2 avril 2007

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TUNISNEWS
7 ème année, N° 2506 du 02.04.2007

 archives : www.tunisnews.net


Reporters sans frontières: Tunisie –  Un journaliste d’opposition accusé de diffamation, le site Dailymotion bloqué

L’Audace: Ben Ali vote Sarkozy

L’Audace: Après le Sénégal, l’Afrique du Nord s’impatiente – Mauritanie de tous les espoirs…

AFP:France: démantèlement d’un réseau de trafic de substituts à l’héroïne

Communauté Tunisienne au Qatar: Mascarade de Mr Ben Othman Président de L’OTEF

Maghrebia: Succès des nations du Maghreb en matière d’amélioration des droits des femmes et des enfants

Le Temps: Me Mokhtar Jalali  » Les partis de l’opposition « officielle » semblent considérer que leur rôle se limite à soutenir sans réserve »

Le Temps: De quoi meurt le Tunisien
Le Temps: Moubarak ou la tentation monarchique
Al Ahram Weekly :Olmert et l’initiative arabe de paix au Proche-Orient


 

2.04.2007  
Reporters sans frontières / bureau Internet et libertés

 

TUNISIE

Un journaliste d’opposition accusé de diffamation, le site Dailymotion bloqué

 

Reporters sans frontières dénonce le harcèlement judiciaire dont est victime Omar Mestiri, directeur de la rédaction du journal d’opposition en ligne Kalima ( www.kalimatunisie.com ), qui risque trois ans de prison pour « diffamation ». L’organisation demande par ailleurs la réouverture du site de partage de vidéos, www.dailymotion.com, bloqué dans le pays depuis le 1er avril 2007. « La plainte déposée contre Omar Mestiri est absurde, car elle repose sur un article en ligne qui n’est pas accessible dans le pays. Nous prenons toutefois cette affaire très au sérieux. Le cas de Mohammed Abbou, condamné en avril 2005 à trois ans et demi de prison pour un texte publié sur le Net, nous rappelle que la justice tunisienne est contrôlée par le pouvoir et qu’une plainte en diffamation peut entraîner une lourde condamnation. Quant à la censure du site Dailymotion, elle montre que le gouvernement, aussi paranoïaque en matière d’Internet que la presse traditionnelle, est prêt à interdire des dizaines de milliers de vidéos inoffensives pour bloquer une poignée de documents qui lui déplaisent », a déclaré Reporters sans frontières.  Omar Mestiri est accusé de diffamation par un avocat tunisien, Mohammed Baccar, en raison d’un article, publié le 5 septembre 2006, dans lequel il accuse ce dernier de faux et d’escroquerie. Le journaliste a été convoqué par le substitut du procureur de la République, le 29 mars 2007, pour répondre de cette accusation. Les avocats d’Omar Mestiri ont remis en cause la base juridique de la plainte. En effet, le journal en ligne Kalima étant filtré en Tunisie, l’accès à l’article incriminé est impossible. Le site www.dailymotion.com est filtré en Tunisie depuis le 1er avril. Cette censure pourrait avoir été déclanchée par les nombreuses vidéos portant sur la situation politique du pays qui y sont publiées, comme par exemple : http://www.dailymotion.com/generationtunezine
http://www.dailymotion.com/tunisietunisie www.dailymotion.com/c-iom13 www.dailymotion.com/mouwatentounsi www.dailymotion.com/tounishourra www.dailymotion.com/tunisiawatch www.dailymotion.com/Saber_ch
http://www.dailymotion.com/relevance/search/rsf%2Btunisie/video/x1i3jh_rsf-tunisie Plus d’informations sur l’avocat emprisonné Mohammed Abbou : http://www.rsf.org/article.php3?id_article=15056  


IL S’INVITE DANS LES ELECTIONS FRANCAISES AVEC SES METHODES MUSCLEES

Ben Ali vote Sarkozy

 
Le candidat de l’UMP à la présidentielle, Nicolas Sarkozy, a-t-il besoin du soutien de Ben Ali, un chef d’Etat infréquentable et qui mène son pays par le bâton et la corruption? En tout cas, le voilà prévenu. Car, début mars en effet, Hedi M’henni, le secrétaire général du RCD (parti de Ben Ali au pouvoir) a réuni en conclave à Paris tous les consuls tunisiens de France ainsi que l’ambassadeur. A l’ordre du jour: tout faire pour que les résidents tunisiens bénéficiant de la nationalité française et en âge de voter le fassent en faveur du candidat de la Droite. Et depuis, les amicales tunisiennes, les centaines d’associations de jeunes, culturelles ou professionnelles domiciliées au 36 rue Botzaris dans le 19ème arrondissement de Paris (siège de la barbouzerie tunisienne en France) mais aussi en province sont mobilisées à cet effet. On peut comprendre dès à présent le désarroi de certaines familles naturalisées suspectées de ne pas avoir plié à l’injonction de Ben Ali. Comme à son habitude, le Général-Président use des méthodes les plus abjectes et des calculs les plus bas pour espérer tirer quelques dividendes. Il sait qu’une présidente socialiste ne ménagera pas ses critiques notamment concernant le respect bafoué des droits de l’homme par le tyran de Tunis. Récemment encore (le 2 février 2007), le parti socialiste français et le parti socialiste européen ont publié deux communiqués sévères à l’encontre du régime tunisien. Et le PSE a même dû annuler une visite de travail en Tunisie pour protester contre les méthodes du gouvernement. On estime à près de 400 000 les Tunisiens recensés en France par les préfectures et les consulats. Si le tiers de ces ressortissants est naturalisé, Ben Ali espérait offrir un cadeau à M. Sarkozy au cours d’élections qui se joueront dans un mouchoir de poche. Mais avec de pareilles méthodes, même M. Sarkozy devrait se démarquer. Car, avec Ben Ali, on ne sait jamais: qui garantit que dans un proche avenir il ne proposerait pas ses sbires et « observateurs » pour un dépouillement à la tunisienne, donnant des scores à la soviétique…? (Source: « L’Audace » (Mensuel tunisien – France), N° 146, Avril 2007)

Après le Sénégal, l’Afrique du Nord s’impatiente : Mauritanie de tous les espoirs…

 
Voilà ! C’est fait ! Les Mauritaniens l’ont fait ! Ce dimanche 25 mars sera marqué d’une pierre blanche? Les Mauritaniens ont élu leur chef de l’Etat et chef de leur exécutif (régime présidentiel). De par leur volonté souveraine, ce sera Sidi Ould Cheikh Abdallah. Tous les témoignages sur place* et les rapports des organismes étrangers** l’ont attesté : le processus électoral a été loyal, équitable et transparent. L’administration ne s’en est pas mêlée et aucun parti ne s’est cru obligé de gagner coûte que coûte. Les scores ont été assez serrés et le triomphe a été modeste (52.85%). Le perdant a félicité l’élu. L’institution militaire a reconnu le résultat et s’apprête à livrer le pouvoir à ses nouveaux et légitimes prétendants. (Voir sujet en page xx) Entre les deux tours, et même après le second, planait une atmosphère comme celle de décembre 1991 entre les deux tours des législatives algériennes remportées haut la main par le FIS. Le journal Le Monde avait alors annoncé, quasiment dans le détail, comment l’appareil militaire, terrorisé à l’idée de perdre sa mainmise et ses privilèges, allait « leur voler leur victoire… » Là où l’Algérie avait si mortellement trébuché, la petite Mauritanie allait réussir avec un brio et en même temps une bonhomie surprenants. Pourtant, un potentat africain n’avait-t-il pas déclaré sans rire que l’« on n’organisait pas des élections pour les perdre ! » Après des échecs douloureux, les forces armées, menées par colonel  Ely Ould Mohamed Val, mues par une volonté politique sincère et hautement patriotique ont réussi à débarrasser le pays de son Ben Ali local, le sanguinaire colonel Ould Taya. Pour la deuxième fois depuis l’inoubliable soudanais Abderrahmane Siwar Eddhahab, des militaires organisent une transition de salut national dans des délais raisonnables et scrupuleusement respectés, avant de rendre le pouvoir aux civils. Pas une victime, pas un coup de feu. Un travail d’orfèvre. Et les pays frères, me diriez-vous ? Et la puissante ambassade US ? Et la tête de pont de l’Etat d’Israël implantée sous Ould TAYA au cœur de Nouakchott en direction de tout le Maghreb et de l’Afrique ? Nul ne s’est senti en mesure de s’opposer à l’âpre désir des Mauritaniens de changer, d’évoluer et d’épater le monde par un festival politique où nul n’avait été laissé sur le bas-côté. Seul le stupide et sénescent colonel Kadhafi a tenu à aboyer au passage de l’imposante caravane… L’autre point essentiel et intriguant concerne la personnalité de M. Ould Mohamed Vall : en effet, il s’agit de l’ancien bras droit du dictateur déchu et directeur de la sécurité durant… 18 ans. Cela aussi prouve qu’il peut se trouver au sein des pouvoirs tyranniques des hommes prêts à changer leur sort et celui de leur pays.   Mais alors, vu de Tunis, Nouakchott ne nous envoie-t-il pas un message puissant ? N’est-ce pas la preuve éclatante que l’Amérique n’est pas aussi omnipotente que certains tunisiens veulent bien le faire croire. Même avec une présence physique, l’Etat d’Israël et son Mossad n’ont très vraisemblablement rien vu venir. Un peu comme au Liban. Ce doit être également pour nous la confirmation, si besoin était, que notre salut ne viendra jamais de l’extérieur. Ce sera l’œuvre de notre opposition nationale et de notre société civile, ou nous ne nous en sortirons jamais. Or, le spectacle qu’offre l’opposition tunisienne n’indique en rien qu’elle ait retenu grand-chose de ses échecs, de ses sacrifices et de ses expériences passées. Sinon, comment expliquer que la tension politique ne soit souvent pas entre elle et le pouvoir tyrannique, mais à l’intérieur de ses propres rangs ? Par quel extraordinaire, la question de l’héritage, par exemple, réussit-elle à devenir l’alpha et l’oméga de la politique tunisienne ? Quelle pulsion suicidaire pousse-t-elle les Tunisiens à vouloir régler le problème du statut formel de la femme tout de suite et définitivement, quitte à envoyer l’instance du 18-Octobre contre le mur ? Et d’ailleurs, sont-ce des opposants ceux qui offrent tant de jouissance à un pouvoir ravi de voir ses détracteurs agrippés les uns au cou des autres. N’est-ce pas le zombie dinosauresque Mohamed Harmel qui prétend jouer l’aile gauche du tyran et qui pousse à la surenchère »progressiste » ? N’est-ce pas lui qui lance les os à ronger que certains attrapent au vol et les yeux fermés ? N’est-ce pas lui et sa clique qui se préparent d’ores et déjà à jouer les comparses de Ben Ali en 2009, comme ils l’ont fait en 1989, 1994 et 2004 ? En tombant si souvent dans le panneau, tantôt par peur, tantôt par petit calcul mesquin, tantôt par tentation, certains opposants se condamnent à d’interminables travaux de Sisyphe dictés par le pouvoir. En ce 51ème anniversaire de l’indépendance formelle, Ben Ali a confirmé sans détour sa ligne immuable : il possède le pays et ses habitants et n’est comptable devant personne. Face à cette main de fer renouvelée, l’opposition, toutes tendances confondues, doit se retrouver pour enjoindre au tyran usurpateur de partir. A défaut, nous ne pouvons qu’envier Sénégalais, puis Mauritaniens d’avoir honoré leur pays et l’Afrique. En fait, il ne reste que le Maroc et l’Algérie pour que le soleil se lève à l’Ouest… Mais sommes-nous condamnés à attendre tant d’étapes, au risque de déclencher le torrent de sang promis par Ben Ali ?? Khaled BEN M’BAREK * Deux des nôtres, Pr. Moncef Marzouki et Pr. Abdelwahab Maatar ont représenté notre pays en tant qu’observateurs du premier tour. ** Mme Marie Anne Isler Béguin, membre du Parlement européen a conduit la mission européenne d’observation. (Source: « L’Audace » (Mensuel tunisien – France), N° 146, Avril 2007)


A Son Excellence Monsieur le Président De La République Tunisienne Doha, le 01 Avril  2007 Objet : Mascarade de Mr Ben Othman Président de L’OTEF

 
Monsieur, En tant que Tunisiens résidents au Qatar et parents d’élèves de l’école Tunisienne de Doha nous avons assisté depuis quelques jours a une mascarade et une scène de comédie écrite par Mr le président de l’OTEF et sa commission qu’il a envoyé pour terroriser et les enseignants et les parents de l’école Tunisienne de  Doha soit disant pour enquêter et siéger sur les problèmes que vit notre école depuis bonne lurette et exactement depuis sa mise sous tutelle de cette organisation. Or avec l’aide de ce filou de coordinateur général ces personnes désignées pour cette mission et que nous connaissons leurs intentions se sont comportées d’une manière qui nuit a notre pays et ont dérape des  grandes lignes de démocratie tracées par votre honneur ce qui n’est pas nouveau a cette organisation depuis l’arrivée de son actuel président connu par son acharnement contre les parents d’élèves de l’école Tunisienne de Doha et la communauté Tunisienne au Qatar en général malgré vos directives et votre assistance aux Tunisiens résidents a l’étranger. Monsieur, quand on vous a écrit auparavant on s’attendait a ce que cette commission vienne pour résoudre les graves problèmes  crées par le coordinateur général de l’école, or c’était le contraire et cette commission n’a fait que cumuler d’autres surtout en laissant cet ignorant responsable agir en toute liberté avec le plein pouvoir en mettant l’intérêt de cette école en jeu et ce malgré l’opposition des parents lors de la réunion tenue le 22 Février ce qui a engendre une ambiance très tendue recherchée par ce coordinateur et son supérieur qui optent pour la division au sein de notre honorable communauté surtout en absence de notre ambassade. Monsieur le Président nous venons par la présente vous solliciter de bien vouloir donner vos fermes instructions afin de restructurer notre si cher établissement et l’assainir  pour ne pas laisser l’opportunité devant ce coordinateur malhonnête qui demeure jusqu’à présent protégé par  le président de l’organisation Tunisienne de l’éducation et de la famille, sachant que cette école est le fruit de nos énormes sacrifices depuis 20 ans et que cette organisation n’a fait que la piller depuis son arrivée et a toutes les fois ce sont les parents qui payent les pots cassés. Dans l’attente d’un suivi qu’on espère bien favorable, veuillez agréer votre excellence les  considérations les plus profondes et les plus distinguées. Au nom de la communauté Tunisienne au Qatar.

France: démantèlement d’un réseau de trafic de substituts à l’héroïne

 
AFP, le 1er avril 2007 à 12h09 PARIS, 1 avr 2007 (AFP) – Douze personnes ont été inculpées et cinq, dont deux médecins, incarcérées dans le cadre du démantèlement en France d’un trafic de produits de substitution à l’héroïne pour les marchés parallèles de Paris, d’Europe de l’Est de Finlande, a-t-on appris dimanche de source judiciaire. Un troisième médecin a été placé sous contrôle judiciaire tout comme six pharmaciens de Paris et de région parisienne interpellés mercredi et jeudi dans le cadre de cette affaire, a-t-on appris auprès du Parquet de Paris. Trois dealers présumés de Subutex mais également de Skénan, un puissant antalgique, originaires de Tunis et de Bagdad et en situation irrégulière, ont été interpellés à Paris et en banlieue et placés en détention provisoire. Les douze personnes interpellées ont été mises en examen comme auteur principal ou complice pour « infraction à la législation sur les stupéfiants », « infraction à la législation sur les produits vénéneux » et « escroquerie à la sécurité sociale ». Médicaments délivrés pour des traitements de substitution à l’héroïne à l’origine, le Subutex et le Skénan peuvent être utilisés comme des drogues et devenir mortels en cas de surdose. Selon les premiers éléments de l’enquête, les médecins délivraient une ordonnance pour du Subutex ou du Skénan contre 20 euros. Les trafiquants présumés se rendaient ensuite dans une pharmacie complice et obtenaient le produit. Le démantèlement de cette filière par la brigade des stupéfiants de Paris a commencé en octobre avec l’arrestation inopinée d’un homme en possession de 32 ordonnances pour du Subutex. AFP


Succès des nations du Maghreb en matière d’amélioration des droits des femmes et des enfants

18/03/2007

Un récent rapport de l’UNICEF fait ressortir les progrès accomplis par la région en matière de renforcement des droits des femmes et des enfants. La Tunisie, le Maroc et l’Algérie ont été distingués pour leur engagement spécifique en faveur de l’émancipation des femmes.

Par Jamel Arfaoui pour Magharebia à Tunis — 18/03/07

Un récent rapport de l’UNICEF a montré les progrès accomplis par les trois pays du Maghreb — la Tunisie, le Maroc et l’Algérie — dans le renforcement des droits des femmes et des enfants. « A l’exception de la Tunisie, de l’Algérie et du Maroc, le reste des pays du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord ne font preuve d’aucun sens des responsabilités en matière d’émancipation politique des femmes », a déclaré Moncef Moalla, responsable du bureau de l’UNICEF en Tunisie.

Le rapport annuel de l’UNICEF, distribué récemment au Centre de Formation et de Recherche des Femmes Arabes (CAWTAR), montre que la Tunisie se classe première pour ce qui est de la représentation des femmes au parlement, avec 23 pour cent, suivie du Maroc (11 pour cent) et de l’Algérie (6 pour cent).

Jean Michel Delmot, directeur du bureau de l’UNICEF en Tunisie, affirme que cette année a été une première pour son organisation dans le combat pour l’égalité entre les sexes « de manière à montrer clairement que l’une des restrictions les plus fortes entravant la mise en pratique des droits des enfants et la réalisation des objectifs de développement du millénaire au plan international est la discrimination à laquelle les femmes sont confrontées ».

Sous le titre Femmes et Enfants: Le Double Dividende de l’Egalité des Sexes, le rapport de cette année de l’UNICEF renouvelle son constat selon lequel, comparée à d’autres régions en développement, la région Moyen Orient-Afrique du Nord est en retard en matière d’offre de services de santé aux mères. Chaque année, 21 000 femmes de cette région meurent par suite de complications lors de leur grossesse et à la naissance. De plus, un quart des pays de la région a enregistré un taux de mortalité maternelle de plus de 200 morts pour 100 000 naissances en 2000, dernière année pour laquelle des chiffres sont disponibles. Les normes internationales fixent un maximum de 5 morts pour 100 000 naissances.

Quant aux droits personnels et aux libertés des femmes au Moyen Orient et en Afrique du Nord, le rapport se fonde sur une enquête très approfondie dont l’organisation américaine Freedom House avait été chargée par l’UNICEF en 2003. Freedom House avait procédé à un examen de grande envergure et très méticuleux sur plus de vingt mois, en se fondant sur une équipe de quarante chercheurs, analystes et experts spécialisés. Cette enquête avait donné les résultats suivants: bien que certains gouvernements du Moyen Orient et d’Afrique du Nord aient enregistré des progrès significatifs en matière d’émancipation des femmes, « aucun des pays évalués ne peut prétendre à satisfaire aux normes internationalement reconnues en matière de droits des femmes ».

Selon l’échelle d’évaluation de 1 à 5 de Freedom House, la Tunisie a enregistré le meilleur score de la région dans le domaine des droits et des libertés personnelles des femmes, obtenant une note de 3,6. Elle est suivie du Maroc (3,2), de l’Algérie (3) et de la Libye (2,3). L’Arabie Saoudite se classe dernière, avec un total de 1,2.

Ce rapport montre également que la différence de salaires entre les femmes et les hommes est importante au Moyen Orient et en Afrique du Nord. « Dans certains pays du Moyen Orient et d’Afrique du Nord, les femmes gagnent moins de 40 pour cent du revenu de leurs collègues masculins, ce qui a des conséquences dévastatrices pour les femmes et leurs familles. »

En 2005, une étude de la Banque Mondiale avait montré que si les revenus des femmes correspondaient à leur niveau d’éducation, « leurs revenus augmenteraient de 45 pour cent dans le secteur privé et de 13 pour cent dans le secteur public ».

Les femmes au Maroc se classent premières dans la région, avec des revenus équivalents à 40 pour cent de ceux des hommes. Ce pourcentage tombe à 37 pour cent en Tunisie et à 31 pour cent en Algérie.

Le rapport de l’UNICEF félicite le Maroc pour ses efforts en vue de la création d’un budget national « lié au sexe » en 2006, produit de quatre années de coopération entre le gouvernement marocain et le Fonds des Nations Unies pour les Femmes (UNIFEM), la Commission Européeenne et le gouvernement belge. Ce budget intègre les programmes des ministères des Finances, de l’Education, de la Santé, de l’Agriculture et du Développement Rural aux échelons national et local.

(Source: Maghrebia le 18 mars 2007)

Lien: http://www.magharebia.com/cocoon/awi/xhtml1/fr/features/awi/features/2007/03/18/feature-02


 

Me Mokhtar Jalali ex-député et dissident de l’UDU

 » Les partis de l’opposition « officielle » semblent considérer que leur rôle se limite à soutenir sans réserve »

 

Après 16 ans passés comme membre du bureau politique de l’Union Démocratique Unioniste ( UDU ), Me Mokhtar Jelei a claqué la porte avant le congrès du parti en mars 2006 à cause des divergences sur les positions et les orientations du parti avec des membres du bureau politique.

 

Nous l’avons invité pour nous donner son point de vue sur la faiblesse des partis de l’opposition et sur certaines alliances qui se sont nouées entre des partis et d’autres questions. Interview.

 

Le Temps : Après votre retrait de l’UDU, vous avez certainement acquis un recul qui vous permet de juger plus sereinement les partis de l’opposition. Comment expliquez vous leur faiblesse et la léthargie qui les frappe. Quelles en sont d’après vous les causes ?

 

Me Mokhtar Jellali :Il n’est pas facile d’avoir du recul tant qu’on est  » dedans « . Même le recul qu’on aurait l’impression d’avoir est faussé par la réalité, le quotidien qu’on continue à vivre.

 

Ce n’est qu’en décrochant qu’il devient plus facile de regarder les choses et les gens avec plus d’objectivité et de lucidité. C’est ainsi qu’il a fallu que je quitte l’UDU pour me rendre réellement compte de ce qu’il était, et je peux dire que je regrette d’y être resté aussi longtemps, d’avoir accepté  les compromissions d’un parti d’opposition qui n’en était pas un. Il faut dire que, par candeur peut-être, je nourrissais l’espoir, incongru et chimérique, de le voir devenir, un jour, un véritable parti d’opposition.

 

Par ailleurs, je ne vois pas de différence notable entre l’UDU et les autres partis de l’opposition  » officielle « .

 

Quant à la faiblesse de ces partis et à la léthargie qui les frappe, elles sont dues à des facteurs complexes et enchevêtrés. La responsabilité propre de ces partis n’en est pas moins importante notamment parce qu’ils ont accepté le jeu dérisoire, contraire à toutes les règles éprouvées et communément admises et, surtout contraire aux intérêts du pays. C’est ainsi que leurs ambitions ont fini par se limiter à l’obtention de quelques sièges de députés ou de conseillers.

 

En tous cas, ces partis de l’opposition  » officielle « , dite  » nationale  » semblent considérer que leur rôle se limite à soutenir sans réserve le Pouvoir . Cela ne les empêche pas d’émettre, de temps à autre, de timides critiques qualifiées de  » constructives « . Cependant, l’idée qu’ils doivent ou qu’ils pourraient être des adversaires ne semble pas les chatouiller. Quant à constituer une alternative, c’est un tabou. L’idée ne les effleure même pas.

 

De là, à dire que ces partis sont inutiles, nuisibles même pour certains, il n’y a qu’un pas que d’aucuns ont franchi depuis bien longtemps.

 

* Et les remèdes ?

 

 -Il n’y a pas de recette miracle pour remédier à une situation aussi désastreuse. Les dirigeants de ces partis gagneraient à se rappeler qu’ils assument une lourde responsabilité dans l’état d’incapacité qu’ils vivent et qu’ils ont failli à une mission noble et salutaire pour le pays qui consiste pour eux à constituer un contre pouvoir.

 

Quant à la sempiternelle excuse du pot de terre contre le pot de fer, du déséquilibre des forces etc… elle n’est qu’un prétexte pour qu’ils continuent, peinards, à dépenser le petit pécule accordé par l’Etat et de faire partie du carnet mondain de la politique en attendant des opportunités qui se font désirer et qui pourraient venir ou ne pas venir.. au gré des vents ..

 

A mon avis, la véritable délivrance, tant pour les partis que pour le pays, consisterait en une réforme politique totale, sincère et rigoureuse et à arrêter la main mise du RCD/ETAT sur l’administration en particulier et sur la vie quotidienne des citoyens en général, avec les mesures d’accompagnement adéquates, dont la liberté d’expression notamment, afin que chacun puisse jouer son rôle en toute sérénité et dans un climat de liberté et d’égalité des chances.

 

*L’UDU, le PSL, le PUP, et le PVP ont constitué une sorte de forum de réflexion et de propositions dit  » La rencontre démocratique « . Que pensez vous de cette alliance?

  

 – Des alliances de ce genre, nous en avons déjà connu. Malheureusement elles n’ont jamais fait avancer la démocratie ni autre chose d’ailleurs.

 

Mais lorsque les partis concernés déclarent que l’alliance en question n’est pas politique, je ne peux m’empêcher de me poser des questions sur les raisons de son existence et la nature de ses objectifs. En effet une alliance entre des partis politiques, qui n’est pas politique mais qui est néanmoins démocratique, Dieu seul sait ce que cela peut être.

 

C’est pour cela que je suis enclin à penser qu’une telle alliance est venue en réaction à une autre alliance, autrement plus crédible, ou pour essayer de la contrecarrer.  Cette alliance pourrait être aussi une action désespérée  pour dire :  » Ohé, on est là, on existe  » afin qu’on ne les oublie pas tout à fait.

  

 * Que pensez vous de l’alliance dite du « 18 Octobre » ? Etes-vous pour l’alliance avec ceux qui appartiennent au courant religieux?

  

 -J’ai été parmi ceux, nombreux, qui ont encouragé et soutenu cette alliance dès le début. Le pays a besoin que les forces vives se coalisent pour le servir.

 

Bien que les objectifs de cette alliance tiennent plus de la lutte pour les droits de l’homme que du programme politique, je considère que la lutte pour la liberté d’expression, la liberté d’association et l’amnistie est une lutte éminemment politique, d’autant que l’alliance a pu réunir un grand nombre de partis politiques d’opposition et d’associations civiles autour de revendications claires et simples. 

 

Que le courant d’obédience religieuse modérée soit représenté au sein de l’alliance du 18 octobre, c’est positif. Il n’est pas question d’exclure un Tunisien qui veut défendre la liberté et les droits dans une alliance pour la liberté et les droits dès lors qu’il adhère aux lois garantissant cette liberté et ces droits.

 

Pour les courants religieux extrémistes, il en est autrement.

 

*Ettajdid va tenir son congrès avec la participation d’indépendants. Et, comme aujourd’hui, vous vous considérez comme faisant partie des indépendants pourquoi ne rejoignez vous pas cette alliance ?

  

 – Ettajdid est un parti de l’opposition démocratique et progressiste qui a son histoire et ses repères.

 

Le fait qu’il ouvre ses portes à une vaste alliance est une initiative louable, et je pense que tout Tunisien, et pas seulement les Indépendants, pourra la rejoindre s’il pense s’y retrouver.

 

 

 * Comptez-vous constituer un parti ou réintégrer l’UDU comme l’a vivement souhaité M. Inoubli dans une interview qu’il nous a accordée?

  

 – J’avais effectivement déclaré en quittant de l’UDU que je comptais, avec un certain nombre de camarades, constituer un nouveau parti politique qui sera lui le parti de la liberté et de l’unité. Les contacts sont encore en cours avec un certain nombre de militants sérieux et dévoués à leur pays et à leur nation. Les occupations au quotidien ont cependant ralenti notre marche. Mais tant que la volonté y est, nous y arriverons.

 

Quant à réintégrer l’UDU, il n’en est pas question même s’il n’y avait aucun projet de constitution d’un nouveau parti.

 

A ceux qui souhaitent  » vivement  » me voir réintégrer l’UDU, je leur rappelle juste ce qu’ils ont tout fait  pour m’empêcher de préparer le dernier congrès, ainsi que les campagnes de dénigrement à plusieurs vitesses qu’ils ont menées contre moi et ma famille. Non. Merci.

 

 Interview réalisée par Néjib SASSI

 

(Source: « Le Temps » (Quotidien – Tunis), le 2 avril 2007)


 

Couverture sociale: A partir du 1er juillet 2007, augmentation des retenues au profit de la CNRPS et instauration des retenues pour la CNAM

La CNRPS renflouera les caisses, mais qui paiera la note?

 

– Avec la croissance de l’espérance de vie et le recul de l’âge de la 1ère embauche, il faut envisager une révision globale du régime de la retraite.

 

– La tendance dans le monde est vers le recul à 62 ans (voire 65) de l’âge d’activité.

 

Les cotisations des employés de l’Etat au titre de l’adhésion à la Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance Sociale « CNRPS » vont augmenter de 1,2 %, étalé sur trois années (0,4 % chaque année) à partir du 1er juillet 2007. La contribution de leur employeur (l’Etat) augmentera, quant à elle, de 1,8 % (0,6 % chaque année). Cette augmentation coïncidera, en principe, avec l’entrée en vigueur des retenues au profit de la Caisse Nationale de l’Assurance Maladie « CNAM » qui seront de 0,6 % pour l’employé et de 0,9 % pour l’employeur, durant les deux premières années, et de 0,55 % pour l’employé et de 0,95 % pour l’employeur durant la 3ème année. Cette décision fait suite au constat de déficit qui caractérise la gestion courante de la CNRPS. En effet, d’une comptabilité très excédentaire, cette caisse est passée à une phase déficitaire et la problématique exigeait une solution immédiate et un programme de moyen terme.

 

Donc, les employés de l’Etat vont voir leurs cotisations au titre de la couverture sociale grimper de 2,95 % (1,75 % + 1,2 %) progressivement durant les trois prochaines années. Pour les affiliés de la CNSS qui relèvent essentiellement du secteur privé, les nouvelles retenues se limiteront à celles de la CNAM. Pour le secteur public, les fonctionnaires de l’Etat remarquent que ces nouvelles retenues risquent d’éponger les augmentations salariales et d’affecter le pouvoir d’achat des fonctionnaires si l’on tient compte de l’inflation galopante. Mais, qu’est-ce qui justifie ce projet ?

 

Situation de la CNRPS

 

La Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance Sociale « CNRPS », c’est la SECU* des employés de l’Etat. Elle a connu des jours glorieux durant les années soixante et soixante-dix du siècle dernier. Le rapport actifs/retraités était de 10 pour 1, voire 8 pour 1. Les structures de l’Etat ne se sont vraiment constituées qu’au bout de dix, voire 15 ans. Cette génération a mis une carrière pour être admise à la retraite. La CNRPS vivait son époque dorée. Elle s’était permise le luxe d’investir dans l’immobilier. Toutes les grandes villes se sont alors offertes des cités « CNRPS » où les employés pouvaient (et peuvent encore) louer à des prix relativement modérés. Or, depuis le début des années 1980, le ratio « actifs/retraités » n’a pas cessé de diminuer exponentiellement. Il se situe aujourd’hui à moins de 4 actifs pour une pension de retraite (orphelins, invalides, veuves ou retraités). Cette situation s’est répercutée sur les équilibres financiers de la caisse. De ce fait, elle est déficitaire sur l’exercice de l’année en cours quoiqu’elle soit encore excédentaire sur le plan de la comptabilité globale cumulée. Les effets des années roses continuent à équilibrer la balance. Seulement, ce phénomène ne saurait durer. A ce rythme, la CNRPS, ne pourrait honorer les pensions d’ici 2012 ou 2013. Que faudrait-il faire pour sauvegarder ses équilibres ?

 

Refonte globale

 

Face à ce déséquilibre des balances de la CNRPS, une solution d’urgence s’impose certes. Le Conseil d’Administration a donc proposé de relever les retenues de façon à éponger le déficit courant. Seulement, cette solution n’est pas radicale. Car, le ratio « actifs/retraités » va continuer à baisser et la caisse ne pourrait pas procéder à des augmentations régulières des cotisations. Il faudrait plutôt concevoir une autre solution basée sur l’espérance de vie, les projections sur les prochaines retraites des décennies à venir, ainsi que sur les éventuels recrutements. A partir de cette base de données, un projet de refonte de la couverture sociale pourrait être envisagé. Les interventions de la caisse devraient aussi être plus rigoureuses notamment en matière de bonification. Pour ce qui est de l’âge de la retraite, toutes les options restent ouvertes. S’il est vrai que l’allongement de la carrière réduirait la chance d’un nouveau diplômé à être recruté, il est vrai aussi que la fonction publique est « surpeuplée » et que ce n’est pas l’admission, ou non, à la retraite qui va générer l’emploi. D’ailleurs, l’option adoptée partout dans le monde, c’est de retarder l’âge de la retraite à 62 ans, voire plus. Certains pays font travailler leur population active jusqu’à l’âge de 65 ans et laissent une option ouverte de prolongation pour certaines catégories socioprofessionnelles. A chaque pays, ses propres spécificités. La Tunisie a les siennes.  Donc, il serait souhaitable de les établir et de voir s’ouvrir, le plus tôt possible, ce dossier de révision du régime de la retraite.

 

Mourad SELLAMI

 

(Source: « Le Temps » (Quotidien – Tunis), le 2 avril 2007)


 

De quoi meurt le Tunisien

Dr. Samira Rekik

 

Maladies du système circulatoire, cancers, maladies de l’appareil respiratoire, maladies cardiovasculaires, accidents de la route, les causes provoquant la mort du Tunisien à un âge relativement jeune ne sont pas nombreuses et sont facilement évitables. Il suffit pour cela de respecter une certaine hygiène de vie. Enquête.

 

Loin de vouloir réduire le Tunisien à un simple tube digestif, il est facile pour tout un chacun de constater que manger à longueur de journée est un sport national.

 

Dès le matin, c’est un vrai dilemme qui démarre avec la sempiternelle question : qu’est-ce qu’on mange aujourd’hui, le matin, à midi et le soir?

 

Pour commencer ça sera un bol de sorgho, enrichi de grains de sésame, ou alors un beignet arrosé de sucre ou de miel, qu’il aura avalé debout et en vitesse chez le gargotier. Ça, c’est pour ceux qui quittent la maison de bonne heure. Ceux qui ont un peu plus de temps le matin se régaleront d’une bonne bssissa à l’huile d’olive, d’un œuf, de quelques dattes, d’un café au lait, d’un croissant ou d’une tranche de cake.

 

Arrivé sur le lieu de travail, la première chose à faire c’est de se précipiter pour aller chercher un « direct », un express, un allongé… et un indispensable paquet de cigarettes.

 

A l’heure du déjeuner c’est tout le pays qui court dans tous les sens pour avoir une place avant les autres, dans une gargote, dans un fast-food. La différence est dans la présentation, mais pas dans le menu. C’est partout de la friture, des pâtes et des féculents. Les plats soi-disant traditionnels, ne sont que des fonds de sauce très huileux, très épicés, très salés, auxquels on a rajouté quelques autres ingrédients. Le comble de lèse-gastronomie, c’est le fameux casse-croûte tunisien, à base de thon, crudités, huile et que tout le monde considère comme l’un des meilleurs en-cas.

 

Observez un Tunisien en train de se sustenter : il a toujours la bouche pleine, même entre deux bouchées, mange très vite, et fait passer les aliments à coups de boissons gazeuses.

 

Pour le dîner, le repas familial du soir n’existe presque plus. On mange à toute heure. Les pizzas, les sandwichs, les œufs au plat, les jus de fruits bien sucrés, les boissons gazeuses, les gâteaux, et pourquoi pas une crêpe au chocolat, après le film du soir.

 

En soirée, devant la télé, ou au cinéma pour les quelques rares qui y vont encore, on grignote des glibettes et quelques autres fruits secs.

 

Durant les fêtes, on excelle dans le domaine et l’on fait des surenchères en matière de malbouffe. Les deux Aïd, le Mouled, le nouvel an grégorien, le nouvel an de l’Hégire, le ramadan, les mariages, les fiançailles… c’est de la friture, du gras, du sucre, du sel…

 

Le sport ? Oui mais devant la télé avec café, cigarettes et grignotage. Moins de 2,7% de la population adulte pratique un sport.

 

Résultat : bonjour les problèmes, bien avant la cinquantaine !

 

Cocktails explosifs

 

Selon les chiffres de l’Institut national de la Santé publique, 39,8% des femmes et 35,4% des hommes ont de l’hypertension. 10% de la population âgée entre 35 et 70 ans est diabétique, 62,5% des femmes et 48,3 % des hommes sont obèses ou en surpoids. Et, pour finir, on a un taux de cholestérol des plus élevés avec 14,3% de la population.

 

Conséquences de ces chiffres : c’est le cœur qui ne va plus, c’est le cancer qui s’installe, c’est le pronostic vital qui est en jeu. Ajoutons à tout cela que 52,8% des hommes et 5,2% des femmes sont des fumeurs. Quant au pourcentage des personnes qui consomment de l’alcool en Tunisie, on ne le saura jamais. C’est un sujet tellement tabou que personne n’ose en parler. On possède cependant ce chiffre indicatif qu’on tire de la Bourse de Tunis : la SFBT produit plus de litres de bière que toutes les boissons gazeuses réunies dont elle a l’autorisation d’exploitation (Coca, Fanta, Boga et quelques autres marques réputées).

 

Le parcours du système de santé en Tunisie est considéré à juste titre comme une succes story. Baisse du taux brut de mortalité, baisse du taux de mortalité infantile, baisse du taux de mortalité maternelle, baisse de l’indice synthétique de fécondité, taux de vaccination dépassant les 95%, recul de toutes les maladies infectieuses, accessibilité pour tous au système de soins, et surtout augmentation de l’espérance de vie à la naissance, qui est actuellement de 75 ans pour les femmes et presque 74 ans pour les hommes.

 

Le profil épidémiologique de la population a changé. Les maladies liées au sous-développement, telles que les maladies infectieuses, les maladies transmissibles, les malnutritions et autres ont été éliminées. Il se trouve cependant que toutes ces maladies ont laissé la place à de nouvelles pathologies. De la même façon les causes de décès ne sont plus liées aux maladies contagieuses (tuberculose, paludisme), mais elles sont liées désormais à notre mode de vie. Cette transition épidémiologique nous rapproche, sur le plan des maladies, des populations des pays développés.

 

Il n’est pas étonnant par conséquent de savoir que la dernière enquête réalisée par l’institut National de la Santé Publique, classe parmi les premières causes de décès chez les Tunisiens les maladies du système circulatoire, cancers, traumatismes accidentels et les maladies de l’appareil respiratoire.

 

Au constat de ces premières causes de décès que sont les maladies cardiovasculaires, les cancers et les accidents de la route, il apparaît que le comportement nutritionnel du Tunisien est pour beaucoup dans sa propre mort.

 

La mauvaise hygiène alimentaire

 

Les facteurs de risque pour les maladies cardiovasculaires et les cancers étant les mêmes, le meilleur cocktail qui mène vers ces fins macabres, c’est d’associer le tabagisme à la sédentarité, à l’obésité, et le diabète à l’hypertension et à l’hypercholestérolémie, ou encore mieux tous ces facteurs ensemble.

 

Autrement dit, mangez n’importe quoi, n’importe comment, ne faites pas de sport, abusez des sucreries, fumez, buvez de l’alcool sans modération et ne vous étonnez pas du résultat.

 

Ainsi, il est bon de rappeler que l’association hypertension + tabac multiplie par douze le risque de faire un infarctus du myocarde.

 

Les fumeurs et les ex-fumeurs font trois fois plus d’infarctus du myocarde.

 

Les diabétiques obèses multiplient ce risque par dix.

 

Une augmentation de 10% du taux de cholestérol sanguin accroît de 20% le risque de l’infarctus du myocarde.

 

Concernant les cancers, on apprend que 18,2% des hommes et 14% des femmes meurent d’un cancer, ce qui représente la deuxième cause de décès en Tunisie.

 

Cette pathologie est appelée à se développer du fait du vieillissement de la population et la multiplication des facteurs de risque en rapport avec l’adoption de nouveaux modes de vie (tabac, exposition au soleil, infections sexuelles et nouveaux modes alimentaires.

 

D’après l’Institut National de la Santé Publique, l’incidence de tous les cancers est de 100,1/100.000 pour le sexe masculin et 86,4/100.000 pour le sexe féminin.

 

Selon les chiffres de l’INSP et de l’Organisation mondiale de la santé, les cancers les plus répandus sont pour les hommes ceux du poumon (27,6/100.000), de la vessie (13,1/100.000), de la peau (7,2/100.000) et de la prostate (6,1/100.000).

 

Pour les femmes, les cancers les plus répandus sont ceux du sein (23,6/100.000), de la peau (7,5/100.000) et du col utérin (5,8/100.000).

 

Mortalité infantile

 

La mortalité infantile est passée de 51,6‰ des naissances en 1985 à 24 ‰ en 2001.

 

La plupart des décès qui touchent les enfants de moins de cinq ans sont dûs en particulier à des maladies sur lesquelles les moyens d’agir existent, comme les infections aiguës des voies respiratoires inférieures (principalement de la pneumonie), les maladies diarrhéiques, la rougeole et les pathologies en rapport avec les périodes périnatale et néonatale. L’accouchement prématuré et les infections néonatales, restent assez fréquents, malgré la mise en place d’un programme national de surveillance de la santé maternelle et infantile, très ambitieux. Ce programme a pour objectif de baisser la mortalité infantile en dessous de la barre de 20 décès pour 1.000 enfants, et de baisser le taux de mortalité maternelle qui est estimé à 54 décès maternels pour 100.000 accouchements. Mais il y aurait une sous-déclaration de cette cause de décès.

 

Il est donc très clair qu’en respectant une bonne hygiène de vie et qu’en écoutant surtout les conseils de son médecin, on peut réduire considérablement les causes de mortalité, allonger sa durée de vie et en améliorer la qualité. Tout est dans la modération, la nature hait les excès.

 

(Source: « Réalités » (Magazine hebdomadaire – Tunis), N° 1109 du 29 mars 2007)


 

 

Egypte:

Moubarak ou la tentation monarchique

Par : Ridha KEFI

 

Comme si le dispositif constitutionnel et politique visant à permettre une passation de  pouvoir de Hosni Moubarak, bientôt 79 ans, dont 26 à la tête de l’Etat, à son fils Gamal, 43 ans, leader du Parti national démocratique (PND, au pouvoir), n’était pas déjà suffisamment cadenassé, le raïs égyptien a cru devoir y rajouter un énième tour de vis.

 

 C’est là, en tout cas, l’objectif principal – quoique inavoué – du référendum organisé le 26 mars dans le pays de Ramsès II, dans la quasi-indifférence d’un électorat qui ne voit plus vraiment d’utilité aux urnes.

 

 

Encore une fois, l’amendement constitutionnel est passé comme une lettre à la poste. Il a suffi de quelques bulletins dans les urnes pour que le tour fût joué. D’ailleurs, le suspense était mince et la mobilisation faible, trop faible. Et pour cause: les électeurs égyptiens n’ont pas pu mesurer la portée des amendements proposés, compte tenu du court délai qui a séparé l’approbation des modifications constitutionnelles par le Majlis Echaâb (Assemblée du peuple, parlement) et la consultation populaire, soit moins de sept jours entre le 19 et le 26 mars. Selon d’autres analystes, les Egyptiens ont retenu la leçon des deux référendums constitutionnels proposé en 1980 par feu Anouar Al-Sadate et en 2005 par le même Moubarak, et dont les résultats étaient presque connus d’avance.

 

Quoi qu’il en soit, trois électeurs sur quatre ont exprimé leur désaffection en s’abstenant de se rendre aux urnes. On peut estimer qu’un certain nombre d’entreux l’ont fait en réponse aux appels au boycottage lancés par les partis de l’opposition.

 

 

Les absents – et abstentionnistes – ont-ils tort ?

 

Résultat des courses: dans leurs reportages en direct des grandes villes comme Le Caire, Alexandrie et Port-Saïd, les chaînes satellitaires arabes ont montré des bureaux de vote quasiment déserts. Ahmed Ezz, l’un des responsables de la campagne du PND, justifie le fait que trois électeurs sur quatre ne se soient pas exprimés par le nombre trop faible des bureaux de vote (9900).

 

Par ailleurs, selon les organisations non gouvernementales (ONG) et les témoignages recueillis par les journalistes sur place, de nombreuses irrégularités ont entaché le scrutin. «Une fraude flagrante a marqué les dernières heures du référendum», a ainsi indiqué le centre Hicham Moubarak pour les droits de l’homme, qui a relevé trois phases dans le vote: d’abord une très faible affluence, évaluée par l’Organisation égyptienne des droits de l’homme (OEDH), une groupe indépendant, «autour de 5 %» et les Frères musulmans, principal mouvement d’opposition, à 9 %, malgré les appels réitérés du président égyptien et de son fils Gamal, invitant les Egyptiens à participer au référendum, puis l’acheminement en bus par le PND (au pouvoir) d’électeurs et, enfin, le «bourrage des urnes» pour atteindre un taux de participation plus ou moins décent. Ce qui a fait dire à Moustapha Kamel el-Sayed, professeur de sciences politiques à l’Université américaine au Caire, que le dernier «scrutin n’a pas de légitimité, faute de consensus».

 

L’organisation professionnelle des juges a dénoncé, pour sa part, des résultats entachés de fraude. «Les juges se lavent les mains des résultats du référendum», a ainsi déclaré Ahmed Sabr, porte-parole du Club des juges. Selon ce dernier, les juges, qui avaient déjà supervisé le référendum de 2005, ont été empêchés de faire leur travail, la tâche étant rendue impossible par le grand nombre de bureaux de vote à surveiller et l’ingérence des autorités qui ont «publié des instructions interdisant aux juges de se déplacer».

 

Malgré le taux d’abstention très élevé – puisque, de l’aveu même des autorités, seulement 27,1 % des plus de 35 millions d’Egyptiens inscrits sur les listes électorales ont participé au référendum, chiffre avancé par le ministre de la justice Mamdouh El-Marei dans un discours à la télévision égyptienne -, les 34 amendements constitutionnels ont été adoptés sans coup férir avec 75,9 % des suffrages exprimés, selon les résultats officiels annoncés le 27 mars. Au grand dam de l’opposition, islamiste et autres, des défenseurs des droits de l’homme et de quelques observateurs occidentaux dont les voix furent cependant trop timides pour être un tant soit peu audibles.

 

C’est qu’en Egypte, pas moins qu’ailleurs dans ce Grand Moyen Orient qui rechigne à se réformer – au grand désespoir du président Bush -, les résultats des référendums viennent souvent répondre aux espoirs de ceux qui les organisent.

 

De même, les gens, à l’intérieur comme à l’extérieur, finissent par ne plus y réagir, par lassitude, résignation, mépris ou les trois à la fois. C’est ce que les analystes politique arabes appellent «ouzouf» (abandon, indifférence, laisser-faire…)

 

 

Des «réformes» sur la voie de la démocratie, affirme le raïs

 

Pour le PND, cependant, qui les a présentés, les derniers amendements sont des «réformes» sur la voie de la démocratie. Ainsi, quarante-huit heures avant le début de la consultation, le chef du parti au pouvoir, le président Moubarak, avait-il plaidé pour les volets les plus controversés de cette série d’amendements, qui prévoient notamment une extension des pouvoirs de surveillance des communications privées, une limitation du contrôle judiciaire des élections et un pouvoir discrétionnaire de dissolution du Parlement accordé au président. «J’ai appris (…) les dangers de mêler la religion à la politique et la politique à la religion. Les amendements constitutionnels (…) devraient prévenir toute incursion dans la religion et toute atteinte à l’unité de ce pays», avait souligné Moubarak, estimant que l’Egypte se doit d’écarter les dangers du sectarisme et du terrorisme.

 

L’idée maîtresse de cette modification institutionnelle – l’interdiction des activités politiques fondées sur la religion – est de fournir aux autorités les moyens d’interdire les Frères musulmans, qui ont obtenu un cinquième des élus au Parlement en 2005.

 

Lors d’une adresse télévisée à la nation environ une heure après l’annonce des chiffres, le président Moubarak s’est montré très satisfait du résultat et a déclaré que «le peuple est le vrai vainqueur de ce référendum». Pour lui, les amendements «donneront une impulsion à l’activité des partis», «protégeront la nation du danger du terrorisme» et en finiront avec «le commerce de la religion et les activités politiques illégales».

  

C’est un revers pour la démocratie, répond l’opposition unie

 

Les ONG des droits de l’homme estiment, pour leur part, que cette réforme et ce scrutin, convoqué à la hâte, constituent des revers pour la démocratie. Amnesty International y a vu la «plus grande érosion des droits de l’homme» depuis l’entrée en vigueur de l’état d’urgence, décrété après l’assassinat du président Sadate, en 1981. Les Etats-Unis – principal soutien au régime égyptien en place – n’ont pas manqué d’exprimer leur inquiétude.

 

En route pour l’Egypte, le 24 mars, le chef du département d’Etat, Mme Condoleeza Rice, a ainsi fait part de son «espoir que (le référendum) soit un processus qui donne la parole à tous les Egyptiens», mais s’est «inquiétée» du «danger de voir cet espoir déçu».

 

Ce «service minimum», qui s’apparente à un blanc seing, s’explique par le souci de la Maison Blanche de conserver le soutien du Caire dans sa politique irakienne, quitte à mettre en sourdine ses exigences antérieures de réformes démocratiques en Egypte. Cela n’a pas empêché Le Caire d’y voir une ingérence insupportable dans ses affaires. Le ministre égyptien des Affaires étrangères égyptien, Ahmed Aboul Gheit, a d’ailleurs vivement réagi aux critiques de Mme Rice, déclarant qu’«en dépit de ses relations amicales et stratégiques avec les Etats-Unis, l’Egypte ne peut accepter l’ingérence dans ses affaires d’aucun de ses amis». Le président Moubarak a prévenu, de son côté, qu’il ne céderait à aucune «pression», fut-elle amicale.

 

De plus en plus unie contre le régime, l’opposition a vu dans le dernier amendement une accentuation du verrouillage de la vie politique et des atteintes aux libertés publiques et à la vie privée, au nom de la lutte contre le terrorisme.

 

Interdits mais tolérés et contrôlant un cinquième des sièges du Parlement sous l’étiquette d’«indépendants» (88), les Frères musulmans n’ont pas manqué de faire entendre leur opposition à l’amendement constitutionnel, se considérant, à juste titre, visés par l’interdiction de «tout parti» et «toute activité politique» sur une base religieuse. Selon Mohamed Habib, numéro deux du mouvement, les résultats du référendum ont été «truqués à 100 %». «Aucun Égyptien sain d’esprit ne peut accepter ces résultats officiels», a assuré Abdel Halim Kandil, un des dirigeants du mouvement d’opposition Kefaya.

 

Les Frères musulmans, autant que les autres mouvements de l’opposition – comme les partis libéraux al-Wafd et al-Ghad, dont le leader Ayman Nour est en prison, Tagammou (marxiste) et al-Karama (nassérien) – ont d’autant plus raison de rejeter les nouvelles dispositions de la constitution qu’ils seraient tous dans l’impossibilité de présenter un candidat à la prochaine  présidentielle, prévue pour 2011, contre le candidat du PND. Ce dernier pourrait être, selon toute vraisemblance, Gamal Moubarak, après un passage comme premier ministre.

 

Reste que le dernier tour de vis constitutionnel pourrait avoir, pour le régime, des conséquences moins heureuses. Car en verrouillant davantage la scène politique sous prétexte de fermer la voie aux islamistes, le régime de Moubarak pourrait susciter des sentiments de colère chez certains de ses opposants islamistes, qui pourraient alors, par dépit ou par désespoir, succomber à nouveau aux sirènes de la violence politique.

 

Ce n’est pas là, on s’en doute, la meilleure façon pour lutter contre la montée du jihadisme en Egypte et dans toute la région.

 

 

Principaux articles amendés

 

L’article 5, amendé, interdit les partis politiques ou toute activité politique avec «une référence ou une base religieuse».

 

L’article 88, amendé, remplace la supervision de «chaque urne par un magistrat» prévue par la Constitution par une «haute commission indépendante» chargée de suivre le processus électoral dans son ensemble.

 

L’article 136, amendé, stipule que le président n’a plus besoin de l’approbation populaire par le biais d’un référendum avant de dissoudre le Parlement.

 

L’article 179, amendé, permet aux autorités d’arrêter des suspects, de fouiller leur domicile, de surveiller leur correspondance et de mettre leurs communications sur écoutes sans mandat judiciaire. Il accorde au président le droit de faire juger les crimes de terrorisme par «tout organe judiciaire reconnu par la Constitution ou cité par la loi». Il peut ainsi soustraire à la justice ordinaire les personnes soupçonnées de terrorisme et les déférer devant des tribunaux militaires et d’exception.

 

(Source: « Le Temps » (Quotidien – Tunis), le 2 avril 2007)


Olmert et l’initiative arabe de paix au Proche-Orient

 
Azmi Bishara – Al-Ahram Weekly www.info-palestine.net , vendredi 30 mars 2007 – « Israël est en train d’exiger l’absurde mais l’illusion qu’il veut créer se dissipera quand les Etats arabes comprendront que le jeu politique d’alliance qu’on leur propose n’est pas dans leur intérêt », écrit Azmi Bishara. Quelques [dirigeants] arabes ont accueilli favorablement les déclarations d’Ehoud Olmert disant que si l’initiative arabe de paix était légèrement modifiée, elle pourrait servir de base de négociations. Plus précisemment, Olmert considère la référence faite à la résolution 194 de l’Assemblée Générale de l’ONU par l’initiative arabe de paix comme un défaut qu’il faut corriger et une ligne rouge qu’aucun gouvernement israélien ne pourrait probablement dépasser. Ce qui est recherché derrière ces déclarations n’est un secret pour personne. En effet, Olmert lui-même ne prend aucun soin pour le cacher. En premier lieu, Olmert dit qu’Israël ne peut pas ignorer les développements positifs qui se sont produits dans les Etats arabes modérés, et pour prendre cela en compte, Israël a soudainement et non sans surprise, jeté un coup d’oeil sur l’initiative arabe de paix qu’il avait ignoré pendant cinq années pleines. Ce qui est positif dans l’évolution des Etats arabes modérés, selon Israël, est d’abord leur prise de position dans la guerre menée par Israël contre le Liban et ensuite leur contribution à forcer le Hamas à accepter les conditions israélo-américaines. Ces efforts, toujours en vigueur, se font faits à différents niveaux de confidentialité et il semble que beaucoup d’officiels arabes ont confié aux israéliens ce qu’ils avaient sur le cœur. D’une part, l’influence des néo-conservateurs aux Etats-Unis a commencé à disparaître dans ce tourbillon noir du néant où réside maintenant Sharon dans le coma, ce qui a permis aux gouvernements arabes modérés de commencer à récupérer plus de liberté de manoeuvre dans la région. D’autre part, à la suite de l’échec de l’invasion israélienne du Liban, ces Etats ont acquis une plus grande marge de manœuvre découvrant du coup que leurs propres attitudes ont changé face à l’influence grandissante de leurs propres conservateurs pour qui l’amour de la démocratie locale ou importée n’a d’égal que leur répugnance pour l’argent et le pouvoir. Les Etats arabes modérés respirent beaucoup mieux maintenant. Les belles années arrivent. Sont maintenant parties, toutes ces longues années maigres de 2001 à 2006, où la seule ligne de conduite de ces Etats était d’éviter la colère délirante des Etats-Unis déclenchée par le 11 septembre. Il s’agissait pendant ces années de marcher jusqu’au mur, d’embrasser la main qui vous nourrit (même si on prie de la voir se briser) et comme le dit le proverbe arabe, de « garder le mal à distance et de lui chanter une chanson. » Et quelle misérable vue avaient ces Etats quand ils pleuraient en répétant le refrain plaintif, « mes yeux rient, mais mon coeur pleure, » à chaque visite d’un fonctionnaire américain, comme des amoureux au cœur brisé, déconcertés par les sautes l’humeur inexplicables du président de l’Empire et stupéfiés par les conseils malveillants de ses conseillers qui donneraient leurs âmes à son vice-président tellement magnanime. Il est difficile de dire si les Arabes ont récupéré une marge de manoeuvre parce que l’Amérique s’est embourbée de façon spectaculaire en Irak et parce qu’ils ont réalisé ce que c’était une folie de tenir compte des ordres de Washington alors que l’armée israélienne commençait à se casser franchement la figure au Liban, ou parce que, pendant la guerre du Liban notamment, ils ont compris qu’ils étaient autant hostiles aux « extrémistes » dans la région que les néo-conservateurs américains mais qu’ils étaient certainement plus réalistes et non portés sur les rêves d’exporter la démocratie et d’autres facettes du romantisme idéologique des néo-conservateurs en ce qui concerne Israël et son rôle régional. Tous les faits le prouvent, les Etats-Unis relâchent la laisse et l’Israël d’Olmert est en train de prendre les soi-disants Etats arabes modérés plus sérieusement que cela n’a été fait sous Sharon. Retournons donc à Olmert. Pourquoi met-il en avant notamment la résolution 194 bien que l’initiative arabe de paix ne mentionne (malheureusement) pas explicitement le droit au retour des Palestiniens mais se limite plutôt à la formule « d’une paix juste selon » cette résolution ? Pourquoi, aussi, ne nous rappelle-t-il pas qu’il refuse de se retirer des territoires occupés en 1967 y compris Jérusalem ? C’est pourtant cela qu’il avait déclaré clairement à plusieurs occasions, allant jusqu’à accuser Ehoud Barak d’abandonner Jérusalem au cours des négociations de camp David II alors que Barak n’avait rien fait de la sorte. Premièrement, Olmert aime « saucissonner » ses objections pour qu’il puisse extorquer plus de concessions aux Arabes d’une manière progressive. Deuxièmement, il n’a pas voulu évoquer le sujet du retrait des territoires occupés pour ne pas saper les efforts « de l’axe arabe modéré » avant le sommet de Riyad, d’autant plus qu’il sait que l’Arabie Saoudite ne bougera pas un doigt sur la question des frontières et de Jérusalem en particulier. Alors pour ne pas gêner les « modérés », il a limité ses remarques à la résolution 194, parce qu’il rejette par principe le droit des Palestiniens au retour. Mais, supposons par hypothèse que les Arabes jouent le jeu d’Olmert et abandonnent tacitement le droit de retour des Palestiniens, Israël accepterait-il pour autant l’initiative arabe de paix ? Certainement pas. Et nous avons intérêt à ne pas nous faire d’illusions pour croire cela possible. Cela ne servirait que de base de négociations, ce qui veut dire qu’Israël accepterait d’abord le principe de retrait des territoires, puis il marchanderait la profondeur et le phasage de ce retrait et enfin les frontières finales. En un mot, Israël n’accepterait rien de l’initiative de paix arabe. En acceptant de considérer cette initiative, Israël espère la transformer en une machine d’extraction de compromis au détriment des Arabes, tout comme il avait transformé les accords d’Oslo avec l’Organisation de Libération de la Palestine en un processus prolongé pour mettre les Palestiniens au pied du mur. Alors que nous pouvons identifier dans le passé les ruptures défavorables aux Palestiniens et aux Arabes dans leurs relations avec Israël, il devient difficile maintenant de discerner même les coins et les recoins tant le processus d’extraction est devenu fluide et tortueux dans un environnement dominé par les jeux entre les « modérés » et les « extrémistes », dans le cadre d’une attente sans fin des élections israéliennes d’un côté et américaines de l’autre pour déclancher de nouveau l’envoi de séries de « missi dominici » dans la région, et de nouveau des élections palestiniennes se heurtant à un blocus suivi d’une autre période d’attente pour voir comment un peuple sous occupation peut faire face à un étranglement économique et si oui ou non il peut former un gouvernement d’unité nationale pour mettre fin à un blocus qui peut de nouveau entraîner une autre période d’attente. En plus de la tentative de jeter de nouvelles bases pour un « processus de paix », après que la feuille de route ait été neutralisée par l’initiative arabe de paix (d’ailleurs, qu’est devenue la Feuille de route ? Quelqu’un a-t-il fait le compte du nombre d’années, de conférences et d’argent gaspillé en la matière ?), Israël est en train de passer la pommade au « camp modéré ». Avec la fin de l’ère des néo-conservateurs, il veut se présenter comme leur interlocuteur naturel au moins jusqu’à un autre sommet arabe. Après tout, il sait que maintenant il doit accepter ces régimes arabes exactement comme ils sont, tout comme les Etats-Unis semblent retourner à une improbable guerre froide dans laquelle les régimes sont classés par catégorie. « Ceux qui sont avec nous sont modérés, et ceux qui sont contre nous sont extrémistes. » Israël reconnaît également le changement manifeste et « positif » dans les attitudes de ces régimes envers lui. Simultanément cependant, il craint que la liberté nouvellement trouvée que ces régimes ont acquise, peut leur faire tourner la tête et les pousser à aller à l’essentiel qui les pousserait par exemple à décider de se coordonner avec les « extrémistes » pour résoudre leurs contradictions régionales. L’accord de la Mecque entre le Hamas et le Fatah est un petite illustration de ces possibilités. Bien que cet accord n’ait pas résolu un problème régional, il a apporté quand même du sang neuf. Bien que les dilemmes du Moyen-Orient ne soient probablement pas le produit direct de la stratégie de créer des blocs régionaux, cette stratégie a certainement aidé à rendre ces dilemmes encore plus insurmontables. Prenons le cas de l’Irak, par exemple. L’Amérique a mis le feu en Irak, mais ce feu a été attisé par suite par les diverses interventions de ces blocs en opposition. L’Irak est devenu le lieu de confrontation des puissances régionales au lieu d’être une arène de coopération régionale dans laquelle les gouvernements pourraient travailler ensemble pour maîtriser l’enfer au lieu de l’alimenter. Naturellement, les Etats-Unis devraient se retirer d’abord de l’Irak et s’abstenir ensuite de mettre le feu à d’autres points sensibles de la région comme ils l’avait fait et perfectionné pendant la guerre froide. Le Liban offre une illustration plus éclatante que l’Irak. Le problème du Liban pourrait se résoudre avec une plus grande facilité. Qui l’a rendu si complexe ? Voici un pays avec des milliers de personnes prêtes à payer de leurs vies pour forcer une puissance occupante étrangère à se retirer, si en effet la présence de cette puissance constitue bien une occupation étrangère. Pourquoi cela ne se fait-il pas ? Cela s’explique peut-être par le fait que certaines parties qui s’étaient alliées avec l’ancien gouvernement affirment maintenant et rétroactivement qu’elles étaient « sous occupation » et elles exigent la chute d’un gouvernement que l’Amérique soutient dans le cadre de sa politique « anti-extrémiste », raison pour laquelle l’Amérique ne tolère pas les parties en question. Soit le gouvernement libanais précédent qui comptait certaines personnes qui le contestent aujourd’hui dans les capitales étrangères, n’était pas un occupant étranger qui méritait que l’on sacrifiat sa propre vie pour le chasser (…) soit le Liban est devenu le théâtre de rivalités régionales. La psychologie et la logique ne peuvent expliquer les réalignements des différentes parties comme par exemple le passage d’un alignement sur la Syrie, l’Iran et la Résistance à un alignement sur le camp opposé. Cela n’a rien à voir avec des personnes qui rejetteraient l’extrémisme pour devenir tout d’un coup modérées. Leur réalignement sur le camp opposé ne sert en fait que leurs propres intérêts. L’alliance précédente avec le régime qu’ils veulent aujourd’hui renverser, servait leurs intérêts à ce moment-là mais plus maintenant. La satisfaction des intérêts étroits est l’essence du jeu actuel des alliances politiques et c’est la seule explication de la façon dont le problème libanais est devenu un bourbier dans un fatras de complications alors qu’il pourrait trouver facilement une solution. Supposez pour l’exemple, que la partie qui s’était opposée à la présence syrienne au Liban et qui, actuellement, s’oppose avec la Résistance à l’axe américain, puisse participer au gouvernement actuel. Cela ne pourrait se comprendre dans la mesure où elle veut s’assurer que le gouvernement ne se retournerait pas contre elle. Une solution serait aussitôt possible si et seulement si l’autre partie principale peut accepter de l’embarquer dans le même bâteau. La condition principale de leur succès est qu’elles puissent toutes les deux soustraire le Liban aux stratagèmes de la politique régionale des alliances et dont la forme la moins démocratique et la plus pernicieuse est la politique américaine qui ne cherche simplement qu’à utiliser le Liban comme tremplin pour atteindre l’Iran. Le plus mauvais cauchemar actuel pour Israël est de voir les « modérés » se réveiller et comprendre que le jeu de la politique des alliances n’est dans leurs intérêts. Quand ces pays commenceront sérieusement à examiner ce jeu politique, à se demander s’ils sont eux-mêmes vraiment capables d’exiger le renversement d’un autre régime arabe ou de vouloir réellement que les choses commencent par là, ou quel prix ils devraient payer s’ils ne veulent pas cela ou s’ils veulent résister activement à ce jeu ou dans quelle direction, leurs actions seront les plus payantes à long terme, alors ils proposeront inévitablement des conclusions qui diffèrent radicalement de celles des maîtres de ce jeu. La même réflexion s’applique à la question d’une guerre contre l’Iran. Même le citoyen arabe moyen est capable de réaliser les conséquences désastreuses d’une telle guerre. En clair, la dernière chose qu’Israël souhaite est que les Arabes modérés puissent employer leur marge de manœuvre pour commencer à réflechir par eux-mêmes. En attendant tout cela, l’Amérique est dans une mauvaise passe. Elle est coincée entre la conflagration qu’elle a produite en Irak et relayée maintenant par d’autres et la nécessité d’une pause dans les autres petits conflits qui permettrait en retour de calmer les incendiaires en Irak. Les USA utilisent actuellement le même jeu qu’Israël dans ses relations avec les Arabes. Cela consiste à forcer l’Iran et la Syrie à modifier leur mauvaise image de marque créée par les médias américains en aidant l’Amérique à sortir du guépier irakien. « Aidez-nous et en échange, nous vous laisserons nous aider » semble être l’offre américaine magnanime, au mieux, « en échange, nous vous laisserons vous asseoir à la même table que nous à Bagdad. » Les USA s’imaginent que la Syrie et l’Iran sauteraient peut-être sur l’occasion parce qu’ils pourraient justifier cela comme une « victoire ». Cependant, les vraies victoires pour ces pays seront la fin du blocus que Washington impose à la Syrie, et la volonté de parler avec l’Iran ; ces deux attitudes ne s’obtiendront pas par les stratagèmes américains mais découleront de l’échec imposé aux Américains par la résistance au Liban, en Irak et en Palestine. A l’épreuve de tous les événements, le jeu américain en vient très souvent maintenant à se contredire lui-même. Il fluctue d’une part entre les tentatives de démonstration de force comme la réunion à Baghdad avec « l’exposition de la Syrie et l’Iran » en présence des dirigeants irakiens et d’autre part la soumission à contre-cœur au réalisme illustré par le rapport Baker-Hamilton. (Source : Article publié initialement le 22 mars 2007 sur Al Ahram Weekly (hebdomadaire anglais – Egypte) Lien : http://weekly.ahram.org.eg/2007/837/op2.htm Traduction de l’anglais : D. Hachilif


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