Reuters, le 9 mars 2009 à 12h36 LONDON, March 9 (Reuters) -Iraq said on Monday it had reached a bilateral agreement with Tunisia under which it would pay 10.25 percent of outstanding Saddam Hussein-era debt, the latest in a series of similar agreement with creditors. Iraq said that the deal was comparable to accords reached with Paris Club creditor countries which have called for the cancellation of 80 percent of Saddam-era debt with the remainder to be repaid over a 23-year period. It gave no details of how much was outstanding with Tunisia. “Under the terms of this settlement, Tunisia’s claims were cancelled in exchange for a cash payment by Iraq equal to 10.25 percent of the outstanding amount,” Iraq’s Ministry of Finance said in a statement. Iraq said that over the past four years it had resolved its debt issues with 59 countries. It said it had also settled more than 13,000 Saddam-era commercial claims totalling $20.9 billion. The United States, Malta, Slovakia and Cyprus have already cancelled the entirety of the Saddam-era claims against Iraqi, the Ministry of Finance said in its statement. Last week, the Iraqi parliament defied government objections to cut the oil-dependent country’s budget by $4.2 billion, or nearly 7 percent, due to falling oil prices. Iraqi Prime Minister Nuri al-Maliki said over the weekend he was “uncomfortable” with the move, fearing it would in danger efforts to shore up security with reconstruction and jobs. REUTERS
Prof. Taoufik BACHROUCH La question ne se pose-elle pas plus que jamais de savoir si le peuple tunisien n’est pas déjà en butte à des prémices de difficultés sociales qui se traduiraient à terme par une recrudescence de la pauvreté et par suite des manques, des privations et des exclusions, surtout quand le seuil de pauvreté se conjugue déjà avec le chômage de longue durée. Le filet social tendu en des temps où le taux de croissance économique était de l’ordre de 5% est-il à même de répondre aux demandes additionnelles d’assistance publique qui se profilent à l’horizon, et ce en l’absence d’un dispositif de protection des chômeurs, jeunes et moins jeunes, en cours et à venir ? Comme lors de la crise de 1929 qui ne sévit particulièrement en Tunisie que dès 1933, pour frapper les années ultérieures, par un effet à retardement qui rendrait compte de l’émergence de Néo-Destour. Tout donne à penser que nous traverserions une période de latence, que le pire à Dieu ne plaise serait à venir, sans que des mesures énergiques aient été prises et portées à notre connaissance pour conjurer la menace qui se profile, comme si gouverner n’est pas prévoir. Il faut s’attendre en bonne logique à une diminution du pouvoir d’achat des économiquement faibles, surtout avec le renchérissement des prix qui obère par les temps qui courent le panier de la ménagère. C’est sur ce terrain que de surcroît seront jugés bientôt les autorités publiques. Que font-elle de concret pour nous protéger ? La possibilité a été offerte depuis longtemps de disposer d’un vêtement décent. Le problème de l’habillement a été en effet résolu puisque la majorité du peuple tunisien, hommes et femmes confondus, s’habille à la fripe, en s’appropriant les hardes des nantis vivant dans les pays riches ? L’habillement d’emprunt est devenu un trait constitutif de l’identité tunisienne : s’affubler en se fringuant des restes vestimentaires des autres est considéré comme étant un signe de modernité, même d’occasion. Ainsi personne ne pourra nier que nous portons des habits usagés qui n’ont pas été taillés à notre mesure (comme nos chaussures neuves faites avec des moules formatées sur des pieds occidentaux), ceux que des âmes charitables appartenant à des pays riches nous ont laissés de bon coeur dans le dessein leur donner une seconde vie et faisant d’une pierre deux coups, moderniser plus avant nos pratiques vestimentaires jusqu’aux plus intimes. La réincarnation vestimentaire est un critère objectif de métempsychose pouvant servir à identifier la pauvreté déguisée dont on se sert pour alléger le portefeuille du père de famille. En arriverons-nous à leur demander un jour, sous la pression des nécessités, de nous envoyer leur rebut alimentaire ? Certes la majorité du peuple tunisien est encore en mesure de satisfaire ses besoins vitaux en terme de nourriture (sous-nutrition=1800 calories par jour, malnutrition= 2400 calories quotidiennes) et de logement. Les pauvres sont définis comme vivant dans des conditions difficiles. C’est une manière d’occulter le problème du seuil de pauvreté, non seulement par rapport aux besoins minimaux objectifs, mais aussi et au-delà par rapport aux besoins souhaités, ceux en vertu desquels on aspire par vanité à faire comme les autres, sinon plus. En la matière les statistiques tunisiennes posent un problème de méthode et de critères. On vient de l’admettre en haut lieu pour une plus grande rigueur. Les statistiques internationales sont bien plus fiables, mais vieillissent sans que leur actualisation soit la règle. C’est pourquoi l’indice synthétique de pauvreté humaine reste énigmatique, incertain et peu fiable : indices numériques et/ou volumétriques, vieille pauvreté, nouvelle pauvreté, précarité. On nous annonce l’existence dans le tournant du siècle de 1 327 zones d’ombres, de plus de 1 2000 000 personnes vivant dans des « conditions difficiles », mais la création de seuls17 719 emplois seulement à leur intention. Qu’en est-il au jour d’aujourd’hui ? Les manques en termes de niveaux de vie relatifs aux hommes et aux femmes appellent une attention particulière, moins politicienne, et d’une exactitude plus respectueuse du genre humain. Disons pour fixer les idées, et en dépit des aléas statistiques et des querelles de chiffres entre « économcistes » et « humanicistes » pour faire bref, que la décroissance annuelle moyenne du seuil de pauvreté est passée de -10,1% entre 1975 et 1980, à -6,4% entre 1980 et 1990 et à -7,7% entre 1995 et 2000. Ce qui revient à dire que l’indice du seuil national de pauvreté est tombé de 30% en 1960, à 22,2% en 1975, à 12,9%à 1980, et à 7,7% en 1985, (recul du taux de pauvreté entre 1975-1985 : fin de l’ère du bourguibisme social), puis à 6,7% en 1990, à 6,2 en 1995, à 4,2 % en 2000/2004 et à 3,8% en 2008 (soit une décélération du rythme durant cette période, à l’ère du mondialisme démocratique). On espère parvenir à rabaisser ce seuil à 2% en 2015. S’agissant de sa répartition géographique, la pauvreté concerne plus les milieux urbains (là où les équipements de base ne manquent pas, thèse de l’INS), et y touche plus de 5% de la population (soit l’équivalent de 74% de l’ensemble des pauvres) ; et dans une moindre mesure les milieux ruraux qui retiendraient les 26% restants, soit près de 3% des habitants. La Banque mondiale prétend le contraire. En souffrent partout notamment les chômeurs (y compris les diplômés dont 42,5 % sont au chômage de longue durée d’après les chiffres de 2004), les ouvriers agricoles et les ouvriers non agricoles. Cependant les inégalités régionales ne sont pas négligeables ; elles oscillent en matière de pauvreté entre 2,3% et 8,7%, d’après l’enquête nationale sur le budget, la consommation et le niveau de vie des ménages, entreprise en 2000. Les régions relativement les moins pauvres sont le Nord-Ouest, le Centre-Est et le Grand Tunis. Les régions comparativement les plus pauvres sont le Sud et le Centre-Ouest. Le Nord-Est occupe une position médiane avoisinant la moyenne nationale qui est rappelons la de 4,2%. Mais 2009 n’est plus 2000. Les plus nantis (20%, estimés à 747 000 personnes en tout nous dit-on de source officielle et accaparant 47% de la consommation) sont considérés comme riches parce qu’il sont censés pouvoir dépenser plus de 11 dinars par jour et par tête. En somme un travailleur qui gagne 340 dinars (l’équivalent de 200 euros, alors que le seuil de pauvreté est fixé en France à 817 euros) par mois pour subvenir à ses seuls besoins personnels est considéré comme un nanti. Il faut une bonne dose de niaiserie pour y ajouter foi. Mais qu’en est-il d’un père de famille qui gagne par exemple le double et dont la femme ne travaille pas et dont progéniture est au chômage ? Les plus démunis (20%, soit 376 000 personnes en tout affirme-t-on ne disposant que de 7% de la consommation totale) sont considérés comme pauvres dès lors qu’il sont censés ne pouvoir dépenser qu’un dinar par jour et par tête (à peine de quoi se payer un seul casse-croûte quotidien au thon ou un bol de lablabi sans option oléicole, ou les deux tiers d’un chapatti ordinaire au plus). La CIA Word Factbook (2004-2008) estime quant à elle que 7% des tunisiens sont pauvres. Au vu de ces critères, les membres de la classe moyenne (se situant entre les plus riches et les plus pauvres, soit 60% en nombre et 46% en part de consommation) disposeraient d’une plage allant de plus de un dinar à près de onze dinars. En son sein se trouvent ceux qui ne sont pas candidats à l’aide sociale et qui n’ont pas de matelas nécessaire pour traverser éventuellement la crise de leur pouvoir d’achat ; d’où la tentation grandissante des prêts à la consommation (l’endettement affecte en 2006 le tiers de la population active). Entre la réalité vécue et les élucubrations chiffrées, il y a de quoi perdre son latin. Une remise en ordre s’impose. Une telle approche pose le problème de la fiabilité et de la disponibilité de l’information sur la pauvreté vraie et actualisée à l’échelle nationale et locale. La mesure de la pauvreté ne doit pas reposer sur de simples critères monétaires et surtout plus sur le PIB, car cela pose le problème de l’inégalité sociale de la répartition des richesses. Ne jouons pas avec la pauvreté en en modifiant le baromètre pour en réduire artificiellement l’indice par calcul politique, surtout quand les gens déclarent que la vie devient de plus en plus dure. La pauvreté se constate sur le terrain et les organismes caritatifs sont par malheur inféodés au pouvoir. Le mode d’évaluation et le calcul statistique laissent perplexes, faute d’un contrôle indépendant. De toute façon le décalage entre la réalité et les statistiques nourrit le doute et alimente une tension sociale latente. Convenons que la pauvreté est une forme de violation des droits de l’homme et d’atteinte à la dignité des citoyens défavorisés. Déjà en 1998, tous les gouvernements et tous les parlements du monde ont considéré en chœur que la pauvreté « porte atteinte à la dignité et aux droits inaliénables et égaux de tous les êtres humains ». De la parole à l’acte il y a loin. Le « monitoring » social n’en est qu’à ses débuts. La lutte contre la marginalisation a un long chemin devant elle. Prof. Taoufik BACHROUCH (Source: “Mouwatinoun” organe du FDTL (Hebdomadaire – Tunis) nr 95)
Tunisie : LE COURAGE D’INFORMER
Par Houcine Bardi MAITRE Houcine BARDI nous a rendu une aimable visite au siège de notre journal « MOUATINOUN » le lundi 12 janvier 2009, à la veille du procès des militants du bassin minier. De retour en France, il a publié un long rapport sur les conditions de la presse en TUNISIE .voici de larges extraits de ce rapport… Deux presses coexistent en Tunisie. La plus docile bénéficie d’importantes subventions étatiques et de revenus publicitaires conséquents, d’origine publique comme privée. L’autre se bat depuis de nombreuses années pour faire entendre une voix différente. Est-il utile de préciser que cette dernière survit dans des conditions économiques difficiles, en l’absence notamment des avantages accordés à la première ? Les médias tunisiens indépendants du pouvoir ne sont pas libres de mener leur activité d’information .Leur diffusion restreinte ne leur permet pas d’avoir accès à une audience importante ….Les journaux appartenant à des partis légaux d’opposition, à l’instar des hebdomadaires Al-Maoukif et Mouwatinoun, sont difficiles à trouver dans les kiosques du fait de pressions exercées aussi bien sur les distributeurs que sur les marchands de journaux. Et les sites Internet critiques envers le pouvoir sont tout simplement inaccessibles dans le pays. Une délégation de Reporters sans frontières s’est rendue à Tunis, en fin d’année 2008, à la rencontre de cette presse d’opposition traquée par les services de police et trahie par la justice. L’organisation appelle à un soutien politique de la communauté internationale. La surveillance exercée par le régime tunisien sur les opposants et la presse indépendante n’a pas faibli depuis la précédente visite de l’organisation en juin 2005… La presse d’opposition, élément de décor du pluralisme tunisien Certes, en apparence, quelques progrès on tété accomplis. Mais en apparence seulement. La création avec l’accord des autorités, en janvier2008, du Syndicat des journalistes tunisiens(SJT), dirigé majoritairement par des indépendants, a été perçue comme “un pas dans la bonne direction”. L’Association des journalistes tunisiens (AJT), dissoute au moment de la création du syndicat, était considérée comme une marionnette entre les mains des autorités. Le responsable des affaires sociales au sein du nouveau syndicat, Habib Chebbi, confie les difficultés de l’action syndicale en Tunisie : “Nous n’avons d’autre choix que de dialoguer, même quand les promesses qui nous sont faites ne sont pas tenues. Aujourd’hui, le syndicat veut d’abord s’attaquer aux chantiers sociaux: titularisation de journalistes pigistes de longue durée,projet de couverture sociale, etc. Nous n’avons pas encore commencé à parler des libertés.” C’est pourtant sur ce terrain que l’on pourra mesurer l’indépendance et l’efficacité de cette nouvelle organisation professionnelle. L’existence d’une presse privée indépendante, renforcée par l’apparition de nouveaux titres, pourrait également être considérée comme un signe d’ouverture. Sauf que, dans les faits, les autorisations ne sont distribuées qu’à un cercle très fermé. Selon Soukaina Abdessamad, secrétaire générale du SJT, “les licences ne sont pas accordées à des hommes de métier, mais aux proches du pouvoir”… Mustapha Ben Jaafar, secrétaire général du Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDTL, opposition légale) et directeur de l’hebdomadaire Mouatinoun (Citoyens),l’organe de son parti, parle de “pluralisme de façade”. La pression internationale exercée sur le régime tunisien aura permis la naissance d’une presse d’opposition, mais “le pouvoir finit par reprendre ce qu’il a cédé”,ajoute-t-il. La délégation de Reporters sans frontières n’a pas pu se procurer Mouatinoun dans les kiosques de la capitale tunisienne. Il n’était disponible qu’à l’aéroport. “Nous vivons presque comme si nous étions un parti clandestin. Nous ne bénéficions pas d’un financement public pour le journal. Nous sommes invisibles pour l’Agence tunisienne de communication extérieure (ATCE), l’organe chargé notamment de la distribution de la publicité des entreprises publiques, rebaptisé ‘agence tunisienne de la censure’ par la presse d’opposition.” Depuis son lancement en 2007, Mouatinoun n’a cessé de réduire son tirage ; la distribution est assurée en partie par les militants du FDTL. La publicité des entreprises privées n’est certes pas distribuée par l’ATCE, mais elle est, selon Mustapha Ben Jaafar, officieusement gérée selon les mêmes prérogatives, à savoir le degré d’allégeance des rédactions au pouvoir. Il n’existe pas, en Tunisie, d’organisme indépendant chargé de certifier les chiffres de ventes des journaux. La distribution de la publicité se fait donc de manière arbitraire par l’ATCE. De leur côté, les hommes d’affaires n’achètent pas d’encarts publicitaires dans la presse d’opposition, de peur d’être accusés de la financer… .Zakia Dhifaoui, membre du FDTL et collaboratrice occasionnelle de Mouwatinoun, a eu à subir la prison pour avoir couvert et participé à une marche de soutien au mouvement de protestation de Gafsa. Elle a été arrêtée le 27 juillet 2008 à Redeyef (chef-lieu de Gafsa), et condamnée à huit mois de prison pour “insubordination ,trouble de l’ordre public, entrave à un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions et atteinte aux bonnes moeurs”. Elle a passé cent deux jours en détention, avant de bénéficier d’une mesure de grâce accordée à l’occasion du “21e anniversaire du Changement”. Tout un symbole. Zakia Dhifaoui a été profondément marquée par les conditions de son interpellation et son séjour en prison qu’elle a qualifiées d’”inhumaines”. “J’ai été interrogée pendant plusieurs heures sur mon activisme politique et sur les raisons de ma présence à Redeyef. Les agents voulaient savoir de quelle manière j’avais pu entrer dans la ville. Même si je n’avais pas participé à la marche de soutien, j’aurais tout de même été arrêtée. Les autorités auraient trouvé un autre prétexte pour le faire”, a affirmé la militante, dans un entretien accordé à Reporters sans frontières. Depuis sa sortie de prison, Zakia Dhifaoui n’a pas été en mesure de reprendre son poste d’enseignante à Kairouan (Centre)….. En 1991, Moncef Ben M’Rad avait publié un éditorial intitulé “Le courage d’informer”, dénonçant la saisie dont sa publication venait de faire l’objet. “Le numéro 87 de Réalités, qui devait être mis en vente ce jeudi 10 octobre, a été saisi. Le motif officiel invoqué était : ‘la diffamation d’une autorité officielle’. (…) Nous ne pouvons que nous élever avec la plus grande fermeté contre cette dernière saisie ; nous continuons à croire que la Tunisie est notre droit et que l’information objective est notre devoir. Notre combat continue de manière banale car nous ne sommes pas des héros mais des citoyens qui veulent un pays plus libre, plus prospère, plus juste, plus démocratique”, avait écrit le journaliste à l’époque. Rien n’a changé depuis, si ce n’est que la liberté de ton dont faisait preuve Moncef Ben M’Rad est devenue un luxe qui se paie cher.
(Source: “Mouwatinoun” organe du FDTL (Hebdomadaire – Tunis) nr 95)