AP: Tunisie: manifestation hostile à la visite de Hillary Clinton
AFP: Tunisie: aide algérienne de 100 millions de dollars
Tunisie: manifestation hostile à la visite de Hillary Clinton
Tunisie : SP abaisse à son tour la note d’un cran à BBB-
Tunisie: aide algérienne de 100 millions de dollars
Une centaine de Tunisiens ont manifesté aujourd’hui à Tunis pour dénoncer la prochaine visite de la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton. “Clinton dégage”, “non à la présence américaine en Tunisie”, scandaient les manifestants près du ministère de l’Intérieur en brandissant des banderoles anti-américaines.
“Nous sommes contre la visite de Hillary Clinton, ou de n’importe quel représentant américain, nous n’avons jamais oublié les crimes américains en Irak”, a lancé Sofiane, un étudiant de 22 ans.
La secrétaire d’Etat américaine a quitté dimanche les États-Unis pour une tournée en Europe, en Tunisie et en Égypte, où elle est arrivée cet après-midi. Au cours de sa visite au Caire, Hillary Clinton devrait s’exprimer sur la situation en Libye voisine, où les forces fidèles à Mouammar Kadhafi enchaînent les victoires depuis une semaine.
A Paris, Hillary Clinton avait pris part aujourd’hui à une réunion des pays du G8 qui n’ont pas trouvé d’accord pour une zone d’exclusion aérienne ou des frappes ciblées pour faire plier le régime libyen.
Concernant l’Égypte et la Tunisie, dont les présidents ont été renversés par des soulèvements populaires en janvier et février, Hillary Clinton a souligné la semaine dernière que pour Washington “c’est un enjeu énorme” de faire en sorte que ces deux pays “soient les modèles du type de démocratie que nous souhaitons voir”.
Source: “Le Figaro” le 16-03-2011
Tunisie. Béji Caïd Essebsi rassure les Algériens
Le Premier ministre Béji Caïd Essebsi a effectué, mardi, une visite de 24 heures à Alger pour «informer les autorités algériennes de la situation en Tunisie et écouter leur avis».
Cette visite, la première d’un Premier ministre tunisien à l’étranger depuis la chute de l’ex-président Ben Ali, le 14 janvier, marque le retour de la Tunisie sur la scène diplomatique, après trois mois d’instabilité politique.
A son arrivée à l’aéroport d’Alger, M. Caïd Essebsi a été accueilli par le chef du gouvernement Ahmed Ouyahia et le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines Abdelkader Messahel.
«Je viens informer les autorités de la situation en Tunisie et écouter leur avis», a, ainsi fait savoir le Premier ministre, qui a eu, plus tard dans la journée, un entretien avec le président Abdelaziz Bouteflika.
La révolution en Tunisie a contribué au «renforcement de la volonté populaire, ce qui a consolidé les liens de fraternité et de coopération avec les peuples frères, notamment les peuples voisins liés par un destin commun de par les facteurs stratégiques, amicaux et historiques qui les unissent», a déclaré le Premier ministre cité par l’Aps.
«Le saut qualitatif opéré dans la vie des Tunisiens a engendré des données diverses sur les plans national, régional et international», a encore affirmé M. Essebsi, considérant que les Algériens étaient les «mieux placés» pour servir d’interlocuteurs avec lesquels il serait possible d’«opérer un échange de points de vue».
Akram Belkaïd, un confrère algérien basé à Paris, s’est interrogé récemment sur le silence de l’Algérie vis-à-vis de la révolution tunisienne. «A Tunis, à Sfax ou ailleurs, on est dérouté par la froideur d’Alger», bote Belkaïd. Il ajoute: «En un mot, ce pays qui vient de se libérer de ses chaînes attend encore le grand discours fraternel et amical qui viendrait de notre capitale. Un discours qui saluerait d’abord le courage des Tunisiennes et des Tunisiens et qui proclamerait de manière solennelle que notre pays saura être aux côtés de son voisin dans la période incertaine qui débute.»
En bon diplomate, M. Essebsi a tenu un discours d’ouverture et d’amitié, tournée vers l’avenir. La révolution tunisienne est une donnée nouvelle avec laquelle tous les gouvernements de la région vont devoir composer.
M. Essebsi est attendu aujourd’hui au Maroc où il achève sa mini-tournée maghrébine.
Source : « Kapitalis » Le 16-03-2011
Lien : http://www.kapitalis.com/fokus/62-national/3103-tunisie-beji-caid-essebsi-rassure-les-algeriens.html
Une lecture des défis pressants de la Tunisie
La révolution de la liberté et de la dignité du 14 janvier 2011 a brutalement mis le peuple tunisien face à sa capacité de se prendre en charge par lui-même et à être acteur, lui qui a été pendant des décennies bercé par une logique du tout « parachuté », « décidé par en haut ».
La brutalité du choc n’a pu être amortie en raison du désert politique dans lequel se trouve le pays, avec l’absence de partis politiques capables d’encadrer la voie vers une nouvelle réalité politique, sociale et économique, voir des personnalités reconnues qui inspirent la confiance, qui ont la capacité d’intégrer les aspirations du peuple et qui ont le charisme suffisant pour se prévaloir d’un leadership et de proposer une alternative qui remet le peuple tunisien en confiance. La situation est telle que la Tunisie n’a pas pu faire l’économie de trois gouvernements successifs en moins de 50 jours !!
A ce stade et à en croire les avis et les sondages, les Tunisiens semblent plus rassurés, plus confiants qu’il ya quelques semaines. Mais est-ce suffisant pour retrouver la voie du travail, de la construction économique et sociale, en plus de celle de la nouvelle Tunisie politique ? La majorité semble croire en des lendemains meilleurs, mais beaucoup avec une peur profonde que l’équilibre précoce actuel ne bascule et engage le pays dans une spirale destructrice où la recherche de l’intérêt suprême du pays affichée pourtant par la plupart des acteurs, laisse la place à des agendas politico-politiciens vers une quête effrénée du pouvoir sans vrais projets viables, sans moralité, sans éthique. La feuille de route pour l’élection d’une assemblée constituante annoncée pour le 24 juillet 2011 est-elle garante de la représentativité, dans cette assemblée, de la voix du peuple, sans que certains acteurs à position hégémonique bien organisés, sans contre poids, ne prennent en otage l’assemblée et donc le peuple ? Est-ce que cette feuille de route peut aussi garantir que toute tendance aussi minoritaire soit-elle, puisse avoir sa voix dans cette assemblée ? S’agissant d’un objectif extrêmement important qu’est la mise en place d’un nouveau projet de constitution, il est impératif que la feuille de route puisse adresser ces préoccupations.
Par ailleurs, et afin de permettre à tout citoyen tunisien de faire son choix en connaissance de cause, et dans la mesure où le paysage politique a totalement changé après le 14 janvier 2011, il y a besoin de mettre en place sans tarder, une série d’espaces de débats, télévisés surtout, impliquant tous les acteurs potentiels. La régulation, dès maintenant, du temps d’antenne accordé à ces acteurs devient une nécessité pour assurer l’équité, et éviter ce qu’on observe depuis quelques temps par rapport à certains visages politiques qui ne quittent plus les plateaux des chaines télévisées tunisiennes !
Afin de permettre au tunisien de retrouver sa sérénité et la confiance en l’avenir, il est plus que capital que notre économie reprenne sa vitesse de croisière dans les meilleurs délais. Les emplois fragilisés par les évènements de Décembre à Février doivent être sécurisés. C’est une priorité aussi importante que celle qui consiste à en créer d’autres. Le cercle vertueux du développement économique doit être remis sur les rails : le travail crée la richesse, qui contribue, à son tour, à la création de nouveaux emplois. Il est tout aussi important que les acteurs sociaux assument leurs responsabilités historiques face à la fragilité de la conjoncture actuelle pour appuyer ce retour à la normale loin des surenchères et des tentations de récupération. Il ne faut pas que la ferveur de la révolution nous fasse oublier les réalités économiques dans lesquelles la Tunisie essaie de se faire son chemin avec pour seul atout le génie de ses enfants.
Une des grandes difficultés de la période actuelle est que le gouvernement en place soit un gouvernement de gestion des affaires courantes avec pour principal objectif « réussir l’élection de l’assemblée constituante ». Cette gestion suppose ne pas s’engager dans des choix stratégiques politiques, économiques et sociaux qui pourraient affecter durablement l’avenir de la Tunisie et lier l’action d’un gouvernement futur émanant des urnes et donc des choix du peuple tunisien. Ceci ne semblait pas être respecté totalement au vu de ce que nous avons observé auparavant au niveau de l’activité du gouvernement et des partenaires sociaux.
La question devient plus critique quand on essaie d’avoir une lecture du calendrier possible après même le 24 juillet 2011. Dans les meilleurs des cas, le peuple tunisien aura sa nouvelle constitution pour la fin de l’année en cours, ce qui veut dire que pendant une année au moins, la vie politique, économique et sociale aura été gérée dans une logique de gestion des affaires courantes. Au terme du choix de la nouvelle constitution et donc du modèle politique futur (sous entendu Présidentiel, Parlementaire, mixte, etc..), le pays se lancera dans le choix, par les urnes, de la politique économique et sociale qu’il voudra avoir pour la période de 4 ou 5 ans (selon ce que prévoira la constitution) et donc l’élection de son Président et des forces politiques qui vont gouverner le pays sur la base d’un programme et donc d’un certain nombre d’engagements validés par le peuple. Dans le meilleur des scénarios, cette opération ne pourra se faire dans un délai inférieur à 9 mois, ce qui nous conduira à Septembre 2012 pour que la Tunisie puisse être dotée de façon démocratique de toutes les instances nécessaires à la gestion du pays.
Durant cette période, il est impératif que tous les acteurs politiques, économiques et sociaux soient au niveau de leur responsabilité historique vis-à-vis de leur pays pour faire en sorte que cette période se passe dans le respect des valeurs de la révolution et de celles qui nous rassemblent tous et qui font de nous tous un peuple unique. Il est tout aussi impératif que toutes les demandes qui peuvent émaner de tout un chacun d’entre nous, qui sont certes légitimes, restent dans le contour des prérogatives des instances qui gouvernent le pays en cette période de transition vers un pays démocratique.
Dans le même cadre, nous devons redoubler d’efforts pour rassurer les investisseurs étrangers qui ont fait le choix de venir créer des emplois chez nous, en martelant de façon systématique et à tous les niveaux que le peuple tunisien est et restera fidèle à ses engagements même si ces engagements ont été pris par un régime et un gouvernement devenus illégitimes, car tant qu’ils assumaient la responsabilité du pays, ils représentaient le peuple tunisien.
Notre révolution doit rester, comme elle a commencé, une révolution exemplaire à tous les niveaux. Son exemplarité est dans ses valeurs, son humanisme, son respect des droits de chacun, son sens de la responsabilité, sa quête du meilleur pour le tunisien en abolissant un régime abject, sans tomber dans le chaos.
Source : « Leaders » le 16-03-2011
Lien ;http://www.leaders.com.tn/article/une-lecture-des-defis-pressants-de-la-tunisie?id=4495
Le Retour en Tunisie
LE POINT DE VUE DE JEAN DANIEL
Jean Daniel a retrouvé chez les Tunisiens les intenses ferveurs de sa jeunesse. Il décrit les promesses, les angoisses d’une jeunesse qui a enchanté le monde.
Sur les Libyens, à Tunis où je suis, j’écoute les Tunisiens. Kadhafi, ils connaissent. Si l’on remonte un peu dans le passé, sans le sursaut d’un Bourguiba pourtant vieilli, ils auraient été absorbés par la Libye. Aujourd’hui, ils vivent sous la menace du dictateur de Tripoli, c’est ce qui les rend attentifs à bien des choses qui m’ont échappé à Paris. Les Tunisiens que j’ai rencontrés, si provisoires que leurs responsabilités soient supposées être, savaient déjà, depuis une semaine ou plus, que Kadhafi retenait ses troupes, rassemblaient ses tribus et ne subissaient pas de vrais revers. Qu’il croyait à ses chances de réussir une négociation et qu’il avait des appuis dans le monde arabe ou asiatique. Qu’il pouvait soit précipiter sa victoire, soit stopper son avance pour envisager une partition (la Cyrénaïque n’intéresse pas vraiment le matamore libyen).J’avais eu la candeur la semaine dernière de réclamer pour eux des armes : on m’a demandé à qui les donner.
Bref, les Tunisiens ont peur. Ils ont salué le geste solitaire de Nicolas Sarkozy qui efface les maladresses choquantes d’une diplomatie trop timorée. Mais, précisément c’est un acte solitaire. Alors, disent-ils, si cette annonce théâtrale d’une intervention n’est pas suivie d’effet, ce sera pire que si elle n’avait pas été faite, parce que la victoire de Kadhafi deviendrait alors insolente. Ces Tunisiens ont respiré en entendant une confidence faite par Alain Juppé. Au retour du Caire, notre ministre leur a laissé entendre que la Ligue arabe était moins hostile qu’on ne le disait à la création d’une « No flight Zone » au-dessus du territoire libyen. Chose curieuse, et pour eux choquante, seule l’Algérie y serait hostile. Cela ne va pas empêcher M. Caïd Essebsi,le nouveau Premier ministre, de faire une visite de courtoisie au président algérien et au roi du Maroc. D’autant que, pour ce qui est de Mohamed VI, les Tunisiens peuvent n’être pas étrangers à la décision qu’il vient de prendre de se diriger, même avec lenteur, vers une monarchie constitutionnelle. Chacun, certes, fait dépendre toute intervention d’une décision du Conseil de sécurité. Il n’est plus impossible, surtout si les conquêtes de Kadhafi s’accompagnent de massacres, que la Russie et la Chine reviennent sur leur refus. Mais pourquoi Sarkozy n’a-t-il pas attendu d’être suivi par les autres Européens avant de se prononcer ? Alain Juppé avait commencé à réhabiliter le Quai d’Orsay et on le dit maintenant furieux contre cette fameuse « diplomatie du perron » qui consiste pour le Président à rendre publiques ses décisions sans même en avertir son ministère.
Pour le moment, en tout cas aux yeux des Tunisiens la Libye est en mesure de détruire la nouvelle image que l’on avait du monde arabe, et même de l’homme arabe
Je partage évidemment ces inquiétudes qui ne me font cependant pas oublier que je suis aussi revenu dans ce pays pour retrouver ma jeunesse, pour dire ma gratitude, pour apprendre à nouveau l’espérance. Sans doute, au départ, ai-je eu la tentation de retrouver les « nourritures terrestres » et mes « noces », et je les ai découvertes ni à Biskra, ni à Tipasa, mais à Sidi Bou Saïd. Mais lorsque j’ai connu ce pays dans les années 54, la lutte pour l’indépendance y était incarnée par un homme exceptionnel, Habib Bourguiba qui a rapidement pris, pour son peuple, le visage du destin. Aujourd’hui, je retrouve une nation certes indépendante, mais enrichie d’une liberté que lui procurée l’audace de sa jeunesse. Cette nation a mille visages et elle n’en a aucun. C’est un vide rempli de toutes les virtualités, il est donc impossible de rien prévoir et interdit de rien exclure. Je me sens suffisamment proche de ce peuple pour m’émerveiller avec lui, comme en symbiose, de ce qu’il a fait et qu’il croyait ne pas pouvoir faire. A vrai dire, les Tunisiens ne sont pas encore revenus de leur audace, ou plutôt de celle de leur jeunesse, comme s’il fallait absolument une certaine fraîcheur et une grande innocence pour déclarer insupportable ce qui l’était depuis longtemps, et pour croire que l’on pouvait en finir enfin avec les humiliations infligées par un régime détesté. Sans doute y a-t-il eu pour permettre ce sursaut des faits exceptionnels, je l’ai dit à mes amis en réponse à une question qui m’était posée dans un débat au Collège international de Tunis. Supposez que le jeune Bouazizi, au lieu de s’immoler par le feu à Sidi Bouzid, ait commis un attentat suicide. On voit très bien ce que l’on aurait dit. Ce n’aurait été qu’un exemple de plus de ce saint fanatisme hérité d’une barbarie venue de loin, qui n’épargne pas les civils, et qui attend une récompense du ciel. A l’idée qu’un tel attentat pourrait inspirer des imitateurs, toutes les femmes tunisiennes ne se seraient pas mobilisées pour réveiller une nation comme elles l’ont fait. Le geste de Bouazizi a défanatisé le martyre, il l’a rendu exemplaire non pas au sens où l’on devrait suivre son exemple mais au sens où il fallait absolument se montrer digne de lui. Au sens où il culpabilisait ceux qui s’étaient accommodé du despote tout en déplorant chaque jour le déshonneur qu’il y avait à le subir.
Alors nous sommes maintenant en face d’un « équilibre instable » avec tous les dangers, tous les risques, toutes les angoisses que cela comporte. C’est en effet la stabilité qui faisait la force du despote et qui était partout louée. C’était la stabilité de l’ordre qui assurait en permanence une lâche solidarité des alliés, des voisins, et des gouvernements européens. Fin de la stabilité, fin de l’ordre. Au lieu de cela des pouvoirs difficiles à remplacer ou qui se redistribuent selon des critères encore incertains, des journaux multiples et des partis trop nombreux. Dans le discours, chacun prétend interpréter la volonté populaire, et cette préoccupation est assurément un acquis irremplaçable. Il y a des choses que l’on ne se permet plus, de peur que le peuple ne les refuse. Mais il y a aussi une difficulté à cerner le visage de ce peuple à qui l’on doit tout et qui reste plus ou moins introuvable, comme pendant la révolte de Mai 68 en France. Un homme cependant, me semble avoir trouvé les mots du consensus tout en affirmant son autorité. M. Caïd Essebsi, le nouveau Premier ministre, m’a paru être un disciple de Bourguiba avec lequel je lui vois bien des points communs. Comme son mandat est provisoire, et comme il vient à un moment où l’on se lasse de dire à chacun « dégage », alors il dispose d’une certaine autorité, dont il fait un usage calculé. Que découvrent aujourd’hui les jeunes révolutionnaires ? Que la contestation de l’autorité n’est pas l’insurrection, que l’insurrection n’est pas la Révolution, que la Révolution n’est pas la démocratie. C’est-à-dire qu’il y a des étapes à parcourir avant d’atteindre l’objectif. Et pour le moment, l’objectif, c’est la Constituante. Elle pose tous les problèmes. Dans l’histoire, on sait que de telles assemblées ont tendance à se transformer en institutions législatives. Et l’on sait aussi désormais et que l’élection des Constituants doit s’accompagner du maintien en place d’un pouvoir capable d’assurer un ordre sans despote.
Je veux revenir ici de revenir sur la Tunisie telle que son fondateur la conçue au moment de l’indépendance. Comme Bourguiba avait eu à lutter contre un parti néo-religieux appelé le Vieux Destour, il se méfiait des théologiens. Comme son principal rival, Salah Ben Youssef, s’arrimait au nassérisme, il redoutait le panarabisme. Et comme les paysans devenaient volontiers des fellaghas, c’est-à-dire des dissidents militarisés, il se méfiait à la fois des faiblesses du peuple et du danger que pouvait représenter le pouvoir d’une armée. Il ne devait jamais oublier aucun de ces éléments pendant son règne, qui a été marqué, au fond, en tout cas selon une thèse que j’ai fait mienne depuis longtemps, par l’idée qu’il se faisait d’un peuple composé essentiellement d’élèves dont il se voyait l’instituteur permanent et irremplaçable. Ce pédagogue a refusé de voir grandir son peuple tout en s’efforçant de faire son éducation et de libérer ses femmes. Il pratiquait une forme de despotisme éclairé. Quelle leçon à tirer pour aujourd’hui de cet exemple ? Peut-être d’espérer qu’après la chute du tyran qui a succédé à Bourguiba, surgisse un autre pédagogue de la démocratie qui serait, lui, à l’abri des tentations l’hubris.
Quelques observations, maintenant, sur des faits très simples qui m’ont frappé dans cette Tunisie que je retrouvais
Les femmes autant celles de la bourgeoisie que du peuple, m’ont paru s’investir de manière plus fervente et plus radicale que jamais. Autrement dit, l’émancipation dont elles ont été les bénéficiaires a été un facteur de progrès dans tous les domaines. Il se peut que la vie démocratique soit désormais animée par les femmes autant que par les jeunes. Le hasard a voulu veut que, vendredi dernier, jour de prière, parcourant, dans la Kasbah, le souk qui longe la mosquée, tandis que des haut-parleurs tonitruaient le prêche des imams, je n’ai pas aperçu une seule femme voilée. C’était pourtant le jour où, pour la première fois la Kasbah était à nouveau fréquentée dans l’euphorie,.la bousculade, la hâte, et une sorte d’avidité de se retrouver les uns les autres. On ne voyait des visages rassérénés. Stéphane Hessel et moi-même avons eu l’occasion de parler, dans une immense salle comble, des vertus de la démocratie et des mérites qu’il y avait à en être obsédé. Les quatre cinquième des assistants étaient des jeunes gens, parfois très jeunes, et la qualité de l’écoute était saisissante. Et relisant ces phrases que je viens d’écrire, je me demande d’où nous vient à tous cette candeur admirative, cette disponibilité émerveillée, alors que nous étions il y a si peu de temps dans le désenchantement ou dans les invitations à nous indigner. Je me dis qu’il y a tout de même un besoin de croire, contre toutes les raisons raisonnables, et que c’est peut-être, la non-violence de ces révolutionnaires qui nous en impose. Les intellectuels européens, depuis Hegel et Marx, ont estimé que la révolution et la violence étaient consubstantielles, que la violence était accoucheuse d’histoire, et il s’est même trouvé récemment un philosophe communiste réputé pour écrire que plus il y aurait de morts, plus il y aurait d’espoir. Qu’est-ce qui nous a éloigné des utopies, sinon la barbarie de ceux qui ont prétendu les mettre en pratique ? Maintenant, ayant dit cela, je me demande si les jeunes Tunisiens qui ont provoqué cet ébranlement et qui ont toutes les raisons d’en être fiers sont bien conscients de leurs responsabilités. Un échec de la grande aventure tunisienne serait désastreux non seulement pour la Tunisie, non seulement pour le Maghreb ni même pour le monde arabe, mais pour la Méditerranée toute entière et peut-être surtout pour notre capacité à croire en l’homme révolté.
P.S : Je voudrais rappeler, puisque certains amis tunisiens me font le redoutable honneur de me demander mon avis, que la Révolution du 14 janvier n’était prévue pas personne, qu’elle était opérée par des insurgés sans passé, et qu’il y avait tout de même, parmi ces élites si nombreuses, des opposants qui n’ont pas démérité et dont l’esprit de responsabilité m’a impressionné. On ne peut pas juger coupables tous ceux qui n’ont pas fait la révolution, puisqu’on n’avait même pas l’idée de la concevoir, et en tout cas ce propos vient de quelqu’un qui a suivi bien des révolutions. Le fait de juger doit être dominé par un souci ainsi formulé : Ce n’est pas parce que nous avons lutté contre la police que nous devons devenir des flics.
Source : « Le Nouvel Observateur » le 16-03-2011
Lien :http://jean-daniel.blogs.nouvelobs.com/archive/2011/03/16/le-retour-en-tunisie.html
Tunisie – Le Parti Républicain : présentation et orientations (mise à jour avec la fiche signalétique)
Le Parti Républicain, qui vient d’obtenir son visa, s’inspire directement de l’histoire de la Tunisie la plus prestigieuse, la République de Carthage, qui s’est fondée non pas sur la conquête par la force mais sur le rapprochement, l’échange et la prospérité des peuples de la Méditerranée.
C’est qui ressort d’un communiqué que nous a adressé ce parti, via l’agence conseil en communication, « Memac Ogilvy Label » et qui précise que le Parti Républicain considère comme des acquis définitifs la liberté et le droit à la dignité que la Révolution tunisienne a arrachés au prix du sang de ses martyrs.
Le Parti Républicain milite, ajoute le communiqué, à l’inscription de ces droits fondamentaux et du code du statut personnel dans la future constitution de la République, de même que les libertés individuelles, la séparation absolue des pouvoirs législatif/ exécutif/judiciaire et le droit de saisine constitutionnel par tout citoyen
Le même parti défend l’émergence d’une démocratie juste et durable et fonde son action sur les principes suivants, à savoir : la méritocratie, la responsabilité, l’imputabilité, la diversité, l’équité et le Pragmatisme.
Le Parti Républicain, qui ne se veut prisonnier d’aucun dogme ni idéologie, quels qu’ils soient, lit-on encore dans ce communiqué, prône le partage de la prospérité plutôt que de l’austérité. Il œuvre, naturellement, à la création des richesses mais aux fins de pouvoir disposer de plus pour mieux les répartir tout en s’inscrivant dans la spécificité tunisienne qui a su si bien intégrer Islam et modernité.
Mise à jour :
Le Parti Républicain
www.partirepublicaintn.com
Visa du Ministère de l’Intérieur obtenu le 14 mars 2011
Adresse : 4 rue Claude Bernard, 1002, Bélvédère.
Tél. : 71 786 381
E mail : prepublicain@gmail.com
Personnes formant le bureau politique :
– Abdelaziz BELKHODJA, Président d’honneur, écrivain et éditeur
– Kamel GHOZLANI, Secrétaire général, Consultant en organisation
– Noor HAMZA, Secrétaire générale adjointe chargée de la réglementation intérieure et de la trésorerie, Professeur d’anglais à l’école nationale de l’administration de Tunis (ENA)
– Amine BEN AYED, Secrétaire général adjoint en charge l’économie et du développement régional, directeur général d’une société industriel
– Selim AZZABI, Secrétaire général adjoint en charge de l’infrastructure et des études, expert financier
– Asma SASSI, Secrétaire générale adjointe en charge des relations extérieures, étudiante en Médecine
– Mehdi AZZOUZ, Secrétaire général adjoint en charge des affaires sociales, organisations nationale et de la vie associative, manager d’une agence de voyage
Source : « Business News » Le 16-03-2011
Laïcité Tunisienne, est-ce un Tabou d’en parler ?
Article premier de la Constitution – « La Tunisie est un Etat libre, indépendant et souverain ; sa religion est l’Islam, sa langue l’arabe et son régime la république »
Article 38 – « Le Président de la République est le Chef de l’Etat. Sa religion est l’Islam »
Article 40 – « Peut se porter candidat à la Présidence de la République tout Tunisien, jouissant exclusivement de la nationalité tunisienne, de religion musulmane… »
Sommes-nous prêts à amender ces articles et supprimer toute référence à la religion ? Peut-on introduire dans notre constitution la notion de laïcité Tunisienne ?
Soumettre cette question au suffrage universel me parait une évidence et une occasion historique qui s’offre au peuple Tunisien.
Sauf que pour porter le débat sur la scène publique pouvoir exposer, expliquer la laïcité, il faudrait conjuguer à la fois le courage politique mais également, le savoir, la maitrise et l’intelligence dans le discours.
La Tunisie qui est entrain d’accoucher de sa Deuxième république, est appelée à fonder les piliers de sa nouvelle constitution. Pour ce faire, une assemblée constituante sera élue le 24/07/2011 pour bâtir cette constitution sur laquelle la Deuxième république trouvera son fondement. Cette constitution qui fixera l’organisation de l’Etat et régira le fonctionnement de ses institutions.
Il est vrai que le peuple Tunisien est majoritairement (au moins officiellement) de religion musulmane mais il est difficile de connaitre les proportions exactes des pratiquants, des croyants non pratiquants, des juifs, des chrétiens, des athées et des agnostiques. Mais peu importe, quelque soit les proportions, la constitution doit garantir pour l’ensemble des Tunisiens ; qu’ils soient majoritaires ou minoritaires les mêmes Doits et Obligations.
Je disais que ce débat est aujourd’hui une occasion historique. Oui c’est une occasion qui se justifie aujourd’hui et plus que jamais surtout qu’on a reconnu enfin un parti politique islamiste.
Cela peut paraitre paradoxal mais en fait le débat ne pourrait être riche et constructif qu’en présence d’un tel parti sur la scène politique. C’est exactement pareil si on voulait parler de cinéma sans les acteurs ou débattre sur le sport sans les sportifs.
Je suis convaincu que débattre sur la laïcité Tunisienne avec un parti comme leMouvement de la tendance islamique (seul parti islamique ou islamiste reconnu à ce jour) ne peut qu’être bénéfique pour aller au bout de la réflexion et je dirais même donner une légitimité au choix final des Tunisiens quel qu’il en soit.
Mais que veut dire ce mot « Laïcité » et peut on avoir une Laïcité Tunisienne propre à nous et à nos valeurs ?
Je ne voudrais pas rentrer dans un débat idéologique, je me contenterai d’une définition simple et accessible. La laïcité est la séparation de l’Etat de toutes les religions et croyances. Ces derniers font partie du domaine privé alors que l’Etat fait partie du domaine public.
Être laïque c’est :
- respecter toutes les religions et croyances,
- garantir la liberté de conscience et de culte,
- affirmer sa religion, sa croyance sans s’imposer
- <!–[endif]–>être égal de droits indépendamment de sa religion ou croyance
Maintenant comment appliquer concrètement le principe de laïcité dans la société Tunisienne ?
Heureusement, qu’en Tunisie on ne part pas de zéro et que le principe de laïcité est dores et déjà appliqué dans certains domaines.
Un Etat Tunisien laïque cela voudra dire :
- Un Etat où l’état civil (acte de naissance, de mariage, de décès…etc.) est tenu par l’officier de l’état civil (la municipalité)
- <!–[endif]–>Liberté de choisir entre le mariage religieux et le mariage civil mais tous les cas c’est l’officier civil qui établira l’acte de mariage.
- Liberté à chacun de pratiquer la religion de son choix ou même de n’avoir aucune religion tant que cette pratique ne va pas à l’encontre des droits d’autrui (respecter les jeuneurs et les non jeuneurs)
- Liberté d’afficher son appartenance religieuse ou ses croyances par des tenus vestimentaires ou autres signes tant que cela ne va pas à l’encontre des droits d’autrui et de la morale collective
- Que l’Etat et ses institutions ne peuvent, dans l’exercice de leurs pouvoirs et mandats, distinguer entre les personnes sur des critères religieux
- L’Etat doit être le garant du respect de la laïcité dans ses institutions
Pour débattre sur la Laïcité Tunisienne (ses principes, ses fondements et ses applications dans notre société), il faudrait réunir aux moins deux protagonistes un qui est pour et l’autre qui est contre. Et c’est là où j’arrive au courage politique que je faisais allusion au début de mon papier. Courage, parce qu’il faudrait être prêt intellectuellement pour affronter une éducation, des habitudes bien ancrées dans la construction du Tunisien depuis son jeune âge. Nos grands parents, nos parents, nous-mêmes et nos enfants également, tous on a eu droit dans l’école publique à une éducation religieuse. Je ne porter aucun jugement de valeur sur l’éducation en général, je veux tout simplement que notre école publique n’exclut aucun tunisien. Qu’il soit musulman, juif, chrétien ou sans religion, le contribuable Tunisien, a droit d’être dans cette école publique et qu’on ne lui impose pas la religion de la majorité.
Parler de la laïcité Tunisienne c’est prendre le risque de nager contre courant et le risque de se faire battre dans les urnes. Mais, dit-on pas que les grandes causes se gagnent dans la douleur !!
Hélas, je n’ai pas entendu nos élites, nos politiques parler de ce sujet.
Est-ce par manque de courage politique ? Ou tout simplement c’est le sujet qu’il ne faut surtout pas évoquer. C’est TABOU HARAM !!
Source : « Agoravox » Le 16-03-2011
Lien :http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/laicite-tunisienne-est-ce-un-tabou-90648
L’Union européenne face au tsunami déclenché par la révolution tunisienne
En renversant le régime dictatorial et corrompu de Ben Ali, les Tunisiens ont déclenché un véritable tsunami politico-stratégique dont on n’a pas encore fini de ressentir les effets.L’Union européenne a quant à elle, visiblement, pris la mesure de l’évènement et de ses retombées. «Les évènements qui se jouent actuellement chez nos voisins du Sud sont historiques. Ils reflètent un processus de mutation profonde et auront des conséquences durables non seulement pour les populations et les pays de la région, mais aussi pour le reste du monde et pour l’Union européenne en particulier», observent la Commission européenne et la Haute représentante de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité (Mme Catherine Ashton), dans une «communication conjointe» préparée à l’adresse des institutions européennes (Conseil européen, Parlement européen, Comité économique et social européen et Comité des régions).
Les Vingt-sept en ont conclu que l’UE «ne doit pas être un spectateur passif» et «doit appuyer pleinement le souhait des peuples voisins de bénéficier des mêmes libertés que ses propres citoyens, qui les considèrent comme des droits». D’autant que «l’éclosion d’une démocratie à part entière n’est jamais un long fleuve tranquille; cette transition s’accompagne de risques et d’incertitudes».
Pour parer au plus pressé, l’UE a déjà pris rapidement des dispositions visant à aider les deux pays où la révolution s’est déjà opéré –la Tunisie et l’Egypte- à faire face aux premières urgences. La Tunisie ayant été la première à exprimer ses besoins, Bruxelles lui a accordé, à l’occasion de la visite de Mme Catherine Ashton, une enveloppe de 17 millions d’euros au titre de «soutien immédiat et à court terme à la transition vers la démocratie et d’aide aux zones intérieures frappées par la pauvreté» –et 258 autres millions d’euros pour la période 2011-2013, dans le cadre du Programme Indicatif National (PIN).
Mais le plus important, du point de vue européen, reste à faire. Car, pour nos voisins du Nord, «la transformation radicale du paysage politique dans le sud de la Méditerranée exige que l’Union européenne change de stratégie à l’égard de la région».
Déjà entamé, ce processus de remise à plat de la Politique de voisinage –qui va porter sur les «thèmes fondamentaux de la différentiation, de la conditionnalité et du partenariat»- aboutira à la formulation d’une nouvelle stratégie qui devrait être présentée en avril prochain.
Toutefois, la «communication conjointe» révélée le 8 mars 2011 en a déjà présenté les grandes lignes. Baptisée «Partenariat pour la démocratie et une prospérité partagée» (PDPP), cette nouvelle stratégie s’articule autour de trois axes: «une transformation démocratique et un renforcement des institutions», «un partenariat renforcé avec les populations» et «une croissance et un développement économique durable et inclusifs».
Source: ”wmc” Le 16-03-2011
Hannibal II pourrait être délivré dans les heures à venir. Deux ministères démentent.
Selon le site Cibletrade.com, dans les prochaines heures, Hannibal II et son équipage devraient être délivrés, d’après M. Farid Abbas, l’armateur de la société GMT dont dépend le navire, Abbas a souligné que la libération des 32 membres de l’équipage était imminente et n’était plus qu’une question d’heures. Cette libération devienne effective.
Abbas a aurait insisté, selon le site qui rapporte l’information, sur ce fait et il compte donner tous les détails relatifs aux négociations avec les pirates qu’une fois le Hannibal II et son équipage seront hors danger. Les transactions, avec les pirates somaliens, toujours selon la même source, pourraient avoir lieu à Djibouti. Toutefois, il est fort probable que d’ici ce soir, beaucoup de faits nouveaux vont intervenir.
Il est cependant important de noter, que ni le ministère du transport, ni le ministère des affaires étrangères n’ont confirmé cette information et l’ont même démentie.
Source:” African Manager” le 16-03-2011
Lien:http://www.africanmanager.com/articles/132465.html
Le football tunisien en quête de liberté
Certains joueurs ne sont plus payés. Pour s’en sortir, les clubs de l’élite cherchent un nouveau modèle économique, indépendant de l’État.
La Ligue 1 tunisienne est à genoux, le souffle coupé par le manque d’argent. Aucun match de championnat n’a été disputé depuis le 9 janvier. La 15e journée, maintes fois reportée, est en suspens. La fédération de football a nourri l’espoir d’une reprise le week-end dernier (12 et 13 mars), mais les dirigeants des clubs s’y sont opposés. Le problème de la sécurité dans les stades a servi leur refus. Les pouvoirs publics ont décidé de se délester de cette responsabilité. Dorénavant, la tâche incombe aux clubs. À charge pour eux de former en urgence et de rémunérer des bataillons de stadiers. “On n’est pas préparé à ça, explique un salarié de l’Espérance de Tunis. On ne peut pas former 300 ou 400 stadiers à la va-vite”. Le club a fait appel au RC Lens et à l’Olympique de Marseille pour lui porter conseil.
Puisque la formation demande du temps, la fédération a proposé une reprise de la compétition à huis clos. Une idée qui a fait grimacer les clubs. Ils seraient privés de la recette billetterie. Les stades vides n’attirent pas les annonceurs et ne vont pas favoriser le versement des droits TV. La télévision nationale tunisienne, détentrice des droits télé, a d’ailleurs déjà cessé le paiement. Les sources de revenus pour les clubs professionnels se sont taries les unes après les autres. Promosport, la société de paris sportifs, a cessé de reverser une partie de ses gains. Les sponsors n’honorent plus les contrats et les subventions municipales ont été réaffectées. La majorité des clubs ne peuvent plus verser leurs salaires aux joueurs. Pour Anis Benmime, avocat et conseiller juridique du Stade tunisien, “nous sommes dans une configuration de football professionnel virtuel : il n’y a pas de revenu fixe alors que nous devons assumer des charges fixes”.
Emploi
Le modèle économique est tout simplement à rebâtir. La révolte populaire, qui a soulevé le pays en janvier, a révélé la fragilité de celui en place. Les clubs sont boiteux à cause de leur statut d’association à but non lucratif. Par exemple, ils ne sont pas autorisés à ouvrir de boutique pour vendre écharpes et maillots à leurs couleurs. Patrick Liewig, l’entraîneur français du Stade tunisien, qui a travaillé au PSG dans les années 1990, est conscient de la nécessité d’une transformation : “Les clubs ne doivent plus être assistés, dépendre de l’État ; il est temps qu’ils soient gérés comme des entreprises. La Tunisie a de fortes compétences, les investisseurs vont s’y intéresser.”
En pleine crise, les joueurs ont obtenu le feu vert pour créer un syndicat des joueurs professionnels. Mohamed Salama, joueur du Club athlétique bizertin, fait partie de la délégation reçue lundi par le ministre de la Jeunesse et des Sports : “Il nous a encouragés.Le syndicat permettra de défendre les intérêts des joueurs en matière de contrats, d’assurances, etc. Jusqu’à maintenant nous n’avions pas de voix.” À l’heure où la Tunisie tente de se reconstruire politiquement et de lutter contre le chômage, le football n’est pas sa priorité. Mais il peut, lui aussi, permettre de créer des emplois. C’est l’argument avancé par plusieurs dirigeants pour inciter le gouvernement à les aider. Car avant de s’en affranchir, certains attendent un dernier coup de pouce de l’État.
Source: “Le Point” Le 16-03-2011
Lien:http://www.lepoint.fr/sport/le-football-tunisien-en-quete-de-liberte-15-03-2011-1306906_26.php
Tunisie : La majorité passive pourrait perdre les élections
Depuis la révolution du 14 Janvier à ce jour, une trentaine de partis ont vu le jour pour atteindre le nombre hallucinant de 37 partis politiques légalisés jusqu’à présent et ce nombre ne cesse de croître de jour en jour puisque sept autres partis politiques sont en instance de légalisation.
L’augmentation du nombre de partis reflète, certes, une dynamique politique en Tunisie mais chaque phénomène comporte ses avantages et des inconvénients.
En effet, l’ouverture brutale, après des décennies d’immobilisme, du champ politique a aiguisé les appétits, et la possibilité qui va avec de se propulser sur les devants de la scène et tant de places à prendre autant d’opportunités à portée de main car certains rendez-vous avec l’histoire ne sauraient être ratés.
Pourtant, cette dynamique politique et surtout la pléthore des partis politiques, salutaire en apparence, cache bien des idiologies incompatibles avec le souhait du tunisien voire des vices que le commun des mortels ne saurait deviner de prime abord.
Déjà que, dans ces partis politiques, se cachent des tendances nationalistes, ultra nationalistes, nassériennes, RCDistes, islamistes, sans oublier bien sur, et comment les oublier, les partis travaillistes et communistes et nous ne sommes pas apparemment au bout de la course. Derrière la façade des partis politiques fraîchement légalisés, existent des tendances qui font froid au dos.
Pour ce qui est des partis à tendance nationaliste, ultra nationaliste et nassériens ainsi que ceux à tendance islamiste, sans les citer, se cache des perspectives de l’unité arabe et du retour vers une autre époque, concept qui a montré ses limites, voire échoué à maintes occasions. Ces tendances n’ont rien à voir, par ailleurs, avec les raisons pour lesquelles s’est soulevé le peuple tunisien.
Pour d’autres partis, l’orientation RCDiste est à peine voilée, ce qui nous amène à penser que des éléments du RCD sont toujours actifs et souhaitent perpétuer le système qui leur a tant été bénéfique sous une autre forme mais avec le même esprit.
Du reste, les partis travaillistes, ouvriers et communistes obéissent à une autre logique de lutte des classes et du dictat du prolétariat se qui se trouve être à des années lumières du quotidien du tunisien moyen…
Il ne faut pas oublier, non plus, le manque de clarté dans la définition des orientations stratégiques et des postulats de base de ces partis. Une opacité totale tourne autour des programmes politiques et stratégiques de ces partis et on n’est pas franchement informé de leurs orientations ainsi que des méthodes qu’ils espèrent faire valoir afin d’atteindre leurs objectifs.
Chaque partis politique est tenu, de ce fait, de présenter, afin de drainer les électeurs mais aussi par impératif de transparence, un programme politique varié, touchant tous les aspects de la vie publique du citoyen à savoir le programme politique, l’éducation, l’emploi, la politique économique, l’environnement, le rôle de la femme, l’université, la santé, le transport, la politique sociale, la politique étrangère, la politique et l’appareil sécuritaire, etc… et pourtant nous ne voyons rien venir et les programmes de ces partis sont jusqu’alors méconnus pour certains et inconnus pour d’autres alors qu’on ne demande qu’à les connaître… et au plus vite. Si ces partis vont solliciter, dans quelques mois, le vote des citoyens, ils se doivent, sans équivoques, d’annoncer haut et fort à quoi ils aspirent.
Un autre aspect de la nouvelle donne politique tunisienne et pas des moindres : le nombre élevé de partis. Cette quarantaine de partis existant dont 8 anciens datant de l’ancien régime, ne peuvent pas survivre sans pacte et sans fusion entre eux pour les partis qui des tendances analogues ou proches. Pour plusieurs raisons stratégiques et financières en premier lieu et pour des vices de représentativité ainsi que des tracasseries administratives, plusieurs partis vont fatalement disparaître faute de ne pas avoir drainé de public. Pour les autres, ceux qui resteront, ils seront amenés tôt ou tard, bon gré mal gré, à faire des fusions et des coalitions par principe de rapprochement des tendances et e renforcement au niveau des bases électorales. Le remue ménage ne durera pas donc longtemps et cette quarantaine de partis sera réduite à moitié.
Nonobstant ces irrégularités qui guettent la scène politique tunisienne, et par voie de conséquence, la vie du citoyen tunisien, existent d’autres chamboulements, qui altèrent ou altèreront la représentativité du citoyen au sein de la vie politique.
En effet, le citoyen tunisien d’avant la révolution ne s’intéressait pas à la politique à cause d’une inculture préméditée et orchestrée par le régime en place. Il ne connaissait, à cet effet, que le parti au pouvoir, à savoir le RCD, et deux ou trois autres partis ou formations pour les plus éclairés.
Aujourd’hui, ce même citoyen se trouve en face d’une quarantaine de formations politiques qui atteindra aisément la cinquantaine de partis dont il ignore tout, surtout après la dissolution du RCD qui était le seul connu. Comment alors solliciter le vote du citoyen dans cette jungle politique qu’il considère fatalement, à tort ou à raison, non représentative de ses aspirations ?
Le risque est, et c’est le scénario le plus plausible, de voir une abstention record au jour des législatives, du moment que, la majorité du peuple tunisien estime que ces formations lui sont inconnues et étrangères. Ces abstentions vont pourtant provoquer le contraire des effets escomptés d’une élection à savoir un vide politique abyssal qui profitera aux formations politiques extrémistes qui sortiront vainqueurs.
La majorité passive pourrait ne pas être représentée lors des prochaines élections et se sentir frustrée faute de ne pas s’être reconnue dans un parti capable de mobiliser une grande masse de citoyens et de répondre aux aspirations profondes et légitimes.
Les grands gagnants de ce remue ménage politique sournois vont être, justement et à contre courant, les formations politiques qui ne sont pas soutenus par la majorité des tunisiens. Ces derniers vont, en effet et sans le vouloir, par la force de la donne politique exposée, offrir, sur un plateau en argent, l’occasion à ses partis d’accéder au pouvoir législatif et par conséquent au pouvoir exécutif.
Le paradoxe tunisien va être du coup une majorité qui ne vote pas pour des vices de représentativité et des partis vainqueurs dont l’idéologie n’a rien à voir avec les revendications générales des électeurs.
Source : « Investir en Tunisie » Le 16-03-2011
Lien :http://www.investir-en-tunisie.net/index.php?option=com_content&view=article&id=9267
Tunisie : Il ne faut pas avoir peur de la démocratie
Avoir 37 partis politiques ne peut-être qu’une bonne nouvelle pour notre pays. Toute sensibilité qui a un projet politique, économique ou social a le droit de s’exprimer en toute légalité. C’est cela la démocratie. Le nombre 37 (voire plus) ne doit en aucun cas nous sembler bizarre ni nous faire craindre un chaos politique, pour la toute simple raison que dans une vraie démocratie, le monde politique est en constante mutation. Sa légitimité est tirée des réponses qu’il apporte aux attentes du citoyen et de la société civile. En démocratie, le triptyque pouvoir exécutif, législatif et civil se trouve renforcé, équilibré et jouit d’un consensus très large auprès de la société. En outre, dans une démocratie saine (comme on l’espère pour notre pays), la physionomie politique de la société évolue selon les aspirations politiques des citoyens. Par moment, certains de ces partis vont devenir incontournables, d’autres vont s’allier à des tendances qui leur sont proches, d’autres encore vont tout simplement disparaître. Bref, la démocratie est un processus dont le dynamisme est source de fertilisation de la vie politique. D’ailleurs, il ne se limite pas à la sphère politique, l’économie, la culture y seront également consacrés.
Ce que vit notre pays aujourd’hui est un rêve tant désiré et souhaité par tout un peuple. Toute la Tunisie est exaltée par cette naissance mais ceux qui ont plus de 40 ans et qui ont participé aux trois dernières révolutions avortées l’apprécie, à juste titre, encore plus. Merci à la génération de facebooker et twitter qui a réussi ce coup de force, qui a réussi à réconcilier le peuple avec sa nation et le remettre au cœur des priorités politiques et économiques du pays. Merci à tous ceux qui ont apporté leur pierre à la construction de cet édifice.
Notre devoir à tous aujourd’hui est de soutenir cette transition démocratique, de lui être fidèle malgré les torsions et les crispations qui surgiront de temps en temps. L’erreur grave que peut faire le tunisien d’aujourd’hui, pour une raison ou une autre aussi importante soit-elle, est de décrier cette marche vers la liberté et l’égalité. Les Tunisiens sont conscients qu’à court terme certains sacrifices sont à concéder, des consensus sont à faire, des priorités sont à concevoir et ils n’ont pas peur. Le tunisien est sûr qu’une fois le processus de transition fini, la Tunisie démocratique saura tirer profit de ses acquis antérieurs et saura faire valoir ses acquis récents. L’image de marque et le capital de sympathie dont la nouvelle Tunisie jouit sont tels que la sortie de cette période délicate sera aussi naturelle et spontanée que la naissance de notre révolution.
Aujourd’hui, une échéance électorale et un événement politique cruciaux se profilent pour nous tous. Le rôle du gouvernement par intérim est, une fois pour toute, clarifié. Ceci est arrivé un peut tard, on aurait pu gagner ces six dernières semaines. Mais bon…le temps est au travail.
Les 37 partis et toutes les composantes sociales anciennes, fraichement créés doivent maintenant jouer leur rôle politique : présenter leurs projets, communiquer et informer le citoyen sur leur vision respective de la nouvelle Tunisie, sur le pourquoi du comment de leur choix. Le citoyen a besoin de savoir et connaître les alternatives politiques qui sont possibles et plausibles pour un meilleur futur. Il a bien montré sa capacité à analyser et à comprendre le fait politique. Il a bien montré son aptitude à juger de la crédibilité et de la faisabilité du fait politique. Ce dont il a grandement besoin aujourd’hui, c’est une communication rapide et efficace. Il a besoin que l’information arrive à temps, claire et intelligible. Il a besoin de médias à la hauteur de ses attentes et à la dimension de l’événement.
Un travail de communication et de vulgarisation énorme repose, donc, sur nos médias. Ils seront en avant de la scène politique et sociale. Ils devront être le meilleur vecteur de ce nouvel apprentissage politique, de cette nouvelle culture politique. Le devoir, par excellence, des ses acteurs de la communication et de l’information est d’aller à la source de l’information, de la comprendre, de l’analyser et de la communiquer avec un maximum d’objectivité. Aujourd’hui autant la presse écrite qu’audiovisuel devrait faire la refonte de leur procédé de collecte de l’information. Le travail du terrain et l’investigation devraient être la dynamique de cette révolution médiatique. Ces 37 partis politiques et autres doivent comprendre qu’ils ne sont pas soumis uniquement aux jugements cycliques des urnes, mais que les médias permettent aux citoyens un contrôle quotidien de fait politique.
Pour finir, il n’existe aucun autre choix que de réussir cette transition. Le citoyen, les acteurs politiques, les acteurs sociaux et les médias sont et seront responsables face aux générations futures. Notre génération sera remerciée d’avoir légué un pays paisible, prospère et dynamique rayonnant autant à l’échelle régionale qu’internationale, ou nous serons maudits à jamais d’avoir raté cette énorme chance envers notre pays.
Source: “GlobalNet” Le 16-03-2011
Lien: http://www.gnet.tn/sur-le-vif/tunisie-il-ne-faut-pas-avoir-peur-de-la-democratie/id-menu-1006.html
La transition démocratique en Tunisie by Iyadh Ben Achour
«Les experts les plus optimistes estiment qu’il faut au moins 22 semaines pour préparer une élection après la promulgation du Code électorale. On va pouvoir y arriver en quatre mois».
C’est ce qu’a affirmé Iyadh Ben Achour, président Conseil de l’instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique, dans son intervention au séminaire international sur le thème: «Expériences de transition démocratique: Quelle voie pour la Tunisie » organisé le 9 mars à l’hôtel Golden Tulip, à Gammarth, par l’Association de recherche sur la démocratie et le développement (AR2D), fondée récemment et dirigée par l’économiste Azzam Mahjoub, l’Institut pour les études de sécurité dépendant (Iesue) de l’Union européenne, l’Instituto de Estudos Estratégicos E Internacionais (Ieei, Portugal), le Centre des études et recherche en sciences sociales (Cerss, Maroc).
Le ‘‘retour à la lucidité’’
Le séminaire, qui a réuni des experts et des universitaires de Tunisie, Maroc, France, Espagne, Portugal, Afrique du Sud et Pologne, a été l’occasion de partir des interrogations et des défis relatifs au processus de transition en Tunisie en questionnant d’autres expériences de transition démocratique.
Au début de son intervention, M. Ben Achour a souligné la soudaineté de la révolution tunisienne qui a surpris tous les observateurs, y compris ses premiers protagonistes. «Les Tunisiens pensaient être dans une dérive monarchique, avec la préparation d’une régence de l’épouse de l’ex-président et de son gendre avant une passation du pouvoir pour le fils», a-t-il dit. Et d’expliquer: «La dictature avait tout pour durer. Mais c’est elle qui, paradoxalement, nous [les Tunisiens, ndlr] a ramenés à la conscience politique, ou à ce que Taoufik El Hakim appelle le ‘‘retour à la lucidité’’. Le vœu que l’on forme aujourd’hui est que ce retour à la lucidité soit définitif. La garantie essentielle du non-retour de la dictature étant cette conscience et cette lucidité retrouvées.» En d’autres termes, les Tunisiens sont les seuls gardiens de leur futur. «Tout ce que je suis en train de faire pour aider à la réussite de la transition démocratique est peu de chose devant l’esprit civique majoritaire [des Tunisiens] qui a changé», a ajouté le conférencier pour souligner davantage la responsabilité collective de ses concitoyens dans l’issue à donner à leur révolution.
L’éradication des vieux démons
Cette révolution fait face, selon M. Ben Achour, à plusieurs défis. Le premier défi est «cosmologique» et réside dans «l’éradication des vieux démons». «Ces démons ont certes été combattus, mais, en politique, il ne faut pas rêver, le combat va durer encore longtemps», a prévenu le professeur de droit constitutionnel. Et pour cause, a-t-il expliqué: «Les ondes de choc sont susceptibles de revenir et de déstabiliser la société.»
Que faire pour éviter le retour en arrière? Réponse du conférencier: «Nous devons maîtriser l’onde de choc en maîtrisant tous les vecteurs de la déstabilisation». Et ce par l’ordre et la discipline. Car, a-t-il expliqué, «la première liberté c’est l’ordre social. Les autres libertés peuvent revenir avec la stabilité politique et sociale.» Et d’insister sur la nécessité du retour au calme et de la restauration de l’ordre publique: «La démocratie est une discipline de toutes les activités et organisations sociales. C’est le défi de l’ordre et de la discipline des mœurs. C’est le défi de la discipline politique. Si nous voulons arriver à une démocratie réelle, ne nous battons pas sur les détails». Autrement dit, «il s’agit d’être rigide sur les principes et souple sur les moyens. Eviter de diviser les rangs de la société. Il ne s’agit pas de tout concéder mais être plus souple sur les moyens pour passer du néant démocratique à l’existence d’une société démocratique réelle». C’est là «un pari extrêmement difficile», a concédé le conférencier, mais ce pari est aussi exaltant que réalisable, même si sa réalisation pose un autre défi, celui du temps.
Arrivé à ce point de son intervention, M. Ben Achour s’est autorisé une digression historico-philosophique: «L’idée de démocratie est née en Italie au 14e siècle grâce aux poètes et aux artistes. Gagner le pari du temps, c’est gagner le pari de la démocratie comme étant un pari culturel.»
Les conditions techniques de l’élection
Pour la Tunisie, cependant, le temps qui sépare les citoyens des premières élections libres et transparentes est très court. «Comment organiser des élections libres et démocratique d’ici le 24 juillet alors qu’on n’en a jamais organisées auparavant?», s’interroge M. Ben Achour. La tâche est dure, presque impossible. Car, il faut changer le code électoral et mettre en place les conditions techniques de l’élection: 7 millions d’enveloppes, des dizaines de milliers d’urnes, une administration neutre, 15.000 à 18.000 agents électoraux, etc. «Les experts les plus optimistes estiment qu’il faut au moins 22 semaines pour préparer une élection après la promulgation du code électorale», a rappelé M. Ben Achour. Comment la Tunisie va-t-elle pouvoir y arriver en quatre mois? Réponse du conférencier: «Nous devons réduire le nombre de bureaux de vote de 13.000 à 5.000 ou 6.000, former suffisamment d’agents électoraux, etc. Nous avons des ressources et des moyens pour le faire et nous allons y parvenir avec l’aide de nos amis de l’Union européenne.»
Source : « Kapitalis » Le 16-03-2011
Commentaire sur l’article «Thérapie contre l’intégrisme musulman»
Par Hédi Smida CHAIEB – Ce commentaire, je l’adresse à l’intention du Docteur Dhaoui Hechmi sur son article cité ci-dessus.
En commençant la lecture de votre article, on est d’emblée frappé par un style imprégné de haine et de mépris à l’égard de Monsieur Rached Gannouchi. Votre tout premier paragraphe mentionne ce qui suit : « Il ne faut surtout pas oublier que Rached Gannouchi (sic) a donné carte blanche à Ben Ali juste après le 7 novembre 1987 en déclarant au journal Le Temps : [ je crois en Dieu et en Ben Ali ]. Il vient de refaire la même bêtise en acclamant le sanguinaire Maamer El Kadhafi »
En ce qui concerne cette prétendue carte blanche donnée à Ben Ali après le 7 novembre 1987, était-il le seul à avoir adopté une position de soutien et même d’allégeance à l’égard de Ben Ali pendant les tous premiers mois de sa présidence ? N’avions-nous pas tous crus – un moment – en un possible changement après que Bourguiba, sénescent et très peu lucide, n’était devenu que l’ombre de lui-même ? N’étions-nous pas majoritairement abusés par Ben Ali, et ne nous a-t-il pas bien fallu quelques longs mois pour nous apercevoir de la supercherie ?
Quant à la phrase attribuée à M. Rached Gannouchi [ je crois en Dieu et en Ben Ali ], je ne le crois pas capable de dire une absurdité pareille, lui qui continue à ce jour à assumer des responsabilités de haut rang dans le monde arabo-musulman ( forums, conférences, colloques, etc. ). La déclaration que vous lui attribuez l’aurait indubitablement discrédité auprès de tous, ce qui n’a jamais été le cas. Je pense tout simplement que ses propos ont été déformés de façon malsaine et malintentionnée.
Quant à son « acclamation » de Kadhafi, je vous laisse la responsabilité de vos propos. Je n’ai pas eu personnellement l’occasion de lire ou d’entendre une telle allégation.
Je reviens à votre article pour vous dire que je ne comprends pas comment quelqu’un qui présente votre profil (docteur en médecine, de surcroît psychiatre-psychanalyste), puisse se laisser guider par une pulsion d’animosité aussi féroce et une haine aussi marquée, pas seulement à l’égard de M. Gannouchi (libre à vous de ne pas apprécier la personne, si elle ne vous revient pas) mais aussi et surtout à l’égard de tous les islamistes. En effet, vous écriviez dans votre article, avec beaucoup de suffisance, comme si vous déteniez seul toute la vérité, ce qui suit : « Je pense profondément qu’il n’existe pas d’islamisme modéré, et si parfois il apparaît ainsi, c’est uniquement par le double langage. Ils ne cessent d’amplifier les mérites de leurs prédécesseurs dans une régression identificatoire et idéalisante de leurs ancêtres, à leur mode d’être. Cela les prédispose à désirer la mort et à devenir autant de dangereuses bombes humaines ambulantes ». Au passage, je me permets de vous faire remarquer que le mot souligné « idéalisante » ne peut pas se mettre au féminin et prendre la forme d’un adjectif, sauf peut-être dans un langage psychanalytique, qui permettrait apparemment toutes les distorsions. Je reviens à votre « pensée profonde ». En affirmant avec tant de conviction qu’il n’y a pas d’islamisme modéré, ne seriez- vous pas en train de prôner – sans l’avouer – le bannissement de l’Islam de notre pays ? Si un islamisme radical, pur et dur ne vous conviendrait pas et vous auriez raison, sans aucun doute, qu’est-ce que vous proposeriez à la place, sinon un Islam modéré portant les vraies valeurs de la tolérance, de la paix et de l’amour ? Si vous n’êtes pas croyant, c’est votre affaire, et personne ne peut vous le reprocher. Mais ne serait-il pas logique que de votre côté vous accepteriez qu’on puisse ne pas être d’accord avec vous et qu’on puisse épouser une doctrine qui ne soit pas forcément avec la vôtre ? N’êtes-vous pas enclin – ainsi – à rejeter l’autre et à ne pas accepter la différence ?
D’autre part, vous avez évoqué – à votre manière – l’histoire des Musulmans et des salafistes, avec pour objectif de démontrer que Monsieur Rached Gannouchi « est le produit de plusieurs échecs, depuis les salafistes auxquels il se réfère ». Pour y parvenir, vous avez osé, sans aucune retenue vis-à-vis de nos icônes, mettre en doute la sincérité du premier calife Abou Bakr qui aurait désigné à sa mort Omar Ibn El Khattab comme son successeur, rien que parce qu’il lui avait fait allégeance comme premier calife, à la mort du Prophète, paix sur son âme. Les historiens spécialistes des questions de l’Islam, musulmans ou non musulmans, vous diront unanimement que l’acte d’allégeance d’Omar pour Abou Bakr, dans ces conditions historiques particulières, a empêché une guerre fratricide qui aurait eu des conséquences désastreuses pour cette religion naissante et qui aurait manifestement abouti à l’arrêt net de son expansion.
Quant à Abou Bakr, sa sagesse et sa connaissance des hommes ont été les seuls déterminants pour le guider dans le choix de son successeur. En désignant Omar pour cette lourde responsabilité, l’histoire lui a donné raison. En effet, rares – voire inexistants – sont les chefs d’Etat, à travers l’histoire de l’humanité, qui peuvent prétendre égaler les mérites, la lucidité, la clairvoyance et la justice d’Omar.
Vous vous êtes ensuite hasardé à parler très mal d’un volet très important dans l’histoire de l’Islam, et qui vous échappe complètement, à savoir la succession d’Omar au poste de calife. Cher Docteur, vous auriez mieux fait de vous abstenir de traiter un tel sujet, pour éviter de sombrer dans le ridicule. Voilà ce que vous écriviez dans votre article : « …puis Omar a laissé en place un soit-disant conseil de six personnes (majless choura) dont quatre étaient acquis à Othman Ibnou Affen contre l’Imam Ali, alors que le Prophète voulait que le pouvoir se fasse dans la concertation entre les Musulmans ». Je vous rappelle que les six membres proposés par Omar étaient les suivants :
Othman Ibnou Affen, Ali Ibnou Abi Taleb, Taha Zoubeir, Abderrahman Ibnou Souf et Saâd Ibnou Abi Waqqas
Quels sont les quatre qui seraient, d’après vous, acquis à Othman ? Tous les six étaient hautement appréciés par le Prophète et ils étaient tous assurés de leur entrée au paradis. Auraient-ils pu prétendre à une telle haute distinction s’ils n’étaient pas irréprochables à tout point de vue ? Et comment l’un d’entre eux pouvait-il être acquis à quelqu’un d’autre que lui-même, puisqu’ils étaient tous, à part Abderrahman Ibnou Aouf, également prétendants au poste de calife. Il est connu que Abderrahman Ibnou Aouf s’était retiré de son plein gré pour se consacrer à une mission d’arbitrage entre les cinq autres prétendants, ce qui fut fait. Même les chiites ne se reconnaissent pas dans vos allégations, car pour la plupart d’entre eux le Prophète aurait expressément désigné l’Imam Ali comme premier calife, ce que les sunnites ont toujours récusé, évidemment.
Par ailleurs, convaincu que vous êtes du fait qu’il n’y a pas d’islamisme modéré, et rejetant par conséquent en bloc tout ce qui a trait à l’Islam, vous sombrez dans la contradiction en étayant votre argumentation de cinq versets du coran pour démontrer que M. Rached Gannouchi « a dénaturé l’esprit de l’Islam, dont la règle de la vie sociale est la paix dans le respect des choix religieux ». Décidément vous ne reculez devant rien pour tirer sur M. Gannouchi à boulets rouges.
D’autre part, dans votre texte vous faites l’étalage de vos connaissances en matière de psychanalyse et de psychiatrie à tort et à travers pour des fins calomnieuses et diffamatoires sur les islamistes. En voici quelques exemples : « Fixation anale, phobie des femmes, sentiment de culpabilité religieuse, le refus de l’altérité, délire paranoïaque, le thème de la persécution se forme à partir d’une homosexualité refoulée, la zoophilie (pour éviter plus simple : « bestialité ») ». Et j’en passe.
Docteur, cela ne vous honore pas. On ne badine pas avec la foi. Vous ne pouvez pas mettre tout le monde dans le même sac. Certes, il y a des intégristes très intransigeants que je désapprouve, tout comme vous. Mais, à mon humble avis les Musulmans, de par les nobles valeurs véhiculées par l’Islam et dans lesquelles ils croient, sont majoritairement très modérés et ne pratiquent pas le double langage, comme vous l’affirmez dans votre texte.
Cela dit, je vous précise que je ne n’ai pas eu encore l’honneur de faire la connaissance de M. Rached Gannouchi, mais je ne m’en priverais pas si l’occasion se présentait. Aussi, je n’ai pour le moment aucune idée sur les orientations actuelles et futures du parti Ennahdha, donc aucune sympathie particulière pour l’instant. Ma réaction à votre article est simplement suscitée par le malaise et le désagrément que j’ai ressenti en le lisant.
Source: “Le Temps” Le 16-03-2011
Lien:http://www.letemps.com.tn/article-54074.html
Premiers signes de contestation en Syrie
Une quarantaine de personnes ont manifesté brièvement mardi à Damas, qui avait jusqu’ici échappé au vent de révolte soufflant dans le monde arabe.
Les contestataires ont défilé dans le souk Al Hamidiyé de la vielle ville avant de se disperser des les rues adjacentes pour échapper à la police secrète, dont la présence a été renforcée depuis les événements de Tunisie et d’Egypte, rapportent des témoins.
Selon le président Bachar al Assad, qui a succédé à son père Hafez en 2000, il n’y a aucune chance que la révolte gagne la Syrie. L’opposition n’y est pas tolérée et l’état d’urgence reste en vigueur. Le parti Baas, dirigé par le chef de l’Etat, est au pouvoir depuis 1963.
Dans un bref document vidéo visible sur YouTube, on peut voir quelques dizaines de personnes défiler après la prière de midi aux abords de la mosquée des Omeyyades en scandant “Dieu! Syrie! Liberté! ça suffit !“, détournant un slogan pro-gouvernemental.
Jean-Philippe Lefief pour le service français
Source : « L’express » le 16-03-2011
Lien :http://www.lexpress.fr/actualites/2/monde/premiers-signes-de-contestation-en-syrie_972652.html
La police disperse une petite manifestation à Alger
La police a fait usage mercredi de grenades lacrymogènes pour disperser à Alger de jeunes manifestants armés de pierres et de cocktails Molotov, a constaté un journaliste de l’agence Reuters.
Les protestataires, qui avaient bloqué une artère de l’est de la capitale, ont affirmé ne pas avoir de revendications politiques. Ils souhaitent obtenir des pouvoirs publics de meilleures conditions de logement.
“On vit comme des chiens. Nous vivons avec toute la famille dans un même appartement et ce depuis les années 1960“, a expliqué à Reuters un jeune homme.
Les manifestants – une soixantaine au départ pour atteindre ensuite 150 environ – venaient pour la plupart de la cité ouvrière de Diar el Mahsoul et demandaient à être reçus par des responsables pour faire part de leurs doléances.
Manifester pour exprimer sa colère contre le mal-logement n’est pas rare en Algérie, où les autorités redoutent aujourd’hui tout signe d’agitation dans le sillage des soulèvements populaires réussis en Tunisie voisine et en Egypte.
Mais pour le moment, le mouvement de contestation est resté très localisé en Algérie où les tentatives de l’opposition de susciter un grand mouvement d’ampleur nationale se sont essoufflées
Lamine Chikhi; Jean-Loup Fiévet pour le service français
Source : « L’express » Le 16-03-2011
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