12 juin 2000

Accueil

 

 

CENTRE  D’INFORMATION  ET  DE  DOCUMENTATION  SUR  LA  TORTURE
        CIDT-TUNISIE
Association de citoyens du monde pour le droit des Tunisiens à ne pas être
torturés
Membre du Réseau SOS-Torture de l’OMCT-Genève

    Comité d’honneur :
    M. Jacques  FRANÇOIS
    Mgr. Jacques  GAILLOT
    Dr. Hélène  JAFFÉ
    M. Gilles PERRAULT
    M. François DE  VARGAS
                                        Besançon, le 12 juin 2000
    Président :
    Jean-Marc MÉTIN

        Chers amis,

Le! Pr. Moncef Marzouki, porte parole du Conseil National pour les Libertés en
Tunisie et ancien président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme,
nous a fait parvenir la déclaration ci-après. Nous portons ce texte à la
connaissance de l’opinion avec ce seul commentaire : il fut un temps au début
des années 90, où nous taisions des faits encore plus dramatiques que ceux
que vous allez lire, de peur d’être taxés de propos excessif…

******************************************************

Dr. Moncef  MARZOUKI
Tél. : (216 3) 246 102

DECLARATION

Dans mon pays aujourd’hui un peuple sans souveraineté, un Etat sans
crédibilité, une politique sans boussole et des enfants à vendre.

    Dimanc!he 8 juin, au milieu du souk de la ville de Douz,  dans le Sud
tunisien, dans la partie destinée au commerce du bétail, s’est installé un
instituteur affamé depuis trois jours. M. Ali Sghaïer Ben Salem Ben Mohamed
proposait ses quatre enfants aussi affamés que lui, à la vente. Voici le
texte de la lettre qu’il m’a envoyée et que je prends sur ma responsabilité
de la fait parvenir au peuple tunisien et à tous les défenseurs de la dignité
de l’Homme dans le monde.

« J’ai passé de nombreuses années dans les prisons du régime en Tunisie, sous
l’accusation d’appartenance à association non autorisée. J’y ai connu toutes
sortes de tortures et d’humiliations, dont je souhaiterais perdre jusqu’au
souvenir , tellement cela était dur, cruel.
    Ensuite, je suis sorti de prison et j’ai été jeté dans les tourments de
la société. Je me suis retrouvé confronté à une longue liste d’interdits :
interdit de travailler, i!nterdit de voyager, interdit d’exprimer la moindre
revendication civique, fût-elle modeste. Je me suis retrouvé dans une prison
encore plus grande. J’ai tenté de trouver un travail, quel qu’il fût, pour
pouvoir subvenir aux besoins alimentaires de mes enfants. Je n’y suis pas
parvenu, car les agents de la sécurité ont terrorisé tout le monde et les ont
menacés de toutes les foudres s’ils venaient à m’apporter toute forme d’aide
ou si d’aucun osait m’employer pour n’importe quelle tâche.
    Toutes les voies s’étaient fermées devant moi et je me suis retrouvé
incapable de subvenir aux besoins les plus élémentaires de mes enfants, alors
que j’avais maintes fois tenté de trouver un emploi quel qu’il soit par
lequel j’aurais sauvegardé ma dignité, même s’il ne permettait que le strict
nécessaire.
    Il n’est rien de plus cruel pour un père que de voir ses enfants se
tortiller de faim et se gangrener !de maladie, alors qu’il reste plongé dans
l’impuissance, désoeuvré et ne voyant aucun début de solution qui le
sortirait du drame, face à un régime qui nous prive des ressources d’une vie
digne, comme il prive les chômeurs de la carte de soins. Ce sont là des
châtiments collectifs que prohibent toutes les législations sans exception.
Dans le même temps, le pouvoir prétend préserver les droits de l’homme. Cela
peut être vrai à un certain point, mais à la condition que l’homme en
question soit affilié au parti au pouvoir et donc un supporter du régime en
place.
Pour toutes ces raisons, j’ai résolu de proposer mes enfants à la vente.
Peut-être parviendrais-je ainsi à secouer quelques consciences qui pourraient
partager mon drame et celui de milliers de déshérités comme moi ».

    Pour ce qui précède, je dis aux Tunisiens : ceci n’est qu’un échantillon
des drames silencieux dont souffre notre peuple.

Parc!e que c’est le pouvoir qui transgresse à tout bout de champs les lois
élémentaires de la patrie et du monde,
parce que, durant des années, il a confisqué la plupart des droits
individuels et la totalité des libertés collectives du peuple, se contentant
d’une politique changeante visant à tromper l’opinion,
parce que ce pouvoir refuse de prendre la mesure incontournable qu’est
l’amnistie générale en vue de mettre fin à ces drames qui heurtent la
conscience. Cela induirait la libération de tous les prisonniers politiques,
la réintégration de tous ceux qui ont été renvoyés de leur travail, le retour
en toute sécurité des exilés, la levée de toutes les restrictions à
l’exercice des droits et libertés énoncés dans la Déclaration universelle,

pour tout cela donc, il ne nous reste pas d’autre choix que de renforcer la
lutte pour la dignité de la Tunisie et des Tunisiens.
Avançons partout dans la discipline et le calme, en utilisan!t tous les moyens
pacifiques, en vue de recouvrer nos droits imprescriptibles, protégés que
nous serons par la Constitution et par les traités internationaux régissant
les libertés. Que le mot d’ordre de cette étape soit : Désormais, plus de
peur et plus d’humilité, pour qu’aucun Tunisien ne soit contraint, en un jour
noir, de proposer ses enfants à la vente au marché des moutons et des chèvres.

                    9 juin 2000
                    Signature
************************

UNE PUISSANTE VOLONTE D’EMANCIPATION S’EMPARE DE LA TUNISIE

A L’INITIATIVE D’ATTAC,
TOUS AVEC LES TUNISIENS

POUR LA LIBERTE                         CONTRE LES PRISONS PLEINES
POUR LA DIGNITE                         CONTRE L’AVILISSEMENT
POUR LA DEMOCRATIE                  CONTRE LA TORTIOCRATIE
POUR L’ETAT DE DROIT                    CONTRE LE DESPOTISME BEYLICAL

LES TUNISIENS SE RETROUVENT AVEC LEURS AMIS
POUR UNE SOLIDARITE INTERNATIONALE EN FAVEUR DU « PAYS PROCHE »

MARDI 13 JUIN 2000 A PARTIR DE 18 HE!URES
A LA BOURSE DU TRAVAIL DE SAINT-DENIS

Khaled BEN M’BAREK, Coordinateur du CIDT-TUNISIE

***************************

Mardi 13 juin 2000, 18h

Bourse du Travail de St Denis

 

5 heures pour la démocratie en Tunisie

 

Plus que jamais, ceux qui se battent pour une véritable démocratie et pour un avenir plus juste en Tunisie ont besoin de soutien. Pour relayer leur combat, pour renforcer le mouvement de solidarité en France, le Collectif national de Soutien en R.A.I.D. organise un Meeting pour la Démocratie en Tunisie. Des représentants des principales organisations démocratiques autonomes tunisiennes y participeront :

 

·     Khemais Ksila (vice président de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme)

·     Moncef Marzouki (porte parole du Conseil national pour les libertés en Tunisie)

·     Taieb Moalla (représentant du RAID)

·     Ahmed Maaroufi (syndicaliste)

·     Ahlem Belhadj (Association tunisienne des femmes démocrates)

·     Fawzi Ben Mrad (Association des jeunes avocats)

 

avec des  personnalités :

Patrick Baudoin, Yasmine Boudjerada, Hélène Flautre, Monseigneur Gaillot, René Gallissot, Mohamed Harbi, Leon Schwartzenberg

 

et

 

du groupe musical Diwan de Bechar

et du chanteur Mohamed Bahr

 

COLLECTIF NATIONAL DE SOUTIEN AU RAID – Organisations signataires

Association pour une Taxation des Transactions financières pour l’Aide aux Citoyens (ATTAC), Syndicat National de l’Enseignement Supérieur (SNESup), Droits Devant, Union Syndicale du Groupe des 10, Sud Etudiant, Comité de Soutien aux Luttes Civiles et Politiques en Tunisie, Jeunesses Communistes Révolutionnaires-RED (JCR-RED), Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT), Groupe de Travail sur la Tunisie (GTT), Parti Communiste Français (PCF), Fédération Syndicale Unitaire (FSU), Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR), Union dee Etudiants Communistes (UEC), Mouvement des Démocrates Marocains (MDMF), La Voie Démocratique, Hourijya Liberté,

******************************

UNE ÉCONOMIE TUNISIENNE
FACE A DES DÉFIS MAJEURS

Bédoui Abdeljelil

Université de Tunis- Tunisie

La Tunisie, comme la majorité des pays en développement, se trouve depuis environ quinze années, engagée dans une dynamique de transition vers une économie de marché, dans un contexte historique dominé par un processus de mondialisation.

La transition, renvoie au passage d¹une économie qui a été pendant trente ans centrée sur un espace national fortement protégé et régulé par un Etat envahissant à une économie ouverte, de plus en plus régulée par le marché  et cherchant une plus grande insertion dans l¹économie mondiale considérée comme étant la nouvelle base pour une relance ferme et durable de la croissance.

Cette transition pose de nombreux problèmes, dans la mesure où elle appelle des changements substantiels et multiples tant au niveau structurel, institutionnel que comportemental. Le programme d¹ajustement structurel (PAS) avec ses réformes visant la libéralisation, la déréglementation et la privat!isation ne semble pas avoir jusqu¹ici favoriser et entraîner d¹une façon spontanée les changements souhaités.

En outre, le contexte de la mondialisation et les nombreuses mutations internationales en  cours génèrent des défis et des contraintes, qui dans le cas Tunisien posent de nouveaux problèmes relatifs au modèle actuel de croissance et à ses capacités et aptitudes à réaliser une insertion dynamique dans l¹économie mondiale. Ce qui rend encore plus impératif la réalisation des changements au niveau des structures, des institutions et des comportements afin de pouvoir négocier les nouvelles contraintes résultant    de la mondialisation en général et de celles découlant de l¹accord de création de la zone de libre échange avec l¹union européenne en particulier.

L¹ampleur des changements requis  s¹explique par la lourdeur de l¹héritage légué par l¹économie administrée d¹une part et les exigences tant de la logique d¹une transition vers un!e économie de marché que celles découlant de la nécessité d¹intensifier et de diversifier le modèle de croissance afin d¹améliorer l¹insertion mondiale de la Tunisie d¹autre part.

En effet, depuis le début des années soixante, la Tunisie dans le cadre d¹une économie administrée à mis en place un modèle de croissance extensive  qui s¹est élargie au fil des années sur la base de la mise en valeur des ressources naturelles pour l¹essentiel non reproductibles (phosphate, pétrole..) dans un premier temps et de l¹exploitation d¹une main d¹¦uvre abondante non qualifiée et du développement du secteur touristique dans un deuxième temps.

Ce qui mérite d¹être fortement signalé ici, c¹est que cette économie administrée a fini par créer de nombreuses rigidités et inerties, dans la mesure où elle a structuré, hiérarchie et modelé le comportement des acteurs et le type des rapports qui se sont établis entre les différentes sphères et instances de la vie sociale. Ceci appar!aît en particulier à travers les quelques observations qui suivent :

– En premier, il faut souligner que l¹économie administrée s¹est édifiée dans le cadre d¹un rapport entre l¹Etat et la société civile caractérisée par une domination totale de l¹Etat sur la société civile. Ce type de rapport a poussé constamment l¹Etat, à la recherche d¹une légitimation, à multiplier et élargir sa politique de redistribution de ressources pour l¹essentiel non reproductibles (rente pétrolière, dette extérieure) d¹une part et a fini par inhiber l¹esprit de création et d¹entreprise, déresponsabiliser les acteurs socio économiques et cultiver chez ces derniers un comportement d¹assistance et de recherche de rente .
– Dans ce cadre, tout l¹édifice institutionnel a été conçu pour renforcer l¹Etat et affirmer l¹hégémonie du politique sur l¹économique et non pour créer un environnement institutionnel favorable aux acteurs économiques et autorisant des interactions dynamiques entre l¹économi!que et le politique. Ceci s¹est traduit par le développement d¹une culture d¹allégeance dans la mesure où le degré d¹enrichissement économique devient tributaire du degré d¹allégeance politique.

– Sur un autre plan, la priorité accordée à l¹industrialisation a débouché sur une soumission de l¹agriculture aux impératifs d¹un développement industriel  dépendant et désintégré. Cette soumission s¹est réalisée concrètement par un transfert permanent du surplus agricole vers les autres activités économiques et s¹est traduite par une marginalisation du monde paysan tant sur le plan économique  qu¹institutionnel.
– Concernant les différentes fractions du capital non agricole, il faut souligner l¹absence d¹articulation entre le capital bancaire et le capital industriel. Dans le cadre de l¹économie administrée, le capital bancaire fortement soumis à l¹Etat et à la logique du  primat du politique sur l¹économique, s¹est contenté de jouer le rôle passif d¹un simp!le intermédiaire financier qui se contente de collecter l¹épargne et de la canaliser vers ceux qui ont un besoin de financement et ce conformément à une politique monétaire et industrielle définie d¹une façon centralisée. L¹absence d¹une autonomie relative du capital bancaire a empêché ce dernier  de jouer un rôle actif au niveau de la construction , la restructuration, la consolidation  et la diversification de l¹appareil productif. De sorte que le système bancaire s¹est trouvé au bout du compte accablé par des créances   douteuses, alors que le système industriel  se trouve fragilisé par un lourd endettement, un parc machine   vieilli, une forte spécialisation avec une prolifération des petites et moyennes entreprises incapables de faire face aux contraintes actuelles de la libéralisation et de la mondialisation.
– En outre, les rapports entre les employeurs et les travailleurs se sont structurés de leur côté selon une logique qui a fait! de l¹entreprise un lieu de captation de la rente   et des ressources   redistribuées par l¹Etat, plutôt qu¹un  lieu de création des richesses sur la base de compromis stables et négociés entre les acteurs concernés. Il en est résulté des faibles taux d¹encadrement , de faibles gains de productivité, de faibles taux d¹utilisation des capacités de production installées, une absence de la formation continue, de politique de maîtrise et d¹adaptation technologique et une évacuation des problèmes relatifs à la qualité et à la maîtrise du coût.
– Tout ce qui précède a pu se réaliser sur la base d¹une articulation  entre le national et l¹international qui a constamment cherché à atténuer  la contrainte extérieure en aval, c¹est-à-dire en protégeant l¹économie de la compétition internationale débouchant de la sorte sur une aggravation de la contrainte internationale en amont, c¹est-à-dire au niveau technologique et financier.
– Dans ces conditi!ons , l¹évaluation de la dynamique de transition, en cours actuellement en Tunisie, doit être menée en examinant dans quelle mesure cette dynamique a pu bousculer ces pesanteurs structurelles, institutionnelles et comportementales,  et créer des conditions nouvelles pour une relance durable et soutenue de la croissance.

L¹analyse de l¹économie tunisienne montre que la simple application des politiques de libéralisation de déréglementation et de privatisation ne suffit pas pour bousculer les inerties et les pesanteurs héritées d¹une économie administrée et politiquement centralisée. Une économie du marché livrée à elle même avec des acteurs qui prônent le principe de la neutralité vis à vis des mécanismes d¹allocation   des ressources tel que le fait l¹Etat à travers la logique de désengagement, qui appliquent les règles prudentielles telles qu¹elles sont conçues dans le cadre de la réforme du système bancaire, qui cherchent des profits à court terme en ab!sence d¹une visibilité de l¹avenir ;  tel qu¹il ressort actuellement du comportement du secteur privé, qui font de la flexibilité du marché du travail une politique de rénovation des relations professionnelles et qui font de la politique sécuritaire et des restrictions des libertés une politique de stabilité politique et de paix sociale ; une telle évolution actuellement en cours n¹offre  aucune perspective pour une relance durable de la croissance  et une amélioration de l¹insertion mondiale de l¹économie tunisienne.

Une analyse plus ciblée de la dynamique de transition dans le contexte de la mondialisation   fait apparaître  l¹existence en Tunisie de deux grands problèmes centraux qui pèsent sur l¹avenir économique de la Tunisie  et appellent des solutions urgentes :

Le premier problème est relatif à l¹essoufflement du modèle actuel de croissance extensive. La libéralisation et la déréglementation révèlent   de plus !en plus la fragilité de ce modèle, alors que la mondialisation fait apparaître son incapacité à améliorer l¹insertion mondiale  du pays en général et à faire face aux échéances prévues  dans l¹accord d¹association avec l¹union européenne en particulier. Ceci exige nécessairement la transition vers un modèle de croissance intensive et diversifiée.

Le deuxième problème est relatif au décalage inquiétant entre la dynamique économique caractérisée par un processus accéléré de marchandisation de la vie économique et la dynamique politique dominée par le recul des libertés et l¹absence de perspectives réelles de démocratisation de la vie politique. Ce décalage est inquiétant  dans la mesure où il relève d¹un paradoxe qui ne peut que paralyser la vie économique et empêcher toute refonte du modèle de croissance qui nécessite une réforme de l¹Etat et des transformations concomitantes aux niveaux des institutions et des comportements.

A- L¹essoufflement du modèle de croissance

Au cours de la période de transition vers une économie du marché et grâce à la politique de stabilisation  qui représente le premier volet du PAS on a observé en Tunisie certaines évolutions jugées conformes aux résultats attendus par le PAS :
       – Une certaine amélioration des grands équilibres macro économiques telle qu¹elle ressort du recul de l¹inflation,  de la baisse des déficits  budgétaires, de la baisse du taux d¹endettement et du coefficient   du service de la dette  et de la baisse du déficit de la balance des paiements.
       – Une certaine augmentation du degré d¹insertion de l¹économie tunisienne dans l¹économie mondiale, conforme aussi aux objectifs recherchés. C¹est ainsi, qu¹en moyenne la part des exportations  des biens et services dans le PIB est passé de 38!%  au cours de la fin des années 80 à 43% au cours de la fin des années 90 .
       – Une transformation de la structure des exportations marquée par la progression de la part des produits manufacturés et le déclin de celle des produits primaires.

Ces résultats ont été obtenus sur la base de l¹ancien modèle de croissance extensive et à la faveur de la politique de stabilisation et de certaines réformes appliquées dans le cadre du PAS. En effet, la dévaluation du dinar suivie d¹une dépréciation continue sous forme de glissement du taux d¹échange nominal, la réduction de l¹inflation suite à la maîtrise de l¹évolution de la masse monétaire et à la compression des dépenses publiques et la stagnation du salaire réel, conjuguées à une amélioration du taux d¹utilisation des capacités de production installées ont contribué ensemble à accroître l¹offre, améliorer la compétitivité-prix, accroître la part de la Tunisie sur les marchés ext!érieurs et augmenter le taux d¹intégration  mondiale du pays.

Toutefois, depuis environ le milieu des années 90, le modèle de croissance donne des signes multiples et manifestes d¹essoufflement :

– baisse puis stagnation du taux d¹investissement
– régression de la part des investissements manufacturiers et augmentation de la part des investissements dans les services à faible productivité. Cette orientation du capital vers les activités de service s¹explique par la recherche de la rente (tourisme) et/ou des activités rentables à court terme et encore protégées de la concurrence extérieure.
La stagnation du taux d¹investissement et la régression de la part des investissements manufacturiers interviennent au moment même où l¹on assiste à une augmentation du taux de marge dans l¹ensemble du secteur manufacturier. Cette évolution traduisant une aggravation des inégalités dans la répartition des !revenus a entraîné une augmentation de la part des biens de consommation importés. Cette augmentation s¹est réalisée à la faveur d¹une libéralisation du commerce extérieur et grâce à un secteur informel particulièrement actif au cours des années 90.
cette orientation des ressources aux dépens des activités productives et au profit des activités des services est amplifiée par le secteur bancaire. En effet, l¹évolution des crédits bancaires à moyen et long terme laisse apparaître une baisse continue de la part de ces crédits affectés à l¹industrie. cette part est passée de 43% en 1987 à 25,6% en 1997. Parallèlement , la part de ces crédits accordées au secteur des services est passée de 44,5% à 63% au cours de la même période. Cette évolution s¹explique par le comportement d¹un système bancaire qui se contente toujours de jouer le rôle de simple intermédiaire financier et d¹appliquer de plus en plus depuis quelques! années les règles prudentielles dictées par la banque mondiale.

– Les évolutions précédentes du secteur privé et des crédits bancaires montrent une convergence des comportements des acteurs économiques qui sont pour l¹essentiel animés par la recherche de gains garantis et rapides non conformes aux exigence de la croissance et du développement durable. Cette convergence de comportement explique pourquoi la part du secteur privé dans l¹investissement n¹a pu atteindre que 49% alors que l¹objectif affiché par le dernier plan est de 55%.
– Cette dynamique perverse (dans la mesure où elle n¹est pas conforme à l¹objectif du développement durable) au niveau de l¹allocation des ressources à contribuer à la régression du taux moyen de croissance des exportations tunisiennes   au cours de la dernière période comparativement à la première période de la transition. Cette régression traduit les limites de la compétivité-prix qui sont intrinsèques à un modèle de croissan!ce extensive et amplifiées par un parc machine vieilli, des tailles d¹entreprises réduites et des taux d¹encadrement faibles. Cette régression s¹explique aussi par l¹exacerbation de la concurrence sur   la principale destination des exportations tunisiennes qui est le marché Européen. Ce qui s¹est traduit par une réduction des gains de parts de marché à l¹extérieur.
– Parallèlement à la régression du taux de croissance des exportations tunisiennes on assiste au cours des dix dernières années à un rétrécissement du nombre des produits les plus dynamiques et les plus entraînants de la croissance des exportations. Ce nombre est passé de 12 produits entre 1987-1990 à 7 seulement actuellement. Sur ces 7, il y a 4 qui appartiennent au textile-habillement-cuir. Cette évolution signifie une accentuation de la polarisation de la spécialisation de la de la Tunisie autour d¹une seule branche au cours de la dernière période.
Les 2/3 des exportations des biens sont réalisés par les entreprises offshore. Cette part atteint même 90% des exportations hors produits agricoles, phosphate et dérivés et pétrole.
L¹accentuation de la polarisation et de la spécialisation autour d¹une seule branche à faible valeur ajoutée conjuguée à la polarisation géographique (84% des exportations tunisiennes sont destinées à l¹union européenne en 1998) explique la détérioration du déficit commercial  de la Tunisie avec l¹union européenne. Lequel déficit n¹est pas compensé par des investissements directs étrangers (IDE) conformes aux attentes.  La part des IDE dans la formation brute du capital fixe est passée en moyenne de 14,7 au cours de la période 1985-1990 à 8,7% au cours de la période 1991-1996 . En plus l¹essentiel de ces IDE  se réalise dans le secteur pétrolier suivi de tourisme et autres services. Et récemment, les augme!ntations des IDE constatées en Tunisie se sont réalisées pour l¹essentiel dans le cadre de la privatisation en particulier celle qui a concerné les cimenteries .
– Enfin, il faut souligner que dans le contexte actuel de la transition, les activités jusqu¹ici motrices de la croissance, tendent d¹une part, à se réduire et d¹autre part à connaître pour certaines (agriculture et pêche) une réduction de leur poids relatif dans la dynamique de la croissance . Les autres activités motrices connaissent de leur côté, soit des limites intrinsèques à leur type de croissance (pléthore de services divers et faiblesse de leur productivité), soit une saturation de la demande (le cas des branches bâtiments et travaux publics,   et les matériaux de construction, céramiques et verres), soit enfin de nouvelles contraintes  propres à la période de transition (le cas de l¹administration soumise à la logique du désengagement de l¹Etat).
Le profil du modèle de croissance,  !la fragilité structurelle du système productif et l¹évolution de ces multiples indicateurs prouvent que le modèle de croissance actuel s¹essouffle et devient de plus en plus incapable   de tirer la croissance et de favoriser une insertion mondiale dynamique de la Tunisie. Le passage à un modèle de croissance intensive et plus diversifiée requiert plus que jamais une autre configuration de l¹économie tunisienne au niveau structurel, institutionnel et comportemental.

B- Le décalage entre l¹économique et le politique et la nécessité de réformer l¹Etat

La plupart des études qui ont été menées sur la dynamique de transition vers une économie de marché dans les pays qui étaient auparavant régulés d¹une façon fortement administrée montrent des évolutions fâcheuses qui entravent lourdement la dynamique économique. En particulier, ces études ont relevé les tendances fâcheuses suivantes :

– Parall!èlement au désengagement de l¹Etat, inscrit dans la logique même de la transition vers une économie de marché on a assisté dans de nombreux pays à une privatisation de l¹Etat par des clans et des lobbies qui ont fini par détourner le patrimoine et les ressources à leurs profits personnels et par introduire de nouveaux dysfonctionnements sur les  différents marchés ayant débouché sur des régressions économiques et sociales d¹une ampleur différenciée selon les pays.
– La libéralisation et la déréglementation se sont traduites dans la majorité des cas par le développement des activités informelles, la fuite des capitaux et la généralisation de la corruption
–  A leur tour, les évolutions précédentes  ont amplifié la résistance des nouveaux groupes qui se sont accaparés de l¹Etat dans la mesure où ils n¹hésitent pas à recourir à la violence pour empêcher toute réforme de l¹Etat et ce en poussant , en particulier, dans le sens de l¹affirmation du pouvoir coerci!tif et répressif de l¹Etat.

L¹ensemble de ces évolutions fâcheuses a non seulement entamé la légitimité de l¹Etat, mais aussi jeté le discrédit sur les réformes libérales engagées et sur les institutions internationales qui sont derrière ces réformes : FMI, BIRD, OMC.
Ceci a amené ces institutions à s¹activer pour sauver l¹idéologie libérale en proposant des réformes visant à réunir les conditions d¹une bonne gouvernance  . Cette notion, vague et flexible, vise en dernière instance à réunir les conditions jugées nécessaires pour un bon fonctionnement du marché : décentralisation administrative, participation, circulation de l¹information, transparence dans la gestion des deniers publics, lutte contre la corruption, respect des libertés, indépendance de la justice , démocratisationŠ
En Tunisie, la dynamique de transition n¹a pas échappé à la dérive de l¹incohérence. En effet, malgré la libéralisation, la déréglementation et la privatisation on assiste à la rep!roduction du même type de rapport entre l¹Etat et la société civile.
Dans une économie administrée, la domination de la société civile par un Etat omniprésent et envahissant pouvait relever d¹une certaine cohérence dans la mesure où :
la centralisation du pouvoir politique par l¹Etat s¹accompagnait d¹une centralisation du pouvoir économique par ce même Etat.
le rôle redistributif de l¹Etat procurait à ce dernier une certaine légitimité politique qui fonde l¹exercice  de son pouvoir coercitif.
il existait un projet de développement qui, implicitement, véhiculait une hiérarchie entre l¹économique et le politique et pouvait exprimer  un compromis tacite renvoyant les libertés et la démocratisation de la société à une étape ultérieure, c¹est-à-dire lorsque le  « citoyen » a!urait été relativement affranchi de ses contraintes matérielles en termes de satisfaction de ses  besoins essentiels grâce au développement économique.
Ce raisonnement cohérent (mais pas forcément approprié et juste) avait bénéficié d¹un certain consensus et s¹est traduit dans la pratique par le fait que le « citoyen  » s¹est déchargé de toute responsabilité en remettant son destin à un Etat qui devait éduquer, former, employer, redistribuer, planifier, produire, régulerŠ
Par contre, dans une dynamique de transition vers une économie de marché, et dans le contexte actuel de la mondialisation, la reproduction du rapport de domination de la société civile par l¹Etat devient anachronique, relevant de l¹incohérence et hautement préjudiciable pour la dynamique économique et ce pour différentes raisons :

– Actuellement, les évolutions divergentes entre l¹économique et le politique ne peuvent relever que de! l¹incohérence dans la mesure où la dynamique de la marchandisation de la vie économique à la faveur du désengagement de l¹Etat ne peut en aucun cas s¹accommoder d¹un recul des libertés et d¹un reflux du processus de démocratisation de la vie politique. Car, par principe, l¹Etat en se désengageant, il se décharge, au moins partiellement, de certaines de ses attributions qu¹il a jusqu¹ici assumées (la production, la commercialisation..) au profit des citoyens, c¹est-à-dire  des acteurs économiques. Dés lors, ces derniers se voient attribuer de nouvelles obligations qui nécessitent pour être assumées de nouveaux droits. En  effet, ces acteurs sont appelés dorénavant à faire preuve de plus d¹esprit d¹initiative, d¹innovation, d¹agressivité  économique tout en assumant tous les risques. Dans cette tache, les acteurs économiques et sociaux  sont appelés à conclure des contrats , à passer des accords d¹entente et de partenariat et à élaborer des compromis stables! pour la poursuite de leur activité etcŠ toutes ces nouvelles obligations nécessitent des institutions et des organisations représentatives et crédibles, une liberté d¹action, des règles stables, le respect de la loi, la libre circulation de l¹information, la possibilité de recours à des contre pouvoirs en cas d¹abus et de litiges etcŠ Concrètement, tout cela exige l¹élargissement des espaces de libertés de toutes sortes, la construction d¹un Etat de droit et la démocratisation de la vie politique.
Le décalage entre la dynamique économique et la dynamique politique devient aussi anachronique et relevant de l¹incohérence dans la mesure où l¹on assiste parallèlement à la décentralisation des décisions économiques (du fait de la libéralisation, de la privatisation et de la déréglementation) à un accroissement de la centralisation, voire même de la concentration du pouvoir politique, aggravé au surplus d¹une marginal!isation des institutions de l¹Etat et des organisations professionnelles. Ces tendances anachroniques ne peuvent que jeter le discrédit sur la fiabilité des réformes engagées et ne peuvent que paralyser les acteurs économiques et entraîner les institutions et les organisations dans une logique de privatisation (moyennant allégeance politique) et de captation de rente à travers les pratiques de détournement, de rackette et de corruption.
– En outre, le décalage entre l¹économique et le politique vide le principe de la neutralité  de l¹Etat de tout son sens. Car ce principe qui signifie que la politique économique de l¹Etat doit  être neutre dans le sens de ne pas peser sur les mécanismes marchands d¹allocation des ressources, se heurte dans la pratique et dans le contexte du décalage souligné à une utilisation informelle et privée des différentes institutions de l¹Etat débouchant sur un fonctionnement pervers  des marchés au profit de ceux   qui sont! en mesure de manipuler ces institutions en toute impunité.
– Enfin, le décalage entre l¹économique et le politique devient anachronique dans la mesure où il intervient au moment même où les moyens de l¹Etat se rétrécissent. Ceci, non seulement sape la base matérielle de la légitimité de l¹Etat, mais en plus la persistance du décalage , se traduisant par l¹affirmation de la fonction coercitive   et répressive de celui-ci entraîne une dynamique d¹allocation perverse des ressources publiques de l¹Etat toujours au détriment de la fonction redistributive. Cette dynamique peut être à l¹origine    d¹un cercle vicieux débouchant sur l¹aggravation de l¹érosion de la légitimité de l¹Etat, mettant de la sorte en péril la stabilité économique et sociale.
En outre et au delà du rétrécissement des moyens, les PAS, loin d¹être politiquement neutres  et de jouer un rôle d¹efficacité technique c!omme on le suggère, ils véhiculent une logique de remise en cause des politiques redistributives à travers l¹ajustement et la désétatisation comme ils contribuent à l¹abandon de toute stratégie de développement économique nationale .

C¹est pour toutes ces raisons fondamentales que nous considérons que l¹élargissement des espaces de liberté, la construction d¹un Etat de droit et la démocratisation de la vie politique ne relèvent plus d¹un luxe que l¹on peut reporter à plus tard mais devient un préalable à toute transition vers une économie du marché contrairement à la logique d¹une économie administrée où ces questions pouvaient être renvoyées à une étape ultérieure d¹un développement orchestré quasi exclusivement par l¹Etat.
Ceci appelle une réforme radicale de l¹Etat et de ses institutions dans le sens d¹une refonte  démocratique de son rapport avec la société civile .
Mais cette refonte doit s¹accompagner d¹une redéfinition du rôle de l¹Etat conformément a!ux exigences de la transition d¹un modèle de croissance extensive à un modèle de croissance plus intensive et diversifiée.
Cette redéfinition est nécessaire dans la mesure où l¹ancien modèle s¹essouffle et dans la mesure où le contexte de la mondialisation a créé jusqu¹ici chez les différents acteurs privés un effet de désarroi  plutôt qu¹un effet d¹annonce.
L¹effet de désarroi est devenu prononcé avec l¹adhésion de la Tunisie au GATT et particulièrement avec la signature en 1995 de l¹accord de création d¹une zone de libre échange entre la Tunisie et l¹Union européenne (UE). L¹adhésion de la Tunisie au GATT traduit un engagement d¹acceptation de la liberté des échanges et de l¹élimination graduelle de toutes les barrières tarifaires. Dès lors l¹ancien accord de 1976 qui régissait les rapports entre la Tunisie et l¹union européenne et qui accordait un traitement préférentiel à la Tunisie sur le plan commercial à l¹origine de la dynamique des exportations tunisiennes !est devenu   en contradiction avec le principe de  la réciprocité qui caractérise le nouveau système commercial international que l¹OMC est chargé de faire respecter par les pays signataires de l¹accord de Marrakech. C¹est ce principe  de réciprocité dans le traitement qui va être consacré par l¹accord de partenariat signé en 1995 avec l¹UE et qui accorde aux produits industriels en provenance de l¹UE le même traitement et implique la suppression par la Tunisie des droits de douane et taxes d¹effet équivalents selon un calendrier prévu par l¹accord.
Les effets négatifs attendus de cet accord de 1995 qui programme un démantèlement  tarifaire sur 12 ans sont nombreux:
– accroissement des importations et une plus grande concurrence sur le marché intérieur. Cet effet est déjà enregistré en Tunisie comme l¹indique l¹accroissement des importations en provenance de l¹UE   et une plus grande polarisation des exportations tunisiennes sur l¹UE av!ec une détérioration  du déficit extérieur.
– une perte des recettes fiscales provenant des taxes sur les importations. Cette perte a été estimée en valeur cumulée à 4 milliards de dinars au terme de 12 ans d¹application de l¹accord. Déjà la part des taxes à l¹importation dans le total des recettes fiscales est passée de 22,8% en 1995 à 15,6% en 1998. Cette perte fiscale a été compensée par une augmentation de la TVA, dont la part dans les recettes fiscales est passée de 26,5% en 1995 à 31,6% en 1998.
 – on considère que près de 58% du PIB est exposé au choc du démantèlement tarifaire et au risque de disparition d¹environ 1/3 des entreprises  et de 200 000 emplois .
Néanmoins, on a estimé que ces effets négatifs seront largement compensés par un « effet  d¹annonce  » qui contribuerait à relancer les investissements directs étrangers (IDE) sous forme de délocalisation dans le but de bénéficier des avantages de la zone de libre échange.
Pour le mome!nt, ce qui est constaté, c¹est plutôt  un  » effet de désarroi  » qui caractérise les investisseurs locaux d¹une part  et la faiblesse des IDE traduisant une faible  attractivité  de la Tunisie d¹autre part.
Cette évolution, fait que, malgré l¹amélioration des équilibres macroéconomiques, la Tunisie n¹arrive pas à se hisser à un niveau supérieur de croissance ferme et durable. En plus, le taux de croissance est resté toujours  fluctuant et soumis aux aléas exogènes. Dans ce contexte, l¹essoufflement du modèle de croissance signalé plus haut conjugué à l¹inertie qui caractérise la structuration de la société et le comportement des acteurs ne peuvent que peser lourdement sur l¹avenir de la croissance économique de la Tunisie.
La dynamique de transition en cours actuellement en Tunisie nécessite des mesures énergiques dans les directions principales et prioritaires  suivantes :
la d!éfinition d¹une stratégie de développement organisant le passage d¹un modèle de croissance extensive à une croissance intensive et diversifiée conforme aux mutations internationales en cours. Ce passage ne peut en aucun cas se réaliser par les simples mécanismes du marché et dans le contexte actuel d¹inertie sur le plan structurel, institutionnel et comportemental.
pour organiser ce passage il faut repenser le rapport entre l¹Etat et la société civile dans le sens d¹une démocratisation réelle de la société et d¹une réhabilitation des institutions et des organisations en mesure de créer les conditions permettant les débats  féconds et l¹élaboration des compromis stables et dynamiques entre les différents acteurs.
–         ce qui procède doit se traduire par une redéfinition du rôle de l¹Etat dans le sens de l¹abandon  du principe de neutralité qui régit actuell!ement sa conduite économique. L¹abandon de ce principe doit se traduire en priorité par la définition d¹une politique industrielle en accord avec les acteurs économiques et en mesure de rendre l¹avenir visible pour ces derniers.
–       le financement de cette stratégie de développement nécessite en premier une redéfinition du rôle du capital bancaire et de son articulation avec le capital industriel dans le sens d¹une plus grande implication de ce capital bancaire dans la restructuration de l¹appareil productif
enfin, il y a lieu de signaler la nécessité d¹une rénovation urgente des relations sociales entre travailleurs et employeurs qui devrait déboucher sur un compromis salariale en mesure d¹impliquer et de responsabiliser tous les acteurs, de stimuler l¹innovation, d¹accroître la création d¹une richesse plus compétitive et de permettre un partage plus équitable des fruits d¹!une croissance durable.

Tels sont les défis majeurs que la Tunisie devrait sans tarder chercher à relever au début de ce 21ème siècle.

Tunis le, 13 Avril 2000
*****************************

Campaign for Human Rights in Tunisia

In this Newsletter:*Ex- political prisoner puts his children up for sale by auction atweekly market!*Two prisoners of conscience released following active support movementinside and outside Tunisia:-Communique of several organisation in Paris: ACAT, AmnestyInternational, FIDH, ...: Two prisoners of conscience released-Communique of Hourriyya/Liberte: Release of Abdelmoumen Belanes andFahem Boukaddous-Communique of the Centre for Information and Documentation on Torture:Beginning of détente or usual dividing manoeuvre...-Communique of an-Nahdha Movement: We celebrate the release of MrBelanes and Mr Boukaddous, and call all Tunisian national forces tounite efforts for a general amnesty*Dr Marzouki recovers his passport, while Mrs Bensedrine denies news ofbeing granted a passport:-Open letter to the Tunisian President by the Euro-Mediterranean HumanRights Network-AFP: Activist Benserine belies news of having received her passport--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Communiqué***************************************************************************Ex-political prisoner presents his children for sale at Douz WeeklyMarket***************************************************************************Desperate and banned from any profitable activity, Mr. Ali Ben Salem BENMOHAMED, known as Ali S'GAÏER, teacher and ex-political prisoner hasjust put up for sale by auction his two youngest daughter and son:Manara (7 years) and Hassane (one and a half years) at the weekly marketof the town of Douz in Kebili in Southern Tunisia. Mr. BEN MOHAMED wasquickly taken with his children to the police station where he wasquestioned by policemen and the delegate for the Douz area. Mr Ali andhis children were later released.Mr. Ali Ben Salem BEN MOHAMED, born in 1955, married to Mrs. MabroukaBEN ALI, father of Majdeddine (21), Saber (19), Amel (17), Sabra (15),Mohamed (14), Salem (10), Manara (07) and Hassane (18 months) wasarrested and imprisoned in 1994 to serve a 2 years and 11 monthssentence for belonging to an unauthorised organisation.Released in June 1997, Mr. Ali BEN MOHAMED could not move three fingersof his left hand following the torture sessions of which he was victimduring the period of his detention. Mr. BEN MOHAMED is still forbiddenfrom regaining his job as a teacher which he had been for 19 years ofhis professional life. His latest memories of teaching were in the "18Janvier" school in Douz.No one escapes the rule, nor does Mr. Ali BEN MOHAMED: He is required tosign his presence, every day, at the police station- since his release.The family is deprived of any medical assistance. His eldest son, Mr.Majdeddine, second year computing student at Sfax university does notbenefit from any social grants. The despondent father has been deprivedof everything and followed everywhere. It has been impossible for him todo anything to provide for his five other children at school. TheTunisian authorities forbid him any kind of employment. Mr. Ali BENMOHAMED has tried to work as a trader, a builder or a worker inagriculture. However, he was not able to obtain any job.A crazy idea! But perfectly justifiable to highlight the extent ofterror and suffering endured by political opponents and their familiesin their own country and among their own citizens.Vérité-Action stresses that the Tunisian authorities tramples on all thefundamental human rights and the right to existence itself. How couldone prevent a woman or a child from being examined by a doctor? Or howcould one deprive someone of the right to work or to travel?Vérité-Action expresses its solidarity with Mr. Ali BEN MOHAMED andsimilar cases, and urgently appeals to all NGO's, figures and politicalinstitutions all over the world to intervene in order to put an end tothe numerous grave and systematic violations of human life, and callsthe Tunisian government to a social and political reconciliation inorder to ensure a better future in this Mediterranean country.Fribourg, 8 June 2000El Afif GHANMI, PresidentVA Case postale 938 CH - 1701 Fribourg Tel: ++41 79 247 23 61 Fax: ++4121 922 80 27 CCP: 17-554253-0Email: verite_action@hotmail.com-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Communiqué***************************************************Tunisia : Two prisoners of conscience are released***************************************************During a press conference that took place at the headquarters of theACAT (Christian Action for the Abolition of Torture) on 7 June 2000, theundersigned organisations tried to alert public opinion concerning thesituation of many prisoners on hunger strike. On the same day, a largemovement of solidarity among Tunisian human rights defenders took placein Tunisia and in Paris. During this press conference, NoureddineAouididi, Tunisian journalist in London on hunger strike since 3 May2000, participated with a message about the repression to which all hisfamily members are subjected.We have been informed that two prisoners of conscience, AbdelmoumenBelanès, on hunger strike since 8 May and Fahem Boukaddous (both accusedof having links with the Tunisian Workers Communist Party (PCOT),unauthorised party whose leader, Hamma Hammami, sentenced to 9 years'imprisonment is forced to live underground), have been released onSaturday 10 June 2000 around 3 p.m.We celebrate these releases and hope that they will be followed by othermeasures starting from the release of all prisoners of conscience.We are still concerned about the state of health of those on hungerstrike, Sadok Chourou, Samir Dillou, Fathi Karraoud and Abdellatif ElMekki (accused of being members of, or sympathisers with, theorganisation Ennahda, unrecognised), and call the Tunisian authoritiesto ensure that they receive the necessary treatment.We launch an appeal for the improvement of detention conditions inTunisian prisons, the release of all prisoners of conscience and therespect of democratic liberties.Christian Action for the Abolition of Torture (ACAT)Amnesty International French sectionInternational Federation of Human Rights (FIDH)Working Group on Tunisia (GTT)Reporters sans frontières (RSF)Committee for the Respect of Liberties and Human Rights in Tunisia(CRLDHT)Hourrya LibertéCommittee of Support for Civil and Political Struggle in Tunisia(CSLCPT)Paris, 11 June 2000-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Hourriya/ liberté21 ter rue Voltaire 75011 Paris- FranceCommuniqué****************************************************TunisiaRelease of Abdelmoumen Belanes and Fahem Boukaddous****************************************************We learnt today Saturday 10 June about the release of AbdelmoumenBelanes and Fahem Boukaddous. This release took place on the 33rd day ofthe hunger strike observed by Abdelmoumen Belanes at the Prison Civiledu 9 Avril where he was serving a 5 and a half year sentence, andfollowing a vase mobilisation of support for the political prisoners onhunger strike, in various Tunisian cities and abroad.We particularly wish to thank those who responded to the call made byour association to participate in a 24-hour solidarity hunger strike onWednesday 7 June.This release, however, must not let us forget the hundreds of politicalprisoners in Tunisia who have been tortured and issued heavy sentencesfollowing unfair trials for the simple reason that they belonged- orwere presumed to belong- to an unauthorised party- Nahdha. Among themare Taoufik Chaieb and Ahmed Amari, whose health state is particularlyworrying.Neither should it make us forget the case of those who have been forcedto live underground in order to escape torture and heavy prisonsentences, such as Hamma Hammami, sentenced in absentia in August 1999to 9 years and 3 months in prison by the Tunis court of appeal forbelonging to the PCOT (Tunisian Workers' Communist Party).We call you to continue our struggle:*For the improvement of detention conditions in Tunisian prisons.*For an end to torture and the impunity of those who have practiced it.*For the release of all prisoners of conscience.*For the lifting of all sanctions imposed on activists forcedunderground.*For a general amnesty in Tunisia.Paris, 10 June 2000-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------INFORMATION AND DOCUMENTATION ON TORTURECIDT-TUNISIEAssociation of citizens of the world for the right of Tunisians not tobe torturedMember of the OMCT (World Organisations Against Torture) SOS-Torturenetwork- GenevaHonorary committee:M. Jacques FRANÇOISMgr. Jacques GAILLOTDr. Hélène JAFFÉM. Gilles PERRAULTM. François DE VARGASPresident :Jean-Marc MÉTINBesançon, 9 June 2000********************************************************************************Beginning of détente or usual dividing manoeuvre,ABDELMOUMEN BELANES AND FAHEM BOUKADDOUS TO BE RELEASED THIS FRIDAY 9JUNE 2000********************************************************************************A well-informed source at the CNLT (National Council for Liberties inTunisia) has informed us that Fahem Boukaddous and Abdelmoumen Belanes,activists of the PCOT (Tunisian Workers' Communist Party), are to bereleased today 9 June. It was Dali Jazy, General Ben Ali's advisor, whoinformed Me Taoufik Bouderbala, president of the LTDH, of the news.We congratulate the two activists and their families on their relentlessresistance as well as their release that has been won through struggle.At the same time, we have heard a very alarming rumour concerning thecritical state of health of imprisoned journalist Abdallah Zouari,adopted by Raporters Sand Frontieres. We have no further details of thesituation, but we would not forget that in January 1995, anotherjournalist, Sohnoun JOUHRI, died in prison as a result of poorconditions and intended deprivation of medical care. Those twojournalists worked at Al-Fajr newspaper (tolerated till 1991) ofEnnahdha movement (Islamist moderate, unauthorised).These two pieces of news tend to indicate that the government believesto be still able to benefit from the strategy that has succeeded for itfor so long: to loosen the grip on some in order to better isolate theothers.It is time that public opinion- first of all the Tunisia one- letsGeneral Ben Ali's government understand that this tactic will only bringit further protests and condemnation of its treatment of thousands ofprisoners still behind bars.We call all those concerned with the Tunisian situation to persevere sothat all imprisoned Tunisians, some of whom for an entire decade, somein complete isolation, may be released, and that end be put to thehorrifying practices of isolation and intentional deprivation of medicalcare in detention, which are forms of torture endorsed by thegovernment.Khaled BEN M'BAREK, CoordinatorCentre d'information et de documentation sur la Torture (CIDT-TUNISIE).Association Loi 190123, rue Brulard F25000 Besançon. FRANCE. Tél/Fax : (33 3) 81 41 33 22 .E-Mail : cidtunisie@aol.comCCP N° : 6 458 94 X DIJON-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Press Release******************************************************************************We celebrate the release of Mr Belanes and Mr Boukaddous,and call all Tunisian national forces to unite efforts for a generalamnesty******************************************************************************Yesterday, Friday 9 June 2000, the two prisoners Mr Abdelmoumen Belanesand Mr Fahem Boukaddous, members of the PCOT (Tunisian CommunistWorkers' Party) were released. This followed the mobilisation of vastsectors of Tunisian activists and of human rights organisations insideand outside Tunisia, and the pressure they exerted on the Tunisiangovernment, forcing the latter to succumb to these pressures and releasethe two prisoners Belanes and Boukaddous and end all injustice againstthem.An-Nahdha Movement, as it congratulates Mr Belanes and Mr Boukaddous,and all the national political class and human rights organisations ofthese great news and this significant victory over the policy ofsystematic repression, silencing of all voices and punishing allhonourable activists:1. Calls all Tunisian national forces inside Tunisia and abroad to unitetheir ranks and cooperate for a general amnesty, emptying prisons ofpolitical prisoners, liberating political life from all forms ofrepression, compulsion and authoritarianism, in the context of ademocratic national front which gathers all genuine political,intellectual, human rights, and humanitarian bodies, in order to obtainliberties and democracy and denounce all forms of exclusion, hostilityand violation of individual and public liberties.2. Draws Tunisian parties' attention to the fact that the struggle fordemocracy is one and that no democratic life could be maintained withexclusion and turning a blind eye to the injustices inflicted uponIslamists for a decade. Tens of experiences, including that of the earlynineties in Tunisia have taught us that monopolising the struggle forliberties, or wholeheartedly supporting the government in order toeradicate a significant political party, were all wrong practices thathave led our country to the strengthening of repression, dictatorshipand corruption, which necessitates a serious ad urgent revision by all,in order to establish a collective national front that gathers diversenational forces in order to win the battle for democracy and liberatepolitical life from all forms of repression and authoritarianism.3. Calls all human rights organisations, all political and civilmovements in Tunisia, and local and international public opinion toexert pressure on the Tunisian government in order to release over athousand political prisoners belonging to an-Nahdha, hundreds of whomsuffer from dangerous illnesses that threaten their lives. As areminder, all political prisoners had begun a general unlimited hungerstrike in prisons weeks ago, and dangerous consequences are feared toaffect their health conditions.Finally, the Movement renews its congratulations to Mr Belanes and MrBoukaddous and the entire Tunisian political and civil class on thisoccasion, hoping to see all political prisoners and political life inTunisia liberated from the shackles that chain them.London, 10 June 2000An-Nahdha Movement of TunisiaRached Ghannouchi-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------(1.6.00)*******************************************************Open letter to President Ben Ali concerning theTunisian Authorities prohibiting human rights defenderDr. Moncef Marzouki from leaving Tunisia*******************************************************Your Excellency, President Ben AliThe Euro-Mediterranean Human Rights Network (EMHRN) wishes to expressits deep concern about the Tunisian authorities preventing Dr. MoncefMarzouki from leaving Tunisia.According to our information, Dr. Moncef Marzouki, spokes person of theConseil National des Libertés en Tunisie (CNLT) and member of theEuro-Mediterranean Human Rights Network was not permitted to leavetunisian territory on 25 May 2000 because of "pending legal procedures"against him and his activities with an "illegal organisation"(CNLT).Dr. Marzouki has only recently recovered his passport after four yearsof being unable to travel outside Tunisia. While the EMHRN welcomes thereturn of Dr. Marzouki's passport, we regretably notice that he is stillprevented from exercising his right of leaving Tunisia.The EMHRN regards the situation with utmost concern since it constitutesa violation of the right of freedom of movement which runs counter toTunisia's commitments both in regard to international human rightsstandards as well as to the Barcelona Declaration and the associationagreement between Tunisia and the EU.On this background, we urge you, Mr President, to take the necessarysteps to enable Mr. Marzouki to recover all his rights.On behalf of the EMHRNAbdelaziz BennaniPresidentMarc Schade-PoulsenExecutive Director-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------****************************************************AFP: BenSedrine denies having received her passport****************************************************6 June 2000Tunisian human rights activist Bensedine denied that the Tunisianauthorities restored her passport two days ago. "It is completely false,and I categorically belie it. It is a revolting lie", she told AFP byphone from Tunis.Mrs Bensedrine had gone on hunger strike in March after having exhaustedall admistrative and legal routes to obtain her passport of which shehas been deprived since September 1995.Active human rights defender, co-founder of publishing house aloes, theliterary director of which Jean-François Poirier was ordered out ofTunisia on 13 February, Mrs Bensedrine is member of the independent ATFD(Tunisian Association of Democratic Women) which recently condemned theconfiscation, non-renewal or non-issuing of passports", a practiceconsidered discriminatory and affecting human rights defenders inparticular.------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Campaign for Human Rights in TunisiaFor more information, please contact:mail@chrtunisia.orgPlease visit our website at:http://www.chrtunisia.org

 


Get Your Private, Free E-mail from MSN Hotmail athttp://www.hotmail.com

Accueil

Lire aussi ces articles

6 octobre 2008

Home – Accueil TUNISNEWS 8 ème année, N° 3058 du 06.10.2008  archives : www.tunisnews.net     ALTT: Soutenons le correspondant de

En savoir plus +

Langue / لغة

Sélectionnez la langue dans laquelle vous souhaitez lire les articles du site.

حدد اللغة التي تريد قراءة المنشورات بها على موقع الويب.