2 février 2006

Home – Accueil الرئيسية

TUNISNEWS
6 ème année, N° 2082 du 02.02.2006

 archives : www.tunisnews.net


  ACAT-France: Cas de Omar Chlendi – Lettre au ministre de la justice AFP: Caricatures : le président tunisien dénonce les atteintes aux religions Israel News: Roger Bismuth.Sénateur tunisien. Entretien exclusif Webmanagercenter: Le Pick-up Mitsubishi L200 sur orbite Publico: Incarcéré en Tunisie, un lusodescendant est accusé de faire partie d’un groupe terroriste Yahyaoui Mokhtar: Perspectives Pour la Tunisie Balha Boujadi: Le Danemark ou la manipulation islamiste Dr Abbas Aroua: A propos des « Visages de Mahomet » L’héritage pourri de la dictature policièreOmar Mestiri

 
ACAT-France 7 rue Georges Lardennois – 75019 Paris Tel : 01 40 40 42 43 – Fax : 01  40 40 42 44

A Monsieur  Bechir Takkari Ministre de la Justice Ministère de  la Justice

31 Boulevard Bab Benat 1006 Tunis – La Kasbah Tunisie Fax : 00 216 71 568 106             Monsieur le Ministre,   Omar Chlendi a été arrêté par les autorités tunisiennes le 8 février 2003. Détenu arbitrairement et torturé pendant ses interrogatoires, il a été amené à signer des aveux.   Privé de procès équitable, il a été inculpé pour « utilisation d’Internet à des fins d’activités terroristes » et condamné, sans preuve, le 6 juillet 2004, à 13 ans de prison. Incarcéré dans des conditions lamentables, son état de santé ne cesse de se dégrader.Omar Chlendi était en mauvaise condition physique lors de la dernière visite familiale qu’il a reçue. Souffrant d’un genou en raison des tortures dont il a été victime, il éprouve beaucoup de difficultés à se déplacer mais n’a reçu aucun soin.   Nous vous demandons qu’il puisse bénéficier des soins médicaux dont il a besoin, de le faire examiner par un spécialiste et d’accepter une intervention si nécessaire.   Nous vous remercions de nous lire et nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’_expression de notre plus haute considération. Nicole Pignon Péguy Pôle actions CC : Copie à l’ambassade de Tunisie, 25 rue Barbet de Jouy, 75 007 Paris, Fax : 01 45 56 02 64 L’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT) France est affiliée à la Fédération Internationale de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture, ayant statut consultatif auprès des Nations unies et du Conseil de  l’Europe.


Caricatures : le président tunisien dénonce les atteintes aux religions

jeudi 2 février 2006
AFP 02.02.06 | Le président tunisien Zine El Abidine Ben Ali a dénoncé jeudi les « attitudes et formes d’expression qui nuisent aux symboles et sanctuaires religieux », après la publication de caricatures du prophète Mahomet dans des journaux européens. Sans mentionner ces publications, qui ont provoqué une vague de protestations dans le monde arabo-musulman, M. Ben Ali, qui s’adressait aux ambassadeurs en poste à Tunis, a déclaré que « la Tunisie continuera d’apporter son soutien au dialogue des civilisations et des religions dans le sens de la consécration de la sécurité et de la paix internationales ». Dans un discours à l’occasion des voeux de nouvel an du corps diplomatique, il a insisté sur le soutien de son pays, au sein de l’Organisation de la Conférence islamique, pour « la propagation des principes de modération et de juste milieu et (le) bannissement de l’extrémisme et de la violence ainsi que de toutes attitudes et formes d’expression qui nuisent aux symboles et sanctuaires religieux ». La seule réaction officielle en Tunisie à la publication des caricatures de Mahomet a été l’interdition de la diffusion du quotidien parisien France-Soir, qui avait publié mercredi la reproduction des dessins jugés blasphématoires dans le monde musulman.
 

Caricatures de Mahomet: France, Norvège et Danemark menacés

swissinfo   2006 – 10:1    Caricatures de Mahomet: France, Norvège et Danemark menacés GAZA – Deux groupes armés palestiniens ont menacé de « prendre pour cible » tout Français, Danois et Norvégien à Gaza et en Cisjordanie, après la publication dans la presse de ces pays de caricatures du prophète Mahomet. En Tunisie, « France-Soir » a été saisi. Ces caricatures ont été publiées en septembre 2005 par le journal danois Jyllands-Posten, puis reprises par plusieurs quotidien européens. Elles ont provoqué une campagne de protestation dans les pays arabes et musulmans. Les ministres de l’Intérieur de 22 pays arabes ont condamné cette publication et demandé des sanctions. Dans un communiqué, les Comités de la résistance populaire et le « commandement commun » des Brigades des martyrs d’Al-Aqsa affirment que « tout Norvégien, Danois ou Français présents sur notre terre est une cible ». Un porte-parole de ce groupe a confirmé que cette menace devait être prise au sérieux et qu’elle serait élargie à tous les pays dont la presse publierait ces caricatures. Les deux groupes réclament également le boycottage des produits français, danois et norvégiens. Une vingtaine d’hommes armés du Fatah et du Jihad islamique ont par ailleurs pris position autour du siège de l’Union européenne (UE) à Gaza pour exiger sa fermeture, selon des témoins. Ils réclament des excuses dans les 48 heures pour ces caricatures. Les activistes ont tiré en l’air et se sont hissés sur le mur d’enceinte du bâtiment. Ils ont tagué les mots « fermé jusqu’à nouvel ordre » sur la porte d’entrée de l’édifice, qui n’avait pas ouvert jeudi par crainte de violences. Aucun employé de l’UE ne se trouvait à l’intérieur du bâtiment, protégé par une patrouille de la police palestinienne. En Tunisie, l’agence officielle TAP a annoncé que l’édition du quotidien parisien « France-Soir » reproduisant les caricatures qui ont provoqué un tollé dans le monde arabe a été saisie. http://www.swissinfo.org/sar/swissinfo.html?siteSect=105&sid=6433592&cKey=1138876573000

 
 Roger Bismuth.

Sénateur tunisien. Entretien exclusif

A l’occasion de la réunion du Conseil des Parlementaires Juifs qui vient de se tenir a Jérusalem, Guysen a rencontré Roger Bismuth, sénateur, membre de la récente Chambre des Conseillers tunisiens, élue il y a quatre mois. Dans un entretien avec Ugo Rankl, Roger Bismuth donne une image précise de « l’exception tunisienne » dans le monde arabe. Il parle de la personnalité du Président Ben Ali, de l’attentat de Djerba et des moyens utilisés par la Tunisie pour juguler le développement de l’islamisme dans la société tunisienne. Selon Roger Bismuth, la répression policière est moins efficace que le pari sur la modernité technologique et sociale pour réduire à néant l’audience des prêcheurs de haine.
 
Pour voir l´interview cliquer sur ce lien: http://www.guysen.com/videos.php?vid=199  

Le Pick-up Mitsubishi L200 sur orbite

Par Moncef MAHROUG Il aura fallu six mois au concessionnaire d’automobiles Le Moteur et à la S.T.I.A. pour monter les premiers modèles du Pick-up Mitsubishi, leur faire subir tous les tests d’usage par les ingénieurs de la multinationale japonaise et les mettre sur le marché, et après avoir eu l’autorisation officielle de la marque à la calandre de forme triangulaire. Six mois presque jour pour jour après la présentation de son programme de partenariat avec la Société Tunisienne d’Industrie Automobile (S.T.I.A.) en vue du montage du Pick-up L200 de Mitsubishi, Le Moteur a organisé samedi 28 janvier une journée «Portes ouvertes» au Show Room de Mitsubishi, à la zone industrielle de Charguia, pour marquer le démarrage de la commercialisation de ce véhicule utilitaire, monté par la S.T.I.A. en vertu de deux accords de partenariat liant Le Moteur à cette société et à Mitsubishi Motors Corporation. Les prix de ce Pick-up destiné principalement «aux artisans et aux PME», précise M. Abdessatar Ben Mustapha, directeur général-adjoint de la société «Le Moteur», s’insèrent dans une fourchette allant de 20.675 dinars pour le modèle de base «châssis-cabine» à 32.600 dinars pour le 4 X 4 double cabine 2,8. Présent lors du dernier Salon de l’Auto du Kram, le Pick-up L200 a été sacré véhicule utilitaire de l’année 2006 lors du Salon de Paris. Fabriqué en Thaïlande par Mitsubishi Motors (Thaïlande) Co., comme tous les pick-up de 1 t destinés au marché international, le L200 sera assemblé en Tunisie à raison de 120 unités par mois dans un premier temps -un chiffre appelé à grimper rapidement à 200 par mois. Alors que les besoins annuels du marché tunisien –où le pick-up Mitsubishi L200 est concurrencé principalement par Ford et Isuzu- sont estimés à près de 4.000 véhicules -et peuvent évoluer à 5.000 unités au cours des deux prochaines années-, Le Moteur ambitionne, donc, d’écouler 1.200 véhicules en 2006 et près du double l’année suivante. Pour être proche de sa clientèle, la société –qui compte actuellement deux succursales (Tunis et Sfax), 3 agences (Sousse, Sfax et Djerba), 6 ateliers agréés et plus de 40 revendeurs de pièces de rechange- compte étendre rapidement son réseau commercial à d’autres régions du pays. Monté et commercialisé exclusivement -pour l’instant- en Tunisie (et en Afrique du Sud, pour les marchés où l’on roule à gauche), le Pick-up Mitsubishi L200 pourrait à l’avenir être exporté dans d’autres pays de la région. (Source: le site http://www.webmanagercenter.com le 02 fevrier 2006)


 

Incarcéré en Tunisie, un lusodescendant est accusé de faire partie d’un groupe terroriste

 

 
Ana Cristina Pereira   Sa mère, originaire du district de Braga, mène campagne en France « pour que le monde comprenne que ce pays n’applique pas les lois internationales ». Le crime de son fils, dit-elle, est d’avoir surfé sur le net. Térésa Quintas Chopin, originaire du Prado, Vila Verde, a lancé un appel aux artistes portugais. Omar Chlendi, son fils de 23 ans, est l’un des « six internautes de Zarzis », emprisonnés parce qu’ils auraient utilisé Internat à des fins terroristes. Sa mère organise un concert de solidarité à la Bourse du Travail de Saint Denis, en France, en présence de musiciens de différents coins du monde. Il y a trente cinq ans que Térésa a émigré en France. Elle s’est mariée jeune, a eu six enfants et le couple s’est séparé. « les enfants auraient dû avoir les trois nationalités car ils sont nés en France d’une mère portugaise, qui est française aussi », mais le père a refusé. Il voulait qu’ils ne soient que Tunisiens, comme lui. Leur mère a bien tenté de les faire immatriculer au Consulat du Portugal en France. Trop tard. Ses enfants étaient déjà loin. Son ex-mari avait pris la fuite avec eux pour la Tunisie. L’aîné avait alors neuf ans, le plus jeune allait sur ses trois ans. Ils grandissaient à Zarzis, au sud de la Tunisie. Térésa a passé dix huit années, suspendue, claquemurée dans sa peine, à tenter de les récupérer. L’un après l’autre, une fois finies leurs études, ils ont affronté leur père et sont revenus en France. Ils voulaient « sortir du pays et ne plus y remettre les pieds, car c’est un régime totalitaire ». En 2003, un accident a fauché l’une des filles. L’autre fille n’en a pas supporté davantage. « Elle a dérobé son passeport à son père », « elle est arrivée sans valise ni vêtements, sans rien, elle est allée directement de la fac à l’aéroport ». Seul est resté le plus jeune, Omar Chlendi. Dans l’abîme. Arrêtés en février 2003, les « Internautes de Zarzis » ont été condamnés en avril 2004 pour avoir constitué une « bande de malfaiteurs » dans l’objectif de « préparer des attentats », pour « vol et détention de produits explosifs ». En appel, leur peine a été réduite, et confirmée en cassation. Omar, condamné en vertu de la loi anti terroriste, effectue une peine de treize ans.   Usage de Publinet Térésa consacre sa vie à son fils emprisonné. Elle a touché des représentants d’Amnesty International, d’Avocats Sans Frontières, de la FIDH. Le groupe sur la Détention Arbitraire des Nations Unies étudie le cas. « En Tunisie, il y a un problème avec Internet, ils ont servi d’exemple », soutient-elle. Les jeunes ont eu l’audace d’utiliser les services d’un publinet (cybercafé tunisien) et de proférer des critiques politiques. Omar était alors en première année à l’université. « Quand les jeunes ont vingt ans, ils disent du mal du gouvernement ». La police les a emmenés. Pendant dix-huit jours, « personne n’a eu de leurs nouvelles ». Ils ont affirmé avoir été « pendus, battus, torturés, tout ». L’un d’eux a dit avoir été abusé sexuellement et on l’a menacé d’assister au viol de sa mère et de sa sœur. Pendant le procès, les accusés ont nié toutes les accusations à leur encontre. Tous (sauf l’enseignant impliqué par deux étudiants lors des interrogatoires) ont évoqué des aveux arrachés sous la torture. Le juge a qualifié les tortures d’ »imaginaires ». Quant aux preuves présentées au tribunal, : sorties papier d’internet, dont nul ne peut savoir la provenance, car elles n’ont pas de références, ni de date, ni de nom, une carte de téléphone mobile, et un tube de colle d’écolier, témoigne la mère, « rien d’autre, rien ». Et « entre février et juin 2003, les avocats de la défense ignoraient tout de ce qu’ils allaient représenter »   Réunir quelques fonds Après avoir épuisé toutes les instances judiciaires, Térésa concentre tous ses espoirs sur un jour : celui qui verra la libération de son fils. « ma tâche, maintenant, c’est de faire en sorte que le monde comprenne que ce pays n’applique pas les lois internationales, qu’il ne respecte pas les droits humains ». Elle pense que « si les Européens réalisaient ce qui s’y passe, il n’y aurait pas autant de tourisme en Tunisie ». « On cache tout, on laisse voir ce qu’on veut et cette mésaventure d’Internet pourrait bien arriver à tout un chacun ». Le concert du 17 février devrait médiatiser l’affaire. Térésa souhaiterait qu’un « chanteur portugais s’intéresse à cette initiative ». Elle « organise tout-il y aura de la musique venue de plusieurs coins du monde » « Je dois aussi trouver un peu d’argent, car je dois me déplacer souvent et je n’ai que les revenus de mon travail », rappelle-t-elle. Elle a 46 ans et travaille « dans une maison de retraire ». Pour que cette mère puisse rendre visite à son fils à la prison de Borj El Amri, il faut toucher la diplomatie française. « je n’ai pas le droit, car je suis étrangère, le consulat de France en Tunisie doit demander une autorisation à la direction des services pénitentiaires ». Et le temps, sculpteur impitoyable, joue la montre contre ce fils, qui pour elle est toujours un enfant. Les genoux du jeune Omar « sont très infectés ». « Pour tenir debout, il doit s’appuyer sur un gardien ». Un jour viendra où il n’y aura plus de larmes, seulement des souvenirs. Le silence de son cri, c’est déjà trop. Térésa s’est remariée, mais elle a dû « se séparer, car cette histoire a envahi toute sa vie. Son mari ne pouvait plus supporter son obsession maternelle ». Elle a eu un autre enfant avec son second mari de nationalité française. « La première chose que j’ai faite, cette fois-ci, ce fut de lui donner la nationalité portugaise ».  «Je ne veux pas revivre le même problème » dit-elle. Elle ne veut pas le voir disparaître, comme les autres. Cette erreur continue de lui ronger l’existence et celle des siens : le plus jeune vit dans « cet enfer » et la jeune fille fugitive s’est déjà présentée au Consulat du Portugal, mais pour lui donner sa nationalité, les services consulaires « exigent un document que son père refuse : un acte de naissance du père »   Le procès   Les anomalies relevées par les avocats et les observateurs internationaux sont énumérées sur le site du comité de soutien, géré par Térésa Quintas Chopin (http ;//www.zarzis.org). Pas d’expertises médicales, ni d’investigations sur la torture, en dépit des plaintes. On a dit que les jeunes avaient tiré des documents d’internet pour apprendre le maniement des armes, où sont ces armes ? Et « où sont les éléments constitutifs du vol ? » En ce qui concerne les explosifs, « la formule citée ne peut avoir servi à les fabriquer ». Et quand bien même il y aurait eu vol, seuls deux jeunes sont impliqués, pourquoi les autres ont-ils été condamnés à ce motif ? L’accusation de réunion interdite « n’a pas de justification, il n’y a pas eu de violation de la loi, ils étaient dans un lieu public ». Conclusion ?? Les conditions d’un procès équitable n’ont pas été réunies. Lors de ce procès, on n’a pas entendu la défense, les droits des accusés ont été ignorés. Ce procès est un « disfonctionnement de la justice et a été monté pour des raisons politiques ». A. C. P.   (Source : Publico du 30/1/06) (traduction ni revue ni corrigée par l’auteure de la version en portugais, LT)

 


Perspectives Pour la Tunisie

Il y avait un temps ou les changements profitent aux extrêmes de droite comme de gauche ou à des juntes militaires comme cela a prévalu partout dans le monde, et pendant les dernières décennies, au tiers monde et en particulier dans le monde arabe. Toute homme politique censé ne peut aujourd’hui que reconnaître la fin du temps des insurrections, des coups d’état et des révolutions. Dans le monde aujourd’hui, l’histoire nous apprend que tout changement s’effectue dans l’évolution et dans la continuité comme le résultat d’un processus qui a fini d’accumuler tous les ingrédients nécessaires à la nouvelle situation. C’est pourquoi je pense qu’un discours politique ne doit plus tendre à viser un renversement brusque et brutal d’une situation. Il doit plutôt agir sur les mentalités, la spoliation et la tutelle dont ils font l’objet, pour leur permettre de pouvoir percevoir la réalité et les amener à la contester non seulement par mécontentement mais surtout par conviction car tout homme pourvu d’un minimum de bon sens saura que ça ne peut plus durer. Qu’on est dans une situation qui handicapait les potentialités de notre pays et que le pouvoir tel qu’il est exercé constitue une entrave à son développement et à son progrès. Les sociétés contemporaines sont impliquées et intégrées dans une situation complexe qui conditionne et façonne leur vie. Ils dépendent dans leurs besoins les plus élémentaires d’un mode de vie dont aucun pays ne détient à lui seul les commandes qui le régissent. Ce n’est plus un renversement de conditions entre deux pôles complètement opposés par lequel on cherche à évoluer mais simplement un réajustement de situations et l’ouverture de nouveaux horizons capables d’amener de nouvelles générations à s’intégrer dans de nouveaux projets et d’ajuster avec plus d’équité la façon par laquelle la cité est gérée, au profit de la majorité. Penser la politique autrement me parait prendre des risques sur lesquels peu de gens sont prêts à parier et tenir des promesses qui ne peuvent tôt ou tard que nuire à la crédibilité si ce n’est des illusions de démagogie à chauffer les foules avant de les laisser a leur triste réalité. Il parait même de plus en plus vain de faire appel à une notion de sacrifice et de patriotisme pour cultiver les passions alors qu’il ne s’agit que de trouver la solution adéquate aux problèmes du pouvoir et de gouvernement, chose qui a plus besoin de maturité et de réflexion. C’est vers une nouvelle perception de la citoyenneté qu’on doit se diriger, une conception dynamique du rôle de l’individu dans la société qui le libère des peurs et des appréhensions et qui lui ouvre bien les yeux et le met directement en face de ses responsabilités. S’il y a une véritable révolution dans le changement dont notre pays a besoin c’est dans la façon de l’aborder. Le changement est devenu un devoir national qui implique chaque citoyen. L’individu aujourd’hui est confronté a un double défi : La fin de l’Etat provoyeur, l’Etat assistant dont on se met à la charge et qu’on ne pense qu’à en profiter. L’individu est devenu l’élément moteur de génie et de création. L’Etat maintenant fait peur et doit être contrôlé et ses pouvoirs strictement délimités pour assurer l’épanouissement des libertés d’entreprise et des idées. Pour en arriver là on doit parvenir à amener notre société à refuser l’arbitraire et les atteintes à sa dignité et à ses intérêts privés. Cela ne peut être achevé que lorsque n’importe qu’elle injustice qui touche n’importe quel individu devient comme une atteinte qui interpelle chaque citoyen dans sa propre individualité et qu’il sent de son devoir de la dénoncer si non d’arrêter ses effets. La légitimité du pouvoir n’est plus un vain mot. Elle devient dans ces conditions plus importante que l’institution. C’est dans cette perspective que j’ai voulu sensibiliser tous nos citoyens et les amener a sentir le martyr de nos prisonniers d’opinions et l’infamie dans laquelle sont détenus tous nos prisonniers sans ménager ni pouvoir ni opposition dans ma contestation car c’est ça la preuve de notre sous développement et s’il persiste de tels situations avec cette cruauté c’est qu’on n’a pas tous fait le nécessaire pour le dépasser. Je crois que maintenant le plus déterminant dans tout engagement politique n’est plus le don de soi le sacrifice et le martyr pour son pays et tous ces manifestation de maladie d’ego a cause de ses propres frustrations. Ce stade là on l’a dépassé et on ne doit pas trouver aucune contradiction dans sa subsistance dans d’autres situations – Palestine, Tchétchénie- Le plus déterminant maintenant est le surplus, l’apport nouveau et l’amélioration de sa propre situation que doit trouver tout nouveau adhérant au projet de changement. Nous n’avons plus besoin de militant dégoûtés qui n’ont plus rien a perdre à s’engager dans la contestation qui n’attendent que le moment de la pagaille pour s’acharner dans la destruction car ils finirons par êtres matés et encore davantage humiliés. Ces situations de profonde oppression doivent être bannies à jamais. Tout engagement doit procéder d’une conviction que le changement va apporter des moyens pour améliorer toutes les conditions en plus de la dignité et des libertés retrouvés et ce n’est pas par un comportement d’opportunisme et d’hypocrisie que tout cela va se réaliser si tout citoyen ne se sent pas concerné comme un devoir d’apporter sa propre contribution pour le réalisé. C’est pourquoi je crois que nous devons tempérer nos ardeurs de révoltés et ramener nos ambitions au seuil de la réalité sans que mes propos ne soient compris comme un appel à la démobilisation c’est plutôt le contraire que je prêchais. Seulement je veux qu’on soit définitivement débarrassée de cette illusion de chef ou de guide qui va tout réaliser. Ces gouvernants de harkis et ces opposants de fellagh doivent être dépassés car ils ne représentent en tout et pour tout que la preuve d’un système basé sur l’exclusion qui réduit les citoyens dans ce débat au second plan. Sans un engagement conscient et massif de toute les forces vives de la nation nous ne pourrant pas dépasser cette situation d’un pays arriéré d’un tiers-monde en convulsion. Le problème pour certains pays en phase de transition. – dont la Tunisie – Qui vivent cette singulière contradiction entre une respectable condition de vie générale et un manque effarant de liberté et de respect du droit dans la gestion du pays. Ce qui donne l’impression d’un peuple soumis qui doit lutter pour conquérir sa liberté est très difficile à cerner. On est dans une société partagée entre deux temps : Vivant a la liesse et avec engouement la modernité dans tous les manifestations de la vie ordinaire de son quotidien, alors qu’elle est au moyen age de la politique (Tunisie), de la religion (Algérie), de la culture et même des valeurs de comportement (Maroc). Seule la dictature et la répression sont à même de gérer cette situation. C’est un tribu que la société donne l’impression d’accepter de le consentir volontairement pourvu qu’elle conserve ses maigres acquis et ses illusions. Alors qu’une certaine élite en banqueroute d’idées va jusqu’à le légitimer par les règles de l’évolution ce qui ne fait qu’asseoir d’avantage les marasmes d’une situation de blocage et de contradiction. Le rebelle et le résistant qui croit avoir tout compris et qui se voit déserter par la foule mis aux pas par ses tyrans n’a que mépris et amertume se voyant marginaliser alors que le temps le broyais ainsi que ses fantastiques projets. La aussi la rupture parait consommée entre une certaine élite et sa société. Je ne crois pas qu’on doit succomber à la dépression de la fatalité ni persister a cogner la tête sans répit sur des portes sans issues. Je ne crois pas non plus que notre pays soit un cas particulier ni à une certaine notion de la spécificité qui cherche à tout expliquer par la particularité. Si on réussi a comprendre l’histoire dans son cheminement on finira par déterminer notre position par rapport a son évolution et souvent la particularité de la phase qu’on est en train de dépasser peut être déterminée a l’image des expériences des pays qui nous ont précédés et ceux qui nous suivent de prés.Je crois qu’on n’est pas loin du Portugal de Salazar ni de l’Espagne de Franco ou de la Grèce des généraux plutôt que des pays des blocs soviétiques qui ont connue une autre évolution. Le monde du 21 siècle est en train de se tracé à nous d’être au rendez-vous. Nous devons nous préparer à admettre la défaite de l’histoire et de la géographie qu’on nous a enseigné. Nous sommes des occidentaux d’un pays qui n’a pas fini de se constituer. Le Maghreb est notre pays, notre destin et notre défi qui doit intégrer son espace naturel et savoir négocier sa position dans la nouvelle civilisation par la démocratie et le triomphe de la liberté. Le dynamisme de l’histoire dans lequel nous somme maintenant impliqués est en train de défaire ces liens séculaire qui ont pu associer le despotisme et l’arbitraire dans notre vie avec tout le mépris qui est en train de se propager envers ces politiques corrompus, ces magistrats soumis, ces richards affamés cette bureaucratie pourrie et tout ces esprits tordus qui ne veulent pas lâcher, qui cherchent a tout accaparé et qui se sentent de plus en plus menacés. Ils savent et tout le monde sait qu’ils ont définitivement échoués alors qu’on n’a rien fait pour les déranger sauf exprimer ici ou là quelques mots qui leurs sonnent aux oreilles comme le jugement dernier. Ce qui est en train de se passer en réalité c’est l’histoire qui est en train de les balayer C’est cette défaite morale et sans appel qui va achever cette opulence ostentatoire et provocante cette arrogance qu’ils ne peuvent que manifester qui est en train de les dénoncer. Cette agressivité et cette rancune et ce manque de pitié qui dévoilent leur culpabilité et toute cette hypocrisie ces parodie et ces magouilles de plus en plus décriée au rythme des scandales a répétition. Ces tendances mafieuses de parrains incontestés qu’on cherche en vain à maquiller en de faux nouveaux projets de société. Tout à l’air de marcher alors que rien ne va plus  » l’ère nouvelle  » est finie avant de commencer. Seule la vision capable de décerner cet arbitraire et de démanteler ce passé demeure incapable de déchiffrer l’avenir qu’on cherche a nous voilés par toute cette censure et cette langue de bois qui veut nous abêtir comme si on cherche a nous interdire de franchir le dernier pas vers l’émancipation et la liberté par la terreur et ces menaces qui ne font plus peur. Comment dans ces conditions peut on se taire et ne pas dénoncer l’archaïsme d’où il vient, les schémas et les clichés dans les quelles on veut nous emprisonner par des valeurs et des concepts périmés ? Comment peut on avoir encore du respect à une conception de la politique qui ne dépasse pas l’aspiration de gérer la médiocrité dont on veut se débarrasser ? Comment peut on encore admettre les magouilles qui cherchent a occulter l’expression de la noblesse de notre humanité séquestrée , torturé et dont la vie même est censurée dans des ghetto des Tazmamart de Borj Erroumi ou El Amri entre autres, ces lieux de la honte qu’on veut cachés aux étrangers ? Comment peut on être accusé de parricide en série et de jouer contre son propre camp alors qu’on cherche à sauver les plus martyrisés. Ceux qui les ont puni et surtout tout ceux qui les ont oubliés du carcan ou ils se sont tous installés ? Yahyaoui Mokhtar Tunis le 02-02-2006
 

LE  DANEMARK  OU  LA  MANIPULATION  ISLAMISTE

 

BALHA BOUJADI

 

Après la publication de mon papier sur le Danemark, j’ai reçu beaucoup de messages qui me félicitaient et d’autres qui me traitaient de chien et de sioniste et de déraciné, et mêmes il y’avait des volontaires qui voulaient sauver mon âme perdue car, d’après eux, je leur faisais de la peine.

 

Bref, il y’en avait de toutes les couleurs, et c’est normal et c’est tant mieux, juste je dois tranquilliser tout le monde que je me sens bien et que mon âme est pure et que je vis dans le bonheur total, matériel et surtout spirituel.

 

Je reviens à la grande manipulation orchestrée par les islamistes moyenâgeux pour intimider l’Occident démocrate.

 

Je pense qu’il faut se poser quelques questions, et comme ça je répondrai à Mr. Larbi Guesmi qui m’a répondu sur Tunisnews (voir le nº 2081 du 1er février 2006). Et aux autres qui m’ont écrit directement par e-mail.

 

1-     Les caricatures de ce journal conservateur danois que personne ne connaissait sont apparues au mois de septembre, les islamistes ont crié au scandale vers la fin du mois de janvier, quatre ou cinq mois après. Ça c’est de la manipulation, ils ont utilisé cette histoire au moment du problème nucléaire de leurs maîtres à penser iraniens et la proclamation des résultats de  triomphe de Hamas, tout ce bazar pour détourner l’attention de l’opinion publique. C’est comme ça qu’on utilise la religion pour des fins mesquines.

 

2-     Depuis cinq mois, personne n’a entendu parler de ces caricatures, aujourd’hui les journaux du monde entier sont en train de les publier, par curiosité, pour vendre plus, pour se moquer de nous, pour se solidariser avec les danois, pour défendre la liberté d’expression… La manipulation a tourné au vinaigre pour les islamistes. C’est la même histoire qui se répète de ce petit écrivain médiocre qui s’appelle Salmane Rochdi qui, grâce aux islamistes, il est devenu l’écrivain le plus connu de la planète. Est-ce que les islamistes sont conscients de que toutes leurs batailles sont perdues d’avance ?

 

3-     Les islamistes de Ghaza qui ont excellé dans les actes barbares de brûler les drapeaux des pays « ennemis », ne savaient-ils pas que les pays européens, dont on brûle leurs drapeaux avec un enthousiasme primitif, sont les donateurs généreux de 60% de leur budget, c’est-à-dire sont ceux qui font nourrir leurs enfants? Je ne comprends plus rien, l’Islam nous a enseigné la gratitude et la générosité. Ces gens là qui défendaient l’Islam, soi-disant, n’ont rien à voir avec l’Islam qui m’ont transmis mes parents

 

4-     Ces jours-ci, j’ai zappé sur toutes les chaînes arabes qui ont traité ce problème, et je n’ai vu que de la manipulation. On ne voyait sur le plateau que des barbus qui crient au scandale, mais jamais une seule personne, juste une seule qui a osé dire un petit mot pour défendre le diable, juste pour qu’il y’ait débat. Le problème est que ces islamistes ne veulent pas des débats, ils adorent la manipulation, une information de matraquage direct, et ce genre d’information ce qui nous attend si les barbus prendront un jour le pouvoir.

 

5-     Et la foi ? où est-elle ? Si quelqu’un a la foi pure et sûre, la foi qui fait bouger les montagnes, pourquoi serait-il offensé par un petit danois dans un bled de glace dans le pôle nord qui a dessiné un croquis quelconque ? Quand je voyais les guignols de Canal+, qui montraient le Pape dans tous ses états, au début ça m’a choqué, mais après j’ai apprécié l’esprit libre et la grande tolérance sans limite. Les gens qui rigolaient et se tortillaient de rire de leur Pape malmené, le jour suivant se rendraient à l’église et se prosterneraient avec beaucoup d’humilité. Quelle différence !

 

 

Ces islamistes n’ont rien compris de l’Islam, ni de l’Histoire, ni de la Culture, ni de la Civilisationm ni des Temps Modernes. Ils sont primitifs, barbares et sanguinaires… Cependant, Ils peuvent faire mal, mais jamais, jamais ils ne passeront… Parole de Balha.

 

BALHA BOUJADI, le 2 février 2006.

 

balhaboujadi@yahoo.es

 


A propos des « Visages de Mahomet »

par le Dr Abbas Aroua, Institut Hoggar (www.hoggar.org), 1er février 2006 Qui aurait pensé qu’on arriverait un jour à fédérer, d’une part, la conférence des ministres arabes de l’Intérieur, gestionnaires de l’industrie de la torture – de leur propre initiative ou sous mandat –, et, d’autre part, les masses des citoyens arabes victimes des régimes policiers ? Eh bien c’est fait ! Grâce au recueil des douze caricatures satiriques, « Les visages de Mahomet », paru le 30 septembre 2005 au quotidien danois Jyllands-Posten et reproduit depuis dans d’autres medias comme le journal norvégien Magazinet, le tabloïd français France Soir et les quotidiens Die Welt en Allemagne, La Stampa en Italie et El Periodico en Espagne. Alors qu’à l’issue de leur réunion du 31 janvier à Tunis, les Premiers policiers arabes ont demandé au gouvernement danois de « sanctionner fermement » les auteurs des caricatures jugées blasphématoire contre le prophète, les manifestations se multiplient dans les capitales arabes et musulmanes brûlant drapeaux danois et photos du Premier ministre Anders Fogh Rasmussen. La campagne de boycottage des produits danois s’élargit et se renforce dans le monde musulman. Elle est suivie scrupuleusement aussi bien par le religieux qui renonce à son lait Arla que par le profane qui abandonne sa bière Carlsberg. Nestlé, qui s’est trouvé mêlé à cette affaire, a dû publier un encart publicitaire en première page du quotidien Asharq al-Awsat, concernant le lait en poudre Nido, précisant que « ce n’est ni produit au Danemark, ni importé du Danemark. » Quel est donc ce pouvoir fédérateur qui a pu unir dans le monde musulman haut responsable et simple citoyen, Shiite, Salafi et Frère musulman, Turc, Persan et Arabe, Organisation intergouvernementale et ONG ? C’est que l’on a touché à la personne du prophète, qu’un musulman est censé chérir plus que sa propre personne. On a touché à ce symbole non pas parce que sa représentation soit illicite – cette interdiction ne peut être applicable aux non musulmans – mais à cause du contenu des caricatures qui ramasse en quelques croquis, comme celui du prophète coiffé d’un turban en forme de bombe, l’ensemble des clichés véhiculés à l’encontre de la religion islamique : terrorisme, misogynie, obscurantisme, fanatisme, etc., en Occident et notamment « dans un royaume [du Danemark] où la religion musulmane est qualifiée de ‘religion terroriste’ ou ‘religion du Moyen Age’ par certains hommes politiques au Parlement », comme le soulignait La Libre Belgique du 31 janvier dernier. Les autorités danoises ont refusé d’entrer en matière dans cette affaire en évoquant la sacro-sainte liberté d’__expression. Les millions d’Arabes et de musulmans, en déficit chronique de liberté, ne peuvent être insensibles à cet argument. Seulement ils constatent que ce principe, brandi à chaque fois que l’on publie des propos ou représentations qu’ils jugent blasphématoires envers leur religion, est occulté en d’autres occasions. Les Algériens, par exemple, se souviennent comment en 1995 au même moment où les plus hautes autorités de l’Etat français recevaient en grandes pompes Salman Rushdie l’honorant pour ses « Versets sataniques », le ministre de l’Intérieur français de l’époque interdisait un recueil de témoignages de tortures pratiquées par le régime militaire algérien, sous prétexte qu’ « en raison de l’appel à la haine qu’il contient, sa diffusion est susceptible d’avoir des incidences sur l’ordre public. » Par ailleurs, les citoyens du monde musulman observent à quel point la loi et les médias occidentaux sont sévères à l’encontre de la judéophobie, notamment lorsqu’il s’agit de négationnisme ou même de révisionnisme, et à quel point ils sont laxistes à l’encontre de l’islamophobie. Le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, a jugé que la presse européenne « observe deux poids et deux mesures » car elle « craint d’être accusée d’antisémitisme, mais invoque la liberté d’__expression lorsqu’elle caricature l’islam ». A une époque caractérisée par l’exacerbation des tensions entre communautés, où des millions de musulmans se sentent humiliés à la vue des images d’Abu Ghraib et de Guantanamo, une publication comme « Les visages de Mahomet » vient accroître la violence symbolique ressentie dans le monde musulman et risquerait de jeter des pans entiers des sociétés musulmanes dans la violence anti-occidentale. On se demande s’il est opportun de publier ce genre de produit pour le simple but de « tester l’autocensure et la limite de la liberté d’__expression », comme l’ont avancé certains pour justifier la publication de Jyllands-Posten, au risque de susciter encore plus de haine et d’inciter à encore plus de violence dans un monde que d’aucuns, de tous bords, voudraient plonger dans l’Apocalypse. Il est peut-être temps de réfléchir sérieusement sur le principe de liberté d’__expression, son caractère absolu ou relatif, son application universelle ou sélective, éventuellement sur ses limites, et surtout de s’interroger sur le rôle et la responsabilité du journalisme dans promotion de la paix dans le monde.

 

 


L’héritage pourri de la dictature policière

Omar Mestiri 30 janvier 2006
Il y a 16 ans, le 15 janvier 1990, les comités de citoyens de Berlin-Est investissaient le quartier général de la STASI. Moins médiatisée que la chute du mur qui l’a précédée de deux mois, cette conquête brisa le centre nerveux du système qui a écrasé l’Allemagne de l’est durant quatre décennies. Entreprise dans l’euphorie, cette action déclencha pourtant un contre séisme qui allait plonger la société dans un désarroi profond dont elle peine encore à se relever. Malgré la spécificité d’un système conçu au cœur de la guerre froide, on retrouve de nombreuses similitudes avec les méthodes adoptées par le général Ben Ali et ses adjoints à la tête des services sécuritaires et toujours en vigueur. Certaines sources prétendent même, sans toutefois en apporter la preuve, qu’un certain nombre d’anciens cadres de la STASI auraient trouvé refuge au « pays du jasmin », à la chute du mur de Berlin pour y être enrôlés comme conseillers… À l’heure où le bilan de la dictature policière se solde par un fiasco complet et que la Tunisie s’enfonce dans une atmosphère de fin de règne, la mise en lumière des mécanismes du défunt système policier est-allemand pourrait s’avérer précieuse pour tout projet de démantèlement de la police politique locale. Dans ce cadre, « L’empire des mouchards » constitue une référence intéressante et précise. Cet ouvrage est le fruit d’une enquête menée par deux journalistes français, Luc Rosenzweig et Yacine Le Forestier sur les 220 kilomètres d’archives de la STASI sauvés des broyeurs de documents qui ont fonctionné sans relâche à la Normannenstrasse , depuis la chute du mur. Ils rapportent que l’ouverture de ces archives a provoqué « le choc le plus violent subi par le peuple allemand depuis la révélation, en 1945, des horreurs commises […] dans les camps nazis»… Pour avoir une idée de la puissance de la STASI, il suffit d’évoquer que les comités de citoyens, accompagnés du procureur, venus investir son quartier général étaient infiltrés par des agents qui avaient réussi à les dévier vers des objectifs mineurs et à préserver les zones sensibles, au point qu’il fallut plusieurs tentatives à ses comités pour se rendre maîtres du site ; la destruction des archives s’est même poursuivie bien après le 15 janvier 1990 ! Il est aujourd’hui établi qu’un strict contrôle a pu être maintenu – à la différence des autres pays communistes – sur les activités des petits groupes de dissidents, y compris aux heures les plus chaudes de l’automne 1989. Au point que certains, comme le chanteur contestataire Wolf Biermann n’hésite pas à décrire Prenzlauer Berg, le quartier de Berlin-Est qui abritait les activités de la dissidence, comme le « petit jardin de la STASI ». Le pasteur Joachim Glauck, qui préside l’office public chargé de gérer les archives, estime quant à lui que « la Stasi a créé une partie de l’opposition » . Le Tsunami des révélations En fait, on découvre que bon nombre de porte-drapeaux de la révolution de 1989 avaient collaboré avec la STASI. Le milieu des intellectuels dissidents et de la culture était largement infiltré ; sa figure centrale, le poète Sascha Anderson, celui qui était de tous les combats, incontournable lorsqu’on voulait organiser quelque chose à Prenzlauer Berg, la niche à opposants, était en fait le principal informateur de la police politique est-allemande. L’écrivain Rainer Schedlinski, animateur de la revue clandestine Ariadnefabrik, célèbre à l’ouest, renseignait régulièrement les services. Le choc des révélations et le discrédit qu’elles entraînèrent sur l’ensemble du milieu politique est-allemand furent tels que les partis de l’ouest furent obligés d’importer massivement à l’est leurs propres cadres et qu’il fut convenu de soumettre tout élu à une enquête approfondie. Le cas qui fit le plus sensation fut celui de la députée Vera Wollenberger, alors nouvellement élue au Bundestag, découvrant que son mari, père de ses deux enfants l’espionnait depuis une dizaine d’années pour le compte de la STASI. Son collègue Gerd Poppe, animateur d’« initiative pour la paix et les droits de l’homme », n’en croyait pas ses yeux lorsqu’il découvrit que la moitié des vingt fondateurs du groupe étaient en réalité des agents infiltrés. De longs mois, il resta furieux contre lui-même de n’avoir pas été en mesure d’en démasquer un seul. L’incorruptible égérie des manifestations de Leipzig, le peintre Bärbel Bohley se rendit à l’évidence que le « Nouveau Forum » qu’elle dirigeait était en fait un nid d’espions. Le mouvement « démocratie maintenant », troisième pilier de la dissidence était tout aussi infiltré. C’est ainsi que la STASI connaissait les moindres détails des débats internes de la contestation qu’elle s’empressait de rapporter aux dirigeants du parti. Les verts est-allemands, fondés le 24 novembre 1989, soit après la chute du mur, étaient surveillés par plusieurs IM , dont Henry Schramm, leur candidat aux premières élections générales de l’après réunification. Le président de la branche est-allemande du SPD, reconstituée le 7 octobre 1989, s’est avéré avoir été l’informateur vedette de la STASI dans les milieux de la dissidence. Les chrétiens démocrates de l’est n’étaient pas en reste puisque Martin Kirchner, leur secrétaire général , s’est révélé un IM royalement rétribué en raison de « la qualité de ses informations ». Enfin, Lothar De Maiziere, avocat des dissidents, dernier premier ministre de la RDA, membre du premier gouvernement de l’Allemagne réunifiée et vice-président de la CDU, s’est révélé n’être autre que l’informateur « Czerny ». Les dégâts ont touché l’ensemble des secteurs, notamment les milieux de l’église, du sport, de l’université, de la recherche… Une extension cancériforme inversement proportionnelle à la popularité Les estimations les plus fiables indiquent que pas moins d’un demi million d’IM étaient en collaboration active avec la STASI au moment de sa dissolution, le 31 mars 1990. Elle comptait près de cent mille fonctionnaires et entre trois et quatre millions de citoyens au total, lui avaient, à un moment de leur vie, apporté leur contribution. Sur un total de seize millions d’est-allemands, près de six millions avaient fait l’objet de notes de surveillance établies par la police politique. Ce dispositif est considéré comme « le système de surveillance réciproque des membres de la société le plus efficace de l’histoire ». À titre de comparaison, les effectifs de la gestapo ne dépassaient pas les 44000 agents pour l’ensemble de l’Allemagne hitlérienne qui comptait 70 M d’habitants. Arrivés dans les fourgons de l’armée rouge, les dirigeants ne se faisaient aucune illusion sur le soutien réel dont ils bénéficiaient au sein de la population. Cette impopularité a alimenté la paranoïa du régime qui a développé une hystérie du complot . Les masses populaires étaient mises en avant dans les discours, mais dans la pratique, le régime cultivait la méfiance la plus totale envers les citoyens. Le développement de ce système de surveillance totale de la population s’est fait en raison inverse du soutien dont bénéficiait le régime au sein de la société. Cette phobie a été superbement immortalisée par le talent caustique du célèbre dramaturge Berthold Brecht, à la suite des émeutes du 17 juin 1953 réprimés dans le sang par les chars soviétiques : « ne serait-ce pas plus simple que le gouvernement décide de dissoudre le peuple et d’en élire un autre ? » Prédilection pour les méthodes « persuasives » En fait, contrairement à sa réputation terrifiante, la STASI s’est appliquée a rejeter les méthodes brutales alors en vigueur à la Securitate de Ceausescu. Le régime tenait à son image auprès de l’Allemagne de l’ouest, celle-ci étant un très gros pourvoyeur de devises. Le recours à la torture était exceptionnel et le nombre de prisonnier d’opinion assez limité. Par contre les gardes-frontières (vopos) s’étaient illustrés dans l’application stricte de la directive leur enjoignant de tirer à vue sur tout candidat-fuyard pour l’ouest, qui fit un nombre très élevé de victimes. LA STASI privilégiait les pressions discrètes comme celles aboutissant au licenciement professionnel ou forçant les étudiants à abandonner leur place à l’université ; d’autres sont contraints à un « retour à la production de base ». Son principe était « persuasion d’abord, sinon répression ». C’était une « dictature de la vertu » dont le but était de récupérer les « égarés ». On convoquait la personne sensible à la PID (voir plus loin), un entretien visait à lui faire « prendre conscience de ses intérêts familiaux » ; dans la majeure partie des cas cela suffisait. Seulement 25 % de ses interventions donnaient lieu à une action en justice, le reste étant classé sans suite ; des pressions étaient en outre exercées pour amener la «cible» à devenir informateur. La puissance de la STASI reposait sur une peur latente de la population ; cette peur de la répression était souvent impalpable, sournoise, perverse, diffuse… Le système de surveillance orwellien couvrait tous les secteurs de la société sans exception, la sphère publique comme la sphère privée la plus intime, afin de tuer dans l’œuf ou de refouler toute velléité de rébellion. La police politique s’attachait à mettre sur le pied de guerre des effectifs quatre fois supérieurs au nombre total des contestataires. Traquer la « diversion politico idéologique » La STASI qui s’affichait comme « le glaive et le bouclier du parti » se sachant garante de la survie du régime a, du coup, sans cesse étendu son action. Elle « protégeait » le pays en combattant énergiquement toute forme de PID, abréviation du concept de « diversion politico idéologique » mis au point par ses services. Cette définition englobe « toute manifestation de l’activité humaine, individuelle ou collective, s’effectuant hors de cadres institutionnels établis : écrire et publier sans appartenir à l’Union des écrivains, peindre et exposer sans l’aval de l’Union des artistes, défendre l’environnement sans en référer aux instances municipales, être pacifiste en dehors des heures de manifestation sur ce thème organisées par le parti… ». C’est ainsi qu’elle s’appliquait à étouffer dans l’œuf les initiatives écologistes comme « la bibliothèque de l’environnement » et pacifistes comme le mouvement « transformons les épées en charrues ». Dégâts dans les mentalités Cette dernière exerçait un contrôle total sur le pays, ou tout au moins donnait le sentiment à tout un chacun qu’elle le faisait. Cette dimension fantasmatique a provoqué des dégâts dans les mentalités en instillant un sentiment permanent de persécution . La plupart des informateurs recrutés par la STASI, ont accepté « par goût de l’aventure, opportunisme, mesquinerie ou carriérisme… ». On avait affaire à une société bel et bien malade où délation du prochain et accommodement avec le pouvoir étaient devenus, pour le plus grand nombre, des « actes de normalité ». La culture du grand besoin d’Etat a facilité l’instauration du totalitarisme. On était parvenu à brider une population entière, à faire du suivisme et de l’adaptation au milieu ambiant les modèles d’existence les mieux partagés. Puisqu’il n’y avait aucune chance de transformer le système, il fallait donc, au mieux, se taire, sinon composer et participer. Au sein de ce système, seuls pouvaient subsister ceux qui s’accommodaient, qui sacrifiaient leur capacité critique et leur intégrité pour mener une existence toute tournée vers l’assujettissement… « D’abord vient la bouffe, ensuite la morale » Les conditions psychologiques étaient réunies pour le bon fonctionnement de l’appareil de surveillance et de son tentaculaire réseau d’indicateurs. Les dirigeants est-allemands s’étaient attachés à promouvoir le modèle d’« un citoyen au ventre plein, roulant en Trabant et passant deux semaines en été au bord du lac Balaton » qui ne pouvait que s’identifier au régime. La STASI s’était attachée a rassembler une quantité monumentale de données sur les « cibles », traquant les détails les plus anodins de leur existence. Ainsi, elle a constitué des dossiers comprenant plus de dix mille pages sur les dissidents les plus en vue. Etaient notés, l’heure où la lumière était éteinte, la disposition des objets dans les appartements, les mots échangés avec les commerçants lors des emplettes, s’ils prenaient leur sandwich avec ou sans moutarde, la façon de s’habiller… Le comble fut la collecte les odeurs intimes des opposants ; les manifestants de Leipzig ont découvert plusieurs milliers de bocaux sagement entreposés dans les caves de la STASI renfermant chaussettes, caleçons… Paralysée par cette montagne de données qu’elle ne pouvait plus gérer, La STASI sera, malgré sa puissance, incapable de prévenir la chute du régime. Surtout, les réponses policières aux problèmes réels ont provoqué une accumulation du retard dans divers domaines comme l’économie ou l’innovation technologique, entraînant une montée en masse des demandes d’émigration à l’ouest. Les anciens cadres et officiers de la défunte police politique ont pour la plupart réussi leur reconversion dans l’Allemagne réunifiée. Doté d’une solide formation, ils n’ont eu aucun mal à se faire embaucher dans le privé ou à l’étranger. Certains sont même revenus sur la scène en fournissant de précieux tuyaux à la presse, distillant les dossiers sulfureux qu’ils ont pu emporter avec eux. D’autres sont devenus les vedettes des talkshows ou ont rédigé des mémoires à succès…Par contre, la déstasification s’est abattue avec toute sa rigueur sur les IM, avec le déclenchement d’une véritable chasse à l’indic : avoir été IM était une raison de licenciement.

 

(Source: le numéro 40 de Kalima)

Home – Accueil الرئيسية

أعداد أخرى مُتاحة

Langue / لغة

Sélectionnez la langue dans laquelle vous souhaitez lire les articles du site.

حدد اللغة التي تريد قراءة المنشورات بها على موقع الويب.