VOEUX A MON SUPERIEUR HIERARCHIQUE AU MOSSAD
Bonne Rosh Hashana
Arrivée du Aïd / Retornado Hmaïdi, Actions et Réactions des Aïdoun / Retornados Bouchadekh, Ounissi, Amri, Latif et Ghannouchi
Par: Aïd / Retornado Abdel Wahab Hani
Aïd Retornado Béji Hmaïdi passe la première nuit entre les siens au Kéf, après plus de 19 ans d’absence. Aïd Retornado Bouchadekh a été appelé aujourd’hui pour un rendez-vous au Consulat général de Pantin le jeudi 22 décembre. Echange émouvant entre Aïd Bouchadekh et Aïd Ounissi. Aïd / Retornado Chokri Amri a déposé sa demande de passeport au Consulat général de Paris. Aïd Retornado Zouhir Latif s’impatiente. Aïd / Retornado Adel Ghannouchi émouvant dans une interview sur AIDOUN ILA TOUNES. Des dizaines de Aïdoun Retornados ont été contactés par les services consulaires pour des rendez-vous aux Consulats.
Aïd Retornado Béji Hmaïdi au Kéf:
Ce soir, mardi 22 décembre 2009, Aïd / Retornado Béji Hmaïdi passe la première nuit entre les siens au Kéf, après plus de 19 ans d’absence. Il a ebmarqué, avec toute sa famille, au bord du vol TU 725 de la compagnie nationale Tunis Air, au départ de 09h10 ce matin à l’aéroport parisien d’Orly. Les Hmaïdi ont finalisé les formalités de police et des douanes peu après 13h00. A leur sortie, ils ont été accueillis par leurs proches et amis. Béji a été submergé d’appels téléphoniques de félicitations et de voeux de bon Retour.
Avant son Retour, Aïd / Retornado Hmaïdi a donné une interview à AIDOUN ILA TOUNES, dont les 3 épisodes sont déjà en ligne, ainsi qu’un Communiqué à l’Opinion publique, informant de son retour et remerciant les autorités qui y ont contribué..
Les 6 épisodes sont disponibles sur AIDOUN ILA TOUNES:
4: http://www.facebook.com/video/video.php?v=107084779302071&oid=216677883568
5: http://www.facebook.com/home.php?#/video/video.php?v=107088212635061&oid=216677883568
6: http://www.facebook.com/home.php?#/video/video.php?v=107092355967980&oid=216677883568
Aïd Retornado Bouchadekh au Consulat général de Pantin jeudi 22 décembre:
Le Doyen des Exilés tunisiens en France, Aïd Retornado Bouchadekh a été appelé, aujourd’hui mardi 22 décembre, par les services consulaires, pour un rendez-vous au Consulat général de Pantin le jeudi 24 décembre, le Consulat étan fermé le mercredi, jour de repors hebdomadaire (en contre partie de l’ouverture au public les samedi et dimanche pour faciliter la vie de la communauté). Espérons que Aïd Retodnao Bouchadekh obtiendra son passport, en attente depuis le 20 mai 1990.
Rappelons que Aïd Bouchadekh a donné une interview très marquante, de 11 épisodes, à AIDOUN ILA TOUNS, où il évoque notamment ses débuts de co-fondateur du Mouvement de la tendence islamique (MTI), son premier départ en 1978, puis son Exil en septembre 1981, le décès de sa gille en 1986 et son souhait de se recueillir sur sa tombe et de serrer son père agé de 96 ans à Djerba sa terre natale.
En marge du débat sur le sentiment d’asile intérieur et l’Exil, Aïd / Retornado Bouchadekh a rédigé un commentaire très profond sur la condition de l’Exilé dont voici copie:
“Cher frère Abdelwahab, j’ai suivi avec beaucoup d’intért la discussion sur facebook à ce sujet, j’ai été interpelé par la réflexion de l’un de mes compatriotes que j’aime, car cette reflexion va directement au coeur.
L’exil à l’intérieur de la patrie, il est dur certes, mais l’exemple de notre ami Abdallah Zouari, qui est sous controle administratif à Zarzis dans le sud du pays, est l’exemple-type de l’exil à l’interieur de la patrie. Sans oublier que ce sentiment d’injustice dans son propre pays lui a donné la force de se battre et de perseverer dans son combat, par la volonté et par la croyance qu’il a dans la cause qu’il defend. Cette souffrance de l’exil à l’interieur de la patrie, crée une energie formidable pour être soit même. L’exemple du professeur Ben Salem aussi, chacun dans son domaine, Zied Doulatni, Hammadi Jebali, Ali Larayedh. Chacun a trouvé le moyen de vivre avec sa cause à l’interieur de la patrie. Je peux citer d’autres comme Saïd Mekrazi ou Abdelkader Jedidi ou Fadhel El Beldi, sans oublier BenIssa Demni ou Abdelfattah Mourou. Pour toutes ces raisons, je revendique le Devoir du Retour à l’Interieur de la patrie, quitte à assumer l’exil à l’Interieur, avec une direction à l’Interieur, qui prend en considération, la situation avec ses contextes politiques et ses coalitions et son combat qui ne finira jamais. Tant qu’il nous reste un nerf ou une pulssion ou un coeur qui bat.
On se bat tout en restant debout, à coté de nos compatriotes tunisiens. Nous partagerons leurs malheurs et leurs joies. Lorsque quelqu’un se mari, nous serons tous ensemble avec lui. Lorsqu’il tombe malade, nous serons à ses cotes. Lorsqu’il est sur la point de mourir, nous serons à ses cotes, ne srait-ce que pour lui tenir la main et lui rappeler qu’il n’est pas tout seul dans ce bat monde comme dans l’au-delà.
Voilà pourquoi je persiste à vouloir rentrer, ne serait-ce pour pouvoir mourir dans mon pays.”
Réactions du Aïd / Retornados Mustapha Ounissi:
Ce cri du coeur a fait réagir notre ami Aïd / Retornado Mustapha Ounissi, dans des termes on ne peut d’une profondeur extrême:
إلى السيد عبدالسلام عميد اللاجئين السياسيين التونسيين،
إليك وإلى كل المناضلين مساندتي اللامشروطة في الحصول على جواز سفر يحمل اسم بلدك العزيز تونس،خاصة وأنا أعلم لو أنك تحصلت عليه في الصباح لعدت في المساء لتصل رحما رحيما قطعه الإستبداد و حبلا متينا قطعه الظلم واستغلال النفوذ. لا تحزن أخي فإن معركة العودة هي معركة شريفة قلبها
النابض هو الوطن.
ونحن سنخوضها
بكل إخلاص خدمة للوطن ، كل الوطن. ضاربين عرض الحائط بمصالح حزبية ضيقة حسبها أصحابهانهاية التاريخ، و نسوا أن الغاية النبيلة في هذه المعركة هو الإنسان المـُكرم، فلا شيء قبله و لا شيء بعده.
لقد نسي الكثير من إخوان الدرب الهدف الأصلي لمعاركهم ، واندفعوا يذودون عن أهداف صغيرة، بل هي حقيرة و وهمية في أحيان كثيرة، و هي جد ثانوية مقارنة مع الهدف الأصلي،
وإذا حاولت أن تذكرهم و نفسك بهذهالحقيقة رموك بالتخاذل و المهادنة، وأخذتهم العزة بالإثم، وهم ، إذا ما استثنينا السذج منهم، يعلمون علم اليقين أنهم على خطإ كبير، ولكن نرجسيتهم منعتهم من الإعتراف بالفشل، و التواضع للحق و حـُسْن التعامل مع الواقع.
هذا هو حال جزء كبير من معارضتنا التيمنحناها ثقتنا الكاملة في وقت من الأوقات، ولكنها لم تحسن التصرف في هذا الرصيد المعنوي،
فقادتنا من فشل إلى فشل و فرضت عليناوصاية لا تقل في عنفها و بشاعتها عن تلك الوصاية التي يعمل النظام على فرضها على شعبنا المسالم.
لقد حان الوقت أن نأخذ أمورنا بأيديناو لا نعول إلا على الله و المخلصين من أبناء شعبنا والمدافعين عن حقوق الإنسان الصادقين في العالم لنفرض مطالبنا المشروعة ،
و ما العودة الكريمة و الآمنة إلا و جهمن وجوه هذه المعركة ،
فإلى الأمام،
ودمتم في حفظ الله
Ce à quoi Aïd Retornado Bouchadekh a répondu:
لقد اخطئوا في تصورهم ووهمهم لانهم فرطوا في القضية الاصلية ويخشون المحاسبة من اخوانهم قبل كل شيء لانهم يزين لهم الشيطان سوء عملهم ولقد الشيطان بربه لما دعاه ليسجد لآدم فقال انا خير منه وهكدا ان الغرور والعزة بالاثم تزين لالاانسان انه يحسن صنعا.
وهكدا اختلط الامر فاصبح الدي اعتمر مثل من لم يوجهه لله ابدا
بل عند بعضهم الملحد الدي يدعوا لالحاده مثل المدنبالعاصي الدي يستتاب وقد يرجع عن معصيته ويتوب الىالله
وقد اختلط الامر عندهم بين ما هو تكتيكوما هو استراتيجي
هدا ما اردت ان اقوله لاخي مصطفى اللونيسي وفي حفظ الله دمتم والسلام
Rappelons que Aïd Retornado Bouchadekh s’est confié à AIDOUN ILA TOUNES dans une longue interview émouvante:
FaceBook: AIDOUN ILA TOUNES: http://www.facebook.com/search/?ref=search&q=AIDOUN%20ILA%20TOUNES&init=quick#/group.php?gid=216677883568&ref=search&sid=100000484151507.944755671..1 YouTube: 1: http://www.youtube.com/watch?v=fFnqFUL_siA 2: http://www.youtube..com/watch?v=iOFjYVlTCws 3: http://www.youtube.com/watch?v=LCkyfrWqLd4 4: http://www.youtube.com/watch?v=OkwXqGlDBUQ&feature=related 5: http://www.youtube.com/watch?v=oyR42fyIaJo&feature=autofb 6: http://www.youtube.com/watch?v=Dj7HwPk-STo&feature=related 7: http://www.youtube.com/watch?v=a1_WDoRTVOU&feature=related 8: http://www.youtube..com/watch?v=V42qk1sgEwc&feature=related 9: http://www.youtube.com/watch?v=yeNLMbicNww&feature=related 10: http://www.youtube.com/watch?v=vdD_aZJ5ouE&feature=related 11 et fin: http://www.youtube.com/watch?v=ec_LWE5RK-I&feature=related
Clip en images et dates:
Aïd / Retornado Chokri Amri a déposé sa demande de passeport:
Aïd / Retornado Chokri Amri a déposé sa demande de passeport au Consulat général de Paris, ce mardi 22 décembre 2009. Il était euphorique, à sa sortie du Consulat, après cette reprise des relations normales avec les symboles de l’Etat tunisien, suite aux années d’Exil.
Ayant quitté le pays trop jeune, Aïd / Retonado Chokri Amri s’est construit dans la souffrances de l’Exil. Il est l’exemple type de l’Homme d’affaires auto-didacte, aux affaires florissantes, dans le secteur difficile du Batiment. Sa première aventure fut l’apprentissage du français,comme ils se doit, dans une école sépcialisée. C’était le passeport de réussite de ce jeune homme maigre et toujours souriant, même dans les moments les plus difficiles, que j’ai rencontré au début des années 1990 à Paris.
Aïd / Retornado Adel Ghannouchi ouvre son coeur à AIDOUN ILA TOUNES:
Dans un émouvant témoignage de 7 épisodes, Aïd Retornado Adel Ghannouchi s’est ouvert à AIDOUN ILA TOUNES, le 17 décembre son jour anniversaire. Victime d’une simple délit de patronyme, du à sa parenté avec Si Rached Khriji-Ghannouchi, Président en exercice du mouvement en exil Ennahdha, Aïd / Retornado Adel revient sur:
Les conditions de son départ de Tunisie pour études en Syrie, son arrivée en France pour poursuivre ses études, la perte de son passeport à Paris en 1992, l’obtention de sa carte de résident dans le cadre de la régularisation Chevenement, sa demande de passeport qui date de 1997, la disparition de son père feu Si Brahim Ghannouchi, Allah Yarhmou, et de tous ses oncles, la maladie et l’hospitalisation de sa mama septuagénère, la condition des 5 frères handicapés, sa vie en France, ses démarches et sa patience llégendaires pour l’obtention de son passeport, dans la légalité et sans succomber à l’instrumentalisation…
Espérons que Adel Ghannouchi puisse se rendre au chevet de sa maman, souffrante à la Rabta, dans les plus brefs délais et qu’il puisse accompagner ses enfants et son épouse aux prochaines vacances scolaires, se recueillir devant la stelle de si Brahim Ghannouchi, Allah Yarhmou. La patience, le patriotisme et la bonté du Aïd / Retornado trouvent leur origine dans une noble éducation familiale, loin d ela haine et de la vengeance.
Clip en images et dates:
Extraits interview:
L’intégralité de l’interview:
1: http://www.facebook.com/group.php?gid=216677883568&ref=ts#/video/video.php?v=106995902644292&oid=216677883568 2: http://www.facebook.com/group.php?gid=216677883568&ref=ts#/video/video.php?v=107016439308905&oid=216677883568 3: http://www.facebook.com/group.php?gid=216677883568&ref=ts#/video/video.php?v=107046399305909&oid=216677883568 4: http://www.facebook.com/group.php?gid=216677883568&ref=ts#/video/video.php?v=107051342638748&oid=216677883568 5: http://www.facebook.com/group.php?gid=216677883568&ref=ts#/video/video.php?v=107054139305135&oid=216677883568 6: http://www.facebook.com/group.php?gid=216677883568&ref=ts#/video/video.php?v=107056609304888&oid=216677883568 7 et fin: http://www.facebook.com/video/video.php?v=107064142637468&oid=216677883568
Des dizaines de Aïdoun / Retornados contactés par les services consulaires:
Des dizaines de Aïdoun Retornados ont été contactés par les services consulaires pour des rendez-vous aux Consulats, notamment à Paris et à Pantin, compétent pour les départements de la banlieue parisienne.
Une vingtaine de passeport serait prêt à délivrer en France. Les Consulats exigent la remise du statut de réfugié auprès de l’Office français pour la protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) et ses équivalents européens.
Les démarches, de la demande de cessation définitive du statut de réfugié, durent entre 45 et 60 jours. Ce qui est de nature à troubler la bonne marche de certains Aïdoun / Retornados devenus de véritables globe-trotter avec des voages aux quatre coins de la planète.
Les Consulats devraient se contenter d’un engagement sur l’honneur et de l’accusé de réception de la demande de cessation de l’intéressé, pour délivrer les passeports tunisiens, afin de faciliter la vie aux AIDOUN / Retornados.
Voeux 1431 H / 2010 J:
Que cette nouvelle année lunaire de l’hégire 1431 et que la nouvelle année administrative solaire du calendreir julien 2010 apportent aux Rerornados la joie de rentrer au pays, qu’elle apporte à la Nation toute entière la sagesse d’opter pour les bons choix et d’ouvrer pour le bien des tunisiennes et des tunisiens.
Montreuil, banlieue parisienne,
22 décembre 2009
Abdel Wahab Hani
+33 6 17 96 00 37
FaceBook: Abdel Wahab Hani
Groupe FaceBook: AIDOUN ILA TOUNES
Sir Khaled et les quarante journalistes…..
Réponse à Sihem Ben Sedrine
La question des classes sociales aujourd’hui
Voilà une notion sulfureuse, éminemment politique, qu’on pensait définitivement enterrée et irrémédiablement condamnée, car idéologique et datée! Depuis l’avènement des années quatre-vingt, en effet, peu de sociologues sérieux osent parler de classes sociales, encore moins du sujet poussiéreux de leurs luttes hypothétiques. C’est comme si un accord était apparu parmi les membres de la profession sur la «fin des classes sociales». Car des évolutions auraient eu lieu dans nos sociétés post-modernes et auraient rendu cette catégorie incapable de saisir leurs logiques de fonctionnement et de transformation. Pourtant, depuis quelques années en France, un sociologue (Louis Chauvel) et un économiste (Thomas Piketty) travaillent patiemment, et à contre-courant pour ainsi dire, sur les inégalités économiques, éducatives et culturelles dans la société française. Et le résultat est là, bien tangible : non seulement les inégalités existent, mais elles sont structurées et elles s’approfondissent !
Or, c’est justement le fait que les inégalités soient structurées qui remet à l’ordre du jour la catégorie de classe sociale et autorise les sociologues à l’interroger de nouveau. C’est ce que fait Chauvel dans un texte fondamental publié en 2001 dans la revue de l’OFCE et intitulé justement Vers le retour des classes sociales ? Nous présentons ci-dessous l’essentiel de ces réflexions. Nous nous proposons, d’abord, de revenir sur le lieu commun de la fin des classes sociales et d’expliquer l’évolution qui les a, en quelque sorte, réactivées, de souligner, ensuite, le phénomène des inégalités d’aujourd’hui et, de nous interroger, enfin, sur l’éventuelle portée de cette problématique chez nous, en Tunisie.
Fin des classes sociales ?
La thèse n’est pas tout à fait neuve. Elle date des travaux du sociologue américain R. Nisbet de la fin des années 50 qui l’ont justifiée par la diffusion du pouvoir, l’extension du tertiaire (où se dilue la notion de classe) et l’élévation du niveau de vie. A cette thèse classique se sont ajoutées, cependant, des approches contemporaines qui justifient la fin des classes par le phénomène des fragmentations économiques et symboliques[1]. Les premières auraient réduit les différences entre les classes, tout en les approfondissant au sein de chacune d’elles. Quant aux secondes, elles auraient fortement déstabilisé l’identité collective classique par l’émergence de nouvelles identités et des combats pour la reconnaissance qui transcendent les classes (du type, homosexuels ou hétérosexuels, fumeurs ou non, féministes ou non…). A ces deux dimensions, on doit ajouter une importante évolution idéologique : un discours (nouveau?) sur la reconnaissance de l’individu et sa centralité a éclipsé celui (ancien) sur la primauté des intérêts collectifs.
Pour revenir à la dimension économique, toutefois, il est indéniable que la phase des «Trente Glorieuses», par la forte croissance qui l’a caractérisée et le partage équitable dont celle-ci a fait l’objet, a fortement contribué à atténuer les inégalités économiques et à renforcer, notamment, la classe moyenne. C’est d’ailleurs l’extension de cette dernière au point d’inclure «deux Français sur trois», selon la célèbre formule de Giscard, qui aurait contribué à la fin d’un système basé sur les antagonismes de classes et à promouvoir la vision en termes de classement ou de compétition entre individus.
Seulement l’histoire des sociétés humaines est loin d’être un long fleuve tranquille. Elle n’est surtout pas le siège d’une évolution linéaire. Et ce mouvement de croissance, porteur d’une limitation des inégalités – que des historiens américains ont identifié par l’expression imagée de « la grande compression » – ne s’est pas poursuivi. Il y a eu une inflexion à la fin des années soixante-dix et aux Trente Glorieuses ont succédé les «Trente Piteuses», pour reprendre le titre d’un livre de N. Baverez, avec ralentissement de la croissance et réapparition d’un chômage de masse. Cet essoufflement de la croissance s’est aussi accompagné par le retour en force de politiques économiques libérales, par une déstructuration de l’Etat Providence et par l’apparition, dès les années 90, d’«une foi démesurée dans le marché autorégulé et un sentiment d’impunité absolue parmi les élites économiques et financières»[2].
Or, il ne s’agit pas là d’un simple retournement de la conjoncture, mais d’une transformation structurelle de nos économies (à l’œuvre depuis les années quatre-vingt et qui s’est accentuée depuis la chute du mur de Berlin) qui nous a insensiblement menés d’un capitalisme salarial, plus ou moins maîtrisé et policé, à un capitalisme patrimonial[3], beaucoup plus brutal, en tout cas, nettement plus inégalitaire.
Le retour des inégalités
Dès lors, et comme le souligne Chauvel, le retour des inégalités structurées est dû à l’effritement de la société salariale comme modèle, avec sa hiérarchie maîtrisée, ses changements stabilisés, ses revenus régulés et ses droits sociaux. Aujourd’hui, «les droits vont de plus en plus dépendre d’une capacité à épargner» et «dans cette société patrimoniale, la répartition du revenu est amenée à s’étirer entre les deux extrémités», et la classe moyenne, notamment, y est fortement menacée, car elle est «consubstantielle à la société salariale» (333). Et l’analyse de la répartition du revenu, comme les enquêtes sur la consommation des différentes catégories socioprofessionnelles ou l’étude des chances de réussite à l’école des enfants de chacune d’elles, en France sur les vingt dernières années, sont éloquentes : les classes sociales sont bel et bien là!
Ainsi, les écarts s’approfondissent entre catégories populaires (ouvriers et employés) et cadres, par exemple. Mieux même, la nette baisse de la croissance des salaires des premiers fait en sorte que le «temps de rattrapage» (qui estime le nombre d’années nécessaires à l’ouvrier pour atteindre le revenu d’un cadre) s’est nettement allongé : d’une génération (30 ans) dans les années 70, il est passé à un siècle aujourd’hui. D’où un effet déprimant sur les classes populaires et leurs enfants qui ne peuvent plus espérer atteindre, dans un avenir proche, le niveau de vie des cadres d’aujourd’hui.
Si on ajoute à cela, la faible mobilité entre les différentes catégories sociales, la persistante inégalité des chances devant l’école (les enfants de cadres occupent les 80% des places dans les Grandes Ecoles), la forte homogamie (choisir son conjoint dans la même classe) et la forte différenciation dans les modèles de consommation, on ne peut que conclure à la permanence des frontières sociales et à leur faible porosité. Une dernière indication, enfin, sur l’approfondissement des inégalités porté par ce capitalisme patrimonial : sur les vingt dernières années, les salaires ont crû de 30%, tandis que les actifs patrimoniaux, comme, par exemple, le prix d’un mètre carré en location a crû, lui, de 135% (332). Il s’agit là, indéniablement, d’une profonde modification du rapport de forces entre salariés et détenteurs du capital. Ainsi, aux Etats-Unis, cette réactivation des inégalités a déjà abouti à la reconstitution d’une haute bourgeoisie possédante!
Toutefois, et comme le souligne Chauvel, il est clair que la réapparition au premier plan des inégalités structurées et des classes sociales n’a pas été accompagnée, en parallèle, par l’émergence d’une «conscience de classe». Ainsi, on n’a pas constaté un retour du sentiment d’appartenance, ni un renouveau de la mobilisation syndicale ou de l’action politique à travers des partis structurés (même si on peut aisément distinguer, en France, un vote populaire d’un vote bourgeois). Ce qui nous mène, paradoxalement, si l’on adopte la définition marxiste des classes sociales à conclure leur… disparition. Mais on ne peut préjuger de l’avenir et rien n’interdit de penser, si ce mouvement inégalitaire persiste, à un retour possible des classes sociales dans le champ politique (357).
Et chez nous ?
Il est tout à fait légitime, en effet, de s’interroger sur les évolutions qui sont à l’œuvre dans les structures économiques et sociales de notre pays, car à moins de vivre en autarcie (ce qui est loin d’être le cas de la Tunisie), on ne peut facilement échapper aux changements qui affectent l’économie mondiale et en particulier aux transformations du capitalisme. Ainsi, comme plusieurs pays, la Tunisie a vécu, à sa manière, les Trente Glorieuses et la phase de l’Etat Providence puis, avec un léger décalage (1986), le passage à une nouvelle conception du développement économique. D’ailleurs, en estimant que l’économie tunisienne a connu, d’abord, une «modernité socialiste» (1962-1986), à laquelle aurait succédé une «modernité libérale» (à partir de 1987), Chedly Ayari admet indirectement l’existence d’un point d’inflexion, sinon dans l’histoire du jeune Etat, du moins dans ses politiques économiques[4].
On peut, dès lors, s’interroger à propos de ce changement, sur ses effets sur la prospérité des différentes classes sociales ou catégories socioprofessionnelles et se demander si l’effritement de la société salariale est bien à l’œuvre chez nous. Toutefois, la réponse à ces questions n’est pas aussi aisée qu’il ne paraît à première vue. D’abord, parce qu’on ne dispose pas de données fiables relatives aux revenus et à la fiscalité, ni d’enquêtes sérieuses sur la consommation des ménages. Mais, surtout, parce que les classes sociales sont, ici, complètement évacuées par un discours sur la classe moyenne, son extension et sa bonne santé, qui sature l’espace médiatique. C’est ce discours qui a, désormais, remplacé celui, plus vieux, des «forces vives de la nation» destiné, lui aussi, à conjurer la charge conflictuelle de la notion de classes sociales. Car il est clair que la «formidable extension» de cette classe moyenne dont on nous rebat les oreilles est, d’une certaine manière, l’évocation d’une fin des classes sociales. Son extension est telle, aux dernières nouvelles, qu’elle risque bientôt d’englober toute la population du pays.
Or, cette prospérité de la classe moyenne tunisienne gagne à être interrogée pour, au moins, trois raisons. D’abord, une classe moyenne englobant plus de 80% de la population devrait logiquement mener à un nivellement des conditions et se traduire par une société fortement égalitaire. Or, l’observation, rapide il est vrai, évoquerait plutôt un accroissement continu des inégalités, à travers le sentiment de déclassement chez les enfants des classes moyennes des années soixante-dix et l’accroissement de leurs difficultés à maintenir un certain rythme de vie, tel qu’il a transparu, par exemple, dans un débat intéressant sur la blogosphère tunisienne[5].
D’un autre côté, le phénomène inquiétant du chômage des diplômés du supérieur (80 mille aujourd’hui) est contradictoire avec l’idéal méritocratique qui a été constitutif de la société salariale et de ses classes moyennes. Il n’est donc pas surprenant qu’apparaisse, chez les jeunes Tunisiens, à l’image de leurs congénères américains ou français, une réelle nostalgie pour la société de leurs parents. Par ailleurs, cette classe a vraisemblablement beaucoup recruté dans la fonction publique à l’ère de l’Etat Providence, et il est tout à fait attendu que cette catégorie cesse de croître avec une politique fondée sur la libéralisation et la privatisation.
Enfin, les rares chiffres dont nous disposons sur la répartition du revenu en Tunisie, tels que le rapport interdécile[6], (qui est de 6) n’évoquent pas une société particulièrement égalitaire (il est égal à 3 pour la Suède et 4 pour la France). Il en est de même quand on constate l’explosion inédite des revenus des 1%, voire des 0,1%, les plus riches[7].
Tout ce qui précède devrait nous amener à déconstruire ce discours lénifiant sur cette classe moyenne pléthorique et à essayer de cerner sa portée mystificatrice et, à la limite, incantatoire. Ce travail de déconstruction est le préalable à un sérieux diagnostic sur l’état et l’évolution des différentes classes sociales en Tunisie.
Baccar Gherib
[1] Louis Chauvel, Le retour des classes sociales ?, Revue de l’OFCE, octobre 2001.
[2] Thomas Piketty, Penser le capitalisme au 21ème siècle, Le Monde du 29 avril 2009.
[3] Olivier Mongin, Du capitalisme fordiste au capitalisme patrimonial, Esprit, novembre, 1998.
[4] Chedly Ayari, Le système de développement tunisien, CPU, 2003.
[5] http://coeos.wordpress.com/2009/08/07/le-mythe-de-la-classe-moyenne-en-tunisie/
[6] Il s’agit du rapport entre le revenu de la tranche inférieure du 10ème décile (les 10% les plus riches) et la tranche supérieure du 1er décile (les 10% les plus pauvres).
[7] M. Ben Romdhane, 1987-2007 : le bilan économique et social, Attariq Aljadid, déc. 2007.
(Source: Les amis d’Attariq Aljadid le 20 decembre 2009) Lien:http://amisattariq.blogspot.com/2009/12/la-question-des-classes-sociales.html
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