre filles et garçons ».
Certains en sont persuadés: cette décision porte l’empreinte des islamistes tunisiens, dont le mouvement Ennahda (« Renaissance ») est crédité du meilleur score aux prochaines élections.
« Les +barbus+ se frottent les mains », commente « Pénélope » sur businessnews.com.tn.
« Arthur », lui, dénonce « l’apparition d’un ordre moral dont tout le monde sait parfaitement quels partis l’inspirent », et craint de « se retrouver dans quelques années avec un +Ministère du Vice et de la Vertu+ comme dans l’Afghanistan des talibans ».
Mais l’interdiction des sites pornographiques recueille aussi des suffrages.
« N’oubliez pas que nous sommes arabo-musulmans, on a des traditions, on a de la pudeur, ce genre de cochonneries n’a pas à être ouvert dans un pays comme le nôtre, on est pas en Occident », lance slim2212.
« Excellente initiative, Il y va de la sécurité de nos enfants », souligne un autre internaute.
Un argument balayé par les défenseurs d’une liberté d’expression totale: « Tout le monde sait que l’agence tunisienne fournit gratuitement les logiciels de contrôle parental », assure l’un d’eux.
L’interdiction des sites X, si elle entrait en vigueur, constituerait le deuxième cas de censure sur internet dans la Tunisie post-Ben Ali. Début mai, quelques profils Facebook ont été bloqués sur ordre d’un tribunal militaire, pour des motifs encore obscurs.
Cyberdissident emprisonné sous le régime Ben Ali, le blogueur Slim Amamou, nommé mi-janvier secrétaire d’Etat à la Jeunesse dans le gouvernement transitoire, a démissionné lundi, en critiquant notamment cette première affaire de censure.
Samedi matin, le porno était toujours accessible sur le web tunisien.
AFP, le 28 mai 2011 à 13h39 GMT
Obama félicite la Pologne pour son engagement en Afrique du Nord
VARSOVIE, 28 Mai 2011 (AFP) – Le président américain Barack Obama a félicité samedi la Pologne pour son engagement en Afrique du Nord, l’encourageant à y présenter ses propres transformations politiques et économiques opérées depuis un quart de siècle, lors d’un point de presse à Varsovie.
« Je suis reconnaissant pour l’aide de la Pologne à la Tunisie. Je sais aussi que le ministre des Affaires étrangères s’est rendu à Bengazi » en Libye, a déclaré le président Obama lors d’une rencontre avec des hommes politiques polonais.
Fin avril, à la demande du gouvernement polonais, Lech Walesa, chef historique du syndicat polonais Solidarnosc, s’est rendu à Tunis pour y apporter son « savoir-faire » en matière de « transition maîtrisée vers la démocratie ».
Le 11 mai, le ministre polonais des Affaires étrangères, Radoslaw Sikorski, a été le premier chef de la diplomatie d’un pays européen à se rendre à Benghazi où il a exprimé le soutien des Européens à la rébellion libyenne.
« Grâce à son succès extraordinaire en ce qui concerne la démocratie et l’économie de marché, la Pologne est un modèle, un exemple, et la transformation incroyable qui a été effectuée ici au cours des 25 dernières années, a fait de ce pays un leader en Europe », a déclaré M. Obama.
Il a remercié la Pologne pour son action en faveur de « la promotion de la démocratie non seulement dans la région mais aussi dans le monde, par ses paroles et par son propre exemple ».
Le président Obama a également exprimé son « impatience » de voir la Pologne prendre le 1er juillet la présidence tournante de l’Union européenne.
« Les pays comme l’Ukraine comptent sur la Pologne qui exerce une influence favorable sur le chemin de la modernisation et des réformes démocratiques », a-t-il expliqué.
AFP, le 30 mai 2011 à 12h37 GMT
Le Maghreb ne peut faire l’impasse sur l’investissement étranger (Lellouche)
ALGER, 30 Mai 2011 (AFP) – Le secrétaire d’Etat français au Commerce Pierre Lellouche a déclaré lundi à Alger que « le Maghreb ne pouvait pas faire l’impasse sur l’investissement étranger » en inaugurant un forum de partenariat franco-algérien rassemblant près de 700 entreprises.
M. Lellouche, venu avec l’ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin pour ce forum « inédit » de par son ampleur entre les deux pays, a évoqué dans son intervention les révolutions arabes et le rôle de l’Algérie, de l’Europe et de la France sur cette scène jugeant qu’on « ne pouvait plus parler de commerce et de développement sans parler aussi de géopolitique ».
« Dans un monde arabe en recomposition, l’Algérie est au cœur de l’échiquier du fait de son poids démographique, de son statut de 3e pays producteur de pétrole en Afrique et de 6e producteur mondial de gaz », a-t-il souligné.
« L’Algérie a un destin et une responsabilité de puissance régionale », a-t-il insisté soulignant que la France avait « tout à gagner d’une Algérie forte et pleinement intégrée dans la communauté euro-méditerranéenne ».
Après avoir tardé à réagir à la révolution tunisienne, Paris s’est depuis bien placée dans son soutien aux révolutions arabes. M. Lellouche s’était rendu lui-même en Egypte post-Moubarak en avril pour l’assurer de l’aide de la France. Celle-ci a été le premier pays à reconnaître le Conseil national de transition (CNT) libyen qu’elle soutient militairement aux côtés de l’Otan et elle est très critique envers la répression des manifestations menées par le régime de Bachar el Assad en Syrie.
A Alger, M. Lellouche a appelé à en finir avec les douleurs du passé. « Ceux qui regardent dans le rétroviseur se trompent », a-t-il dit rappelant que 65% des Algériens avaient moins de 30 ans et cherchaient plutôt à regarder l’avenir que de vivre dans la douleur du colonialisme passé et de la guerre de libération, il y a 50 ans.
Dans ce partenariat avec l’Algérie « amie », « respectée », que la France est prête à « accompagner sur le chemin du développement dans un rapport équilibré et mutuellement bénéfique », il a évoqué brièvement les principes de la « bonne gouvernance ».
Le forum de deux jours résulte de six mois de négociations sur la coopération économique dirigées par l’ancien Premier ministre français Jean-Pierre Raffarin et le ministre de l’Industrie, de la PME et de la Promotion de l’Investissement algérien Mohamed Benmeradi.
Ce dernier a mis l’accent sur toutes les récentes mesures prises par les autorités pour relancer l’économie, dont la réunion tripartite samedi entre gouvernement, patronat et syndicat officiel qui ont convenu de mesures pour dégripper la machine, soulignant la volonté des autorités de « faire bouger les lignes ».
« Il y a un nouveau climat entrepreneurial en Algérie », a-t-il insisté.
La part de marché de la France en Algérie tourne autour de 15%, contre 25% il y a 20 ans. Elle reste le premier investisseur étranger hors hydrocarbures et les échanges s’élevaient en 2009 à 9 mds d’euros.
L’Algérie est déterminée à sortir de sa dépendance des hydrocarbures qui lui assurent 98% de ses recettes en devises.
Chefferies politiques tunisiennes et les objectifs de la Révolution : Foutaises !
Abdo Maalaoui, Montréal, Canada, Opposant
Après notre dernière mission en Tunisie, notre tournée dans les régions pauvres, les conférences que nous avons animés du Nord au Sud de la Tunisie et les rencontres que nous avons eu avec des miliers et des milliers de jeunes tunisien(ne)s, je suis convaincu que les Stars politiques tunisiennes, qu’on nomme aimablement chef de parti politique, (le Ministre de l’Intérieur a délivré 81 visas) doivent sagement faire une alliance stratégique si elles veulent que leur parti survivra… Je sais que l’homme politique tunisien est orgueilleux et il n’a pas l’habitude de partager ses idées avec d’autres et encore moins de voir une autre personne prendre sa place…
Parce que toutes ses Stars politiques cherchent avant tout la promotion de sa bonne image médiatique et surtout soigner ce que les autres vont dire d’elles.! Mais aussi, ses stars politiques tunisiennes cherchent le bénéfices marginaux du POUVOIR …
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C’est de la foutaise de me dire que ses Stars politiques tunisiennes cherchent le bonheur du peuple et elles veulent aider les veuves et les enfants orphelins …
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C’est de la foutaise de parler de démocratie quand on a une culture de la culte de personnalité (le parti de Sidi Ghanouchi, le parti de Dr Sidi Marzouki, le parti de Sidi Chebbi – même si Maya est la petite chefette, le parti de Dr Sidi Ben Jaafar, le parti de Sidi Morjen, le parti de Sidi El Borni, etc.. «walayas Allah al Salihines»;
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C’est une autre foutaise de me dire quelles veulent réaliser les objectifs de la Révolution dont 90% de nos stars politiques tunisiennes ne savent même pas d’une façon claire et précise : c’est quoi les objectifs de la Révolution ?
Concours national : Je peux mettre au défi si les 81 chefs de partis tunisiens actuel peuvent m’écrire noir sur blanc d’une manière précise : les objectifs de la Révolution ! J’ouvre un concours à ses Stars politiques tunisiennes (qui sont tous des hommes en passant !), un séjour d’une semaine au Canada sur les frais de la Reine !
C’est une autre mascarade mes sœurs et mes frères tunisiennes et tunisiens : Vous voulez la VÉRITÉ :
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les morts sont morts ;
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les opprimés sont opprimés ;
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les torturés sont torturés ;
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les pauvres vous allez rester encore pauvres ;
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Tunisnews restera toujours le médium des égarés, des révoltés, des abusés, des violés politiques, des opposants, des sans voix, des futurs amers et exilés ;
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et moi je reste toujours l’opposant à ces chefs de la Bêtise politique tunisienne.
Un ex-opposant qui revient à son poste : Abdo Maalaoui : Opposant
La Tunisie et la grand méchant loup islamiste
publié le 30/05/2011 – mis à jour le 30/05/2011
ParJDEMPLOI Jamel DRIDI « Un pour Tounes, Tounes pour un! »
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La recette du loup islamiste a permis pendant des années d’arnaquer le peuple tunisien. Aujourd’hui elle est périmée. Pourtant certains continuent de l’utiliser au risque de faire le jeu de ceux qui, par le passé, ont confisqué la démocratie en Tunisie.
Si le diable pouvait parler, il dirait sans doute qu’il est énormément déçu et jaloux de ne pas être un islamiste ! En effet, lui qui aime qu’on parle de lui comme étant le plus méchant, le plus dangereux, le plus tout ce que vous voulez de négatif, a été détrôné durant ces 30 dernières années par le grand méchant loup islamiste. Un loup islamiste qu’on nous a servi à toutes les sauces et dans toutes les langues, dans tous les pays aussi. Ici pour défendre la laïcité, ailleurs pour protéger la condition féminine, là pour se préserver du terrorisme…. En Tunisie surtout où le cuisinier en chef Ben Ali savait le préparer mieux que quiconque. En slata méchouia (salade tunisienne typique et piquante), en couscous, en sucré, en salé, il en connaissait tous les secrets. Ce fut un chef cinq étoiles au point tel qu’avec ce plat il a pu justifier de tous ses abus liberticides et de l’asservissement du peuple tunisien. Ben Ali a sans doute réussi la plus grande escroquerie du siècle grâce à cet épouvantail islamiste (avec la complicité passive de certains amis occidentaux qui comme nous le verrons plus bas viennent de changer de fusil d’épaule en disant qu’il fallait dorénavant dialoguer avec tout le monde, même avec les islamistes). Mais, maintenant qu’elle est connue, on aurait pu penser que plus personne n’oserait brandir sérieusement cette escroquerie de la menace islamiste. Eh bien non. Certains consciemment ou involontairement retombent dans les mêmes travers. Ce qui est le plus surprenant, c’est que ce sont sans doute ceux qui, hier, ont le plus soufferts de ce mensonge/prétexte et des méthodes des fausses accusations, à savoir les intellectuels qu’ils soient issus des partis politiques ou des médias qui nous remettent, aujourd’hui, cette menace islamiste sur la table. Des journalistes cèdent la place à la méthode du loup au lieu de s’arrêter aux faits Expliquons-nous. Il y a quelques jours, en lisant la presse tunisienne, surtout électronique, on a pu constater les nombreux sujets sur la censure du porno sur internet en Tunisie. Les articles sont intéressants et ont raison d’aborder le sujet car dans une société libre et forte, il n’y a pas de sujet tabou. Le problème n’est pas là mais réside dans le fait que beaucoup de journalistes semblent céder la place à la bonne vieille méthode du loup islamiste au lieu de s’arrêter aux faits comme le leur impose la déontologie journalistique. Ils critiquaient les méthodes d’autres journalistes sous Ben Ali mais, eux, font du journalisme 100% Ben Ali. Pour ce qui est des faits, on commence toujours par nous dire que ce sont trois avocats qui ont demandé à la justice cette interdiction. Puis on nous dit qu’on devine qu’ils sont islamistes (notez bien que l’on n’est pas sur qu’ils le soient ; de toute façon, on voit mal trois avocats se présenter comme islamistes même s’ils le sont vraiment). Et puis ensuite sans que l’on comprenne le lien avec l’affaire du porno on nous dit qu’on doit rester vigilant car on a quitté une dictature et qu’on ne souhaite pas en tomber dans une autre islamique…..(A noter au passage que, partout dans le monde, il y a des milliers d’associations qui luttent contre la pornographie ou la prostitution et la majorité n’ont aucun lien avec aucune religion quelle qu’elle soit) Je pense que tout tunisien est d’accord avec cette affirmation. Plus personne ne veut de dictature en Tunisie qu’elle soit islamiste ou pas ; mais est-il sérieux et professionnel de jeter sur la place publique, comme cela, sans preuve, de telles affirmations ?! est-ce responsable par les temps qui courent ? n’agit-on pas la comme le faisait il y a si peu de temps l’ancien régime ? Lequel inventait des menaces islamiques récurrentes pour mieux asseoir son pouvoir et n’hésitait pas aussi à dire que telle journaliste était une prostituée ou que tel homme politique en exil était un agent des services secrets d’un pays étranger. Si ces avocats étaient des islamistes, iraient-ils réclamer leurs droits devant un tribunal qui, à ce que je sache, ne juge pas selon la charia ? ou le seul fait peut-être d’être musulmans pratiquants les rend soupçonnables ? Comme on va le voir plus bas, je ne défends aucunement Ennahda ou tout autre groupe islamique. Mais comme tout tunisien qui s’est « fait rouler une fois dans la farine », je ne souhaite pas goûter une deuxième fois au même mensonge. Surtout que ce mensonge a servi à empêcher toute velléité démocratique et a renforcé justement les courants islamiques.. La peur du loup, totalement improductive Mais d’abord pourquoi y a t-il eu le recours à ce procédé ? Ce fut une façon de rendre infréquentable le mouvement Ennahda et de stigmatiser ses théories en jouant sur la peur. Le problème est que ce fut une stratégie totalement perdante. Non seulement, le mouvement islamiste tunisien est encore plus fort qu’à la fin des années 1980 mais en plus il a acquis une aura populaire qui fait de lui un favori politique très populaire. Pourquoi ? La première raison est que le courant politique islamique impitoyablement combattu et rendu infréquentable par l’ancien régime n’a jamais pu appliquer son programme. Ainsi, il a acquis une position idéalisée dans l’imaginaire populaire. La position de l’Islam historique datant de l’ère du Prophète musulman Mohammed vecteur d’honnêteté et de probité. Ainsi, les islamistes, par cette virginité politique forcée, sont indirectement devenus synonymes d’espoir face à un système ou 5% de la population se partageait 90 % des richesses. Au final, en l’empêchant d’être confronté à la dure réalité de l’action politique pratique, au lieu de l’affaiblir, on l’a renforcé ! La seconde est qu’au fil du temps, et pas qu’en Tunisie, les peuples se sont rendus compte que les campagnes de dénigrement et d’éradication dont ont été victimes les courants politiques islamistes et le gonflement de la menace n’a servi qu’à servir les intérêts de dictateurs, de leur proches ainsi que de ceux de pays occidentaux. L’épouvantail islamiste ne fut qu’un bon prétexte pour empêcher la démocratie et n’a pas apporté la prospérité économique de manière égalitaire au peuple, seuls une minorité s’est enrichie. Les peuples l’ont bien vu et ont bien compris que les partis politiques à obédience islamique, à condition de respecter les règles du jeu démocratique, n’étaient pas une menace mais une alternative possible comme en Turquie. Surtout, sans nier le fait – et ceci les islamistes doivent l’accepter aussi – qu’il n’y a pas que des musulmans en Tunisie, on a « oublié » que la Tunisie était quand même un pays avec une majorité de musulmans depuis des siècles. Le pouvoir allant même jusqu’à presque interdire, pour un musulman lambda, de pratiquer sa religion en niant le principe de la liberté de culte (arrachage des voiles des femmes en pleine rue, arrestation et torture de ceux qui allaient trop souvent à la mosquée….). Ainsi, en 1986, pour ceux qui connaissent bien la Tunisie, il n’y avait pas plus d’islamiste que ça même s’ils existaient. Qu’en est-il aujourd’hui, 26 ans plus tard malgré la chasse qui a été faite aux islamistes ? sont-ils moins nombreux ? sont-ils moins forts qu’hier ? ou au contraire s’imposent-ils comme une force avec laquelle il va falloir compter ? Qui est responsable de cela si ce n’est cette rhétorique du loup islamiste ! Cela devrait être bien médité. Recommencer la même erreur que dans le passé en tentant d’empêcher le courant islamiste de participer au jeu démocratique ne fera que le renforcer encore plus ; tant intrinsèquement qu’aux yeux du peuple ! Dans certains milieux tunisiens, on commet donc une erreur stratégique et de sens en continuant à brandir cette fausse rhétorique. Surtout, on continue d’appliquer les méthodes de l’ancien système. Une erreur improductive et tellement à contre courant d’ailleurs que, comme pour se racheter, les anciens défenseurs en chef de cette rhétorique font volte face et draguent ouvertement Ennahda comme le fait actuellement officiellement l’administration américaine. En définitive, si l’on veut rester crédible, il est nécessaire d’arrêter d’agiter cet épouvantail islamiste. Cela ne fait que du vent. Au lieu de cela, il convient plutôt de mettre sous les projecteurs le programme politique de tout groupe à idéologie musulmane (d’ailleurs cet examen critique vaut pour tout groupe qui se dit apte à diriger la Tunisie qu’il soit islamiste ou non). S’il y a masques, c’est la meilleure façon de les faire tomber. Pas de procès d’intention mais un examen critique du programme S’abstenir d’émettre des hypothèses infondées n’exclut pas un dialogue critique concernant le programme politique. En savoir plus dans le détail sur le programme et poser des questions précises permet davantage de démasquer les arrières pensées. Cela permet de connaître le positionnement par rapport à des sujets précis et éventuellement s’en servir demain si le programme réalisé est en contradiction avec ce qui avait été dit quelques mois ou années plus tôt. Cela permet surtout de savoir (et je crois que c’est surtout ce qui intéresse le peuple tunisien) s’il y a un programme économique et sociétal sérieux permettant de sortir la Tunisie du marasme dans lequel elle se trouve. A fortiori si le groupe islamiste en question, tant par son organisation que par le nombre de ses sympathisants, semble être un acteur de premier plan et indique clairement qu’il souhaite respecter les règles démocratiques. Surtout qu’en Turquie le gouvernement islamique a clairement réussi son pari. La Turquie a ainsi acquis ses galons internationaux tant au niveau diplomatique qu’économique alors qu’au départ il y a eu beaucoup de bruits et de critiques autour de l’AKP. Traiter par conséquent le parti islamique tunisien de cette façon en le montrant comme étant un loup pour la liberté et la démocratie n’est ni juste ni légitime. C’est aussi mépriser la démocratie puisque ce parti représente une partie non négligeable de la population au vu du nombre de ses sympathisants et membres. Aucun amoureux de la liberté n’acceptera de diktat islamiste mais il n’acceptera pas non plus les mêmes techniques mensongères reposant sur la peur qui étaient utilisées hier. Un prétexte pour stopper la révolution tunisienne ? Le loup islamiste tunisien n’existe pas. Même si ici ou là on essaie de lui attribuer des actes graves qui se déroulent en Tunisie alors que ces actes relèvent en réalité des crimes de droits commun. Les loups de l’ancien régime existent eux bel et bien et font tout pour garder leurs privilèges. Ils gangrènent par leur corruption et leurs mauvaises habitudes anciennes le système tunisien. Il faut d’ailleurs souligner que le fait de continuer à brandir la menace du loup islamiste leur permet d’être tranquille parce que les projecteurs ne sont pas braqués sur eux !! (Cela est-il voulu ?) En tous cas ce sont bien ces loups qui constituent un risque pour la stabilité de la Tunisie. Le mécontentement populaire face au fait qu’ils ne soient toujours pas jugés l’atteste et risque de faire descendre de nouveau les gens dans la rue. Il serait plus judicieux et courageux de s’attaquer à ce type de loups bien réels et beaucoup plus dangereux qu’une hypothétique « menace fantôme », fusse –t’elle islamiste. Sauf à vouloir, comme dans le passé, avec cette méthode du loup islamiste, recommencer une nouvelle campagne d’éradication des islamistes en leur faisant porter le chapeau pour des actes graves montés de toute pièce et au final installer de force un pouvoir liberticide et dictatorial. Le procédé serait bien grossier et les risques que le courant Ennahda ainsi qu’une partie du peuple tunisien ne se laisse pas faire réels. Ce serait en tous cas la moins bonne des solutions pour ramener la sécurité ainsi que la stabilité politique et économique dont a besoin aujourd’hui la Tunisie.
(Source: les Echos le 30 mai 2011)
Lien : http://lecercle.lesechos.fr/economie-societe/international/221135488/tunisie-et-grand-mechant-loup-islamiste
L’ombre de Ben Ali plane sur la presse tunisienne
Le secrétaire général de Reporters sans frontières revient de Tunis. Jean-François Julliard est partagé entre l’enthousiasme de la récente révolution et l’inquiétude d’assister au retour des vieux réflexes autoritaires.
La presse tunisienne est libre. Plus libre que sous Ben Ali. Cela ne fait aucun doute et personne ne le conteste. Pourtant, beaucoup de Tunisiens craignent de ne pas profiter bien longtemps de cette liberté. Pour eux, elle pourrait s’évanouir aussi soudainement qu’elle est apparue.
Le paysage médiatique peine à évoluer. Dans les kiosques, deux ou trois nouveaux titres seulement. En dehors du journal de l’ancien parti gouvernemental, les quotidiens historiques sont toujours là. Le contenu a changé mais les noms, les signatures et même la maquette restent identiques. A la télévision, rien de neuf. Aucune nouvelle chaîne n’a été lancée depuis la chute de l’ancien régime. Idem pour la radio. Une centaine de demandes de création de radios ou télévisions ont été déposées. Elles sont en cours d’examen, mais cela prend du temps. Plus de temps que les Tunisiens le pensaient.
Les journalistes de province sont les oubliés de la révolution médiatique. Pour eux, rien n’a changé. A Radio Sfax ou Radio Monastir, deux stations publiques régionales, l’information vit encore sous l’ère Ben Ali. Les conférences de rédaction n’existent pas. Les ordres viennent d’en haut et les journalistes les exécutent. Aucune discussion sur les choix des sujets, ni sur l’angle à adopter. Le débat est absent au sein des équipes, autant qu’à l’antenne.
Pire: dans certaines radios, les dirigeants —fervents défenseurs de Ben Ali avant sa chute le 14 janvier 2011— se vantent d’être aujourd’hui les vrais révolutionnaires, ceux grâce à qui la liberté de la presse existe en Tunisie. Pour la plupart, ils ne sont pas journalistes, n’ont jamais pratiqué ce métier et n’ont pas l’intention de commencer aujourd’hui. Pour eux, le recueil de témoignages ne sert à rien, pas plus que le recoupement des sources. Et ceux-là tiennent à l’écart les bons éléments, tirant vers le bas la qualité de l’information dans les régions.
Les journalistes indépendants historiques (Sihem Bensedrine, Taoufik Ben Brik…) ne se contentent pas d’une liberté en demi-teinte. Ils dénoncent une apparence de révolution et un système toujours en place.
Certes, la presse étrangère est désormais présente. Impensable auparaavant, les Tunisiens peuvent désormais lire sans se cacher Le Canard enchaîné ou Le Monde. En revanche, Charlie Hebdo a déjà fait savoir que la publication ne serait plus vendue dans le pays. Un numéro de l’hebdomadaire satirique a été interdit en raison de caricatures jugées trop dures envers la religion musulmane. La direction a préféré cesser sa distribution en attendant des jours meilleurs.
D’autres anicroches ont été recensées. Des pages Facebook ont par exemple été censurées à la demande de la justice militaire. L’Agence tunisienne d’Internet a décidé de jouer la transparence en affichant ouvertement la réquisition du juge d’instruction militaire. Le blogueur Slim Amamou, propulsé secrétaire d’Etat à la Jeunesse et aux Sports, a jeté l’éponge pour retourner à ses anciennes activités. Lui aussi a dénoncé un retour de la censure.
L’autorité de transition planche sur trois textes essentiels: une loi sur la presse débarrassée de ses dispositions les plus liberticides, un Freedom of Information Act à l’américaine qui permettrait une plus grande transparence, et une loi sur l’audiovisuel instituant un CSA local. Mais le temps presse. Si les trois textes ne sont pas adoptés avant l’élection de la Constituante, ils seront renvoyés à une date ultérieure. Et le risque est grand de voir les vainqueurs sortis des urnes reprendre un travail déjà accompli, mais peut-être pas à leur goût. Les partis politiques hostiles aux libertés n’ont pas déserté la Tunisie.
Il n’est pas trop tard, mais il faut agir vite. Les journalistes tunisiens ont besoin de tout: formation, moyens, garantie d’indépendance, amélioration des conditions de travail et un management à la hauteur. Si on ne les aide pas, les vieux réflexes autoritaires de contrôle de l’information vont refaire surface. Et la révolution tunisienne aura perdu l’un de ses plus précieux acquis.
Jean-François Julliard, secrétaire général de Reporters sans frontières
(Source: SlateAfrique le 30 mai 2011)
Lien: http://www.slateafrique.com/2323/presse-tunisienne-l-ombre-de-ben-ali-plane
Appui budgétaire exceptionnel de 500 millions de dollars de la Banque africaine de développement pour la Tunisie
Le Conseil d’administration de la Banque africaine de développement (BAD) a approuvé aujourd’hui un prêt de 500 millions de dollars afin de soutenir le gouvernement tunisien dans la phase de transition d’après la révolution. L’objectif est d’aider à restaurer la stabilité socio-économique en Tunisie et de permettre une croissance mieux distribuée et bénéfique pour tous les Tunisiens.
Ce programme de soutien d’urgence sera déboursé rapidement et en une seule fois. Cette nouvelle approche permet à la Banque africaine de développement de mieux répondre aux besoins d’urgence des pays africains.
Ce financement de la BAD fait partie d’un programme de 1.4 milliard de dollars financé par la Banque mondiale (500 millions de dollars), l’Union européenne (90 millions d’euros) et l’Agence française de développement (185 millions d’euros).
Le Premier Ministre tunisien Beji Caïd Essebsi, a salué la Banque africaine de développement, comme première institution financière à avoir apporté son soutien au pays juste après la révolution du 14 janvier 2011. « La Tunisie apprécie tout particulièrement le soutien accordé par la BAD, a dit le Premier Ministre Essebsi à Donald Kaberuka, President de la Banque africaine de develoopment, quand il a recu Monsieur Kaberuka en avril dernier.« La BAD a fermement soutenu la Tunisie pendant des années et en particulier, dans les mois difficiles que nous venons de traverser, »a-t-il ajouté.
Donald Kaberuka a déclaré: « La Banque africaine de développement se tient aux côtés des peuples de la Tunisie et de l’Afrique du Nord pendant cette période importante, et la banque pourrait offrir de cinq à sept milliards de dollars pour soutenir la transition économique de la région dans les prochaines années vers une croissance plus forte et bénéficiant à tous. »
Cette opération de prêt répondra immédiatement aux exigences des Tunisiens exprimées si fort pendant la révolution. Elle comprend trois piliers : la réduction des disparités régionales en améliorant l’accès aux services sociaux dans les régions mal desservies, la création et le maintien des emplois ainsi que le renforcement de l’écoute des citoyens et de leur responsabilisation.
Une des priorités de cette opération de soutien est d’aider le gouvernement tunisien à réduire le chômage des jeunes, en particulier parmi les nouveaux diplômés. Une autre priorité est de réduire les inégalités entre riches et pauvres, en particulier entre les régions côtières plus riches et les régions de l’intérieur plus pauvres. Jacob Kolster, directeur régional de la BAD pour la Tunisie, la Libye et l’Egypte, a déclaré : « Investir dans la participation et la responsabilisation des citoyens et restaurer un climat propice à l’investissement sont essentiels pour une croissance économique équitable. Cela créera un nouveau sentiment d’espoir pour les Tunisiens et de confiance en l’avenir. » Ces défis sont amplifiés par les conséquences de la révolution, en particulier la baisse des revenus du tourisme, le gel des investissements et la croissance du chômage.
La Banque Africaine de développement travaillera en étroite collaboration avec le gouvernement tunisien, aux niveaux national, régional et local, comme avec la société civile, pour s’assurer que les objectifs du programme sont atteints, avec des résultats clairs et concrets sur le terrain, surtout dans les régions les plus pauvres.
(Source: AfricanManager 30-05-2011)
Selon le 25ème rapport de la cours des comptes
On payait des « imams » qui sont morts ou déchus
Des primes ont continué à être octroyées à des cadres qui se sont avérés par la suite décédés ou déchus de leurs fonctions depuis une longue période
● On constate la vacance de 1.108 postes à la fin de l’année 2008 concernant 240 imams prédicateurs, 306 imams «khams», 324 «muezzins» et 238 préposés à l’entretien des mosquées.
● Des primes ont continué à être octroyées à des cadres qui se sont avérés par la suite décédés ou déchus de leurs fonctions depuis une longue période.
Les rapports de la cour sont devenus enfin publics, suite à une décision du président temporaire, prise lors du conseil des ministres. La cour des comptes est un organisme du conseil d’Etat, qui est chargé d’examiner les comptes et apprécier la gestion de l’Etat, des collectivités locales, des établissements et entreprises publics, ainsi que de tous les organismes dans lesquels l’Etat, les collectivités locales, les établissements et entreprises publics détiennent une participation au capital. Dans ce cadre la cour des comptes effectue chaque année des missions d’inspection et de contrôle et livre des rapports. Sous l’ère du président déchu, ces rapports étaient présentés en fanfare, et n’étaient pas publics, pourtant ils recèlent des informations importantes concernant la mauvaise gestion dans certaines structures. Dans le 25ème rapport couvrant la gestion de 2009, la cour des comptes a examiné la gestion du ministère des affaires religieuses, et a soulevé certaines dérives inacceptables. En effet, on payait des imams qui sont morts, et on n’a aucune idée sur les mosquées en cours de construction. Une anarchie qui dénote d’une mauvaise gestion qualifiée. Les mosquées sont aujourd’hui au cœur de la polémique qui va peser dans les prochaines élections.
La gestion des cadres et des monuments religieux
L’examen de la gestion des cadres chargés du fonctionnement et de la protection des monuments religieux classés comme «monuments religieux pris en charge par l’Etat» a permis de constater la vacance de 1.108 postes à la fin de l’année 2008 concernant 240 imams prédicateurs, 306 imams «khams», 324 «muezzins» et 238 préposés à l’entretien des mosquées.
Il ressort des investigations, également, que des primes ont continué à être octroyées à des cadres qui se sont avérés par la suite décédés ou déchus de leurs fonctions depuis une longue période; les changements les concernant n’ayant pas été communiqués à temps au Ministère. Pour régulariser cette situation, celui-ci a procédé à l’émission d’ordres de reversement dont le montant s’est élevé au cours de la période 2006-2008 à environ 238 mD.
D’après la lecture du rapport, il s’avère que le ministère n’est pas bien informé sur les mosquées et lieux de culte qui sont construits. En effet, la cour des comptes a constaté des défaillances au niveau de l’établissement de la carte des monuments religieux servant de base à la fixation, notamment, du nombre de monuments à créer. Selon le rapport, le Ministère n’est pas toujours tenu informé des nouvelles créations, ni du commencement de l’exécution des travaux, ni de l’octroi des autorisations de souscription pour leur construction, ce qui le contraint à intégrer ces monuments dans la carte en question à titre de régularisation.
Au niveau de la maintenance des monuments religieux, le ministère ne semble pas maitriser la situation, puisqu’il débloque de l’argent à cet effet, sans savoir s’il était consommé ou non, et sans tenir compte des collectes auprès des donateurs généreux. Selon le rapport, il a été observé que la reprogrammation des reliquats des crédits transférés dans les budgets des Conseils régionaux s’est effectuée, dans plusieurs cas, sans l’approbation du Ministère, ce dernier n’ayant pas reçu communication du programme d’utilisation de ces reliquats. Le total des crédits non utilisés des années précédentes et des crédits transférés en 2008, au titre de l’entretien et de l’équipement, a atteint 4,4 MD, consommés à hauteur de 52%. Une situation de mauvaise gestion des deniers publics, dans laquelle vivait l’administration publique, au moment où on avait besoin de chaque dinar pour créer de l’emploi.
L’inspection des «kouttebs»
Les «kouttebs», que la majorité des Tunisiens ont fréquenté durant leur enfance, semblent hors contrôle du ministère des affaires religieuses. Selon le rapport, le nombre des «kouttebs» a atteint, à fin septembre 2009, environ 1.051 «kouttebs» fréquentés par 25.000 enfants. Plusieurs inspections sont faites sur l’activité de ces institutions qui n’ont pas abouti à des résultats probants.
Le rapport de la cour des comptes constate à travers l’exploitation d’un questionnaire élaboré par la Cour des comptes, que certains inspecteurs régionaux des affaires religieuses ne procédaient pas à la transmission des rapports relatifs aux visites d’inspection qu’ils ont effectuées. D’un autre côté, les rapports d’inspection communiqués au Ministère ne mentionnent pas toujours les données complètes et détaillées qui permettent d’évaluer la situation de ces espaces et de suivre le rythme d’exécution du programme en vue de développer le secteur.
Le rapport relatif au diagnostic du ministère relève, contre toute attente, l’inactivité de l’inspection générale et la mauvaise gestion au niveau des systèmes d’information à travers la non maîtrise de certaines applications.
La mission de contrôle a observé que le Ministère ne détenait pas le dossier administratif de certains cadres exerçant dans plusieurs mosquées et «masged» de différents gouvernorats. Elle a relevé également que certains dossiers de cadres en activité ne comportaient pas toujours les pièces prévues par le manuel de gestion des personnels en charge des monuments religieux.
Les lieux de culte après la révolution
Nous avons soulevé le point concernant l’activité du ministère des affaires religieuses pour mettre la lumière sur ce qui s’est passé, et se passe actuellement dans les mosquées tunisiennes. En effet, depuis la révolution plusieurs «imams» ont été changés par force et certains ont été chahutés lors de la prière du vendredi. Des commissions ont été créées pour la gestion des mosquées sans recevoir d’ordre et de procuration de la part du ministère. Les mosquées sont même devenues des lieux de cours particuliers et de soutien, et de cours pour les analphabètes, et des lieux de conférences. Des rencontres de membres de partis à tendances islamistes se tiennent dans les mosquées, sans autorisation ou permission. La polémique est soulevée depuis la révolution sur l’utilisation des lieux de culte pour faire de la propagande politique, et qui n’a pas été tranchée dans la pratique jusqu’à présent, surtout en la présence d’un silence impuissant de la part du ministère des affaires religieuses.
Ce ministère est appelé aujourd’hui à se départir des simples communiqués et appels impuissants, et reprendre en main la gestion des mosquées afin d’éviter les dérapages, surtout que la Tunisie se prépare à des élections historiques. Le rapport de la cour des comptes a tiré la sonnette d’alarme, la révolution a soulevé plusieurs problèmes, qu’il est urgent de résoudre avant qu’il ne soit trop tard, et que d’autres structures prennent les choses en main, car «la nature a horreur du vide».
A.T.
(Source : « L’Expert » (Quotidien économique – Tunis), le 13 mai 2011)
La révolution tunisienne et l’émergence d’un rap réactionnaire
Fayçal Abroug (*)
L’appel du rappeur Psycho M au meurtre du cinéaste Nouri Bouzid, accusé d’orienter les jeunes vers les valeurs de l’Occident, ne devrait pas être pris à la légère.
Un rappeur qui mérite amplement son surnom a tenu, lors d’un meeting, des propos pouvant obtenir facilement droit de cité dans un discours fasciste et néonazi, devant un parterre surexcité – du moins en partie au regard des images diffusées, à titre d’information, par quelques chaines de télévision – et prêt à en découdre par les armes avec un cinéaste tunisien désigné nommément sous les cris hystériques d’Allahou Akbar, et prêt probablement à lapider les mécréants de tout bord: cinéastes, hommes et femmes de théâtre, actrices, écrivains, poètes, chanteurs, peintres, et la liste est loin d’être exhaustive. Je parle délibérément de propos et non de chanson et encore moins de musique. De fait, il lance un appel au meurtre, à la liquidation à la kalachnikov du cinéaste dont il ne partage pas les opinions si on peut parler en l’occurrence d’opinion.
Ce rappeur dont le rap est, semble-t-il, monnayé politiquement par certains, n’est malheureusement pas un cas isolé; d’autres aussi, selon ceux qui connaissent ce milieu, sont adeptes de l’idéologie de la mort, quoique d’une manière timorée.
La justification est pire que la faute
En attestent les propos tenus par un autre rappeur, propulsé au rang d’héros national voire international, sur un plateau de télévision, dimanche 22 mai, sur une chaine qui s’est intronisée vox populi et qui nous rappelle inlassablement, avec une modestie au-dessus de tout soupçon, à travers un slogan publicitaire annonçant la rediffusion d’anciennes émissions, ne pas avoir attendu le 14 Janvier! Propos destinés à justifier ceux de son confrère et que je traduis textuellement: «Je ne crois pas que Psycho M veut vraiment tuer Nouri Bouzid. Cest du sens figuré». Et il ajoute qu’il n’est pas d’accord avec le cinéaste parce qu’«il emmène les jeunes vers la mentalité occidentale et que ce qu’il fait ne respecte pas l’islam».
Selon un proverbe arabe, la justification est pire que la faute car dire qu’il faut prendre au sens figuré les propos de son ami, c’est conférer à ces propos une valeur symbolique et dire donc, consciemment ou inconsciemment, que la mise à mort du cinéaste est une mise à mort symbolique, autrement dit c’est une mise à mort de tout ce qu’il incarne, à tort ou à raison, comme choix culturels et esthétiques, en un mot comme projet de société.
Quant à l’argumentaire éculé autour du respect du contexte arabo-musulman que des inquisiteurs, toutes écoles confondues, brandissent à tout bout de champ pour censurer toute création artistique qu’il s’agisse de littérature, de théâtre, de cinéma ou d’arts plastiques, pour peu qu’elle ne corresponde pas à leur vision du monde, un monde obsolète; il mérite qu’on s’y arrête ne serait-ce que pour ne pas se cantonner dans le champ étroit du rap et dévoyer ainsi la réflexion dans une polémique terre à terre et stérile. Un argumentaire fallacieux car il participe d’une vision figée et réductrice du référent culturel arabo-musulman parce que généralisante et anhistorique. Une vision idyllique qui transforme un passé révolu en un tout indivisible, une entité d’une homogénéité sans faille et d’une pureté immaculée sur le plan linguistique, culturel et religieux, occultant ainsi les différences, les divergences, voire les conflits entre les diverses doctrines religieuses, les écoles d’exégèse, les courants de pensée, sans parler des influences culturelles subies au contact des us et coutumes des contrées conquises.
Faire valoir cet argumentaire c’est réduire donc une civilisation arabo-musulmane plurielle à sa seule expression métaphysique et théologique, elle-même, faut-il le répéter, plurielle; c’est surtout nier la diversité et la richesse d’un patrimoine culturel qui a su traverser l’histoire de l’humanité dans une interaction créatrice avec les autres langues et les autres cultures; un patrimoine partie prenante de la civilisation universelle à laquelle des Arabes et des musulmans d’une autre trempe ont contribué sans complexes et sans les obstacles moraux factices dressés, de nos jours, par des esprits chagrins qui pleurent un passé révolu idéalisé en dehors de toute lecture historique objective qui permette d’appréhender le présent et d’envisager l’avenir.
Face à la déferlante réactionnaire et rétrograde
Al Hallej, Ibn Rochd, Ibn Khaldoun, Ibn Hazm, Al Maârri, Abou Nawas, pour ne citer pêle-mêle que ceux-là, des références, entre autres notoires de notre patrimoine culturel, dont certains avaient été jugés hérétiques par les censeurs de leurs époques respectives, seraient-ils le produit d’un complot interplanétaire ourdi par l’Occident mécréant et débauché l’encontre de l’islam et des musulmans?
Et puis, si on devait énumérer tout ce qui, dans la civilisation moderne et postmodernité, s’accommode très mal de la culture arabo-musulmane vécue comme un carcan immuable, la liste risque d’être un peu longue à commencer par le rap.
Où irions-nous si on laissait les vannes ouvertes à cette déferlante réactionnaire et rétrograde qui cherche à tirer parti de la précarité de la situation post révolution pour inonder les plages paisibles d’une contrée à la civilisation millénaire? Allons-nous avoir, à l’instar de certains pays «frères», une brigade des mœurs qui choisit pour nous les chansons à écouter, les feuilletons, les films et les pièces de théâtre à voir ou les livres à lire? Des iconoclastes d’un autre âge ne se sont-ils pas spécialisés, outre la vindicte et le lynchage médiatique, dans les procès spectaculaires intentés, pour un oui pour un non, à des actrices, cherchant par des actions en justice à suspendre la diffusion d’un feuilleton télévisé (‘‘Al Jamaâ’’; ‘‘Al Massih’’; ‘‘Youssouf Assedik’’) ou à empêcher la réédition d’un livre (‘‘Les Mille et une nuits’’)?
Peut-on dire en plagiant Jean Ferrat qu’en Tunisie on peut dormir à l’abri? Dans ce balbutiement démocratique que nous vivons des prémices sur lesquelles il est inutile de revenir, nous interpellent.
Pour revenir à mon propos de départ, à savoir cette forme singulière de rap, je tiendrais, en tant que citoyen, pour complice toute radio, toute chaine de télévision qui diffuserait ce vomi de haine, cette culture de la négation de l’autre fût-elle servie sous le label du sacré.
(*) Inspecteur pédagogique et ancien président de la Fédération tunisienne des ciné-clubs.
(Source : « Kapitalis », le 28 mai 2011)
Exclusif: des frais de Gérard Longuet « pris en charge » par Ben Ali en 2006
30/05/2011 | 16H50
Après l’affaire MAM, un document officiel tunisien datant de 2006, que les Inrocks se sont procuré, évoque un séjour de Gérard Longuet et de son ami le journaliste Jean-Marc Sylvestre dans un hôtel de luxe du pays « pris en charge » par le régime de Ben Ali.
En février dernier, en plein feu des révolutions arabes, éclatait le scandale des vacances tunisiennes de Michèle Alliot-Marie. Notre ministre des Affaires étrangères avait bénéficié de l’avion gratuit d’un homme d’affaires, Aziz Miled, proche du régime de Ben Ali. Au nom de la « République irréprochable » exigée par Nicolas Sarkozy, la gauche demandait sa démission. Un homme avait volé au secours de la ministre:
« Trop c’est trop ! tempêtait-il. MAM s’est exprimée avec honnêteté sur ses déplacements en avion, lors de son séjour de fin d’année en Tunisie. »
Cet homme était le président du groupe UMP du Sénat, Gérard Longuet. Qui se trouve être aujourd’hui notre ministre de la Défense. Ce qu’on ignorait à l’époque, c’est que Gérard Longuet, lui non plus, n’avait pas tout raconté sur ses escapades privées en Tunisie.
Des documents que nous avons récupérés dans les archives de l’Agence tunisienne de communication externe (ACTE), le bras armé de l’ex-pouvoir tunisien pour organiser des séjours agréables aux politiques et aux journalistes étrangers, nous permettent de reconstituer les conditions de l’escale tunisienne de Longuet en 2006.
Gérard Longuet est arrivé sur les côtes tunisiennes à bord d’un beau voilier de 17 mètres de long, le Silver Shadow. Notre ministre qui à l’époque était conseiller politique du patron de l’UMP, Nicolas Sarkozy, était accompagné pour cette croisière de Jean-Marc Sylvestre, chroniqueur renommé à l’époque de LCI et de TF1, avec lequel il part fréquemment en bateau. Leurs enfants les accompagnaient.
Ces vacanciers eurent la chance d’amarrer leur voilier dans le joli port de Sidi Bou Saïd et de séjourner deux jours dans le superbe palace cinq étoiles de Gammarth, The Residence. Selon le document de l’ATCE, le programme pour recevoir ces hôtes de marque comprenait une soirée au festival de Carthage et un dîner avec le ministre de Affaires étrangères de Ben Ali, Abdelwaheb Abdallah. Devenu ces dernières années l’homme fort de Carthage, ce dernier s’était rapproché de Leila Trabelsi, l’épouse de Ben Ali, et s’était fait connaître pour avoir été un as de la désinformation et du verrouillage des médias.
Au cours de cette croisière avec son ami Longuet, le journaliste Jean-Marc Sylvestre avait demandé une faveur aux autorités tunisiennes :
« Si monsieur Jouini, ministre du Développement et de la Coopération, n’est pas en vacances, lit-on dans le programme de l’ATCE, Jean-Marc Sylvestre serait intéressé de le revoir (il l’avait accueilli dans son émission « Le Club de l’économie » sur LCI, en juin 2004) ».
Or la surprise, la voici : selon le document officiel tunisien, le gouvernement de Ben Ali se met en quatre pour financer le séjour des Français. Dans un courrier daté du 27 juillet 2006, que nous nous sommes procuré (à paraître dans les Inrocks de ce mercredi), Oussama Romdhani, directeur Général de l’ATCE, demande aux responsables de l’Office national du tourisme tunisien de:
« Bien vouloir envisager la possibilité de prise en charge des frais du séjour à l’hôtel The Residence à Gammarth de monsieur et madame Longuet [madame, in fine, ne participera pas au voyage]. L’ATCE, prendra en charge, par contre, le séjour de M. Sylvestre. »
Dans un autre document, celui-ci en arabe, le directeur de l’ATCE demande à la direction du port de plaisance de Sidi Bou Saïd de réserver une place pour le voilier de Gérard Longuet et de Jean-Marc Sylvestre, « un ami de notre pays », précise la note. On s’en doutait un peu.
Je ne me souviens pas d’avoir été invité
Nous avons joint au téléphone Gérard Longuet.
– « Avez-vous séjourné pendant vos vacances à l’hôtel The Residence?
– Oui, j’ai du y passer au maximum deux nuits. Nous avions laissé mes trois enfants ainsi que le fils de Jean-Marc dormir sur le bateau. A l’hôtel, nous avons même retrouvé mon ami Philippe Seguin au bord de la piscine.
– Seguin, un grand ami aussi du régime ?
– C’est possible…
– Par qui a été payée la note d’hôtel ?
– Je pense avoir réglé, mais je n’en n’ai plus la certitude… C’est peut-être mon copain Jean-Marc qui a réglé pour moi.
– Mais nous avons des documents qui précisent que c’est le régime tunisien qui a payé.
– Je serai bien incapable de vous le dire. Je ne me souviens pas d’avoir été invité, il est possible que cela se soit fait, je ne m’en suis pas personnellement occupé et ne me suis pas posé la question. Ce n’est pas moi qui leur ai demandé en tout cas. Mais si le gouvernement tunisien a le sentiment que je n’ai pas payé, je peux lui envoyer un chèque tout de suite, ça ne me pose pas de problème. »
Nous contactons son ami Jean-Marc Sylvestre.
– « Qui a payé vos nuit à l’hôtel ?
– Je pense que nous avons payé.
– Mais vous n’en êtes pas sûr…
– Je n’ai pas de souvenir précis. Mais je pense qu’on a payé. »
Nous avons pu parler au téléphone à un fonctionnaire de l’Office national du tourisme tunisien. L’homme a pris pour nous des renseignements auprès de l’hôtel The Residence. Voici la réponse qu’il en a obtenu:
« Le séjour de Gérard Longuet, qui s’est déroulé dans cet hôtel du 10 au 12 août 2006, a été pris en charge par l’Office de tourisme, qui a payé l’hébergement et la restauration. Monsieur Longuet, nous précise-t-il, a payé les extras, c’est à dire le téléphone et le bar. »
Quant à Jean-Marc Sylvestre, à l’image de beaucoup de patrons de rédactions et de chroniqueurs illustres, il est un aficionado des voyages organisés vers ce paradis du Jasmin (et de la torture) qu’était la Tunisie de Ben Ali.
Six mois avant sa croisière en voilier, le chroniqueur économique passait ses vacances de Noël dans le Sud tunisien, du 19 au 25 décembre 2005, en compagnie de ses deux enfants.« C’était un voyage studieux », nous explique-t-il.
Le voyage était, là encore, entièrement organisé et financé par l’ATCE, comme le montre une autre note, signée par un cadre de l’Agence, Bochra Malki. Jusqu’au choix du chauffeur ou les réservations « en pension complète » dans les meilleurs établissements, Yadis Djerba ou le Palm Beach Tozeur, rien n’était laissé au hasard. A l’arrivée, à l’aéroport, une voiture accueillait la famille.
– Apparemment, insiste-t-on, votre voyage studieux ressemblait davantage à un voyage touristique, et d’après nos documents il était organisé et financé par le régime.
– Possible, je n’ai pas de souvenir, il faudra que je regarde mes calepins.
« Jacques Séguela, fils de pub, fils du Sud »
A la décharge de Longuet et de Sylvestre, ils ne sont pas les seuls, au sein de l’élite médiatique et politique française, à avoir profité des largesses du régime tunisien. MAM, avec son voyage de vingt minutes à bord de l’avion de son ami Aziz Miled, fit dans ce dossier figure de victime expiatoire.
Dans le petit livre que nous venons de publier, Tunis et Paris, les liaisons dangereuses, nous racontons comment Philippe Seguin, le compagnon de piscine de Longuet, qui qualifiait le président Ben Ali « d’homme politique moderne, qui défend jusqu’au bout les notions d’humanisme et de liberté », s’était fait offrir en 1997 l’appartement en pleine médina de Tunis où il avait passé son enfance.
Disons que le propriétaire légitime de cet appartement, Mhadheb El Jed, un petit patron franco-tunisien membre de l’UMP, avait mal vécu la saisie par le régime de son bien sans contrepartie financière.
« Ce monsieur a tout cassé, nous a-t-il raconté à propos de Seguin. Y compris les cheminées de marbre ! »
Après une négociation serrée entre Seguin et le Franco-Tunisien, le propriétaire légitime retrouvait son bien en 2003.
Le goût des plages de sable fin et des luxueux palaces n’explique pas, à lui seul, l’aveuglement de la France sur ce qui se passait en Tunisie. 1 200 entreprises françaises sont aujourd’hui présentes en Tunisie. L’image d’un pays prospère et paisible, « rempart » contre l’intégrisme musulman, leur a été vendue par des communicants talentueux.
C’est ainsi qu’en janvier 2011, et alors que la révolte démarre dans l’intérieur du pays, le magazineTunisie Plus du très hospitalier Hosni Fjemalli, cet hôtelier tunisien qui reçut tant de journalistes français, consacre sa Une à « Jacques Séguela, fils de pub, fils du Sud ».
« La Tunisie, explique le grand publicitaire jadis Mitterrandolâtre aujourd’hui bon ami de Sarkozy, a mené un chemin comme aucune autre nation africaine. »
N’en jetez plus ! C’est ce qu’on appelle un beau retour sur investissement pour le régime de Ben Ali, qui quelques mois plus tôt, avait favorisé l’installation en Tunisie d’Havas, la boîte de Séguéla.
En mai 2010, Ghazoua Ben Ali, une des cinq filles de Ben Ali, devenait en effet la coactionnaire de cette nouvelle société et son mari, Slim Zarrouk, son patron. Deux mois plus tard, Havas-Tunisie se voyait confier l’un des marchés publicitaires les plus juteux du pays: celui de la campagne publicitaire pour l’opérateur téléphonique numéro un, Tunisie Télécom.
On en apprend beaucoup, aujourd’hui, sur la France, quand on fait le voyage à Tunis. Les verrous du business franco-tunisien sautent comme s’ils n’avaient plus de gardiens. On a pu vérifier, par exemple, que par chance les archives de l’ATCE n’ont jamais été détruites, comme cela avait été dit sur des blogs tunisiens.
Les semaines à venir pourraient donc nous offrir quelques surprises sur d’autres bénéficiaires français des gâteries du régime. Ah, les vacances !
Nicolas Beau et Arnaud Muller
Nicolas Beau et Arnaud Muller sont les auteurs de Tunis et Paris : les liaisons dangereuses,ed. Jean-Claude Gawsewitch, 2011.
(Source: Les Inrockuptibles le 30 mai 2011)
Lien: http://www.lesinrocks.com/actualite/actu-article/t/65858/date/2011-05-30/article/des-frais-de-gerard-longuet-pris-en-charge-par-ben-ali/
Réponse de Habib Boularès au colonel Zoghlami et au lieutenant-colonel Mohamed Ahmed
Deux estimables militaires à la retraite m’interpellent sur l’exercice, il y a vingt ans, de mon ministère à la Défense. Il s’agit du colonel Moncef Zoghlami (Journal La Presse du 30 avril) et du lieutenant-colonel Mohamed Ahmed (Magazine Réalités du 12 au 18 mai).
Le premier me reproche dans un article de grande qualité d’avoir gardé le silence sur ce qui s’était passé. Le second sur un ton dur m’accuse d’être l’auteur de tous ses maux. Je l’excuse car on ne saurait reprocher à un écorché vif de ne pas avoir de retenue. Je vais répondre aux deux parce que je n’ai rien à me reprocher et que j’avais beaucoup de peine pour eux et pour leurs camarades qui ont connu les mêmes épreuves. Mais d’abord quelques rappels. J’ai été installé au ministère de la Défense le 21 février 1991, c’est-à-dire en pleine guerre du Golfe. L’Armée tunisienne était en treillis dans les rues pour assurer la sécurité avec armes et munitions, et nous étions sur nos nerfs car nous étions à la merci d’un incident. D’ailleurs le colonel Zoghlami décrit très bien cette situation dans son article. Tous ceux qui ont vécu cette période se souviennent de la passion avec laquelle le peuple tunisien soutenait Saddam Hussein. C’est dire qu’en débarquant dans ce ministère que je ne connaissais pas, et où je ne connaissais aucun
officier, je n’avais pas la possibilité de prendre le temps de m’y familiariser avec les gens et avec les procédures. En réponse à l’objection que je faisais au Président de la République il me dit : «Cela ne pose pas de problème : le ministère est bien organisé ; laissez son organisation fonctionner et vous n’aurez pas de souci.» Passée cette période dure de la guerre, nous nous sommes trouvés face à ce qu’on a appelé «le complot des islamistes» qui était déjà en fait engagé depuis décembre, deux mois avant mon arrivée à la Défense. Des noms de militaires ayant été cités dans les interrogatoires civils, ils avaient été arrêtés selon une procédure qui relève du tribunal militaire. Le lieutenant-colonel Mohamed Ahmed rappelle, en ce qui le concerne, que son calvaire a commencé en avril (1991).Qui peut imaginer, à l’époque ou aujourd’hui, qu’un Président de la République, issu de l’Armée, ancien Directeur de la Sécurité militaire, ancien Directeur de la Sécurité civile, ne suive pas en permanence, l’évolution d’une enquête sur un «complot» qui visait le régime, alors même qu’il était «chef suprême des forces armées» en vertu de l’article 44 de la Constitution? Il connaissait personnellement tous les militaires à partir du grade de commandant, comme il me l’avait souligné. C’est lui-même qui les avait nommés et établis dans leurs fonctions. Aux questions que je lui posais à propos de ces enquêtes, la réponse était la même «laissez le système fonctionner», entendant par là l’organisation de la justice militaire.
Les prévenus étaient, selon ce système, remis à la police qui en demandait l’arrestation en vertu d’une commission rogatoire signée par le magistrat instructeur militaire. Les détails sont donnés dans les deux textes et dénoncent, à juste titre, ce qu’ils ont subi comme traitement indigne, inacceptable et inhumain. Le colonel Moncef Zoghlami et le lieutenant-colonel Mohamed Ahmed et d’autres avec eux, ont été victimes d’un système d’investigation aveugle, dans lequel l’Etat-major de la Défense n’est pas responsable et encore moins le ministre qui, comme celui de la Justice, n’a pas à intervenir directement dans une instruction en cours. Cela ne nous a pas empêchés, mes collaborateurs et moi, choqués par ce traitement dont nous avions pensé, nous aussi, qu’il était destiné à décapiter l’armée, de tenter de peser sur le cours des événements. Nous avons démontré, sans entraver la marche de la justice, que l’affaire dite de Barraket Es-Sahel ne tenait pas. C’était une bulle que nous avions dégonflée preuve à l’appui. Quand j’ai remis le dossier qui prouvait, photos et mesures à l’appui, que ce lieu-dit ne pouvait pas rassembler tous ceux qui sont accusés d’y avoir comploté, le président de la République me dit : «Vous vous rendez compte que vous êtes en train de changer le cours de l’enquête !» J’ai rapporté cet entretien à mes collaborateurs et, depuis ce jour, nous avons adopté une autre conduite. Nous ne pouvions pas, légalement, et
contrairement à ce que pense le lieutenant-colonel M. Ahmed, nous opposer aux arrestations, mais nous avions décidé de garder les prévenus dans des établissements militaires tant qu’il n’y avait pas de
preuves irréfutables de leur culpabilité. Cela ne fut pas étranger au changement du cours de l’enquête en juillet et cela a permis d’épargner à des dizaines d’officiers l’horreur. Même aujourd’hui je ne peux rien
dire de plus. Je suis tenu au devoir de réserve auquel est soumis tout ancien responsable dela Défense parce qu’il s’agit, pour l’Armée, d’un ensemble de corps interconnectés et si l’on cite l’un, il
faut que les autres puissent s’exprimer dans le cadre d’une levée du ‘secret défense’. En tout cas, les collaborateurs avec lesquels j’ai travaillé directement à l’époque savent quels étaient mes sentiments. Croire que je n’ai été qu’un exécutant servile, c’est contraire à la vérité. Auprès du président de la République j’ai protesté contre les traitements subis par les militaires. Je dois à la vérité de mentionner qu’en réponse à mes remarques, il s’était montré «étonné», disait-il, devant le comportement des enquêteurs, rappelant notamment «qu’il y a d’autres méthodes». Ce n’est pas à moi de dire s’il était sincère ou pas.
Je rapporte des faits. Mais il était ferme sur un point : il n’est
pas question qu’un officier arrêté reprenne son commandement. C’était lui qui avait le pouvoir de décision et non pas moi. Croyait-il, alors, qu’il n’y avait pas de fumée sans feu, ou refusait-il de reconnaître publiquement qu’il y avait eu une erreur qu’il ne voulait pas attribuer aux hommes en qui il avait confiance ? Toujours est-il que les tensions ayant continué avec nous, j’ai dû, bien avant le commencement du procès, quitter la Défense pour la Chambre des Députés, en octobre 1991.Je n’ai pas sur mon passage à la tête de ce département la même opinion que le lieutenant-colonel Mohamed Ahmed. Je garde de ces huit mois le souvenir d’une armée bien organisée qui fonctionne avec des officiers loyaux et compétents que j’ai appris à estimer et à respecter. J’ai fait ce que je pouvais pour les défendre. Je n’ai pas eu l’impression, durant les six années de présidence de la Chambre des Députés que la Défense gardait de moi un mauvais souvenir; de même durant les quatre années passées à l’Union du Maghreb Arabe quand j’étais régulièrement invité par l’Institut de défense nationale à y faire des conférences. Enfin, reprocher le silence observé par moi et par tous les ministres qui m’ont succédé, c’est encore une fois oublier le devoir de réserve. Combien avez-vous vu, de par le monde, de ministres de la défense parler, après leur ministère, de ce qu’ils y ont connu durant leur mandat ?Cela dit, je suis tout à fait d’avis que tous ceux qui ont subi de mauvais traitements, civils ou militaires, ont droit à des réparations morales. La nouvelle Tunisie le leur doit. Il ne suffit pas de dénoncer les mauvais comportements de
l’ancien régime, hérités du passé colonial et même beylical ; il faut en empêcher tout renouvellement, mais aussi réparer, autant que faire se peut, le préjudice. J’adhère à tout mouvement qui va dans ce sens.
(Source: « Réalités » du 26mai au 1er juin 2011)
AFP, le 30 mai 2011
Trente ans de Sida : Les grandes dates du Syndrome d’immunodéficience acquise
Paris (afp) Voici les grandes dates du Sida depuis l’apparition des premiers cas, il y a 30 ans:
5 juin 1981: le Centre de contrôle des maladies (CDC) d’Atlanta (sud-est des Etats-Unis) relève que cinq homosexuels de Californie ont été atteints d’une forme rare de pneumonie frappant habituellement des patients immuno-déprimés. En juillet, il fait état d’un cancer rare de la peau (sarcome de Kaposi) chez 26 homosexuels.
1982: le nom de Syndrome d’immunodéficience acquise (Sida) est donné à cette maladie, qui se transmet par voie sexuelle mais aussi par voie sanguine, par le lait maternel et par sécrétions vaginales.
1983-1984: en France, les Pr Luc Montagnier, Françoise Barré-Sinoussi et Jean-Claude Chermann, de l’Institut Pasteur, isolent le virus du Sida qu’ils baptisent LAV (Lymphadenopathy associated Virus). Un an plus tard, aux Etats-Unis, le Pr Robert Gallo annonce à son tour avoir isolé un virus qui s’avère être le même. Début d’une polémique franco-américaine sur la paternité de la découverte qui s’achèvera en 1987.
21 juin 1985: la France autorise la commercialisation du premier test de dépistage.
2 octobre 1985: l’acteur américain Rock Hudson meurt du Sida. D’autres stars suivront, comme le chanteur Freddy Mercury (1991) ou le danseur russe Rudolf Noureev (1993).
1986: mise au point du premier médicament, l’azidovudine (AZT), un antirétroviral qui ralentit la progression du virus mais ne l’élimine pas. Celui-ci est officiellement appelé virus de l’immuno- déficience humaine (VIH).
En décembre, 4.500 cas sont recensés en Europe, soit une augmentation de 124% en un an.
1996: apparition d’une nouvelle thérapie, avec des médicaments en combinaison, les trithérapies, qui réduisent fortement la charge virale.
Les Nations unies mettent en place le Programme conjoint sur le Sida (Onusida). L’épidémie s’étend rapidement en Afrique et s’aggrave en Europe orientale, en Inde et en Chine.
2000: première conférence internationale sur le sida en Afrique, continent le plus touché par la maladie.
2002: création du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, avec le soutien de Bill Gates.
2003: lancement par le président George W. Bush d’un programme sur 5 ans de 15 milliards de dollars, le Pepfar.
2006: des études établissent que la circoncision d’hommes non infectés par le virus divise au moins par deux les risques qu’ils soient contaminés par le VIH. Mais elle ne protège pas les femmes. Début des campagnes de circoncision en Afrique.
2009: depuis l’apparition de la maladie, quelque 25 millions de personnes sont mortes du sida et 60 millions ont été contaminées. Depuis huit ans, le nombre d’infections a baissé de 17% (Onusida).
2010: une étude montre qu’un gel vaginal microbicide contenant un antirétroviral peut, bien utilisé, réduire de moitié le risque d’infection au VIH chez les femmes.
2011: un essai clinique établit que traiter au plus tôt des personnes séropositives avec des antirétroviraux réduit quasi totalement le risque de transmission du virus à des partenaires séronégatifs.