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Le Nouvel Observateur: Procès de Ben Ali : « la révolution, c’est l’Etat de droit »
Atlantico: Révolution tunisienne – il était une fois la gifle
Leaders: Rafaa Ben Achour : ma mission auprès de Béji Caïd Essebsi
Le Post: Le tunisien Rached Ghannouchi, ou le retour de l’islamisme
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Procès de Ben Ali : « la révolution, c’est l’Etat de droit »
« Ce procès fera en sorte que personne dans l’avenir n’osera faire de son pays ce que cet homme a fait », commente le Bâtonnier de l’ordre des avocats tunisiens.
Une date a été choisie pourle procès de Ben Ali. Mais à quoi va-t-il servir alors que l’ex-président est en fuite ?
– Ben Ali est accusé de certains faits criminels et délictueux. Il doit donc répondre, comme tout un chacun, des faits dont il est accusé. Il va être donc être cité devant la Justice,c’est tout à fait normal. Tout le monde doit répondre devant la Justice quel que soit son poste ou ses responsabilités. C’est ça la révolution. C’est l’Etat de droit. Et Ben Ali doit s’exécuter.
Le procès aura lieu même en son absence ?
– Il y a une procédure. Quelqu’un qui est inculpé doit se présenter devant la Justice. S’il ne répond pas, la procédure continue et il sera quand même jugé. S’il est présent, il pourra se défendre. S’il ne répond pas à la convocation, il sera jugé par défaut.
Comme vous le savez, il s’est enfui en Arabie Saoudite et je ne pense pas qu’il se présentera. Un mandat d’amener international a été émis qui devrait être exécuté par les Saoudiens mais je pense qu’ils ne le feront pas. La Justice doit pourtant faire son travail. Et c’est la plus belle manière de tourner la page d’un passé douloureux de la Tunisie qui a connu l’absence d’une véritable justice et du respect des droits de la défense, la torture et l’emprisonnement arbitraire…
Le procès Ben Ali va faire en sorte que personne dans l’avenir n’osera faire de son pays et de son peuple ce que cet homme a fait. Tout cela, sans chasse aux sorcières ni vengeance. Au contraire, dans le respect de la loi, de la procédure et des droits de la défense.
Ben Ali n’est pas le seul accusé de l’ancien régime. Y a t-il d’autres procès à venir ?
– Plusieurs responsables politiques du temps de Ben Ali font l’objet de poursuites. Et cela ne veut pas dire d’ailleurs que tout le monde est coupable. J’espère que la Justice va pouvoir faire son travail dans la sérénité, le respect de la loi et encore une fois des droits de la défense.
Les avocats étaient en première ligne lors du mouvement révolutionnaire. Qu’en est-il ? Gardez-vous une certaine vigilance ?
– Les avocats restent toujours vigilants. Ils ont constitué un rempart pour la défense de la liberté et de la démocratie pendant des années. Et nous demeureront toujours ce qu’on nous avons été. Rien n’a changé de ce côté là, nous poursuivrons notre mission.
Les réformes que vous appeliez de vos vœux sont-elles en cours ?
– Les réformes ne sont pas encore réalisées. Nous devons continuer de dire haut et fort que notre justice doit être indépendante. Il y a des projets en ce moment en discussion pour réformer le statut des magistrats et nous demeurons prêts pour faire nos remarques sur ce projet.
Et il y a une demande pressante pour réformer le Conseil supérieur de la magistrature. Celui-ci était dirigé par le président de la République et son vice-président est le ministre de la Justice. La plupart de ses membres sont également désignés par l’exécutif et cela n’assure pas l’indépendance de la Justice.
En tant qu’avocat nous demandons également une réforme de notre statut. Un nouveau projet doit garantir une liberté de la défense car ce n’est pas le cas aujourd’hui. Nous sommes en effet encore menacés par l’application de l’article 46 de la loi actuelle qui permet au juge de traduire un avocat s’il estime que celui-ci a une plaidoirie qui dépasse les règles d’usage. Nous estimons que la défense doit être libre. Cela va dans le sens de la révolution : nous avons conquis notre liberté.
Source : « Le Nouvel Observateur » Le 15-06-2011
Comment faire renaître la justice ?
A quelques jours du procès Ben Ali qui doit commencer le 20 juin, plusieurs spécialistes du droit se sont réunis à Tunis pour évoquer l’état de la justice tunisienne. Il y a du pain sur la planche pour la remettre sur pied.
Pas de surprise, la justice tunisienne est dans la même situation qu’ont connue les pays vivant leur transition démocratique : blocage institutionnel, déficit criant de la confiance dont elle bénéficie au sein de la population, manque terrible de moyens…, constate Wahid Ferchichi, professeur de droit public. Certains ne manquent pas de rappeler cette étude surréaliste : le juge tunisien est l’un des plus mal payés du monde – juste derrière le juge bangladais. Quand on sait que seulement 25 % des pays qui ont vécu une transition démocratique l’ont vraiment réussie au cours des quarante dernières années, on conclut que la Tunisie a vraiment du pain sur la planche. Et il n’existe pas de panacée pour mettre en place une justice transitionnelle, justice transitionnelle qui devra examiner plus de cinquante années de non-droit pour réconcilier tout un peuple avec son histoire. « Nous sommes tous responsables, déclare Wahid Ferchichi, et nous devons user de concessions et de consensus pour passer ce cap ; la loi ne suffira pas, et nous manquons de légitimité. » Et puis « tout ce qui appartenait à l’ancien régime n’est pas mauvais, sinon nous devrions nous suicider, car nous appartenons tous à ce régime », poursuit-il, un brin provocateur. Autre constat qui fait l’unanimité : le pouvoir judiciaire n’en n’est pas vraiment un. Il a toujours été inféodé à l’exécutif. L’indépendance de la justice et la séparation des pouvoirs, éléments fondamentaux des systèmes démocratiques depuis la Révolution française, inscrits dans les principes onusiens, sont une chimère en Tunisie. Les juges censés êtres les protecteurs de la Loi sont devenus les bras du pouvoir, un cauchemar, avoue le juge d’instruction Hamadi M’zoughi. L’Etat de droit, la suprématie de la loi, l’indépendance de la justice ont toujours été proclamés par les régimes en place depuis cinquante ans. Dans les faits, le juge Majda Ben Jaâfar précise dans son analyse que, déjà, la constitution de 1959 donnait les pleins pouvoirs à l’exécutif en la personne du président de la République. L’amendement de la Constitution en 1967 fait de la justice une institution de pouvoir, mais pas un pouvoir. Une autre tentative pour instaurer l’Etat de droit en 1987 « enterre » définitivement la république et marginalise le Parlement. Nous sommes entrés dans l’ère de l’ »autorisation présidentielle ». Une justice moribonde même si les lois étaient en théorie des plus modernes sous Ben Ali, encore fallait-il les appliquer, précise Hamadi M’zoughi. La Justice tunisienne est à la ramasse : peu de moyens financiers et humains et un vaste chantier en attente. Comment procéder ? La justice est divisée. Une première faction cède à la pression populaire et médiatique prônant une justice accusatrice, partant à la chasse aux sorcières et réunissant ses partisans sur Facebook. Une autre, préconisant une justice « légale et juste », a plus de mal à se faire entendre. Toutes les personnes présentes ont semblé d’accord pour juger équivoques les positions du Conseil de la magistrature et de l’Association des magistrats. La participation aux débats de l’Instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la révolution est une implication contre-nature de la Justice dans le jeu politique. La création d’une Commission pour la réforme de la magistrature est intempestive, car elle anticipe la nouvelle Constitution qui devra d’abord statuer sur le rôle et les objectifs de la justice dans la nouvelle République, juge-t-on encore. Aucune solution miracle, en somme, mais les premières pierres qui serviront à bâtir une Justice indépendante et garante des droits de l’homme et des libertés font l’unanimité : une révision du statut de la justice dans la Constitution et la suppression de la loi de 1967 qui en fait un jouet aux mains du pouvoir exécutif, l’expurgation des articles de loi actuels portant atteinte aux droits de l’homme, la création de commissions d’enquête sur les cas de torture, crime qui ne tombe jamais sous le coup de la prescription… Il est question que la justice fasse « son propre procès, avant de faire celui des autres, et qu’elle saisisse l’opportunité qui s’offre à elle pour rompre définitivement avec un passé entaché de corruption ». Une corruption dont on n’a pas beaucoup parlé lors de cette rencontre, les intervenants et les participants s’étant contentés de présenter la justice dans le rôle de victime d’un demi-siècle de dictature.
Source : « Courrier international » Le 15-06-2011
Révolution tunisienne : il était une fois la gifle…
Le printemps arabe aurait été déclenché par la gifle assénée par Fayda Hamdi, une policière, à Mohamed Bouazizi, un jeune diplômé sans emploi de la ville tunisienne de Sidi Bouzid qui s’était ensuite immolé par le feu. Il semblerait en fait que la gifle n’ait jamais été donnée et que le diplômé ne l’ait pas été. Décryptage d’un story-telling révolutionnaire ultra efficace.
L’Histoire se nourrit d’histoires. Ce que l’on enseigne dans les écoles françaises n’est pas le passé exact du peuple français mais sa mythologie, qui permet à ceux qui l’adoptent de se sentir partie d’une même histoire et donc d’une même société. De la même manière, les événements mondiaux ont besoin d’être contextualisés, que le spectateur leur trouve un sens. Fournir des faits bruts n’est pas satisfaisant, l’observateur a besoin de « comprendre », c’est-à-dire de discerner un ordre rationnel dans le déroulement d’incidents qui parfois n’ont pas de suite logique. Les médias remplissent souvent ce rôle de troubadours, et fournissent leur ration quotidienne d’histoires aux spectateurs qui se sentent ainsi témoins de l’Histoire. Le danger consiste à prendre un détail pour l’ensemble du tableau.
Croire qu’une gifle ait pu déclencher une révolution en Tunisie revient à admettre que les Etats-Unis sont rentrés en guerre à cause de Pearl Harbor. Une multitude de phénomènes sont à prendre en compte lorsqu’on entend étudier avec précision le cours des événements de l’Histoire. Dans le cas de la Tunisie, la légende d’une révolution moderne, « facebook » mais aux odeurs de jasmin a été infusée et vendue comme telle aux spectateurs français trop heureux de revivre un remake de leur propre révolution.
Cette belle histoire n’était pourtant pas évidente au départ. Comment expliquer aux Français, habitués à vivre en bonne harmonie avec une dictature méditerranéenne, la nécessité d’un changement radical ? Les hommes politiques français entretenaient une relation privilégiée et durable avec le régime de Ben Ali, comme l’a montré avec fracas l’affaire Alliot-Marie. Quant au peuple français, l’attrait d’un pays politiquement stable, peu onéreux et disposant de soleil en abondance compensait l’horreur que l’on pouvait éprouver devant une dictature autoritaire. La mondialisation est perçue comme une menace en France. Cette peur n’empêche pas chacun d’y contribuer en achetant des cafetières chinoises fabriquées dans des sweat shops ou de profiter d’un hôtel 5 étoiles sur une plage tunisienne à un jet de pierre d’une prison remplie d’opposants politiques favorables à la liberté.
Que la gifle d’un policière en Tunisie ait existé ou pas n’a finalement pas d’importance, l’histoire reste trop belle et il importe peu qu’elle ait vraiment eu lieu. Encore aujourd’hui, le citoyen averti préfère croire à de belles légendes où les méchants et les gentils sont clairement identifiés, plutôt qu’à une vérité plus nuancée qui montre la banalité du mal.
L’Histoire officielle est donc parsemée de ces contes de fées moraux qui expliquent simplement les origines des hauts faits d’armes. Le souvenir de la résistance héroïque de l’URSS contre les armées nazies occulte le pacte germano-soviétique ou le massacre de Katyn. La France commémore également la Résistance contre l’envahisseur et décrète que tout est de la faute de Pétain, héros discrédité par les mêmes qui l’avaient hissé sur un piédestal durant la Première guerre mondiale. En Tunisie, le méchant sera Ben Ali, bientôt jugé pour ses méfaits, mais on oubliera tous ceux qui ont permis le maintien de sa tyrannie pendant tant d’années. Car traduire en justice tous les complices reviendrait à accuser aussi ces Français qui ne voyaient pas d’inconvénient à collaborer avec une dictature aussi ensoleillée. L’histoire de la vraie-fausse gifle est finalement plus acceptable et on connaît la fin du conte : dans le monde arabe, la révolution tunisienne a eu beaucoup d’enfants. Pour la plus grande joie du peuple français qui voit déjà revenir les publicités vantant le soleil de Tunisie.
Source: ”Atlantico” Le 15-06-2011
Sidi Bouzid, épicentre de la révolution tunisienne, entre fierté et désenchantement
Six mois après le geste désespéré de Mohamed Bouazizi dont l’immolation a fait de Sidi Bouzid l’épicentre d’un séisme qui a amorcé la révolution tunisienne avant de gagner le monde arabe, sa région natale hésite entre fierté et désenchantement.
« La révolution de la dignité et de la liberté est celle du 17 décembre (date de l’immolation) et non du 14 janvier », date de la fuite du président Ben Ali, lit-on sur un mur avenue Habib Bourguiba à Sidi Bouzid, 270 km au sud-ouest de Tunis.
En face du gouvernorat de Sidi Bouzid, devant lequel Mohamed Bouazizi, jeune marchand de fruits excédé par des humiliations policières s’était immolé, les étals en plein air se succèdent.
« Depuis des mois, les journalistes du monde entier défilent, et ma situation n’a pas changé pour autant », déplore Youssef un vendeur de légumes, approuvé par plusieurs autres jeunes gens. « Avant, je me faisais 100 dinars (50 euros) par semaine, depuis la révolution, une vingtaine (10 euros) », se plaint-il, en cachant à peine son regret du temps de « ZABA » acronyme de l’ex-président Zine el Abidine Ben Ali.
« Il parait qu’il pleut des milliards sur Sidi Bouzid. Je n’ai pas vu un centime », lâche un autre.
Ces « sans-diplômes » comme ils se présentent, se sentent, à nouveau, oubliés. Ils attendent encore de voir ce que la révolution va « leur apporter ».
Dans la Maison des Jeunes, toute proche, trois membres de l’association Al-Karama, la dignité en arabe, sont réunis pour élaborer des solutions de développement.
Après le 14 janvier, « les critiques ne sont valables qu’assorties d’alternatives » tranche Hichem Daly, un enseignant de 36 ans. Son groupe propose ainsi « un projet de +comité de développement régional+ réunissant des représentants de l’Etat, des communes et de la société civile qui débattront en public des priorités pour leur région ».
Pour Hichem Daly, il faut « impliquer ceux qui ont des problèmes pour qu’ils puissent les résoudre eux-mêmes ».
L’euphorie s’évanouit toutefois avec l’évocation d’une récente visite de huit ministres du gouvernement provisoire. « C’est une trahison: ils sont venus annoncer des mégaprojets sans consulter » les locaux, dit Hichem, amer, « ces choix arbitraires ont causé des tensions entre les habitants de la région ».
Au delà de Sidi Bouzid, de nombreux Tunisiens trouvent que les choses ne vont pas assez vite. Mais, selon un baromètre de l’institut Sigma conseil, plus de 70% de la population se dit confiante dans l’avenir, même si une liberté retrouvée ne fait pas oublier toutes les difficultés.
Dans la colonne positive du bilan des six derniers mois, Pierre Vermeren, historien spécialiste du Maghreb, note: « une vie politique s’est mise en place avec la création de nombreux partis, le pays n’a pas basculé dans la guerre civile ou un degré de violence trop grand et il ressent une grande fierté nationale d’avoir été à l’origine du processus » du Printemps arabe.
Au plan politique, après de longues tergiversations les autorités, les partis et la commisssion électorale se sont entendus pour fixer au 23 octobre la date des élections qui désigneront l’assemblée chargée d’élaborer une nouvelle constitution pour la Tunisie.
La scène politique est toutefois extrêmement morcelée avec l’apparition de plus de 90 partis que les futurs électeurs ne connaissent pas ou très peu et aucun leader ne se dégage pour le moment.
Seuls les islamistes du mouvement Ennahda apparaissent comme relativement organisés.
Côté négatif, la crainte du marasme d’une économie tirée vers le bas par la baisse considérable d’une de ses principales ressources, le tourisme, assombrit le paysage.
La guerre en Libye pèse aussi sur la Tunisie avec les quelque 500.000 réfugiés qu’elle a dû accueillir et la tension à sa frontière sud.
La blogueuse Lina Ben Mhenni tire pour sa part un bilan simple mais éloquent des six derniers mois en Tunisie: « On s’est débarrassé de la peur ».
Source : « La Depeche » Le 15-06-2011
Le tunisien Rached Ghannouchi, ou le retour de l’islamisme
Rached Ghannouchi, 69ans, est un homme politique islamiste qui a commencé son militantisme en France au sein de la Jamaat Tabligh dans les années 60. Il était alors étudiant à la Sorbonne, et déja impliqué dans la « ré-islamisation » des populations immigrées en France. Le Jammat Tabligh est un mouvement qui prone l’interprétation littérale du Coran, il trouve sont origine en Inde.
Après un militantisme islamiste important en Tunisie, il est finalement condamné à perpétuité en 1987 pour un coup d’Etat prévu par le noyautage de l’armée tunisienne. Il sera gracié l’année suivante après la destitution du laïc Habib Bourghiba par le nouveau président Zine el-Abidine Ben Ali. Durant les années 90, Ghannouchi est interdit de séjour aux Etats-Unis, au Liban, en Egypte. Il réussira même à se faire expulser d’Espagne en mars 1995.
Rached Ghannouchi est de retour en Tunisie depuis le 30 janvier 2011. Naturellement l’Union des Associations Musulmanes de Seine Saint-Denis (‘UAM93) lui a consacré un article en le qualifiant avec le terme léger « d’opposant au régime ». Une association qui ne cache pas son fondamentalisme sur son site internet, on vous laissera juger par vous-mêmes de sa position sur la lapidation. Et qui jouit de l’attitude courtisane d’un certain nombre d’hommes politiques comme Christiane Taubira, François Bayrou, Claude Bartolone, ou bien sur Eric Raoult (très critiqué par ses collègues pour son attitude en tant que rapporteur sur la sur la mission parlementaire d’information sur la burqa).
Cette association a notamment reproduit des publications dont l’auteur n’est autre que le très anti-républicain Daniel Youssef Leclercq, pour qui les lois de la République passent derrière les lois de l’islam, ou encore des extrait d’un ouvrage sur l’islam dont l’auteur est Roger Garaudy, le révisionniste condamné par la justice pour ses écrits sur la seconde guerre mondiale (l’Union n°110, 20 AVRIL 2007).
Pour plus de détails sur l’UAM 93 et l’attitude clientéliste de certains hommes politiques à l’égard du fondamentalisme musulman, le chercheur Joachim Veliocas a consacré un ouvrage au sujet : « Ces maires qui courtisent l’islamisme » aux Editions Tatamis.
Daniel Youssef Leclercq alors président de la Fédération Nationale des Musulmans de France avait déclaré au Nouvel Observateur en 1992 :
« Si demain on avait une majorité dans ce pays, pourquoi est-ce qu’on imposerait pas la charia progressivement ? Ca vous dérange ? Tant pis ! »
Le site de l’Observatoire de l’Islamisation a relevé deux jours avant le retour de Ghannouchi que certains militants islamistes de l’UAM93 alors en exil sont retournés en Tunisie.
On voit donc que la Tunisie commence à voir affluer ses vieux démons autrefois forcés à l’exil. Ce n’est pas sans réactions de la part de la société tunisienne, les facebook anti-islamistes ou plus spécialement anti-Ghannouchi se multiplient.
Malin, Rached Ghannouchi prétend s’inpirer de l’AKP Turc, se présentant en « démocrate islamo-conservateur ». Ce qui ne l’empêche pas d’être très claire sur son programme qui consisterait par exemple à fermer les boites de nuit ou interdire l’alcool. Un programme qui ne semble pas correspondre à la société tunisienne telle qu’elle est en 2011.
« Cheikh Ghannouchi, j’étais encore enfant quand vos partisans terrorisaient leurs concitoyens à coups de vitriol sur le visage »
Une « lettre ouverte au Cheikh Rached Ghannouchi et aux islamistes tunisiens » publiée sur le média Nawaat.org illustre parfaitement la ferme opposition à l’islamisme dont fait preuve de manière militante une large part de la société en Tunisie. Reste à savoir pour combien de temps l’islamisme tunisien va se contenter de méthodes démocratiques, lui qui a largement versé dans des méthodes macabres pour essayer de s’imposer.
Source: “Le Post” Le 15-06-2011
Rafaa Ben Achour : ma mission auprès de Béji Caïd Essebsi
Tunisie : « La fragile révolution des médias”. Carte interactive de Tunis proposée par Telerama
Rached Ghannouchi : «Ennahdha fait l’objet de tentatives de déstabilisation orchestrées»
Rached Ghannouchi a déclaré aux journalistes algériens (notamment Le Temps D’Algérie et Tout Sur l’Algérie) lors d’une rencontre à Tunis en marge des festivités marquant le trentième anniversaire de la création du parti : «La souveraineté du peuple ne s’est pas encore matérialisée sous forme d’institutions, parlement, gouvernement, présidence, assemblées locales…L’ancien régime gouverne toujours», déplorant «l’influence qu’exercent encore les relais de l’ancien régime au sein du pouvoir actuel». La seule différence, selon lui, c’est simplement que «ce même régime a juste été dépossédé des instruments d’intimidations et de répressions par lesquels il imposait, durant les années précédentes, son diktat à la société». Le leadeur du parti Ennahdha a expliqué que «la révolution tunisienne est parvenue à extraire la souveraineté au régime politique tunisien pour l’offrir au peuple, néanmoins, ceci demeure encore insuffisant tant que la souveraineté qu’exerce la société dans la rue ne s’est pas encore traduite en termes de nouveaux mécanismes de loi et ne sert pas encore de base à l’édification de nouvelles institutions politiques du pays», précisant que ce ne sont pas les prochaines élections de l’Assemblée constituante prévues le 23 octobre prochain qui vont marquer l’aboutissement du processus de transition politique. Pour Rached Ghannouchi : «Ces élections ne constituent qu’une manœuvre supplémentaire de l’ancien régime pour se maintenir en place». Il a dénoncé le fait que sa formation fait l’objet «de tentatives de déstabilisation orchestrées à son encontre par les héritiers de Ben Ali qui sont encore au pouvoir, assistés dans leur besogne par une meute de partis politiques qui leur servent de suppléants». Selon lui, il s’agit de «manœuvres politiciennes» pour empêcher l’accession d’Ennahdha aux institutions politiques : «On tente de faire peur aux gens en défendant la thèse que les mouvements islamistes constituent un danger pour la population tunisienne». Ainsi, «le régime de Ben Ali possédait la force, la police et la répression et ne se contentait pas de la guerre médiatique. Il menait également une offensive sécuritaire. Ses héritiers ont récupéré son appareil médiatique et usent du « spectre islamiste » pour serrer les rangs de l’ancien régime en faisant une alliance avec les laïcs extrémistes. Ils cherchent l’appui de l’Occident en mettant en avant cette crainte», a-t-il précisé. «Ils veulent nous présenter aux yeux de la société et de la communauté internationale comme une menace pour le devenir de la Tunisie, des droits de la femme, du tourisme…», a-t-il ajouté. «En vérité Ennahdha n’est une menace pour personne» a-t-il insisté, expliquant que «C’est plutôt les intérêts mercantiles des résidus de l’ancien régime occupant encore des postes de responsabilité qui menacent notre pays». Pour conclure, Rached Ghannouchi a indiqué : «Nous voulons l’amitié de toute l’Algérie» et qu’«une Algérie harmonieuse, solidaire et solide profite à la Tunisie. On peut même dire que l’Algérie est une profondeur stratégique de la Tunisie. On ne se mêle jamais du jeu politique interne de l’Algérie. Le peuple tunisien attend de l’Algérie une position en faveur de la Révolution comme nous avons soutenu le peuple algérien dans sa guerre de libération. Tout ce qui est bien pour la Tunisie, l’est pour l’Algérie ».
Source: “Business News” Le 15-06-2011
Tunisie : les oubliés de Gafsa
Directement à l’origine de la révolution, pour laquelle ils ont payé le prix fort, les habitants du bassin minier n’en sont que plus impatients d’en toucher les dividendes. Qui se font désespérément attendre… Reportage.
Attablé à la terrasse d’un café, Béchir ne décolère pas : « Et dire qu’on est à l’origine de tout. La civilisation capsienne est née ici ; notre sous-sol a donné à la Tunisie des richesses, mais nous n’avons reçu en retour que de la misère ; c’est de chez nous que sont parties les révoltes du pays, et on nous oublie. » Cet ancien mineur exprime le sentiment général qui prévaut dans la région de Gafsa : cinq mois après la chute de Ben Ali, la contestation n’a toujours pas cessé. « Personne n’est content, renchérit un autre retraité des phosphates. Chaque jour, à Redeyef, Metlaoui, Oum el-Arayes, la liste des revendications s’allonge. On fait grève, on coupe les routes, mais les résultats sont maigres. La compagnie est comme un État dans l’État. »
Le coupable est tout désigné : la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG). Depuis plus d’un siècle, elle régente le tissu socioéconomique du bassin minier, aujourd’hui durement affecté par le chômage et la pauvreté, sous l’effet des coupes drastiques opérées par la CPG dans les effectifs – ramenés de 15 000 à 5 000 employés en dix ans – et de l’externalisation de différents corps de métiers. Pendant longtemps, la CPG a été la mère nourricière de la région ; elle prenait en charge les besoins de la population locale, allant jusqu’à assurer la distribution de l’eau, de l’électricité, ainsi qu’une couverture médicale et sanitaire. Symbole de la place centrale de cette mono-industrie, le siège de la CPG, mastodonte oppressant de béton et de verre, domine la ville.
La CPG suscite d’autant plus le ressentiment qu’elle a affiché, en 2008, année de la révolte locale, un bénéfice de 500 millions d’euros. Depuis le 14 janvier, elle ne tourne qu’à 40 % de ses capacités. « La compagnie a servi à engraisser Ben Ali et ses acolytes », accuse Ali, fondateur d’une nouvelle association de développement. Les tensions nées de l’implosion de 2008 sont loin d’être retombées. Politologues et sociologues s’accordent d’ailleurs à voir dans ce soulèvement sans précédent, qui a paralysé le bassin minier pendant près de six mois, les signes avant-coureurs de la révolution. Ce conflit a mis en évidence la fracture entre, d’un côté, les salariés intégrés, ouvriers et cadres de la CPG, et, de l’autre, les laissés-pour-compte du marché du travail : les chômeurs – près de 40 % de la population locale –, les travailleurs précaires des chantiers municipaux, les lycéens, les familles d’ouvriers victimes d’accident du travail dans les mines.
« On nous a tellement divisés que nous ne nous reconnaissons plus. Il n’y a pas si longtemps, nous ne faisions qu’un, même avec les Algériens, les Libyens et les Marocains qui travaillaient ici. Aujourd’hui, on se massacre entre voisins. À tous, je pose la question : pourquoi ? » Omezzine Guedria, ingénieur à la CPG, ne mâche pas ses mots lors d’une réunion avec les différents représentants de la société civile locale. Native de Gafsa et formée aux États-Unis, elle attend que ses enfants aient leur baccalauréat pour quitter la région. « On se méfie de tout et de tous ; en vingt-trois ans, on nous a appris à nous “désaimer”, je ne veux pas de ça pour mes enfants. »
Depuis le 14 janvier, l’esprit tribal semble en outre prendre le dessus. À El-Aguel, les gens du cru exigent de Yazaki, le producteur de câbles automobiles nippon, de recruter en priorité leurs enfants, arguant que le terrain de l’entreprise était, il y a des années, propriété de leur tribu. En réalité, dans la confusion de la révolution, des responsables syndicaux ont manœuvré pour faire croire à un réveil du tribalisme. Pour sauver leurs privilèges, certains recourent au bon vieux « diviser pour régner ». Il a suffi de provoquer une bagarre entre deux écoliers pour mettre le feu aux poudres entre les Ouled Abid et les Ouled Bouyahia. Deux morts ont scellé la discorde. « Les gens ne doivent pas être dupes, met en garde Ameur Dhahri (lire portrait p. 43). Après les événements de 2008, un syndicaliste a reçu de l’argent du pouvoir pour organiser l’immigration clandestine de centaines de jeunes. Il y a même un membre du clan Trabelsi [famille de Leïla Ben Ali, NDLR] qui continue de manœuvrer au grand jour alors que ceux qui sont attachés à la région ont fini en prison.
Inertie
Non seulement la manne des phosphates n’a pas profité à la population, mais l’environnement s’est considérablement dégradé ; il est loin le temps où l’Oued Magroun, à Metlaoui, était un jardin connu pour ses roseraies. Aujourd’hui, des grilles aux fenêtres ont ôté à la ville son charme post-colonial, tandis qu’à Oum el-Arayes les inondations de 2009 ont effacé la révolte de 2008. Un géologue de la CPG pose la grande question : « Y aura-t-il ici un avenir après les phosphates ? » Omezzine, qui en vingt ans n’a eu que trois promotions, dénonce l’inertie de sa hiérarchie : « Professionnellement, je suis aussi dans l’impasse, car la compagnie n’a aucun programme de recherche, même si elle dispose des équipements les plus sophistiqués. Alors que c’est la recherche qui a conduit à l’exploitation du site de Sra Ouertane. »
La région désespère de produire autre chose que des phosphates. L’agriculture souffre du déficit hydrique, la culture étagée de l’oasis est torpillée par des constructions anarchiques, tandis que l’oliveraie perd ses variétés locales au profit de cultures extensives qui pompent les ressources du sol et l’eau. Quant au tourisme, la région de Gafsa n’y songe plus ; le train qui conduisait les touristes dans les gorges de Selja est à l’arrêt. Abderazzak Lejri, enfant du pays et chef d’entreprise, montre, découragé, les piscines romaines à l’abandon, tout en évoquant la richesse civilisationnelle qui a déterminé le caractère des gens de Gafsa. « À un moment donné, analyse Béchir, on a troqué la vraie culture contre celle des applaudissements à tout-va. Dans les années 1970, c’est dans la troupe régionale que les noms les plus illustres du théâtre tunisien actuel, Raja Farhat, Fadhel Jaïbi, Raouf Ben Amor et Fadhel Jaziri, ont fait leurs armes. Il y avait une volonté politique de décentralisation, très vite escamotée par une pseudo-délocalisation.
Lueur d’espoir
À défaut de vie culturelle,Gafsa a renoué avec son humour et sa verve à travers la radio locale, qui ouvre son antenne à toutes les actions citoyennes. C’est en reporter plus qu’en animateur qu’Amor Aloui, de Radio Gafsa, couvre les colloques. « Il faut faire parvenir l’information, dire ce qui se passe, expliquer. Il y a un apprentissage citoyen auquel la radio doit participer », souligne-t-il. Mais radio et télévision ne suffisent pas. Les jeunes ont bien du mal à trouver leurs repères. « Peu d’hommes politiques sont venus nous voir, raconte Hafedh. De toute façon, même si les islamistes ont fait salle comble, nous ne voulons pas de la politique politicienne. Ici, on se souvient surtout du temps où Rached Ghannouchi [fondateur du parti islamiste Ennahdha], alors professeur de philosophie, faisait les quatre cents coups avec une femme si maigre qu’elle était surnommée “Emna Spaghetta”. »
Tout projet de développement de la région implique son désenclavement et un réexamen des infrastructures, les routes mais aussi la ligne de chemin de fer, qui dépendait de la CPG et qui ne peut être raccordée au réseau national en raison d’écartements différents entre les rails. En 2011, 32,5 millions d’euros d’investissements publics sont prévus pour développer les transports et l’équipement dans la région. Une lueur d’espoir pour ces habitants du bassin minier mis à l’écart socialement et économiquement dans une région elle-même marginalisée.
Source : « Jeune Afrique » Le 15-06-2011
Tunisie/Al WAtan : Les raisons de la démission d’Ahmed Friâa
Des sources informées du parti Al Watan, citées par Assabah dans son édition de ce mercredi, disent que les raisons de la démission de son fondateur Ahmed Friâa, sont les affaires en justice encore ouvertes à son encontre. Son départ est un choix, pour permettre au parti de continuer son travail dans de bonnes conditions, sous la conduite de Mohamed Jegham. Ces mêmes sources confirment que Friâa a présenté cette démission suite aux accusations d’homicides volontaires, ce qui lui barre définitivement la route pour aspirer à un avenir politique. Ce départ n’aurait donc rien à voir avec ce qu’a vécu Friâa dans sa ville natale Zarzis, où il a été empêché de tenir un meeting avec la population de la région. L’ex-ministre de l’Intérieur, qui a occupé ce poste avant le 14 janvier, a déclaré avant-hier aux médias que sa démarche vise à passer le témoin aux jeunes. Sauf que quelques acteurs politiques disent que c’est un choix stratégique, pour que le nom de Friâa ne figure pas sur la liste de ceux qui ont été interdits de présenter leur candidature à l’Assemblée Nationale Constituante. Ce qui compromettrait les chances d’Al Watan lors des élections législatives.
Pour sa part, Mohamed Jegham, Secrétaire Général du parti, a déclaré qu’il existe un courant hostile à Ahmed Friâa au sein du parti. Il a exclu tout différend l’opposant à l’ancien ministre de l’Intérieur. Source : « Global Net » Le 15-06-2011
Jegham « confirme l’existence d’un courant protestataire au sein du Parti « Al Watan » contre Ahmed Friaa »
Le secrétaire général du parti « Al Watan », M. Mohamed Jegham, a confirmé mardi après midi, l’existence d’un courant protestataire contre M. Mohamed Friaa qui a démissionné, lundi, du parti. Il a fait remarquer que ce courant considère Friaa comme étant « un obstacle pour la progression du parti », au vu des nombreuses critiques qui lui sont adressées en raison du poste qu’il avait occupé en tant que ministre de l’Intérieur avant la Révolution du 14 janvier 2011.
M. Jegham a nié, dans une déclaration à l’agence TAP, l’existence d’un quelconque conflit avec M. Friaa, précisant qu’ils ont été tous les deux victimes d’exclusion, sous le régime du président déchu, en dépit de leur appartenance au RCD dissous et de l’occupation de postes de responsabilité.
Il convient de rappeler que M. Mohamed Jegham avait occupé durant la période comprise entre 1995 et 1997, le poste de ministre de l’Intérieur. Il avait également était chargé, de 1997 à 1999, de la fonction de directeur du Cabinet présidentiel.
De son côté, M. Ahmed Friaa a déclaré que l’engagement par la Tunisie d’une nouvelle étape post-révolutionnaire, commande de faire passer le flambeau aux jeunes, soulignant que sa démission du parti « Al Watan » ne l’empêchera pas de servir le pays, notamment à travers l’animation de conférences, la publication de livres et la présentation de conceptions sur différents projets.
MM. Mohamed Friaa et Ahmed Jegham ont fondé le 4 mars 2011 le parti « Al Watan », un parti centriste qui rejette le fanatisme et l’exclusion, défend les objectifs de la révolution et sauvegarde les acquis du pays.
Source : « Tunsie Numerique » Le 15-06-2011
Le vrai faux départ des partis politiques
Bassam Bounenni
Répression de manifestations dans la violence, bain de sang dans le Bassin minier, censure, atermoiements juridiques. Tel est le bilan de l’après-Ben Ali. Et, pourtant, les partis politiques semblent être déconnectés d’une réalité qui fait de plus en plus peur.
Que l’officier de police, Samir Feriani, risque d’être jugé devant un tribunal militaire ou que les journalistes soient tabassés et les locaux de leurs journaux saccagés, rien ne semble susciter la moindre forme d’indignation chez nos politiques.
Plongés dans les “logiques” électorales, les partis déçoivent. Avant le 14 janvier, à la moindre dérive, on criait scandale. Aujourd’hui, quand les droits de l’Homme sont bafoués, preuves à l’appui, les réactions se font aussi rares que dérisoires.
Le lobby des défenseurs des libertés, très présent dans les quelques partis politiques, reconnus et interdits sous la dictature, ainsi que dans le milieux des avocats, semble avoir lâché prise.
A Metlaoui, outre le mutisme complice du gouvernement, les partis politiques ont laissé faire, se contentant, dans les meilleurs des cas, à des communiqués futiles portant des dénonciations on ne peut plus laconiques. Du déjà vu. D’autant plus que les temps ont changé. A 14 morts, du jamais vu dans nos murs, hors période de soulèvement, l’immobilisme irresponsable des partis politiques est flagrant.
Tapis rouges pour Messieurs
Sombrant dans un populisme radical, vantant leurs épopées, parfois exagérées et même erronées, seuls les meetings populaires et les bains de foule les intéressent. On croyait naïvement que seul le défunt RCD pouvait oser faire dans l’immoral. Mais, voilà les figures de proue de la lutte anti-Ben Ali imiter le parti unique, payant la foule et mettant à sa disposition des bus pour des déplacements aussi bien “politisés” que “politisants”.
Sur la toile, pas de scrupules même si l’on achète des pages ou des blogs assez sollicités “pour la bonne cause”. La leur. Pourquoi rougir des pseudonymes si c’est pour achever un détracteur. Bref, on n’est pas sorti de l’auberge.
Des affichages à l’effigie des “conquérants” qui n’ont rien à envier à ceux de Ben Ali sont de retour sur nos auto-routes et sur les principales artères des grandes villes. Décidément.
Débats houleux pour la Saint-glinglin
Dans de telles circonstances, il serait, donc, absurde de s’attendre à des miracles. Le débat politique se résume aux manœuvres pré-électorales. La dualité Islamisme/Laïcité reprend de plus belle, causant des dégâts quasiment irréparables, sans pour autant marquer le moindre tournant ou la moindre avancée. Loin s’en faut. Pendant ce temps, les caciques de Ben Ali dissimulent les quatre vérités qui ont fait de la Tunisie, 23 ans durant, un pays claquemuré, une coupole pour chefs mafieux. Un non-Etat.
Le cas Samir Feriani
Les pièces à conviction sont, donc, inaccessibles. Et, même quand on ose crier haut et fort qu’on veut tout cracher, il y a non-lieu. Pis, des représailles. Tel est le cas de Samir Feriani.
Cette affaire est si grave que Human Rights Watch avait averti que “le gouvernement provisoire devrait encourager ceux qui tirent la sonnette d’alarme, et non pas utiliser les lois discréditées du gouvernement déchu pour les emprisonner.” Seuls les inoxydables Mohamed Abbou et Samir Ben Amor, avocats de “l’accusé” ont tiré la sonnette d’alarme.
Bouées de sauvetage pour les juges de Ben Ali
Pendant ce temps, la justice tunisienne vit un semblant d’assainissement. Mais, rien d’innocent. En effet, les juges corrompus sous Ben Ali bénéficient du gel de leurs activités, une procédure illégale, en fait. Car, un gel présuppose un argument. L’argument étant la corruption, cela exige le jugement. Le gel devient, donc, une aubaine pour les symboles de la corruption des cours de Ben Ali qui échapperont au procès.
La demission qui en dit long
Même situation ou presque au sein de la Commission nationale d’établissement des faits sur les affaires de malversation et de corruption. La démission de Sadok Ben M’Henni en protestation contre un projet d’amnistie des personnes qui se présenteraient devant la Commission et avoueront des faits. Là, encore, aucune réaction de nos partis politiques. Peu d’échos, également, dans la presse la place.
Les pro-Abdallah toujours aux commandes
Car, faut-il avancer que nos médias n’ont pas encore cassé la voix. Les décideurs sont toujours les mêmes. A l’exception de Abdel Aziz Jeridi, aucun sbire de la machine de propagande de Ben Ali ne s’est senti menacé par d’éventuelles poursuites judiciaires.
Les partis politiques ne s’en soucient pas, en tous cas. Ce qui les importe, c’est d’être présent dans les médias. Peu importe les médias, bien entendu. Qu’ils soient heritiers de Cactus Productions ou téléguidés par d’anciens proches d’Abdel Wahab Abdallah, l’essentiel c’est la Une, les titres principaux et le prime time. Et, tant pis pour l’éthique et la déontologie.
Partis ou personnes ?
Mais, faut-il tant exiger de nos partis politiques ? Sous Ben Ali, j’insistais sur le terme “forces de protestation” plutôt que partis politiques. Cela ne touchait en rien leurs sacrifices et militantismes mais les situait mieux sous une dictature politiquement intolérante. Le vrai faux départ des formations politiques émanerait, justement, de ce lent passage de la protestation à l’exercice politique. Autrement dit, entre la dissidence et la participation effective il y aurait des années-lumière à traverser. Il y va de l’intérêt de tous. Mais, pour ce faire, force serait de dé-sacraliser le leadership des partis et de consolider en leur sein de vraies et solides pratiques démocratiques. Ce que Tunisiennes et Tunisiens avaient presque accompli, au lendemain du 14 janvier. Aux partis politiques, maintenant, de faire leurs propres révolutions respectives.
Source: “Le blog de Bassam Bounenni » le 15 juin 2911)
La Tunisie face aux enjeux régionaux : entre leadership et intégration
Introduction
Quelle sera la place de la Tunisie libérée dans le Maghreb, et plus largement dans le monde arabe ?
Après Bourguiba, une diplomatie bien timide
Au cours de la longue présidence d’Habib Bourguiba, la Tunisie a acquis une position prépondérante dans la diplomatie arabe. Quoi que l’on puisse penser de l’homme, et en dépit des nombreuses dérives de son régime, Bourguiba a su mener une politique étrangère éclairée, portant ainsi la voix raisonnée de la Tunisie à l’occasion des grands débats diplomatiques qui ont animé le monde arabe, notamment en ce qui concerne les perspectives de résolution du conflit israélo-palestinien. De plus, l’esprit pacifique de la politique bourguibienne combiné à une politique de développement relativement efficace, des avancées en matière d’éducation et de droits de la femme, ont permis à cette Tunisie qui s’est distinguée, de bénéficier d’une certaine aura au sein du monde arabe, en dépit des nombreuses atteintes aux droits de l’Homme. Avec le règne de Ben Ali, c’est une Tunisie effacée, timorée et au visage terne, sinon morbide, qui a timidement arpenté les couloirs des chancelleries étrangères, sans le moindre éclat, hormis quelques éclaboussures sanguinolentes, témoins de la répression que subissaient encore journalistes, hommes de loi et militants des droits de l’Homme. En effet, arc-boutée sur les acquis de l’Indépendance que la Tunisie de Ben Ali n’a pas eu l’audace de surpasser, la diplomatie tunisienne avait peu de choses à « vendre » au monde, si ce n’est l’attrait d’une économie plus ou moins stable et des plages bradées au renfort de campagnes publicitaires qui n’ont pas su évoluer au fil des années.
Le nouveau souffle de la Révolution
Avec la Révolution du 14 janvier 2011, c’est une nouvelle voie qui s’ouvre à la Tunisie. La sombre page de Ben Ali étant tournée, la Tunisie, forte d’une nouvelle aura « révolutionnaire », a la possibilité de redéfinir sa diplomatie ainsi que la place qu’elle entend conquérir sur la scène diplomatique arabe. Bourguiba l’avait bien compris, ce ne sont ni nos maigres ressources financières ou minières ni notre population qui n’a pas encore dépassé la barre des 11 millions d’habitants, qui nous permettront d’accéder au rang de leader régional. Pour accéder à une position de leadership, la seule voie est celle d’une diplomatie intelligente, combinée à une économie performante et une culture dynamique. Jusqu’au départ de Ben Ali, la petite Tunisie timide et isolée avait perdu toute légitimité pour prétendre à restaurer son prestige et son influence diplomatique. Avec cette Révolution populaire qui se diffuse au-delà de nos frontières, nous avons construit l’embryon de notre propre légitimité internationale. Et c’est en continuant de tracer la voie que nous avons esquissée que nous pourrons acquérir un rôle majeur sur la scène diplomatique régionale et mondiale.
La Tunisie, leader dans la voie de l’intégration ?
Dans le cadre de ce dossier, nous envisagerons différentes pistes en vue de parvenir à ce nouveau leadership et d’en faire un usage salutaire pour nous-mêmes et pour les peuples voisins.
La clé, dans la poursuite de ce leadership utile, semble être l’idée d’intégration régionale. Cette intégration régionale a connu quelques balbutiements avec la construction maghrébine qui n’a pas porté ses fruits, dans le cadre d’une Union du Maghreb Arabe. En effet, l’UMA était continuellement convalescente, victime de divers blocages et de la mauvaise volonté des différents régimes autocratiques, la dictature ne favorisant ni l’intégration ni les abandons de souveraineté que cette dernière nécessite. Or, même si la Révolution tunisienne ne s’est pas exportée telle quelle chez tous nos voisins, elle a tout de même eu un impact majeur tendant vers une démocratisation de nombreux Etats arabes. Ce « printemps » arabe dont les mots d’ordre proviennent de la rue tunisienne change la donne en matière d’intégration. En effet, des peuples libérés et en possession de leur souveraineté ont plus d’avantages et de facilité à coopérer entre eux sur la voie de la prospérité que des autocrates jalousement assis sur leur pouvoir national.
Au fur et à mesure que la transition démocratique s’approfondira dans les pays arabes, ils pourront tendre vers une union économique et politique à l’instar de la construction qui a permis de fonder l’Union Européenne, tout en tirant des leçons des échecs européens[1], reproduisant uniquement les réussites de ce laboratoire à ciel ouvert qui nous fait face, de l’autre côté de la Méditerranée. En effet, ce n’est ni le panarabisme classique, frappé d’obsolescence, ni un nationalisme arabo-islamique nostalgique qui nous permettront de nous unir, car ces idéologies d’un autre âge ne reflètent pas la réalité de ce que nous sommes et font abstraction de la diversité et des sensibilités nationales au sein de la communauté des Etats arabes. A contre-courant d’un romanticisme nassérien ou de la poursuite d’un illusoire califat islamique transarabe, c’est dans une intégration fondée sur l’échange, la coopération, la raison et le droit que nous pourrons à la fois mettre en commun nos ressources, nous unir pour prospérer, tout en formant une communauté soudée mais respectueuse des souverainetés nationales et de l’identité culturelle spécifique à chaque population. Nous proposons un nouveau panarabisme rationnel et moderne, purgé de tout mysticisme et centré sur la recherche efficiente de la prospérité et sur des valeurs communes plutôt qu’une caricature d’identité.
Dans cette entreprise de construction régionale, l’impulsion pourrait venir de la Tunisie, qui ferait de l’intégration l’un des grands axes de sa politique étrangère. Déjà riche de sa position de pionnier de la marche vers la démocratie arabe, la Tunisie tirerait des avantages de l’intégration qu’elle proposerait à ses voisins. D’une part, outre les bénéfices directement tirés de l’intégration, le rôle d’impulsion que pourrait jouer la Tunisie lui offrirait un fort leadership régional sur le plan diplomatique. D’autre part, il y a l’attrait formidable que représente la possibilité de redessiner l’espace régional dans lequel nous nous insérons.
Premier exportateur de révolutions, ou devrions-nous dire de liberté, la Tunisie pourrait institutionnaliser la « Révolution » sur le plan régional. Il ne s’agirait pas tant d’exporter et encore moins d’imposer notre modèle ou notre révolution en tant que tels, mais d’inviter les peuples voisins à définir avec nous un socle commun à partir duquel chacun de nous moderniserait son modèle national. Le vecteur de cette construction serait la création d’une entité supranationale et interétatique sur le modèle de l’Union Européenne, ayant une vocation fonctionnelle. Cette institution pourrait être fondée par la Tunisie, avec un ou deux autres partenaires qui ont entamé leur transition vers la démocratie et l’état de droit. L’objectif pour la Tunisie et ses partenaires initiaux consisterait à créer une dynamique à partir de cette entité commune qui dessinera un ordre juridique supranational (réglementations communes, institutions communes etc.). En offrant un cadre institutionnel régional permettant d’assurer en commun la consolidation des acquis démocratiques des Etats qui auront choisi d’entamer leur transition, l’accès à cette union des démocraties arabes pourrait constituer un objectif attrayant pour les peuples de la région. En effet, l’existence d’une organisation régionale dotée d’un cadre institutionnel interétatique et articulée autour d’un axe démocratique pourrait constituer une perspective attractive pour les Etats de la région qui seraient incités à opérer à leur tour leur transition démocratique afin de prendre part eux aussi à cette construction et de bénéficier des avantages politiques, techniques et économiques de l’intégration. Cette démocratisation par l’incitation a fait ses preuves lorsque les Etats d’Europe Centrale ont modernisé leur législation en matière de droits de l’Homme et de libertés fondamentales afin d’intégrer l’Union Européenne.
Loin de la chimère de la fusion des Etats-nations à la mode sous Nasser et Kadhafi, cette union des démocraties arabes prendrait la forme d’une coopération renforcée par l’institution d’un ordre juridique supranational : des institutions communes pour appliquer des traités auxquels ont adhéré des Etats souverains et indépendants. Quant à l’identité de ces Etats, il n’est pas intéressant de se limiter aux Etats du Maghreb Arabe. Nous avons pu constater l’échec de l’UMA. C’est pourquoi il faut user de pragmatisme et construire les premiers partenariats avec tout pays arabe qui a entamé une transition démocratique et qui a la volonté de mettre en œuvre l’intégration proposée, afin de ne pas mettre en péril ce projet du fait des blocages que certains pays pourraient exercer. Il ne faut pas avoir peur de commencer à petite échelle avec un niveau de coopération renforcé entre un petit nombre de pays pour ensuite préparer l’extension de l’union lorsque celle-ci aura déjà commencé à porter ses fruits pour les membres fondateurs.
Habib M. Sayah
Analyste pour Atlas Economic Research Foundation
Fondateur d’El Mouwaten
Vous trouverez l’intégralité de l’étude sur www.UnMondeLibre.org, le site francophone d’Atlas Economic Research Foundation
[1] Outre la construction d’un lourd appareil bureaucratique, les écueils à éviter sont l’interventionnisme excessif d’une structure supranationale comme l’Union Européenne en matière de réglementation, mais aussi l’idée illusoire d’une politique étrangère commune parfaitement homogène. A cela s’ajoute le bilan mitigé de la monnaie unique.