9 juin 2007

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TUNISNEWS
8 ème année, N° 2573 du 09.06.2007

 archives : www.tunisnews.net


Kamel GHALI: Yasser Ghali : prononcé du jugement en appel Oum Ahmed, Luiza Toscane: JOYEUX ANNIVERSAIRE A GHAITH GHAZOUANI El Maalem: L’omniprésence de Abdelwaheb Abdallah Le Jeune Independant: La Tunisie a enregistré un record de 6,5 millions de touristes en 2006 Bakchich :Amnesty fouette le Maghreb :Droits de l’hommisme par La princesse enchantée Réalités: 2009 approche… Que font nos partis politiques ? AFP:Prisons secrètes de la CIA:39 personnes toujours portées disparues (ONGs) AFP:Prisons secrètes de la CIA en Europe: Dick Marty dévoile vendredi son 2e rapport Le Monde : EnquêteEnlevé par la CIA, torturé en Egypte  


Yasser Ghali : prononcé du jugement en appel

La cour d’appel de Tunis a prononcé son verdict ce jour samedi 09/06/2007 concernant Yasser Ghali : 3 mois de prison ferme ce qui le rend libérable aujourd’hui même après quatre mois et trois semaines de détention. Tout en restant convaincue que Yasser ne méritait pas ces trois mois, le considèrant toujours comme complètement innocent et condamnant sa détention, les agissements policiers en le gardant au secret durant des semaines et en l’obligeant de signer un procès verbal sans lecture ni accord, la famille de Yasser Ghali se sent soulagée, remercie toutes celles et tous ceux qui l’ont soutenue durant cette épreuve de trop et appelle toutes les citoyennes et tous les citoyens et en particulier les personnalités et les personnes morales de la société civile, tous les organismes de la défense des droits humains, toutes les militantes et tous les militants pour la liberté et la démocratie, à continuer de soutenir la famille Ghali pour la libération de son autre fils Hédi GHALI, prisonnier depuis 1990 et condamné en 1992 à perpetuité. Pour la famille GHALI Kamel GHALI Frère de Hédi et Yasser


SOUHAITS UNIVERSELS A TOUS LES NATIFS DU 10 JUIN NOUS SOUHAITONS UN JOYEUX ANNIVERSAIRE A GHAITH GHAZOUANI QUI SE TROUVE A LA PRISON DE MORNAG ET EXIGEONS SA LIBERATION IMMEDIATE

 
ASSOCIEZ-VOUS A NOS VŒUX EN LUI ECRIVANT * Né le 10 juin 1983, Ghaith Ghazouani est célibataire. Il était en deuxième année à l’Université lorsqu’il a été arrêté. Son arrestation remonte au 22 mai 2005 en Algérie. Il a été maltraité pendant sa garde à vue en Algérie puis il a été remis aux autorités tunisiennes. Il a été torturé lors de sa garde à vue au ministère de l’Intérieur : poulet rôti, privation de sommeil, menace de viol et il a été contraint de signer ses aveux. Il a été écroué en vertu des dispositions de la loi antiterroriste et sans cesse transféré de prison en prison. Son procès, plusieurs fois reporté, a fini par se tenir. Il a été condamné à dix ans d’emprisonnement. Son procès en appel, prévu pour le 8 juin, a été reporté au 10 juillet prochain. Son père se bat avec d’autres familles pour la libération de son fils. Il déplore que Ghaith ne puisse poursuivre ses études en prison. On lui a même refusé un dictionnaire ! Oum Ahmed, Luiza Toscane *Adresse en prison : Ghaith Ben Ahmed Ghazouani N°267 Prison de Mornag 2090 Mornag Gouvernorat de Ben Arous, Tunisie  

 
MAGHREB CONFIDENTIEL N° 790 du 07/06/2007
 

TUNISIE Slaheddine Maouia

Après avoir été ambassadeur de Tunisie en Arabie Saoudite, Slaheddine Maouia, un temps écarté, réapparait sur la scène politico-médiatique tunisienne. Il vient d’être nommé à la tête de l’Union des télévisions et radios arabes, qui a son siège dans la capitale tunisienne. Maouia, partisan d’une plus grande ouverture de la presse, s’était fait remarquer en 2001, quand il était ministre des droits de l’homme et de la communication, en publiant une tribune dans « Le Monde » décrivant la presse tunisienne comme « médiocre et insipide ». Cela lui avait valu les foudres de l’ancien « communicator » du président Ben Ali et actuel ministre des affaires étrangères Abdelwahab Abdallah.


L’omniprésence de Abdelwaheb Abdallah

 

 
  Abdelwaheb Abdallah rêve du palais de Carthage, il ne le cache pas, il le montre même bravant la colère de son patron qui peut lui tomber sur la tête à n’importe quel moment! Abdelwaheb Abdellah a du courage, il sait qu’il n’a pas le choix, il doit aller de l’avant au risque de se faire écraser, écrabouiller et terrasser par la foudre benalienne. En parcourant les journaux et les sites officiels tunisiens, notamment La Presse et Infotunisie, on ne peut que rester impressionné par l’omniprésence de cet homme assoiffé de pouvoir. Juste après les activités du Général – Président, on tombe sur Abdelwaheb Abdallah et ses différentes rencontres, déplacements, inaugurations, communications etc…On a l’impression chaque jour que le gouvernement tunisien se résume à un seul ministre, que Abdelwaheb Abdallah est un surhomme, ayant une capacité de travail hors norme, patriotique jusqu’au bout des doigts, travaillant jour et nuit pour le bien de ses concitoyens et de son pays! Mais derrière tous ça, se cache les plans sordides d’un apprenti sorcier, fasciné par le Machiavélisme et le totalitarisme, ne reculant devant rien, allant jusqu’au bout de ses ambitions, dénué de tout principe et à la limite de l’ignoble, cet homme est dangereux pour la Tunisie! Parions (et espérant) qu’il accompagnera dans un jour proche Abderhamen Tlili et Ismail Sahbani dans leur descente aux enfers. Ces deux hommes qui ont osé déclarer un jour leur ambition présidentielle!     El Maalem

 

Sami Ben Gharbia lors de la rencontre d’Amnesty UK du 6 juin 2007

Voici la vidéo de l’intervention de mon complice de Nawaat, Sami Ben Gharbia, lors de la rencontre d’Amnesty International UK sous le thème “Some people think the Internet is a bad thing“.

 

Entre autres, Sami est intervenu pour présenter un rapide bilan, Ô combien sombre, concernant les nombreux internautes à travers le monde qui ont connu la répression pour le fait d’avoir utilisé l’Internet.

 

L’intégralité du WebCast de cette journée du 6 juin 2007 se trouve sur le site d’Irrepressible Info d’Amnesty International UK.

 

Voici également la liste (non exhaustive) des autres intervenants :

          Keynote address – Martha Lane Fox – The state of the internet – Ron Deibert – Repression in the West – Josh Wolf – The power of blog – Yan Sham-Shackleton – Beating the censors – Sheva Nerad – Ethan Zuckerman talks about internet repression (WebCam)

 

 

(Source : le blog d’Astrubal, le 7 juin 2007)

Lien: http://astrubal.nawaat.org/2007/06/07/sami-ben-gharbia-lors-de-la-rencontre-damnesty-uk-du-6-juin-2007/

 

La Tunisie a enregistré un record de 6,5 millions de touristes en 2006 :

L’Algérie, troisième pourvoyeuse derrière la Libye

par Youcef Brahimi L’Algérie a été, en 2006, le troisième fournisseur en touristes de la Tunisie derrière la Libye et la France, a annoncé avant-hier le ministre tunisien du Tourisme, Tijani Haddad. Première destination touristique du sud de la Méditerranée, la Tunisie a attiré 900 000 Algériens contre 1,4 million de Libyens et 1,2 million de Français, sur un total de 6,5 millions de visiteurs, un record absolu pour notre voisin. La part des Algériens représente 7,22 %, les Libyens 21,54 % et les Français 18,46 %. Avec 47,22 %, les trois pays réunis fournissent un peu moins de la moitié des touristes à la Tunisie qui a enregistré une augmentation de 3 % du nombre des touristes étrangers et une progression de 8,6 % des recettes, toujours selon M. Tijani Haddad. Avec plus de 1,2 million de touristes, les Français arrivent en tête des visiteurs occidentaux suivis par les Allemands, les Italiens et les Britanniques. Le marché allemand revient progressivement en haut du classement, au 4e rang derrière le marché algérien, avec près de 600 000 visiteurs en 2006. Traditionnellement principale pourvoyeuse de touristes aux côtés de la France, l’Allemagne fournissait annuellement plus de un million de touristes, un chiffre qui a chuté à quelque 300 000 visiteurs à la suite notamment de l’attentat de Djerba qui avait coûté en avril 2002 la vie à 21 personnes : 14 touristes allemands, 5 Tunisiens et 2 Français. Les Maghrébins ont, pour leur part, largement contribué au record de fréquentation de 2006 avec 2,3 millions de visiteurs, soit une proportion de 35,38 % du chiffre global. Pour l’année en cours, les spécialistes prévoient une progression de 20 à 30 % des touristes algériens dont le nombre pourrait atteindre 1,2 million.
 
(Source: Le Jeune Independant « Algerie » le 09 juin 2007)


Amnesty fouette le Maghreb

Droits de l’hommisme

 
par La princesse enchantée Le dernier rapport d’Amnesty International (près de 400 pages !) sur la situation des droits de l’homme dans le monde vient de sortir. Le Maghreb s’en tire plutôt… mal. Algérie. Fichtre ! L’Algérie est sérieusement épinglée par Amnesty International dont la délégation s’est vue refuser l’accès au pays. Pour faire simple, la promulgation de nouvelles lois d’amnistie a renforcé l’impunité dont bénéficient les responsables d’atteintes flagrantes aux droits humains. Du coup, critiquer les dérives des forces de sécurité pendant la guerre civile est devenu une infraction pénale. Et toujours pas le début du commencement d’une enquête sur les nombreux cas de disparitions forcées dans les années 90. Par contre, Réconciliation nationale oblige, quelques 2 200 “repentis” ont été libérés. Enfin, les journalistes, syndicalistes et défenseurs des droits humains sont harcelés par les forces de l’ordre, quand ce n’est pas embastillés ! Tunisie. Le régime du “Zinochet” local, alias le président Ben Ali, continue de réprimer tous azimuts. Les abus sont particulièrement nombreux dans « la guerre contre le terrorisme » que livrent les forces de l’ordre aux méchants barbus qui veulent installer un califat au Maghreb : arrestations arbitraires, tortures, condamnations à de lourdes peines de prison… Zinochet et ses sbires n’y vont pas de main morte, surtout contre les barbus suspectés d’appartenir au GSPC. Quant à la liberté d’expression, elle reste ridicule. Seule lueur d’espoir : l’Union Européenne a protesté plusieurs fois face à tant de dérives. Libye. Le réchauffement des relations diplomatiques avec le grand Satan américain et l’Union européenne semble avoir eu un petit effet bénéfique sur les droits de l’homme : même si la liberté d’expression et d’association reste dérisoire, plus de 150 prisonniers politiques ont recouvré la liberté. Pour autant les autorités libyennes ont la gâchette facile. Au moins 12 personnes ont été tuées en février 2006 par des tirs des forces de l’ordre lors d’une manifestation contre les fameuses caricatures de Mahomet. Idem avec le décès, probablement par balle, d’un prisonnier incarcéré à la prison d’Abou Salim lors d’une mutinerie. C’est tout de même mieux qu’en 1996, où 1 200 prisonniers avaient été tués dans ce même centre de détention lors d’une jacquerie… Maroc. Bien que le royaume enchanté soit le mieux placé en matière de droits de l’homme, il lui reste du chemin à parcourir pour prétendre devenir une démocratie. Les Sahraouis qui militent pour un référendum d’autodétermination au Sahara occidental continuent d’être malmenés et condamnés à de la prison ferme pour leurs opinions politiques. Les islamistes sont arrêtés à tour de bras et condamnés à de lourdes peines sur les bases d’une loi anti-terroriste floue. Mais les plus mal lotis sont les migrants subsahariens qui, outre leurs expulsions illégales, subissent parfois des sévices sexuels. Mauritanie. Pas grand-chose à signaler si ce n’est qu’Amnesty relève que les pratiques esclavagistes et le travail forcé n’ont pas disparu. Ah si, quand même, quelques dérives en matière de lutte anti-terroriste : « au moins 15 personnes ont été arrêtées de manière arbitraire et accusées d’appartenance à une organisation terroriste ». Plusieurs sont susceptibles d’être des prisonniers d’opinion. (Source : « Bakchich » (Site d’infos – France), le 5 juin 2007) Lien: http://www.bakchich.info/article1235.html


2009 approche… Que font nos partis politiques ?

 
Par Zyed Krichen Dans un peu plus de deux ans les Tunisiens seront appelés aux urnes pour élire le Président de la République et leurs représentants à la Chambre des Députés. Que nous préparent les partis politiques, au pouvoir et à l’opposition, pour faire de ces élections un véritable rendez-vous démocratique ? * * * * Dans les jeunes démocraties, comme dans les vieilles, l’élection est le moment majeur de la vie politique. Les partis politiques ne vivent pratiquement que pour cela et de cela. Qu’en est-il dans notre pays ? La Tunisie compte neuf partis politiques légaux. Un seul au pouvoir depuis 1956. Les huit autres se partagent en quatre groupes. Le premier regroupe le Parti de l’Unité Populaire, l’Union Démocratique Unioniste, le Parti Social Libéral et le Parti des Verts pour le Progrès. C’est “l’Alliance démocratique”, taxée par ses adversaires d’être un soutien inconditionnel au régime, mais elle se présente comme un espace de soutien au projet de société du Président Ben Ali tout en restant vigilante et critique quant aux politiques gouvernementales. Le second se réclame d’une critique radicale du pouvoir et se place sous l’emblème du Mouvement du 18 octobre. Il se compose, outre le Parti Démocratique Progressiste et le Front Démocratique pour le Travail et les Libertés, d’un ensemble de personnalités et de mouvances islamisantes et gauchisants. Son objectif, pas toujours déclaré, est d’être, à lui seul, une alternative au régime en place. Le troisième groupe est composé du nouveau partenariat entre le Mouvement Ettajdid et des centaines d’indépendants de gauche. Ils aspirent à fonder un parti progressiste et démocratique le plus large possible. Le coup d’envoi public sera le congrès constitutif de ce nouveau mouvement, à la fin de juillet 2007. L’ambition déclarée de ses dirigeants est d’être, à terme, un parti qui pèse réellement sur la scène publique. Le dernier groupe ne contient que le Mouvement des Démocrates Socialistes, qui est devenu l’ombre de ce grand parti (aux normes tunisiennes cela s’entend) des années 1980. Le MDS est englué depuis plus de dix ans dans des querelles futiles et n’eût été sa légitimité historique, il aurait probablement disparu de l’échiquier politique. Chose curieuse qui peut hérisser les poils de tout observateur non initié à la chose publique tunisienne : aucun groupe, aucune alliance, aucun parti ne se présente en 2009 en vue de gagner les élections ! C’est comme si nos opposants étaient les derniers à être fidèles au concept fondateur des Jeux Olympiques : l’essentiel est de participer. Et même cette participation est souvent incomplète. Car hormis le MDS et le PUP aucun parti n’a présenté jusqu’ici des candidats dans toutes les circonscriptions électorales. Tous les partis politiques n’ont pas vocation à être des partis dominants, mais de là à se comporter comme un “club” d’amis ou à batailler dur pour les places réservées d’offices aux listes minoritaires… Il n’y a pas beaucoup de pays au monde où l’on voit un pareil spectacle. On peut toujours disserter sur l’emprise de “l’Etat RCD” sur la vie publique. Le parti au pouvoir n’est pas exempt de tout reproches, loin de là. Mais le rendre l’unique responsable de l’incurie de tous les partis politiques de l’opposition réunis, c’est insulter l’intelligence de tout citoyen. Qui empêche, aujourd’hui, un parti ou une alliance de proclamer sa volonté de gagner les élections de 2009? Qui empêche un parti de présenter un programme d’alternance de gouvernement ? Justement, là est le problème. Ayant intériorisé l’idée de la déconfiture avant le combat, plus aucun parti de l’opposition, depuis vingt ans, ne se pose comme voulant conquérir le pouvoir. Du coup les partis politiques se sont totalement désintéressés des questions qui taraudent leurs concitoyens. Que proposent-ils à propos de l’Ecole, de la Santé, des régimes sociaux, du chômage des jeunes, du déséquilibre régional, de l’environnement, des rapports avec l’Union Européenne ? On a beau scruter, on ne voit que certaines pétitions de principe ou des slogans sans contenu. N’étant pas concerné par la conquête du pouvoir, on n’est pas dans la démarche politique rationnelle : défendre des propositions aujourd’hui pour les appliquer demain. On comprend alors pourquoi certains partis se sont “spécialisés” dans la critique de la politique américaine au Moyen-Orient, d’autres sont devenus des “professionnels” de la contestation et les plus sérieux risquent de sombrer dans l’intellectualisme. De toutes façons, tous ont oublié que leur rôle est d’apporter des réponses aux problèmes socio-économiques du citoyen/électeur. Que fait pendant ce temps-là le Rassemblement Constitutionnel Démocratique ? Il défend le programme du Président Ben Ali et l’action du gouvernement. Cela fait, incontestablement, partie de son rôle. Mais que propose-t-il de plus au pays ? Malheureusement rien. Il n’y a pas une seule proposition qu’on peut estampiller RCD et qui fait aujourd’hui débat. Pourtant le parti au pouvoir ne manque ni de compétences humaines ni de moyens financiers. C’est cette léthargie dans laquelle baignent tous les partis politiques du pays qui fait qu’il y ait une telle rupture entre la jeunesse et les forces vives du pays d’un côté et la classe politique censée les diriger et les encadrer. Cet état de fait n’exonère en rien les médias de masse, et surtout notre télévision publique qui refuse de jouer son rôle de vecteur de pluralisme. Confiner le débat politique à ces quelques malheureuses minutes de propagande électorale quand les citoyens ne sont pas encore rentrés chez eux, c’est le condamner à mort. Il va sans dire que multiplier les débats contradictoires sans aucune exclusive et en direct ne peut qu’aguerrir ces partis en gestation. Pour cela il faudrait que notre télévision comprenne définitivement qu’elle est au service du pays et non du gouvernement. L’échéance électorale de 2009 est dans moins de trente mois. Il est encore temps de proposer à nos concitoyens une véritable joute démocratique. Sinon la déception de la jeunesse tunisienne n’en sera que plus grande. (Source : « Réalités » (Magazine hebdomadaire – Tunis), N° 1119 du 7 juin 2007)


Prisons secrètes de la CIA:

39 personnes toujours portées disparues (ONGs)

 
LONDRES, 6 juin 2007 (AFP) – Six organisations de défense des droits de l’Homme ont publié jeudi les noms de 39 personnes qui ont vraisemblablement été détenues dans les prisons secrètes de la CIA, mais qui n’ont depuis donné aucun signe de vie alors que le gouvernement américain affirme que ces prisons sont vides. Les organisations britanniques Amnesty International, Cageprisoners et Reprieve, et américaines Human Rights Watch (HRW), Center for Constitutionnal Rights (CCR) et Centre for Human Rights and Global Justice (CHRGJ), livrent ces noms dans un rapport de 21 pages intitulé: « Off the Record: US Responsibility for Enforced Disappearances in the +War on Terror+ ». Cette liste donne l’identité de quatre personnes considérées comme disparues pour la première fois. Elle fournit des détails (noms, nationalités…) sur 39 personnes originaires d’Egypte, du Kenya, de Libye, du Maroc, du Pakistan et d’Espagne. « +Off the Record+ souligne les aspects du programme de détention de la CIA que le gouvernement américain a activement cherché à dissimuler, comme les endroits où les prisonniers ont pu être détenus, les mauvais traitements qu’ils ont subis, et les pays dans lesquels ils ont pu être transférés », ont expliqué les six organisations. Le président américain George W. Bush avait reconnu en septembre l’existence du programme de prisons secrètes, mais l’administration avait précisé qu’après le transfert de 14 détenus soupçonnés d’être des membres importants d’Al-Qaïda vers Guantanamo (Cuba), la CIA ne détenait plus de prisonniers. Le rapport révèle aussi, selon les organisations, que des parents des personnes emprisonnées, dont les épouses ou les enfants parfois âgés de seulement 7 ans, ont également été détenus en secret. Il cite l’exemple de Khalid Sheikh Mohammad, considéré comme le principal responsable des attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, dont les enfants âgés de 7 et 9 ans avaient été arrêtés en septembre 2002. « Selon des témoins, ils ont été placés dans un centre de détention pour adultes pour au moins quatre mois pendant que des agents américains les questionnaient sur leur père », affirme-t-il. « Le devoir des gouvernements de protéger les gens des actes de terrorisme n’est pas en question. Mais capturer des hommes, des femmes et même des enfants, et les placer dans des endroits secrets sans les protections les plus basiques l’est sans aucun doute. L’administration américaine doit mettre une fois pour toute un terme à cette pratique illégale et moralement répugnante », a commenté Claudio Cordone, directeur de recherche à Amnesty. Amnesty, le CCR et International Human Rights Clinic of New York University School of Law ont par ailleurs annoncé avoir déposé jeudi une plainte devant une cour fédérale américaine en vertu de la loi sur la liberté de l’information pour obtenir des renseignements sur les détenus disparus. L’existence des prisons secrètes de la CIA, révélée en 2005 par le Washington Post, avait suscité une vive émotion à travers le monde, et plus particulièrement en Europe, où deux enquêtes ont montré qu’une vingtaine de pays avaient coopéré plus ou moins activement au programme.


Prisons secrètes de la CIA en Europe: Dick Marty dévoile vendredi son 2e rapport

 
AFP, le 7 juin 2007 à 14h27 STRASBOURG (Conseil Europe), 7 juin 2007 (AFP) – Le rapporteur du Conseil de l’Europe Dick Marty dévoile vendredi son 2e rapport sur les prisons secrètes de la CIA en Europe, au lendemain de la publication, ce jeudi, par six organisations de défense des droits de l’homme, des noms de 39 personnes vraisemblablement encore détenues dans ces prisons. Un an après les révélations du sénateur suisse sur les transferts illégaux de terroristes présumés à travers l’espace aérien européen, la Commission des questions juridiques et des droits de l’homme qu’il préside se prononcera vendredi à Paris sur ce texte avant qu’il ne soit débattu le 27 juin à Strasbourg pendant une session plénière de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Dans un document rendu public jeudi, les organisations britanniques Amnesty International, Cageprisoners et Reprieve, et américaines Human Rights Watch (HRW), Center for Constitutionnal Rights (CCR) et Centre for Human Rights and Global Justice (CHRGJ), ont publié les noms de 39 personnes qui n’ont depuis donné aucun signe de vie alors même que le gouvernement américain affirme que les prisons de la CIA sont vides. La liste donne notamment l’identité de quatre personnes considérées comme disparues pour la première fois et fournit des détails (noms, nationalités, etc.) sur les 39 personnes originaires d’Egypte, du Kenya, de Libye, du Maroc, du Pakistan et d’Espagne. Dans son premier rapport présenté en juin dernier devant le Conseil de l’Europe, Dick Marty, 62 ans, ancien procureur général du canton suisse du Tessin, avait épinglé 14 Etats européens pour leur implication, voire leur collusion, concernant les vols secrets de la CIA. La Pologne et la Roumanie y étaient en outre citées pour avoir abrité des centres de détention clandestins, allégations rejetées par les deux pays. Les Etats-Unis avaient reconnu en septembre dernier l’existence de prisons secrètes américaines hors de leur territoire, confortant le Conseil de l’Europe dans son enquête. Le rapport devrait faire de nouvelles révélations, Dick Marty ayant déclaré le mois dernier à un quotidien suisse avoir recueilli des témoignages d’agents de la CIA. Ces témoignages permettront de « renforcer les affirmations du premier rapport sur les activités secrètes de la CIA en Europe », selon le rapporteur. « A mon avis, des accords secrets entre les gouvernements occidentaux ont été signés après le 11 septembre 2001 pour donner plus de pouvoirs à leurs services de renseignements. C’est ce qui explique pourquoi certains pays sont hostiles à mes investigations », avait-il ajouté. Le parlementaire suisse avait dénoncé précédemment l’absence de coopération de plusieurs Etats européens, dont l’Italie, l’Allemagne, la Pologne et la Roumanie.  

Enquête

Enlevé par la CIA, torturé en Egypte

 
LE CAIRE ENVOYÉE SPÉCIALE Quarante-quatre ans à peine, mais l’homme en paraît soixante. L’imam égyptien Oussama Moustafa Hassan Nasr, plus connu sous le nom d’Abou Omar, se décrit lui-même comme un « vieillard brisé, le corps en ruine », un homme qui « mange trop, ne désire plus sa femme, gavé aux tranquillisants ». Pas une nuit sans qu’il ne se « réveille en hurlant », réminiscence du cauchemar bien réel, commencé avec son enlèvement dans une rue de Milan, en Italie, le 17 février 2003, et qui s’est poursuivi par d’interminables séances de torture, durant quatre ans, dans les geôles égyptiennes. Vendredi 8 juin, Abou Omar aurait dû être le témoin-clé du procès historique de 26 agents de la CIA (Agence centrale de renseignement) et de plusieurs anciens dirigeants des services secrets militaires italiens, jugés pour les transferts illégaux de détenus dans le cadre de la lutte américaine contre le terrorisme. Les juges italiens n’entendront pas l’histoire de l’imam. Le consulat italien du Caire lui a refusé son visa, ses papiers de réfugié politique en Italie, obtenus en 1997, ont expiré alors qu’il était en détention et les autorités égyptiennes l’ont inscrit sur la liste des citoyens interdits de voyage à l’étranger. « Les Nations unies, le Conseil de l’Europe, les ONG professent de beaux principes qui s’appliquent aux Européens et aux Occidentaux. Mais quand il s’agit d’Arabes et de musulmans, tout cela n’est plus qu’un peu d’encre sur du papier, déplore Abou Omar. Justice ne sera pas rendue. Le gouvernement italien s’abrite derrière le « secret d’Etat ». Les commandos de la CIA ne comparaîtront pas. Ce procès a pris une ampleur internationale, mais cela ne me concerne pas. Le scandale a éclaté quand le chef des services de renseignement italiens en Irak, Nicola Calipari, a été tué par les Américains (en 2005). Les Italiens ont voulu leur renvoyer une gifle ; ils se sont servis de mon cas, comme on sort une carte maîtresse dans un jeu de poker, sans aucune considération pour mes souffrances. » Ses chevilles portent encore les stigmates des anciennes entraves. Soulevant sa dichdacha (vêtement), il exhibe les marques des brûlures à l’électricité sur ses bras et ses jambes. A cause des coups répétés sur le visage, Abou Omar n’entend plus d’une oreille. « Les tortures physiques s’effacent avec le temps, assure-t-il, mais les tortures psychologiques sont des machines à destruction. » Il en veut pour preuve le cas de Khaled Masri, un Libanais d’origine allemande, enlevé dans des conditions similaires en Macédoine, fin décembre 2003, pour être « interrogé » pendant six mois dans une prison afghane. Il y a trois semaines, Masri a mis le feu à un supermarché. Il est maintenant dans un asile d’aliénés en Allemagne. « On est tous devenus fous. La seule différence entre Masri est moi, c’est la religion qui m’a aidé à tenir le cap, même si l’officier égyptien m’a ri au nez quand je lui ai demandé un Coran. » Abou Omar se proclame « salafiste », une pratique très rigoriste de l’islam, depuis l’âge de 22 ans. En racontant son itinéraire, sa fuite d’Egypte jusqu’en Italie, en passant par la Jordanie, le Yémen, le Pakistan et l’Albanie, il est conscient que ces destinations ont pu susciter les soupçons des services occidentaux. Des djihadistes, il en a rencontré. Mais il affirme avoir toujours rejeté « leur idéologie et leurs méthodes ». « Je ne sais pas me servir d’une arme, ajoute-t-il : je me suis enfui d’Egypte avant mon service militaire. » Né en 1963 dans le quartier de Mahram Beik, à Alexandrie, Abou Omar étudie le droit et se passionne pour la politique. Il adhère au Wafd, un parti libéral, où il côtoie un certain Ayman Nour, unique et malheureux concurrent de Hosni Moubarak lors de la dernière élection présidentielle de 2005, jeté en prison peu après sa défaite, et dont ses proches attendent toujours la libération. Très vite, Abou Omar préfère l’engagement religieux et devient l’un des plus jeunes prédicateurs d’Alexandrie. Ses prêches n’épargnent pas le régime, ce qui vaut à l’imam, alors âgé de 25 ans, son premier séjour en prison et ses premières séances de torture. Six mois dans les geôles de Tora, au Caire, le dégoûtent pour toujours de son pays. C’est ce qui le décide à fuir, par la Jordanie, pour rejoindre le Yémen, puis Peshawar, au Pakistan. Il raconte avoir alors avoir travaillé pour une organisation humanitaire koweïtienne, au service de réfugiés afghans. « Peshawar était la base arrière des djihadistes, notamment égyptiens. Ces derniers m’ont menacé de mort à plusieurs reprises, parce que je refusais leur combat. C’est la raison de mon départ pour l’Albanie, en 1992 », dit-il. Le jeune homme s’engage alors dans une autre organisation, la Wakalat al-insaniya lil ghaouth wal taamir (Agence de sauvetage et de reconstruction), financée par l’Arabie saoudite. Au bout d’un an, il épouse une Albanaise, qui lui donnera deux enfants, et se lance dans la vente « de viande et d’alimentation ». « Ce parcours, dit-il, les Américains le connaissent depuis longtemps. En 1994, ils m’ont arrêté et interrogé au côté de la police albanaise. En tant que commerçant, j’avais beaucoup de contacts avec les Arabes et les musulmans venus se battre en Bosnie. Les policiers m’ont dit : « Tu restes et tu deviens notre informateur, sinon tu pars. » J’ai plié bagage avec ma famille et suis parti en Allemagne, puis en Italie où j’ai réussi à obtenir le statut de réfugié politique. » A Milan, Abou Omar reprend ses fonctions d’imam dans une mosquée locale. Ses prêches sont aussi virulents que par le passé et s’attaquent cette fois à la politique américaine au Moyen-Orient. « J’avais le pressentiment que quelque chose allait m’arriver. Une caméra avait été installée devant l’entrée de la mosquée filmant les allées et venues de tous les fidèles. Je recevais des coups de téléphone bizarres. J’avais l’impression d’être suivi. » Jusqu’au jour de l’enlèvement : des hommes débarquent d’un van blanc, l’empoignent, le ligotent, le bâillonnent, l’allongent à l’arrière du véhicule. Il était midi à Milan. Le lendemain à l’aube, il débarque au Caire. Morgan Mohammed, un entrepreneur égyptien émigré à Milan et qui fréquentait la même mosquée, a été appréhendé par la police égyptienne le 28 septembre 2003, à sa sortie d’avion, alors qu’il venait d’atterrir au Caire. Lui n’avait jamais eu d’ennuis avec le gouvernement. Il a passé dix mois en prison. Aujourd’hui encore, il ne comprend pas pourquoi. « On m’a demandé si je finançais Abou Omar et on m’a accusé d’entraîner mes ouvriers à devenir des moudjahidines pour l’Irak : c’était une entreprise de restauration de bâtiment ! », confie-t-il timidement. Le 4 avril 2004, Abou Omar est déclaré innocent et libéré « à condition (qu’il) se taise ». « En partant, j’ai vu un document sur le bureau de l’officier, jure-t-il. C’était une feuille divisée en deux parties. La première me concernait. Il était écrit : « libéré, mais ne doit pas ouvrir la bouche pour ne pas mettre le gouvernement italien dans l’embarras » ; la deuxième était une liste d’une dizaine d’Arabes résidant en Italie « à envoyer en Egypte », probablement de la même manière que j’y avais été envoyé. C’est pourquoi j’ai décidé de parler. » Quelques mots aux médias. Retour en prison. Un officier lui explique qu' »il y restera le temps de se faire oublier ». Abou Omar a été libéré le 11 février 2007. Il répète qu’il a tout perdu et qu’il n’attend rien du procès de Milan. Son seul souhait : « Quitter l’Egypte. » Cécile Hennion (Source : « Le Monde » (Quotidien – Tunis), le 8 juin 2007)

 

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