5 novembre 2007

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TUNISNEWS
8 ème année, N° 2723 du 05.11.2007

 archives : www.tunisnews.net
 

 

 


Le Soir :Le coup d’Etat de 1987 avait suscité beaucoup d’espoir:Le système Ben Ali a 20 ans Le Soir: Il règne sans partage depuis vingt ans à Tunis Ben Ali, flic et président Le Soir: La Tunisie, vingt ans après le coup d’Etat de Ben Ali « Un bilan à nuancer, mais le régime a traumatisé la société » Le Soir: Vingt ans de souffrances Le Soir: Tunisie : histoire d’un gâchis Le Soir: Ubu Roi a vingt ans Reporters sans frontières: La censure de la presse tunisienne  – Un cas d’école depuis vingt ans L’AUDACE:Un zoo bientôt sur la colline d’Amilcar L’AUDACE:1987 – 2007 :VINGT ANS DE TORTURE L’AUDACE:IMPRESSIONS DE VOYAGE:Ben Ali n’est pas un moderniste TAP :La revue “ARABIES” publie une interview du Président Ben Ali AFP: Ouverture à Marrakech de l’Assemblée générale d’Interpol AFP:90 ans après, les Russes restent partagés sur la Révolution de 1917 AFP: La Turquie autorisée à ériger un mémorial ottoman à Jérusalem-est AFP:L’Espagne veut impulser le projet d’Union méditerranéenne (Moratinos)


Appel de détresse de Tunisie (*)

 

 

Au nom de Dieu le Clément, le  Miséricordieux,

Appel à toute âme charitable

A nos frères en Dieu dans le monde entier

A toute conscience vive et humanitaire

 

Nous sommes sur la terre de la Zeitouna et de Kairouan et nous sommes submergés par le malheur et le dénuement.

 

Les difficultés de vos frères et sœurs sont démesurées et il ne nous reste plus aucun espoir après Dieu et vous.

 

Chers frères, une fois sortis de prison, nos frères se sont trouvés dans une nouvelle grande prison, ils se sont heurtés à la dure réalité à laquelle ils ne s’attendaient pas.

 

Leur séjour a été si long qu’ils doivent non seulement surmonter des obstacles matériels mais  aussi psychologiques notamment au sein de leurs familles.

 

Ils ont frappé à toutes les portes recherchant du travail peu importe le salaire ; peu d’entre eux ont subvenu à leur besoin. Par contre la majorité d’entre eux se trouvent au seuil de la pauvreté alors qu’ils avaient promis à leur famille richesse et aisance et  une vie en rose ; d’autant plus que les enfants ont grandi entre temps et que leurs demandes et leurs besoins ont grandi aussi.

 

Tous les rêves et les espoirs se sont envolés, le travail se fait rare et les proches et les amis ont tournés le dos ; certains d’entre eux ont même vu partir leurs épouses et leurs enfants.

Il y a, certes,  des frères comme ceux cités par Allah : «… que l’ignorant croit riches parce qu’ils ont honte de mendier – tu les reconnaîtras à leur aspects – Ils n’importunent personne en mendiant.. » La vache/273 . Nous nous soucions d’eux et nous ressentons ce qu’ils ressentent.

Il y en a d’autres qui, par pudeur, n’ose pas sortir de chez eux refusant tout contact extérieur ; craignant le regard des autres en raison de  leur pauvreté.

 

D’autres sollicitent  Allah avant d’aller affronter les gens et leur dire « donnez moi à manger j’ai faim », et les cas similaires sont nombreux.

 

Chers frères, cette crise qui a longtemps duré a engendré des conséquences et des situations néfastes.

 

Nos frères qui sont restés en prison parfois plus de quatorze ans se sont retrouvés dans des situations alarmantes :

 

Certains ont atteint la cinquantaine et sont toujours célibataires, ajouté à cela de nombreuses maladies de l’estomac, du rein, le phénomène d’impuissance sexuelle, le cancer  entraînant  la mort dans de nombreux cas.

 

Le pire c’est que la majorité de ces frères sont privés de cartes de soins et certains d’entres eux sont au chômage ou en invalidité.

 

La situation  de leurs enfants est parfois plus alarmante. De nombreux sont ceux qui présentent des maladies psychologiques du fait du stress permanent entraînant des perturbations graves, et comme vous le savez, ces cas nécessitent de l’attention, de la prévention et une prise en charge permanente qui est coûteuse.

 

Tout cela n’est qu’un aperçu de la réalité, une goutte dans un océan.

 

Chers frères, la lecture de cette lettre ne doit pas vous laisser indifférents, nous sommes persuadés qu’après sa lecture votre cœur sera touché.

 

Notre espoir en Dieu est grand ainsi qu’en votre générosité devant pareil cas de dénuement et de pauvreté.

 

Nous ne souhaitions à personne de vivre cette situation. Nous prions Dieu pour qu’Il vous protège et vous donne la paix.

 

Nous n’avons pas voulu vous importuner avec nos souffrances mais si nous  faisons appel à vous après Dieu, c’est que la situation a atteint un seuil critique.

 

Nous demandons à toute âme charitable de nous aider afin que nos frères puissent retrouver et garder leur dignité.

 

Grâce à votre aide généreuse et votre main tendue, vous pouvez empêcher le désespoir de s’emparer de vos frères qui n’ont pour tort que d’avoir souhaiter vivre dans leur pays en harmonie avec leur religion.

 

Nous gardons espoir en Dieu qui, inchallah, nous unira sur la voie de la foi et l’amour de Dieu.

Le prophète psl dit : « celui qui soulage le fardeau d’un croyant, Dieu le soulagera d’un fardeau le jour du jugement dernier »

 

Qu’Allah vous vienne en aide et vous protège !

 

Wassalem alaikom wa rahmatoullah wa barakatouhou.

 

 

(*) Cette lettre est parvenue récemment de la Tunisie à l’Association « TAKAFUL » pour le secours et la solidarité, et nous  la transmettons à l’opinion publique  pour l’alerter sur l’inquiétante situation matérielle, sociale et psychologique d’un grand nombre de tunisiens victimes de la politique répressive du régime durant les deux dernières décennies.

Vu l’ampleur du drame et le nombre important des victimes qui sont dans le besoin et la précarité ; l’Association TAKAFUL fait  appel à votre générosité pour nous aider à secourir vos frères et les aider à sauvegarder leur dignité.

 

« Et toute dépense que vous faites dans le bien, Il la remplace, et c’est Lui le meilleur des donateurs » (34 Saba /verset 39.)

 

« Quiconque prête à Allah de bonne grâce, Il le lui rendra multiplié plusieurs fois. Allah restreint ou étend (ses faveurs).Et c’est à lui que vous retournerez » (la vache, verset 245)

 

Vous pouvez  faire parvenir vos dons:

 

* directement en donnant vos dons à des gens de confiance en contact avec l’association TAKAFUL (enregistrée en France)

 

* en envoyant vos dons à cette adresse :

TAKAFUL  16, cité vert –  94370 Sucy en Brie.

France

 

Tél: 06 09 17 22 88 / 06 80 85 92 98

e-mail :contact@hotmail.fr

 

* par virement  bancaire à l’adresse suivante :

 

la Banque Postale. / France

 

Etablissement         guichet          n° compte          clé RIP

30041                   00001        5173100R020          42

 

Identifiant International de Compte  IBAN

FR54  3004  1000   0151   7310  0R02  042


 
 

Tunisie Le coup d’Etat de 1987 avait suscité beaucoup d’espoir Le système Ben Ali a 20 ans

 
BAUDOUIN LOOS   Vingt ans. Vingt ans, au choix, de « progrès civilisationnels qui ont enraciné durablement les avancées démocratiques » ou « de répression et de régression qui ont fait du pays une vaste caserne où les droits de l’homme sont piétinés ».   A Tunis ce 7 novembre, le régime du président Zine el-Abidine Ben Ali célébrera avec fastes ses vingt ans. Le temps de la réconciliation entre zélateurs et censeurs n’est pas en vue.   Beaucoup de familiers du dossier ne cachent pas leur déception. Le « coup d’Etat médical » organisé et mis en œuvre en douceur contre un Habib Bourguiba – frappé de sénilité – par celui qui était Premier ministre depuis seulement cinq semaines, Ben Ali, avait engendré tant d’espérances. Plus dure fut la chute… du régime aux prétentions démocratiques vers le totalitarisme. Au pays de Ben Ali, la langue de bois domine le paysage, écrase les citoyens. Dernier exemple, tiré d’un discours du « zaïm » (chef) le 2 novembre : « Nous n’avons cessé et continuons d’être attentifs aux attentes de notre peuple en nous attachant à nos valeurs et principes civilisationnels constants, en adhérant aux valeurs de modernité et aux mouvements de progrès, réagissant aux mutations qui se produisent dans le monde, en devançant les événements et les nouveaux développements, et en œuvrant constamment pour que la Tunisie demeure une oasis de sécurité et de stabilité (…) »   Tout est à l’avenant. Ce langage fleuri auto glorifiant à l’obsession comporte d’ailleurs même pour partie des vérités. Car même si la pauvreté n’a pas été éradiquée, les résultats économiques de la Tunisie contemporaine pourraient être jalousés par la plupart des pays du tiers monde. Comme nous le dit Ahmed Manaï, un opposant exilé à Paris gagné par le réalisme, « le PNB, qui a progressé en moyenne de plus de 5 % au cours des vingt dernières années, ainsi que tous les autres principaux indicateurs macro-économiques, inflation, investissement, déficit budgétaire, endettement, réserves en devises, chômage, etc., attestent d’une économie en bonne santé et assez bien gérée ».   Le même homme s’empresse de préciser : « Mais la bonne tenue de l’économie ne suffit pas à mettre en confiance une société marginalisée et inquiète de la privatisation de l’Etat, du dévoiement de la justice, de la montée vertigineuse de la corruption, du développement des réseaux mafieux et des graves disparités sociales, mais aussi et surtout de l’absence de perspectives d’avenir. Je crois que les Tunisiens, dans leur écrasante majorité, sont convaincus qu’ils auront Ben Ali à vie. »   Il existe bien un « système Ben Ali ». Un Etat qui fonctionne, une économie qui tourne, des profiteurs (dans le cercle familial présidentiel) qui profitent, des consommateurs qui consomment, des acheteurs qui achètent (à crédit, surtout), puis des flics, beaucoup de flics (et des indics) qui font régner l’ordre, par la peur. A boire et à manger, donc. Assez pour satisfaire une Europe pas très fière, un peu veule, qui sacrifie ses valeurs sur l’autel d’une collaboration avec un régime bon élève du FMI et qui pourchasse avec assiduité ses islamistes, le mouvement Ennahda.   Les Tunisiens, eux, sont priés d’oublier la politique. Kamel Jendoubi, autre exilé parisien qui préside un centre pour les droits de l’homme, l’explique : « On nous dit : la politique, la gestion de la cité, l’économie, l’éducation, c’est pas votre affaire. Faire de la politique en Tunisie c’est une prérogative réservée au président. Même les ministres ne sont que des exécutants, qui agissent toujours en référence à Ben Ali. Même les opposants officiels sont choisis par lui. Celui qui défie cette loi sera combattu et éliminé politiquement, par tous les moyens y compris une justice instrumentalisée. Ils vont jusqu’à la privation de ressources, les pressions sur les proches… Sinon, on pousse à l’exil. » Les principales cibles du pouvoir ont pour noms islamistes et défenseurs des droits de l’homme. Féroce avec les uns, implacable avec les autres, le régime embastille et torture les premiers, harcèle et dénigre les seconds. Entre les deux se terre une société civile qui sait son intérêt à se taire et qui, souvent, se tait.   Alors ? Un bilan humain noir. Et, pour Jendoubi, « un grand échec » : « Après vingt ans d’éradication de l’islamisme, il est toujours là ; Ben Ali a essayé de diviser Ennahda, de les emprisonner, les exiler. A quoi a servi cette répression ? Le bilan est nul, qui n’a pu empêcher la réislamisation des esprits. Les islamistes d’Ennahda qui n’ont pas, depuis 1992, donné d’exemple de violences conservent une capacité politique. La Tunisie a été transformée en caserne bourrée de flics et d’éradicateurs, pourtant l’islamisme y reste un mouvement d’avenir. »   Une conférence à l’ULB   Ce mardi 6 novembre, Amnesty International Belgique francophone et le Cercle du Libre Examen organisent une conférence sur les vingt ans du régime tunisien, avec la participation, notamment, de Sihem Bensédrine (journaliste), Houcine Bardi (avocat), Riadh Bettaieb (membre d’Ennahda), Véronique Jamoulle (PS) et Vincent Legrand (ULB). Salle H 1 301 au campus de l’ULB, à 19 h 30.   (Source : « Le Soir », (Quotidien – Belgique), le 5 novembre 2007)


 

Il règne sans partage depuis vingt ans à Tunis

Ben Ali, flic et président

Rédaction en ligne

lundi 05 novembre 2007, 18:26

Rusé et implacable, Zine el-Abidine Ben Ali a assis son pouvoir grâce une main de fer. Une dictature à quelques encablures de l’Europe.

L’homme qui préside aux destinées de la Tunisie (depuis vingt ans ce mercredi 7 novembre) reste paradoxalement un inconnu pour les Tunisiens. Peu en connaissent même le son de sa voix. Zine el-Abidine Ben Ali n’est pas du genre à faire des conférences de presse. D’ailleurs, il n’en a jamais donné. « Il en serait bien incapable », raillent ses opposants.

Le verdict de Kamel Jendoubi, président exilé à Paris du Comité pour le respect des libertés et des droits de l’homme en Tunisie, se veut plus nuancé : « Même si Ben Ali n’a pas les capacités intellectuelles de mener une conférence de presse, nous dit-il, c’est un homme rusé. Pas intelligent ni courageux, encore moins visionnaire comme Bourguiba, son prédécesseur, mais rusé. Et tenaillé par la peur. Il a voulu se donner l’apparence d’un démocrate. Il a ainsi coupé avec le concept de « présidence à vie ». Ce fut sa première ruse. »

Lancé sur le sujet, Jendoubi devient insatiable. « Sa seconde ruse se passa en 1989, quand il trompa les gens aux élections ; il a autorisé les islamistes à se présenter comme indépendants, et il s’est ainsi constitué une base de données qui a servi lors de la répression. Sa troisième ruse fut d’instaurer en douce son « système », à savoir mettre l’Etat au service de ses ambitions aux relents de népotisme. Ceux qui l’ont accompagné au début ont été éliminés. Maintenant, il reste ses frères, cousins, la famille de sa femme, quelques cercles proches. C’est un régime où l’Etat n’est pas celui de ses citoyens mais celui d’une clique. Il ne peut subsister que dans un cadre policier. »

Rude charge que voilà. Mais incomplète, puisqu’il faut y ajouter des funestes « performances « en matière de droits de l’homme dénoncées par toutes les organisations compétentes en la matière, y compris la Ligue tunisienne, elle-même paralysée par le harcèlement judiciaire du pouvoir. Emprisonnements, tortures, persécutions (y compris de l’entourage des éléments ciblés) : toute la gamme des violations des droits humains fait partie des méthodes développées par le régime qui a aussi instrumentalisé la justice.

Quant à une presse digne de ce nom, à l’exception de l’un ou l’autre périodique d’opposition confiné dans la marginalité, elle a disparu du paysage tunisien, qui offre aux lecteurs locaux des journaux insipides qui rivalisent en glorifications les plus grotesques du génie présidentiel.

La destinée de Ben Ali n’avait pourtant rien d’évident. Pour ce fils de famille nombreuse et modeste né en 1936 à Hammam Sousse, sa sélection pour une formation militaire en France, qu’il prolongera même aux Etats-Unis représente une aubaine inespérée, qu’il saisit à pleines mains dès l’indépendance, en 1956. L’homme deviendra rapidement un spécialiste de la sécurité. Un flic cinq étoiles.

Tour à tour directeur de la nouvelle sécurité militaire, attaché militaire au Maroc puis en Espagne, il franchit un palier capital en 1977 en décrochant les galons de directeur général de la sûreté. Un nouvel éloignement à l’ambassade de Varsovie n’affecte pas longtemps sa marche en avant : en 1984, le président Bourguiba le rappelle et lui confie un secrétariat à la sûreté nationale, qui devient ministère l’année suivante.

Tout s’accélère alors : en 1986, le voilà ministre de l’Intérieur, avant de devenir Premier ministre en 87. Pas pour longtemps : moins de cinq semaines plus tard, il organise un « coup d’Etat médical « qui dépose en douceur Habib Bourguiba pour sénilité. Les Tunisiens s’enthousiasment pour un homme qui annonce la fin de la présidence à vie et le début d’une ère démocratique.

Mais un grain de sable nommé islamisme va tout compliquer. Les islamistes tunisiens, d’abord courtisés, se fâchent après les législatives de 1989, dont ils sortent floués, selon eux. Certains auraient alors comploté. La répression sera terrible. Les promesses de liberté s’envolent. A jamais. Le régime se concentre sur l’économie, non sans résultats, quoique la corruption ronge les rouages. La classe moyenne accepte sans broncher d’échanger la liberté contre un certain confort.

Libéral et anti-islamiste : voilà qui plaît aux Européens, qui en font leur allié privilégié, malgré ses « petits « défauts. Parmi eux, la perte de mémoire : Ben Ali avait interdit la présidence à vie. Vingt ans plus tard, il reste aux commandes, sans partage. Et pour longtemps encore, sans doute.

BAUDOUIN LOOS

(Source : « Le Soir », (Quotidien – Belgique), le 5 novembre 2007)

 


 

La Tunisie, vingt ans après le coup d’Etat de Ben Ali

« Un bilan à nuancer, mais le régime a traumatisé la société »

Rédaction en ligne

lundi 05 novembre 2007, 18:31

Neuf questions à Ahmed Manaï, Tunisien exilé après avoir échappé aux griffes du régime Ben Ali, agronome, ex-expert de l’ONU, animateur du site tunisitri.net.

Le régime Ben Ali aura 20 ans le 7/11.

1. Quel bilan global pouvez-vous tirer ?

Le militant a souvent tendance à noircir le tableau. Je l’ai souvent fait, sciemment ou par ignorance. En tout cas, un bilan de ce genre, qu’il soit positif, négatif ou nuancé, ne peut être attribué au seul régime. C’est le bilan de tout un pays : ses ouvriers, ses paysans, ses entrepreneurs, ses fonctionnaires, son administration et aussi le contexte régional et international.

En tout cas ce sont 20 ans (en fait 18 seulement) de despotisme d’un homme, conforté par l’aventurisme de certains, un contexte régional et international des plus favorables, une société tunisienne résignée et un militantisme politique et associatif inopérant, avec néanmoins des succès économiques incontestables.

2. Le régime met en avant son bilan socio-économique ; est-il aussi brillant qu’il ne le dit ?

Le PNB, qui a progressé en moyenne de plus de 5 % – sauf pour la période 1992-1995 où il était de 4,3 % – au cours des 20 dernières années, ainsi que tous les autres principaux indicateurs macro-économiques, inflation, investissement, déficit budgétaire, endettement, réserves en devises, chômage, etc., attestent d’une économie en bonne santé et assez bien gérée. Les prévisions alarmistes sur l’effondrement « de pans entiers de l’économie tunisienne et notamment de son industrie textile », suite à la mise en place du partenariat avec l’Europe, ont été fort heureusement démenties.

Reconnaissons à Ben Ali le fait qu’il a placé souvent des gens compétents à la tête des ministères techniques et qu’il a hérité d’une bonne administration.

Mais la bonne tenue de l’économie ne suffit pas à mettre en confiance une société marginalisée et inquiète de la privatisation de l’Etat, du dévoiement de la justice, de la montée vertigineuse de la corruption, du développement des réseaux mafieux et des graves disparités sociales, mais aussi et surtout de l’absence de perspectives d’avenir. Je crois que les Tunisiens, dans leur écrasante majorité, sont convaincus qu’ils auront « Ben Ali à vie ». Mais après lui ? La réponse relève de la bonne gouvernance et non pas de la gestion économique !

3. Nombre d’observateurs décrivent une économie tunisienne aux mains de vraies « mafias » gravitant autour de Ben Ali, cela correspond à votre vision des choses ?

Ce serait faire injure aux Tunisiens, entrepreneurs et travailleurs, de les associer tous aux « mafieux ».

Le tissu économique tunisien est constitué d’un peu plus de 400.000 entreprises dont plus de 98 % sont des petites et moyennes entreprises (moins de 10 ouvriers) qui n’intéressent pas ces « mafias ». Les entreprises étrangères aussi échappent à leur prédation. Mais les « mafias », proches ou non de Ben Ali, existent et contrôlent de nombreuses activités. Elles ont largement profité des privatisations des entreprises de l’Etat et des sociétés mixtes, ainsi que des facilités bancaires. Le jour où elles parviennent à contrôler le système bancaire, toute l’économie tunisienne sera entre leurs mains.

4. Le statut de la femme en Tunisie est aussi vanté par le régime ; mais n’est-ce pas surtout à Bourguiba que les femmes doivent ces avancées ?

Bourguiba a été le précurseur incontestable de l’émancipation féminine. Il lui a ouvert la voie par une législation révolutionnaire sur le « statut de la femme et de la famille » et par la scolarisation des filles. Son œuvre s’est quelque peu ralentie vers la fin de son règne. Mais c’est au cours des 20 dernières années que les avancées des femmes ont été les plus significatives : à l’université par exemple, le nombre d’étudiantes dépasse de loin celui des garçons (52 % et 48 %). On assiste au même phénomène dans la fonction publique, tous secteurs confondus. La femme est présente aussi dans le monde des affaires, au gouvernement, au parlement et dans les structures dirigeantes du RCD, mais paradoxalement quasi inexistante dans celles des partis d’opposition. On pourra toujours me rétorquer que tout cela n’a aucune signification dès lors que le champ politique est verrouillé et que tout tient du Chef. N’empêche qu’il s’agit d’un phénomène de fond qui est en train de transformer la société tunisienne et que rien ne pourra plus infléchir. Devant tant d’avancées des femmes tunisiennes, je suis abasourdi, par le traitement aussi humiliant qu’inopérant, réservé, parfois, aux jeunes filles voilées, ainsi que par mille autres tracasseries quotidiennes.

Enfin il manquera toujours à la femme tunisienne de devenir éligible à la magistrature suprême et d’accéder à l’égalité avec l’homme en matière d’héritage ! Mais c’est là une autre histoire.

5. Les ONG « droits de l’hommistes » critiquent durement les méthodes du régime, qui nie tout en bloc, y compris la torture, le harcèlement, les prisons dégradantes, etc. Qui a raison ?

Les méthodes du régime sont exécrables et donc condamnables, mais cela dure depuis le milieu de 1990, avec une certaine amélioration au début des années 2000. Cela reprend de plus belle avec la loi sur le terrorisme. Les ONG (à l’exception d’Amnesty International), les militants « droits de l’hommistes » et l’Union européenne qui les finance, ne doivent pas oublier leur silence complice au moment où il était encore possible d’arrêter la machine infernale. A l’époque, leur devise était : « le parapluie des droits de l’homme ne doit pas protéger les intégristes islamiques ».

A un moment où de nombreuses démocraties, longtemps considérées comme des modèles du respect des droits de l’homme, ne se gênent plus à légaliser la torture, à la pratiquer à ciel ouvert ou à la sous-traiter une allusion aux Etats-Unis, notamment, NDLR, les dénégations du régime tunisien m’étonnent vraiment.

6. La liberté d’expression est clairement un leurre en Tunisie, cela montre-t-il la pusillanimité ou une paranoïa de ce régime ?

Au commencement c’était la paranoïa à laquelle est venue s’ajouter par la suite une bonne dose de pusillanimité. Ce qui est déroutant dans cette affaire, c’est que le pouvoir n’ignore pas que les moyens traditionnels d’expression et d’information qu’il s’ingénie à étouffer, interdire et contrôler sont complètement dépassés. Avec les chaînes satellitaires arabes et l’Internet, relayés par « radio arabe », les gens sont informés en temps réel, de l’événement le plus anodin dans les campagnes tunisiennes, bien avant que ne le relate « le meilleur journal de l’opposition ».

7. Le principal mouvement islamiste local, Ennahda, a subi les foudres du régime depuis 1989 ; croyez-vous que le régime avait vu juste ?

Non, la répression a commencé plus tard, au milieu de 1990, pratiquement en même temps que l’occupation du Koweït par les troupes irakiennes. Pour la vérité, il faut rétablir les faits et rappeler la chronologie des événements. Au début, le régime a bien géré ce dossier, ce qui lui a valu les louanges dithyrambiques de Rachid Ghannouchi cher d’Ennahda, NDLR. Ainsi, il a libéré les prisonniers politiques, près de 2000, réglé par un non-lieu ce qu’on appelle « l’affaire du groupe sécuritaire », en fait une piètre tentative de coup d’Etat du mouvement de la tendance islamique (MTI). Il a décrété une amnistie générale « plutôt sélective », réintégré les prisonniers libérés dans leurs fonctions et emplois.

Il a légalisé le syndicat étudiant islamiste (UGTE), nommé Abdel Fettah Mourou, deuxième homme d’Ennahda, au sein du Conseil supérieur islamique. Il a associé un dirigeant de ce mouvement à la signature du pacte national, en son nom propre et au même titre que les chefs des partis légaux (hypocrisie partagée), autorisé la participation des listes indépendantes (soutenues par Ennahda) aux élections législatives de 1989 et autorisé la parution d’un journal du mouvement en janvier 1990.

A partir du milieu de 1990, les choses se sont gâtées, mais Ennahdha qui joue à la victime innocente depuis 17 ans, ne doit pas oublier sa lourde responsabilité politique dans le déclenchement des hostilités avec le pouvoir ni sa responsabilité morale dans le drame prisonniers politiques.

J’estime en tout cas, que le pouvoir a le droit de se défendre et défendra la société dont il a la charge contre les menées subversives mais dans le respect de la loi et des droits humains et sans aller jusqu’à instituer un régime de punitions collectives, de généraliser la répression et de traumatiser toute une société. Ben Ali a fait le choix que l’on connaît, aidé et soutenu à l’époque par nombre de « leaders démocrates » et militants « droits de l’hommistes « actuellement dans l’opposition.

8. Pour autant, malgré la répression, croyez-vous que l’islam politique exerce encore de l’attrait auprès de la population ?

L’islam politique n’est pas un phénomène passager. Il est consubstantiel de l’islam et sert souvent de révélateur des crises internes de ses sociétés.

Est-ce qu’il a encore de l’attrait auprès de la population ? Sûrement et pour longtemps encore, parce qu’il se nourrit, entre autres, de la confusion, savamment entretenue, entre islam et islamisme. Actuellement il ne dispose d’aucun encadrement politique et ne semble pas capable de produire de sitôt un projet politique et social concret et crédible. Dans une consultation électorale démocratique et malgré les apparences, il risque d’être minoritaire sans pour autant être marginal.

En Tunisie, l’avenir, après Ben Ali, est pour « un parti politique pour un peuple musulman », c’est-à-dire une formation capable d’apaiser et de stabiliser les rapports entre les sphères religieuse et politique, à l’instar du parti de la justice et du développement (AKP) en Turquie, mais aussi de l’Istiglal et du Destour au début des indépendances du Maroc et de la Tunisie.

9. Peut-on dire que Al-Qaïda ou la mouvance terroriste jihadiste en général menace la Tunisie ? Si oui, comment et pourquoi ?

Il y a une différence entre ceux qui s’engagent aux côtés de la résistance irakienne par exemple et ceux qui s’attaquent à des objectifs civils ou militaires dans leur propre pays ou dans des pays étrangers. Ceci dit, cette mouvance s’est illustrée par certains actes en Tunisie, tels que l’attentat de Djerba en 2002 et les événements de Soliman en décembre 2006.

Je ne crois pas qu’ils aient un rapport avec Al-Qaida ou que la Tunisie soit menacée par cette dernière. Le ministre algérien de l’Intérieur et des experts en terrorisme de l’International Crisis Group (ICG), ont démenti récemment les relations entre Al-Qaida et le GSPC algérien qui aurait recruté des Tunisiens. Il faut remarquer qu’on a souvent annoncé Al-Qaïda dans les régions sur lesquelles les Américains avaient des visées, et si la Tunisie était limitrophe du grand Sahara, le spectre d’Al-Qaida s’y serait aussi manifesté.

Propos recueillis par BAUDOUIN LOOS

(Source : « Le Soir », (Quotidien – Belgique), le 5 novembre 2007)

 


 

Carte blanche

Mohamed Abbou Avocat dissident et écrivain tunisien

Vingt ans de souffrances

lundi 05 novembre 2007, 15:28

 

 

Comme il est affligeant de vivre dans une société dirigée par un Etat qui ne garantit ni les droits de la personne, ni sa dignité, ni sa liberté ; et qui mobilise ses institutions pour réprimer les citoyens, sans rendre compte de ses actes à personne.

Et comme il est pénible pour un intellectuel de constater que la majorité des enfants de son pays sont sous l’empire de la peur, préoccupés à assurer la subsistance de leur famille, en quête de sécurité personnelle et de salut individuel.

Comme il est triste de constater que l’opposition n’a pas réussi à mettre en échec le despotisme, malgré les sacrifices consentis.

Un Etat de non droit, un peuple sous l’emprise de la peur, une opposition faible ; voilà la moisson de 20 ans de mandat du 2e Pprésident de la « République ».

L’Etat est nécessaire pour assurer la sécurité de la société, instaurer la justice à la place de la vengeance individuelle, édicter des lois et les faire respecter par des citoyens égaux en droits et en devoirs.

Dans notre pays, la Tunisie, il nous arrive souvent de revenir à cette définition comme référence dans notre vie quotidienne. Mais nous faisons face à des institutions qui fonctionnent plus ou moins normalement. Nous faisons face à un appareil sécuritaire qui poursuit par moments les criminels et les sanctionne ; et par moments agit comme un gang qui menace, frappe et torture, sans aucun respect des lois qu’il est sensé appliquer. Cet appareil sécuritaire place au dessus des lois les puissants qui n’ont de compte à rendre à personne. Ceux-là, il n’est pas permis de les critiquer, ni de les dénoncer, ni d’évoquer leur corruption sous peine d’être jeté en prison. Aucune attention n’est prêtée aux cris de secours venant de l’intérieur, ni aux déclarations de nos partenaires en Occident, qui sont parfois contradictoires avec leurs positions secrètes.

Ces mêmes institutions sont parfois utilisées pour persécuter les adversaires du pouvoir en place et qui osent le critiquer. Leurs ressources sont coupées, ils sont affamés et ils sont humiliés de façon qu’ils n’oublieront jamais ; ils sont agressés dans la rue et leurs enfants sont soumis à des harcèlements ; tout cela afin de garantir la pérennité du régime et que le pouvoir établisse son pouvoir absolu. Un pouvoir qui appuie sa légitimité sur des élections qui se déroulent dans un climat de peur ; une minorité d’électeurs est contrainte de voter en sa faveur en mettant dans l’urne le bulletin rouge de façon ostentatoire. Pendant que les chefs de bureau de vote se chargent de voter pour les absents, et que certains partenaires occidentaux se chargent eux de faire reluire l’image de la Tunisie à l’étranger.

Le régime tunisien dissémine la peur auprès des citoyens en vue d’asseoir son pouvoir.

Lorsque j’ai osé dénoncer la réalité de la situation qui prévaut en Tunisie, j’ai transgressé l’interdit en dénonçant les scandales et évoquant le sujet de la corruption. C’est alors que le régime a décidé de frapper les intérêts de ma famille et de la persécuter ; puis il m’a jeté en prison en cherchant à m’humilier.

Et malgré les nombreuses pressions qu’il a subies, il a prolongé ma détention au maximum. Non parce que je dirigerais une association qui constituerait une menace pour le régime, ni même parce que je disputais au potentat son trône, couvert de sang et de larmes, mais seulement parce que je représentais désormais à ses yeux un modèle de contestation qui risquait de contaminer d’autres franges de la société.

Ceci n’est qu’un aperçu de la politique suivie par ce régime 20 ans durant. Une politique également suivie par l’ancien Président.

Je me remémore une anecdote rapportée par feu Mohamed Chakroun, alors qu’il était ministre dans le gouvernement Bourguiba et qu’il l’accompagnait pour inaugurer une caserne de la garde nationale qui venait d’être « tunisifiée ». Il lui dit : « Il faudrait maintenant que le Tunisien aime la garde nationale après avoir craint la gendarmerie » ; et Bourguiba de rétorquer : « Il faudrait plutôt que sa peur du gendarme reste vivace ».

Cette politique de la peur (comme instrument de gouvernement) est devenue une tradition et s’est renforcée et étendue sous le Président actuel. Elle est même devenue une école avec ses techniques sophistiquées. Le pouvoir va jusqu’à diffuser ses faits d’armes en la matière pour que le citoyen comprenne bien qu’il est intransigeant et n’a aucune pitié pour ceux qui le défient.

La sanction ne se fait plus seulement par la voie de l’emprisonnement ou de la torture, mais elle englobe également les représailles collectives, en affamant les familles. De façon à ce que celui qui éprouve une disposition à sacrifier sa liberté, sa santé et sa vie pour une cause, comprenne bien qu’il expose également sa famille et ses enfants à la faim, à la terreur et à la désolation.

Le pouvoir a réussi admirablement dans cette politique et, jusqu’à présent, la majorité des citoyens tunisiens est terrorisée à l’idée de parler de politique.

La Tunisie a une spécificité qui la distingue des autres pays arabes : la société tunisienne est une société homogène ethniquement et religieusement. La majorité des croyants est sunnite. La Tunisie ne compte pas de minorité ayant besoin d’une protection particulière, ni de séquelles de tribalisme. Par conséquent, on ne trouve en Tunisie aucune des causes qui favorisent les conflits dans d’autres pays arabes.

Par ailleurs, les civilisations qui s’y sont succédées, ainsi que ses caractéristiques naturelles et géographiques, ont conféré à ses habitants un tempérament modéré et tolérant. Ajouté à cela, le pays connaît depuis 50 ans une fréquentation de touristes importante auxquels se sont accoutumés les Tunisiens. Ces derniers bénéficient de surcroît d’un niveau d’éducation élevé, dû aux choix faits par la Tunisie au lendemain de l’indépendance.

Tous ces atouts sont suffisants pour prédisposer la Tunisie à devenir une démocratie où prévaut un Etat de droit apte à assurer la dignité, la liberté et le progrès à tout citoyen, sans crainte de scissions ou de chaos.

L’opposition tunisienne est parfaitement consciente de ces données, mais elle n’arrive pas encore à trouver la voie pour devenir une vraie force politique. Oscillant entre la peur de la répression et ses divisions idéologiques – parfois entretenues par le pouvoir – elle a échoué jusqu’à présent à attirer vers elle un nombre significatif de citoyens en les libérant de la peur.

Affligeante réalité que celle – ci ; comme si notre rêve refusait de se réaliser.

Mais la conscience du caractère critique de la situation et les rapprochements qui commencent à se faire jour entre les différents courants politiques d’une part ; et certains indices allant dans le sens du rejet de ce régime d’autre part, font que nous ne renoncerons pas à notre rêve, quand bien même la répression se resserre et les voix qui sèment le doute et répandent l’abattement se font pressantes.

Notre détermination et notre discernement nous conduiront vers la voie de la victoire, et si nous n’y parvenions pas, notre confiance en nos enfants est entière.

(Source : « Le Soir », (Quotidien – Belgique), le 5 novembre 2007)

 


 

Carte blanche

 

Taieb Moalla Auteur, journaliste canadien d’origine tunisienne, vivant à Québec. Il a été correspondant du « Soir « en Tunisie

 

Tunisie : histoire d’un gâchis

lundi 05 novembre 2007, 18:49

 

 

Vingt ans après son arrivée au pouvoir, le président tunisien Zine Ben Ali règne d’une main de fer sur un pays qui possédait pourtant tous les atouts pour devenir la première démocratie du monde arabe et musulman. Chronique d’un gâchis.

Le 7 novembre 1987, Ben Ali devenait le deuxième président de la République en succédant au « père de la nation », le très malade Habib Bourguiba. À l’époque, le pays tanguait dangereusement entre les clans obsédés par la succession du vieux raïs et un mouvement islamiste conquérant. L’énigmatique et peu connu Ben Ali, issu de l’obscur milieu du renseignement, réussissait alors un véritable tour de force en déposant son prédécesseur sans effusion de sang et en respectant les formes légales.

« L’époque que nous vivons ne peut plus souffrir ni présidence à vie ni succession automatique à la tête de l’État desquelles le peuple se trouve exclu. Notre peuple est digne d’une vie politique évoluée et institutionnalisée, fondée réellement sur le multipartisme et la pluralité des organisations de masse », annonce à la radio Ben Ali dans son premier discours-programme.

La presse mondiale salue rapidement « la révolution du jasmin ». Difficile d’accuser les faiseurs d’opinion occidentaux d’excès de zèle lorsqu’on sait que les plus farouches opposants au système de l’État/Parti ont quasi unanimement applaudi l’avènement du nouveau pouvoir à Carthage.

Cela dit, les promesses de démocratisation de la vie publique, une croissance continue du PIB, un taux de natalité contrôlé et un statut envié des femmes ne sont pas une garantie absolue de succès. La personnalisation à outrance du pouvoir et la répression de toute voix discordante sont (re)devenues le lot quotidien des Tunisiens.

Après une embellie démocratique de deux ans (1987-1989), ayant vu s’épanouir une presse relativement libre, le régime de Ben Ali s’est montré sous son vrai visage en emprisonnant les islamistes dans des procès dénoncés par les organisations de défense des libertés à l’extérieur et à l’intérieur du pays. Au milieu des années 1990, le pouvoir tunisien s’attaquait à ce qui restait de la gauche politique. Après avoir mis les syndicats et la presse au pas, le pouvoir glissait petit à petit vers le despotisme. Même la limite légale de trois mandats présidentiels finissait par sauter à la suite d’un référendum, organisé en 2002, modifiant la Constitution.

« En Tunisie, la dictature policière a pris en otage le pays et mis en coupe réglée son économie développant de nouvelles pratiques mafieuses qui s’accommodent mal d’une bonne gouvernance et d’une presse libre. Les chances de la Tunisie d’évoluer vers un processus démocratique ont ainsi été usurpées », soutient Sihem Bensedrine, rédactrice en chef du magazine en ligne Kalima (censuré en Tunisie) et porte-parole du Conseil national pour les libertés en Tunisie (non reconnu).

Depuis 1987, le président et son parti récoltent régulièrement plus de 90 % des suffrages lors des différentes échéances électorales. Fort d’un contrôle étroit de la société, Ben Ali peut théoriquement continuer à gouverner jusqu’en 2014. La campagne électorale présidentielle de 2009 a d’ailleurs déjà été lancée par les éternels laudateurs qui appellent le président sortant à se représenter à la tête du pays.

Aujourd’hui, le paysage médiatique tunisien est un des plus arriérés du monde arabe et musulman. La plupart des journaux, tant publics que privés, chantent les louanges du bien aimé président et de son parti. La télévision et la radio publiques abreuvent leur auditoire de litanies à la gloire d’un chef qui reçoit, explique, ordonne, dispose, insiste et donne des instructions à longueur de journée.

Côté politique, les partis de l’opposition réelle – nous excluons de notre analyse « l’opposition cosmétique « qui sert essentiellement de faire-valoir démocratique au régime – sont sous étroite surveillance. Leurs membres sont soumis à un contrôle étroit et à une répression constante. Les organisations indépendantes, comme la Ligue tunisienne de défense des droits de l’Homme, vivent des sagas politico-judiciaires et sont régulièrement menacées de disparition. L’Université et le principal syndicat du pays, berceaux de la contestation dans les années 1970 et 1980, sont plus au moins rentrés dans le rang. Tout comme la justice totalement inféodée au pouvoir exécutif.

Une des rares armes dont disposent les opposants au régime demeure la grève de la faim. Deux dirigeants du Parti démocratique progressiste (légal), Maya Jribi et Néjib Chebbi, ont cessé de se nourrir entre le 20 septembre et le 20 octobre, mettant ainsi leur vie en danger. Ils accusaient l’exécutif d’utiliser le pouvoir judiciaire, qui a ordonné l’expulsion du parti de son local, pour régler ses comptes avec l’opposition.

Ce moyen de lutte individuel, quoique courageux, cache difficilement l’abîme qui existe entre une large partie de la population, peu désireuse d’affronter les risques réels liés à l’engagement politique, et le discours des dissidents. Tant que les revendications de démocratisation de l’espace public ne seront portées que par une infime minorité, l’avenir paraît brumeux. Les quelques mesures de décrispation, que plusieurs anticipent à l’occasion du 20e anniversaire du « Changement », seront un leurre puisqu’elles proviendront d’un régime à la légitimité fort écornée.

Le modèle tunisien, tant vanté par les politiciens occidentaux comme un rempart contre l’islamisme, n’est qu’une vaste fumisterie. En créant un vide politique et culturel autour de lui, le pouvoir ne peut que jouer le jeu de tous les extrémismes. La récente et galopante ré-islamisation de la société tunisienne, naguère une des plus laïques du monde musulman, en est une des illustrations. Ce repli identitaire est un danger qui guette les acquis de la Tunisie moderne.

(Source : « Le Soir », (Quotidien – Belgique), le 5 novembre 2007)

 


 

Carte blanche

 

Driss El Yazami Secrétaire général de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH)

Jean-Pierre Dubois Président de la Ligue des droits de l’Homme et du citoyen (LDH)

Kamel Jendoubi Président du Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT)

 

Ubu Roi a vingt ans

lundi 05 novembre 2007, 19:11

 

 

Pour beaucoup, c’est comme si c’était hier. Le 7 novembre 1987, Zine El Abidine Ben Ali, prenait le pouvoir à la faveur de ce que l’on appellera très vite un « coup d’Etat médical ». Il y a vingt ans donc, que la vie politique tunisienne vit sous la coupe du Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD), parti présidentiel omnipotent. Vingt ans que le pays se fige, dans une dictature qui ne veut pas dire son nom, en totale contradiction avec l’image que souhaite se donner ce président hors normes, celle de « chantre de la démocratisation du pays ».

D’aucuns objecteront que le pays connaît une croissance économique continue, et rayonne aujourd’hui sur tout le Maghreb ; ils n’hésiteront pas également à revendiquer l’héritage politique de Bourguiba toujours présent. Ils évoqueront enfin la nécessaire efficacité de la lutte antiterroriste, pour justifier l’ampleur de la répression à l’encontre de toutes les voix dissidentes.

Les arguments de ces défenseurs d’un » réformisme à la tunisienne » sont connus, usés par les laudateurs du régime, et trop souvent avancés, jusqu’au sein même des instances internationales, où des associations créées de toutes pièces par le régime, s’acharnent à empêcher les organisations indépendantes de s’exprimer. Nous pourrions être fatigués de devoir sans cesse les contrer, de devoir rétablir continuellement certains faits, pourtant indéniables.

Ainsi, si le statut des Tunisiennes a effectivement pu être considéré comme le plus progressiste de la région dans les années 80, force est de constater qu’il n’a guère évolué depuis. Par ailleurs, toujours citée en exemple en matière de réformes économiques, la Tunisie ignore encore l’impact du démantèlement des accords textile sur les droits économiques et sociaux des ouvrières de ce secteur. Quant aux investissements effectués dans le domaine des Nouvelles technologies de l’Information, ils ne peuvent guère se concrétiser dans les faits, au regard des graves atteintes aux libertés d’expression et d’information constatées chaque jour dans le pays. La « Société tunisienne de l’information » demeure extrêmement bloquée, et ses acteurs pratiquent toujours l’autocensure à outrance, de peur de subir les foudres du régime.

Par ailleurs, si des réformes politiques ont pu voir le jour durant les quelque temps qui ont suivi l’accession au pouvoir de Ben Ali, il ne s’agit bien souvent que de réformettes, sur lesquelles le président est revenu depuis. La décision prise en 2002 d’étendre le nombre de mandats présidentiels – pourtant limités à trois en 1988, en constitue à ce titre l’un des exemples les plus édifiants. Réélu en 2004 pour un quatrième mandat (avec 99,91 % des voix), le président Ben Ali pourra briguer un cinquième mandat, sans aucune chance pour l’opposition de pouvoir le concurrencer.

Depuis vingt ans, le verrouillage de la société tunisienne est tel que plus aucun corps n’ose, ou ne peut désormais contester le régime. De l’Union Générale des Travailleurs Tunisiens, à la vénérable Association des Magistrats Tunisiens, on ne compte plus les tentatives réussies de main-mise du pouvoir sur les principaux leviers de la société civile tunisienne. Quant à ceux qui osent encore résister à cette emprise, ils tombent immédiatement sous le coup d’une répression implacable, moderne, et multiforme. De l’arrestation de cyberdissidents, à la surveillance plus classique de défenseurs des droits de l’Homme, jusqu’au tabassage en règle de militants ou de leurs familles, l’imagination du pouvoir semble sans limites. Jusqu’à la torture systématique de tous les islamistes emprisonnés.

Harcelée judiciairement, la Ligue Tunisienne de défense des droits de l’Homme(LTDH) ne peut quant à elle toujours pas aujourd’hui tenir son congrès, et nombre de ses sections ont été officiellement interdites d’activités. La réouverture récente du siège du Parti démocrate progressiste Tunisien (PDP), un des derniers espaces libres de réunion en Tunisie avec le local de la LTDH, aurait pu être une source de satisfaction. Mais le prix à payer – une grève de la faim de près de 30 jours –, montre bien le degré extrême de détermination qu’il faut aux militants tunisiens pour que leur voix fasse aujourd’hui entendre.

Ces faits sont largement connus sur le plan international. Mais les soutiens extérieurs de la Tunisie sont nombreux, qui continuent de voir dans ce pays un allié de poids face à la montée de « la menace intégriste », ou un partenaire économique fiable. Le climat sécuritaire qui y règne y est en effet présenté comme une preuve de stabilité. A tort d’ailleurs, si l’on se réfère aux derniers affrontements qui ont eu lieu au début de l’année, entre groupes salafistes et forces de l’ordre, et qui ont démontré, si besoin était, l’inefficacité d’une telle politique.

Absurde, brutale, paradoxale, la Tunisie d’aujourd’hui présente assurément bien des traits communs avec la « Pologne » mythique d’Alfred Jarry. Malheureusement, il s’agit bien ici d’un pays réel, où les acteurs paient au quotidien le délire paranoïaque d’un pouvoir absolu. Autrefois proposée comme modèle progressiste dans le monde arabo-musulman, la Tunisie est devenue un pays monolithique et corrompu.

En 2009, M. Ben Ali se représentera donc probablement une nouvelle fois pour briguer un cinquième mandat présidentiel et nul ne doute qu’il y parvienne sans difficultés, si les défenseurs des droits de l’Homme ne reçoivent pas le soutien qu’ils sont en droit d’attendre de la part des démocraties partenaires de la Tunisie. Ainsi, en juin prochain, M. Ben Ali sera probablement l’un des invités de marque du sommet des chefs d’Etat de l’Union méditerranéenne, qui constitue l’un des grands objectifs de la présidence de M. Nicolas Sarkozy. Verra-t-on alors la question des libertés en Tunisie en particulier, et dans d’autres pays de la région en général, inscrite à l’ordre du jour ?

(Source : « Le Soir », (Quotidien – Belgique), le 5 novembre 2007)


 

Reporters sans frontières Communiqué de presse 5 novembre 2007 TUNISIE La censure de la presse tunisienne Un cas d’école depuis vingt ans

 
Le président Zine el-Abidine Ben Ali fêtera le 7 novembre 2007 son vingtième anniversaire à la tête de la Tunisie. Les journaux proches du pouvoir, qui constituent la grande majorité du paysage médiatique tunisien, louent, comme il est de rigueur, le bilan du “président du changement”. La presse locale ne retient que le développement économique et social, omettant d’évoquer les questions des libertés civiques et des droits de l’homme, bafoués depuis vingt ans. Sous prétexte qu’il constitue un “rempart contre la menace islamiste”, le président Ben Ali bénéficie des faveurs de la plupart des pays occidentaux. A l’instar de l’Union européenne dont l’accord d’association signé en 1995 avec la Tunisie est loin d’être aussi contraignant sur la question des droits de l’homme que ceux passés avec les pays de la zone Afrique-Caraïbes-Pacifique. Si les premières années de son arrivée au pouvoir ont été synonymes de “décrispation”, le président Ben Ali a très vite cherché à prendre en main l’information. Au début des années 1990, et plus particulièrement au moment de la première guerre du Golfe, sonnera l’heure de la fin du pluralisme et de la liberté d’expression en Tunisie. Les journaux indépendants, très actifs à la fin de la présidence de Habib Bourguiba, ont été fermés les uns après les autres. En vingt ans, le président Zine el-Abidine Ben Ali a placé sous tutelle tous les contre-pouvoirs, à commencer par la presse et la justice. Au cours de cette période, au moins 48 publications ont été visées par des mesures de censure (saisie, suspension, fermeture, etc), pour la moitié d’entre elles, dès les six premières années de son mandat. Durant toutes ces années, le président Ben Ali n’a eu de cesse de faire taire les voix dissidentes au sein de la presse comme de la société civile. Entre séduction, intimidation et répression, le pouvoir s’est accaparé les principaux espaces d’information, aujourd’hui gérés par l’Etat directement ou par des proches du régime. A l’approche de ce vingtième anniversaire, une grève de la faim, une de plus pour défendre la liberté d’expression et d’association, a été menée par des opposants. En Tunisie, cela semble être l’unique moyen d’être entendu par les autorités. En 2000 le journaliste Taoufik Ben Brik, en 2002 l’avocate Radhia Nasraoui, en 2003 le journaliste Hamadi Jebali, en 2005 les journalistes Abdallah Zouari et Lotfi Hajji, l’avocat Mohammed Abbou et en 2006 le journaliste Slim Boukhdir, pour n’en citer que quelques-uns, ont eu recours à cette méthode pour lancer des appels à la communauté internationale. Le 20 septembre 2007, c’était au tour de Maya Jribi, secrétaire générale du Parti démocratique progressiste (PDP), et de Mohamed Néjib Chebbi, directeur de l’hebdomadaire Al-Maoukif, organe du parti, d’entamer un jeûne pour protester contre une procédure judiciaire visant à les expulser de leurs locaux à Tunis. Le parti d’opposition a accusé le gouvernement d’avoir poussé le propriétaire des lieux à rompre le bail sous prétexte d’”usage abusif des locaux”. Au bout de trente jours, les deux opposants ont mis un terme à leur grève de la faim après avoir trouvé un accord avec le propriétaire, suite à l’intervention des autorités. Faux-semblant de pluralisme Al-Maoukif (Le point de vue) continuera donc de paraître, pour le moment. Cet hebdomadaire arabophone est distribué à 10 000 exemplaires, deux fois plus qu’il y a deux ans. Cette progression s’est faite en dépit de nombreux obstacles. Le journal est privé de toute subvention publique. Il est, par ailleurs, boycotté par l’ensemble des annonceurs privés, sauf un, lui-même en conflit avec les autorités. “Nos problèmes ne sont pas seulement d’ordre financier”, a expliqué à Reporters sans frontières son rédacteur en chef Rachid Khechana. “Nous rencontrons de nombreuses difficultés pour accéder à l’information. Les officiels refusent de répondre à nos questions ou de nous recevoir. Il nous faut alors trouver d’autres canaux et sources d’information.” Toujours selon le rédacteur en chef d’Al-Maoukif, “les imprimeurs et les diffuseurs de la presse indépendante subissent d’importantes pressions – fiscales par exemple -, ce qui les oblige à distribuer le journal avec parfois jusqu’à 48 heures de retard”. Deux autres publications appartenant à des partis d’opposition – l’hebdomadaire Mouwatinoun et le mensuel Attariq Aljadid – font face aux mêmes contraintes. Le Forum démocratique pour le Travail et les Libertés (FDTL) a lancé l’hebdomadaire Mouwatinoun (Citoyens) en janvier 2007, après avoir obtenu, chose extrêmement rare, une autorisation en moins de six mois. Mustapha Ben Jaafar, le directeur de la publication, a pourtant confié à Reporters sans frontières que le journal souffrait d’une véritable discrimination au niveau de la distribution. “Rares sont les kiosques qui l’exposent. Mouwatinoun est rendu invisible par la volonté des autorités et la peur des vendeurs”, a-t-il affirmé. Ces entraves ont, bien entendu, des conséquences financières sur le journal qui a déjà réduit sa diffusion de 5000 à 3000 exemplaires. Ces journaux de partis ne sont pas à l’abri de la censure et font parfois l’objet de saisies non officielles. “Il arrive que des policiers confisquent un numéro dans tous les kiosques sans nous prévenir ou nous donner une raison”, a expliqué Mustapha Ben Jaafar. Les publications indépendantes continuent de faire cruellement défaut. Un grand nombre de demandes de créations de nouveaux titres n’ont jamais abouti. Sihem Bensedrine a déposé depuis 1999 quatre déclarations pour l’enregistrement et la parution de l’hebdomadaire bilingue Kalima auprès du ministère de l’Intérieur. Chaque fois, les autorités ont refusé de lui délivrer le récépissé qui seul autorise un imprimeur à mettre un journal sous presse. Le site Internet du journal est inaccessible dans le pays, obligeant la rédaction à le diffuser sous forme de newsletter, envoyée par courrier électronique. Le reste de la presse privée adopte dans son ensemble une ligne éditoriale progouvernementale teintée de prosélytisme. Elle est devenue le principal support des attaques orchestrées contre les opposants au régime, qu’il s’agisse de journalistes, de grévistes, d’intellectuels ou d’hommes politiques. Les journalistes de ces rédactions, comme ceux qui travaillent pour les médias publics, ont pour consigne de ne traiter que les informations émanant de l’agence officielle Tunis Afrique Presse (TAP), placée sous le contrôle du ministère de l’Intérieur. De l’aveu de l’Association des journalistes tunisiens (AJT), “les sujets qu’il est permis de couvrir sont ceux contenus dans les prévisions de la TAP, et la plupart du temps il s’agit d’activités officielles. Toute initiative supplémentaire n’est pas la bienvenue”. Les journalistes de la presse officielle – les deux journaux gouvernementaux, La Presse et El-Sahafa et les deux organes du RCD (parti du président Ben Ali) Le Renouveau et El Houria – ne disposent d’aucune marge de man¦uvre et s’en tiennent rigoureusement à cette directive. Ils remplissent clairement le rôle d’outil de propagande. Parfait exemple de cette langue de bois : “En ce 20e anniversaire du Changement que les Tunisiens, toutes catégories et tous âges confondus, ont l’insigne fierté de célébrer, les dividendes du parcours économique, politique et social initié et promu par le président Ben Ali se succèdent pour nous conforter dans la conviction que l’expérience tunisienne en matière de développement constitue, bel et bien, un modèle à suivre”, pouvait-on lire, le 4 novembre 2007, dans les colonnes de La Presse, premier quotidien tunisien en langue française. Le secteur de l’audiovisuel est encore plus uniforme. Les télévisions d’Etat (Canal 7 et Canal 21) ne diffusent que des informations favorables à la politique gouvernementale. Il existe bien quelques télévisions et radios privées, mais elles appartiennent toutes à des personnalités proches du pouvoir. A titre d’exemple, le ministre des Affaires étrangères est le plus gros actionnaire de Mosaïque FM, tandis qu’Hannibal TV, inaugurée un 7 novembre, est la propriété d’un membre de la famille de la femme du président tunisien. Une seule chaîne de télévision privée – Al-Hiwar Attounsi (Le Dialogue tunisien) – vient diversifier le paysage audiovisuel tunisien, mais ses retransmissions sont limitées à une heure par jour pour des questions de moyens. Son directeur, Tahar Ben Hassine, n’a jamais obtenu les autorisations nécessaires pour lancer la chaîne dans son pays. Al-Hiwar Attounsi diffuse ses programmes depuis 2002 à partir de l’Italie via satellite. “Le flou le plus total entoure les critères de distribution des licences audiovisuelles. Les refus ne sont jamais motivés. La décision est directement soumise à l’agrément du président Ben Ali”, a déclaré Tahar Ben Hassine à Reporters sans frontières. Pas de traitement de faveur pour la presse étrangère “Si vous êtes invités en Tunisie et que vous souhaitez remercier vos hôtes de leur hospitalité, apportez-leur la dernière édition d’un journal censuré dans leur pays.” Cette phrase d’un journaliste tunisien résume le déficit d’information de ses concitoyens, privés d’un grand nombre de publications étrangères interdites. Le Canard enchaîné, Al Hayat, Charlie Hebdo, entre autres, ne sont plus disponibles dans le pays. De nombreuses autres publications sont occasionnellement interdites d’entrée sur le territoire, de manière arbitraire, ou retardées pendant plusieurs jours à la frontière. Ces saisies ne sont pas effectuées au hasard. Elles sont, dans la plupart des cas, liées à la publication d’articles sur les dirigeants du pays, à commencer par le président Ben Ali. La chaîne de télévision qatarie Al-Jazira a, elle aussi, un lourd contentieux avec les autorités tunisiennes. Ces dernières refusent d’accréditer son correspondant, Lotfi Hajji, et empêchent la chaîne d’ouvrir un bureau. En octobre 2006, la Tunisie avait même décidé de fermer son ambassade au Qatar pour protester contre la “campagne hostile” d’Al-Jazira suite à la diffusion d’une interview de l’opposant tunisien Moncef Marzouki. Les journalistes étrangers ne rencontrent généralement pas de difficultés majeures pour se rendre en Tunisie. Mais une fois sur place, ils sont soumis à la surveillance de policiers en civil qui ne les empêchent pas de travailler mais intimident, par leur présence même, ceux qui voudraient leur parler. L’activité des correspondants locaux de médias étrangers est étroitement contrôlée et parfois interdite. Encore récemment, la journaliste Flore Dussey et son cameraman, de la Télévision Suisse Romande (TSR), ont pu se rendre en Tunisie le 2 novembre 2007, mais il ne leur pas été permis d’interroger la population dans le cadre de leurs reportages. “Nous avons été constamment suivis tout au long de notre séjour dans le pays. Nous avons demandé une autorisation de tournage à l’ATCE (Agence tunisienne de communication extérieure) qui ne nous a pas été accordée. Au lieu de cela, un fonctionnaire de l’agence nous a accompagnés pendant tous nos déplacements. Notre chaperon a refusé la présence d’un collaborateur d’Al-Hiwar Attounsi qui devait nous accompagner sur un lieu de tournage”, a déclaré la journaliste suisse à Reporters sans frontières. Fait rare, en novembre 2005, l’envoyé spécial du quotidien Libération, Christophe Boltanski, a reçu un coup de poignard dans le dos, sous le regard passif de policiers. Le journaliste préparait un reportage sur la situation des droits de l’homme en Tunisie en marge du Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) organisé à Tunis par les Nations unies. Quand les autorités jouent au chat et à la souris sur la Toile L’Internet n’échappe pas non plus au contrôle des autorités. Les cybercafés sont surveillés, en province les internautes doivent parfois produire une pièce d’identité avant d’accéder à un ordinateur, et il n’est pas rare que leurs propriétaires demandent de ne pas naviguer sur certains sites, jugés “subversifs”, pour leur éviter des ennuis. Il est vrai que selon la loi tunisienne, ils sont responsables des activités de leurs clients. Le régime tunisien met ainsi à contribution les gérants de cybercafés dans sa politique de répression et de contrôle. Pour tout téléchargement ou ajout de pièce jointe à un e-mail, le client doit passer par le serveur central, à savoir l’ordinateur du gérant. Par ailleurs, grâce à l’adoption en 1998 d’un Code de la poste, toujours en vigueur, les autorités tunisiennes peuvent contrôler à tout moment les messageries électroniques des internautes. Cette loi autorise en effet l’interception de tout courrier pouvant “porter atteinte à l’ordre public et à la sécurité nationale”. Le ministère de la Communication opère ainsi une surveillance méticuleuse des informations qui s’échangent sur la Toile. Les blogueurs et les responsables des sites indépendants n’échappent pas aux sanctions. L’avocat Mohammed Abbou a passé 28 mois en prison pour ses écrits publiés sur des sites d’opposition. Depuis sa sortie de prison, le 24 juillet 2007, l’avocat s’est vu interdire, à deux reprises, de quitter le territoire tunisien. Dans l’un des cas, il devait se rendre à Londres pour enregistrer une émission sur les droits de l’homme. Comme ceux de plusieurs organisations de défense des droits de l’homme et médias étrangers, le site Internet de Reporters sans frontières n’est pas accessible en Tunisie. Les autorités bloquent et débloquent régulièrement l’accès à certains sites afin de se prémunir d’accusations de censure. Les connexions privées de certains journalistes et opposants sont coupées pour “des problèmes techniques” ou alors, leur débit est diminué afin d’augmenter le temps de téléchargement des pages Internet et réduire ainsi leur possibilité de consulter des sites. S’il existe aujourd’hui en Tunisie près d’une douzaine de fournisseurs privés d’accès Internet, l’opérateur Planet.tn, propriété de l’une des filles du président Ben Ali, continue de détenir la plus grosse part de marché. Au pouvoir depuis 1987, le président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali est considéré par Reporters sans frontières comme l’un des 34 prédateurs de la liberté de la presse dans le monde. La Tunisie occupe la 145e place sur 169 du classement mondial de la liberté de la presse, établi par Reporters sans frontières en octobre 2007. North Africa & Middle-East Desk Reporters Without Borders 47 rue Vivienne  F – 75002 Paris Tél : + 33 1 44 83 84 78 Fax : +33 1 45 23 11 51 E-mail : moyen-orient@rsf.org www.rsf.org


Un zoo bientôt sur la colline d’Amilcar

 
Délicate attention du «Guide» libyen ! Connaissant la passion (héréditaire) des Materi pour les animaux exotiques, Mouammar Gedafi vient d’envoyer, par avion spécial, un délicieux petit singe, en présent, au gendre préféré du Président Ben Ali, Sakher Materi. La passion animalière de cette noble famille remonterait à l’époque où le papa Saint- Cyrien, Moncef Materi, avait séjourné au Congo, faisant partie du contingent militaire tunisien, au sein de la force multinationale chargée de rétablir l’ordre au Congo dans les années 60. Il est à signaler que le lieutenant Materi, avait participé en 1962 à la tentative de coup d’etat contre le président Bourguiba. Il a été condamné à perpétuité. Par la suite, il a été libéré en juin 1973. Le Général Ben Ali, après son accession au pouvoir le 7 novembre 1987, l’a reçu, l’a décoré et a donné des instructions pour que ses émoluments salariaux lui soient versés de décembre 62 en novembre 87, avec les promotions militaires affairant à son grade. Collectionneur dans l’âme, et avant de se mettre à collectionner les voitures de prix (Aston-Martin, Bentley ou Porsche Cayenne…), le jeune Sakher s’est constitué une collection impressionnante d’animaux sauvages. Parmi les plus belles pièces, on recense déjà un tigre du Bengale, une douzaine d’aras d’Amazonie (ces somptueux perroquets au plumage rouge et rutilant), et quelques gazelles et Antilopes. Cette précieuse ménagerie se trouve, pour l’instant, en pension, dans le parc du Palais de Carthage. Mais Sakher et son épouse espèrent bien transférer rapidement leur «zoo» au palais de 5000 à 6000m2 couverts, qu’ils sont en train de se faire construire au sommet de la falaise fauve d’Amilcar…, sur une zone, jusqu’ici, protégée, et «Non Acdificandi».   Chacun son style !   En attendant le plaisir d’entendre rugir ses fauves, piailler ses perroquets, et couiner ses sapajous sous les fenêtres de son «Palais d’Amilcar», Sakher ne déteste pas faire vrombir ses bolides sous le nez des badauds, entre Salammbô et le cap de Gammarth… C’est ainsi que les habitants de La Marsa ont eu, récemment, le bonheur et le privilège de voir le gendre Sakher passer sur la Corniche au volant de son Aston-Martin toute neuve. Un «joujou» de gendre gâté, qui vaut «toutes options» entre 250 000 et 300 000 euros (entre 450 000 et 530 000 dinars tunisiens) «hors douane»… Mais, en la circonstance, également «douane comprise» ! puisque Sakher, arguant des deux années passées à vaquer dans une université bruxelloise…, comme un étudiant diplômé, ou en travailleur retraité rentrant au pays…   Fouette, cocher !   Posséder une Aston-Martin, une Bentley, une Porsche-Cayenne à 27 ans à peine, constitue un rare privilège… Mais en plus de la voiture, Sakher peut s’enorgueuillir de posséder aussi un équipage presque aussi chic ! A ses côtés, les Marsois, aussi éberlués qu’émerveillés, ont cru, en effet, reconnaître, dans le rôle de postillon ou de souscocher de fiacre le ministre des Transports, Abderahim Zouari. Heureux et fier de pouvoir être vu dans cette magnifique voiture, aux côtés du gendre du Président… Derrière, peut-être un peu pliée en deux sur la banquette, et son buste opulent un rien comprimé entre ses genoux, et le dossier du siège du noble pilote, mais non moins ravie que son époux, les curieux pouvaient discerner la belle Sarah (madame Zouari). Sans doute le fier trio venait-il de fêter, en cet équipage la reprise des car-ferries, jusqu’ici propriété de l’Etat tunisien, par l’heureux gendre du Président, à un prix «confidentiel», mais que l’on dit néanmoins modeste, pour ne pas dire symbolique. Un pareil «deal» méritait bien quelques tours de carrosse !   Après Souha, Naïma ?   Il ne fait pas bon d’être intime avec la tyrannique Leïla !A peine Souha Arafat, expédiée à Malte, avec sa fille, mais privée de sa nationalité et sans pouvoir emporter ses avoirs (que cette candide avait cru avoir mis à l’abri au pays de son amie Leïla …), voilà que maintenant le torchon s’est mis à brûler aussi entre la présidente et son autre grande copine, Naïma Materi , l’heureuse maman de la nouvelle Star du business tunisien, et gendre présidentiel, Sakher Materi… On se souvient avec quel soin et quelle discrétion (au début !) les deux amies et mères des futurs tourtereaux avaient «mijoté» cette union. Invitant leurs deux enfants à rompre leurs attaches sentimentales anciennes pour s’unir à la convenance de leurs mamans, soucieuses de leur préparer un avenir plus convenable dans un cas, et très prospère dans l’autre… Eh bien ! Aujourd’hui, rien ne va plus entre les deux mères marieuses et non moins mafieuses. Sans les nécessités de «l’Aïd Mabrouk», Leïla n’aurait plus entendu la voix de Naïma, et réciproquement, depuis le début du mois sacré… La brouille se serait nouée au retour de ce voyage, décidément funeste, en Libye de Souha Arafat et Naïma Materi…   La fureur «noire» de Leïla   «Alors? Il paraît que c’est toi qui commandes la Tunisie, maintenant…», lui avait lancé, d’un ton glacial, Leïla à son amie Naïma… L’infortunée Naïma pensait, pourtant, avoir parfaitement rempli son rôle d’accompagnatrice- surveillante et surtout rapporteuse de Souha Arafat, comme le lui avait demandé la présidente, redoutant que son ex-amie Souha aille faire des confidences désobligeantes au Guide libyen. Ce que cette ingrate de Souha ne s’est pas privée de faire ! Racontant à l’ami Mouamar de son défunt mari tout ce qu’elle avait fait pour le couple présidentiel tunisien : rapatriant tous ses comptes secrets en Tunisie, et amenant son ami, le copte Egyptien SAWIRIS (patron d’ORASCOM) à investir pour créer une seconde compagnie de téléphonie mobile, TUNISIANA, dont il offrira, en remerciements, 20% du capital à Souha et Leïla. Le tissu relationnel de Leïla n’allant guère audelà de La Marsa au Nord et d’Hammamet au sud, n’était-ce pas aussi Souha Arafat qui avait mis en rapport Leïla et ses frères avec Guedafi d’abord, puis les Emirs du Golfe? En retour, elle conseilla à cette prévoyante famille d’ouvrir des comptes bancaires à Dubaï, plus sûrs et discrets en cas de «coup dur», de préférence à Monaco, Genève ou Bruxelles où cette famille d’écureuils angoissés cacherait ses «petites» économies. Elle encore qui avait introduit auprès du Cheikh Maktoum de Dubaï, de sa famille et de ses ministres et gestionnaires de «fonds souverains », Leïla, son frère Belhassenn et son nouveau gendre Sakher Materi, leur facilitant leurs investissements à Dubaï et dans les Emirats. Ainsi que les associations dans la reprise de sociétés publiques tunisiennes, comme Tunisie-Télécom, ou dans les investissements émiratis en Tunisie.   Une rivière de diamants et une mallette   Au retour de Tripoli, Naïma Materi rapporta bien scrupuleusement toutes les « médisances » et «calomnies» que cette ingrate de Souha Arafat avait colportées sur son compte et sur celui de sa noble famille auprès de la famille du Guide comme des cercles influents de pouvoir à Tripoli. Racontant même qu’à un moment, le généreux Guide s’était isolé avec Souha, pour lui remettre discrètement une magnifique rivière de diamants et une petite mallette bourrée de devises, alors que la malheureuse Naïma n’aurait rien reçu, elle, qu’un modeste collier en or, comme on en trouve aux Souks de Tunis, en provenance d’Inde ou de Turquie pour parer des «AROUSSAS» (nouvelles mariées) émerveillées … Mais ce qui aurait, peut-être, le plus blessé la pharaone de Tunis Leïla 1, c’est que cette peste de Souha Arafat ait cru bon de relater au Guide libyen les vicissitudes de leur association pour créer l’International School of Carthage… Cette «Alma Mater» imaginée par ces deux quasi-analphabètes et destiné à périmer d’un coup la Sorbonne, Oxford, Cambridge, Harvard et Yale… C’était la «calomnie» de trop ! Deux choses font entrer Ben Ali dans de violentes et dévastatrices colères : Que l’on médise ou ironise sur lui ou les siens. Que l’on contrarie les appétits financiers (insatiables) de sa famille et de ses proches… Souha Arafat avait franchi, au cours de son déplacement à Tripoli, les deux lignes jaunes! Elle devait partir, déchue de sa nationalité, et plus pauvre qu’elle n’était rentrée (ses biens ont été gelés dans les banques tunisiennes)… La réponse du berger à la bergère Mais avant de filer, Souha, redevenue Cosette Arafat, trouva le moyen de donner le coup de pied de l’ânesse. Comprenant que son amie Naïma avait fait, au retour, un rapport très désobligeant, et finalement fatal, à la présidence, Souha décida de se venger. Et elle raconta à Leïla que si elle s’était peutêtre laissé emporter à Tripoli par le bavardage ou l’indignation, sa copine de voyage, Naïma, ne s’était pas montrée non plus très sobre, quoique sur un autre registre … La maman de Sakher n’aurait pas cessé de «faire la roue» faisant valoir que désormais la «voie Royale» pour atteindre le président Ben Ali, comme pour faire des affaires en Tunisie, passait par la famille Materi. Le papa Moncef n’est-il pas chaque matin, avec ses collègues Saint-Cyriens Guediche et Seriati, dans l’antichambre du Président? Ben Ali ne manque pas d’ouvrir très sûrement la porte pour leur demander conseils. Quant aux «affaires», désormais tout le monde est informé, des grandes compagnies occidentales aux Emirs du Golfe, qui savent que plus rien ne passe que par son fils Sakher, gendre préféré du président et heureux papa de la petite Leïla, dont les deux grands-parents, Zine et Leïla, sont littéralement fous. Peut-être plus encore que de leur fils Zine, c’est un miracle de la procréation assistée. Le clan Materi dans la ligne de mire du clan Trabelsi C’était trop ! Leïla, qui, depuis des mois, a les oreilles chauffées à blanc par les «médisances » de ses frères sur «l’arrogance» et les «appétits» insatiables du petit Sakher, (dont le seul mérite il n’a aucun diplôme, n’étant que Bac -3) ! Il prétend avoir passer 2 ans en France et obtenu le bac par équivalence. Il bénéficia d’avoir un profitable mariage, se demanda si sa mère Naïma, poussant son fils en avant sans modération, ne se croyait pas déjà «Reine de Tunisie». Qu’arriverait-il, si Sakher, voulant jouer les Gamal Moubarak, se faisait nommer successeur de Ben Ali… Vue la santé incertaine de son mari, si Sakher entrait au Palais de Carthage, Leïla ne serait-elle pas obligée d’aller à son tour, faire des courbettes, au «Club Didon», devant la maman du nouveau petit Sultan? Oh là là ! Quel cauchemar ! Leïla décida qu’elle avait été trop bonne avec Naïma, et que leur proximité lui avait «gonflé» la tête. Il était temps de la ramener à sa place de petite bourgeoise de La Marsa. Les Trabelsi ne se sont pas débarrassés successivement, mais non sans mal, des clans El Taief et Chiboub, pour voir émerger un nouveau clan, qu’ils auraient nourri en leur sein: le clan des Materi ! Comme dans la CAMORRA, il faut savoir supprimer à temps, les proches aux dents trop longues.   Abou Idyl   (Source : « L’AUDACE » (Mensuel tunisien – France), N°153, Novembre 2007)

1987 – 2007 : VINGT ANS DE TORTURE

 
par Khaled Ben M’Barek   Il y a dix ans, le Centre d’information et de documentation sur la Torture (CIDT-TUNISIE) faisait paraître un numéro spécial Tunisie de la revue Droits de l’Homme sans Frontières (DHSF), en partenariat avec l’ONG belge du même nom, intitulé : Tunisie : 10 ans de torture. En ce 7 novembre 2007, s’il y avait quelque chose à changer, ce serait les noms des victimes. Tout le reste est imperturbablement en place : la torture, les persécutions en tous genres, la lutte acharnée contre les libertés, le mépris pour le peuple et pour ses élites, le maillage policier du pays, la mainmise du RCD sur les consciences par la peur et le chantage, la dissolutions du lien social…   Vingt ans que le général Ben Ali, à la chevelure plus noire que jamais, semble s’apprêter à renouveler à l’infini. Peut-être même entrevoit-il la possibilité d’une succession à la syrienne. Au moment où nous mettions sous presse, l’Argentine se préparait à élire présidente l’épouse du président sortant. On pourra toujours nous servir l’analogie de Chirac élu à 83 % face à Le Pen en 2002. Pourquoi pas une épouse présidente ?   LA SURVENUE   En ce printemps 1987, il régnait en Tunisie une atmosphère presque surréaliste. La tension politique était perceptible et le pouvoir se raidissait au rythme des manifestations de rue organisées par le MTI, toujours à l’improviste et à des endroits stratégiques au cœur de Tunis. M. Rached Ghannouchi avait quitté le pays début avril 1987  et s’était établi à Londres (Correction de TUNISNEWS : il avait été emprisonné début mars 1987 suite à son refus d’arrêter les leçons qu’ils faisait dans certaines mosquées). Le Mouvement s’attendait à un coup dur du pouvoir avec l’Ascension fulgurante d’un obscur ancien officier des renseignements militaires. De ministre de l’Intérieur, cet homme à la cinquantaine grisonnante, se retrouve Premier ministre et en profite pour conserver sous sa coupe le ministère de l’intérieur auquel il avait été nommé un mois plus tôt. Comme une chouette dans la nuit noire du sénilissant Bourguiba, le militaire localise toutes les personnalités qui auraient pu contrecarrer son dessein de se proclamer héritier du vieux président.   En cette belle et fraîche nuit du 6 au 7 novembre 1987, il les fixe tous avec le concours de son acolyte Habib Ammar, autre général de l’armée, qui tenait la Garde nationale. La voie vers le Palais de Carthage est grande ouverte.   Il est très vraisemblable que le général putschiste, en tant que ministre de l’intérieur, avait ménagé les manifestants et s’était arrangé pour qu’ils puissent trouver un endroit stratégique non gardé d’où ils pouvaient lancer les manifestations.   En même temps, il décrivait la situation à Bourguiba comme critique et faisait en sorte que le vieillard soit de plus en plus effarouché. L’homme à poigne qu’il avait appelé à chaque crise ne pouvait manquer d’apparaître comme l’homme de la situation. C’est ce qui explique que Bourguiba, fût-il affaibli, ait permis qu’un même homme rassemble entre ses mains l’inconcevable combinaison de Premier ministre et de ministre de l’intérieur.   Le reste de l’entreprise sera facilité par l’élément régionaliste. La plupart des complices du putsch étant du Sahel et spécialement de la région de Sousse. Il apparaît ainsi évident que l’avis médical des sept médecins arguant de l’incapacité de Bourguiba, n’était qu’un alibi. Cela n’empêchera pas certaines voix, comme celle de Pierre Messmer, de protester contre le coup d’Etat. Le vieux Bourguiba finira quand même sa vie dans la cage dorée qu’il s’était construit lui-même à Skanès-Monastir.    FOIRE D’EMPOIGNE   Dès qu’il a pu se convaincre lui-même qu’il avait aussi facilement réussi son entreprise, Zine Ben Ali choisit une brochette d’opposants qu’il tire les uns après les autres à la manière d’un chasseur de canards. Ce furent les ex-MDS Dali Jazy, Hammouda Ben Slama, d’anciens gauchistes tels que Monsser Rouissi, Moncef Gouja… Le plus souvent, le choix était sur dossier. Les intéressés étant « envoûtés par le luxe des palais nationaux et des sièges feutrés»1, s’étaient livrés à un curieux et tapageur concours de compétence. A qui mieux mieux, chacun exposait son analyse, sa vision, voire son projet pour tel ou tel domaine de la vie publique. Derrière cette foire d’empoigne dans les colonnes de la presse locale, Gilbert Naccache avait décelé «l’appel d’offres du 7 novembre»2. Quelques têtes ont été sélectionnés en fonction de l’impact politique de leur désignation aux affaires. Les premières victimes étaient le MDS et la LTDH, délestés de quelques-uns de leurs dirigeants les plus en vue. Mais c’est l’opinion nationale tout entière qui avait été intoxiquée, aveuglée par cette escroquerie politique unique dans les annales du pays. Le MDS ne s’en est, pour ainsi dire, jamais relevé. Quant à la LTDH et pour s’être débattue, après les épisodes Zmerli, puis Charfi, elle avait été tout bonnement dissoute par le sinistre Abdallah Kallel. La situation de paralysie totale qu’elle connaît depuis le cinquième congrès et l’élection de Mokhtar Trifi à la présidence, n’est en rien séparable de ce dessein global du pouvoir.   Des personnalités ayant cherché de bonne foi à « réformer le régime de l’intérieur » se sont retirées en silence (Ben Slama) ou dans un grand fracas (Chammari). D’autres, par opportunisme, cécité politique ou par faux calcul, sont demeurées – c’est le cas de le dire – aux côté du despote et, pour certains, ont cautionné ou accompli les forfaits par lesquels ce dernier avait cherché à les compromettre de façon à leur couper toute retraite. C’est notamment le cas aussi dramatique qu’emblématique de M. Charfi, qui amené ou, en tout cas, laissé mener la répression étudiante la plus sanglante et la plus longue de l’histoire du pays. Mais dès qu’il s’était risqué à reprendre un semblant de liberté, il a été débarqué sans ménagement. C’est à partir de là que cette entreprise de pseudo ouverture avait pris fin, aggravant l’aspect désolant de tas de ruines auquel ressemblait la société civile tunisienne.   L’ETAT DE GRACE : Avions-nous manqué de puces (à l’oreille) ?   Pendant ce temps-là, la propagande officielle galvaudait les idéaux politiques les plus nobles auxquels pouvaient rêver les Tunisiens. Des mesurettes formelles et des promesses mirobolantes étaient présentées comme une révolution du régime. Des comité et des conseils plus hauts les uns que les autres étaient créés à tour de bras. Les conflits politiques et sociaux étaient liquidés à coups de tapes dans le dos toujours appuyées par la menace sousjacente. Ce fut le cas de l’UGTT où le Lion Habib Achour a accepté de faire son propre hara-kiri en se plaçant à égale hauteur avec le jaune Abdelaziz Bouraoui, dans le bureau flambant neuf du général au sourire narquois. Les partis officiels ont été davantage normalisés par des manœuvres du ministère de l’intérieur pour en extirper la moindre graine de contestation à venir. Les scissions se concluaient invariablement au profit des plus dociles. Depuis Ahmed Mestiri à l’aube du changement jusqu’à l’insignifiant PSL, en passant par l’Union des Ecrivains, confiée au cacique Midani Ben Salah, l’UGTT offerte à Ismail Sahbani, l’Union des ingénieurs et autre Association des Magistrats, encore des années plus tard. D’autres faits moins marqués étaient des signes parlants comme le maintien des poursuites antérieures à l’établissement du nouveau pouvoir3 ou, a fortiori, le refus sec de l’amnistie générale. Mais les deux faits qui auraient dû mettre non pas des puces, mais d’énormes scarabées à l’oreille des mieux disposés à l’égard du pouvoir, étaient la pratique continue de la torture et l’intransigeance avec la presse. Ces deux facteurs étant, comme leurs noms ne l’indiquent pas forcément, très intimement liés. Le général Ben Ali avait esquissé l’architecture globale de la tortiocratie qu’il se promettait d’installer dans le pays. En bon militaire, il savait qu’il lui fallait le duo la peur et le camouflage. Or, sans torture, il n’y a pas de peur4 ; une presse libre finirait par avoir raison des camouflages les plus sophistiqués. C’est ainsi que les journaux hors contrôle, de quelque nature qu’ils soient, furent éliminés en un laps de temps record. L’offensive de l’Etat tortiocratique sur la société pouvait commencer. D’autant que Ben Ali, «fidèle à ses convictions diamétralement opposées à cel- les de Tahar Belkhoja ou d’Ahmed Bennour, veut grouper dans une même main le contrôle de la police et celui du renseignement/contre-espionnage civil.»5   Il faut reconnaître que Ben Ali a réussi des années durant à se faire passer pour un apprenti démocrate au moment où des milliers de gens étaient soumis aux tortures les plus abjectes, parfois jusqu’à ce que mort s’ensuive.   «ON N’ORGANISE PAS DESELECTIONS POUR LES PERDRE»6 :   Cette situation était-elle une fatalité ? Les Tunisiens étaient-ils condamnés à tomber dans la servitude de Ben Ali et de sa famille tant d’années après l’indépendance formelle et la formidable extension du système éducatif ? Les élections d’avril 1989 étaient une occasion en or pour prendre du recul et pour se débarrasser des illusions les plus tenaces. Toutes les forces politiques qui avaient souhaité donner sa chance au nouveau pouvoir avaient de quoi être édifiées. Non seulement le système électorale avait été maintenu verrouillé, mais Ben Ali y avait introduit des closes qui lui permettaient à la fois de choisir qui entrera au parlement, de récompenser ceux qui se prêtent à son jeu (indemnités, subventions, aides à la presse…) et d’humilier ceux qui s’obstinent à jouer pour leur propre compte (scores pitoyables, manques de financements public, tracasseries en tout genre…)   Le MTI, devenu Ennahdha sur injonction du pouvoir et dans un esprit d’apaisement, était le premier concerné, car sa survie était clairement en jeu. Malgré tous les signaux enthousiastes qu’il avait publiquement envoyés au pouvoir, ce dernier a obstinément maintenu ses distances. De puissants indices montraient qu’il travaillait inlassablement à couper le parti du reste de la société civile et du monde extérieur. C’est la situation piège que Bourguiba n’avait jamais réussi à créer.   Malgré l’évidence du danger, Ennahdha part en campagne électorale, expose ses militants et ses sympathisants et se comporte comme un parti légal dans un système loyalement administré. L’alignement sans nuance sur l’Iraq de feu Saddam Hussein après l’invasion du Koweït constituera la quadrature du cercle : le mouvement se coupe de ses soutiens dans le golf. Ben Ali n’hésitera pas une seconde.   A leur tour les adversaires politiques de Ennahdha se sont obstinés à ne voir dans la mise à terre de celle-ci au mieux qu’un écart du pouvoir, certes regrettable, mais sans autre conséquence. Au pire, certains esprits forts ont pu y voir une raclée administrée à des anti-démocrates par le gardien de la démocratie.   Faisant flèche de tout bois, le pouvoir manie le bâton à tour de bras et finit par se convaincre lui-même que le renoncement et l’obéissance lui sont dus par tout le monde.   UNE RANCOEUR DE DROMADAIRE :   Certains analystes se refusent à intégrer quelque donnée subjective que se soit dans leur approche du politique. C’est peut-être vrai ailleurs, mais en Tunisie c’est se condamner à ne rien comprendre. Depuis les 20 premières années de son règne, l’officier de renseignement Ben Ali a montré qu’il voulait le pays à son entière dévotion. Pour cela, il avait grand besoin de montrer ostensiblement ce qu’il peut en coûter de bêler hors du troupeau ou de regarder le berger au gros bâton droit dans les yeux, ou encore de prétendre lui être redevable en quoi que ce soit. Comme le dromadaire dans l’imaginaire populaire, il s’en souviendra. Très longtemps après… Le jeune informaticien Tunisien Marwan Ben Zineb a été le premier à en faire les frais en 1989 pour s’être connecté apparemment au réseau informatique de Carthage. Il a été retrouvé dans une morgue. Il aurait confié à des proches être tombé sur une liste d’agents du Mossad à Tunis sur l’ordinateur de Ben Ali lui-même. Comme à l’accoutumé le pouvoir a assuré que le jeune de 27 ans avait été victime d’un accident de la route… Mais Ben Ali peut se montrer encore plus dangereux pour des personnes qui lui sont très proches. C’était le cas pour Hédi Baccouche dont on dit qu’il avait conçu et rédigé la déclaration du 7/11. Dans une interview à Jeune Afrique, il s’était justement vanté : «Le 7-Novembre, je l’ai fait». C’en était trop et l’imprudent était bon pour une bastonnade en règle dans la rue, d’après des informations difficiles à vérifier. Le Général Habib Ammar suivra peu de temps après par la mise en cause de son fils Douraïd dans des affaires de trafic de drogue. Mais le cas le plus emblématique reste celui de Ali Saïdi, ancien militant PDS/RCD, puis opposant farouche, avant de revenir à Tunis auréolé du titre de n°3 du ministère des affaires étrangères. Il sera retrouvé le 31 décembre 2001 sous 1,5 mètre de terre7. Deux femmes seront accusées de son meurtre, jugées et condamnées à la perpétuité. Ali Saïdi avait été attiré en Tunisie pour être liquidé. Il n’avait certainement pas lu cet avis sur Ben Ali livré par un ancien ministre : «S’il cherche à se réconcilier avec quelqu’un, c’est un piège.»8 Le jour de sa mort Ben Ali tenait un conseil de gouvernorat de la ville du défunt au cours duquel il avait loué de façon étrangement appuyé la « fidélité » des gens de Gafsa au pouvoir. Avec l’air d’ajouter : «Sinon…» C’est cette même rancœur dévorante qui l’avait jeté sur M. Mouada et le MDS. Comme encore récemment sur Mohamed Abbou. L’addition de ces cas est très lourde en terme d’image de marque et de conséq u e n c e s d i p l o m a – tiques. Mais Ben Ali n’en a cure. Quand il s’agit de se venger, seule la vengeance compte.   MALEDICTIONSUR LES PALESTINIENS:   Vingt ans après, il est tant aussi légitime de dresser une ébauche de bilan : Quelle image se fait-on aujourd’hui de la Tunisie? Les rapports émanant d’organismes ou d’ONG spécialisés sont accablants. Que ce soit dans le domaine des droits de l’homme, de la liberté de la presse ou de la corruption, la petite Tunisie est à l’index. Du département d’Etat US, à Amnesty International, en passant par la Human Rights Watsch et les ONG des journalistes ou des juristes, est-il possible que tous se seraient donné le ton pour «nuire aux acquis de la Tunisie»? C’est pourtant très sérieusement ce que prétend le gouvernement et ses zélotes. Toujours est-il que les intérêts vitaux du régime ne sont jamais touchés. Et pour cause : il «contribue à la paix au Moyen-Orient», selon une phraséologie US qui absout ainsi le régime de Ben Ali de tous ses crimes. Car les américains connaissent bien Ben Ali notamment depuis son passage à l’école de renseignement et de sécurité de Fort Hollabird, dans l’Etat du Maryland9. comme avec les militaires d’Amérique latine, le premier contact donne toujours lieu à un suivi très très long. Les Américains et les Israéliens ne manqueront pas de s’en rappeler. Ils avaient certainement remarqué que l’homme « était plus attaché à la police intérieure qu’au travailde renseignementexterne ou au contre- espionnage…»10. La conséquence en sera la plus importante hécatombe de hauts dirigeants palestiniens de toute l’Histoire. On prétend même que Yasser Arafat en personne aurait échappé à la mort le 1er octobre 1985 lors du bombardement de son Quartier général à Hammam Chat, grâce à une alerte de dernière minute… Trois ans plus tard, en février 1988, c’est le tour de Khalil Al Wazir (Abou Jihad) d’être abattu dans son lit et sous le regard de sa femme par un commando de tueurs qui repartira sans être inquiété le moins du monde. En 1991, un autre commando réédite la même opération et repart tranquillement laissant derrière lui les corps criblés de balles de Salah Khalaf (Abou Iyed), d’Abou Mohamed et de Hail Abdelhamid (Aboul Hol) A chacun de ces crimes, le général Ben Ali est aux affaires comme haut responsable de la sûreté puis comme chef de l’état. Jamais de protestation, à part concernant l’attaque de Hammam-Chatt car l’état d’Israël l’avait revendiqué et Ronald Reagan l’avait publiquement appuyée ! Jamais de souvenir, d’exigence de réparation. Ce sont surtout ces actes négatifs qui sont les plus sûrs indices mettant en évidence les complicités évidente dans cette série noire, qui n’est certainement pas encore finie. Le dernier épisode connu concerne le dirigeant Atef Bseisso, assassiné à Paris à l’été 1992. On apprendra en novembre 1993 que le dénommé Adnane Yacine, responsable de la sécurité rapproché des chefs palestiniens, est un agent du Mossad. Ce dernier l’aurait recruté en 1989, époque de grande présence palestinienne à Tunis. Epoque où a été éliminé la crème de la classe dirigeante palestinienne… Pour détourner l’attention et mettre fin aux lancinantes questions que tous ces crimes impunis et si facilement exécutés laissent en suspens, les services du général Ben Ali mettent périodiquement le grappin sur Ahmed Bennour, ancien secrétaire d’Etat à la sûreté et ancien supérieur de celui qui était encore le colonel Ben Ali. On l’accu- se ni plus ni moins que d’avoir guidé la main des assassins du Mossad. Ben Ali voue à son ancien patron une haine toute personnelle11 et en profite pour faire de cette pierre son deuxième coup : Impliquer Bennour dans l’assassinat et le discréditer à vie. Plus il persiste dans ce dessein qu’il reprend cycliquement, plus il semble hurler ses aveux… Rétrospectivement du haut de ces deux décennies, il apparaît bien que ce qui était prévu était parfaitement prévisible. Nul ne pouvait raisonnablement espérer déguster du bon miel à partir des sécrétions d’une guêpe12. C’est ce qui fait ressembler les nouveaux conciliateurs du pouvoir à des zélateurs au camouflage tellement usé qu’il ne camoufle plus rien. C’est également ce qui rend certains opposants encore plus pathétiques dans leur hallucination d’être engloutis par l’épouvantail islamiste au moment où leur dignité est annulée par une tortiocratie qui n’a rien de virtuel. Ce sont ces gens-là, menés par Salah Zghidi, qui crient au loup et dénoncent ni plus ni moins que l’«islamisation du pouvoir tunisien13» (Sic !). Il y a là un crétinisme pire que tous les autres, car il est probablement des plus sincères…   DANS VINGT ANS, UN HERITIER, UNE HERITIERE OU LES DEUX ??   Les despotes savaient qu’on pouvait se débarrasser d’eux à leur péremption et leur mort naturelle. Ils ont cherché une parade et certains l’ont trouvée : nous fourguer leurs rejetons. Tous ont des Bébé doc en stock. Celui de Syrie est déjà aux commandes. Ceux d’Irak n’en ont pas eu le temps. Ceux de Libye et d’Egypte sont en piste, surtout après que le fonctionnaire d’Al Azhar a pondu une fatwa -une de plus !- autorisant la succession héréditaire à la tête de l’Etat… Et en Tunisie ? On a une vague impression que Zine Ben Ali mène une inlassable course contre la montre pour maintenir sa succession dans le cercle familial. Le scénario le plus probable est celui de l’épouse mise en orbite pendant le quinquennat prochain (2009/2013). Le patriarche tenterait de durer au-delà, mais Madame sera censée être capable d’assurer un intérim, puis les fonctions suprêmes à l’issue d’élections générales. Elle devrait alors tenir pendant trois mandats de cinq ans. Nous seront au minimum en 2028. Le petit héritier aura alors 24 ans et toute la vie devant lui…
Les nouveaux Tunisiens laisseront-ils faire ??     1Taoufik Ben Brik, Je vote pour Moncef Marzouki ; In Le Monde. 29 janvier 2001   2 Dans un article paru dans l’excellente revue Outrouhat, dont nous n’avons plus les références exactes.   3 K. Chammari était poursuivi pour délit de presse avant le 7/11/1987. Début 1988, il était encore en procès. Comme pour être averti de ce qui pouvait lui arriver même sept ans plus tard…   4 Le nouveau pouvoir avait entamé son exercice par la mort sous la torture du commandant Mohamed Mansouri, membre du groupe sécuritaire. Ce groupe a été élargi après que le pays tout entier eût été au courant des formes de torture dont il avait été victime.   5 Roger Faligot/Rémi Kauffer, In Les Maîtres-espions. Ed. Robert Laffont. Paris. 1994 p. 345   6 Dixit un dirigeant d’Afrique noire.   7 Pour une vision plus claire de ce crime d’Etat, on peut visiter ces liens dont deux sont des sites de Ali Saïdi et qu’il n’a jamais supprimés même quand ils avait décidé de devenir haut fonctionnaire de l’Etat bénalien : http://pageperso.aol.fr/BENMBAREKK/mapage/associationsbis.html http://membres.lycos.fr/tuniscom/     8 Jean-Pierre Tuquoi. Ben Ali l’inconnu. Le Monde, 24 mai 2002. La citation entière vaut la peine d’être lue : « On ne lui connaît aucun ami. C’est un timide de la pire espèce. Il n’est entouré que de courtisans apeurés ou de profiteurs. Personne n’ose lui faire de remarque. Jamais il n’abandonnera le pouvoir. Malheur à ses adversaires : il ne les lâche pas et les poursuit jusque dans leur tombe. Regardez comme il a saboté les obsèques de Bourguiba. S’il cherche à se réconcilier avec quelqu’un, c’est un piège. »   9 C’est également là qu’on trouve l’Anti Terrorist Alert Center (ATAC), d’où les thèmes que développera plus tard Ben Ali pour monter en grâce auprès des nouveaux seigneurs..   10 Roger Faligot/Rémi Kauffer, Op. cité p. 341   11 Il est quasiment certain que M. Bennour ne rentrera jamais dans son pays du vivant de son ancien subordonné. On peut lire à ce sujet une approche très fine de cet aspect de la personnalité de Ben Ali sur le blog de son ami intime Omar Khayam   12 Proverbe tunisien saisissant dans ce contexte, transcrit de manière bien élevé.   13 Entre autres, à propos d’une décision récente et fort remarquée du Tribunal administratif déclarant l’interdiction du voile dans les administrations anticonstitutionnelle.   (Source : « L’AUDACE » (Mensuel tunisien – France), N°153, Novembre 2007)

IMPRESSIONS DE VOYAGE

Ben Ali n’est pas un moderniste

 
Hannibal Barca   En vérité, dans le calme apparent sans nous en douter la Tunisie est dans un état de guerre civile latente depuis l’instauration d’une dictature à vie par Ben Ali. Point de perspective. Tous les Tunisiens, notamment l’élites, que j’ai rencontrés, pour des motifs opposés, mais analogues, commencent à juger l’intérêt du pays d’après leurs intérêts de classe de groupes, à mêler la politique intérieure à la politique extérieure, et, peut-être sans bien se rendre compte eux-mêmes à soutenir un régime par une non action et un non projet politique alternatif clair. Sans doute en présence d’une pareille tragédie d’une telle complexité, peut-être est-il possible, peut-être est-ce un devoir pour chacun d’essayer d’analyser les caractères essentiels ou les raisons principales de la catastrophe. Nul doute d’abord que la manière même de délimiter notre champ d’investigation est ici d’importance capitale et qu’il en préjuge en partie le résultat. L’opinion que je vais vous livrer est la résultante de plusieurs rencontres et d’observations pendant mon séjour dans le pays. C’est l’insigne mauvaise foi des représentants de l’élite du pays depuis l’avènement du 7 novembre que de se demander, non pas pourquoi et comment Ben Ali règne en maître sur le pays, mais pourquoi et comment estil arrivé au pouvoir : comme si cette tragédie était fatale, comme si, dès le début, les Tunisiens ont dû la considérer comme acquise, et agir pour l’éviter était impossible. C’est toute l’histoire de la Tunisie ces vingt dernières années qu’il faut reprendre pour faire apparaître les raisons de cette totale abdication qui semble devoir être le triste résultat d’une trahison d’une partie de l’élite de ce pays qui pour des motifs divers a livré le pays à une bande de criminels. Les islamistes d’abord, on ne saurait songer à le nier : passés ouvertement d’une opposition frontale avec Bourguiba qu’ils avaient bruyamment combattu dans un sens belliqueux, en particulier pendant les deux dernières années précédent la fin de son règne à une alliance incestueuse avec Ben Ali au début de son prise de pouvoir, ils semblaient même lui apporter, par une curieuse attitude bien vaillante, un sacré coup de main pour qu’il puisse sans encombre asseoir son pouvoir sur le pays. Leur leader n’a-t-il pas déclaré à l’époque que sa confiance en Ben Ali est comparable à celle qu’il en a pour Dieu. Erreur historique et surtout un mauvais calcul politique. Les islamistes qui se trouvent actuellement dans les prisons de Ben Ali ont le droit de savoir pourquoi leur mouvement avait été complice (actif ou passif) avec ce personnage ? Quelles ont été les raisons amenant un homme comme Ghannouchi à faire « confiance à Ben Ali » ? Pour eux la chute de Bourguiba étant le but visé, le complot de Ben Ali en était le moyen, avec une indifférence curieuse à son issu pour les Tunisiens. Quelques-uns semblaient même penser que ce coup d’Etat serait bénéfique pour le pays dès lors qu’ils vont par la suite naturellement prendre le pouvoir. Par quel moyen ? Mystère. La masse des militants suivit-elle, en fait, ses chefs les plus notoires dans leur palinodie ? Il est difficile de le savoir avec exactitude : il est certain qu’ils ont été instrumentalisés aussi bien par ces derniers que par Ben Ali et ses officines (de manipulation). En tout cas, leur réveil actuel, pour plusieurs Tunisiens que j’ai rencontrés, est non seulement tardif, mais surtout a produit l’effet inverse. Il a permis à Ben Ali de se faire passer pour un moderniste éclairé défenseur de la démocratie et de la modernité contre l’obscurantisme dont l’idéologie islamiste est porteuse. Et ce petit jeu de manipulation continu aujourd’hui. Il en résulte certainement, et c’est le moins qu’on puisse dire, une hésitation, un élément d’incertitude grave dans toute une partie de l’opposition (la vraie) et chez beaucoup de Tunisiens sur les visées politiques des islamistes. Mais cela n’empêche qu’avec le recul et peu importe ce que leur idéologie est porteuse d’ambiguïté (un jour les historiens de ce pays se pencheront sur cette question) le goût reste amère et la complicité de ce mouvement est certaine. Au centre, parmi les partis politiques reconnus (MDS, MUP, PC) et dans toute une fraction de la petite bourgeoisie ou ce monde de fonctionnaires et professions libérales dont il est l’expression, l’idée d’une alternance politique à Bourguiba était doctrinalement présente. Sous forme sentimentale d’abord : les récits effroyables des horreurs d’une guerre civile éventuelle, l’abomination des tueries qui pourraient s’en suivre avaient assombris les imaginations et ébranlé les nerfs. Il faut dire que les officines de manipulation et de désinformation de Ben Ali s’activaient (avec la complicité des islamistes) pour rendre l’air « politique » à l’époque irrespirable. En outre, le goût de cette partie de la calasse politique pour une logique simpliste et outrancière, pour les idées extrêmes et les paradoxes, son esprit critique, allaient dans le même sens : on soumettait à la plus impitoyable discussion et critique le régime de Bourguiba (ou ce qui en restait), on se satisfait de la légitime et trop facile démonstration de l’absurdité.   d’une situation de fin de règne dans laquelle un médiocre personnage comme Saida Sassi jouait un rôle politique déterminant : comme s’il suffisait de casser le thermomètre pour faire baisser la fièvre ! De là à la discussion sur l’alternance au pouvoir, à l’ébranlement du pays par un coup d’Etat, il n’y avait qu’un pas. Et combien allaient jusqu’à proclamer le coup de force de Ben Ali comme un mal nécessaire, je ne sais quelle résistance passive et inerte comme la seule efficace contre la violence (réelle ou imaginaire), et la paix comme méritant d’être achetée au prix même de l’indépendance et de l’honneur national ! Quelle qu’ait été l’évaluation des sentiments et les intentions d’un Ahmed Mistiri, d’un Mouaada, d’un Benlhaj Amor, d’un Harmel et de leurs disciples on ne saurait nier le mal qu’ont fait leurs doctrines, et qu’elles n’aient pu trouver dans la lâcheté de ceux qui les accueillaient et les répondaient leur principale force de séduction et de persuasion. Pourtant, c’est certainement dans cette partie de l’opinion qui aussi bien constitue la plus grande partie de la classe politique en Tunisie, que le sentiment de la patrie et de l’honneur de la Tunisie resta plus ferme en somme et que se recrutèrent, dès de la fin de la petite comédie du « changement démocratique » , les partisans de la résistance « jusqu’au bout» à l’usurpateur. Mais c’est de côté d’une partie de la gauche et des anciens perspectivistes que s’est produit le changement capital des esprits et pour certains d’entre eux des cœurs (voir édito de l’Audace juillet août), qui explique sans doute le mieux leur soutien à Ben Ali qui nous a précipité dans l’abîme. Sans doute, des anciens de « Perspective » en particulier, avaient des comptes à régler avec leurs histoires personnelles et avec Bourguiba : sans remonter très loin dans l’histoire de leur mouvement, c’était du patriotisme et du militantisme en faveur de la démocratie qu’ils en avaient fait leur tremplin et le contenu de leur idéologie. Et l’accusation de dictateur et de tyran à l’encontre de Bourguiba et son régime était leur arme favorite. Ils étaient pour une lutte à outrance. C’est de chez eux qu’étaient parti tous les mots d’ordre d’intransigeance contre toutes les formes de « tyrannie ». Au cours des années 70 et jusqu’à la veille même de la prise du pouvoir par Ben Ali, c’était encore le lieu commun de toutes les publications de ces mouvements que de dénoncer dans le régime bourguibien l’ennemi héréditaire et irréconciliable avec la démocratie. Mais cependant, sourdement, un revirement s’était opéré, qu’on n’osait avouer : l’admiration pour le régime de force se faisait jour chez les doctrinaires de ces mouvements et comme chez certains de leurs figures emblématiques ; comment n’auraient ils pas sympathisé avec celui qui a mis Bourguiba à terre, avec leur axiome que la politique n’a pas à se soucier de considérations de moralité, ils se sont montrés peu regardant sur les qualités de l’homme « du changement » et sur sa méthode. Ce n’est pas tout : certain d’entre eux ont même proposé leur service à Ben Ali (ils continuent encore, pour certains, aujourd’hui à le faire) pensant que ce « type » était fréquentable. Belle erreur d’appréciation. Il ne faut pas le dissimuler : c’est par sa signification morale et philosophique profonde, par tout ce qui la rendait dégoûtant eu égard à la générosité de l’idéologie de ces mouvements que cette alliance ou cette aide à Ben Ali est profondément condamnable et même pour certains impardonnables ; car, ces gens là font partie de l’élite la plus éclairée et la plus politisée du pays. On ne peut se permettre à ce niveau là une telle erreur historique. Certes, il ne faut pas exagérer le rôle de trahison de cette gauche, dans notre désastre ; mais on ne saurait la nier tout à fait ; et au-delà, il faut faire bien plus importante la part de cette trahison latente, qui consistait à la refouler et à la répudier dans les secrets des cœurs. Et l’on doit avouer qu’en ce sens il y a eu trahison des clercs. De là tant d’invraisemblables négligences, une telle incurie avant la lutte ; un si prompt et total abandon à l’heure des revers. Telle est la situation morale et politique qui nous semble expliquer le mieux au-delà de mille circonstances fortuites que l’histoire découvrira peu à peu, notre défaite face à Ben Ali. Elle se trouve sinistrement vérifié par l’absence de perspective politique claire pour ce pays. Du jour eu lendemain, ce fut un retournement furieux. Les Tunisiens sont trouvés livrés à une dictature innomée. Ils sont considérés comme responsables de leurs malheurs, et seuls coupables. Et qu’il leurs faut, pour le grand profit de l’usurpateur, répéter inlassablement leur soumission et renier tous leurs principes, leur idéal d’hier ou leur mission séculaire, toutes leurs raisons de combattre et de vivre, leur volonté même de liberté et de justice et qu’il ne leurs restait plus qu’à retourner du côté du dictateur. C’est la plus brusque, la plus complète, ne faut-il pas dire aussi la plus déshonorante, capitulation morale de notre histoire.   (à suivre)   (Source : « L’AUDACE » (Mensuel tunisien – France), N°153, Novembre 2007)
 


La revue “ARABIES” publie une interview du Président Ben Ali

 
TUNIS, 05 nov 2007 (TAP) – La revue mensuelle “Arabies”, paraissant à Paris, vient de publier une interview exclusive du président Zine El Abidine Ben Ali. Dans cette interview, le Chef de l’Etat met en exergue les réformes et réalisations accomplies par la Tunisie, durant les deux décennies du Changement, et qui ont touché tous les domaines politique, économique, social, et culturel. Le Président de la République y souligne, également, que ces acquis ont permis de restaurer les valeurs républicaines et fait de la Tunisie d’aujourd’hui un état de droit, nanti d’institutions solides qui lui assurent la stabilité dont il a besoin pour poursuivre l’œuvre de développement en toute sérénité. Il note, par ailleurs, que ces acquis ont favorisé l’émergence d’une société équilibrée et homogène, entreprenante et solidaire, qui avance à pas sûrs sur la voie de la modernité. Voici le texte intégral de cette interview:   Question : Monsieur le président, le 7 Novembre 2007, il y aura vingt ans que vous avez accédé à la magistrature suprême. Selon vous, en quoi la société tunisienne a-t-elle changé depuis ce jour, et comment voyez-vous son avenir ?   Réponse : Nous avions, dès l’aube du Changement, agi pour restaurer la confiance et instaurer un esprit de réconciliation et de consensus, sachant que rien ne peut être fait sans le concours actif de la nation et l’adhésion individuelle et collective des citoyens. Nous avons œuvré à restaurer les valeurs républicaines qui sont d’abord une exigence de progrès et de justice. La société se modernise, elle est entreprenante et solidaire. Nous avons développé l’esprit d’initiative et cultivé le goût de l’entreprise et de l’effort pour libérer les forces vives qui créent la richesse et font la croissance. Notre administration est moins pesante. Par ailleurs, nous avons instauré le pluralisme et élargi le champ des libertés et de la pratique démocratique. Notre vision de la démocratie tient compte de l’histoire et de la culture de notre pays, c’est-à-dire de ses spécificités, en même temps qu’elle intègre les impératifs du pluralisme, de la liberté et de la défense des droits de l’homme. Ce sont là des valeurs universelles. Ce fut pour nous une tache exaltante tant elle nous a permis, au plan politique, de mettre en place des réformes qui ont jeté les bases d’un système pluraliste où cohabitent, aujourd’hui, neuf partis politiques de tendances diverses. Nous avons restauré la souveraineté du peuple, qui choisit désormais en toute liberté ses dirigeants, lors d’élections transparentes et régulières qui ont lieu tous les cinq ans. Il faut se rappeler que c’est bien au cours de ces deux décennies que, pour la première fois dans l’histoire de la Tunisie, des élections présidentielles pluralistes ont été organisées, que les partis de l’opposition ont accédé à la Chambre des députés, et que le pouvoir législatif a été renforcé par la création d’une chambre des conseillers. Pour la première fois également, le peuple a eu à exercer sa souveraineté directement, par référendum, en se prononçant sur la réforme de la Constitution. Je rappelle aussi les décisions prises en matière de financement des partis politiques et d’aide à la presse des partis, l’amendement électoral et les innombrables réformes et mesures destinées à promouvoir les conditions de l’exercice démocratique et à en développer le processus. Ainsi, nous avons fait de la Tunisie d’aujourd’hui un Etat de droit, nanti d’institutions solides qui assurent au pays la stabilité dont il a besoin pour poursuivre l’œuvre de développement en toute sérénité. Au plan économique, les indicateurs sont révélateurs de l’étendue des progrès que nous avons pu accomplir dans une conjoncture mondiale pourtant difficile. Ces performances attestent que nous sommes passés du stade de pays en développement à celui de pays émergent. La vitalité de notre économie est incontestablement un des points forts du Changement du 7 novembre. Classée 1ère en Afrique et 29ème mondiale en termes de compétitivité, la Tunisie se place parmi les 80 pays les plus avancés du monde. Notre nation a pu, outre la réduction du taux d’inflation à un niveau très bas et la compression du déficit budgétaire pour le maintenir à 2,9 pc du PNB, assurer pendant une longue période une croissance économique soutenue, qui a avoisiné 5 pc en moyenne annuelle sur deux décennies, ce qui nous a permis de multiplier par 6 le PIB. Nous avons veillé à faire en sorte que les fruits de cette croissance soient équitablement répartis entre tous les Tunisiens. Les enquêtes sur les dépenses et la consommation des ménages indiquent, quant à elles, une amélioration progressive du niveau de vie des tunisiens, qui ont désormais accès à toutes les commodités du progrès. C’est ainsi que la part que représente la classe moyenne a été renforcée et couvre désormais plus des trois quarts de la population. La réforme de notre politique sociale a fait reculer la pauvreté, qui ne concerne plus aujourd’hui que 3,8 pc de la population, contre le double il y a vingt ans. L’esprit de solidarité entre les tunisiens a été revitalisé faisant de la société tunisienne une société à visage humain. Nous avons, en effet, renforcé le volume des transferts sociaux qui s’établit aujourd’hui à plus de 56 pc du budget global de l’Etat. En outre, nous avons élargi notablement la couverture sociale dont le taux dépasse désormais 90 pc contre 54,6 en 1987, développé notre système de santé et modernisé l’éducation et la formation. Nous sommes déterminés à maintenir le cap et à persévérer dans cette voie, en vue de hisser la Tunisie au niveau des pays développés. Nous savons que ce sera dur, mais nous savons que c’est possible, si nous allons au bout de nos choix.   Question : La place de la femme dans la société tunisienne -voire sa place exceptionnelle dans la société arabo-musulmane-, une économie florissante citée en exemple par la banque mondiale, une classe moyenne pilier de la société tunisienne comme il n’en existe pratiquement pas dans le monde arabo-musulman… Ces thèmes sont-ils vos plus grandes fiertés ?   Réponse : Nous sommes fiers évidemment d’avoir pu assurer l’intégration de la femme dans la dynamique générale du développement. Aujourd’hui, le principe de l’égalité entre l’homme et la femme est expressément garanti par les textes constitutionnels et législatifs. Différents indicateurs attestent ce statut remarquable de la femme. Elle assume désormais un rôle plus actif et des plus déterminants dans tous les domaines, en consécration de notre approche politique globale qui se fonde essentiellement sur la consolidation des droits de la femme en tant que partie intégrante des droits de l’homme. Les femmes constituent près du quart de la population active en Tunisie. Les taux de représentation féminine sont de 22,7 pc à la Chambre des députés, de plus de 15 pc à la Chambre des conseillers, de plus de 27 pc aux conseils municipaux, de 18 pc au Conseil économique et social, de 13,3 pc au Conseil supérieur de la magistrature et de 12 pc au sein des cabinets ministériels. Les femmes représentent également 27 pc des magistrats, 31 pc des avocats, 42 pc du corps médical, 72 pc des pharmaciens et 34 pc des journalistes. La femme est aussi fortement présente dans le secteur public et dans la vie associative. Nous sommes également fiers d’avoir réalisé un développement soutenu et harmonieux qui a profité à toutes les couches de la société ainsi qu’à toutes les régions du pays. Nous nous félicitons en particulier des succès obtenus en matière de lutte contre la pauvreté, laquelle a été ramenée à 3,8 pc. Nous prônons une économie ouverte, fondée sur l’encouragement de l’initiative privée et la création de richesses. Dans le même temps, nous tenons à préserver la dimension sociale de notre œuvre de développement. Notre approche vise l’instauration d’une société équilibrée, cohérente et solidaire. C’est ainsi que les investissements dans les secteurs sociaux, notamment en matière d’éducation, de santé et de promotion de la condition de la femme, mobilisent plus de la moitié du budget de l’Etat. Les acquis dans ces domaines constituent un motif de fierté pour notre pays : le taux de scolarisation atteint 99 pc et les femmes composent, à 59 pc, le total des étudiants. Dans la population active, la femme représente 29 pc des effectifs. Enfin, l’espérance de vie du citoyen tunisien s’élève aujourd’hui à 74 ans. Ces résultats ont permis une avancée notable de l’indice de développement humain en Tunisie, qui s’élevait à 0,76 pc en 2006, se rapprochant ainsi du niveau des pays développés.   Question: Que répondez-vous à certaines organisations internationales non gouvernementales qui reprochent à la Tunisie de ne pas respecter les droits de l’Homme et la liberté de la presse ?   Réponse : Nous avons fait, dès le départ, le choix de la démocratie et de la promotion des droits de l’homme et des libertés publiques. Ces choix volontaires, nous les avons rendus irréversibles en les inscrivant dans notre constitution et en veillant à ce qu’ils soient scrupuleusement respectés dans la pratique. Nous continuons notre progression dans ce domaine, comme dans d’autres, avec la ferme conviction que les droits de l’Homme sont un tout indivisible que l’on ne saurait fractionner en dissociant ou en privilégiant les uns au détriment des autres, et que la démocratie est une œuvre de tous les jours qui peut avancer à des rythmes différents d’un pays à l’autre, en fonction, entre autres, de nos spécificités et de nos réalités. Autant nous respectons ceux qui ont des évaluations différentes de la nôtre et accueillons favorablement toute appréciation objective, autant nous rejetons les jugements excessifs, sans relation avec les réalités tunisiennes, qui d’évidence tendent à déformer l’image du pays. Nous continuerons de progresser avec assurance sur la voie de la démocratie dans notre pays. Nous sommes conscients qu’il nous reste encore du chemin à faire, mais nous sommes déterminés à poursuivre notre marche en tenant compte de nos réalités et des aspirations de notre peuple. L’élection de la Tunisie au Conseil des droits de l’Homme est un témoignage éloquent de la pertinence de notre démarche à cet égard et constitue une reconnaissance, de la part de la communauté internationale, des efforts consentis par notre pays. Au niveau de la presse et des médias, nous avons pris de nombreuses mesures en vue d’enrichir et de diversifier le paysage médiatique, et de protéger davantage la liberté d’opinion et d’expression. Ainsi, le Code de la presse, promulgué par la loi du 28 avril 1975, a été amendé à quatre reprises (1988, 1993, 2001 et 2006) dans un sens encore plus libéral, notamment par la suppression du délit de diffamation de l’ordre public, l’abrogation de la procédure de dépôt légal pour les publications nationales d’information. L’objectif de ces amendements est de permettre aux journalistes d’assumer leur rôle en toute liberté et de bénéficier d’un climat adéquat pour exercer et faire du secteur de l’information un espace de dialogue, d’échange et de discussion sur des thèmes et des questions qui engagent le devenir du pays et la défense de ses acquis. Des subventions sont en outre accordées par l’Etat aux journaux d’opinion et notamment à ceux de l’opposition qui paraissent en toute liberté et contribuent à l’animation de la vie intellectuelle et politique dans notre pays. Le paysage audiovisuel s’est, quant à lui, enrichi par le lancement de radios entièrement privées, d’une radio culturelle et de chaînes de télévision privées. Des débats sont régulièrement diffusés en direct par les radios et télévisions publiques réunissant des représentants des partis politiques et de la société civile.   Question : Lors de sa visite en Tunisie, le nouveau président français a défendu l’idée d’une Union Méditerranéenne regroupant les peuples du pourtour méditerranéen dont naturellement la Tunisie. Qu’en pensez-vous ? Et comment voyez-vous l’avenir des relations tuniso-françaises ?   Réponse : Nous avons toujours œuvré pour faire de la Méditerranée un espace de paix, de solidarité, de sécurité et de prospérité. La Tunisie a été l’un des pays fondateurs du processus de Barcelone et a milité en faveur du rapprochement entre les deux rives de la Méditerranée. Elle a été aussi le premier pays de la rive Sud à conclure un accord d’association avec l’Union européenne (UE). Il s’agit pour nous d’un choix volontaire et stratégique tendant à conforter notre engagement pour la modernité et à intégrer l’économie tunisienne dans l’espace euro- méditerranéen. La Tunisie sera d’ailleurs, à compter de janvier 2008, le premier pays de la rive Sud de la Méditerranée en zone de libre-échange avec l’UE. La Méditerranée a toujours été au premier rang des priorités de notre politique extérieure. Nous avons favorablement accueilli l’initiative française d’Union méditerranéenne parce que nous soutenons tout projet susceptible de rendre la coopération méditerranéenne plus efficace, afin de promouvoir la stabilité et le codéveloppement dans la région. Nous sommes convaincus que, pour réussir, ce projet doit impliquer l’ensemble des parties concernées et prendre en compte les priorités des uns et des autres sur la base d’un partenariat équilibré et solidaire entre les deux rives de la Méditerranée. Il doit également compléter et enrichir les acquis réalisés dans le cadre du processus de Barcelone et du dialogue 5+5. Quant à nos relations avec la France, elles ont été et sont exemplaires. Nos deux pays entretiennent des relations étroites d’amitié et de coopération, marquées par une tradition de concertation et de dialogue. Notre lien bilatéral est dense et multiforme, et évolue favorablement à la satisfaction de nos deux pays. La France est à la fois notre premier client et notre premier fournisseur. Elle est également le premier pays en termes d’investissements directs étrangers, hors énergie, et notre principal bailleur de fonds européen. Elle accueille en outre le plus grand nombre de ressortissants tunisiens établis à l’étranger. La visite en Tunisie du président Sarkozy, quelques semaines seulement après son élection, témoigne de la volonté qui anime nos deux pays d’œuvrer de concert à impulser ces relations dans tous les domaines, en procédant notamment à l’adaptation de tous les mécanismes de la coopération aux exigences de l’étape à venir.   Question : Dès les années 90, vous avez vu se profiler la menace de l’extrémisme intégriste… Avez-vous aujourd’hui le sentiment d’avoir évité à la Tunisie ce qui est arrivé dans d’autres pays ?   Réponse : Profondément convaincus que le terrorisme représente une grave menace pour la paix et la sécurité dans le monde, nous avons, dès le début des années 90, attiré l’attention de la communauté internationale sur la nécessité d’une coopération accrue pour y faire face. Nous avions à cet effet appelé à l’adoption, par les Nations Unies, d’un code de conduite engageant tous les pays dans un effort commun pour éradiquer ce fléau. Nous constatons aujourd’hui avec satisfaction une plus grande prise de conscience internationale, face à l’extrémisme et au terrorisme, fléaux qui menacent tous les pays sans exception. Nous continuons de plaider pour une approche globale de la lutte contre le terrorisme en s’attaquant aux racines du mal qui se nourrit de la pauvreté, de l’exclusion, de l’ignorance, des frustrations, des injustices et de l’absence d’équité dans les relations internationales. En Tunisie, nous sommes parvenus à nous prémunir contre l’intégrisme et la menace terroriste grâce à une stratégie de développement globale et solidaire qui repose sur la justice sociale, la réduction des inégalités et la promotion des couches les plus défavorisées. Nous y sommes parvenus, grâce également à l’ancrage des principes de modération, d’ouverture et de tolérance dans notre société. Notre système éducatif a été entièrement réformé et ses programmes mobilisés de façon à développer chez les jeunes générations le sens critique et l’ouverture sur le monde. Nous avons renforcé le rôle de la femme dans la société et consacré l’égalité en droits et en devoirs des citoyennes et des citoyens. L’œuvre de démocratisation continue, menée dans le pays, a favorisé l’émergence d’une société équilibrée et homogène. En tant que terre de rencontre et de civilisation plusieurs fois millénaire, notre pays apportera sa contribution au dialogue des cultures et des civilisations pour un monde meilleur où règneraient la paix, la prospérité et la sécurité.   Question : La situation au Moyen-Orient n’a jamais été aussi explosive : le danger d’un éclatement de l’Irak, l’absence de processus de paix au Proche-Orient et ses répercussions régionales… Comment en voyez-vous l’issue, vous qui, dans ce domaine, avez souvent fait preuve de sagesse et de raison ?   Réponse : Certes, comme vous l’avez relevé, la situation dramatique au Moyen-Orient demeure une source d’inquiétude pour nous tous en raison des dangers sans cesse croissants et des risques qu’elle fait peser sur la région entière. Il importe en conséquence que la communauté internationale -et notamment les membres influents dont le Quartette- intensifie les efforts et mette tout son poids dans la balance pour réactiver le processus de paix, en vue de parvenir à un règlement juste et durable du conflit, par la création d’un Etat palestinien viable, sur la base des résolutions onusiennes, de la feuille de route et de l’initiative arabe de paix. L’administration américaine entreprend des efforts que nous encourageons pour relancer le processus de paix au Moyen-Orient. Nous espérons que ces efforts, et notamment la conférence de paix qui aura lieu prochainement, déboucheront sur des propositions concrètes et équitables qui permettront de redonner l’espoir en une paix juste et durable dans la région. Pour ce qui est de l’Irak, notre position reste la même. Elle consiste à appeler de nos vœux la mobilisation de tous les efforts pour mettre un terme à l’anarchie et aux violences qui endeuillent chaque jour ce pays frère, favoriser la réconciliation nationale, sauvegarder l’unité et l’intégrité territoriale de l’Irak et donner ainsi au peuple irakien la possibilité de se consacrer à la reconstruction nationale.   (Source : l’agence TAP (Officielle), le 5 novembre 2007)

Ouverture à Marrakech de l’Assemblée générale d’Interpol
AFP, le 5 novembre 2007 à 12h06  
MARRAKECH (Maroc), 5 nov 2007 (AFP) – La 76e Assemblée générale d’Interpol, qui doit discuter notamment du terrorisme, de la contrefaçon et de la lutte contre la pédophilie s’est ouverte lundi à Marrakech, dans le sud du Maroc. Près de 600 délégués venus de 144 pays doivent participer jusqu’à jeudi aux travaux de la plus grande réunion de policiers du monde. Un périmètre de sécurité a été mis en place autour du Palais des congrès de la ville ocre. Dans la salle, une grande banderole a été tendue avec deux mains, l’une blanche et l’autre noire, qui se serrent en signe de solidarité. A la tribune ont pris place notamment les ministres de l’Intérieur français et marocain, Michèle Alliot-Marie et Chakib Benmoussa, qui doivent prononcer une allocution ainsi que le président et le secrétaire général d’Interpol, Kackie Selebi et Ronald K. Noble, ainsi que le directeur exécutif des services de police d’Interpol, Jean-Michel Louboutin. Le terrorisme sera un des principaux thèmes de cette réunion qui se tient à huis clos. Près de 11.000 noms de terroristes sont enregistrés dans la base de données d’Interpol. Après le succès de l’opération “Vico”, qui a permis en moins de deux semaines l’arrestation d’un pédophile présumé grâce à la diffusion mondiale d’un appel à témoins, “la sollicitation de l’aide du public pour identifier et localiser les pédodélinquants sera aussi un thème central”, a précisé Interpol.   AFP

90 ans après, les Russes restent partagés sur la Révolution de 1917
 
AFP, le 4 novembre 2007 à 10h39 Par Victoria LOGUINOVA   MOSCOU, 4 nov 2007 (AFP) – Quatre-vingt dix ans après la Révolution bolchevique de 1917, les Russes restent partagés sur son bilan historique et nombre d’entre eux craignent même “un retour en URSS”. Le 7 novembre (25 octobre dans le calendrier julien) 1917, les bolcheviques prirent le pouvoir, puis fondèrent, en 1922, l’Union soviétique, qui ne disparaîtra qu’en 1991. Quarante pour cent de Russes estiment toujours que les conséquences de la Révolution de 1917 ont été plutôt “positives” pour le pays, 29% étant d’un avis opposé, selon un récent sondage de l’institut FOM. Le 7 novembre, fête nationale pendant des décennies, n’est désormais plus un jour férié et a été remplacé en 2005 par la Journée de l’unité du peuple, célébrée le 4 novembre. Mais nombre de Russes continuent à fêter l’anniversaire de la Révolution de 1917. “Le 7 novembre reste une grande fête pour moi. La Révolution a donné la liberté et des acquis sociaux à notre peuple. Mais le nouveau pouvoir a tout rayé. Les prix ont grimpé et nous avons perdu la foi en l’avenir”, regrette Galina Ivanovna, une retraitée âgée de 75 ans. “Ce n’est pas une fête. La Révolution a privé les Russes de leur religion, de leur culture, de leur sens moral”, considère de son côté Sergueï, un prêtre orthodoxe de 40 ans. D’après un récent sondage du Centre Levada, un peu plus d’un Russe sur trois (35%) souhaiterait un retour au système politique soviétique, alors que 44% y sont opposés. Dans le même temps, un Russe sur quatre pense que le système politique dans la Russie d’aujourd’hui “rappelle de plus en plus le système soviétique”, ressort-il de cette enquête. Cette ressemblance devient de plus en plus frappante à l’approche des législatives de décembre, relèvent les médias d’opposition. “Le 2 décembre, la Russie votera pour un avenir soviétique, avec un parti hégémonique, une économie dirigée et un grand leader”, titrait récemment le journal d’opposition Novaïa Gazeta. Le parti pro-Kremlin Russie unie, soutenu par une majorité de Russes, semble vouloir prendre la place des communistes, qui ont, eux, perdu leur influence au Parlement, analysent les opposants. “Toutes les forces du pays – président, gouverneurs, maires – vont tenter de faire élire à la Douma (chambre basse du Parlement) une équipe docile qui votera pour tout ce qu’on lui propose”, commente Guennadi Ziouganov, le chef du Parti communiste, dont la popularité a fortement chuté ces dernières années. Les Russes, souvent venus de province, restent pourtant nombreux à faire la queue pour visiter le mausolée de la Place Rouge, où repose Vladimir Lénine, le “père de la Révolution”. “Lénine était un grand homme. A son époque, les gens avaient des idéaux. Aujourd’hui, seul l’argent compte”, déplore Anton Diagterev, un ouvrier de 18 ans présent au mausolée. Les débats sur l’enterrement de Lénine se poursuivent. Un responsable de l’administration présidentielle russe, Vladimir Kojine, avait évoqué en octobre l’idée d’un référendum sur la fermeture du mausolée. “La présence de Lénine au coeur de Moscou est symbolique”, note pour sa part un homme d’affaires russe de 44 ans, pour lequel l’actuel président continue à suivre une politique “soviétique”. “Nous observons un culte de personnalité de Poutine. A Moscou comme dans le régions, on n’écoute que le Kremlin. Et Russie unie a remplacé le PC”, conclut-il, sous le couvert de l’anonymat, ajoutant : “en 1917, ce n’était pas une révolution, mais un coup d’Etat sanglant. Nous continuons à en ressentir les conséquences”.   AFP

La Turquie autorisée à ériger un mémorial ottoman à Jérusalem-est
AFP, le 4 novembre 2007 à 14h31
JERUSALEM, 4 nov 2007 (AFP) – Le Waqf, l’office des biens musulmans, a autorisé la Turquie à ériger un mémorial pour ses soldats tombés à l’époque de l’empire ottoman, à Jérusalem près de l’Esplanade des mosquées du Dôme du rocher et d’al-Aqsa, haut lieu de l’islam, a indiqué dimanche son directeur. “Nous avons autorisé le gouvernement turc à ériger un mémorial pour les soldats de l’époque ottomane à Jérusalem”, a déclaré à l’AFP Azzam al-Khattib. Le mémorial doit être érigé à l’extérieur des remparts de la vieille ville à quelques mètres de l’Esplanade des mosquées, troisième lieu saint de l’islam après La Mecque et Médine, bâtie sur le site où se dressait jadis le Temple juif d’Hérode, détruit par les romains en l’an 70 de l’ére chrétienne. Un terrain de 120m2 a été alloué à cet effet au gouvernement turc près d’un cimetière musulman voisin de la porte des Lions, a-t-on indiqué. Le projet doit encore obtenir le feu vert du Premier ministre israélien Ehud Olmert mais un responsable de son bureau contacté par l’AFP a indiqué “n’être pas au courant” de la requête présentée par le gouvernement turc. Jérusalem a été contrôlée durant quatre siècles depuis la Sublime porte, à Istanbul, par l’empire ottoman de 1517 jusqu’à 1917 date de sa prise par les forces du général britannique Edmund Allenby lors de la première guerre mondiale. Israël a occupé et annexé le secteur oriental de Jérusalem dans la foulée de la guerre israélo-arabe de juin 1967. La Turquie et Israël entretiennent une importante coopération économique et militaire depuis qu’ils ont signé un accord en 1996, au grand dam des pays arabes et de l’Iran.   AFP

L’Espagne veut impulser le projet d’Union méditerranéenne (Moratinos)
 
AFP, le 4 novembre 2007 à 14h45
ALGER, 4 nov 2007 (AFP) – L’Espagne est prête à soutenir le projet d’Union méditerranéenne du président français Nicolas Sarkozy, a déclaré le ministre espagnol des Affaires étrangères Miguel Angel Moratinos, dans un entretien au Quotidien d’Oran (Algérie) à diffuser lundi.   “Nous sommes prêts à travailler pour donner une nouvelle impulsion (aux relations entre l’Europe et les pays du sud de la Méditerranée), à travers l’initiative de l’Union méditerranéenne du président français”, Nicolas Sarkozy, a déclaré M. Moratinos.   “Le temps est venu pour aller vers un +Barcelone plus+ et de mettre en place un tas d’institutions pour que cela marche de façon plus systématique, et pour refléter davantage le partenariat. Il faut aller vers plus d’institutions communes, des projets et des engagements communs. C’est dans cet esprit que se situe l’initiative du président Sarkozy”, a-t-il précisé.   “Le pourtour méditerranéen doit avoir une priorité dans la stratégie de l’Espagne et de l’Union européenne. Ce qui manque depuis de longues années, c’est un engagement stratégique de l’UE vis-à-vis de sa frontière sud”, a-t-il poursuivi.   “Il faut un espace régional plus méditerranéen. Nous saluons la proposition française. Nous avons déjà parlé avec nos amis français qui sont tout à fait d’accord pour mener des projets stratégiques concrets, comme la sécurité, l’immigration, l’environnement, la culture, le dialogue des civilisations. Cela a beaucoup avancé. Tous ces sujets sont importants”, a dit le ministre espagnol.   Le “processus de Barcelone” avait été lancé lors d’un sommet en 2005 avec pour ambition la promotion d’une statégie de coopération avec le Sud semblable à celle mise en oeuvre avec les pays de l’Est européen après la chute du mur de Berlin, mais les partenaires méditerranéens de l’UE ont exprimé à plusieurs reprises leur “insatisfaction” concernant les résultats de cette politique.   L’Union méditerranéenne est un des projets phares en politique extérieure du nouveau président français. Il l’a exposé fin octobre au Maroc et doit l’exposer prochainement en Algérie et en Tunisie à l’occasion de visites d’Etat dans ces deux pays.   M. Moratinos a par ailleurs souligné que “le temps est venu pour que les efforts (du Maroc et du Front Polisario), sous les auspices de l’ONU, débouchent sur des résultats” pour une solution du conflit du Sahara occidental, une ancienne colonie espagnole annexée en 1975 par Rabat et dont le Polisario, soutenu par Alger, réclame l’indépendance.   “Nous ne pourrons plus continuer à rester inertes devant une situation de blocage au sein du Maghreb. La solution du problème du Sahara occidental ne doit pas être ajournée d’une façon éternelle et ne doit pas arrêter l’intégration maghrébine”, a-t-il dit.   AFP

 

 


 

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