4 avril 2011

TUNISNEWS
10 ème année,  N°3968 du 04.04.2011
archives : www.tunisnews.net 


Lettre d’information relative aux activités de l’ATTF et interpellation de l’action gouvernementale en matière de récupération des biens spoliés par le Président déchu et son clan Bourguiba – Devoir et droit de mémoire  Appel  – Urgence d’un moratoire sur les renvois vers la Tunisie, et d’un accueil digne des Tunisien.ne.s dans l’UE !

AFP: Lampedusa: environ 200 immigrés arrivés dans la nuit, plus de 1.300 évacués

AP:Berlusconi à Tunis pour discuter des réfugiés tunisiens en Italie

AFP:Immigration: Berlusconi annonce un dispositif italo-tunisien


REVUE DE PRESSE

Association Tunisienne pour la Transparence Financière (ATTF)


Rue Léopold Senghor, Sousse

Tél : (00216) 98 402 128/ 22655021

Fax : (00216)73 221 985

associationttf@yahoo.fr

Sousse, le 31 mars 2011

Monsieur le Premier Ministre

Place de la Kasba

Tunis

CC : MM. Ministre de la Justice, Ministre des Finances, Ministre des Affaires Étrangères, Ministre de l’Intérieur et Gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie

Objet : Lettre d’information relative aux activités de l’ATTF et interpellation de l’action gouvernementale en matière de récupération des biens spoliés par le Président déchu et son clan.

Monsieur le Premier Ministre,

Durant des décennies de corruption et d’activités financières illicites, le président déchu et son entourage ont spolié le peuple tunisien.  Ce même peuple qui commence à écrire une nouvelle page de son histoire a plus que jamais besoin de la restitution de ses biens pillés.

C’est dans un élan patriotique et en raison de la complexité et de la lenteur des démarches juridiques et administratives pour la récupération des biens détournés par le président déchu et son entourage, qu’est née l’Association Tunisienne pour la Transparence Financière (ATTF). Cette association  s’est fixée comme objectifs essentiels de :

          Faire pression sur les gouvernements et les institutions financières pour accélérer les démarches de restitution des biens dérobés.

         Aider le gouvernement Tunisien  dans ces démarches, au moyen d’actions citoyennes ciblées. A cet effet, elle veillera notamment à mobiliser le réseau d’ONG de par le monde œuvrant pour le même idéal.

         Interpeller les décideurs politiques sur les dispositions mises en place en matière de lutte contre la corruption, et plus précisément sur les démarches administratives et juridiques menées pour la récupération des biens détournés du peuple tunisien.

         Conduire toute action en vue de renforcer les lois et les structures permettant de lutter efficacement contre la corruption.

         Sensibiliser les jeunes, futurs acteurs de la vie économique et sociale aux enjeux de la démocratie, de l’état de droit, et de l’intégrité, autant de valeurs fondamentales dont la corruption constitue la négation.

Le mercredi 23 mars 2011, l’ATTF a mené sa première action citoyenne, en organisant une manifestation pacifique devant l’Ambassade de Suisse à Tunis. À cette occasion, un comité de l’ATTF a eu une entrevue avec Monsieur Pierre Combernous, Ambassadeur de Suisse. Au terme de l’entrevue, une pétition signée par 10 260 citoyens tunisiens a été délivrée à Monsieur l’ambassadeur.

Au cours de l’entretien, le Dr Sami Remadi président de l’ATTF, a reproché à la Suisse et aux gouvernements occidentaux leur « silence complice» vis-à-vis du régime du dictateur déchu, malgré leur connaissance parfaite des pratiques mafieuses du système. A titre d’exemple, il a évoqué l’affaire de la main basse du gendre du président déchu sur 40 % des actions de Nestlé Tunisie. Le géant de l’agroalimentaire avait quand même gardé le silence pour ne pas mettre en péril ses activités en Tunisie. Monsieur l’Ambassadeur avait rétorqué « …La Suisse n’était pas complètement silencieuse. En effet  les propos de Monsieur le Président de la confédération évoquant la question épineuse des droits de l’homme  dans le cadre du sommet mondial sur la société de l’information en 2005, n’ont pas manqué d’irriter le régime tunisien… ». Le président de l’ATTF a également fait part de l’inquiétude des citoyens tunisiens quant aux possibilités de récupération de leurs biens dérobés, évoquant des affaires de fuite de capitaux qui n’ont pas abouti après plusieurs années d’attente (affaire Mobutu,…). Comme il a fait remarquer à Monsieur l’Ambassadeur qu’il est dommage que la confédération, et les banques suisses ont dû  répondre dans certaines affaires seulement sous la pression (évoquant l’affaire des fonds en déshérence des juifs, et l’affaire du fisc américain avec l’UBS en 2009).

De même, lors de cette réunion il a été mentionné à Monsieur l’Ambassadeur que normalement dans un état de droit qui s’attache aux valeurs de démocratie, on ne devrait pas accepter de l’argent sale, et si des dispositifs de monitoring sincères et scrupuleux étaient appliqués, les avoirs illicites du clan déchu n’auraient jamais pu aboutir sur des comptes bancaires suisses. La situation  témoigne en fait de standards relativement laxistes appliqués par les banques helvétiques.

Monsieur l’ambassadeur a attiré l’attention que la demande d’entraide judiciaire pour le gel des avoirs a intéressé 48 personnes seulement.

En effet après vérification des documents officiels émanant du département fédéral des affaires étrangères, l’ATTF constate effectivement que « l’ordonnance instituant des mesures à l’encontre de certaines personnes originaires de la Tunisie » datée du 19 janvier 2011, au vu de l’art 184 al. 3 de la constitution helvétique, et modifiée le 4 février 2011, comporte effectivement 48 personnes seulement!

Monsieur l’Ambassadeur a confirmé que le gel des avoirs est effectif, et qu’on peut faire confiance à l’ordonnance du conseil fédéral. Ce gel concerne seulement la liste nominative des 48 personnes. Cependant des fuites peuvent avoir lieu via des sociétés écrans montées par le président déchu et son entourage.

Au vu de l’article 4, section 2 de l’ordonnance du conseil fédéral datée du 19 juillet 2011, L’ATTF a demandé à Monsieur l’Ambassadeur une liste exhaustive des avoirs gelés. En effet, cet article mentionne : « Les personnes ou les institutions qui détiennent ou gèrent des avoirs ou qui ont connaissance de ressources économiques dont il faut admettre qu’ils tombent sous le coup du gel des avoirs prévus à l’art 1 al 1, doivent le déclarer sans délai à la DDIP  (Direction du Droit International Public). La déclaration doit mentionner le nom du bénéficiaire, l’objet et la valeur des avoirs et des ressources économiques gelés ». Monsieur l’Ambassadeur n’a rien promis quant à la liste des avoirs, mais l’ATTF suppose que sa demande est légitime au vu de l’article sus mentionné.

Monsieur L’ambassadeur a remarqué que l’accélération des procédures de gel, de saisie, et de restitution des biens est tributaire d’une plainte pénale introduite en Tunisie contre les personnes incriminées, ce qui prouverait l’origine illicite des avoirs en question. Il a également souligné que des efforts supplémentaires sont attendus de la part du gouvernement tunisien et de la banque centrale afin d’accélérer la procédure de restitution.

Le président de l’ATTF a proposé l’application de la loi portant sur la restitution des valeurs patrimoniales d’origine illicite de personnes politiquement exposées (LRAI) qui est entrée en application le 1er février2011. Monsieur l’Ambassadeur a rétorqué « …Ca serait peut être une possibilité, mais je ne suis pas juriste pour vous le confirmer… ».

Au terme de la rencontre, Monsieur L’ambassadeur a promis une réponse officielle à l’ATTF. Il s’est adressé aux manifestants en ces termes: « …je vous félicite pour cette entreprise citoyenne, et pour la parfaite organisation qui démontre beaucoup de sérieux et d’engagement. Les autorités et le peuple suisse sont admiratifs de ce que les tunisiens ont fait. Vous avez la garantie d’engagement des autorités suisses, et nous ferons l’impossible pour que les choses aillent le plus rapidement possible. Je vous remercie de vous préoccuper de ce qui est à vous. J’ai vu certains de vos slogans qui m’ont fait gentiment sourire parce que je partage également vos préoccupations comme citoyen, et pas seulement comme ambassadeur… » . Bien entendu, l’ATTF s’engage à tenir le gouvernement informé de toutes les informations qui seront communiquées par Monsieur l’Ambassadeur.

Tout en poursuivant sa mobilisation et dans l’attente de la réponse officielle de la Confédération Helvétique, l’ATTF salue les propos de Monsieur l’Ambassadeur qui a démontré beaucoup de sérieux et de sincérité.

Au vu de ce qui précède l’ATTF interpelle le gouvernement tunisien de transition et souhaiterait avoir des réponses quant à :

         Son intention d’étendre son ordonnance de saisie des avoirs à la totalité des 110 personnes qui ont fait l’objet d’un décret-loi portant saisie des avoirs et des biens mobiliers et immobiliers parmi les anciens dirigeants, leurs parents et leurs associés. L’ATTF souhaiterait que le gouvernement de transition expose au peuple tunisien les raisons de cette absence d’initiative.

         Les dispositions prises par le gouvernement de transition relatives aux plaintes pénales à l’encontre des personnes incriminées en vue de faciliter les procédures de saisie et de restitution des avoirs dérobés.

         Les raisons qui ont poussé au changement de la liste initiale ayant fait l’objet d’une ordonnance par le conseil fédéral suisse, instituant des mesures à l’encontre de certaines personnes originaire de la Tunisie en date du 19 janvier 2011, modifiée le 4 février, au vu de l’article 6 de la section 4 de la dite ordonnance.

Par ailleurs,

         L’ATTF demande au gouvernement et aux instances dirigeantes de la Banque Centrale de Tunisie de faire les enquêtes nécessaires, et d’éclairer les ONG, et le peuple tunisien sur les pratiques frauduleuses de change et de transfert de devises, ce qui permettra d’orienter nos actions citoyennes.

         L’ATTF souhaiterait connaître les raisons pour lesquelles le gouvernement tunisien n’a pas usé de la convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003 et adoptée par les textes de loi n°16 daté du 25 février 2008, afin de geler les avoirs dérobés par le clan déchu et placés au Canada à Dubai, au Luxemburg, à Monaco, et ailleurs… Sachant que jusqu’à ce jour les personnes incriminées sont en train de dilapider les avoirs du peuple tunisien et de les mettre dans des paradis fiscaux à l’abri des poursuites judiciaires.

         l’ATTF continuera d’interpeller les responsables politiques afin qu’ils communiquent en toute transparence, toutes les péripéties des procédures engagées en vue de la récupération de nos biens.

          L’ATTF s’engage, de son côté, à publier en temps opportun toutes les informations qui permettraient d’éclairer l’opinion publique.

 

Monsieur le Premier Ministre, l’ATTF, consciente du caractère extrêmement critique de la mission de votre gouvernement, ne manquera pas d’apporter l’appui nécessaire de la société civile dans l’objectif d’accompagner et de soutenir les démarches officielles visant la récupération des biens spoliés par le président déchu et son clan.

 

Veuillez agréer, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de ma haute considération

 

 

Association Tunisienne pour la Transparence Financière

 

Le Président

Dr Sami Remadi


Bourguiba : devoir et droit de mémoire


 

Enfin, le bon grain débarrassé de l’ivraie, nous avons une mémoire à célébrer !

 

Le 6 avril 2000, le peuple tunisien privé de sa liberté et de sa dignité depuis le coup d’État militaro-policier du 7 novembre 1987, fut dépossédé aussi de sa mémoire par une junte mafieuse dissimulée derrière un prête-nom civil ! Frustrés et spoliés, les Tunisiens assistèrent, désemparés, à la confiscation de la célébration de la disparition d’un Homme symbole : Habib BOURGUIBA, le Père de la Nation. C’était la pire des frustrations, nous dirais même un CRIME contre notre mémoire collective.

 

Aujourd’hui, grâce à cette merveilleuse Révolution, la Tunisie va pouvoir se rattraper et rendre hommage à Si Lahbib, fondateur de la République et libérateur de la femme, une occasion de prouver que tout Tunisien se trouve incapable d’oublier l’homme qui l’a hissé très haut ! Bourguiba, le Père qui a su donner à ses enfants une éducation et leur inculquer des valeurs reconnues dans le monde entier ! Bourguiba,  le Président qui a su inscrire cette jeune Tunisie, le petit pays arabo-musulman, dans la Modernité !

 

Sur cette unité retrouvée, sur cette Révolution magique, plane « l’esprit » de celui qui s’est consacré à l’édification d’une Tunisie qu’il avait toujours voulue comme modèle à suivre, comme un phare ! C’est aujourd’hui chose faite !

 

Encore un rendez-vous avec l’Histoire !  

 

Pour le collectif Tunisie : solidarité, éveil et vigilance

                     

Mansour SAYAH

Chérif FALAH

Noureddine CHAHED

Sonia GUELLOUZ

Najet LABIDI

Henda DHAOUDI

Nassima BEN AZIZA

Leïla KAMMOUN

Chokri TOUNSI

Slim DALI

Faouzi ZAGHOUANI

Mongi FERCHICHI

Moncef MHAMDI

Nadia SAFI Mongia JAMMALI

 


Appel 

Urgence d’un moratoire sur les renvois vers la Tunisie, et d’un accueil digne des Tunisien.ne.s dans l’UE !


 

 | 4 avril 2011 |  

Depuis deux mois, la Tunisie subit des pressions considérables, notamment de la part de l’Italie, pour renforcer les contrôles à ses frontières et réadmettre ses ressortissants arrivés à Lampedusa. La visite de Silvio Berlusconi ce 4 avril a pour objet d’obtenir des engagements des autorités tunisiennes en ce sens, malgré les appels répétés des organisations de défense des droits des migrants (Migreurop, 22 Février, Mare Nostrum, 2 Mars et REMDH, 23 Mars) et en dépit de la situation exceptionnelle à laquelle le pays doit faire face.

La Tunisie vit des moments historiques et doit relever les défis considérables en termes de construction démocratique. La situation est porteuse d’immenses espoirs mais elle est complexe et rendue particulièrement difficile par la guerre en Libye. La Tunisie a accueilli depuis le début de la crise libyenne plus de 200 000 personnes, soit dix fois plus que l’Italie. Si la majorité des personnes arrivées en Tunisie ont pu être rapatriées vers leur pays d’origine, des milliers d’entres elles sont toujours bloquées dans les campements à la frontière, ne pouvant rejoindre leur pays en guerre, comme c’est le cas pour la Côte d’Ivoire, l’Erythrée et la Somalie.

Il est hypocrite et immoral de la part de l’UE de se réjouir de la révolution en Tunisie tout en exigeant que celle-ci continue, au nom de la supposée nécessité de protéger l’Europe d’un « déferlement migratoire », à jouer le rôle de garde frontière, comme du temps de la dictature de Ben Ali. Il est urgent au contraire de prendre acte des changements démocratiques et de reconstruire les relations entre l’UE et la Tunisie sur des bases équitables et transparentes. Les Etats européens ne peuvent pas répondre au processus démocratique en cours par une politique répressive à l’égard des migrant.es, en faisant peser la menace d’un renvoi collectif.

Non seulement cette menace doit être levée, mais les Etats de l’UE ont la responsabilité d’accueillir dignement celles et ceux qui sont arrivé.e.s en Europe ces dernières semaines. Depuis plus d’un mois, l’arbitraire et l’incohérence caractérisent la gestion de la situation par le gouvernement italien. Le traitement qui est réservé aux Tunisien.n.es dans certains centres de rétention en Italie, la chasse aux migrants dans le sud de la France et le jeu de « ping-pong » dont d’autres sont l’objet à la frontière franco-italienne sont inacceptables.

Il est enfin inadmissible que l’Union Européenne laisse à la Tunisie la seule responsabilité de l’accueil des personnes fuyant la Libye et qui n’ont pas la possibilité de rentrer dans leur pays. L’Union Européenne a le devoir de se montrer à la hauteur de la situation, en prenant exemple sur l’accueil offert par la Tunisie à toutes les personnes fuyant la Libye.

Une situation exceptionnelle appelle des mesures exceptionnelles, et l’UE dispose de tous les outils juridiques et politiques pour y faire face. Les Etats membres doivent sans plus attendre prendre leurs responsabilités et :

• Déclarer un moratoire immédiat sur les renvois de Tunisien.e.s en Tunisie ;

• Accorder l’admission exceptionnelle au séjour des Tunisiens déjà arrivés en France et en Italie

• Garantir l’accès au territoire européen aux personnes en quête de protection et s’abstenir de toute mesure ou accord qui pourraient l’entraver ;

• Mettre en œuvre le dispositif permettant d’accorder la protection temporaire prévue par la directive du 20 juillet 2001 à tou.te.s celles et ceux qui peuvent s’en prévaloir ;

• Accueillir, dans le cadre de la réinstallation, les réfugié.e.s présent.e.s à la frontière tuniso-libyenne qui le souhaitent ;

• Offrir l’asile ou une protection à toutes les personnes qui ne peuvent être rapatriées du fait de la situation dans leur pays d’origine.

A court terme, il importe de mettre en place un programme européen d’aide et de coopération avec la Tunisie qui permette à ses ressortissant.es d’entrer régulièrement dans les Etats membres pour y travailler ou y faire des études.

Signataires : ABCDS (Ma), ACORT (F), APDHA (ES), ARCI (I), ASGI (I), ATMF (F), CIRE (B), FTCR (F), GADEM (Ma), GISTI (F), La Cimade (F), Migreurop, LDH (B), SOS Racismo (Es)

——————————- FTCR- 5rue de Nantes 75019 – Paris – Tel/Fax 00 33 140341815 – ftcr@ftcr.euwww.ftcr.eu


Lampedusa: environ 200 immigrés arrivés dans la nuit, plus de 1.300 évacués


 
(AFP) – 04/04/11 12:52
 
ROME — Plus de 200 immigrés sont arrivés dans la nuit de dimanche à lundi sur la petite île italienne de Lampedusa d’où l’évacuation de ceux déjà présents s’est poursuivie avec le départ de quelque 1.300 d’entre eux, ont annoncé les autorités locales.
 
Une embarcation avec 210 personnes à son bord a accosté dans le port de Lampedusa peu après 00H00 GMT, après que plus de 600 immigrés avaient déjà débarqué dans la journée de dimanche d’une dizaine de barques.
 
Les évacuations se poursuivent dans le même temps et 1.344 immigrés ont quitté l’île dans la nuit à bord de deux ferries, La Superba et Clodia, à destination d’autres centres d’accueil un peu partout en Italie.
 
L’Italie est confrontée depuis le début de l’année à une vague d’immigration exceptionnelle avec plus de 22.000 arrivées sur son territoire, essentiellement en provenance de Tunisie.
 
Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi se rend lundi dans la matinée à Tunis pour tenter de trouver une solution à ce problème avec les autorités tunisiennes.
 
Il a par ailleurs annoncé dimanche soir l’organisation d’un sommet dans un proche avenir avec le président français Nicolas Sarkozy et consacré à ce sujet. L’Italie envisage, entre autres, l’ouverture de centres d’accueil spécifiques près des frontières pour les migrants voulant se rendre en France ou en Allemagne et la délivrance de permis de séjour leur permettant de circuler librement en Europe.

Berlusconi à Tunis pour discuter des réfugiés tunisiens en Italie


04/04/11 19:02
 
TUNIS (AP) — Le chef du gouvernement italien, Silvio Berlusconi, s’est entretenu lundi à Tunis avec les dirigeants de l’exécutif de transition au sujet de l’afflux de réfugiés tunisiens déclenché par la chute du régime Ben Ali.
 
Selon le président du Conseil italien, quelque 6.000 migrants se trouvent actuellement sur la petite île sicilienne de Lampedusa, située à 160km des côtes tunisiennes, alors que la localité ne compte normalement que 5.000 habitants.
 
« Hier (dimanche), nous avons déplacé vers des régions de l’intérieur de l’Italie la plupart des migrants qui s’y trouvaient, mais dans la nuit de dimanche à lundi 800 autres sont arrivés, d’où l’urgence de trouver une solution au problème », a déclaré M. Berlusconi.
 
Il a rencontré à Carthage, dans la banlieue nord de Tunis, le président par intérim Fouad Mébazzaâ, avant de se rendre à la Kasbah, le siège du gouvernement, où il a eu un long entretien avec le premier ministre Béji Caïd Essebsi.
 
M. Berlusconi a annoncé à la presse avoir convenu avec les responsables tunisiens de la mise en place d’une commission technique pour étudier immédiatement sur le dossier des migrants. Il a précisé que le ministre de l’Intérieur Roberto Maroni qui l’accompagnait dans sa brève visite à Tunis, y reviendrait mardi pour finaliser un accord.
 
Le chef du gouvernement italien s’est dit « confiant (dans la perspective) de parvenir à un accord satisfaisant pour les deux parties », sans plus de détails. Il a vaguement évoqué une aide à la Tunisie et notamment la fourniture d’équipement qui l’aiderait à « contrôler efficacement » ses côtes.
 
Une source proche de la délégation italienne a précisé à l’Associated Press que Rome proposerait 300 millions d’euros d’aide économique en contrepartie de rapatriements de réfugiés tunisiens.
 
M. Berlusconi a assuré que ces retours seraient volontaires et « civilisés ». De son côté, le Premier ministre tunisien a parlé de « relations d’amitié et de coopération tuniso-italiennes privilégiées » que « nous essayons de renforcer davantage dans l’intérêt bien compris des deux pays ». « Entre la Tunisie et l’Italie tout va bien et tout continuera à aller bien », a-t-il insisté.
 
Silvio Berlusconi a annoncé la tenue la semaine prochaine d’un sommet franco-italien sur l’afflux de réfugiés, qu’il a qualifié de « tsunami humain ». Ce sommet réunira avec lui le président français Nicolas Sarkozy et leurs ministres des Affaires étrangères, de l’Intérieur et de l’Economie, a-t-il précisé. Paris n’a pas confirmé dans l’immédiat. AP
 

Immigration: Berlusconi annonce un dispositif italo-tunisien


 
(AFP) – 04/04/11 16:51
 
TUNIS — Le chef du gouvernement italien, Silvio Berlusconi, a annoncé lundi à Tunis la mise sur pied d’une commission technique tuniso-italienne pour « se pencher » sur le problème de l’immigration.
 
« Nous sommes convenus de mettre en place une commission technique pour se pencher sur le dossier de l’immigration », a-t-il annoncé au terme de ses entretiens avec plusieurs responsables tunisiens.
 
« Le ministre (italien) de l’Intérieur Roberto Maroni sera encore mardi à Tunis pour finaliser un accord satisfaisant entre les deux parties », a-t-il précisé.
 
Dès son arrivée à Tunis, M. Berlusconi s’est entretenu avec le président tunisien par Intérim Foued Mebazaa puis le Premier Ministre Béji Caïd Essebsi.
 
Dans une brève déclaration, il a précisé que l’Italie allait apporter une aide financière à la Tunisie pour lui permettre d’assumer un contrôle efficace de son littoral, sans plus de précisions.
 
« Le dossier qui se pose d’urgence est celui du nombre élevé de jeunes Tunisiens qui se trouvent en Italie et veulent émigrer vers l’Europe », a déploré le chef du gouvernement italien.
 
« Le flux migratoire continue, dans la nuit de samedi à dimanche 800 migrants tunisiens ont débarqué, d’où la nécessité de trouver une solution », a-t-il ajouté.
 
M. Berlusconi a assuré que « le rapatriement des Tunisiens se fera d’une façon civilisée » soulignant que le gouvernement italien veut « les meilleures solutions étant donné les grands rapports d’amitié entre les deux pays »
 
Le ton était est monté ces derniers jours entre les deux pays sur la question des départs massifs de clandestins tunisiens vers Lampedusa.
 
La petite île, face aux côtes tunisiennes, a été submergée par une vague d’immigrés depuis le début de l’année, plus de 22.000, essentiellement des Tunisiens.

 


Tunisie : Frédéric Mitterrand, de Hammamet à Makthar


M. Frédéric Mitterrand, ministre français de la Culture et de la Communication, a déclaré lors d’une récente visite en Tunisie, que le patrimoine artistique et culturel du pays était «exceptionnel».

A l’issue d’une réunion de travail tenue avec M. Mehdi Haouas, ministre du Commerce et du Tourisme, le ministre français a notamment indiqué que le tourisme et la culture étaient deux domaines très proches et qu’ils pouvaient aller de pair.

« Le nouveau contexte que la Tunisie vit après la révolution du 14 janvier 2011 est à même de promouvoir la destination Tunisie, notamment à travers la valorisation du patrimoine culturel» a-t-il précisé tout en qualifiant au passage, quelques sites patrimoniaux d’extraordinaires. Ainsi le ministre français a évoqué le fait que les sites de Dougga, Makthar, El Jem et Sbeitla  revêtent une importance particulière par rapport au reste du bassin méditerranéen, malgré le fait qu’ils soient très peu médiatisés.

Source: “Tekiano” Le 04-04-2011

Après avoir déçu les Tunisiens, Frédéric Mitterrand veut se racheter


 

«Celui qui vous parle souffre d’avoir déçu des gens qu’il aime» a dit Frédéric Mitterrand à un panel de journalistes tunisiens réunis à l’hôtel des Berges du Lac.

Le ministre français de la Culture et de la Communication, qui faisait ici allusion à sa défense de l’ancien régime, a déclaré aussi avoir plusieurs projets pour la Tunisie, qu’il souhaite réaliser «en tant que ministre, en tant que Tunisien et en tant qu’amoureux de la culture». Une manière aussi de se racheter…

Frédéric Mitterrand, qui a visiblement bien préparé son discours, a trouvé les mots qu’il faut pour susciter l’émotion. «Je préfère parler de mon cœur», a-t-il dit, sans lever le regard vers son auditoire. A-t-il voulu présenter des excuses indirectes aux Tunisiens? Il a, en tout cas, reconnu qu’à un moment, il a vexé et déçu des gens qu’il aime (par allusion à ses déclarations favorables à Ben Ali, au moment où ce dernier faisait tirer sur les Tunisiens). Et qu’en tant que Tunisien, il a dit avoir vécu, lui et ses deux fils tunisiens (adoptifs), heure par heure, les événements de la révolution, via Facebook et Internet. M. Mitterrand a voulu tourner complètement la page du passé et aller de l’avant pour construire avec ses amis et compatriotes – puisqu’il a eu la nationalité tunisienne – une nouvelle Tunisie, libre et démocratique. Dans sa manette, une série de projets artistiques et culturels franco-tunisiens, dont il a entretenu les responsables tunisiens rencontrés à l’occasion de cette visite.

 

Les Tunisiens se réapproprient leur histoire

«J’ai visité hier le Musée du Bardo, encore en chantier. Il s’agit du plus beau musée du monde de par son contenu en mosaïques, bien présentées. Mais, il y a une semi absence – pas totale –, de la présence islamique, qui est un grand chapitre de l’histoire de la Tunisie. J’ai posé aux responsables cette question qu’on ne pouvait pas auparavant poser. Nous étions détendus. On n’a pas dit toutes les dix minutes que c’est un projet présidentiel. On n’a pas dit que c’est un projet fait sous des directives présidentielles. Je l’ai ressenti très fort. Ce qui est en train de se passer est formidable, digne d’admiration. Ce qui m’intéresse, ce qui est en train de se construire et ça m’impressionne. Il faut célébrer ce qui vient de se passer, regarder et accompagner ce qui se passera (…) On m’a dit qu’ils ont réfléchi sur cette question de legs islamique. Les Tunisiens se réapproprient leur histoire. Lors de ma visite impromptue, j’ai vu des étudiants restaurer des statues. Ils travaillent dans le cadre de la coopération franco-tunisienne. Ce musée qui va rouvrir bientôt sera l’un des meilleurs au monde, comme celui de Marseille», a déclaré M. Mitterrand. Qui a affirmé aussi n’avoir jamais manqué, vingt ans durant, d’être aux côtés des artistes tunisiens, au point qu’on lui disait souvent qu’il en faisait trop. Il a dit aussi qu’il est fier d’avoir la nationalité et d’être Tunisien.

M. Mitterrand n’a pas omis de se souvenir d’un autre Tunisien, aujourd’hui décédé, feu Serges Adda, qui a beaucoup fait, sur TV5, pour faire briller l’image de son pays natal, comme lui, «profondément attentif», lorsqu’il s’est «sincèrement investi dans des choses pratiques en étant derrière la création et la promotion des festivals et autres émissions à la télévision française… pour promouvoir la Tunisie».

Mitterrand fait son cinéma

Lors de sa rencontre avec M. Bach Chaouch, l’actuel ministre de la Culture, qu’il connaît depuis fort longtemps, M. Mitterrand a dit que le dialogue s’est vite établi, notamment sur le dossier du cinéma, aujourd’hui libéré. «Il y aura des fonds français pour aider le cinéma tunisien. Nous avons signé une déclaration en ce sens. Comme vous le saviez déjà, il n’y a pas de cinéma sans salles et il n’y a pas de cinéma sans spectateurs. Pour que l’industrie cinématographique avance, il faut créer des multiplex. Je sais qu’il y a la piraterie, mais rien ne vaut de voir un film sur écran géant», a-t-il relevé après avoir annoncé qu’il vient de nommer une Franco-tunisienne à la direction du Centre national du cinéma à Paris.

Pour le ministre français, le domaine du livre est aussi une priorité et il en a parlé avec son homologue. «Un livre, c’est important», dit-il. Même si la Tunisie a son réseau dans les régions avec les bibliothèques ambulantes, pour M. Mitterrand, il reste beaucoup à faire dans ces régions longtemps abandonnées. «Je connais très bien Sidi Bouzid et Kasserine où il m’est arrivé d’aller souvent dans un hôtel là-bas. Pour cette raison, j’ai souffert… Comment, je n’étais pas présent?», s’interroge-t-il sur une note de reproche. Le ministre français a promis que la France va aider les librairies en équipements, en ordinateurs, etc., pour moderniser le réseau des libraires et développer le numérique dans le premier pays qui a fait sa révolution grâce à Internet et Facebook et surtout dans les régions abandonnées en Tunisie.

 

C’est bien de créer mais ne pas oublier le patrimoine

Dans son discours, l’hôte de Tunis a mis des lumières sur la photographie en Tunisie. «J’ai fait des films sur la photo en Tunisie. La photo existe ici depuis son invention. Et depuis le 14 janvier, en pleine effervescence, on est très attentif aux photos. Cérès Edition est en train de préparer un livre là-dessus. Une sorte de rétrospective de ce qui s’est passé à Sidi Bouzid sortira en film. Une exposition de photo contemporaine tunisienne sera aussi présentée en septembre au Musée de Montparnasse. Nous sommes donc attentifs à la création, mais nous ne devons pas oublier le patrimoine», a dit aussi M. Mitterrand. Car pour lui, le patrimoine est important. Il a d’ailleurs été au centre de sa rencontre avec le ministre du Commerce et du Tourisme, Mehdi Houas. Les deux pays vont travailler ensemble pour développer le tourisme culturel. Depuis 20 ans, on a beau parlé de travailler sur ce secteur, mais il n’y a jamais eu de travail en pool. «Il faut un changement à 360°. Il n’y a pas assez d’hôtels de charme. Pour traverser le pays en cheval, il n’y a pas de chevaux. Pas de découvertes et il faut développer tout ceci en même temps», a dit M. Mitterrand.

Le petit écran n’a pas été oublié par cet homme de télévision. Il vient d’ailleurs de rencontrer les responsables de la télévision d’Etat et selon lui, il y aura «beaucoup à faire» dans ce domaine, notamment pour créer des télévisions régionales, qui seront une fenêtre sur le pays profond. «Il y aura aussi, je l’espère, des programmes pour la communauté tunisienne de France. Une sorte de trait d’union», a-t-il ajouté.

La musique est aussi au programme de la visite de M. Mitterrand qui a proposé à ses homologues de continuer à faire la fête. «J’aime bien qu’en juin, un peu avant les élections, il y aura une fête de la musique qui sera gratuite pour les Tunisiens et transmise en direct sur les chaînes de télévision françaises. Je viens de rencontrer aussi la ministre de la Femme et je lui ai proposé d’organiser un colloque sur ‘‘la femme et la citoyenneté’’ en invitant des personnalités importantes. Voici mes projets. J’espère arriver à les réaliser. C’est ce que je souhaite en tant que ministre, en tant que Tunisien et en tant qu’amoureux de la culture», a-t-il conclu.

Source : « Kapitalis » Le 04-04-2011

De Zarzis à Lampedusa :

«Moi, Bilal, clandestin»


 

D’une rive à l’autre de la Méditerranée, Le Figaro Magazine a suivi un jeune Tunisien qui a fui son pays.

La troisième tentative aura été la bonne. À 23 ans, Bilal Zairi a finalement réussi à quitter Zarzis, ce petit port tunisien sur la Méditerranée, face à l’île de Djerba, où il est né et où il a grandi sous l’étouffant régime de Ben Ali. Il est aujourd’hui sur le sol européen. Chaque fois qu’il trouvait un peu d’argent pour son passage, un bateau, un passeur, son obsession grandissait. Il répétait les mêmes formules: «Je sens l’air de l’Italie», «Je sens la France». Bilal dilatait ses narines, écarquillait les yeux, respirait profondément. Il mimait ce qu’il avait éprouvé les deux premières fois où il avait frôlé les eaux italiennes, presque arrivé à l’île de Lampedusa, l’actuelle porte d’entrée en Europe des clandestins tunisiens.

Fils unique demeuré avec sa mère divorcée, Bilal s’est jeté à corps perdu dans la révolution de jasmin. Sur la place de la Jeunesse, au centre-ville de Zarzis, comme tous ses copains qui ont, depuis, pris le large, il a défié et insulté la police qui assurait l’ordre du dictateur tunisien. «Les premiers soirs, raconte-t-il, je regardais s’il n’y avait pas de policiers qui m’attendaient quand je rentrais chez moi. Après, on est allés chez eux, on est entrés dans leurs appartements.» Ces cerbères, qui contrôlaient la population, et donc l’émigration, ont fui et ne sont toujours pas revenus dans les rues de Zarzis. La voie maritime pour l’Europe s’est ouverte, béante.

Aux premiers jours de février, un mois où quelque 5000 Tunisiens sont arrivés à Lampedusa, Bilal a une première fois embarqué pour l’île italienne. C’était la cohue sur la jetée au bout du port de Zarzis.

Les gardes-côtes sont restés sur leur navire. «De toute façon, ils ont un seul bateau pour surveiller 160kilomètres de rivage!», s’exclame Ahmed Faouzi Khenissi, le maire de la ville. Les militaires, seuls dépositaires de l’autorité publique, ont préféré organiser les départs, plutôt que de s’y opposer. «À l’époque, on voulait éviter les affrontements avec la population», rappelle l’élu. «Trop de monde voulait quitter Zarzis, se souvient Bilal. Mais les militaires ne laissaient partir que les bateaux en bon état. Moi, je leur ai donné mon nom. Il était sur la liste: ils ont contrôlé, et ils m’ont laissé passer.»

Le chalutier sur lequel avait pris place Bilal s’est cependant fait rattraper dans les eaux internationales par un navire de guerre tunisien. Retour à Sfax, puis à Zarzis. Bilal a récupéré la plus grande partie des 2000 dinars (un peu moins de 1000 euros) qu’il avait donnés pour son passage. C’est l’usage. Il a aussitôt retenté sa chance. Le 11 février dernier, il était sur l’embarcation heurtée et coulée par le navire de guerre tunisien «Horria 302». «Ils l’ont fait exprès, assure Bilal. Ils ont reculé, et ils ont coupé notre bateau en deux. Heureusement, un hélicoptère italien est arrivé. Sinon, on serait tous morts. Les militaires ne voulaient pas nous sauver.»

Cette affaire dramatique, dans laquelle une trentaine de clandestins ont sans doute péri, a fait grand bruit à Zarzis et dans toute la Tunisie. «Mais c’est comme avant, le pouvoir dit n’importe quoi, on se moque des gens», s’insurge Farouk Lehiba, qui a perdu son fils de 17 ans et se bat pour que la vérité éclate. Ce naufrage n’a porté aucun coup à l’émigration. Le sentiment d’injustice aurait plutôt renforcé la détermination des candidats au départ. «Non, j’ai pas peur. Tous mes copains sont déjà partis», répète Bilal, qui ne voit pas ce qui pourrait le retenir. Dans les hôtels et clubs de vacances où il a travaillé, à Zarzis et à Djerba, il gagnait 350 dinars par mois. «Qu’est-ce que tu veux faire avec?», questionne le jeune homme, qui préfère évoquer ces touristes françaises, généralement plus âgées, qu’il a séduites. Parmi toutes ses conquêtes, seule Christine trouve grâce à ses yeux. Il s’est promis de lui rendre prochainement visite dans la région parisienne.

100 clandestins payant chacun 2000 dinars

En voyant tous ces jeunes fuir leur ville, plusieurs internautes, sur la page Facebook «Zarzis TV» qui a participé à la mobilisation contre le régime de Ben Ali, ont critiqué ces «traîtres» à la révolution de jasmin. «Ce sont plutôt des victimes», corrige Walid Fellah, responsable de ce site. Il fait observer que les nouveaux émigrés ne sont pas des étudiants, mais des jeunes sans formation, comme Bilal, qui ne veulent pas attendre l’instauration d’une Tunisie démocratique pour commencer à vivre.

Pour l’instant, le parfum de la liberté européenne est plus entêtant que les promesses de la révolution. À Zarzis, nombre de garçons entre 17 et 25 ans sont déjà partis. Mais il reste des candidats au départ à Tataouine, Medenine et Tunis, où les passeurs vont désormais démarcher leur clientèle. Si le trafic baisse demain, ce ne sera que par manque de bateaux !

L’Italie détruit toutes les embarcations transportant des clandestins. «Un pêcheur peut vendre son bateau 100000dinars à un passeur», explique Mohamed, qui gère quatre navires pour le compte d’un patron invisible. L’homme poursuit : «Un filet pour le thon, ça vaut 70000dinars. Le pêcheur retire tout ce qu’il y a sur son bateau. Il le déclare volé. Après, il peut s’en racheter un autre.» Le passeur aura, lui, entassé sur le chalutier plus de 100 clandestins ayant chacun payé 2 000 dinars. Sur les 100 000 dinars gagnés, il faudra payer le capitaine, les rabatteurs, les chauffeurs…

Dans la maison où Bilal a finalement atterri, ce dimanche soir vers 21 heures, ils sont plus d’une cinquantaine à attendre, comme lui, le signal du départ. Ils sont autant dans une maison attenante, près de la plage, derrière le club Sangho, où jadis étaient invités les hôtes du régime. Deux trentenaires originaires de Zarzis, mais vivant désormais en Europe, dirigent les opérations. Une femme ramasse l’argent. Elle donne à chaque jeune un ticket, où est inscrit son nom et son numéro de téléphone. Elle garde le double sur la souche de son carnet. Ce billet garantit d’être en partie remboursé si le passage vers Lampedusa échoue.

Autour de Bilal, ils sont peu à parler français. Nombre d’entre eux sont mineurs. Ils viennent de loin, de Tunis parfois. Ils fument quasiment tous du haschisch, pour tromper l’attente, se donner du courage. Certains montrent sur leurs épaules et leurs dos des impacts de balles, souvenirs de la révolution de jasmin. Bilal dit qu’il a déjà participé à deux voyages pour Lampedusa. Il y a un jeune de Tataouine qui, plusieurs fois renvoyé du sol européen, en est à sa sixième tentative !

Le signal du départ est finalement donné à 5 heures du matin. Par groupe de sept, ils sortent de la maison, montent dans des voitures jusqu’à la plage. Une dizaine d’hommes, certain munis de hachoirs à viande, surveillent les manœuvres. Des bateaux à moteur font l’aller et retour jusqu’au navire au large, qui donne par intermittence des coups de phares dans la nuit, au loin sur la mer.

Serrés flanc contre flanc, assourdis par le martèlement des pistons

A bord, les bonnes places sont rares. Le bateau a embarqué 112 candidats à l’exil. Plus de 120 passages avaient été vendus mais une dizaine ont été renvoyés à terre : le « chargement » était trop lourd. Bilal connaît les coins à éviter : la proue, où l’on reçoit des paquets de mer, et le bastingage, que la gîte peut rendre dangereux. En deux tentatives avortées, il a appris à se protéger. Il file vers la cale et s’installe à côté du moteur. «Ça pue le gasoil, il fait chaud et ça fait du bruit, dit-il. Mais tu es bien à l’abri.» Ils sont une douzaine, serrés flanc contre flanc, dans les entrailles du bateau, assourdis par le martèlement des pistons. Ils s’éclairent à la lampe de poche. Avec quelques fruits secs et une petite bouteille d’eau en plastique glissés dans sa veste de cuir noir, Bilal va tromper sa faim et sa soif.

Ce matin-là, la Méditerranée accorde sa clémence aux jeunes Tunisiens. Le coup de sirocco de la veille, qui avait gonflé les vagues du canal de Sicile et noyé 35 clandestins naufragés, s’est arrêté comme par miracle. Le bateau glisse doucement d’un creux à l’autre vers la terre promise de Lampedusa. Bilal est rassuré. D’autant que celui qui tient la barre a déjà effectué le voyage plusieurs fois – «un bon marin»-, juge Bilal. Sous un soleil au zénith, les heures s’écoulent. La traversée s’éternise. A bord, un diabétique commence à se sentir mal : il manque de sucre. A l’arrière du bateau, un autre clandestin s’agite. Celui-là souffre d’une maladie mentale. «Vous me voulez du mal, crie le gars. Vous êtes tous mes ennemis!» Son compagnon de voyage a le plus grand mal à le calmer. Il explique que la « pilule » qu’il prend chaque jour ne fait plus effet…

Vers 19 heures, un bourdonnement lointain sort tout le monde de la torpeur. Un hélicoptère des gardes-côtes italiens approche. Ça y est : les clandestins comprennent que le salut n’est plus très loin. L’équipage va signaler leur position à la capitainerie de Lampedusa, qui dépêchera une vedette à leur secours. A bord du bateau, l’ambiance se détend. On entend le bruit de canettes de bière décapsulées. Ils vont bientôt fouler le sol italien.

Quatre heures plus tard, la silhouette grise d’un navire de la guardia di finanza – les douanes italiennes – surgit de la pénombre. Le faisceau d’un puissant projecteur balaie le pont du bateau de pêche tunisien. Il jette une lumière crue sur les visages fatigués des clandestins. Sur le journal de bord de la vedette, l’embarcation bleue devient « numéro 4 », la quatrième barcasse chargée de Tunisiens répertoriée ce jour-là par les gabelous de Lampedusa – le chiffre montera à 22. Remorqué vers le port, le rafiot est conduit jusqu’au môle, où une bonne dizaine de bateaux de Zarzis sont déjà amarrés les uns contre les autres. Bientôt, ils finiront tous sur le terrain vague qui jouxte le stade de football local. Un véritable cimetière marin.

La traversée s’achève sur le quai, où les policiers font aligner les jeunes gens en colonne par deux pour les compter. Bilal remarque à peine la froideur professionnelle de l’accueil. «Les gens de la Croix-Rouge nous ont donné du café et des couvertures pour nous réchauffer. Et ils se sont occupés des malades.»

Le nombre de réfugiés dépasse la capacité d’accueil

Des cars franchissent ensuite le portail du port pour emmener les clandestins vers leur premier domicile italien : le centre de secours et d’accueil. Située dans un vallon au cœur de la petite île Pélage, la structure gérée par le ministère italien de l’Intérieur déborde déjà. Elle héberge plus de 1 500 immigrés clandestins pour 850 places. L’afflux de Tunisiens qui ont profité de la chute de Ben Ali pour filer a submergé cette structure conçue comme un lieu de transit. En plus des dortoirs, la direction a réquisitionné salles de réunion et salles communes pour y installer des matelas. Arrivés au milieu de la nuit, Bilal et ses compagnons s’affalent sur les bancs en ciment d’un préau. Le lendemain, il retrouve ses copains de Zarzis et s’ajoute à leur chambrée. Ils sont déjà… 130.

Accoudé au bar d’un café de Lampedusa, Bilal savoure ses premières heures en Europe. Rigolard, il a réussi à tromper la vigilance des carabiniers qui verrouillent les alentours du centre d’accueil pour gagner le village. «Les Italiens sont gentils, dit-il. Ils nous donnent des spaghettis et des cigarettes.» Grâce à une pratique très correcte de la langue, il est déjà à son aise sur le confetti le plus méridional d’Italie, même quand certains le regardent de travers. Optimiste en diable, il envisage une suite sans encombre à son voyage. «Dès qu’ils auront pris mes empreintes digitales, ils vont m’emmener sur le continent italien. Et après, la France.» Voilà des semaines qu’ils ont échafaudé le scénario entre copains, à Zarzis. «A la frontière avec la France, tu prends le petit train local. Mais seulement le samedi ou le dimanche, quand il y a moins de policiers. C’est sûr à 100%!» Et après ? «Après, je rejoindrai ma tante, qui vit dans l’Essonne. A Morangis!» Bilal donne même rendez-vous sous la tour Eiffel. «Pour une dernière photo.»

Source : « Le Figaro » Le 04-04-2011

Lotfi Messaoudi évoque les bonnes conditions de sa détention en Libye


 

Le journaliste tunisien Lotfi Messaoudi a, enfin, été libéré, dimanche 3 avril 2011, par les autorités libyennes. Il est arrivé, à une heure tardive de la nuit, au poste frontalier tuniso-libyen de Ras Jédir.

Selon le témoignage donné à son employeur « Al Jazeera », le journaliste tunisien libéré a confirmé qu’il a été humainement traité, ainsi que l’équipe qui l’accompagne. « A vrai dire, nous nous ne y attendions pas », a-t-il affirmé avant d’ajouter : « Dès notre arrestation et après le premier interrogatoire, les forces pro-Kadhafi nous ont affirmé que nous n’avons rien à nous reprocher et que nous n’avons aucune raison de nous inquiéter ».

En réponse à une question posée par le reporter d’Al Jazeera, Mohamed Al Bakali, concernant son moral après deux semaines de détention, Lotfi Messaoudi a répondu qu’ «ils ont, par moments, eu peur pour leur vie mais l’attitude des responsables de la prison nous a rassurés. Nous avons même entendu le directeur de la prison insister auprès des membres de son équipe qu’ils devaient nous respecter ».

Notre confrère n’a, toutefois, pas, caché qu’il a eu peur quand les responsables libyens l’ont convoqué tout seul. « J’ai eu peur suite à l’échec de la première opération de notre rapatriement mais on m’a confirmé, que je serai en sécurité. Suite à ce déplacement, j’ai pu rencontrer Ahmed Inoubli, secrétaire général de l’Union démocratique unioniste, qui m’a réconforté non sans m’avertir qu’il faudrait passer par des étapes avant d’être libéré ».

A rappeler que Lotfi Messaoudi, journaliste à la chaîne «Al-Jazeera» a été arrêté, le 19 mars, alors qu’il était en train d’accomplir son travail à l’Ouest de la Libye accompagné d’Ahmad Val Ould El-Dine (Mauritanie), Ammar Al-Hamdane (Norvège) et Kamal Ataloua (Grande-Bretagne) qui demeurent encore en détention chez les forces pro-Kadhafi.

Source: “Business News” Le 04-04-2011

Manager les ressources humaines en Tunisie post-révolutionnaire


 

Aujourd’hui le management des ressources humaines en Tunisie est devenu une activité à haut risque. Il s’agit de répondre aux légitimes aspirations des salariés, tout en évitant des dérapages sociaux nuisibles au positionnement des entreprises.

« Dégages ! » telle est la sentence qu’ont entendue certains dirigeants et DRH tunisiens après la fuite précipitée de Ben Ali. Brutalement, le népotisme ordinaire en entreprise s’est trouvé confronté à un besoin de compétences. Du jour au lendemain, les dirigeants compromis et défaillants sentent monter l’exigence d’un management professionnel. « Dégages ! » est devenu un mot d’ordre fréquent en entreprise, presque un mouvement politique qui revendique un changement profond dans la société et dans la gestion des entreprises. Sans ménagement, les dirigeants ou propriétaires incompétents sont raccompagnés fermement à la porte de l’entreprise et un membre du personnel respecté prend (provisoirement ?) la tête de l’entreprise. Pour les directeurs des ressources humaines, il y a urgence à agir :

• Il s’agit de recruter sur la base des compétences plutôt que sur celle des liens familiaux,

• Il s’agit de prendre en considération les avis des collaborateurs, de les traiter avec dignité,

• Il s’agit d’octroyer une juste rétribution et de faire face aux demandes des SMIGARDS et de tous les collaborateurs au risque de provoquer une délocalisation vers un pays à bas coût,

• Il s’agit enfin de mieux employer tous les jeunes qualifiés

Si Tunis concentre nombre de dirigeants et de décideurs, ce qui s’y passe n’est pas représentatif de toute la Tunisie. Mais il est possible de capter dans la ville quelques signaux d’avenir. Par exemple, le « forum des assoiffés »accueille à Tunis, à tour de rôle,  l’un des 50 partis nouvellement créé qui cherchent à exister sur la scène publique. Les débats sociétaux mettent l’accent sur des problèmes cruciaux tels que la laïcité, les déséquilibres de développement économique entre les régions côtières tournées vers l’Europe et l’export et les régions de l’intérieur plus agricoles et désertiques, les moyens humains de développer les entreprise et bien d’autres encore.

Autant de prise de parole, autant de DRH qui aspirent à passer d’un coup dans la modernité. Un peu à la façon dont un passionné de sport constitue l’équipe de foot nationale en plaçant le joueur idéal à la bonne place. La légende affirme de l’ancien président  Bourguiba qu’il apporta trois bienfaits à la Tunisie : l’eau, des droits élargis pour les femmes et l’éducation. Sur ce point avec prés de 380 000 jeunes tunisiens dans l’enseignement supérieur pour environ 10 000 000 d’habitants, la Tunisie n’a pas à rougir de la scolarisation de sa population dans l‘enseignement supérieur équivalente à celle de pays industrialisés. Aujourd’hui, les DRH sont tentés d’adopter les meilleures pratiques occidentales et savent, sans fausse pudeur, distinguer et dénoncer les compétences fumeuses de certains experts, consultants, formateurs internationaux affiliés à des agences mondiales.

De même, les deux millions de Tunisiens branchés sur facebook ne s’en laissent plus conter ils aspirent à plus de transparence et à la défense de leurs droits. Ils s’informent en réseau et « protègent » en s’informant mutuellement la révolution en train de se faire. Les DRH tunisiens sont mis à rude épreuve et doivent gérer le fonds des problèmes mis à jour et la façon de les traiter à marche accélérée. Gageons que l’énergie post-révolutionnaire les aidera et que l’espoir suscité par la révolte d’un jeune homme qui est devenu un symbole national, aidera chacun au moment des choix.

Au fait, ne parlez pas à des Tunisiens de la révolte de Jasmin. Ils récusent le terme, l’expression des journaux Européens est une invention romantique qui ne correspond en rien au chantier pratique qui traverse toute la société et interpelle le vivre ensemble.

Source : « Les Echos » Le 04-04-2011

Quels revenus pour quels dirigeants après la révolution tunisienne?


 

Les patrons sont-ils trop payés ? Cette question a été au centre de débats exacerbés depuis la réussite de la révolution tunisienne. Tout le monde semble avoir sa petite idée sur ces patrons gracieusement payés, y va de sa propre explication et élabore sa théorie particulière. Un chef d’entreprise bien connu de la place disait l’année dernière lors d’un workshop organisé par le CTGE que le sujet ne laissait personne indifférent. En effet, depuis toujours, l’argent est un sujet à la fois attrayant et tabou. Le sujet a toujours fasciné et les dirigeants ont presque tous été critiqués. Les gens ordinaires ne peuvent admettre que certains dirigeants soient si «bien payés» pour atteindre, pour quelque uns d’entre eux, des centaines de fois le SMIG. Les connaisseurs et autres personnes averties n’arrivent pas à expliquer le pourquoi des choses. Si pour les sociétés anonymes, c’est le conseil d’administration qui fixe le salaire du PDG et tous les autres avantages liés au poste, pour les SARL, le gérant est payé soit conformément aux statuts, soit par les différents actionnaires en assemblée générale. Le mode d’attribution des salaires et des avantages perçus par les dirigeants n’explique pas le pourquoi des choses. Sur quelles bases sont fixés les salaires ?  La dernière polémique en date, sur certains salaires jugés scandaleusement mirobolants, a secoué Tunisie Telecom et n’est pas passée inaperçue. Les conséquences ne se sont pas fait attendre : deux PDG «démissionnés», des cadres licenciés, des contrats annulés, des salaires revus à la baisse, et un climat social des plus détestables. La faute à qui ? Le syndicat et les employés toutes catégories confondues ont dénoncé les disparités salariales et les injustices dont sont victimes les employés de cette boîte et fustigent le top management, soupçonné de toutes les dérives et  de tous les maux. L’explication de la direction de l’entreprise, qui a tardé à communiquer (le 15/03/2011) a néanmoins le mérite d’avoir été claire et nette. Il s’agit bien de « contrats de travail exceptionnels » : – « Pour faire face à un environnement concurrentiel de plus en plus difficile, face à la non flexibilité du statut en vigueur pour pouvoir attirer des compétences tunisiennes aux conditions de marché de l’emploi Tunisie Telecom a été contrainte de recourir à des contrats à durée déterminée de 3 ans et ceci dans l’attente de trouver une solution définitive au sujet du statut du personnel. – Les cadres contractuels ont été sélectionnés exclusivement parmi les compétences tunisiennes, en Tunisie ou à l’étranger pour répondre à des objectifs de renforcement de fonctions clés spécifiques, principalement en marketing, commerce, systèmes d’information et finances. Ces compétences -débauchées d’entreprises nationales et internationales- ont été intégrées dans le respect strict des règles de gouvernance de la Société : le recrutement de l’ensemble de ces cadres s’est fait selon un processus d’évaluation au sein du comité d’intégration de l’entreprise et de validation définitive par le Conseil d’Administration. Les salaires alloués ont fait l’objet d’une étude de benchmark réalisée par un cabinet international spécialisé en ressources humaines ; les niveaux des salaires retenus sont en ligne avec ceux pratiqués par la concurrence et par le marché tunisien pour les cas d’espèce. Et contrairement à ce qui s’est dit dans certains médias, la moyenne des salaires de ces contractuels est autour de 3500 DT net/mois, et ils représentent moins de 3% de la masse salariale globale de l’entreprise, soit très loin des 37 millions de dinars et des 30% dont parlent certaines sources. » Fin de l’explication de Tunisie Télécom. Servira-t-elle à calmer l’ardeur des récalcitrants et autres opposants à la direction. Seul l’avenir nous le dira. L’exemple de TT est assez spécifique en raison notamment de son statut juridique et économique particuliers. Mais hélas, n’est pas isolé. Le débat sur la rémunération des dirigeants nous ramène inévitablement à poser le problème de la compétence des dirigeants. Dans la pensée collective un dirigeant exceptionnellement bien payé est un dirigeant qui possède certaines compétences particulières, rares et/ou spécifiques. Cette controverse a refait surface après la révolution tunisienne suite aux révélations sur le salaire de l’ancien PDG de la société ENNAKL qui percevait un salaire mensuel net de 130000 dinars, soit l’équivalent de 260 enseignants contractuels, de 120 assistants universitaires, de 85 assistants hospitalo-universitaires etc. Ce salaire a été perçu comme une véritable insulte au tunisien moyen, instruit et qui a passé de longues années sur le banc des écoles. Pourquoi un tel salaire ? Est-ce que ce PDG possède des compétences extraordinaires pour mériter de tels émoluments ? Quel(s) rôle(s) joue-t-il dans la gestion à proprement parler de son entreprise et dans l’élaboration des stratégies futures. Force est de constater que certaines entreprises n’ont pas besoin de «super dirigeant» ou de « dirigeants superstar » avec des compétences spécifiques et particulières exceptionnelles, elles ‘marchent toutes seules. L’environnement concurrentiel est assez faible et ses produits se vendent sans grands efforts. À la limite ces dirigeants n’ont ‘aucun mérite. Ce PDG mériterait d’être poursuivi pour abus de biens sociaux. En 2004, j’ai réalisé moi-même une enquête auprès des directeurs des établissements hôteliers tunisiens afin de déterminer leurs profils de direction et de compétences. Quelques questions avaient trait à leurs rémunérations. Après des efforts colossaux et beaucoup de refus et de réticence de la part de ces dirigeants, je suis parvenu à établir une grille de leurs salaires. Les salaires de ces dirigeants variaient de 700 dinars mensuels à 25000 dinars mensuels, avec des salaires mensuels moyens de 2000 dinars. L’écart est énorme ! Mais que le constat le plus important c’est que les salaires diminuaient avec l’âge, les performances, les compétences et les diplômes. C’était ahurissant. L’explication mérite un autre papier.  Cependant, les salaires ne sont que la partie émergente de l’Iceberg. Les avantages en nature (les primes, les bonifications, voitures, le carburant, le téléphone, les diners, les voyages, etc.) sont parfois aussi importants que les salaires perçus. Il y a aussi les indemnités d’arrivées et les indemnités de départs, les jetons de présence, etc. La polémique sur la rémunération des dirigeants est une controverse très ancienne et planétaire. Mais ce qui nous intéresse ce sont les dirigeants tunisiens. Les interrogations sont multiples : les dirigeants des entreprises tunisiennes méritent-ils les salaires qu’ils perçoivent ? Selon quels critères ces salaires sont-ils fixés ? Nos dirigeants ont-ils la même stature que les dirigeants des grands groupes internationaux ? Peut-on parler de « super dirigeants », de sauveur et de messie dans notre environnement? Si le dirigeant de PME est souvent à l’origine de la création de l’entreprise. Celle-ci porte même parfois son nom et l’implication dans le temps est souvent clairement marquée par la succession familiale. Ce n’est majoritairement pas le cas pour les très grandes entreprises où le dirigeant est le plus souvent étranger à la création de l’entreprise. De plus, il n’est pas rare de voir se succéder plusieurs dirigeants sur des périodes plus ou moins longues. Les dirigeants de PME pourraient se targuer d’une certaine légitimité salariale eu égard à tous les efforts qu’ils ont fournis pour créer et développer leur entreprise, ce qui n’est pas le cas pour les PDG de ces entreprises auxquelles ils sont étrangers. Le tunisien ordinaire peut admettre qu’un dirigeant se fasse rémunérer dans sa propre boite comme il le souhaite, mais ne peut comprendre qu’une entreprise à laquelle le dirigeant est étranger lui offre 50 fois ou 100 fois le salaire d’un cadre moyen surtout lorsque cette entreprise a bénéficié pendant des années de subventions publiques en tout genre.      Les salaires de la plupart des dirigeants des PME sont très loin de ceux de l’industrie pétrolière ou encore du secteur bancaire. Le salaire annuel brut moyen d’un dirigeant d’entreprise s’élève à 110 417 dinars selon une étude de Sigma Conseil en Février 2010. C’est bien peu de choses à côté des 1.000.000 dinars (1million de dinars) annuels de revenus de certains PDG dont celui de la société ENNAKL– hors bonus et jetons de présence. Mais derrière cette  moyenne, se cachent de grandes disparités, liées à la taille de l’entreprise mais aussi à son secteur d’activité. Sigma Conseil pense que ce manque de transparence et de limpidité dans l’explication de ses disparités au  niveau des salaires est lié au caractère familial du mode de gouvernance des entreprises tunisiennes et exclut tout « dérapage » ! Sigma Conseil constate que les écarts sont à la fois conséquents entre le secteur privé et public d’une part et entre les entreprises privées elles-mêmes. L’explication fournie par cette entreprise de sondage impute ces différences au nouveau cadre législatif jugé  assez précoce et hâtif, où le législateur s’est inspiré plus du cadre législatif européen. Cependant, Sigma Conseil trouve que ce cadre  est garant de plus de transparence et de contrôle que ce soient par l’AG ou/et par le Commissaire aux Comptes. Si telle est l’Explication, pourquoi alors une telle grogne ? Les salaires ne sont malheureusement pas indexés sur le niveau de la performance. Certaines entreprises qui ont réalisé des performances médiocres et en deçà des espérances des actionnaires ont vu leurs dirigeants  bénéficier d’augmentation de salaires contre toute logique. Il est vrai que la notion de performance est assez difficile à définir et à déterminer. Les composants de la performance de l’entreprise ne sont pas que financière, ils sont également sociaux, sociétaux, managériaux, et même citoyens. Limiter la performance aux seuls indicateurs financiers est injuste et  erroné. Les différents indicateurs de performance sont liés les uns aux autres, un climat social instable ne peut qu’engendrer une certaine vulnérabilité au niveau de la performance globale de l’entreprise. Le bien-être de l’entreprise ne peut être confiné aux chiffres de croissance, aux ratios d’endettement et de liquidité ou encore au bénéfice réalisé.       Le problème de la rémunération des dirigeants pose de nouveau le problème de la gouvernance d’entreprise et notamment les mécanismes de contrôle des dirigeants. Dans un environnement tunisien dominé par l’actionnariat familial, et où séparation des fonctions de propriété et de direction n’est pas encore à l’ordre du jour, le doute continuera à planer. Alors peut/doit-on encadrer la rémunération des dirigeants ? Est-il éthiquement ou moralement correct des salaires aussi élevés dans une Tunisie de l’après révolution ?

Emir BEN SALAH Chercheur en Sciences de Gestion. Membre du Centre Tunisien de Gouvernance d’Entreprise (CTGE)

Source: ”Leaders” Le 04-04-2011

Tunisie – La crise libyenne et les revendications sociales fragilisent l’économie


 

« Dégage ». Le mot d’ordre de la révolution tunisienne qui essaime partout dans le monde arabe ne s’est pas limité aux dirigeants du régime, il a touché également les responsables des entreprises. Alors que la croissance avoisinera le zéro en 2011, l’économie tunisienne est fortement secouée par la crise libyenne alors que les impatiences sociales s’amplifient.

La demande sociale est pressante en Tunisie mais les capacités de l’économie à les satisfaire sont limitées. D’autant que le modèle économique en vigueur jusqu’à la révolution se fondait sur une politique autoritaire qui comprimait les revendications. Ce verrou autoritaire, à défaut d’avoir disparu, est vacillant. Alors que les débats sur la transition politique se poursuivent, la multiplication des revendications sociales exerce une très forte pression sur les entreprises. Depuis la révolution, une autre Tunisie, plus vraie, apparait avec ses énormes disparités entre régions côtières et l’intérieur.  La fin de « l’ordre » de Ben Ali libère des revendications longtemps contenues mais que l’économie tunisienne ne peut satisfaire. D’autant que les difficultés économiques liées à la révolution sont fortement aggravées par la crise libyenne. Les perspectives sont encore assombries par l’apparente situation d’enlisement du conflit libyen. Les effets de la crise libyenne sont déjà vertigineux avec le retour de milliers de travailleurs tunisiens  (70.000, sur une communauté de plus de 100.000 personnes) qui viennent grossir le nombre des chômeurs. La Tunisie risque de se retrouver rapidement avec un chiffre déstabilisant de 700.000 chômeurs. Une centaine d’entreprises à l’activité dédiée au marché libyen ont fermé, des centaines d’autres ont été contraintes de réduire leur production. On estime le manque à gagner pour les entreprises à plus de 150 millions de dinars tunisien par mois. A cela s’ajoute le coup d’arrêt au commerce informel avec la Libye qui est à la base de l’économie des régions sud et qui pèserait autant que le commerce légal. Les échanges commerciaux entre la Tunisie et la Libye ont atteint 1,5 milliards de dinars tunisiens en 2010 (1 dinar = 0,52 euro).

L’impact libyen

La Libye est le premier partenaire maghrébin de la Tunisie, son cinquième partenaire au niveau mondial derrière la France, l’Italie, l’Allemagne et l’Espagne. Mais le pire est sans doute dans le secteur du tourisme. Près de 2 millions de libyens visitent chaque année la Tunisie que ce soit pour du tourisme classique ou pour du tourisme médical. Le secteur touristique, premier pourvoyeur de devises du pays, qui  représente 7% du PIB avec 400.000 emplois, a connu une chute de 45% durant les mois de janvier et février. Si la situation de crise persiste en Libye – et rien ne semble indiquer qu’il en sera autrement – le tourisme tunisien, qui a été déjà fortement impacté par les semaines agitées de la révolution, va en payer lourdement les frais. Ce tableau sombre, le ministre tunisien des finances, Jalloul Ayed, l’a synthétisé en parlant d’une croissance située entre 0 et 1% alors que le budget adopté à la fin 2010, sous le régime de Ben Ali, tablait sur une croissance de 5,4%. Dans ce climat morose, les patrons tunisiens en appellent à une trêve des revendications salariales et « autres » qui fragilisent les entreprises.

Des entreprises qui ferment

Les revendications salariales, les contestations des directions et les pressions pour l’embauche ne se comptent plus. Certaines entreprises en arrivent tout simplement à fermer les portes. Dernière en date, la Companie franco-tunisienne de pétrole (CFTP), installée dans la région de Bir Lytayim, (gouvernorat de Sfax), a décidé de fermer les portes en raison des sit-in observés par des habitants de la région qui réclament des emplois. Selon l’agence TAP, cette fermeture à été décidée par la « compagnie en coordination avec les services régionaux pour éviter les problèmes susceptibles de porter atteinte à l’intégrité des personnes et la sécurité de l’entreprise ». Quelques jours auparavant, British Gas Tunisia, a décidé d’arrêter ses activités jusqu’au rétablissement de la sécurité et à la garantie du libre accès à ses sites. BG Tunisia qui fait l’objet de pressions à l’embauche parle de « comportements menaçants et inacceptables qui sont contreproductifs pour tous, y compris pour le pays. ». Jal Group, entreprise européenne de chaussures de sécurité qui emploie plus de 4500 personnes a menacé de se retirer de Tunisie à la suite d’une intrusion musclée de syndicalistes et de travailleurs qui ont séquestrés le personnel de l’administration et le Directeur général. L’entreprise a décidé « suite à ces évènements d’extrême violence » de fermer ses sites de production et a estimé qu’il était « inadmissible d’accepter que des  négociations se fassent par la force et que leur soient imposés des choix stratégiques engageant le futur du groupe».

« De révolution et d’eau fraiche »

Les sites d’informations économiques tunisiens, très sensibles aux appréhensions des chefs d’entreprises, multiplient les exemples de patrons « dégagés » par les travailleurs et d’entreprises qui se retrouvent à l’arrêt. Certains de ces sites font de l’UGTT (Union générale des travailleurs tunisiens) leur cible privilégiée alors que le plus souvent le syndicat, qui n’a plus le monopole de la représentation syndicale, ne fait que suivre une contestation sociale trop longtemps étouffée sous le régime policier de Ben Ali. L’organisation patronale tunisienne qui évoque la perspective d’une croissance « en dessous de zéro » s’alarme et demande une trêve des revendications jusqu’à la fin 2011. Le Journal Le Temps exprime plus clairement cet appel à un retour à la réalité : « la situation risque de devenir dramatique ! Peut-on, en effet, vivre de Révolution et d’eau fraîche ? ».

Source: ”Maghreb Emergent” Le 04-04-2011

Tunisie-Libye : Le commerce se poursuit, cahin caha


Malgré l’instabilité ayant précédé et suivi la chute du régime de Ben Ali, le 14 janvier 2011, et celle que connaît la Libye depuis plus d’un mois, les échanges commerciaux entre les deux pays continuent, mais en deçà de leur volume habituel. Durant les deux premiers mois de l’année en cours, le commerce tuniso-libyen a atteint 120,4 millions de dinars, contre 321 millions de dinars pour la même période de l’année écoulée, soit une baisse de près de 60%. Mais ce sont surtout les importations tunisiennes en provenance de Libye (5,2 millions de dinars durant les deux premiers mois de 2011, contre 171,5 l’année dernière à la même période –soit une chute près de 95%) qui baissent. Les Tunisiens, eux, continuent à exporter (115,6 millions de dinars, contre 149,5 millions de dinars), principalement à destination de la zone frontalière et de l’Ouest libyen –mais certains ont réussi des expéditions à destination de Benghazi. C’est le cas notamment des Industries Alimentaires de Tunisie (IAT, groupe Mabrouk), 4ème plus gros exportateur en direction de la Libye, avec plus de 26 millions de dinars en 2008. Alors que les exportations tunisiennes sont fort diversifiées –dans le Top 10 des exportateurs tunisiens, on trouve Agrimed, Wafa Supply Company, IAT (agroalimentaire), le Groupe Chimique Tunisien (phosphate), les Ciments d’Oum El Kelil et la Société des Ciments de Gabès, Sancella SA et Société d’Articles Hygiéniques (articles d’hygiène), etc.-, celles de la Libye sont composées à près de 80% de pétrole et dérivés. Cette évolution du commerce tuniso-libyen contraste très fortement avec celle des dernières années. En effet, après avoir cru fortement et de manière parallèle entre 2003 et 2008, les exportations de chacun des deux pays vers l’autre ont connu un spectaculaire «découplage» à partir de 2009. Entre 2003 et 2008, les exportations de la Tunisie vers son voisin du sud ont plus que doublé, passant de 453,8 à 1065,2 millions de dinars. Dans le même temps, les importations ont presque triplé, évoluant de 460,5 à 1319,2 millions de dinars. En 2009, les importations libyennes en provenance de la Tunisie ont continué à croître (+10%, à 1121,2 MDT), alors que celles de la Tunisie ont fortement dégringolé à 754,4 MDT (-42%). Ce qui a fait passer le taux de couverture pour la Tunisie de 80,7% en 2008, à 148% en 2009, 258% l’année d’après et –si la tendance des deux premiers mois de 2011 se poursuit jusqu’à la fin de l’année- à 2.223%.

Alors que les exportations libyennes sont composées à près de 80% de pétrole et dérivés, celles de la Tunisie sont très diversifiées. Ce qui veut dire que si c’est l’Etat et les entreprises –publiques- du secteur des hydrocarbures en général qui sont concernés par les échanges avec la Tunisie, dans l’autre sens ce sont plus de 800 entreprises privées tunisiennes qui le sont. D’ailleurs, s’il est plutôt mineur en Libye, le problème posé par la forte baisse des échanges commerciaux tuniso-libyens est crucial pour les entreprises tunisiennes –et en particulier pour celles des secteurs réalisant une grande partie de leurs exportations en Libye.

C’est le cas notamment du secteur agricole-agroalimentaire dont les exportations en direction du marché libyen dépassent les 150 millions de dinars, soit près de 15% du total.

Mais si en Libye la baisse du commerce avec le voisin du nord affecte surtout le secteur public, pétrolier notamment, en Tunisie c’est un grand nombre d’entreprises –près d’un millier- petites et moyennes en particulier et toute la partie sud du pays qui risquent de pâtir le plus de la baisse des échanges avec le voisin du Sud.

Source: “wmc” Le 04-04-2011

Le « retour de Fredo », repentant, à Tunis


 

La première étape, venir en Tunisie, passer une nuit dans sa maison d’Hammamet, rencontrer des ministres, avait été franchie la veille. La seconde, affronter des journalistes tunisiens, s’annonçait plus délicate. Dimanche 3 avril, dans le salon d’un grand hôtel de Tunis, Frédéric Mitterrand a respiré un bon coup avant de se lancer, risquant en aparté cette boutade mi-figue mi-raisin : « le retour de Fredo, c’est bon ça, non ? »

En moins d’une heure, le ministre de la culture et de la communication se devait d’effacer les propos qu’il a tenus, quatre mois plus tôt, lorsque le 9 janvier, au beau milieu de la répression du soulèvement tunisien, il avait jugé « tout à fait exagéré » de qualifier le régime de Ben Ali de« dictature univoque ». Sa lettre d’excuses publiée après coup dans la presse n’avait rien changé à l’amertume déclenchée par les propos du responsable français auquel l’ancien président Ben Ali avait accordé la nationalité tunisienne. « Je sais que celui qui vous parle a suscité une déception forte, je le sais et j’en ai souffert », a commencé Frédéric Mitterrand avant de réclamer l’indulgence de son jury-auditoire. « Je n’ai jamais touché d’argent, a-t-il souligné, et cette nationalité tunisienne que je suis fier d’avoir, je l’ai pratiquée et il faut le prendre en compte. »

Mea culpa

Le ministre a déroulé son engagement et ses actions en faveur du cinéma et de la culture tunisienne, multipliant au passage les références devenues aujourd’hui incontournables. « Je connais Kasserine, Sidi Bouzid (villes du centre à l’origine de la révolution tunisienne), je connais même l’hôtel de Kasserine où je pense que pas un Français n’a dormi depuis vingt ans… »

Livrant ses impressions sur le pays qu’il n’avait pas revu depuis la chute de l’ancien régime, le ministre en a rajouté en insistant sur la différence avec « avant » : « J’ai visité le chantier du Musée du Bardo, le plus beau de la Méditerranée, et tout d’un coup on était détendus… C’était fantastique, nous n’avions pas à dire toutes lesdix minutes : « c’est un projet présidentiel ». Vous voyez bien de qui je veux parler… »

« Ce qui est en train de se passer dans ce pays est remarquable », a-t-il enchaîné. Venu avec quelques mesures d’aide au développement culturel dans sa mallette, Frédéric Mitterrand a également promis son soutien pour l’organisation d’une « grande fête musicale à Tunis dans un endroit emblématique, gratuite et diffusée en direct par une chaîne française », avant les élections pour une assemblée constituante prévues le 24 juillet.

Il en a tant et si bien fait pour crever l’abcès qu’il a franchi sans encombre l’épreuve des questions, au grand soulagement de l’ambassadeur de France, Boris Boillon, assis au premier rang. Pris lui-même dans la tourmente après des déclarations maladroites à son arrivée à Tunis, mi-janvier, le diplomate a dû également faire son mea culpa.

Source: “Le Monde.fr” Le 04-04-2011

Tunisie – A qui profite le climat d’insécurité ?


 

Même si, en ces temps de démocratie retrouvée, on évite de parler d’unanimité, il est utile de mentionner qu’une sorte de majorité s’est dégagée, ces derniers jours, quant à la considération de la sécurité comme étant la première parmi les nombreuses priorités auxquelles se trouve confrontée la Tunisie. A quelques exceptions près, tous les membres du gouvernement transitoire, et à leur tête le Premier ministre, Béji Caïd Essebsi, tous les partis politiques, toutes les composantes de la société civile, tous les médias, tous les citoyens s’accordent à dire que sans sécurité, le pays ne peut rien construire et que Révolution n’a jamais rimé avec anarchie. Même ceux qui fustigeaient la « fezzaâ » de la sécurité ont fini par reconnaître cette évidence. Le nouveau ministre de l’Intérieur, Béchir Essid, a affirmé, samedi 2 avril 2011 lors d’une réunion avec les cadres de la Garde nationale, que le « rétablissement de la sécurité fait partie des exigences prioritaires afin que le système économique et de développement reprenne son rythme régulier » tout en appelant à « rompre avec les pratiques du passé et à veiller au respect du citoyen, relevant la volonté du ministère d’appliquer la loi contre tout abus de pouvoir ou atteinte aux droits des citoyens ». Le porte-parole du gouvernement provisoire l’a mentionné, vendredi 1er avril 2011 à l’issue de la réunion du Conseil des ministres, que « la révolution ne signifie nullement l’anarchie », soulignant que les révolutions qui ont échoué à travers l’histoire ont eu un tel sort parce qu’elles étaient livrées à la surenchère et à l’anarchie qui aboutissent à l’effondrement des économies. Pour sa part, Jalloul Ayed, ministre des Finances, a tenu à préciser en ce même 1er avril lors de la présentation du programme économique et social à court terme, que la sécurité est une « donne essentielle pour tout développement de l’activité des individus et des sociétés ». Pour étayer ces dires, il n’y a qu’à voir les entreprises qui et la marche au ralenti d’autres entreprises ainsi que les services administratifs des départements ministériels et de plusieurs sociétés publiques et privées. L’exemple le plus frappant et inquiétant est celui de JAL à Menzel Bourguiba et de British Gas à Sfax, deux entreprises étrangères qui investissent gros en Tunisie et y font employer des milliers de cadres et travailleurs. Sans oublier les gouvernorats, les délégations et les municipalités qui peinent à retrouver leur rythme de croisière. Tout le monde ressent qu’il y a comme un maillon qui manque à la chaîne sécuritaire, mais personne n’arrive à identifier, avec certitude, les origines de cette situation. Les observateurs initiés estiment, d’abord, que le pays traîne, certes, le vide qui a accompagné le 14 janvier, mais ils restent convaincus que le passage de Farhat Rajhi à la tête du ministère de l’Intérieur s’est accompagné de quelques ratés. Il a beau être populaire et qualifié de « M.Propre », il y a des faits qui ne jouent pas en la faveur de l’ancien ministre de l’Intérieur.

Il y a d’abord eu cette affaire des « 2000 – 3000 policiers » qui, aux dires de M. Rajhi l’avaient attaqué et menacé au siège du ministère de l’Intérieur avant de « se diluer à travers le pays pour terroriser la population », toujours selon les propos du même ex-ministre. Cette « histoire », racontée sur les antennes de la télé, a été suivie par le limogeage et la mise à la retraite forcée de pas moins de 42 hauts cadres dudit ministère. Cette décision, prise sans donnes concrètes et sur de simples présomptions, a entraîné, d’après les connaisseurs, un vide subit dans un ministère aussi sensible, surtout qu’il s’agissait de compétences avérées et qui méritent – du moins pour ceux d’entre eux auxquels on n’a rien à reprocher – d’avoir une chance de reprendre du service. Les mêmes observateurs pensent, ensuite, que certaines parties politiques continuent à se comporter comme s’ils confondaient révolution avec anarchie : des manifestations et des rassemblements pour un oui ou un non, des revendications exagérées, parfois légitimes mais qui peuvent, voire doivent, être reportées, créant ainsi un climat propice au chaos et aux dérapages. En effet, en voulant tout et immédiatement, alors que le pays se trouve, par définition, dans une phase transitoire, ces revendicateurs semblent être inconscients et adeptes du « après moi le déluge ». Tout en reconnaissant l’attitude raisonnable et responsable de l’UGTT depuis l’avènement de Béji Caïd Essebsi à la tête du gouvernement provisoire, il n’en est pas de même pour certaines autres parties dont notamment l’attitude de certains mouvements extrémistes aussi bien islamistes que ceux de gauche. Les premiers s’illustrent par les manifestations qu’ils organisent sporadiquement. On citera, notamment, celle du vendredi 1er avril 2011 où ils étaient, effectivement, plus d’un millier comme nous l’avions indiqué (la photo de Firas Guefrech ci-dessus le prouve superbement) et non quelques centaines comme tenaient à nous démentir certains de nos lecteurs dans leurs commentaires. Ces manifestations ont été marquées par des slogans appelant à la violence et à la haine sans oublier le fait qu’ils constituent une menace et un obstacle pour la bonne marche des commerces dans des zones à haute densité démographique. Les seconds se distinguent par leurs passages et propos répétés et alarmistes. En effet, ils ne cessent de crier leurs craintes de voir les « forces réactionnaires » contourner la révolution et faire retourner le pays à la case d’avant le 14 janvier 2011. Or, on a l’impression que ces voix essaient de faire trop de bruit et aiment bien faire durer la période actuelle, allant jusqu’à réclamer le report des élections de l’Assemblée constituante pour le début de l’année 2012. C’est à croire que ces parties ont peur des urnes et qu’une sorte de chaos pourrait arranger leurs affaires. Les observateurs sont persuadés que ces parties savent qu’ils n’ont pas encore d’assise populaire et qu’ils risquent de « disparaître » du paysage politique après le prochain scrutin. D’où les tentatives de maintenir la pression et de faire retarder l’échéance des élections, ce qui ne peut qu’exacerber les tensions et accroître la pression. D’ailleurs, les analystes se demandent le pourquoi de cette tendance à faire accaparer les plateaux des différentes chaînes de télévisions par les représentants de ces petits partis dont la plupart se trouvaient à l’étranger avant le 14 janvier alors que ceux qui bataillaient à l’intérieur du pays sont, plus ou moins, laissés de côté. On citera, en particulier, parmi ces laissés pour compte, les représentants du PDP, du FDTL et d’Ettajdid qu’on voit et écoute très rarement. Il est bon de noter, toutefois, qu’on sent l’existence d’une certaine prise de conscience, de plus en plus généralisée, quant à la nécessité de se mobiliser pour un rétablissement, au plus vite, de la sécurité, une reprise rapide du cours normal de l’économie nationale et un respect de l’échéancier politique pour faire triompher, justement, les objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique.

Source: “Business News” Le 04-04-2011

Tunisie. Le dictateur est parti, les petites dictatures demeurent


 

Il y a pire que la contrainte qu’exerce un dictateur professionnel: les petites dictatures que l’on subit au quotidien au nom de la religion, de la morale ou autres.

Lorsque la Tunisie était sous le joug de la dictature, très peu nombreux furent ceux qui osaient critiquer la situation politique. On en était arrivé à un niveau de dégradation intellectuelle où l’on était convaincu que l’état des choses était moins douloureux qu’une révolte qui détruirait tout sur son passage. La situation actuelle prouve que c’est faux. Ceci n’empêche pas qu’à l’époque, les opposants étaient marginalisés par la société. La parole qui s’opposait, qui disait non à l’ordre établi, était bannie. Il y avait, à l’origine de cette conception utilitaire et lâche, des dogmes qui prenaient vie dans les esprits en sclérosant toute tentative d’opposition.

L’impossible combat de l’opposant Le lavage de cerveau musclé qui s’est étendu à toutes les couches de la population en était arrivé à la marginalisation des opposants, c’est-à-dire à une violence exercée à l’encontre de tout effort critique. Si quelqu’un était taxé d’«opposant», mot très péjoratif et lourd de sens, tous son entourage (famille et amis) considérait son comportement comme une folie de jeunesse, dangereuse parce que ses conséquences pouvaient conduire au désastre. Une pression quotidienne insoutenable était exercée sur ledit «opposant» de la part de la police non seulement d’Etat mais aussi de l’autre police: celle qui l’exclut en refusant ses idées pourtant salutaires, celle qui l’agresse implicitement parce qu’elle pense que le fait de rentrer dans l’ordre serait plus raisonnable, celle qui lui fait comprendre que cette vie d’opposant ne le conduira à rien : pas de mariage, pas de famille, pas de futur. Il y avait comme une part d’immoralité chez les opposants. Par leur attitude hors la loi, ils mettaient en péril leur entourage et tout l’équilibre social. Si je me promenais aujourd’hui dans les rues d’une ville tunisienne, je me dirais qu’il y a encore des dogmes que les Tunisiens devraient détruire tout comme ils l’ont fait avec ceux de la dictature politique. Exemple simple: imaginons qu’un couple s’embrasse en pleine rue ou dans le métro, ce sera sans aucun doute le scandale. Le couple sera voué aux moqueries les plus véhémentes simplement parce qu’il a osé reproduire en public une expression intime. On agressera la fille surtout, en la traitant de prostituée ou de femme légère. Les motifs de cette agression sont complexes: d’abord une conviction profonde que le fait de s’embrasser en public est mal. Ensuite une frustration sexuelle qui conduit à vouloir se raccrocher d’une façon ou d’une autre à ces corps, de ne pas les lâcher parce qu’ils fascinent, d’insister ultérieurement auprès de la fille parce qu’elle dégage les signes d’une «proie facile». La conviction du mal et la frustration agissent réciproquement en cercle vicieux. Les moqueries étant pour moi aussi violentes et liberticides que la répression policière de Ben Ali, je pense qu’il faut oser une comparaison en employant le fameux «il faut» pour mieux faire comprendre l’urgence de la chose.

Le Ben Ali qui sommeille au fond de chacun L’étape nécessaire à suivre est que le peuple tunisien réalise l’impact catastrophique de sa propre violence comme il l’a fait avec la dictature. Il faudrait que chaque individu fasse un travail sur sa propre tyrannie comme il l’a fait avec celle de Ben Ali. Il faudrait que les gens puissent prendre conscience de la dangerosité policière que produisent certains dogmes religieux et culturels. Ces dogmes qui permettent d’interdire parce qu’il en est ainsi, sans aucune réflexion sur leurs origines philosophiques et historiques ni sur leur portée. Il faut que le Tunisien se remette en question pour faire déchoir le président qui sommeille en lui: un Ben Ali démultiplié, sournois, hypocrite et affreusement hostile à tout changement de mœurs. Avant de se délecter de la révolution, il faudra tuer l’affreux esprit puritain qui le tiraille. Des mécanismes répressifs identiques aux mécanismes politiques sont présents dans le dogme religieux: des idées préconçues qu’on applique au monde parce qu’il ne peut pas en être ainsi. Et s’il pouvait en être autrement, ce serait intolérable, insensé et déshonorant. Toutes les transgressions ayant un rapport de près ou de loin avec le sexe seront aujourd’hui sujettes à des répressions minuscules mais multipliées et répétées. C’est-à-dire qu’on n’en arrivera pas à lapider une femme comme on fait en Arabie saoudite mais à lui faire comprendre directement ou subrepticement que ce qu’elle fait n’est pas acceptable.

Hymne à la dictature au nom de la religion Sur un point de vue médiatique, pensons à la fameuse chanson de Psycho M dans laquelle nous pouvons trouver un hymne à la dictature au nom de la religion. Dans un élan rétrograde se faisant passer pour le sommet de la révolte intellectuelle par le genre rap, un chanteur viril punit des femmes qui se sont trop émancipées. C’est une néo-lapidation qui s’opère là par un soi disant art. Ce clip, apothéose de la dégradation intellectuelle pré-révolution, associe le sionisme à la liberté de la femme pour convaincre les gens qu’il faut haïr la femme «arrogante» comme on hait les sionistes. Cette femme qui s’habille légèrement en public, qui dit des gros mots et qui réfléchit sur la religion, il faut selon ce clip mettre fin à sa liberté comme à celle d’Israël. Le succès populaire de cette chanson sur internet a provoqué des agressions de toutes sortes notamment à l’encontre de Saoussen Maâlej qui a reçu des coups de téléphone menaçants. Cette méthode, parmi tant d’autres, n’a rien à envier aux méthodes policières car son principe consiste à inciter une collectivité à harceler quelqu’un jusqu’à ce qu’il se repent. A partir du repentir éventuel, d’autres apprendront à éviter les problèmes et à marcher dans le droit chemin. Lorsque les Tunisiens prendront conscience de l’absurdité de certains reflexes qui continuent de pourrir la société autant que l’ont fait hier les Trabelsi, lorsqu’ils sauront qu’il y a une égalité totale entre la dictature politique et les dictatures minuscules portées en chacun au nom de la religion, la révolution sera radicale. Que ceux qui trouvent ces paroles scandaleuses pensent qu’un discours critique envers Ben Ali avant le 14 janvier aurait provoqué la même réaction, qu’elle soit sincère ou non.

Source : « Kapitalis » Le 04-04-2011

Contrairement aux rumeurs, aucune société de la famille Ben Ali n’est suspendue en bourse


 

La Bourse de Tunis a démenti, lundi, avoir suspendu la cotation de sociétés qui appartenaient au président déchu et à sa famille, contrairement aux informations publiées, à ce sujet, par des médias tunisiens et étrangers.

Raouf Boudabbous, responsable de la communication à la Bourse de Tunis a déclaré à la TAP, qu’il s’agit plutôt « d’un gel, en vertu de décisions juridiques, des participations des membres de la famille du président déchu et de leurs associés au capital de sociétés cotées en Bourse, sans pour autant, bloquer les transactions boursières de ces dernières ».

La liste des entreprises comporte, essentiellement, Ennakl Automobile, Carthage Cement, Assurances Salim, la Banque de Tunisie (BT) et Monoprix. Elle comprend également la société « Investec » qui appartient au gendre du président déchu et qui détient une part du capital de la société des services de téléphonie mobile « Orange Tunisie ».

Le Conseil du Marché Financier (CMF) avait publié, fin février 2011, une liste de 123 entreprises soupçonnées d’être impliquées dans des transactions au profit du président déchu et de sa famille.

La liste comporte des entreprises privées tunisiennes et étrangères, des fonds d’investissement et des personnes physiques qui avaient fait, avant le 14 janvier 2011, des interventions à la Bourse de Tunis, pour acheter ou vendre des actions au profit du président Ben Ali, des membres de sa famille et de leurs associés.

(…)

Le président du CMF a refusé d’annoncer la liste, relevant qu’elle est « secrète » et que l’opération consiste à « ne pas permettre à ces entreprises d’investir ou de retirer de l’argent de leurs comptes d’exploitation ».

« Shuaa Capital », banque d’investissement basée à Dubaï, qui figure sur la liste, a nié, sur l’antenne d’une chaîne de télévision arabe, avoir des relations avec les entreprises liées aux familles du président déchu, tandis que des sources autorisés, en Tunisie, ont affirmé que cette banque a été inscrite sur la liste par mesure de précaution jusqu’à la fin des enquêtes sur cette question.

«La décision du juge d’instruction, qui détient toutes les prérogatives concernant le gel des avoirs de Ben Ali et de sa famille, de fixer cette liste en mesure de précaution, est de nature à couper court à toute tentative de la part de ces personnes, de gérer leur argent» a affirmé M. Bahri Bahrini, avocat.

M. Bahrini a rappelé, à ce sujet, le décret daté du 14 mars 2011, en vertu duquel, les avoirs mobiliers et immobiliers et les droits acquis après le 7 novembre 1987, du président déchu et de son épouse ont été restitués au profit de l’Etat tunisien, outre ceux de 112 personnes liées au président Ben Ali et à Leila Trabelsi.

En dépit de leur importance, les mesures décidées à ce sujet « ne permettent pas de suivre, et d’une façon très précise, les biens de ces personnes à l’étranger », a ajouté l’avocat.

« Leurs avoirs, qui peuvent être détenus par des sociétés d’investissement, des fonds de placement ou autres, ne peuvent pas être délimités » a-t-il réitéré.

Source: “Business News” Le 04-04-2011

Tunisia : Renationalisations continue


 

As part of Tunisia’s efforts to rectify the massive corruption of the Ben Ali era, 51% of Orange Tunisie has been renationalised and over a hundred firms have been banned from trading on the exchange. On Thursday 31 March Tunisia’s government announced that in terms of an official decree that authorised it to seize assets belonging to ex-President Zine El-Abidine Ben Ali’s family and about 100 connected persons, it was nationalising the 51% of Orange Tunisie that had belonged to one of Ben Ali’s sons-in-law, Marwan Ben Mabrouk. France Telecom owns the other 49% of the company. The government is working closely with Orange’s management to make sure the company keeps operating as before. It has also become public that the country’s securities regulator, the Conseil des Marchés Financiers (CMF), had sent a letter to brokers listing a number of companies for which brokers were forbidden to trade on the market. The companies were also forbidden to withdraw cash from their trading accounts. Among the 123 companies on the list are Ben Mabrouk’s Investec vehicle (not to be confused with the South African bank), the Princesse Holding group of Ben Ali’s other son-in-law Sakher el Materi, and BINA Corporation, which belonged to Ben Ali’s wife’s brother Belhassan Trabelsi. It is likely that all these companies’ stakes in Tunisian firms, listed and unlisted, will be nationalised in the same way as Ben Mabrouk’s share in Orange. This will have a potentially positive impact on the stock exchange: at a time when the Tunisian government is facing wage and other social demands, re-privatising some of the stakes would give it a welcome income boost.

Source: “Les Afriques” Le 04-04-2011

Cyber-activists lend savvy to N African revolutions


 

As hundreds of thousands of Egyptians in Cairo’s Tahrir Square celebrated the resignation of President Hosni Mubarak on 11 February, some held up mobile phones to snap photos of the crowd, others sent Twitter messages to their friends and a few wielded signs proclaiming, « Thank you, Facebook. »

Technology did not cause this upheaval, which fed on widespread and long-festering political and social grievances. But young activists in Egypt, as in nearby Tunisia and elsewhere in the region, were able to use their access to new social media tools to publicize demands, call demonstrations and win support from broader sectors of the population. “Without the social networks, we would not have been able to converge on Tahrir Square” on 25 January, the first day of the Egyptian protests, Jiji Ibrahim, a university student, told the French daily Le Monde. “Twitter and Facebook let us show people the size of the demonstrations, a size that encouraged many others to join in.” The success of the popular movements in toppling the autocratic governments of Egypt and Tunisia encouraged young activists across North Africa and the Middle East. In Algeria, Jordan, Libya, Yemen, Sudan, Iran, Bahrain, Morocco and elsewhere they called marches and rallies, using both online media and more traditional forms of communication. The turnouts varied, and so did government responses, which ranged from promises of reform to brutal crackdowns, as in Libya. The protests in Egypt and Tunisia in particular were shaped by two factors: the growing availability of mobile phone and Internet-based technologies, and several years of painstaking work by young activists adept at using those tools. In both countries, labour strikes erupted in 2008. Students and other youths wrote blogs, set up Facebook pages and generally sought to drum up support for the strikes. Gradually, these online organizers took up other issues — especially human rights abuses — and formed a variety of groups. They shared tips and experiences across their borders. In December 2010 a young but jobless university graduate in a small Tunisian town set himself on fire. His desperate act quickly set off street protests. Videos of the actions were shared across the Internet and were broadcast by the satellite TV network Al-Jazeera. The protests grew ever larger, until they forced President Zine el-Abidine Ben Ali to flee the country on 14 January. Inspired, Egyptian activists called protests against their own government on 25 January. They put out the word on the Internet, but also began their marches through poor neighbourhoods of Cairo, drawing in thousands. As images and texts spread online, the protests mushroomed across the country. They continued even when the authorities shut down the Internet for five days. “I liked to call this the Facebook revolution,” Wael Ghonim, a young marketing executive for Google who had played a key role in initiating the protests, told the huge crowd in Tahrir Square. “But after seeing the people here, I would now say that this is the revolution of the Egyptian people.” Mr. Ghonim and his colleagues insist they played only small parts in a drama unfolding on a grand scale. But those roles proved pivotal. They showed that young people armed with little more than laptops and mobile phones can help amplify popular voices for freedom and justice.

Source: “Africa News” Le 04-04-2011

Des Libyens arrivés en Tunisie racontent l' »enfer de Misrata »


 

Les forces kadhafistes ont déployé leurs chars dans les rues de Misrata, jonchées de cadavres, où les hôpitaux ne peuvent plus faire face à l’afflux de blessés, a-t-on appris lundi auprès de rescapés arrivés en Tunisie qui comparent la ville de l’Ouest libyen à un « enfer ».

Sur le front diplomatique, un émissaire a été dépêché par le colonel Mouammar Kadhafi à Athènes pour tenter de montrer que le régime de Tripoli est ouvert à une issue politique afin de mettre un terme au conflit armé qui s’enlise.

Misrata, troisième ville du pays située à 250 km à l’est de Tripoli et seule agglomération de l’Ouest aux mains des insurgés, subit les pilonnages des forces loyalistes.

« Le pilonnage a débuté aux petites heures de la matinée et se poursuit à l’aide d’obus de mortier et de pièces d’artillerie. Les bombardements visent les quartiers résidentiels », a déclaré à Reuters un porte-parole rebelle prénommé Gemal joint au téléphone.

Des rescapés arrivés dans le port de Sfax, dans le sud-est de la Tunisie, témoignent de la violence des combats.

« Il faut aller à Misrata pour se rendre compte du massacre orchestré par Kadhafi », assure Omar Boubaker, un ingénieur de 40 ans touché par balle à la jambe. « Il y a des cadavres dans les rues (…). Il n’y a plus de place à l’hôpital et les médecins soignent les blessés dans les rues.

Les frappes aériennes de la coalition ont visé les forces loyalistes dans la ville mais elles n’ont pas permis de mettre un terme aux attaques des unités de Kadhafi qui tirent au mortier et à l’artillerie sur les maisons et ont posté, selon des habitants, des tireurs embusqués sur les toits.

L’ITALIE RECONNAÎT LE CNT

Le vice-ministre libyen des Affaires étrangères Abdelati Obeïdi, dépêché en Grèce, a tenté de montrer que Tripoli ne bloquait pas la voie diplomatique. « L’émissaire libyen voulait transmettre le message que la Libye a l’intention de négocier », a dit un responsable grec après la visite d’Obeïdi à Athènes.

Le diplomate libyen, qui doit se rendre mardi à Malte, est arrivé à Ankara lundi après-midi. »Nous allons discuter et voir s’il existe une base commune pour un cessez-le-feu », a dit un responsable du ministère turc des Affaires étrangères.

Toujours sur le front diplomatique, l’Italie a désigné le Conseil national de transition (CNT) formé par les insurgés libyens à Benghazi comme le « seul interlocuteur légitime » de la communauté internationale.

Franco Frattini, ministre italien des Affaires étrangères, n’a en revanche pas jugé « crédibles » les propositions formulées par l’émissaire pour un arrêt des combats.

Le chef de la diplomatie italienne, qui a jugé inacceptable une éventuelle partition de la Libye, a promis que Rome armerait les insurgés si ces derniers en avaient besoin pour se défendre, et notamment pour protéger les populations civiles.

Sur le front oriental, ni les forces gouvernementales ni les rebelles ne parviennent à prendre le dessus, malgré les raids aériens de la coalition internationale engagée militairement en Libye depuis le 19 mars sous mandat des Nations unies.

Après plusieurs retournements de situation sur la route côtière, les deux camps se font face à Brega, important terminal pétrolier du golfe de Syrte. Lundi, les rebelles sont néanmoins parvenus à faire reculer légèrement l’armée loyaliste vers l’ouest mais ils continuaient d’essuyer des bombardements.

Avec Alexander Dziadosz à Brega, Angus MacSwan à Benghazi, Tarek Aamara à Sfax, ainsi que les rédactions du Caire, Alger, Athènes et Ankara, Jean-Philippe Lefief et Benjamin Massot pour le service français, édité par Gilles Trequesser

Source: “Le Point” Le 04-04-2011

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