27 janvier 2009

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TUNISNEWS

8 ème année, N° 3171 du 27.01.2009

 archives : www.tunisnews.net  

OLPEC : Disparition d’un journaliste et encerclement policier de Radio Kalima Liberté et Equité: Nouvelles des libertés en Tunisie AISPP: La Sûreté syrienne relâche un étudiant tunisien au terme d’une détention de quatre mois AISPP: Procès du 24 janvier Maître Houcine BARDI: Procès du 11 décembre 2008 devant le tribunal pénal de Gafsa – Rapport d’observations  judiciaires Tunisia Watch: Tunisie : Refoulement d’un dirigeant de l’association marocaine des droits de l’homme Tunisia Watch: Les immigrés clandestins manifestent « Liberté aidez-nous » à Lampedusa Slim Bagga : Le vrai rapport de mission des barbouzes de Zinochet Mohamed Ettaieb: Michel Boujenah, victime collatérale des frappes israéliennes Sami Ben Abdallah: Avec Gilbert Naccache à Paris. Rencontre avec la génération de l’indépendance AFP: Deux sénateurs français ont rencontré à Damas des responsables du Hamas


 

Liste actualisée des signataires de l’initiative du Droit de Retour : http://www.manfiyoun.net/fr/listfr.html Celles et Ceux qui veulent signer cet appel sont invités à envoyer leur: Nom, Pays de résidence et Année de sortie de la Tunisie sur le mél de l’initiative : manfiyoun@gmail.com

 

 
L’Observatoire pour la Liberté de la Presse de l’Edition et de la Création

Disparition d’un journaliste et encerclement policier de Radio Kalima

 
mardi 27 janvier 2009 L’Observatoire (pour la Liberté de la Presse de l’Edition et de la Création OLPEC) est très préoccupé par la disparition de Dhafer Otay, journaliste à Radio kalima. En effet aujourd’hui 27 janvier 2009 vers 14h, Dhafer Otay, le coordinateur de Radio Kalima a disparu devant le local de la radio alors qu’il était entouré de nombreux policiers en civil. Après avoir participé à la réunion de la rédaction quotidienne, il était sorti avec sa collègue Marwa Rekik pour une pause. A son retour, plusieurs policiers lui ont barré la route et l’ont empêché de regagner le studio, Marwa a elle aussi été empêchée d’entrer au local et elle a vu les policiers en civil entrainer Dhafer avec eux. Depuis, l’équipe de Kalima n’a plus eu aucune nouvelle de lui ; les invités d’une émission qu’il devait enregistrer dans l’après midi ont à leur tour été empêchés de pénétrer au local et n’avaient pas non plus de ses nouvelles alors qu’ils avaient avec lui un RV ferme. Le quartier où se trouve le siège de Kalima a été depuis encerclé par des dizaines de policiers en civil qui empêchent toute personne d’y accéder. Ainsi maître Mohamed Abbou et le journaliste Slim Boukhdhir, venus exprimer leur solidarité avec l’équipe de Kalima ont été à leur tour refoulés par la police qui ne les a pas laissés approcher de l’immeuble. Le reste de l’équipe est resté enfermé à l’intérieur, de crainte de ne pouvoir revenir pour terminer leurs émissions, les policiers ont clairement menacé de ne plus laisser aucun journaliste entrer au local. Cette disparition du journaliste intervient dans un contexte de pressions et de harcèlements qui se sont accélérés ces derniers temps. Depuis plusieurs jours les journalistes de Kalima et notamment Dhafer Otay reçoivent fréquemment des menaces de la police lorsqu’ils effectuent des couvertures médiatiques et la connexion Internet de Kalima est suspendue un jour sur deux. Rappelons que depuis le lundi 27 janvier, la radio qui émettait sur Internet a commencé à diffuser ses programmes sur satellite, les responsables de Kalima pensent que le kidnapping de Dhafer Otay serait lié à cette diffusion. L’OLPEC – Considère les autorités policières comme responsables de tout ce qui pourrait arriver à Dhafer Otay touchant sa sécurité ou son intégrité physique. – Exige que la lumière soit faite sur sa disparition et qu’il retrouve immédiatement sa liberté. – Exige que le blocus du local de Kalima soit levé et que cessent les harcèlements contre les journalistes qui y travaillent. Pour l’Observatoire La vice Présidente Naziha Rjiba
 
(Source: Le blog du journaliste Zied El Heni le 27 janvier 2009)


Liberté pour tous les prisonniers politiques Liberté et Equité Organisation de droits de l’homme indépendante 33 rue Mokhtar Atya, 1001, Tunis, Tel/fax : 71340 860 Liberte.equite@gmail.com Tunis, le 26 janvier 2009

Nouvelles des libertés en Tunisie

 
1) Les détenus de la région de Sidi Houssine Sijoumi ont été présentés au juge d’instruction Au terme de 13 jours de détention à l’administration de la Sûreté de l’Etat au ministère de l’Intérieur, les six jeunes arrêtés dans la région de Sidi Houssine Sijoumi le 13 janvier 2009 ont été présentés au sixième juge d’instruction du Tribunal de première instance de Tunis qui a émis à leur encontre un mandat de dépôt à la prison de Mornaguia pour des accusations en relation avec la loi inconstitutionnelle du 10/12/2003. Il s’agit de Makram Ben Salah Jmou’i, Mouazz Ben Ali Hajji, Abdelkader Mouldi Bader, Saber Mohammed Sassi, Hamdi Foughari et Saïd Rabah Khelfaoui. […] Pour le bureau exécutif de l’Organisation Le Président Maître Mohammed Nouri (Traduction d’extraits ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)


 

Liberté pour le docteur Sadok Chourou Liberté pour tous les prisonniers politiques Association Internationale de soutien aux Prisonniers Politiques 43 rue Eldjazira, Tunis Aispptunisie@yahoo.fr Tunis, le 26 janvier 2009  

La Sûreté syrienne relâche un étudiant tunisien au terme d’une détention de quatre mois

 

Les services de sécurité syriens ont renvoyé en Tunisie et depuis l’aéroport international de Damas dans la nuit du samedi 24 janvier 2009 l’étudiant Othman Ben Béchir Boughanmi, et ce, au terme d’une détention arbitraire de quatre mois dans des conditions pénibles. Il a été soumis à la torture, les yeux bandés, pendant toutes les phases de l’instruction et a été humilié dans le but de lui extorquer des aveux établissant ses rapports avec la résistance irakienne. D’après les sources de l’AISPP, les services de sécurité syriens qui ont mené l’instruction pendant toute la durée de la détention de l’étudiant Othman Boughanmi, étaient convaincus dès le début de son innocence mais ils ont prolongé sa détention arbitrairement, l’ont torturé et l’ont emprisonné dans des conditions lamentables, ne répondant pas aux conditions minima d’incarcération. D’après les sources de l’AISPP, cela a entraîné une dépression nerveuse chez lui et des troubles psychiques qui ont poussé sa famille à lui faire consulter un médecin spécialisé. […] Pour l’Association Le comité directeur (traduction d’extraits, ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)

Liberté pour tous les prisonniers politiques Association Internationale de soutien aux Prisonniers Politiques 43 rue Eldjazira, Tunis Aispptunisie@yahoo.fr Tunis, le 26 janvier 2009
 
Avant-hier, samedi 24 janvier 2009, un groupe de jeunes gens ont été présentés devant la quatrième chambre criminelle du Tribunal de Première Instance de Tunis, présidée par le juge Mehrez Hammami dans l’affaire n°16866. Ils étaient accusés d’avoir constitué une cellule relevant du groupe de Slimane, dans le Sud tunisien. Il s’agit de Belgacem Ben Ali Ben Salah Chenina (né le 22 décembre 1984), Salah Ben Ali Ben Salah Chenina (né 3 avril 1986), Khaled Ben Ali Ben Salah Chenina (né le 25 décembre 1978), Fares Ben Ayadi Ben M’barek Dakhlaoui (né le 4 février 1988), Foued Ben Ahmed Ben Abdallah Jebir (né le 30 mars 1985), Lotfi Ben Elouni Ben Mohammed Rguig (né le 24 janvier 1983), Abdelhamid Ben Mohammed Ben Mohammed Belhajj Ferjani (né le 16 janvier 1987), Dhiaeddine Ben Ali Ben Amor Ferjani (né le 1er février 1988), Abdelhamid Ben Abdelkader Ben Lakdhar Soui’i (né le 9 juillet 1986), Oussama Ben Chtioui Ben Abdallah Abdessamad (né le 28 août 1977), Adel ben Meftah Ben Ali Mdinini ( né le 14 juin 1985), Mohammed Ben Kilani ben Mohammed Bedoui (né le 8 décembre 1979), Kaïs Ben Ali Ben Mohammed Dadi (né le 26 novembre 1980), Salah ben Ali Sghaïer Ben Labidi Dhibi (né le 31 avril 1974), Nader Ben Fethi Ben Ali Ben Salem ( né le 1er août 1981), Hichem Ben Brick Ben Meftah Brick (né le 13 janvier 1986), Hafedh Ben Salah Ben Ali Smida (né le 22 février 1977), Mohammed Ben Ali Ben Mohammed Laïb (né le 21 mai 1984), Nasr Ben Mohammed Ben Nasr Farah (né le 10 avril 1976),-en état d’arrestation,- ainsi que Hassen Ben Mehdi Ben Mohammed Ben Jema’a (né le 1er mars 1986), Ismaïl Ben Ali Ben Mohammed Genfid (né le 20 mars 1984) et Naji Ben Mohammed Ben Salem Maktouf (né le 16 janvier 1985), en fuite, déférés pour adhésion à une entente ayant fait du terrorisme un moyen de réaliser ses objectifs, d’incitation à la commission d’infractions terroristes sur le territoire de la République, de cotisations destinées à financer des personnes en rapport avec les infractions terroristes, de fourniture d’armes, d’explosifs, de munitions et autres produits et équipements à une organisation terroriste, ainsi que de communication d’informations à une organisation terroriste. Le procès a eu lieu dans une ambiance lourde due au fait que le président de la chambre n’avait pas permis aux accusés de s’asseoir en dépit de l’intervention de la commission de la défense qui avait rappelé qu’une des conditions d’un procès équitable voulait que les accusés soient déférés devant le tribunal dans des conditions acceptables et que le tribunal se devait de respecter leur dignité et leur humanité. Pourtant le tribunal, en violation des traditions en vigueur dans les grands procès, les a maintenus debout pendant de longues heures. Après l’appel de l’affaire, le tribunal a procédé à l’interrogatoire des accusés qui ont nié les accusations qui leur étaient imputées et ont affirmé que les déclarations en leur nom consignées par l’enquêteur préliminaire leur avaient été arrachées sous la torture. Puis la parole a été donnée à la défense composée de Maîtres Abdelfattah Mourou, Ridha Lahjouri, Abderraouf Ayadi, Raoudha Cherif, Ouidad Bedoui, Boubaker Ben Ali, Boubaker Betthabet, Fethi Trifi, Samir Ben Amor, Samir Dilou, Radhia Nasraoui et Choukri Belaïd. Au début des plaidoiries le président de la chambre, dès que Maître Samir Ben Amor a eu la parole pour plaider, s’est ingénié à l’interrompre à chaque fois, pour finalement lui couper la parole définitivement alors qu’il n’avait pas conclu sa plaidoirie, entraînant les protestations de la défense et du représentant des avocats de Tunis. La séance s’est poursuivie dans une ambiance chargée. La parole a été donnée à Maître Abderraouf Ayadi, qui a commencé à plaider mais le président l’a interrompu simplement parce qu’il avait remis en cause le travail du juge d’instruction. Lorsque Maître Ayadi a voulu reprendre sa plaidoirie, le juge Mehrez Hammami a donné l’ordre aux agents de sécurité de le faire évacuer de la salle, ce qui a entraîné les protestations de la commission de la défense qui a annoncé qu’elle se retirait. A la suite de quoi, le tribunal a déclaré les accusés coupables et a prononcé des peines d’emprisonnement allant de six à quatorze ans. […] Pour l’Association La commission de suivi des procès politiques (traduction d’extraits, ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)


 

PROCÈS DU 11 DÉCEMBRE 2008 DEVANT LE TRIBUNAL PÉNAL DE GAFSA – RAPPORT D’OBSERVATIONS  JUDICIAIRES

 

Maître Houcine BARDI

Docteur en Droit / Avocat au Barreau de Paris

 1)     MANDAT

Mandaté par le Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT), et la Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des Deux Rives (FTCR), deux associations de droit français, j’ai pu assister, en qualité d’observateur judiciaire, au procès des « 38 » accusés dans la principale[1] affaire judiciaire du bassin minier de Gafsa.

2)     LE CONTEXTE

Suite à l’annonce des résultats du concours de recrutement de la Compagnie des Phosphates de Gafsa, dans le Sud-ouest tunisien, les habitants du bassin minier (Redayef, Metlaoui, Oumlarès, M’dhilla…) se sont révoltés, le 5 janvier 2008, contre ce qu’ils ont pu considérer comme une fraude, un manque de transparence et un favoritisme (au profit des nantis), tant les résultats dudit concours étaient négatifs et décevants pour la plupart des familles pauvres de la région.

La CPG (société publique appartenant à l’État tunisien) est, en effet, le principal employeur de la ville de Gafsa. Les postes d’emploi y sont attribués selon des quotas, dont certains revenaient aux familles des victimes de l’extraction minière, d’autres au syndicat des mineurs, etc.

Des grèves de la faim, des sit-in, des marches et des manifestations pacifiques ont été organisées par les habitants de Gafsa durant plusieurs mois pour exiger, des autorités, des postes d’emploi, notamment pour les plus démunis.

Face à cette montée du mouvement de protestation sociale dans la région, les autorités ont dépêché un nombre considérable des forces de l’ordre, qui ont été rapidement renforcés par une présence massive de l’armée. Les habitants du Bassin minier parleront d’un « état de siège » …

L’installation dans la durée du Mouvement de protestation a donné naissance à une coordination locale, supervisée essentiellement par des syndicalistes de la ville de Redayef, dénommée « Mouvement de protestation sociale de Redayef ».

UneDélégation chargée de négocier avec les autorités locales en a été issue. Elle était composée de  MM. Adnane HAJI (délégué syndical), Béchir ABIDI (délégué syndical), Ali R’HILI (Secrétaire Général de l’Union syndicale locale), Mohamed KHLAYFI (Ancien député et délégué syndical), et M. Ali BOUIHI.

Cette délégation a participé à au moins trois réunions officielles avec les autorités locales : le 02/05/08 (à la Mairie de Redeyef), le 20/05/08 (au siège de l’inspection du travail de Redeyef) et le 26/05/08. Ont pris part à ces réunions, outre les représentants de la commission de négociation, le Gouverneur de la ville de Redeyef, le Maire de ladite ville, des dirigeants de la Compagnie des Phosphates de Gafsa, et des inspecteurs du travail.

Avec l’extension du mouvement de protestation à l’ensemble de la région du bassin minier de Gafsa, une coordination nationale dénommée « Comité national de soutien aux habitants du bassin minier », a également vu le jour. De même qu’un « Comité de soutien aux habitants du Bassin minier de Gafsa » a été créé à Paris, et un mouvement de solidarité similaire a vu le jour à Nantes où réside un nombre relativement important de tunisiens originaires de la Ville de Gafsa.

Les associations civiles tunisiennes, telles que la Ligue Tunisienne de Défense des Droits de l’Homme (LTDH), le Conseil National pour les Libertés en Tunisie (CNLT), le Comité pour les Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT) ainsi que pratiquement toutes les sections locales et régionales (concernées) de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), tout autant que les partis d’opposition tels que le Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés (FDTL), le Parti Démocratique Progressiste (PDP) et le Parti ATTAJDID (pour ne citer que les partis légaux), ont clairement exprimé leur soutien à ce mouvement pacifique de protestation sociale…

Les négociations engagées tant avec les autorités locales qu’avec les ministres envoyés sur place par le Gouvernement ont toutes échoué. Il semblerait, en effet, que les propositions d’embauche faites par les autorités, étaient très en deçà des aspirations de la population. Il convient de rappeler à ce sujet que le taux de chômage dans la région de Gafsa dépasse le double de la moyenne nationale (estimée à plus de 14%)

Le mouvement de protestation s’est donc poursuivi, entrainant dans son sillage un grand nombre d’arrestations (notamment parmi les leaders) et de condamnations (judiciaires).

Le procès organisé le 11/12/08, devant le tribunal pénal de Gafsa (siégeant en matière de crimes) intervient suite à plusieurs autres procès ayant abouti à la condamnation (à de plus ou moins lourdes peines) de la plupart des accusés (les cas de relaxe ont été rares…)

L’importance du présent procès découle à la fois du grand nombre d’accusés : 38, dont 2 considérés « en état de fuite »[2], et de la qualité de ceux qui en font l’objet : « chefs d’une entente (criminelle) », selon l’accusation ; « leaders du mouvement de protestation pacifique de Gafsa » dûment mandatés par les habitants dans le cadre des négociations avec les autorités locales, selon la défense…

3)     QUELQUES OBSERVATIONS PRELIMINAIRES EN MARGE DU PROCÈS

Je voudrais tout d’abord relater quelques faits qu’il m’a été donné de constater en dehors du palais de justice de Gafsa, et qui, tout en étant mineurs, ne sont nullement anodins.

Sur la route qui nous conduisait vers Gafsa, nous avons été (trois jeunes avocats du Barreau de Tunis, et moi-même) contrôlés à trois reprises. A chaque fois il s’agissait de « barrages sélectifs » de la gendarmerie appuyée par des policiers en civil, qui semblaient bien connaître mes compagnons, puisqu’ils les appelaient de leurs noms… et s’enquerraient (surtout) de la présence, dans la voiture, de « l’incognito » que j’étais !

Le premier contrôle s’est déroulé de manière presque « cordiale », avec un air plutôt amusé de la part de mes compagnons, qui ont adressé quelques blagues cyniques à l’endroit des agents…

Les deux suivants ont failli dégénérer, puisque les « contrôleurs » voulaient carrément immobiliser le véhicule… ce qui a obligé mes co-voituriers à dénoncer (par téléphone) auprès de M. le Bâtonnier ESSID, cette « atteinte caractérisée au droit à la liberté de circulation »…

C’est lors d’un contrôle similaire, en date du 04/12/08, que la délégation de l’Association Tunisienne des Femmes Démocrates a été  « refoulée ».

Au bout de 10 à 15 minutes d’attente, « l’ordre » a été donné pour nous laisser repartir.

Arrivés à proximité du Palais de Justice de Gafsa, vers 08H30 du matin, j’ai été impressionné par la présence, le moins que l’on puisse dire, massive des policiers (toutes brigades confondues…).

Un barrage a été dressé à l’entrée du parking du Palais. Des policiers nous en ont interdit l’accès. C’était sans compter avec l’obstination de mes compagnons : « C’est le parking réservé aux auxiliaires de justice, dont nous faisons partie, et vous n’avez nullement le droit de nous en interdire l’accès » ont rétorqué à l’unisson mes trois confrères.

Quelques minutes de « négociation » avec, entre autres, des policiers en civils, ont été « nécessaires » pour lever le barrage, et nous permettre « exceptionnellement » de stationner le véhicule dans l’emplacement qui lui était destiné…

Avant d’atteindre la porte du Palais, une femme (la quarantaine, face blême…) s’est précipitée vers nous (j’ai compris par la suite qu’il s’agissait de l’épouse de M. Fahem BOUKADDOUS, le journaliste de « Al Hiwar Attounsi », accusé en état de fuite, parmi « les 38 ») et a prié mes accompagnateurs de la faire rentrer avec eux au Palais… car l’accès lui a été refusé, par les très nombreux policiers qui gardaient l’entrée du Tribunal.

Nouvelle « palabre » —quelque peu virulente en raison des propos véhéments tenus par un policier en civil répondant au nom de YOUSSEF— entre le petit groupe d’avocats (qui a improvisé un « cordon » afin de protéger la malheureuse… qui s’était, semble-t-il, fait agresser lors de l’audience du 04/12/08 devant la même juridiction) et non moins d’une dizaine de policiers en civils et en tenues. Un appel téléphonique —de l’un d’entre eux— à un « haut responsable » a eu pour résultat d’autoriser la concernée à entrer au Palais…

 

4)    LE PROCES

 

A)    La liste des accusés

Sur les soixante personnes (tous des hommes[3] du gouvernorat de Redeyef) poursuivies initialement par le ministère public, une vingtaine ont pu bénéficier d’un non-lieu, au cours de leur audition par le juge d’instruction…
 

 

NOM ET PRENOM

DATE DE NAISSANCE ET PROFESSION

 

1) Adnane HAJI

25/10/1958 / Instituteur

 

2) Adel JAYAR

22/01/1969 / Professeur de l’enseignement secondaire

 

3) Bechir ABIDI

21/01/1954 / Instituteur

 

4) Tarak HLAYMI

16/11/1965 /  Instituteur

 

5) Tayeb Ben OTHMANE

06/10/1970 / Instituteur

 

6) Hassane Ben abdallah

10/08/1975 / Travailleur journalier

 

7) Maher Fajraoui

11/08/1976 / Ouvrier-boulanger

 

8) Ali JDIDI

02/11/1972 / Travailleur journalier

 

9) Haroun Hlaymi

06/07/1981 / Etudiant

 

10) Mdhaffar ABIDI

11/05/1985 /  Elève

 

11) Ghanem CHRAYTI

22/04/1983/  Travailleur journalier

 

12) Abid KHLAYFI

02/07/1973 / secrétaire de gestion à l’ISSPT de Gafsa

 

13) Rachid ABDAOUI

 

 

14) Ridha AMAYDI

03/01/1966 / Instituteur

 

15) Abdessalam HELALI

07/01/1960 / Instituteur

 

15) Hafnaoui BEN OTHMANE

06/10/1970 / Instituteur

 

16) Sami AMAYDI

13/11/1978 / Travailleur journalier

 

17) Fayçal BEN AMOR

13/06/1978 / Travailleur journalier

 

18) Ridha AZEDDINI

25/03/1974 Travailleur dans les chantiers de l’environnement

 

19) Mahmoud RADDADI

05/10/1968 / Travailleur journalier

 

20) Boubakar BEN BOUBAKAR

12/09/1972/ Travailleur journalier

 

21) Hafnaoui BEN OTHMANE

29/10/1973 / Travailleur journalier

 

22) Hédi BOUSLAHI

17/07/1973/ Travailleur journalier

 

23) Thameur MAGHZAOUI

20/12/1977/ Travailleur journalier

 

24) Issam FAJRAOUI

27/03/1981/ Travailleur journalier

 

25) Mouadh AHMADI

09/02/1974/ Travailleur journalier

 

26) Abdallah FAJRAOUI

11/12/1978 / Travailleur journalier

 

27) Mohamed BALDI

01/04/1983/  Mécanicien

 

28) Makram MAJDI

20/10/1982/ Travailleur journalier

 

29) Othmane BEN OTHMANE

19/06/1983 / Travailleur journalier

 

30) Mahmoud HLALI

07/01/1960 /  Instituteur

 

31) Mohsen AMAYDI

23/01/1978 /  Etudiant

 

32) Radouane BOUZAYENE

30/04/1974/ Travailleur journalier

 

33) Habib KEDIRI (TABBABI)

11/8/1974 /  Travailleur journalier

 

34) Ismaïl JOUHRI

26/09/1977 / Mécanicien

 

35) Lazhar BEN ABDELMALAK

02/01/1959 / Instituteur

 

36) Boujemaa CHRAYTI

22/04/1983 / Travailleur journalier

 

37) Fahem BOUKADDOUS

09/10/1970 / Journaliste

 

38) Mohieddine CHERBIB

30/08/1952 / Immigré en France

 

 

B)    Les chefs d’accusation

Pour les accusés de (1) à (36), il a été retenu les accusations suivantes :

« Appartenance à une bande ; participation à une entente en vue de préparer et commettre une agression contre les biens et les personnes ; participation à une rébellion provoquée par plus de dix personnes avec usage d’armes et durant laquelle il y a eu agression d’un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions ; entrave à la circulation dans les voies publiques ; participation à une rébellion provoquée par des discours prononcés dans des lieux et réunions publics, par des affiches, des communiqués et imprimés ; dégradation, sciemment, de bien d’autrui ; fabrication et détention d’outils et d’instruments incendiaires sans autorisation ; jets de corps solides contre les biens d’autrui ; provocation de bruit et de tapages dans un lieu public ; distribution, vente et exposition de publications destinées à la diffusion en vue de troubler l’ordre public ; collecte de dons sans autorisation ; mise à disposition de locaux et assistance financière aux membres d’une association de malfaiteurs. Faits réprimés par les articles : 32-131-132-133-119-118-121-121 ter-304-320-316 du Code Pénal et les décrets du 21 décembre 1944, du 18 juin 1894 et celui du 02 avril 1953… »

 

Pour les accusés Fahem BOUKADDOUS (37) et Mohieddine CHERBIB (38) :

« Adhésion à une bande ; participation à une entente visant à préparer et à commettre des agressions contre des personnes et des biens ; distribution, vente, exposition et détention, dans l’intention de les diffuser, de documents susceptibles de troubler l’ordre public dans un but propagandiste »

 

Les avocats de la défense résumeront, communément, toute cette série impressionnante d’accusations sous l’appellation : « AFFAIRE DE L’ENTENTE ».

 

Il s’agit bien évidemment de crimes extrêmement graves faisant encourir à ceux qui en sont accusés jusqu’à 10 ans d’emprisonnement (article 119 du CPT), « sans préjudice des peines édictées (…) contre l’auteur des coups et blessures… ». C’est l’application des peines prévues pour ce dernier délit, qui ajoutera des mois supplémentaires aux années d’emprisonnement prononcées à l’encontre de certains accusés…

 

 

C)    Le déroulement de l’audience

Peu de temps avant l’ouverture de l’audience, M. le Bâtonnier Béchir ESSID a convoqué ses Confrères dans la bibliothèque de l’Ordre des avocats, pour débattre de la stratégie de défense à adopter.

La question à laquelle il fallait répondre pourrait être résumée ainsi : doit-on réitéré les demandes relatives aux exceptions de nullité et aux compléments d’enquête et d’information (lesquelles doivent être, il va sans dire,  soulevées in limine litis, avant tout débat au fond) ; et dans le cas où lesdites exceptions sont écartées (d’une manière ou d’une autre) par le tribunal, qu’est-ce qu’il conviendrait de faire ? Défendre l’affaire au fond, ou se retirer en signe de protestation contre le non-respect des droits de la défense ?

Plusieurs avocats ont pris la parole. Les avis étaient divergents. Il m’a tout de même semblé qu’une majorité relative (parmi les présents) penchait plutôt vers l’engagement de la défense au fond, dans le cas où le tribunal « ignorerait » ce que les avocats tunisiens appellent « les demandes préliminaires ».

Toujours est-il que les avocats n’ont pas eu suffisamment de temps pour arrêter définitivement et formellement leur « stratégie ». Quelqu’un est venu nous annoncer que l’on a fait venir les accusés. L’indécision des avocats de la défense ne sera pas sans conséquences dans le déroulement des débats, notamment avec le Président, tout autant que dans l’issue expéditive du procès…

Le dispositif policier qui était déjà impressionnant (dans l’enceinte même du palais) au début de la réunion des avocats, est devenu (à l’issue de cette même réunion) incommensurable et surdimensionné, notamment dans la salle d’audience (de taille moyenne) occupée, pour moitié au moins, par des policiers qui en uniformes qui en civils…

Les avocats de la défense étaient également très nombreux. Il y avait, outre M. le Bâtonnier ESSID, son prédécesseur le Bâtonnier Abdessattar BEN MOUSSA, Me Ahmed Néjib CHEBBI (Président du PDP, et candidat dissident à l’élection présidentielle de 2009), Me Mokhtar TRIFI (Président de la LTDH), ainsi que son fils le jeune avocat Bassam TRIFI, Me Radhia NASRAOUI (Présidente de l’ALTT), Me Ayachi HAMMAMI, Me Saïda GARRACHE, Me Chokri BELAÏD, Me Abdennaceur LAOUINI, Me Karim…, Me Ali KALTHOUM, Me Zouhayr YAHYAOUI, Me Ridha RADDADI, Me Faouzi BEN M’RAD, Me CHAMAKHI, Me BEN THABET, Me ALIMI, Me HENCHIRI, Me FAJRAOUI, Me EL MEDDEB, Me THLIJANI, Me BEN BOUBAKEUR, Me TEBBASSI, Me Salem S’HIMI, Me SGHAIER, Me MLAOUAH, Me ABIDI, Me TARCHEK, Me BEN HAMMOUDA, Me HAMDI, Me ISSAOUI, Me HAMDI, Me BOUSLAH, Me JARBAOUI, Me AMARA, Me ZAROUANI, Me TROUDI, Me BEN YOUSSEF, Me KEDDIS, Me ZENDAH, Me RABHI, Me MANNAÏ, Me KAROUI, Me S’OUDI, Me KHERAYFI, Me MECHICHI, Me CHARNI, Me KRICHI, Me MOUMNI, Me TOUKABRI, Me BUSLAH…[4] Outre les avocats constitués et qui n’ont pu assister à l’audience du 11/12/08, tels que Me J’MOUR, Me ABBOU, Me KOUSRI, etc. En tout, pas moins de 124 avocats de toute la Tunisie, tous constitués bénévolement pour défendre les 38 accusés.

L’ensemble de la société civile et politique tunisienne (indépendante) était présente : la LTDH, AI-Tunisie, le CNLT, l’ATFD, l’UGTT), sans compter les associations dont les membres ont été « refoulés » telle que « LIBERTÉ ET EQUITÉ » ; les partis politiques (ATTAJDID, PDP, FDTL PCOT, PTPD, PSG)

Parmi les observateurs internationaux j’ai remarqué la présence d’un représentant de la Commission européenne ; un représentant du syndicat FSU (France) ; la chargée des affaires politiques de l’ambassade américaine (Mme Tina D. SAHA), ainsi que mon Confrère Antoine AUSSEDA (mandaté par la FIDH, le REMDH et l’Ordre des Avocats de Paris)

 

Après les formules usuelles d’ouverture d’audience, Le Président GARGOURI (à la tête d’une formation collégiale de cinq juges) a donné la parole aux avocats de la défense.

Cinq avocats se sont succédés à la barre : Le Bâtonnier (en exercice) Me Béchir ESSID, Me Radhia NASRAOUI, Me Chokri BELAÏD, le Bâtonnier Abdessattar BEN MOUSSA et Me Ali KALTHOUM.

Les trois principales plaidoiries (Me BEN MOUSSA, Me KALTHOUM et Me BELAÏD, qui nous ont remis leurs écritures) ont soulevé, in limine litis, les principales irrégularités suivantes :

 

1)     SUR LA NON PRÉSENTATION DES SCELLÉS ET AUTRES PIÈCES À CONVICTION

L’accusation de « constitution d’une entente criminelle » a été fondée sur la saisie d’un certain nombre d’armes (et d’armes par destination), ainsi que des disques compacts, des banderoles (portant les inscriptions suivantes  : « droit au travail pour le fils de l’ouvrier et du déshérité » ; « donnez-nous du travail, sinon ne réprimandez pas les chômeurs s’ils la déclenchent » ; «  du travail non des promesses creuse» ; « pas de dignité sans emploi stable »; « oui pour l’emploi stable qui sauvegarde la dignité, oui pour notre part de la richesse nationale, oui pour les vrais projets de développement dans la région »), un téléphone portable, une caméra, des communiqués et des tracts…

Aucune de ces preuves n’a été présentée à la défense.  Ce qui constitue une atteinte on ne peut plus grave au principe du contradictoire (et à l’égalité des armes), à la publicité des débats, et plus généralement aux droits de la défense.

 2)     SUR L’IMPORTANCE DES PROCÈS-VERBAUX CONSTATANT LES RENCONTRES OFFICIELLES ENTRE LES MEMBRES DE « L’ENTENTE » ET LES AUTORITÉS LOCALES

Plusieurs réunions officielles ont eu lieu entre, d’une part, « le comité de négociations » composée de Messieurs : Adnane HAJI (délégué syndical) ; Béchir ABIDI (délégué syndical) ; Ali R’HILI (Secrétaire Général de l’Union syndicale locale) ; Mohamed KHLAYFI (Ancien député et délégué syndical) ; M. Ali BOUIHI ; et les autorités locales représentées notamment par M. le gouverneur de la ville de Redeyef, le maire, ainsi que cinq dirigeants de la compagnie des phosphates de Gafsa et quatre inspecteurs du travail de la ville de Metlaoui.

La défense accorde une importance capitale à ces procès-verbaux, dans la mesure où ils apportent la preuve de l’inexistence de « l’entente » alléguée par l’accusation.

Dans leurs écritures, les avocats disent avoir remis au tribunal des copies des procès-verbaux dont s’agit.

 

3)     SUR LE DROIT D’ENTENDRE ET D’INTERROGER LES TÉMOINS

Les avocats de la défense soutiennent qu’il ne leur a pas été donné d’interroger les témoins à charge ; qu’il n’a pas été fait droit à leur demande d’entendre les témoins à décharge (le précédent gouverneur de Redeyef, le maire de la ville, les inspecteurs du travail, les dirigeants de la société des phosphates de Gafsa, ainsi qu’un certain Omar TAKROUNI, haut officier dans l’armée nationale, ainsi que le ministre de la santé publique qui a un long entretien avec l’accusé Adnan HAJI) ; qu’en outre aucune confrontation n’a été organisée (comme l’exige l’article 65 du code de procédure pénale) entre leurs clients et les témoins à charge.

 

 4)     SUR LES DEMANDES D’EXPERTISES MÉDICALES

 

Les avocats soutiennent que la plupart de leurs clients ont été victimes de torture et ont subi des traitements inhumains et dégradants tout au long de leur détention et notamment lors de la phase d’enquête ; qu’ils ont systématiquement fait état de cette atteinte gravissime à l’intégrité physique des « accusés » en particulier devant le juge d’instruction qui en a constaté la véracité. Ils présentent un tableau des principaux cas de torture allégués et constatés (dont on a pu vérifier la transcription dans l’ordonnance de clôture de l’instruction)

 

Date du PV

Nom de l’accusé

Type de torture

Emplacement des traces

Observations du juge d’instruction

Requête de la défense

21/06/08

Mouadh Ahmadi

physique

Griffures au dos et sur le côté gauche

A constaté les traces

Demande d’examen médical

21/06/08

Issam FAJRAOUI

physique

Blessures au menton

A constaté les traces

Demande d’examen médical

21/06/08

Adesselem HLALI

physique

Blessures au menton

A constaté les traces

Demande d’examen médical

21/06/08

Ridha AZZEDDINE

physique

Fessier, bras gauche

A constaté les traces

Demande d’examen médical

21/06/08

Ali JDIDI

physique

Les dents, bras gauche

A constaté les traces

Demande d’examen médical

21/06/08

Thameur MAGHZAOUI

physique

pieds

A constaté les traces

Demande d’examen médical

21/06/08

Adnane MAHGZAOUI

Menaces

Torture sexuelle

poignets

A constaté les traces

Demande d’examen médical

23/06/08

Med Ben Salah BEDOUI

physique

 

A constaté les traces

Demande d’examen médical

23/06/08

Adnane HAJI

physique

 

A constaté les traces

Demande d’examen médical

26/06/08

Farid HANDIRI

physique

 

A constaté les traces

Demande d’examen médical

08/07/08

Béchir ABIDI

Menace de sodomie

 

A constaté les traces

Demande d’examen médical

10/07/08

Taïeb BEN OTHMANE

physique

 

A constaté les traces

Demande d’examen médical

21/07/08

Kamel KALBOUSSI

 

Ouverture béante au pied droit, blessures au pied et avant bras gauches, ecchymoses…

A constaté les traces

Demande d’examen médical

 

D’autres griefs ont été soulevés par les avocats de la défense (notamment dans la plaidoirie exhaustive —et non interrompue par le Président— du Bâtonnier BEN MOUSSA) telle que l’incohérence flagrante d’un certain nombre de procès verbaux qui taisent les mentions obligatoires devant y figurer (conformément aux dispositions de l’article 13 bis du CPP tunisien)[5] ; ou la maltraitance et le défaut de soins de M. Béchir ABIDI qui, selon la défense, a perdu plus de 30 kg durant son arrestation et y a contracté une anémie et une bronchite aigüe[6]

 

Malgré la gravité extrême des griefs soulevés par les avocats de la défense, tous militant de manière on ne peut plus évidente en faveur de l’annulation des procédures pour torture, non respect des formalités substantielles, non respect du principe (d’ordre public) du contradictoire, de la publicité des débats (et de l’égalité des armes), tout autant que des droits élémentaires de la défense… le Président GARGOURI a décidé de procéder immédiatement à l’interrogatoire des accusés !

Maître Ali KALTHOUM (du Barreau de Gafsa, et un des principaux avocats de la défense) a engagé un débat pointilleux, avec le président, sur le sens exact des dispositions de l’article 143 du CPP (tunisien) qui, selon lui, n’autorise l’interrogatoire des présumés coupables, qu’après la satisfaction des dispositions (du même article) relatives à la présentation des scellés, de la confrontation, etc.

Prenant acte de l’obstination du Président à vouloir passer directement à l’interrogatoire, arguant de ce que leur audition permettra d’apporter des réponses aux interrogations « légitimes » des avocats, la défense a intimé aux accusés de « refuser de répondre »…

Le Président a alors ordonné à ce qu’il soit consigné dans le procès verbal d’audience le refus des présumés coupables de se prêter à l’interrogatoire du Tribunal, et a suspendu l’audience « pour délibération »

Cette décision subite, qui a pratiquement mis un terme de manière totalement inattendue au procès, a surpris tout le monde. Toute l’assistance est restée figée… jusqu’à ce que les « accusés », se dressant sur leur banc, n’entonnent à l’unisson l’hymne national, vite repris par tous les présents, à l’exception des forces de l’ordre…

On entendait des « youyous » dans les bancs du public, situés derrière celui réservé aux avocats… les accusés ont également eu le temps de scander quelques mots d’ordre propres au Mouvement du Bassin Minier… avant de se faire évacuer manu militari par les forces de l’ordre, sous les sifflets et le hués du public…

 

Il était à peu près 11H30, lorsque le Président avait suspendu l’audience pour « délibérer ». La reprise de l’audience n’a eu lieu que vers 23H00 !

A partir de 22H00 l’on a remarqué un remous chez les policiers. C’était le signal de la reprise imminente de l’audience. Personne n’était encore tout à fait certain que le tribunal (non présent au complet, puisque 2 des 5 juges ne seront pas présents…) allait s’apprêter à prononcer le jugement.

Un dispositif des plus impressionnants s’est petit à petit mis en place dans la salle d’audience. Des va-et-vient, des chuchotements, des appels téléphoniques, des placements, des déplacements… bref une fourmilière d’agents de toutes sortes qui ont pris littéralement possession de tout le palais et notamment de la salle d’audience : un corridor de policiers allant de la porte d’entrée des prévenus, jusqu’au banc des accusés ; derrière lequel une rangée d’au moins une vingtaine de policiers (séparant les avocats de leurs clients) ; derrière les avocats une rangée de policiers en civils séparant les avocats des familles ; tournant le dos au tribunal (face à la salle) une autre rangée de policiers ; un grand nombre de policiers (dont les hauts gradés…) bloquaient la deuxième entrée droite de la salle ; sur l’avant de l’aile gauche de la salle d’audience quelques vingt policiers…

Les avocats étaient abasourdis et indignés (ils m’ont affirmé que même lors du procès du « groupe de Soliman » il n’avait pas vu « cette mascarade qui dit long sur l’état de la justice tunisienne ») ! Les observateurs internationaux étaient choqués ! Les familles apeurées …

Lorsque le Tribunal incomplet (3/5 juges présents, sans compter l’absence du ministère public…) est entré en salle pour annoncer la réouverture de l’audience, un jeune avocat du Barreau de Tunis (AL) qui n’a pu contenir sa colère et son indignation au vu d’un pareil « spectacle affligeant », a crié à vive voix : « C’est cela votre justice ? C’est cela votre procès équitable ? Est-ce ainsi que vous respectez l’Etat de droit et l’indépendance de la justice ? Mais c’est une caserne et non plus un tribunal … vous devez avoir honte… voyez gens de Redeyef la justice qu’on réserve à vos enfants… »

C’était « suffisant » pour que le président GARGOURI lève l’audience. Il n’y a donc pas eu lecture du jugement. Le président de la section de l’ordre des avocats de Gafsa a dû aller en chercher une copie manuscrite auprès du greffe pénal.

Rendez-vous a été donné aux avocats et aux membres des familles, dans la bibliothèque de l’Ordre pour lecture du jugement, dont voici le tableau récapitulatif :

NOM ET PRENOM CONDAMNATION
1) Adnane HAJI  
2) Adel JAYAR  
3) Bechir ABIDI  
4) Tarak HLAYMI 10 ans
5) Tayeb Ben OTHMANE  
6) Hassine Ben abdallah  
7) Maher Fajraoui  
8) Fahem BOUKADDOUS  
9) Haroun Hlaymi  
10) Mdhaffar ABIDI  
11) Ghanem CHRAYTI  
12) Abid KHLAYFI  
13) Rachid ABDAOUI  
14) Ridha AMAYDI 6 ans
15) Abdessalam HELALI  
15) Fayçal DHAOUADI  
16) Sami AMAYDI  
17) Fayçal BEN AMOR  
18) Ridha AZEDDINI  
19) Mahmoud RADDADI  
20) Boubakar BEN BOUBAKAR 4 ans
21) Hafnaoui BEN OTHMANE  
22) Hédi BOUSLAHI 1 an
23) Thamer MAGHZAOUI  
24) Issam FAJRAOUI  
25) Mouadh AHMADI  
26) Abdallah FAJRAOUI  
27) Mohamed BALDI  
28) Makram MAJDI 2 ans avec sursis
29) Othmane BEN OTHMANE  
30) Mahmoud HLALI  
31) Mohsen AMAYDI  
32) Radouane BOUZAYENE  
33) Habib KEDIRI  
34) Ismaïl JOUHRI  
35) Lazhar BEN ABDELMALAK Relaxe
36) Boujemaa CHRAYTI  
37) Ali JDIDI  
38) Mohieddine CHERBIB 2 ans

 

 

CONCLUSIONS FINALES DU RAPPORT

 

Avant de donner la parole au Président de la Section de l’Ordre des avocats de Gafsa pour faire la lecture du jugement, le Bâtonnier de l’Ordre National des Avocats de Tunisie, Me Béchir ESSID, a dit « Ce qui s’est passé aujourd’hui ne mérite même pas le terme procès, tant  les irrégularités et illégalités sont évidentes, et le non respect des droits de la défense est flagrant… »

L’audience du 11/12/08, devant le tribunal pénal de Gafsa (statuant en matière criminelle, puisque l’équivalent de la Cour d’assises n’existe pas dans l’ordre judiciaire tunisien) à laquelle j’ai pu assister, m’a permis de constater :

1)     Le non respect du principe de la présomption d’innocence

2)     Le rejet tacite des nombreuses exceptions de nullité soulevées par la défense avant tout débat au fond

3)     L’absence de la moindre prise en compte, par le tribunal, des allégations on ne peut plus graves de torture (de traitements inhumains et dégradants et de défaut de soins) étayées —pour certains— par les constations du juge d’instruction… et la « fin de non recevoir, implicite » des demandes d’expertises médicales

4)     Le refus de présentation des scellés

5)     Le refus de convoquer les témoins (notamment à décharge)

6)     Le refus d’organiser les confrontations avec les témoins à charge

7)     Le refus de diligenter des enquêtes et informations supplémentaires

Toutes ces observations et constations me conduisent à affirmer que le procès auquel j’ai assisté, le 11/12/08 à Gafsa, est un des procès les plus inéquitables auxquels il m’a été donné d’assister. Le principe du contradictoire a, en effet, été totalement ignoré, l’égalité des armes et la publicité des débats ont été systématiquement bafouées, les droits de la défense (et implicitement ceux des accusés) ont été piétinés, depuis l’enquête préliminaire, jusqu’à l’autorité de jugement, en passant par celle de l’instruction.

S’il est un « procès » qui ne saurait avoir pour « mérite » que celui d’être donné en contre-exemple de ce qu’est un procès équitable, c’est bien le « procès des 38 » qui s’est tenu devant le tribunal pénal de Gafsa le 11/12/08 !
 


[1]  Compte tenu tout d’abord de l’importance du nombre des accusés et de leurs qualités (« chefs d’une entente »)

[2] Le cas de M. Mohieddine CHERBIB (Président de la FTCR) est singulier, dans la mesure où l’intéressé a fait l’objet de « poursuites » alors qu’il réside à des milliers de kilomètres de Gafsa ; il n’a jamais fait l’objet de convocation régulière ni de la part des autorités d’enquête, ne de celles de l’instruction, ni par le Tribunal. Voir à ce propos l’argumentaire juridique détaillé réalisé par le CRLDHT « Observations sur l’Ordonnance de clôture de l’instruction dans l’affaire des 38 de Gafsa : le cas de Mohieddine CHERBIB) »

[3] La seule femme qui a été condamnée (à 4 mois d’emprisonnement) suite aux évènements de Gafsa, est Mme Zakia DHIFAOUI (qui a déclaré avoir été victime de torture et de harcèlement sexuel lors de sa détention), membre du Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés (parti légal, dont le secrétaire général, le Dr Mustapha BEN JAAFAR, s’est récemment déclaré candidat aux prochaines élections présidentielles de 2009)

[4] Cette liste n’est pas exhaustive. Je m’excuse par avance auprès des avocats que je n’ai pas cités.

[5] Cas de l’accusé Mansour SOUILMI, dont il est tout d’abord indiqué (dans le PV consigné dans le dossier) qu’il a été placé en garde à vue le 12 août 2008, alors que dans un autre PV il est signalé comme étant « recherché »… ; de même il n’est pas indiqué dans le PV de placement en garde à vue de M. Abid KHLAYFI (daté du 29/07/08) ni la date ni l’heure de la fin de la GAV…

[6] Nous avons appris ultérieurement que l’état de santé du concerné s’est gravement détérioré après le procès, et qu’il a été transféré au CHU de l’Ariana dans la banlieue de Tunis, où il a été maintenue menotté à son lit d’hôpital…

 

 

 


 

Communiqué de presse du Collectif « Associations en danger »

Paris, le 27 janvier 2008

 
Le collectif « Associations en danger » appelle à manifester le jeudi 29 janvier 2009
 
 Le Collectif « Associations en danger » constitué de plus d’une centaine d’organisations associatives et syndicales réunies le 26 janvier 2009, reste très inquiet quant à la situation de la vie associative en ce début d’année.   Décide : –          de poursuivre les actions de mobilisation auprès des pouvoirs publics, des parlementaires et des élus locaux –          d’appeler les militants et les sympathisants des  associations à participer aux manifestations unitaires organisées dans l’ensemble des grandes villes de notre pays le 29 janvier 2009.   À Paris : Le collectif appelle à manifester le jeudi 29 janvier 2009 à 14h00, angle rue Charlot-Boulevard du Temple, sous la bannière « Associations en danger ».     Contact : Pavlina Novotny – Service communication LDH – 01 56 55 51 08  pavlina.novotny@ldh-france.org  

 


 
 

Tunisie : Refoulement d’un dirigeant de l’association marocaine des droits de l’homme

L’Association Marocaine des Droits de l’Homme (MDH) à Rabat, a annoncé que son vice-président Abdelhamid Amin à été empêché de descendre d’avion et refoulé à son arrivée à Tunis vendredi 23 janvier pour participer à une réunion de la coordination des organisations maghrébines des droits de l’homme et discuter avec les autorités tunisiennes de la situation des droits humains dans le pays et dans le Maghreb.

La Ligue Tunisienne pour la défense des Droits de l’Homme qui a protesté contre cette « procédure arbitraire » avait déclaré dans un communiqué du 22 Janvier que cette visite s’inscrit dans un programme d’action de la coordination des organisations maghrébines des droits de l’homme dont Mr. Abdelhamid Amin occupe la fonction de secrétaire général et qui a commencés par une rencontre avec le premier ministre Marocain et divers responsables politique et de la société civile au Maroc. Ce programme devait se poursuivre par des prises de contact analogue en Tunisie. Mr. Abdelhamid comptait rejoindre Mr Mohamed Amine de la Ligue algérienne des Droits de l’Homme, arrivé jeudi, dans l’espoir de rencontrer le premier ministre Mohammed Ghannouchi à qui une demande d’audience à été soumise au nom de la coordination et restée sans suite jusqu’à présent.

Une réunion qui devait aussi se tenir au siège de l’AFTURD, hier samedi, n’a pu avoir lieu. Les responsables de l’association ont été avertis par une source sécuritaire qu’ils ne sont pas autorisés à abriter une telle réunion. La tentative de tenir cette réunion au siège de la Ligue Tunisienne pour la défense des Droits de l’Homme a été empêché par la polie qui à bloqué tous les accès menant au lieu de la réunion et interdit à ceux qui se sont présenté d’y arriver d’après un communiqué publié hier 24 janvier par la LTDH.

la Coordination Maghrébine des Organisations des Droits Humains (CMODH) a été créée le 30 mars 2006. Elle regroupe 12 associations maghrébines non gouvernementales de défense des droits humains:

L’Association Mauritanienne des Droits de l’homme, la Ligue Mauritanienne des Droits de l’homme, l’Association Marocaine des Droits Humains, l’Organisation Marocaine des Droits Humains, la Ligue Algérienne des Droits de l’Homme, la Ligue Algérienne de Défense des Droits de l’Homme, la Ligue Tunisienne de Défense des Droits de l’Homme, le Conseil National pour les Libertés en Tunisie, la Ligue Libyenne de Défense des Droits de l’Homme, l’Association des Travailleurs Maghrébins en France, l’Association de Défense des Droits de l’Homme au Maroc, le Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie.

(Source : « Tunisia Watch », le blog de Mokhtar Yahyaoui, le 25 janvier 2009)

Lien :http://tunisiawatch.rsfblog.org/


Les immigrés clandestins manifestent « Liberté aidez-nous » à Lampedusa

 
Au cris de « Liberté aidez-nous » Quelque 700 immigrés, selon les estimations du maire Bernardino De Rubeis – 1.300 selon certains médias -, des tunisien pour la majorité, ont manifesté hier à Lampedusa pour protester contre leurs conditions de détention et l’accélération des procédures d’expulsion. Selon la police, les réfugiés ont forcé les portes du camp et se sont rendus paisiblement à pied au centre-ville. Plusieurs centaines d’habitants les ont rejoints pour demander leur transfert dans des camps plus vastes ailleurs en Italie. Vendredi, le Haut Commissariat de l’Onu pour les réfugiés (HCR) a exprimé sa préoccupation au sujet du camp, faisant valoir qu’il n’était censé accueillir que 850 personnes, le centre de Lampedusa abrite actuellement 1.300 migrants. Le rôle du centre de rétention, qui était d’abord un lieu de transit temporaire pour des personnes appelées à gagner d’autres centres italiens, a changé cette année aux termes de nouvelles règles en matière d’immigration. Désormais, tous ceux qui sont secourus restent à Lampedusa jusqu’à ce qu’ils obtiennent l’asile ou soient expulsés. Les manifestants marquaient aussi leurs inquiétudes devant l’accélération des mesures d’expulsion décidées par le gouvernement italien. Ce dernier a créé, depuis vendredi à cet effet, un centre d’identification et d’expulsion (CIE). Le ministre italien de l’Intérieur, Roberto Maroni, devrait signer à Tunis, un accord autorisant l’Italie à réexpédier immédiatement tout clandestin tunisien. Maroni « rencontrera son homologue Tunisien, aujourd’hui 27 janvier 2008, à Tunis pour affirmer la signature d’un accord de reconduction des 1200 Tunisiens présents à Lampedusa, » rapporte aujourd’hui un site tunisien proche du pouvoir qui à écrit que les clandestins tunisiens « ont protesté contre leurs conditions de détention, appelant à accélérer les procédures d’expulsion » pour présenter leur rapatriement forcé comme une réponse à leurs souhaits Selon le HCR, les trois quarts des clandestins arrivés l’an dernier en Italie ont demandé l’asile politique et la moitié d’entre eux environ ont obtenu le statut de réfugié ou une protection octroyée en vertu d’autres motifs humanitaires. En 2008, 31.200 immigrés ont débarqué à Lampedusa en augmentation de 75% par rapport à 2007. (Tunisia Watch – Mardi 27 Janvier 2008)
 
(Source : « Tunisia Watch », le blog de Mokhtar Yahyaoui, le 27 janvier 2009)

 

FLAGRANT DELIT DE FUITE

Le vrai rapport de mission des barbouzes de Zinochet

par Slim Bagga 

Ah, qu’ils sont maudits les flics de Ben Ali! Ah, qu’ils sont cuits les espions de « mon » pays!

Si notre Généralissime-Maréchal des Logis Ben Ali reste conforme et égal à lui-même, il ne tarderait pas à envoyer un de ses coups de pied (chancelant) à Abdessattar Bennour, son directeur de la Sûreté qui, à son tour, adresserait des blâmes aux rigolos qu’il a postés dans le 16ème arrondissement de Paris, avenue Henri Martin, avenue Georges Mandel, rue de la pompe et rue Descamps.

Il était tellement vital à ce régime atteint de voyeurisme -entre autres tares- qu’une escouade de policiers payés par le contribuable soient chargés d’une mission de la plus grande gravité pour la sécurité de l’Etat, consistant à suivre du plus près possible le déroulement d’un mariage et d’une cérémonie privée, ce samedi 24 janvier.

Seulement voilà, nos barbouzes furent surprises de ce nous leur avons préparé. Nous doutant de leur bêtise, elles furent reçues comme il se doit, et prises comme des rats. Ce qui fit que nous les vîmes se sauver comme des malfrats, des voyous à la solde d’un régime ripoux. Il fallait le voir ce petit flic moustachu, à la forme d’une bouteille butagaz courir à grandes enjambées en blasphémant et insultant le responsable qui l’a mandaté pour cette sale mission…

Moralité: Ben Ali et ses Tonton-Macoute, qui ont surtout besoin de parfaire leur formation d’espions, n’ont tiré aucune leçon des bavures déjà dénoncées sur les colonnes de « L’Audace » et sur Tunisnews. Ils s’entêtent à penser qu’ils sont capables de tout, alors qu’ils sont la risée de tous.

Un diplomate français me disait, il y a peu de temps à ce sujet: « Que peut-on faire face à tant d’obstination ridicule? L’attitude de la police tunisienne me rappelle farouchement Audiard qui affirmait que les cons, ça ose tout ».

Une dernière chose: lors de cette cérémonie, il y avait un certain Moez M., mari officiel de Rim J. Pour ceux qui l’ignorent, Rim J. est « la Montespan » attitrée de notre flamboyant Maréchal des Logis. Sa présence a échappé aux flics fuyards mandatés pour que dalle!!!Je ne vous raconte pas: c’était DE-LI-CIEUX!!!


 

 Michel Boujenah, victime collatérale des frappes israéliennes

« Bonne nouvelle : l’humoriste français d’origine tunisienne, Michel Boujenah qui vient d’afficher ses propres couleurs en étant « sioniste et fier de l’être », n’a pas de place dans notre Festival du Rire, qui aura lieu du 24 janvier au 1er février prochain au Théâtre municipal de Tunis ».

C’est en adoptant ce ton triomphaliste que le journal tunisien Le Quotidien a récemment annoncé la non venue de Boujenah en Tunisie. Ce dernier devait présenter ce mardi 27 janvier au soir son spectacle paradoxalement intitulé « Enfin libre ».

Le Quotidien exhume, en les déformant un peu, devieilles déclarations de Boujenah — présentées faussement comme étant récentes — dans lesquelles ce dernier rappelait son attachement à Israël et son sionisme. Pour les besoins de l’argumentation, le journaliste du Quotidien passe sous silence les propos du même Boujenah qui signale, dans l’entrevue en question, son appui à la création d’un État palestinien.

«  Fort sentiment anti-boujnah » en Tunisie

De l’aveu même de deux intellectuels tunisiens, «  un fort sentiment anti-boujnah » a déferlé sur Tunis au cours de ces derniers jours. Extrêmement affectée par les images atroces en provenance de Gaza, une partie de la population tunisienne a ainsi déniché une cible exutoire…

Décidément, les temps changent. L’artiste avait reçu une belle ovation à Tunis, il y a tout juste deux ans, à l’occasion de la première présentation du Festival du Rire. Dans son édition du 15 janvier 2009, le journal indépendant Le Temps annonçait, dithyrambique, la venue de Boujenah, « un des meilleurs humoristes français (qui présentera) un one man show à ne pas rater (et) qui fera certes rire tous ses fans ! »

« Go To Hell Michel Boujenah ! » sévit sur Facebook

Sur le populaire réseau Facebook, un groupe répondant du doux nom de : « Go To Hell Michel Boujenah ! » a même été lancé et étrille méchamment le comédien.

De son côté, le journal Le Quotidien s’est félicité de la déprogrammation du spectacle. « Consolation : Boujenah ne sera pas là ! », écrit un journaliste euphorique qui se désole des prises de position de « ce compatriote qu’on a tant chéri et applaudi ».

Le journal arabophone AlChourouk rapporte, lui, que les organisateurs de l’événement ont nié que Boujenah ait été programmé pour leur événement. « Des sources bien informées nous ont cependant confirmé que le show de Boujenah était bel et bien prévu pour le 27 janvier (…). L’administration du festival a invoqué des problèmes organisationnels pour s’excuser auprès du comédien français de cette annulation », ajouteAlChourouk.

Une explication à faire rire… jaune.

Mohamed Ettaieb

(Source : le blog « CHAKCHOUKA TUNISIENNE, UN BLOG PARFUMÉ AU JASMIN » hébergé par « Bakchich » (Hebdomadaire satirique – France), le 27 janvier 2009)

 
Avec Gilbert Naccache à Paris. Rencontre avec la génération de l’indépendance      Gilbert Naccache par les Editions du CERF: Tunisien, né en 1939, Gilbert Naccache a été l’élève de René Dumont à l’Institut national agronomique de Paris. Il a d’abord travaillé comme ingénieur agronome au ministère tunisien de l’Agriculture, avant que ses activités politiques d’opposant à Bourguiba ne lui valent en 1968 une lourde condamnation : il sera finalement libéré en 1979. Après sa libération, il travaille comme éditeur à Tunis. Il s’est installé en France en 2004. De sa prison, il a sorti un roman qui donnera son premier livre, « Cristal », publié en 1982 à Tunis, et de nombreux autres écrits, sur différents sujets. « Le ciel est par-dessus le toit » en rassemble quelques-uns.    

Le Bloc-Notes de Sami Ben Abdallah : Avec Gilbert Naccache à Paris

 
par Sami Ben Abdallah
J’ai publié de longs extraits du Roman « Cristal » de Gilbert Naccache sur mon Blog. A mes yeux, ce livre qui revient sur les procès politiques sous Habib Bourguiba est un grand enseignement pour les nouvelles générations. C’est une partie occultée de l’Histoire de la Tunisie qui doit être connue. Car dans Cristal, on comprend le fonctionnement des « procès politiques », les conditions de détention dans les prisons tunisiennes et la logique des tortionnaires.   Un sondage que j’ai fait auprès d’une dizaine d’amis âgés entre 25 et 35 ans m’a convaincu de la nécessité de publier Cristal sur mon Blog. A la question :  « Connaissez-vous  Gilbert Naccache ? »  Seul une amie en avait entendu parler.   « Ils » ont alerté Gilbert Naccache de cette publication et ce dernier a insisté pour me voir.  
 
Dans le vif du sujet   J’arrive au café parisien où on s’est donné rendez-vous.  Je reconnais Gilbert Naccache. Avant de partir le voir, plusieurs  amis m’ont parlé de son caractère qu’ils trouvaient « un peu spécial » : « il est colérique et trop sûr de ses points de vues » m’ont-ils averti. En ce qui me concerne, j’ai connu des hommes politiques, des chefs de partis et (sauf quelques uns)  mon Dieu, combien ils sont  « insupportables » sur le plan humain. Ils vous regardent de haut comme s’ils ont inventé l’eau chaude alors que leurs Cvs militants se résument en un seul mot : « la prétention ».   A priori, Gilbert Naccache sourit. La seule fois où je l’ai croisé, c’était avec Lakdhar Ellela (président de l’Association des Tunisiens en France et membre de la Commission politique d’Ettajdid) mais je n’ai pas osé saluer Gilbert Naccache tellement il m’a paru « mystérieux ».
 
 Quelques minutes pour les présentations. Je lui explique mon point de vue : « Je ne savais pas si votre  livre se vendait à Tunis ou pas. Dans le doute, j’ai décidé de le scanner et de le mettre en ligne. Ce n’est pas propre à Cristal et à l’extrême Gauche !j’ai mis aussi en ligne des extraits sur l’assassinat de Salah Ben Youssef, la Lettre ouverte de Mohamed Mzali à Habib Bourguiba, des extraits du syndrome Bourguiba d’Aziz Krichen,…etc.   Aujourd’hui avec le développement des nouvelles technologies, j’estime qu’il vaut  mieux trouver des solutions pour contourner la censure quitte à scanner des livres et les mettre en ligne sur des Blogs et des pages facebook plutôt que de passer sa vie à rédiger des « communiqués pour dénoncer la censure » »    Il me regarde puis un second sourire.   « Monsieur Gilbert j’aime pas le vouvoiement ». Il me demande de le tutoyer.   Impatient  et curieux de découvrir cet homme dont j’ai lu le récit dans son roman « Cristal » dans lequel il revient sur la répression de la gauche sous Bourguiba, les procès politiques entre 1967 et 1980, la torture et les conditions de détention dans les prisons tunisiennes, je multiplie les questions : « pourquoi ta génération a échoué à arracher des concessions politiques au pouvoir de Bourguiba ? Pourquoi continuons-nous à militer pour des droits ridicules 50 ans après l’indépendance (délivrance d’une carte d’identité, passeport, le droit de faire une réunion, de participer à une manifestation…etc). As-tu connu untel ou untelle ? Que penses-tu du combat de  telle personne ? Pourquoi as-tu pris des  distances avec plus d’un parti politique ? »   Pendant plus d’une heure, Gilbert Naccache s’exprime et je fais un effort pour ne pas l’interrompre tellement ce qu’il dit me parait précieux. « Le mal politique de la Tunisie, c’est le parti unique qui compte théoriquement des millions d’adhérents » me dit-il . Et d’ajouter : « Quelques uns de mes camarades ont trahi les idéaux de Perspectives [ le mouvement de gauche en 1967 s’appelait Perspectives] et ont rejoint le gouvernement pour cautionner la répression. Certains d’entre eux ont même nié l’existence de la torture devant des instances internationales…. Tahar Belkhoja [ ancien Ministre de l’intérieur] est passé à Aljazeera pour déclarer qu’il ne savait pas que la torture était pratiquée !  ».   Il me parle du gouvernement provisoire établi en 1978 par  le syndicaliste feu Habib Achour dans lequel figurait Mohamed Charfi (l’ancien ministre de l’éducation), des reproches qu’il fait à Ettajdid ( ancien parti communiste), de la crise financière actuelle, de sa logique politique pour expliquer la situation politique de la Tunisie.    L’histoire réelle d’un tortionnaire tunisien   Il me raconte même l’histoire réelle d’un tortionnaire tunisien. « Il me torturait et un jour, il est parti m’acheter une boisson gazeuse et des cigarettes. Je n’ai rien contre toi -m’a-t-il dit-, mais c’est le « pain » (El Khobza) ». Puis, ajoute Gilbert Naccache, « j’ai appris qu’il est allé un peu loin en torturant un détenu. Il a été condamné à 3 ans de prison qu’il a purgé puis il est mort six mois après sa sortie de prison ».    Ils se sont inventés des CVs    En réponse à une question que je lui ai posée (je lui ai cité  les noms de dix personnes dont certains étaient  au gouvernement ou à l’opposition….), Gilbert Naccache me répond au cas par cas puis ajoute:  : «  Plusieurs de ceux qui prétendent aujourd’hui avoir été des dirigeants de la gauche entre 1967 et 1975 ne l’ont pas été dans les faits…. » Ils se sont inventés des CVs .    Créer une opinion publique   Je n’ai pas vu le temps passer tellement ce que disait cet homme m’a paru intéressant. On est resté peut être 2 heures au café. « ton blog ?  oui je l’ai vu. Certes, il y a un peu de tout, mais il est intéressant ».  Je lui ai un peu parlé de Communication et du paragraphe qui m’a marqué en lisant son ouvrage Cristal. A la page 316, il écrit « plus encore que l’indispensable constitution d’une «opinion publique» que l’on craindrait de bafouer ».    
Oui, c’est exactement ça ce qu’il faut faire : « participer à la création d’une opinion publique », faire de sorte que la politique ne soit plus « élitiste » ou la chose d’une minorité. Ce passage m’a toujours intrigué car côtoyant le microcosme politique tunisien, je suis arrivé à la même conclusion:  toute démarche politique est inefficace si en parallèle, il n’y a pas d’effort pour créer une opinion publique.     La seule chose en laquelle je crois, c’est la nécessité de créer une opinion publique, de communiquer autrement et de tenter d’autres choses. J’ai osé exprimer mon point de vue à Gilbert Naccache : « je connais plusieurs  politiques, et mis à part une minorité, ils sont trop cons ! Ils prétendent vouloir gagner l’opinion publique internationale à leurs causes alors qu’ils rédigent leurs communiqués en arabe. Allez savoir comment  des journalistes étrangers arriveront à lire des communiqués en arabe ! Ils passent leurs vies à dénoncer la censure alors qu’ils peuvent se mettre sur internet et  sur facebook. Ils créent des sites webs et occultent les questions du référencement sur les moteurs de recherche Ils parlent du « peuple »  tout en le méprisant… Il y a beaucoup de choses que nous pouvons changer en Tunisie sans forcément s’enfermer dans ce clivage « pouvoir-opposition ».   Gilbert Naccache m’arrête ! « Je partage entièrement ce point de vue ».Cela m’a surpris encore.   Monsieur ! vous êtes un monument…    Environ  40 sépare ma génération de celle de Gilbert Naccache. Il appartient à cette génération de l’indépendance qui a voulu faire le mai 68 tunisien et qui a été torturée  et  emprisonnée durant plus de 10 ans. Et j’appartiens à la génération internet qui n’a connu de la Tunisie que l’après changement du 7 Novembre 1987 et, pour qui « la question politique » est un luxe devant « la question des libertés ».   Je souhaite que des jeunes de mon âge puissent avoir cette chance   Je raccompagne Gilbert Naccache  jusqu’à sa petite voiture. Il me rappelle qu’il m’autorise à continuer à publier son ouvrage « Cristal », qu’il pourrait même me donner d’autres articles  dont il est l’auteur  afin que je les mette sur mon Blog. Je réfléchis. J’ai une meilleure idée Gilbert Naccache : je t’aiderai  si tu le veux  à lancer un petit site où je mettrai tout en ligne. On pourrait tout mettre aussi sur Facebook. Je ne partage pas forcément ton  discours politique, mais j’ai eu la chance de lire Cristal et de te connaitre. Je souhaite que des jeunes de mon âge puissent avoir cette chance.    
 
« Tu es une partie de l’Histoire de la Tunisie qui doit être connue », c’est la dernière phrase que j’ai prononcée en le quittant après avoir convenu d’un second Rendez-vous.  
 
En repartant chez moi, j’ai appelé des amis au téléphone : « vous savez ? Il était très sympathique avec moi et,  très humble. On a parlé comme si on se connaissait depuis des années. Il m’a autorisé à mettre en ligne son ouvrage Cristal afin que ceux qui ne l’ont pas lu puissent le lire ». Puis en raccrochant, je me suis rappelé que j’étais aux condoléances   d’Ahmed Othmani, une autre grande figure de la gauche tunisienne. Lui aussi a publié un ouvrage « Sortir de la prison » dans lequel il revient sur le parcours politique de la génération de la Gauche. Mais combien de la nouvelle génération connaissent Ahmed Othmani ?   
Et je me suis rappelé  la phrase de feu Noureddine Ben Khedr (ancien dirigeant de la gauche tunisienne, ancien prisonnier d’opinion (1936-2005): « En prison  nous avons découvert la Tunisie moyenâgeuse : les caves, la tonte, les uniformes, les besoins faits à même le sol. Il y avait dans les caves des prisonniers quasiment aveugles qui étaient là depuis la répression du coup d’État de 1962. Nous avons aussi été privés pendant des mois des droits les plus élémentaires comme la visite des parents, la lecture et la correspondance ce qui nous a poussé à faire grève sur grève de la faim afin d’imposer aux geôliers le respect. « Le drame de la répression en Tunisie, c’est que tout le monde devient amnésique. Aujourd’hui, tous disent : « on ne savait pas ! ». C’est le comble du cynisme ! Je suis persuadé que, tôt ou tard, ce dossier s’ouvrira. Ce qu’il révélera sera terrible pour ceux qui croient aujourd’hui avoir échappé à la justice humaine. »  
 
Gilbert Naccache ? Durant cette rencontre, je l’ai trouvé intelligent, humble et sympathique. Je ne sais pas pourquoi j’ai eu une certaine affection pour lui, pour Noureddine Ben Khedr et pour Ahmed Othmani.     Ils font partie de l’Histoire de la Tunisie.Il faut que cette partie de l’Histoire de la Tunisie soit connue car  Gœthe homme d’Etat allemand  avait raison de dire que : «  Ceux qui ne comprennent pas leur passé sont condamnés à le revivre ».
 
Blog de Sami Ben Abdallah,Blogueur de Tunisie
 
 
 

Deux sénateurs français ont rencontré à Damas des responsables du Hamas

AFP, le 27 janvier 2009 à 16h20 eux sénateurs français ont rencontré récemment à Damas « en toute indépendance » des responsables du Hamas, à l’occasion d’une tournée au Proche-Orient, a dit mardi le porte-parole adjoint du ministère des Affaires étrangères, Frédéric Desagneaux. « Il y a une délégation de deux sénateurs français » qui s’est rendue dans la région « ces jours-ci », a déclaré M. Desagneaux en réponse à une question sur une rencontre entre des responsables français et du Hamas. « A Damas, ils ont eu des contacts en toute indépendance. Le Parlement et les membres du Parlement déterminent souverainement leurs rencontres et entretiens », a déclaré le porte-parole. Les deux sénateurs sont Jean François-Poncet (vice-président de la commission des Affaires étrangères) et Monique Cerisier-ben Guiga, a-t-il précisé, sans dire qui étaient les responsables du Hamas rencontrés. Le porte-parole a, par ailleurs, réitéré la position exprimée par la France depuis la guerre à Gaza sur les contacts avec le Hamas. « Nous serons disposés » à parler au Hamas « dès lors qu’il respectera les principes qui guident le processus de paix et au premier chef la renonciation à la violence », a souligné M. Desagneaux. « S’engager sur cette voie est le meilleur moyen de garantir au peuple palestinien un avenir de paix, de stabilité et de sécurité », a-t-il ajouté. Le 20 janvier, le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner avait qualifié le mouvement islamiste d' »interlocuteur » possible dans le conflit israélo-palestinien, notamment si un gouvernement palestinien d’union nationale était créé.  

 

 

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