AISPP: Procès du 6 février
Liberté et Equité: communiqué
Amnesty International: Tunisia: Amnesty International sends observer to appeal hearing of key terrorism trial Le Temps: Lois et politiques anti-terroristes, études de cas (France – Tunisie) L’Expression: Autrement dit Islam et démocratie Le Temps: Mémoire collective : janvier 1974:La Déclaration de Djerba :Un acte mort-né (1 -3)
Réalités : Youssef Alouane nous manquera tant!
Infosud: Une charte arabe des droits de l’homme controversée
AFP: Avertissement du président de la Cour de cassation turque sur le voile AFP: Le tabac pourrait tuer un milliard de personnes durant ce siècle (OMS)
Liberté pour tous les prisonniers politiques Liberté pour Abdallah Zouari, le journaliste exilé dans son propre pays Association Internationale de Soutien aux prisonniers politiques 43 rue Eldjazira, tunis e-mail : aispptunisie@yahoo.fr Tunis, le 6 février 2008
AMNESTY INTERNATIONAL
Media Advisory
8 February 2008
Tunisia: Amnesty International sends observer to appeal hearing of key terrorism trial
Friday 8 February 2008: Amnesty International trial observer Denys Robiliard, formerly President of the Blois bar in France, will be attending the start of a second appeal hearing at the Tunis Appeal Court concerning the controversial and high profile terrorism case of the ‘Soliman Group’.
Amnesty International has raised serious concerns about the fairness of the original trial – notably the failure of the court to consider evidence of the use of torture and ill-treatment of the defendants – and about the imposition of the death penalty on two of the co-defendants.
AI spokespeople are available for interview
Trial Observer (Denys Robiliard) will be available from Tunisia for interviews (in French only) Said Haddadi, Amnesty International’s researcher at the Middle East and North Africa Programme (Arabic, French and English) – from London Hassiba Sahraoui, Deputy Programme Director for the Middle East and North Africa Programme (Arabic, French and English) – from London
For more information and to arrange an interview please contact:
Nicole Choueiry, Middle East and North Africa Press Officer: +44 (0) 207
413 5511, +44 (0) 7831 640 170
Background on the Soliman Group case
Between December 2006 and January 2007 30 men were arrested in connection with armed clashes between security forces and members of an armed group named the Soldiers of Assad Ibn al-Fourat, which left 14 dead, including two from the security forces. The Tunisian authorities said five Tunisians and a Mauritanian led the group after entering from Algeria, where they received training from the Salafist Group for Preaching and Combat (GSPC), an armed group opposed to the Tunisian government which now calls itself al-Qaida in the Islamic Maghreb.
In December the Tunis Court of First Instance sentenced two to death, eight to life imprisonment, and the rest to prison terms ranging between five and 30 years. They were convicted on an array of charges, including murder, use of firearms, illegal possession of weapons and explosives and belonging to a terrorist organization. The sentences were handed down after four hearings during which the court systematically failed to refer the defendants for medical examination, as requested by their lawyers or to allow lawyers sufficient time to examine the case documents. In the third session, which took place on 15 December 2007, the defendants were beaten up in court by security when they showed solidarity with their lawyers who decided to leave the court when they were denied further time to look at the case files.
ENDs
Editorial
Autrement dit
Islam et démocratie
signé Ridha KEFI
À en croire certains intellectuels laïques, l’islam n’est pas soluble dans la démocratie. Il y aurait même une inadéquation entre islam et démocratie. Car, disent-ils, l’islam, comme foi et pratique, s’oppose aux principes fondateurs de toute démocratie, à savoir l’égalité (entre les hommes, mais aussi entre l’homme et la femme) et la liberté de conscience.
N’étant pas islamologue, ni même historien, je ne me hasarderai pas dans un débat académique sur cette soi-disant consubstantialité de l’islam et du despotisme, thèse que certains de nos intellectuels n’hésitent pas à défendre pour expliquer les difficultés qu’éprouve aujourd’hui le monde musulman à s’inscrire volontairement – et sans pressions extérieures – dans une dynamique véritablement démocratique.
Je me contenterai donc d’apporter quelques nuances à ce jugement qui me paraît aussi rapide qu’excessif, un peu facile aussi, car il confond les conditions historiques, politiques et économiques qui déterminent l’évolution d’une société et les fondements même de son identité : sa culture et sa spiritualité.
Que l’histoire du monde musulman ait été dominée par une unique forme de gouvernance, le despotisme en l’occurrence, qui perdure d’ailleurs dans de nombreuses contrées majoritairement musulmanes, n’autorise pas à établir un lien de causalité entre islam et despotisme. L’histoire des mondes chrétien, bouddhique ou hindouiste n’a pas été épargnée, elle non plus, par ce même despotisme que l’on qualifie un peu abusivement, après Hegel et Marx, d’«oriental».
Souvenons-nous : jusqu’à il y a quelques décennies, l’Occident judéo-chrétien était écrasé sous le joug de régimes tyranniques d’un autre âge (Hitler, Mussolini, Franco, Somoza…). La plupart de ces régimes, qui ont déclenché deux guerres mondiales et causé des dizaines de millions de morts, se réclamaient même tapageusement du christianisme.
Plus proche de nous, et jusqu’à la chute du mur de Berlin, en 1989, une grande partie de l’Europe, celle de l’Est en l’occurrence, était soumise à des régimes totalitaires. Mais aucun penseur n’a osé établir une corrélation entre l’église orthodoxe et la survivance de la dictature, sachant que la première a joué un rôle déterminant, notamment en Pologne, dans le combat contre la seconde.
De même, des formes résiduelles de dictature persistent encore aujourd’hui dans de nombreux pays non musulmans, qu’il s’agisse de la Russie de Poutine, de la Chine post-communiste ou de certains autres pays d’Asie (Corée du Nord…).
On remarquera aussi que des formes plus ou moins évoluées de démocratie représentative ont pu s’implanter dans certains pays musulmans ou à majorité musulmane. On pense notamment à la Turquie, à la Malaisie, à l’Indonésie et même à l’Iran, avec quelques réserves sur la nature théocratique du régime en place dans ce pays. Ce sont là, il faut le rappeler, les quatre pays musulmans les plus peuplés, puisqu’ils représentent à eux seuls quelque 400 millions d’âmes.
Mieux : certains de ces pays ont été gouvernés par des femmes, notamment la Turquie et la Malaisie. Ce qui tend à démontrer qu’il n’y a pas une inadéquation de principe entre islam et démocratie.
Ces précisions étant faites, on doit cependant admettre que le monde musulman présente des carences criardes de développement : arriération économique, inégalités sociales, taux d’analphabétisme élevé et faible contribution aux avancées scientifiques et technologiques modernes, sans parler de la persistance de tensions politiques et de formes extrêmes de fondamentalisme religieux.
Ces carences tiennent moins à la religion en tant que telle qu’à l’évolution historique et politique des sociétés musulmanes, qui n’ont pas toutes réussi leur processus de décolonisation, passant souvent d’un joug (extérieur) à un autre (intérieur) et laissant des pans entiers de leurs populations dans la pauvreté et l’ignorance.
Il ne s’agit donc pas de rejeter l’islam comme une religion rétrograde responsable de l’arriération des musulmans et de leur incapacité à adopter les principes démocratiques. Il s’agit plutôt de réformer la société musulmane et les modes de gouvernance qui y sont à l’œuvre, de manière à faciliter son intégration dans les évolutions démocratiques en cours dans le reste du monde. L’islam sera alors contraint d’évoluer lui aussi, dans ses dogmes et ses pratiques, afin d’être au diapason des progrès réalisés par ses adeptes. Le christianisme et le bouddhisme, pour ne citer que les deux autres grandes religions universelles, sont déjà passés par là.
(Source : « L’Expression » (hebdomadaire – Tunis), n° 17 du 8 février 2008)
Mémoire collective : janvier 1974
La Déclaration de Djerba :Un acte mort-né (1)
I – L’enthousiasme
Il y a 34 ans, les Tunisiens étaient pris de court par cet événement que fut l’annonce à travers les médias, d’une union de la Tunisie avec la Libye baptisée « République Arabe Islamique ».
On se frottait les yeux, on se pinçait, pour réaliser qu’il s’agissait d’une réalité et non d’un rêve, tellement cette nouvelle était inattendue.
En fait, une telle union n’est pas si irréalisable qu’on le pense. D’autant plus que beaucoup de Tunisiens ont des origines libyennes, et que la Tripoli ou la Tripolitaine faisait partie intégrante du Maghreb.
Il y a, cependant, la main-mise du colonisateur sur cette partie de l’Afrique qui a faussé les données et brouillé les cartes.
Les frontières avaient été plusieurs fois chamboulées entre les pays du Maghreb, en fonction des intérêts des uns et des autres parmi les colonisateurs, notamment italiens et français qui se sont partagés le gâteau à leur gré.
De même que durant l’hégémonie turque, l’empire Ottoman considérait les pays du Maghreb comme étant des provinces turques.
Des villes étaient tantôt rattachées à la Libye, tantôt à la Tunisie telle que l’Ile de Djerba qui faisait partie de la Tripolitaine jusqu’au 16è siècle.
Durant la période coloniale, les militants étaient favorables à l’idée du grand Maghreb car ils étaient tous solidaires, fussent-ils Algériens, Marocains, Libyens ou Tunisiens.
Ce fut le colonisateur qui pratiquait constamment la politique : diviser pour mieux régner.
Au fur et à mesure que les pays du Maghreb étaient libérés du joug du colonialisme, les nouveaux Etats s’occupaient, chacun de son côté, à résoudre les problèmes dûs aux multiples ingérences du colonisateur qui ne s’intéressait qu’à son propre intérêt au détriment de l’intérêt général du pays.
Ces problèmes différaient d’un pays à l’autre. Sur le plan social, économique ou politique.
Cela dit, l’idée de l’Union du Maghreb revenait toujours sur le tapis, au cours des rencontres ou congrès entre les chefs d’Etats maghrébins. Bourguiba ressassait ce thème du grand Maghreb arabe depuis l’aube de l’indépendance.
Déjà en janvier 1957, un trait de fraternité fut signé entre la Tunisie et la Libye qui avait alors encore à sa tête le roi Idriss Essenoussi.
Le leader Bourguiba rappelait souvent dans ses discours, ses origines libyennes, son aïeul étant originaire de Misrata, disait-il, toujours.
Quand le colonel Kadhafi accéda au pouvoir en 1969, il avait à peine trente ans.
Il était féru du nationalisme arabe, le dada du président égyptien Jamel Abdennasser.
Cependant, celui-ci était pour la grande union du monde arabe, y compris le Maghreb qui, d’après-lui en faisait partie intégrante.
Kadhafi, encore jeune à l’époque et nassérien convaincu, déclarait à sa prise du pouvoir, qu’une union maghrébine risquait de retarder le processus de l’unité arabe.
Or, au fil du temps, il commença à changer d’avis, surtout après l’échec du projet d’union avec l’Egypte annoncé en 1972.
L’idée d’une union de la Libye avec les pays du Maghreb, dont notamment la Tunisie, commença à germer dans l’esprit du colonel Kadhafi.
Toutefois, l’idée d’une union entre l’Algérie et la Libye fut suggérée par le colonel lors de sa rencontre avec Boumédiene à Hassi Messaoud.
Bourguiba qui eut vent de ce projet encore en gestation, se formalisa qu’il n’en fût même pas informé.
Ce qui l’incita à agir auprès du colonel Kadhafi pour le résoudre à abandonner un tel projet.
A l’occasion de la fête de la révolution libyenne, il rendit visite au colonel dans le dessein, non seulement de l’en dissuader, mais aussi de l’amener à concrétiser une union avec la Tunisie.
Le colonel le prenant au mot émit le désir de venir en Tunisie en visite officielle, par l’intermédiaire de Mohamed Masmoudi, alors ministre des Affaires étrangères.
Il débarqua le 11 janvier 1974 à Djerba, où il fut reçu par un membre du gouvernement tunisien et passa la nuit à l’hôtel Ulysse.
Le rendez-vous de sa rencontre avec Bourguiba ayant été fixé au 12, celui-ci arriva à cette date accompagné d’une délégation officielle.
Arrivé à l’hôtel Ulysse, Bourguiba fut directement reçu par le colonel Kadhafi qui demanda à rester avec lui en tête à tête.
L’entretien dura une heure à peu près. Puis, en présence de la délégation qui attendait à l’écart, la déclaration rédigée vraisemblablement par le colonel lui-même sur un papier à en-tête de l’hôtel fut lue à l’assistance par le ministre des Affaires étrangères Mohamed Masmoudi.
« Les deux pays formeront une seule république : la République arabe islamique, dotée d’une seule constitution, d’un seul drapeau, d’un seul président, d’une seule armée et des mêmes organes exécutif, législatif et judiciaire. Un référendum sera organisé le 18 janvier 1974 ».
L’union était signée !
Selon les documents, Bourguiba était président de la République Arabe Unie et Kadhafi vice-président et chef d’état-major. Il y avait également des ministres tunisiens et libyens.
L’après-midi, les médias annonçaient cette nouvelle et le ministre des Affaires étrangères lut une seconde fois la déclaration de l’union sur les trois radios tunisiennes : Tunis, Sfax et Monastir.
Des jeunes sortaient pour fêter l’évènement à travers les rues de la capitale en scandant : « Allahou Akbar », « Vive l’union ».
(A suivre)
Ahmed YOUNES
(Source : « Le Temps» (Quotidien – Tunis), le 29 janvier 2008)
Mémoire collective : Janvier 1974 : La Déclaration de Djerba: un acte mort-né (2)
II- La déception
Bourguiba de retour de Djerba, fit la déclaration suivante à l’aéroport de Tunis-Carthage:
« Cette journée est historique, la « République Arabe Islamique » étant appelée à avoir un poids considérable.
Nous exprimons l’espoir de voir l’Algérie, la Mauritanie et le Maroc se joindre à nous. Nous avons décidé au début, d’organiser un référendum pour le 18 janvier 1974.
Cependant, étant donné que la procédure du référendum exige un délai, y compris pour amender la constitution, il a été décidé de fixer le référendum pour le 20 mars date anniversaire de l’Indépendance.
… Nous émettons le vœu de voir les peuples de Machrek suivre notre exemple.
Bourguiba était sans aucun doute bien enthousiaste à cette union.
Il était content voire fasciné d’être le Président de deux pays du Maghreb à la fois.
Dans son euphorie, il appela Boumedienne pour lui demander d’adhérer à l’union mais il s’opposa à un refus net et catégorique.
Le Chef d’Etat algérien se formalisa qu’il n’en fut pas préalablement invité à faire partie du projet de l’union et de n’avoir pas été parmi les signataires de la Déclaration.
Il considéra en effet qu’il était écarté du projet et que l’invitation de Bourguiba à s’y joindre n’était qu’à titre diplomatique.
Mais en réalité le leader Bourguiba était interloqué par la réaction de Boumedienne.
Les réactions des observateurs et des médias étaient mitigées. Alors que certains journaux occidentaux qualifiaient cette union de négative la situation étant différente entre les deux pays tant sur le plan social, qu’économique et politique, d’autres estimaient au contraire qu’elle pourrait éviter les conflits à travers le monde arabe.
Cependant aucun parmi les journaux arabes n’en avait vu un seul côté positif.
Bien plus les journaux algériens l’avait qualifiée d’éphémère et de factice.
Boumedienne déclara au nom du Conseil de la révolution algérienne, dont il était le président, que cette union hâtive et artificielle ne pouvait prospérer ni même survivre.
Cette réaction négative du reste des pays du Maghreb était-elle due au fait de n’avoir pas participé à la discussion préalable du projet d’union qui réunit seulement le colonel et le leader Bourguiba. L’on est tenté de répondre à la question par l’affirmative. Cependant , par un raisonnement à contrario, c’est-à-dire si tous les pays du Maghreb avaient été à l’époque consultés pour une telle union, cela aurait-il pu changer grand chose à la situation? Ce n’était pas certain car à l’époque chacun de ses pays avait des problèmes spécifiques, rendant de la sorte une union entre eux, difficilement réalisable.
En fait, c’était également le cas entre la Tunisie et la Libye à cette période où notre pays venait de passer par une mauvaise période due à l’échec de l’expérience collective de Ben Salah et entamait une nouvelle phase de libéralisme économique à l’avènement de Hédi Nouira à la tête du gouvernement.
Celui-ci pour un décollage économique encourageait des investissements étrangers.
Plusieurs entreprises étrangères s’étaient implantées en Tunisie en vertu de la loi de 1972 leur facilitait les formalités à cet effet, tant sur le plan juridique, que fiscal et douanier. Des exonérations importantes étaient dans le but de mieux les encourager à investir en Tunisie.
L’union avec la Libye en l’occurrence allait-elle constituer un obstacle à ces investissements?
Ce fut ce que pensait Hédi Nouira lui même qui d’ailleurs s’était opposé à l’union, dont la déclaration a été signée en son absence.
Il était,, en effet, à Paris le 12 janvier, et en apprenant la nouvelle par les journaux, il fut si stupéfait qu’il faillit démissionner.
A son arrivée à Tunis, il fit part de sa désapprobation en déclarant qu’il lui était impossible de rester en tant que Premier ministre dans une structure qu’il n’approuvait pas.
Bourguiba, auquel Nouira essaya d’expliquer qu’il avait agi à la hâte en signant la déclaration de l’union était déçu.
Masmoudi , considéré en tant que principal instigateur finit par être limogé et invité à s’expliquer devant les membres du gouvernement.
Afin de surseoir à la concrétisation de l’union, ce fut le motif juridique qui fut invoqué: le projet d’union doit soumis à l’avis du peuple par voie de référendum.
Or, la constitution tunisienne ne prévoyait pas à l’époque de procédure référendaire. Il fallait donc procéder d’abord à l’amendement de la constitution.
Au ministre libyen de l’Intérieur venu en Tunisie avec les bulletins de vote du référendum, on explique cet imbroglio juridique nécessitant au moins six mois pour sa mise en application.
Cependant que Masmoudi insistant sur la nécessité de conclure l’union, déclarait que si la constitution ne prévoyait pas de référendum , elle ne l’excluait pas pour autant.
Le spécimen du référendum comportait les photos de Khadhafi et Bourguiba avec les questions suivantes:
– Acceptez-vous l’union?
– Acceptez-vous que Bourguiba soit le Président de la République Arabe Islamique et que Kadhafi soit son vice-Président . (A suivre)
Ahmed YOUNES
(Source : « Le Temps» (Quotidien – Tunis), le 1er février 2008)
Mémoire collective : Janvier 1974
La Déclaration de Djerba : Un acte mort-né (3)
III – La Brouille
Un émissaire libyen, arrivait à Tunis, quelques jours après la signature de la Déclaration de Djerba, avec les bulletins de vote en vue de lancer le référendum.
Reçu par Bourguiba, il lui fut demandé par celui-ci d’y surseoir en attendant de régulariser le problème du référendum.
En effet, il fallait amender la constitution qui à l’époque ne prévoyait une telle procédure.
Bien que convaincu, le représentant du colonel était au fond de lui-même quelque peu déçu.
Du côté libyen on voulait battre le fer tant qu’il était chaud, ce qui n’était pas possible, l’amendement de la constitution demandant beaucoup de temps.
C’était en tous les cas l’argument de taille, auquel tenait le premier ministre tunisien afin de laisser le temps au temps.
Ce fut d’ailleurs son point de divergence avec Masmoudi, alors ministre des Affaires étrangères qui bien que limogé n’en démordit pas et pour tout argument il avançait par un raisonnement implicite que si la constitution ne prévoyait de référendum, elle ne l’excluait pas pour autant.
Ce qui était un non sens car sur le plan du droit constitutionnel, la procédure du référendum doit être réglementée par la constitution document considéré au-dessus de la loi.
L’émissaire libyen eut connaissance par Hédi Nouira, d’un communiqué du conseil des ministres en ce sens.
Rentrant bredouille il en référa au colonel, qui en fut quelque peu déçu mais ne réagit pas tout de suite, car du côté tunisien on essayait de temporiser les choses à travers les déclarations des ministres, qui étaient parfois même contradictoires.
En effet, alors que pour certains il importait de mener une négociation pondérée et réfléchie sur l’union, le Premier ministre dans une déclaration au journal le « Monde » sa position était mitigée.
Alors qu’il voyait dans la déclaration de Djerba, la proclamation d’un idéal, il appelait plutôt à une coopération avec la Libye en attendant de régulariser la procédure du référendum sur le plan constitutionnel.
Cette attitude du Premier ministre n’était pas à plaire au colonel qui décida de rencontrer Bourguiba qui se trouvait à Genève pour avoir des explications avec lui sur les causes de la remise aux calendes grecques, de la mise en application de l’union.
Bourguiba était accompagné de Hédi Nouira ainsi que quelques autres ministres.
La discussion se termina en queue de poisson et Nouira en rentrant à Tunis, donna une déclaration de Normand, en affirmant que le contenu de l’Union sur lequel a porté l’entretien avec Kadhafi, sera défini au fur et à mesure des négociations.
Kadhafi de son côté trouvait dans cette déclaration un prétexte par le Premier ministre tunisien afin de retarder le processus de l’Union. Car pour lui, les négociations étaient déjà faites et l’union était déjà décidée.
Il commençait à désigner du doigt les « fossoyeurs de l’Union », visant en premier, Nouira, dont il comprit l’attitude de prime abord.
Le ton commençait à monter de part et d’autre.
Alors que du côté libyen on déplore l’échec de l’Union due aux ennemis de la solidarité entre les pays du Maghreb, le Premier ministre tunisien dans son intervention à l’Assemblée Nationale, déclarait qu’il était inadmissible de s’engager dans une union sans l’accord des pays du Maghreb.
Au mois de février 1974 la tension monta davantage, aussi bien d’un côté que de l’autre Kadhafi dénonçait lors d’un rassemblement populaire, les ennemis jurés de l’union, Hédi Nouira déclarait lors de la commémoration des événements de Sakiet Sidi Youssef, que l’unité du Maghreb ne se fera ni avec du tapage ni avec de la précipitation.
A cette commémoration le ministre de l’Intérieur algérien Médghri était présent. Il profita pour déclarer sur un ton soulagé que toutes les tentatives de semer la zizanie entre l’Algérie et la Tunisie avaient échoué.
C’était donc le début d’une sorte de guerre froide entre la Tunisie et la Libye qui allait crescendo.
Les travailleurs tunisiens en Libye étaient quotidiennement expulsés par centaine.
Suivant ensuite, des problèmes attenant tant à la sécurité qu’à la souveraineté du pays.
En effet, le dissident libyen Omar Mhichhi se réfugia en Tunisie, ce qui suscita davantage le mécontentement du colonel.
Quelque temps après, un entrepreneur tunisien fut enlevé à Tripoli.
Par ailleurs, les officiers unionistes libres qui avaient pris en otage une délégation de l’OPEP et à leur tête Zaki Yamanni, essayaient dans leur parcours aérien depuis de l’Autriche, et après avoir atterri en Libye, d’atterrir à l’aéroport de Tunis-Carthage, sans y parvenir pour autant.
Ces officiers avaient pour but, selon des responsables libyens de pourchasser Omar M’hichi, qui était réfugié à Tunis.
Enfin, trois libyens arrêtés, alors qu’ils venaient en Tunisie dans le but d’assassiner le Premier ministre.
Ils furent d’ailleurs traduits devant la cour de sûreté de l’Etat qui condamna l’un d’eux à la peine capitale, et ses deux complices à des peines d’emprisonnement.
Quant au problème touchant à la souveraineté du pays, il concernait l’affaire du plateau continental.
Tel que défini par la cour internationale de justice le plateau continental est une zone prolongeant physiquement le territoire des Etats maritimes par un socle devenant le prolongement naturel du territoire national.
IL était d’abord question de l’exploitation commune du plateau continental.
Cependant le problème fut remis sur le tapis suite à l’échec de l’union.
Le litige éclata à propos de la délimitation des zones tunisiennes et libyennes dans ce plateau continental.
Les pourparlers tuniso-libyens avaient abouti à la soumission du problème à la cour internationale de justice, avec une exploitation commune de la région en attendant la décision de la cour.
Mais très vite le colonel revenant sur cette décision, refusa une quelconque exploitation du plateau continental par la Tunisie avant l’issue de l’affaire pendante devant la CIJ.
Cependant il n’hésita pas à engager une entreprise pétrolière italienne à s’y installer pour des prospections pétrolières pour le compte de la Tunisie.
Ce qui incita à une riposte de la Marine Nationale tunisienne afin d’obliger les responsables de ladite entreprise de se retirer.
Bref, tous ces problèmes avaient altéré les relations entre les deux pays frères du Maghreb. Petit à petit des solutions étaient préconisées tant pour les problèmes des détenus qui furent échangés qu’aux ceux découlant de l’affaire du plateau continental, dans laquelle la CIJ a tranché en faveur de la Libye d’ailleurs.
Le journal le monde écrivait à ce propos : « Il n’est guère contestable que le pétrole libyen a pesé plus lourd que les éponges tunisiennes ».
Une page sombre de l’histoire des relations tuniso-libyennes était définitivement tournée.
Ahmed YOUNES
(Source : « Le Temps» (Quotidien – Tunis), le 5 février 2008)
Mémoire collective :
Janvier 1974 : La Déclaration de Djerba : Un acte mort-né
« La guerre froide » (suite et fin)
Les événements qui se succédèrent à cette époque ne pouvaient qu’augmenter la tension qui existait entre la Tunisie et la Libye et altérer davantage leurs relations tant sur le plan politique que social et économique.
Le dissident libyen Omar Mhichi, réfugié à Tunis, refusait tout bons offices de la part de quiconque,
de nature à l’inciter à retourner en Libye ou en vue d’une réconciliation avec Kadhafi et toute tentative en ce sens, avait échoué.
Très vite, sur ce problème qui contribua à altérer les relations tuniso-libyenne se greffa un autre encore plus épineux celui de la délégation de l’OPEP prise en otage.
En effet, cette délégation dirigée par Zaki Yamani à l’époque avaient été prise en otage à Vienne par un commando dont le chef était Carlos, un terroriste qui avait commis plusieurs actes criminels en Europe.
Les membres de ce commando « les officiers unionistes libres », essayaient dans leurs parcours aériens depuis l’Autriche, et après avoir fait escale en Libye, d’atterrir à l’aéroport de Tunis-Carthage, qu’ils survolèrent pendant près d’une heure, prétextant une panne de carburant mais leur tentative ayant été vaine ils repartirent vers Alger.
Selon des responsables libyens, ces officiers avaient pour but de pourchasser Omar Mhichi.
Quelque temps après, trois libyens étaient arrêtés, alors qu’ils venaient en Tunisie, dans le but d’assassiner le Premier ministre, chez lui.
Ils furent, d’ailleurs, traduits devant la cour de sûreté de l’Etat et condamnés, l’un à la peine capitale et ses deux complices à des peines de prison.
Cependant, en riposte à ce procès, l’armée libyenne intercepta des militaires tunisiens à la frontière.
La crise entre les deux pays était à son paroxysme.
Par ailleurs, le 26 janvier 1980, une insurrection armée à Gafsa sema la panique et la terreur parmi les habitants de la ville par un massacre sanglant, laissant plusieurs morts et blessés.
Cet acte rappelant dans son ampleur les événements du jeudi noir de janvier 1978, était perpétré par un groupe d’hommes armés venus de l’étranger, dans le but de procéder à un complot.
Ce groupe se faisait appeler « l’armée de libération tunisienne », certains parmi ceux qui étaient arrêtées avaient acheminé des armes à partir de la Libye.
Une quarantaine de personnes furent jugées devant la cour de sûreté de l’Etat et condamné à la peine capitale pour certains et à différentes peines de prison pour d’autres.
Les relations entre la Tunisie et la Libye se trouvaient de ce fait, bien compromises.
Quant au problème, touchant à la souveraineté territoriale du pays, il concernait l’affaire du plateau continental.
Tel qu’il était défini par la Cour internationale de justice, le plateau continental et une zone prolongeant le territoire des Etats maritimes par un socle devenant le prolongement naturel du territoire national. Il était d’abord question de l’exploitation commune du plateau continental. Cependant, le problème fut remis en question par la Libye suite à l’échec de l’union.
Le litige éclata à propos de la délimitation des zones tunisiennes et libyennes dans ce plateau.
Les pourparlers tuniso-libyennes avaient abouti à la soumission du problème à la Cour internationale de justice. Avec une exploitation commune de la région en attendant la décision de la cour.
Mais très vite le colonel revenant sur cette décision refusa une quelconque exploitation du plateau continental par la Tunisie, tant que l’affaire était pendante devant la C.I.J. Cependant, il n’hésita pas à engager une entreprise pétrolier italienne à s’y installer pour des prospections pétrolières pour le compte de la Libye.
Ce qui incita à une riposte de la marine nationale tunisienne afin d’obliger les responsables de ladite entreprise à se retirer.
Petit à petit des solutions étaient préconisées tant pour les problèmes des détenus qui furent échangés qu’à ceux relatifs à l’affaire du plateau continental et dans laquelle la CIJ avait d’ailleurs tranché en faveur de la Libye.
Le journal « Le monde » écrivait : « Il n’est guère contestable que le pétrole libyen a pesé plus lourd que les éponges tunisiennes ».
Une page sombre de l’histoire des relations tuniso-libyennes était définitivement tournée.
Ahmed YOUNES
(Source : « Le Temps» (Quotidien – Tunis), le 8 février 2008)
Youssef Alouane nous manquera tant!
Ridha Lahmar
Le paysage de la communication, la planète universitaire et le monde de la société civile viennent de perdre un visage familier qui faisait l’unanimité. Frappés de stupeur, nous sommes restés sans voix dès que nous avons appris la terrible nouvelle, celle du décès d’une personnalité consensuelle qui a marqué de son empreinte ces quarante dernières années.
Une carrière universitaire bien remplie : Docteur et Professeur de sociologie, Directeur des études à l’Ecole Nationale de la Coopération à la fin des années 60 puis à l’Institut Supérieur du Travail dans les années 70, professeur puis directeur à l’ISCAE dans les années 90, puis président de l’Université Tunis El Manar dans les années 2000 avant d’être depuis deux ans professeur émérite.
Youssef Alouane était également un militant de la société civile puisqu’il a été président de l’Arforghe pendant des années où il a instauré le Prix annuel de la Gestion des ressources humaines et organisé plusieurs séminaires et activités internationales remarquables.
Depuis deux ans, Youssef Alouane, qui a toujours été passionné par la communication, a assuré la présidence du Conseil Supérieur de la Communication, où il a engagé en profondeur un travail collectif de réflexion sur le paysage de la communication dans notre pays.
Outre ses compétences professionnelles indéniables, Youssef Alouane avait le privilège de l’ouverture d’esprit, d’une vaste culture, d’une grande capacité d’écoute et d’un franc-parler, avec le sourire, la sincérité, le savoir-vivre et l’esprit de l’Honnête Homme du 17ème Siècle.
Il avait aussi le don des relations humaines et le respect de l’Autre, quel qu’il soit ; Réalités vient de perdre un ami. Que Dieu lui accorde Son infinie Miséricorde et l’accueille dans Son éternel Paradis.
(Source : « Réalités » (Magazine hebdomadaire – Tunis), N° 11453 du 7 février 2008)
Une charte arabe des droits de l’homme controversée
L’ONU salue l’adoption d’une Charte arabe des droits de l’homme. Les milieux pro-israéliens bondissent. Les défenseurs des libertés restent sur leurs gardes.
Carole Vann/InfoSud
Les libertés sont-elles modulables selon les mentalités et les cultures ? La question ressurgit alors que la planète célèbre cette année les soixante ans de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Négociée sous l’égide de la Ligue arabe, une charte régionale des droits de l’homme va pouvoir entrer en vigueur en mars. Elle a été ratifiée par la Jordanie, le Bahreïn, la Libye, l’Algérie, les Emirats arabes unis, la Palestine, le Yémen. La Haut-Commissaire aux droits de l’homme, Louise Arbour, a salué l’évènement. Cette « caution » de l’ONU a provoqué le tollé dans les milieux pro-israéliens.
Ces derniers ont fortement réagi au préambule qui condamne le sionisme au même titre que le racisme. Ils reprochent à Louise Arbour de donner une crédibilité à une charte qui « appelle à la destruction d’Israël », selon UN Watch. Alors que l’ONU est censée éviter tout amalgame à ce sujet. Les défenseurs des libertés, eux, considèrent qu’une telle mention relève du politique et n’a pas sa place dans ce texte.
« La Charte arabe est en conformité avec la Conférence de Vienne de 1993 qui reconnaît des spécificités régionales aux droits de l’homme, argue un diplomate arabe à Genève. La Ligue arabe a voulu réaffirmer que la charia, la loi de Dieu, n’est pas en contradiction avec le droit international. La question du sionisme est un problème intrinsèque à la région. Les Etats arabes ne peuvent pas faire l’impasse dessus. »
Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a toutefois diffusé mercredi un nouveau communiqué, incluant les réserves sur la mention du sionisme et sur certaines dispositions de la Charte considérées en dessous des normes internationales.
ONG sur la réserve
« Ce compromis entre la charia et la Déclaration des droits de l’homme laisse à désirer, relève Eric Sottas, directeur de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT). Certains passages, notamment sur la femme, la torture, la liberté d’association et la peine de mort pour les enfants, restent flous. »
« Tous les pays arabes ont pourtant signé la Convention relative aux droits de l’enfant qui stipule qu’aucun mineur ne peut être condamné à mort pour des crimes commis avant 18 ans. Or cette Charte stipule que la législation interne prime parfois. » Ce qui équivaut à l’application de la charia pour certains pays.
Même réserve chez Said Benarbia, chargé du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord à la Commission internationale des juristes : « Dans certains pays de la région, si on fait partie des Frères musulmans par exemple, on risque la peine capitale sans faire dans le détail, enfant ou pas. »
Et Eric Sottas de poursuivre : « A partir du moment où un pays ratifie une convention internationale, il doit modifier sa législation interne. C’est bien pour cela que les Etats-Unis n’ont toujours pas ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant. »
Said Benarbia s’inquiète aussi de la mise en application des traités. « Lorsqu’un Syrien, un Egyptien ou un Tunisien est traduit en justice chez lui, comment peut-il être protégé par cette Charte ? » interroge-t-il. D’une part, estime de son côté Eric Sottas, le Comité censé veiller au respect de cette Charte n’est autorisé à recevoir que les rapports des Etats. D’autre part, les gouvernements signataires ne font rien pour adapter leur législation aux instruments internationaux ou régionaux. Et comme leur justice n’est pas indépendante, conclut-il, les juges n’osent pas prendre l’initiative de modifier les lois.
Même constat pour l’état d’urgence qui doit, selon la Charte, être une mesure exceptionnelle. « Or dans certains de ces pays, l’état d’urgence dure depuis 30-40 ans ! ironise le juriste. Il y a un réel décalage entre la Charte et la réalité sur place. »
(Source : « Infosud » (Agence de presse – Suisse), le 1er février 2008)
Lien : http://www.infosud.org/spip/spip.php?article1208
Avertissement du président de la Cour de cassation turque sur le voile
AFP, le 7 février 2008 à 16h58
ANKARA, 7 fév 2008 (AFP) – Le nouveau président de la Cour de cassation turque a appelé jeudi le Parlement, qui vient de voter en première lecture une réforme autorisant le voile islamique à
l’université, à ne pas éroder le régime laïc en place en Turquie. « Bien sûr, faire des amendements légaux et constitutionnels est une des fonctions primaires et naturelles du Parlement, mais cette
autorité ne doit pas être utilisée pour affaiblir la laïcité », a déclaré à la presse Hasan Gerçeker, nouvellement élu à la tête de la Cour, lors de sa cérémonie d’investiture.
Le Parlement turc a adopté en première lecture dans la nuit de mercredi à jeudi un amendement constitutionnel conçu par le Parti de la justice et du développement (AKP, issu de la mouvance islamiste)
au pouvoir et autorisant le port du voile dans les universités. L’AKP dispose avec le soutien du Parti de l’action nationaliste (MHP) de la majorité des deux tiers des sièges nécessaire pour adopter la réforme en deuxième lecture samedi. « Il ne s’agit pas d’un simple problème de voile », a affirmé M. Gerçeker. « Nous ne devons pas autoriser les efforts en faveur d’un retour vers un système empreint de superstition (…) à une époque de grands progrès scientifiques et technologiques ».
La réforme a soulevé une levée de boucliers des milieux laïcs -influents au sein de l’armée, la magistrature et l’administration universitaire- qui affirment qu’elle érode les principes laïcs de la Turquie et risque d’ouvrir la voie à l’entrée des femmes voilées dans la fonction publique et les écoles. L’AKP assure défendre la liberté individuelle des étudiantes musulmanes et estime que cette réforme s’inscrit dans le processus
d’adhésion à l’Union européenne.
Le principal parti d’opposition sociale-démocrate, le Parti républicain du peuple (CHP), a menacé de déposer un recours devant la Cour constitutionnelle si la réforme est adoptée.
AFP
Le tabac pourrait tuer un milliard de personnes durant ce siècle (OMS)
AFP, le 7 février 2008
NEW YORK, 7 fév 2008 (AFP) – Le tabac pourrait faire un milliard de morts au cours de ce siècle à travers le monde si les gouvernements et les sociétés civiles n’agissent pas rapidement pour
en réduire l’usage, affirme un rapport de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) publié jeudi à New York. « Le tabac a tué 100 millions de personnes à travers le monde au XXe siècle et en tuera un milliard au XXIe si les tendances actuelles se poursuivent », indique ce « Rapport sur l’épidémie mondiale de tabagisme », présenté par la directrice générale de l’OMS Margaret Chan et le maire de New York Michael Bloomberg, dans une conférence de presse.
« Si rien n’est fait, le nombre des décès liés au tabagisme atteindra plus de huit millions par an d’ici 2030 et 80% de ces cas se produiront dans les pays en développement », poursuit le document.
L’étude, qui fournit des statistiques sur l’usage du tabac et sur les mesures prises pour le réduire dans des pays représentant ensemble 99% de la population mondiale, recommande une stratégie en six points appelée « MPOWER » pour lutter contre le fléau. Celle-ci inclut le suivi dans chaque pays de la consommation et des politiques de prévention, la protection des populations contre la fumée du tabac, des programmes d’aide à ceux qui veulent arrêter de fumer, une meilleure information sur les dangers du tabac, la mise en oeuvre effective des interdictions de la promotion et de la publicité et la hausse des taxes sur le tabac.
« Bien que les efforts pour combattre le tabac gagnent de l’ampleur, pratiquement chaque pays doit faire davantage », a déclaré Mme Chan. « Ces six lignes d’action sont à la portée de tous les pays et, mises en oeuvre ensemble, elles offrent la meilleure chance d’inverser cette épidémie galopante », a-t-elle ajouté. Décrivant le rapport comme « révolutionnaire », M. Bloomberg a déclaré que « pour la première fois, le monde dispose à la fois d’une approche rigoureuse pour stopper l’épidémie de tabagisme et des statistiques solides pour que chaque décideur soit responsabilisé« .
« Les mesures de réduction du tabagisme sont parfois controversées mais elles sauvent des vies et les gouvernements doivent s’impliquer et faire leur devoir », a-t-il dit.
Selon le rapport, c’est dans les pays à faibles revenus que l’usage du tabac augmente le plus. La hausse constante de la population et son ciblage par les cigarettiers ont pour effet que des millions de nouveaux consommateurs deviennent dépendants chaque année.
Près des deux tiers des fumeurs vivent dans dix pays: Chine (près de 30% du total), Inde (10%), Indonésie, Russie, Etats-Unis, Japon, Brésil, Bangladesh, Allemagne et Turquie. Seulement 5% de la population mondiale est protégée par des lois nationales anti-tabac efficaces, indique encore le document. « Dans la plupart des pays, l’usage du tabac est plus répandu parmi les pauvres que chez les riches et les pauvres souffrent davantage des conséquences des maladies liées au tabac, ce qui leur cause des difficultés économiques et perpétue le cycle de la pauvreté et de la maladie », affirme-t-il.
L’usage du tabac coûte actuellement au monde des centaines de milliards de dollars chaque année. Pour les seuls Etats-Unis, ces pertes économiques sont estimées à 92 milliards de dollars par an.
Dans le même temps, l’industrie du tabac dépense des dizaines de milliards de dollars en marketing et cible le monde en développement à l’aide de stratégies de vente et de lobbying qui ont été
interdites dans les pays riches, affirme encore le rapport. L’incitation des femmes et des jeunes à l’usage du tabac fait partie de ces stratégies, ainsi que les pressions sur les gouvernements pour faire obstacle aux restrictions légales et aux hausses des taxes.
Le rapport cite l’augmentation des taxes sur le tabac comme « le plus efficace moyen de réduire la consommation et d’encourager les fumeurs à cesser. »
AFP