Kamel Jendoubi interdit de séjour au Maghreb
Les autorités marocaines viennent de refouler M. Kamel Jendoubi, président du Réseau euroméditerranéen des droits de l’Homme sans aucun motif officiel. Militant tunisien des droits de l’homme de longue date, Kamel Jendoubi, ancien réfugié politique en France est déjà interdit de séjour dans son pays natal. Tout laisse croire que le gouvernement marocain a répondu à des injonctions du régime tunisien pour interdire l’entrée au Maroc de Kamel Jendoubi. La LADDH exprime son indignation face à une mesure injustifiée et injustifiable qui démontre les liens policiers qui existent entre les gouvernements du Maghreb au mépris des droits les plus fondamentaux. Elle estime que Kamel Jendoubi a droit à des excuses de la part des autorités marocaines qui doivent revenir sur cette mesure arbitraire. – Elle exprime sa totale solidarité avec Kamel JENDOUBI, le REMDH et le CRLDHT et appelle la Coordination Maghrébine des Organisations des Droits Humains à réagir vigoureusement, tout en étant disposée à œuvrer avec l’ensemble des composantes du mouvement des droits humains au Maroc et ailleurs pour dénoncer le refoulement de JENDOUBI et défendre les libertés et les droits humains au Maroc dont le respect connait une véritable régression. La LADDH considère que le refoulement de JENDOUBI est également une mesure répressive contre les défenseurs tunisiens des droits humains et exprime sa totale solidarité avec l’ensemble des démocrates tunisiens dans leur combat contre la dictature et pour le respect des droits humains en Tunisie. La LADDH rappelle à cette occasion que les ONG internationales des droits de l’homme sont interdites d’entrée en Algérie depuis de nombreuses années ainsi que d’honorables militants tunisiens des droits de l’homme, Sihem Bensedrine et Khemaïs Chemari,qui ont été refoulés à leur entrée en Algérie. Le autoritaire hostile aux droits de l’homme La LADDH interpelle l’opinion nationale et internationale sur cette situation qui devient insupportable pour le citoyen maghrébin. Le Comité Directeur de la LADDH 3 octobre 2010
Jendoubi : le militant des droits de l’Homme refoulé du Maroc
De Kebili à Mornaguia (seconde partie)
Par Moudhafer Labidi, vendredi 14 mai 2010 Nous étions quinze prisonniers dans la fourgonnette et nous avions beaucoup de bagages. Nous étions entassés comme une marchandise périmée dont le propriétaire voudrait se débarrasser. Le temps s’écoulait avec lenteur. Nous transpirions. Des prisonniers discutaient. Chacun pensait à ce qui l’attendait, se demandait dans quelle prison il allait être transféré. Je laissais aller mon imagination et je me remémorais les jours où nous nous réunissions au local de l’Union locale de Redeyef. Chaque dimanche, nous sortions en grand nombre et nous parcourions les rues de la ville en scandant nos slogans habituels « Travail, liberté, dignité nationale », « Nous ne mourrons pas, mais nous extirperons la répression de notre terre » « Fermeté, fermeté contre l’ordre des mafias » « Citoyen, victime, sors, parle de l’affaire ». Soudain, la fourgonnette stoppe, le moteur se tait et la porte s’ouvre. Les cris des brutaux agents s’élèvent. « Descends, descends, c’est la prison de Gabès » dit l’un des prisonniers. Nous avons été triés dans le hangar. Des prisonniers ont pris leurs bagages et j’attendais mon tour mais j’ai été reconduit à la maudite fourgonnette. De nouveaux prisonniers sont arrivés et sont montés dans la fourgonnette. Quelques minutes plus tard, les portes se sont refermées. Le moteur de la maudite fourgonnette a vrombi de nouveau. Les nouveaux venus me demandent où on les emmène, je leur réponds que je l’ignore puis une longue conversation s’amorce à propos de mon affaire. C’est que nous étions connus et ils m’ont exprimé leur sympathie au vu de ce que nous avions enduré, de la part des tortionnaires, dans et hors la prison. Cette fois-ci, le trajet était long. Tous se sont tus. Mon esprit vagabondait dans les montagnes de Redeyef où nous nous étions mis à l’abri des escouades de la police qui nous avaient contraints à quitter la ville en faisant intrusion dans nos domiciles et en kidnappant ceux qui restaient dans les zones civilisées, pour finir par tirer à balles réelles sur des milliers de manifestants. Nous allions à tour de rôle chercher de l’eau et de la nourriture, risquant à tout moment d’être embarqués. La « maudite » a stoppé une seconde fois, et une seconde fois le moteur s’est tu et la porte s’est ouverte. Oui, j’étais déjà passé par là, à Haouareb, la prison de Kairouan, J’ai descendu mes affaires et j’ai attendu. Est-ce que je devrai rentrer dans cette prison ? Un gardien a appelé mon nom, je me suis approché mais il m’a indiqué du doigt la « maudite », pardon, une autre fourgonnette qui m’emmènerait dans une autre prison et je n’avais qu’à obtempérer. Je me suis assis, toujours menotté. La maudite fourgonnette a redémarré. Une autre fourgonnette, une autre prison, d’autres prisonniers mais je me demandais bien où cette fois-ci ? De façon obsessionnelle, je me replongeais dans mes souvenirs pas si lointains, mais de beaux souvenirs, qui ne reviendront pas malheureusement. Le jour où le camarade Adnane a vu son activité syndicale gelée. Nous avons alors annoncé à la maison des syndicats que la ville rentrerait en grève générale pour la levée de ce gel et la satisfaction de nos revendications de développement, de distribution juste des richesses, de travail et de dignité… Les forces de police mobilisées étaient telles qu’on imaginait que tout Redeyef serait bombardé. La maudite s’arrête et la porte s’ouvre. Je descends et me retrouve à la prison de Borj El Amri. Etais-je arrivé ? Un prisonnier a pris ses affaires puis nous sommes revenus à la fourgonnette qui a redémarré avec nous à l’intérieur. Cette fois-ci je n’en pouvais plus d’attendre. Ma patience était à bout, depuis cinq heures du matin je voyageais sans savoir pour quelle destination. Mais je n’ai pas eu le temps de me replonger dans mes réflexions. Le moteur s’est arrêté et la porte s’est ouverte. L’agent nous a informés que nous étions arrivés, cette fois-ci à la prison de Mornaguia. Je faillis m’envoler, de joie car j’allai voir mon père et ma mère n’aurait pas à subir la fatigue du trajet.
La population de la région de Ben Guerdane, frontalière de la Libye, a manifesté le 9 août dernier pour protester contre la fermeture brutale du poste frontière de Ras Jdir. Les affrontements ont repris le 15 août et ont duré toute la semaine. Région enclavée entre la mer et le désert, privée d’infrastructures économiques, c’est vers le commerce ou l’émigration que se tournent ses habitants. Chaleur et ramadan obligent, c’est la nuit que les manifestants ont protesté contre une mesure les privant de leur unique source de revenu, le commerce transfrontalier. La réponse des autorités ne s’est pas faite attendre : déploiement de forces de police amenées en renfort d’autres régions du pays, réquisition de bâtiments et de transports publics, brutalités inouïes, arrestations massives, torture et incarcérations de centaines de personnes.
Le mouvement de Ben Guerdane n’est que la dernière en date des manifestations de populations laissées pour compte : en effet, l’année 2010 a vu, dans la foulée du soulèvement du bassin minier de 2008, celui des chômeurs et de la population de la Skhira. Pour autant le mouvement de Ben Guerdane se distingue des précédents par la nature sociale des manifestants, pour l’essentiel des commerçants, ou des employés de petits commerces, ou des jeunes n’ayant pour unique perspective que de rejoindre les premiers, dans un secteur largement informel, et par l’objectif à court terme de la mobilisation, l’ouverture de la frontière. Tertio, les manifestants ont gagné, le pouvoir a cédé ! La frontière a été ré-ouverte au passage des marchandises et des centaines de détenus ont été libérés.
Si la raison de la fermeture est restée opaque,-probablement due au préjudice que l’importation de Libye de marchandises à des prix défiant toute concurrence faisait subir à des commerçants proches du pouvoir,-c’est sans explication, mais au lendemain du voyage à Tripoli de responsables tunisiens qu’elle a été ré-ouverte. Le parti au pouvoir, actuellement en campagne pour que la Constitution tunisienne soit amendée pour permettre à l’actuel président de briguer un sixième mandat, a tenté de récupérer à son profit les manifestations de joie et de victoire qui ont éclaté aussi spontanément que les celles, de protestation, des jours précédents.
Néanmoins la taxe exorbitante sur l’entrée en Libye de 150 dinars tunisiens que les autorités avaient promis de supprimer a été maintenue, et a créé des différenciations, seule une minorité de commerçants pouvant s’en acquitter. Enfin dans une volonté de clore le dossier, « toutes les personnes incarcérées ont été finalement libérées, sans charges »[1], selon Houssine Bettaieb, un syndicaliste de l’union locale de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) de Ben Guerdane.
Largement spontané, ce mouvement est à mettre à l’actif de la jeunesse de Ben Guerdane,-de nombreux mineurs ont été incarcérés-un mouvement conjugué au masculin. Quant aux femmes, « elles ont été aux premières loges », selon Houssine Bettaieb, « de la résistance lors des descentes de police dans les domiciles et les quartiers et ont alors pris leur part de la violence policière ». Une population isolée ? Les manifestations de Ben Guerdane, nocturnes, n’ont pas été filmées ni enregistrées et n’ont bénéficié que d’une faible couverture médiatique. Des plaintes ont été déposées par des victimes de tortures, et les commerçants, dont les locaux ont été saccagés par la police, ont fait également appel à un huissier notaire pour obtenir réparation des préjudices subis.
La seule manifestation diurne, le 17 août, devant la délégation de Ben Guerdane, un rassemblement des familles des personnes arrêtées, a vu la participation de diplômés chômeurs. Ils réclamaient la vérité sur les arrestations et la libération des leurs.
C’est du côté syndical qu’est venu le soutien, de la Fédération de l’enseignement secondaire de l’UGTT, d’une part, et au plan local, s’ils n’ont pas participé aux manifestations, des syndicalistes de l’UGTT ont constitué un « comité de suivi des événements de Ben Guerdane ». Houssine Bettaieb décrit le rôle de la centrale syndicale qui « a suivi au plus au niveau, jour après jour, les événements, le Bureau Exécutif ayant mandaté une délégation de trois personnes pour rencontrer le gouverneur de Médenine et se rendre à Ben Guerdane le 20 août s’entretenir avec la population et évaluer les dégâts matériels ». Un rôle de médiation pour l’UGTT ? Houssine Bettaïeb récuse le terme :« Nous n’avons pas joué les médiateurs, nous sommes partie au conflit, la centrale syndicale étudie et propose des solutions pour le développement de la région ». A la question de savoir pourquoi le pouvoir a cédé, il n’a aucun doute « il ne voulait pas de Rédeyef bis ! », mais, tient-il a préciser « il n’y a pas eu d’Intifadha à Ben Guerdane, c’étaient des mouvements de protestations nocturnes, dans certaines localités seulement, la journée, la vie reprenait son cours normal ».
Quel que soit le terme que l’histoire retiendra, «Ben Guerdane » vient confirmer après Redeyef, Fériana ou la Skhira, que l’ère de la peur est bel et bien révolue. A Ben Guerdane, la première victoire remportée laisse irrésolus le problème de fonds de l’emploi. La population ne se satisfait pas de cette situation, ce qu’elle a exprimé par une pétition réclamant notamment « le développement du secteur de l’agriculture et de la pêche maritime, le lancement de projets de développement et de zones industrielles et touristiques intégrant la jeunesse au chômage [2]».
Ce mouvement permanent de protestation depuis deux ans en Tunisie rompt avec une décennie de stabilité apparente que le régime avait voulu vendre au niveau international. Les populations des régions délaissées sont prêtes à se battre. Désormais, dans toute brèche ouverte, s’engouffre le rejet d’une dictature corrompue et tortionnaire.
Luiza Toscane
Censures douces et dures du Maghreb
Par Pierre Coopman
Juin 2010
La question de la censure au Maghreb a animé les débats du Forum de la presse arabe, organisé par l’Association mondiale des journaux, les 6 et 7 juin 2010, à Beyrouth, au Liban. La Tunisie en a pris pour son grade, se voyant classée parmi les Etats aux pratiques dures envers les médias.
Au moment de boucler cet article, le 22 juin 2010, le groupe des Verts au Parlement européen vient de convoquer une conférence de presse à Bruxelles, pour dénoncer un amendement au code pénal en Tunisie, susceptible d’accentuer les entraves à la liberté d’expression… Le ministre tunisien de la Justice a expliqué sans détours que l’addendum vise ceux qui voudraient saboter l’octroi par l’Union européenne du « statut avancé » à la Tunisie. Cette crispation de l’appareil répressif tunisien intervient un mois après la tenue du Conseil d’association, qui a décidé d’explorer la possibilité d’accorder ce statut, tout en demandant à Tunis d’intensifier ses efforts en matières de protection des défenseurs des droits de l’homme et de respect de la liberté d’expression (Voir article de Tunisiawatch – Le Soir) .
Le Maroc et l’Algérie seraient moins répressifs que la Tunisie, mais néanmoins tentés de suivre son exemple. Le Marocain Aboubakr Jamai l’a admis d’emblée lors de son intervention à Beyrouth, le 6 juin : « Je suis presque gêné de me plaindre de la censure dans mon pays lorsque je dois soutenir la comparaison avec ce qui se passe en Tunisie. »
La « douceur » du contrôle des médias au Maroc
Aboubakr Jamai
Ancien directeur du défunt Journal Hebdomadaire, Aboubakr Jamai a relaté son parcours professionnel au Maroc. Après des études de commerce et d’administration, son expérience journalistique proprement dite commence en 1997, lorsqu’il fonde « Le Journal » (1). Trois ans plus tard, cette publication est interdite à cause de la parution d’un dossier impliquant le premier ministre en fonction (Abderrahmane Youssoufi) dans la tentative de coup d’Etat, en 1972, contre le roi Hassan II. Aboubakr Jamai ne se laisse pas démonter et refonde immédiatement la même publication sous un autre nom : « Le Journal Hebdomadaire ». Mais les ennuis continuent : en 2001, Aboubakr Jamai est condamné pour diffamation du ministre des Affaires étrangères Mohammed Benaissa (qu’il accuse de corruption). En 2006, suite à une plainte déposée par un consultant belge, Claude Moniquet, devant la justice marocaine, Aboubakr Jamai et l’un de ses confrères sont condamnés à payer un dédommagement de 300 000 euros pour avoir mis en doute l’impartialité d’un rapport de Claude Moniquet accusant la Front Polisario d’accointances avec Al-Qaïda. Face à l’incapacité de payer dettes et amendes, le Journal Hebdomadaire met la clef sous le paillasson et son directeur quitte le Maroc… La censure se décline, selon Aboubakr Jamai, sous au moins deux formes complémentaires : le harcèlement judiciaire et l’asphyxie économique (2). Mais la violence ou l’intimidation physique, telles qu’elles se pratiquent en Tunisie, seraient rares. Aboubakr Jamai parle de «censure douce» au royaume chérifien.
Ali Anouzla
Ali Anouzla, le rédacteur en chef de « Al-Jarida Al-Oula », identifie une troisième forme de contrainte au Maroc : l’auto-censure ou la surenchère loyaliste. Il cite l’incident qui s’est déroulé le 31 mai 2010 sur les ondes de Radio Mars, une station indépendante de Casablanca. Le cinéaste Hicham Ayouch, invité de l’émission « Mag Mars », y a exprimé son désir de «devenir président de la république marocaine ». Dès surlendemain, le Conseil supérieur de la communication audiovisuelle (CSCA) décrétait une suspension totale des émissions de Radio Mars pendant 48 heures pour « manquement aux obligations légales ». Le communiqué du CSCA constatait que « les propos d’un invité comportaient une atteinte aux constantes du royaume du Maroc telles que définies par la Constitution, notamment celles relatives à la monarchie ». Mais au-delà de ce retour de bâton prévisible, c’est la réaction rapide de l’opérateur qui dénote une surenchère loyaliste, puisqu’il a décidé d’arrêter l’émission « Mag Mars » avant même que le CSCA ne sévisse.
Al-Jarida Al-Oula ne paraît plus. Le journal est mort d’asphyxie, croulant sous les amendes infligées pour publication d’articles s’interrogeant sur l’état de santé du roi. Le jugement fatidique tomba le 29 juin 2009. Al-Jarida Al-Oula et deux autres quotidiens marocains, «Al Massae» et «Al Ahdath Al Maghribiya», furent condamnés chacun à 1 million dirhams (un peu plus de 90 000 euros) de dommages et intérêts et 100 000 dirhams d’amende, pour atteinte à la dignité d’un chef d’Etat étranger, en la personne du guide libyen Mouammar Kadhafi. « Dans un papier d’opinion du 18 novembre 2008, intitulé “Nous et le Maghreb arabe”, j’avais écrit que Kadhafi est arrivé au pourvoir sur un char d’assaut et j’avais critiqué l’absence de démocratie au Maghreb » explique Ali Anouzla. Début mai 2010, l’équipe d’Al-Jarida Al-Oula a annoncé un « arrêt provisoire » de la parution, pour des « raisons économiques ». Le journal est dans l’incapacité de payer ses amendes à la justice et de rembourser ses dettes aux imprimeurs.
Dérive à la tunisienne
Taoufic Bouachrine
« Allah et l’émir sont présents dans toute chose, comment ne pourraient-ils pas être présents dans la presse ? », ironise Taoufic Bouachrine, directeur général d’Akhbar Al-Youm, en commentant ses relations tumultueuses avec le pouvoir royal marocain. « Le problème, poursuit-t-il, c’est que l’émir aimerait présider les conférences de rédaction ». Taoufic Bouachrine fait référence à l’affaire qui a opposé son journal à la justice marocaine, lors de la parution, le 27 septembre 2009, d’une caricature du prince Moulay Ismail. Selon le ministère de l’Intérieur marocain, « l’utilisation de l’étoile de David dans la caricature suscite des interrogations sur les insinuations de ses auteurs et dénote des penchants d’antisémitisme flagrant ». Le goût du dessin incriminé peut en effet paraître douteux…
Sur le fond rouge d’une bannière étoilée (le drapeau marocain), perché dans une « imariya » (la chaise à porteurs dans laquelle s’installe normalement la mariée), le prince fait clairement un salut fasciste – malgré les dénégations de Toufic Bouachrine et du dessinateur Khaled Gueddar. Moins évidente est l’accusation d’antisémitisme. Le corps du prince cache l’étoile marocaine de telle sorte que l’on peut, à la limite, y voir une représentation de l’étoile de David. Il s’agirait d’une allusion tendancieuse au mariage du prince Moulay Ismail avec la ressortissante allemande Anissa Lehmkukl. Mais Taoufic Bouachrine a déclaré que ces interprétations sont délirantes et que le dessin s’insérait innocemment dans un dossier sur les traditions du mariage au Maroc. Il a ajouté que« l’épouse allemande du prince est de confession musulmane et pas du tout juive »… Qui croire dans cette affaire ? L’occasion de museler un média indépendant semblait en tout cas trop belle pour les autorités marocaines. En octobre 2009, le tribunal de première instance de Casablanca condamnait Taoufic Bouachrine et le caricaturiste Khalid Gueddar à un an de prison avec sursis et à 100 000 dirhams d’amende. La justice ordonnait également la fermeture définitive des bureaux du quotidien, ce qui n’empêchait pas sa parution mais l’obligeait à déménager. Taoufic Bouachrine a relancé le journal sous le nom légèrement différent d’Akhbar Al Youm Al-Maghribiya. Le prince a accepté les excuses du journaliste et du caricaturiste. Mais les ennuis de Taoufic Bouachrine ne se sont pas arrêtés. Le 14 juin 2010, après son retour du Forum de la presse arabe à Beyrouth, il a été condamné à six mois de prison ferme pour une obscure affaire d’escroquerie. Le journaliste est accusé de ne pas avoir respecté le montant des versements prévus au moment de l’achat d’une maison. Il est convaincu que cette affaire est un prétexte : « Je paie aujourd’hui la ligne éditoriale de mon journal. Désormais, le pouvoir ne veut plus condamner les journalistes pour leurs écrits. Il les traite comme des gangsters, des malfaiteurs ». Taoufic Bouachrine, qui a décidé d’aller en appel et de ne plus écrire, dénonce une dérive à la tunisienne. Il craint une machination similaire à celle qui envoya le journaliste tunisien Taoufic Ben Brik derrière les barreaux durant six mois, pour un cas non élucidé de viol et d’atteintes aux bonnes mœurs.
Tunisie : le partenaire avancé
Sihem Bensedrine
Au Forum de la presse arabe, les exemples de violations graves de la liberté des médias en Tunisie ont fusés de toutes parts. Sihem Bensedrine, une journaliste tunisienne connue pour ses nombreux déboires avec les autorités de son pays, était présente à Beyrouth. En 2008, elle avait lancé Radio Kalima. Deux rédactions, algérienne et tunisienne, se partageaient cette antenne indépendante avant que les pressions des autorités algériennes et tunisiennes ne la neutralisent. Depuis plus d’un an, les locaux de la radio à Tunis sont sous scellés. Sihem Bensedrine, menacée de poursuites judiciaires, vit en exil. Et depuis mars 2010, la société Eutelsat a cessé de diffuser les programmes de Radio Kalima sur son satellite Hotbird. Eutelsat a annoncé au provider basé à Chypre que Radio Kalima ne disposait pas des licences nécessaires auprès des autorités algériennes et tunisiennes. « Nous avons été censurés à la demande des autorités algériennes », dénonce Yahia Bounouar, le directeur de l’antenne algérienne.
Sihem Bensedrine se pose une question inquiétante : « La Tunisie devient-elle un modèle pour l’Algérie ? ». Elle n’exclut pas que ce soit la Tunisie qui ait demandé à l’Algérie de contacter Eutelsat. Dans une interview récente accordée au site Afrik.com (3), Yahia Bounouar affirmait même que « l’Algérie a envoyé des agents en formation en Tunisie », afin qu’ils y apprennent les techniques de la censure sur Internet… Un participant à la conférence de Beyrouth a ironisé à ce sujet : «Pourquoi le Maroc et l’Algérie ne s’inspireraient-ils pas des méthodes tunisiennes, puisqu’ils constatent bien que celles-ci, particulièrement efficaces, n’empêchent pas la Tunisie d’être sur le point d’obtenir le statut de partenaire avancé de l’Union européenne ? »
Régression et innovation juridiques
Mohamed Krichen
« Mon pays est un exemple de régression des libertés de la presse », a affirmé le Tunisien Mohamed Krichen, journaliste et présentateur célèbre des infos sur la télévision qatarie Al-Jazeera. Intervenant le second jour du Forum, il a comparé les débuts de sa carrière en Tunisie avec ses expériences ultérieures au service arabe de la BBC et au Qatar. Puis il a exhibé une très ancienne caricature parue dans le journal tunisien Ar-Raï en juillet 1978, où l’on représentait un ministre tout puissant à l’époque, occupant la place du président Bourghuiba sur une statue équestre… Mohamed Krichen a regretté que ce type de caricatures irrespectueuses du pouvoir soit devenu tout à fait inimaginable dans la Tunisie du président Ben Ali.
Yousef Ahmed (gauche) et Ali Anouzla (droite)
Le Palestinien Yousef Ahmed, consultant auprès de l’Index on Censorship, est venu présenter le nouveau rapport du « Tunisia Monitoring Group » (TMG), le groupe d’observation de la Tunisie mis en place par une vingtaine d’associations de défense de la liberté d’expression (4). Ce rapport montre non seulement comment la justice tunisienne est manipulée par l’exécutif afin d’étouffer les opinions divergentes, mais recense également de nombreuses affaires de harcèlements moral et physique d’une perversité sans pareille. Le Hollandais Peter Noorlander, directeur au Media Legal Defence Initiative (Londres), a même décelé une innovation juridique dans les méthodes utilisées par la justice tunisienne pour intimider les opposants et leurs familles : le prétexte d’une infraction au code de la route. C’est ainsi que Mohamed Nouri, ancien avocat, actuellement responsable de l’association Liberté et Equité, a expliqué aux enquêteurs du TMG que son fils, un soir, roulant au volant de sa voiture, fut arrêté par des policiers qui lui demandèrent de descendre de son véhicule. Comme il refusa d’obtempérer, les policiers brisèrent sa vitre. Le fils de Mohamed Nouri démarra en trombe. Il fut poursuivi pour « délit de fuite après avoir provoqué un accident de voiture ». Condamné à quatre ans de prison in abstentia, il a demandé l’asile politique à l’étranger et n’ose plus rentrer en Tunisie.
Une autre méthode fréquemment utilisée est la confiscation de la carte d’identité. Le journaliste freelance et bloggeur Samir Boukhdir en a fait les frais. Au lendemain d’une interview qu’il avait accordée à la BBC, en octobre 2009, des policiers en civil l’ont kidnappé et lui ont volé tous ses papiers. L’ennui est que le journaliste freelance, déjà empêché d’activer une connexion internet à domicile, ne peut dès lors plus fréquenter les cybercafés, pour la simple raison que l’accès de ces établissements, en Tunisie, est soumis au dépôt d’une pièce d’identité auprès du gérant…
Tous des menteurs ?
A Beyrouth, après l’intervention de Yousef Ahmad sur la Tunisie, le Norvégien Carl Morten Iversen, secrétaire général de l’association Norsk pen, s’est levé pour insister sur la véracité des témoignages contenus dans le rapport du TMG : « Ne vous étonnez si quelqu’un va demander la parole dans cette salle pour dire que nous sommes tous des menteurs. Mais ne le croyez pas, ce rapport est sérieux »… Il ne pensait pas si bien dire, car un agent de l’ambassade de Tunis à Beyrouth ne tarda pas à s’emparer du micro pour déclarer qu’il n’avait jamais eu connaissance d’une obligation de soumettre une pièce d’identité dans les cybercafés de Tunisie ! Yousef Ahmad se fâcha : « Monsieur, soyez honnête. Peut-être ne faut-il pas tout le temps montrer patte-blanche, mais seulement quand vous connaissez bien le gérant du cybercafé » ! C’est qu’en matière de mesure de la répression et de la censure, tout serait relatif (sic)…
(2) Aboubakr Jamai a expliqué comment son hebdomadaire a dû subir un boycott publicitaire des sociétés publiques et des grandes entreprises privées : “Nous avons perdu 80% de nos recettes publicitaires, les autorités ont tout fait pour nous acculer (…) Nous étions désormais considérés comme un journal à problèmes pour les annonceurs”.
(3)L’article d’Afrik.com sur le lien suivant
(4) “Behind the façade : how a politicised judiciary and administrative sanctions undermine tunisian human rights”, report from the seventh TMG mission to Tunisia (6 June 2010).
(Source: Arab press juin 2010) Lien: http://arabpress.typepad.com/arab_press/censures-douces-et-dures-du-maghreb.html
Ramadan 2011 : Viol, drogue, violence, escroquerie… Verra-t-on toujours les mêmes recettes ?
Face à l’indigestion de presque la totalité des feuilletons diffusés lors des soirées ramadanesques 2010, allons-nous pouvoir délicieusement digérer ceux de l’an prochain ? Qu’aurons-nous l’année prochaine ? A quoi pensent déjà nos scénaristes pour Ramadan 2011 ? A Combien de feuilletons aurions-nous droit (sachant qu’en 2010 on en a eu une bonne dizaine) ? Qui seront les heureux réalisateurs et les chanceux Top-affiche des premiers rôles ? Qui, que, quoi souhaite voir le téléspectateur ? Et si on lui demandait de participer à un référendum (chose impensable) pour faire valoir son choix ? Vous allez certainement vous demander ‘’Pourquoi’’ avons-nous abordé ce sujet et posé ces questions si tôt ? Et bien, il n’est jamais tôt d’attirer l’attention des responsables du ministère de la culture et de la sauvegarde du patrimoine, des décideurs des chaines TV, des scénaristes, réalisateurs et producteurs, afin de rectifier le tir et insister sur le fond. Entre nous, toutes ces questions ont commencé déjà à se poser… Bientôt commencera le compte à rebours pour la planification… On reproche aux réalisateurs et producteurs tunisiens qui se relayent pour introduire leurs feuilletons dans le circuit des chaines de télévisions, de s’orienter depuis quelques années vers des histoires calquées sur la réalité, mais qui partent toutes d’un même point de départ et mènent à une même ligne d’arrivée. Au-delà d’un simple succès, ou d’un simple échec, les feuilletons font désormais partie intégrante de notre quotidien. Outre la thématique de la délinquance, qui est constamment rappelée, les personnages lèvent aussi le voile sur des sujets comme l’homosexualité, l’alcoolisme, l’addiction à la drogue et même le crime. Les téléspectateurs s’attendent à voir une réaction de la part des producteurs de séries TV, en les voyant aller vers d’autres sujets plus convaincants, plus attachants, plus constructifs et surtout proposant des solutions. Question audimat, j’aimerai revenir sur la diffusion par Nessma TV de Youssef Asseddik. Sans aller chercher midi à 14h, j’affirmerai que le feuilleton a été suivi avec intérêt et assiduité et même visionné de nouveau le lendemain, par la plus part des tunisiens pratiquant la prière. Que ce soit par curiosité ou pour confrontation avec ce qui a été écrit dans le Coran, le fait y est, les téléspectateurs l’ont vu, revu et sont restés éblouis par le sujet et la qualité de cette production. (Source: Tunivision le 3 octobre 2010 Lien: http://www.tunivisions.net/ramadan-2011-viol-drogue-violence-escroquerie,10343.html
Monde arabe : des moments charnières…
S’il y a bien une région au monde qui retient son souffle, c’est le monde arabe. Du Maroc au Bahreïn, cette aire géographique qui occupe une place importante dans l’actualité internationale vit au rythme d’une kyrielle presque sans fin de soubresauts. Au plan interne, dans la plupart des pays, des appels pour une politique en faveur du changement se font entendre et se font de plus en plus pressants. Au plan régional, les menaces de guerre contre l’Iran, le blocage du processus de paix entre Palestiniens et Israéliens, l’instabilité en Irak, au Liban, au Yémen et au Soudan alimentent toujours un profond débat sur l’identité de cette région, à bien des égards éclatée, notamment dans un domaine aussi sensible que la politique internationale.
Dans les antichambres et dans la rue des républiques comme des monarchies, le mot qui s’invite à toutes les conversations est le changement. Tous les pays arabes, sans exception aucune, font face à un terrible blocage politique et institutionnel, suite à plus d’un demi-siècle de faillite dans la gouvernance démocratique. Intolérance politique, droits de l’homme bafoués, injustice sociale etc. constituent, en effet, le quotidien de ces pays.
Transition, dites-vous ?
En Egypte, tout comme en Tunisie, en Algérie, en Libye, au Yémen et au Soudan, l’alternance politique est un débat de plus en plus récurrent. Les leaderships de ces régimes ayant failli à leur mission d’asseoir un vrai système républicain basé sur de solides pratiques démocratiques – bien que certains soient à leur poste depuis plus de 40 ans, comme dans le cas libyen, ils sont aujourd’hui interpellés par de larges franges de leurs opinions publiques, avides d’ouverture ou au moins de décrispation.
Cependant, la tendance générale est, si ce n’est de maintenir le statu quo, de léguer le pouvoir à un membre de la famille ou à un proche. Pour ce faire, la pratique commune est celle-ci : d’un côté créer un semblant de démocratie et de l’autre, par l’amendement des codes électoraux, « réadapter » les textes fondamentaux. Les critères d’éligibilité sont ainsi revus et… corrigés. En Tunisie, par exemple, le président Zine El Abidine Ben Ali, a dû abroger en 2002 l’article portant sur le nombre de mandats électifs autorisés par la constitution pour être en mesure de se maintenir au pouvoir. Il n’est pas exclu que le président tunisien opte enfin pour la suppression pure et simple du «verrou» de la limité d’âge, qui l’empêche de se présenter aux prochaines élections de 2014. Plusieurs journaux en Tunisie ont déjà lancé une campagne appelant Zine El Abidine Ben Ali à se porter candidat pour un 6ème mandat.
L’Egypte, véritable poids lourd sur l’échiquier arabe, connait le même blocage. Plusieurs options sont possibles : soit le Président Hosni Moubarak, pourtant souffrant, continue à diriger le pays, soit il passe les rênes du pouvoir à Gamal, son fils. Une autre option favorise la piste Omar Suleyman, chef des services de renseignement. Les deux derniers scénarios constitueraient un précédent, dans la mesure où le pouvoir n’a jamais échappé à l’appareil militaire, depuis l’abolition de la monarchie, en 1952. Ce qui pourrait être là, du moins en partie, le cas.
Des monarchies en quête de changement
Les monarchies arabes, quoique traditionnellement plus stables et moins sujettes à de tels schémas, sont elles aussi en butte au blocage politique. Au Maroc et en Jordanie, l’embellie de la fin des années 1990 est de plus en plus perçue comme un vieux souvenir. Les organisations de défense des droits de l’homme enregistrent, non sans amertume, la fin de la « récréation », avec un retour à la répression de l’opposition, notamment islamiste bien que reconnue, et une attaque sans précédent contre les journalistes.
En Arabie Saoudite, autre poids lourd du monde arabe, l’heure est au changement. Mais lequel ? Les critères saoudiens ne sont en aucun cas ceux «répertoriés» dans les démocraties occidentales, ni même dans les pays voisins. La centralisation excessive du pouvoir, dans les coulisses des Saouds, pèse durablement sur la vie du pays. Ajoutons à cela l’observance de traditions et de coutumes politico-religieuses qui freinent toute mutation réelle… Les indices mêmes économiques reflètent l’échec cuisant des politiques de développement. En dépit d’un PIB dépassant les 400 milliards de dollars, le taux de chômage est de 15%, tandis que le taux d’alphabétisation demeure des plus faibles dans la région, dépassant la barre des 80%.
Pour les voisins de l’Arabie Saoudite, les dimensions géographique et démographique ainsi que la présence chiite, notamment pour le cas du Bahreïn, servent toujours d’alibi pour expliquer le peu d’engouement pour l’ouverture politique. Du Qatar au Koweït, en passant par le Sultanat d’Oman, les Emirats Arabes Unis et le Bahreïn, la scène publique paraît comme sur ses gardes, à cause du rétrécissement des espaces de liberté et l’absence de vie associative et syndicale.
Vers une multiplication de conflits locaux ?
Cet état des lieux politiques et les perspectives qu’il pose voire impose, dans certains cas, est de surcroît aggravé par les menaces sécuritaires, tantôt réelles, tantôt phantasmées.
Au Soudan, le référendum sur l’indépendance du Sud aura-t-il bien lieu ? Omar Al Bashir se laissera-t-il «amputé» d’une partie du vaste pays qu’il contrôle ? Ne sommes-nous pas à veille d’un nouveau conflit, le «cas» du Darfour une fois réglé par Khartoum… Le traçage des frontières entre les futurs Etats constitue en soi un casus belli, puisqu’il pose le problème épineux du partage des ressources pétrolières et ne prend pas en compte les flux migratoires des tribus concentrées sur la frontière, de part et d’autre.
L’acharnement du régime yéménite Ali Abdallah Saleh menace, à son tour, l’intégrité territoriale du pays, réunifié en 1990, mais toujours en quête de stabilité. Sanaa est occupé sur plusieurs fronts : la rébellion chiite houthie au Nord et le mouvement pour la sécession au Sud. Sur ces deux fronts, les fondements de la protestation sont identiques : plus de justice et plus d’équité.
La menace d’une intervention d’une partie de la communauté internationale contre l’Iran est comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête des dirigeants arabes. Source de divisions entre capitales arabes… Les blocs se forment. Le premier comprend l’Arabie Saoudite, l’Egypte et la Jordanie, avec des relais décentrés tels une partie des parlementaires libanais et le Fatah dans les Territoires palestiniens. Le second bloc est tout aussi clairement défini, avec bien sûr en tête l’Iran, la Syrie et également ce qu’on pourrait appeler des antennes locales, le Hezbollah au Liban et le Hamas dans les Territoires palestiniens. Cette équation n’a pas que des inconnues… Cette tension pourrait rejaillir sur le Liban qui a, de tout temps, subi sur son territoire les contre-coups des conflits régionaux et s’est lui-même transformé en terrain de guerre.
En outre, ces alliances régionales empêchent tout règlement du conflit entre Palestiniens et Israéliens. La fracture Hamas-Fatah est comme un «écho» de cette géopolitique. Le mouvement islamiste refuse toute reprise de négociation avec l’Etat hébreu, tandis que son rival joue la carte des pourparlers, quoique sans enthousiasme. Mais, aux yeux d’une large frange des Palestiniens, ni l’un ni l’autre ne portent la légitimité et la crédibilité pour négocier en leur nom.
Les populations irakiennes font aussi les «frais» d’événements tragiques et aujourd’hui, au moment où le processus de retrait des Américains est enclenché et au moment où une solution purement irakienne fait douter, la promesse de jours meilleurs ne suffira plus. Une grande partie de la classe politique irakienne s’est décrédibilisée et les Irakiens de la rue n’y croît plus.
En partie, l’instabilité intérieure et le durcissement des régimes arabes sont «alimentés» par les multiples et complexes dimensions régionales de conflit ouverts ou latents. Les opinions publiques, elles, se font entendre, de plus en plus. Dans l’état actuel des choses, ces opinions, ces voix dérangent, qu’elles trouvent une expression civile dans certains médias nationaux ou internationaux, notamment grâce aux nouvelles technologies (chaînes satellitaires, internet etc.). Les oppositions, laïque ou religieuse, se réorganisent et leur champ d’action et d’interpellation s’ouvre à l’ensemble de la société.
(Source: grotius.fr/ le 3 octobre 2010) Lien: http://www.grotius.fr/monde-arabe-des-moments-charnieres%e2%80%a6/
Le président allemand salue le rôle de l’islam en Allemagne
Par Reuters, publié le 03/10/2010 à 17:16
Le président allemand Christian Wulff a profité dimanche de son discours à l’occasion du 20e anniversaire de la réunification pour inviter les Allemands à plus de respect et de solidarité envers les étrangers.
Il a également souligné que l’islam avait sa place en Allemagne.
“Nous sommes un peuple. Cet appel à l’unité doit aujourd’hui être une invitation adressée à tous ceux qui vivent chez nous“, a-t-il déclaré à Brême, dans le nord de l’Allemagne.
“Le christianisme et la judaïté appartiennent sans nulle doute à l’Allemagne. C’est notre histoire judéo-chrétienne. Mais désormais, l’islam aussi fait partie de l’Allemagne“, a-t-il ajouté.
Le chef de l’Etat, qui joue essentiellement un rôle honorifique, a rappelé que dans le même temps, l’Allemagne exigeait de ses émigrés le respect des valeurs inscrites dans sa Constitution. Etre chez soi en Allemagne signifie ainsi, à ses yeux, respecter la Loi fondamentale et s’en tenir à ses règles.
“Celui qui ne le fait pas, celui qui méprise notre pays et ses valeurs, s’expose à une résistance résolue de nous tous, dans notre pays“, a-t-il continué. Wulff a ajouté que la société restait vigilante face à ceux qui abusent de la collectivité. L’Etat social, a-t-il ainsi souligné, n’est pas “un magasin en libre service“.
L’Allemagne, qui compte sur son sol quatre millions de musulmans, essentiellement d’origine turque, a été agitée ces dernières semaines par un houleux débat sur le rôle de l’immigration.
Après avoir publié un livre devenu un best-seller et défendu des positions particulièrement hostiles aux musulmans, Thilo Sarrazin a été contraint à la fin de l’été de démissionner du directoire de la Bundesbank.
Christian Wulff, qui est né à l’Ouest, a tenu par ailleurs dans son discours à saluer les Allemands originaires de l’ex-RDA, qui, selon lui, ont dû faire d’énormes efforts pour s’adapter à une société nouvelle après l’effondrement de leur pays.
“Dans une certaine mesure, ils ont dû entamer une nouvelle vie, réorganiser leur vie quotidienne et saisir les occasions qui se présentaient“, a-t-il dit.
“Cela, ils l’ont fait dans un état d’esprit incroyablement ouvert aux changements. Cela, on ne le reconnaît pas encore assez aujourd’hui“, a dit le président allemand, qui fêtera bientôt ses 100 premiers jours au château de Bellevue, la résidence du chef de l’Etat.
Eric Faye pour le service français
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