TUNISNEWS
8 ème année, N° 2567 du 03.06.2007
Parents d’élèves de l’école Tunisienne de Doha: Lettre au Président de la République African Manager: Indice global de la paix: la Norvège pour le monde, la Tunisie pour l’Afrique DeZ etunisie : La France, l’Afrique et le co-développement durable La Presse: Mille et une raisons de lutter contre le tabagisme Le Temps: Mémoire collective – Mai 1943: Les juifs tunisiens, citoyens protégés Réalités: Mohamed Ali El Annabi : A la mémoire d’un homme illustre…
Doha le 02 Juin 2007 A Son Excellence Monsieur Le Président de la République Tunisienne Zine El abidine Ben Ali
Objet: L’école Tunisienne de Doha Qatar
Monsieur le Président C’est avec du retard que je vous écris à propos de l’école Tunisienne de Doha malgré que les choses urgeaient et ont viré vers l’irréparable en l’absence de notre ambassade.
De nos jours l’école Tunisienne est devenue la propriété privée de Monsieur Ben Othman avec délégation de plein pouvoir à son coordinateur général.
Après de nombreuses réclamations et plaintes des parents de l’école, le premier responsable de l’OTEF a envoye une délégation au Qatar présidée par un certain Béchir Kraiem bien connu dans le cercle de la corruption, pour jouer une scène de comédie devant la communauté Tunisienne en instaurant un conseil d’administration nommé par le coordinateur général et ce pour régulariser tous les dépassements antérieurs.
De ce fait on se trouve maintenant dans une situation de mendicité auprès des autorités Qatarienne ce qui nuit enormement a l’image de marque de notre patrie surtout que nos relations diplomatiques ne sont pas au beau fixe et cette pratique n’a jamais été autorisée par nos ambassadeurs auparavant alors que ces responsables et a leur tête le Président de l’organisation Tunisienne de l’éducation ne songent qu’a leur intérêts personnels surtout ce coordinateur qui a nuit a maintes reprises a l’image de la Tunisie en tolérant toutes sortes de pratiques sans dignité.
Monsieur le Président, je viens par cette présente vous solliciter de bien vouloir donner vos chères instructions afin d’arrêter ces manipulations nuisantes utilisant notre école et affectant l’image de notre cher pays, sachant que toute la communauté Tunisienne au Qatar est prête et favorable pour une restructuration de cette école sur des bases bien solides élaborée par des experts en la matière dont la Tunisie n’en manque pas.
Veuillez agréer Monsieur Le Président mes plus grands respects et ma haute gratitude. Parents d’élèves de l’école Tunisienne de Doha.
Indice global de la paix: la Norvège pour le monde, la Tunisie pour l’Afrique
par : AM L’indice global de la paix (Global peace index et the economist intelligence unit) classe les pays selon différents critères, 24 au total parmi lesquels figurent la facilité d’accès aux armes, les dépenses militaires, la corruption, et le respect des droits de l’homme. Le rapport publié le 30 mai 2007 arrive à certaines conclusions dont notamment,
– le fait que la paix est étroitement liée à certains indicateurs tels que le revenu, l’éducation et le degré d’intégration régionale. – Les pays les mieux classés partagent souvent un grand degré de transparence et une faible corruption ; – Les petits pays appartenant à des blocs régionaux ont souvent plus de chance d’être parmi les premiers au classement. La Norvège occupe la tête du classement, suivie par la nouvelle Zélande. En bas tu tableau, à la 121ème place se trouve l’Irak. Les Etats unis d’Amérique occupent la 96ème place, le Liban à la 114ème et Israël à la 119ème.
Le premier pays arabe à figurer sur la liste est le Sultanat d’Oman à la 22ème position, suivi par le Qatar (30ème). En Afrique, c’est la Tunisie qui est la mieux classée (39ème) dans ce rapport, suivie par le Ghana (40ème) et Madagascar (41ème). Le Maroc arrive à la 48ème position, l’Egypte à la 73ème et l’Angola, la Côte d’Ivoire et le Nigeria en bas du tableau classés respectivement 112, 113 et 117ème. Une bonne initiative notamment à la veille de la réunion du G8 ; bien qu’on peut reprocher à ce classement qu’il mette dans le même panier ceux qui provoquent la guerre et ceux qui la subissent.
Classement PaysScore 39 Tunisie 1.762 40 Ghana 1.765 41 Madagascar 1.766 42 Botswana 1.786 48 Maroc 1.893 50 Mozambique 1.909 53 Zambie 1.930 56 Gabon 1.952 57 Tanzanie 1.966 58 Libye 1.967 64 Namibie 2.003 65 Sénégal 2.017 68 Malawi 2.038 71 Guinée Equatoriale 2.059 73 Egypte 2.068 76 Cameroun 2.093 91 Kenya 2.258 99 Afrique du sud 2.399 103 Ethiopie 2.479 104 Uganda 2.489 106 Zimbabwe 2.495 107Algérie 2.503 113 Angola 2.587 113Cote d’Ivoire 2.638 117Nigeria 2.898
(Source: African Manager le 3 juin 2007)
La France, l’Afrique et le co-développement durable
Bernard Kouchner, qui vient d’être nommé Ministre des affaires étrangères, a une occasion en or pour mettre en conformité la France -et aussi l’Europe- avec l’ensemble de ses engagements publics et internationaux concernant la lutte contre le détournement d’argent public, la corruption et l’atteinte aux droits de l’Homme dans le monde et plus particulièrement en Afrique. Lui qui a qualifié Mobutu l’ex président du Zaïre (mort en 1997) de « compte en banque ambulant coiffé d’un bonnet de léopard » doit donner un signal fort dans ce sens.
Sur le sujet des droits de l’Homme, Kouchner osera-t-il aller plus loin avec les dirigeants africains, comme il l’a fait avec son homologue birman Nyan Win mardi dernier (Le 29 Mai 2007 au sommet de Hambourg) , en dénonçant la prolongation « inacceptable » de l’assignation à résidence du prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi. Et quand Nyan Win lui répond que Mme Suu Kyi « représente un danger à l’ordre public », Kouchner se dit «choqué» par cette réponse, avant de conclure : « Un pays qui agit de la sorte est un pays qui a peur de lui-même. » [1]
Par ailleurs et pour revenir aux choix politiques de la France, le fait de dissocier le développement durable du co-développement attribué au Ministère de l’immigration et l’aide au développement attribué aux Affaires étrangères, risque d’entraîner en plus des confusions, des incohérences et des redondances. Et les populations africaines risquent d’être les premières victimes de ce choix en entraînant de plus la séparation des dimensions sociales et environnementales du développement, pourtant indissociables pour l’avenir de la planète.
Mais face aux exigences citoyennes de voir la France agir autrement avec l’Afrique et ses dirigeants, d’autres collaborateurs de l’équipe Fillon peuvent et doivent aussi contribuer à atteindre cet objectif. En effet, Brice Hortefeux devrait tout d’abord s’occuper de l’argent dit du co-développement mais souvent détourné par les dirigeants africains que de renvoyer chez eux des pauvres immigrés africains. Cet argent qui devrait servir à construire des écoles, des hôpitaux ou d’autres infrastructures est plus souvent investi dans l’immobilier dans les départements de l’Ile de France (essentiellement le 92 et le 78).
N’oublions pas non plus Alain Juppé qui ayant la charge du développement durable de s’occuper d’une question centrale qui est la notion de sphère d’influence des multinationales et de leur éthique tant sur le plan de l’environnement que des droits de l’homme. Osera-t-il s’opposer aux pratiques immondes de quelques multinationales comme celle du scandale du Probo-koala ? [2] Le Ministre du Développement durable osera-t-il s’attaquer à une « corruption durable » ?
Mais peut-on vraiment croire aux promesses et à la « rupture » sarkozienne ? Quand Sarkozy cite un auteur des plus inattendus comme Gramsci [3], cela laisse perplexe. Que ses promesses « renouvelables » ne soient « biodégradables » !
En attendant, on peut déjà compter sur d’autres acteurs : Le premier est celui des certaines ONG et associations de défense de droits des citoyens et le deuxième c’est celui de l’avancement du droit international marqué par l’adoption de la Convention de l’ONU contre la corruption, qui inclut le principe de la restitution des avoirs détournés.
Pour revenir aux détournements d’argent, inutile de citer les fortunes colossales ramassées par quelques dirigeants africains que tout le monde connaît et que les journalistes de plusieurs groupes de presse français semblent souvent oublier ou ignorer. Mais rappelons tout de même que Mobutu a pu ramasser une fortune de 4 milliards d’euros, que Omar Bongo au pouvoir du Gabon depuis 1967 a ramassé une fortune colossale en pompant les bénéfices du Pétrole avec la complicité d’une compagnie française. Citons aussi le Président Sassou-Nguesso du Congo qui possède un parc immobilier très important en France, en Espagne et au Maroc. N’oublions pas Houphouët-Boigny décédé en 1993 qui a ramassé une fortune de plus de 5 milliards d’euros en trente ans de règne en Côte d’Ivoire (Quelques étages de bureaux à La Défense font toujours partie du patrimoine de ses héritiers). Officiellement, ces Présidents et Hommes d’Etat africains ont des salaires modestes. Tellement modestes qu’un Omar Bongo et un Sassou Nguesso ont pu acquérir des luxueux biens immobiliers dans la région parisienne ! Une insolence doublée d’une provocation. « La sottise est le bouclier de la honte, comme l’insolence est celui de la pauvreté » disait Léonard de Vinci.
Ainsi et face à la complicité de certains Hommes d’Etat français avec les exactions financières, juridiques et policières des dirigeants africains, quelques initiatives citoyennes quoi que non concluantes pour l’instant méritent d’être saluées et citons à titre d’exemple l’action de plusieurs associations contre certains Présidents africains pour « recel de détournement de biens publics » auprès du parquet du tribunal de grande instance de Paris le 27 Mars dernier. « La France peut-elle rester une terre d’asile pour l’argent volé aux Africains ? Cette immunité garantie depuis quarante ans ne peut plus durer », estiment les initiateurs de la plainte, l’avocat William Bourdon, président de l’association Sherpa, groupement de juristes spécialisé dans les affaires économico-financières, et Odile Tobner, présidente de Survie, contemptrice des réseaux de la « Françafrique ». [4]
Et jusqu’à présent les seules procédures couronnées de succès étaient apparemment et de façon paradoxale initiées par des régimes ayant succédé à d’autres régimes évincés. Mais pourquoi faut-il attendre que des dirigeants – qui s’accrochent au pouvoir pour échapper à la justice et aux urnes- ne soient détrônés pour agir ?
Ajoutant aux actions associatives contre le détournement de l’argent des actions médiatiques ciblées comme celles concernant la gouvernance à la Banque Mondiale. La crédibilité de cette dernière – donneuse de leçons et prônant transparence et bonne gouvernance aux pays pauvres– est écornée par l’affaire de népotisme qui a poussé son président Paul Wolfowitz à démissionner.
Il est aussi intéressant de signaler les actions de justice –rares mais efficaces sur le plan médiatique – comme celles engagée par Abdennacer Naït-Liman [5] en Suisse contre l’ancien Ministre de l’Intérieur tunisien Abdallah Kallel ou celle engagée contre Khaled ben Saïd, le Vice-consul de Tunisie à Strasbourg et qui s’est évaporé depuis qu’un juge d’instruction ait ordonné le renvoi devant les assises du Bas-Rhin pour des faits de torture commis en Tunisie. En fuite, sous le coup d’un mandat d’arrêt international, l’ancien diplomate devrait être jugé par défaut. Il est poursuivi au titre de la Convention contre la torture de 1984 qui confère une compétence universelle aux Etats.
Cette décision « est un succès dans le lutte contre l’impunité », s’est félicité jeudi Me Patrick Baudouin, l’avocat de la Fédération internationale des droits de l’Homme lors d’une conférence de presse à Paris. [6]
De la capacité des ONG et du mouvement associatif à dépasser les difficultés dépendent leur efficacité à porter secours aux populations pour vaincre leur sort et à se poser en alternative des logiques politiques et économiques des Etats. Reste à savoir les limites que le droit international va instaurer pour permettre aux « saignés » de revendiquer leur cause universelle.
« A défaut d’optimisme, reste toujours, pour quiconque choisit de se battre contre l’inacceptable, la volonté d’espérer » disait Claude Julien. [7]
DeZ (dez.info[arobase]gmail.com)
Le 31 Mai 2007 [1] AFP le 30 Mai 2007 [2] L’affrètement d’un bateau de déchets chimiques déversés en Cote d’ivoire en 2006. La société Trafigura Beheer BV specialisée dans le courtage maritime et basée aux pays bas était citée dans cette affaire. [3] Le Figaro du 17 Avril 2007 [4] Philippe Bernard – Journal Le Monde daté 29.03.2007 [5] Voir le site TRIAL http://www.trial-ch.org/fr/suisse/les-affaires-en-suisse/tunisie.html [6] Associated Press 22 Février 2007 [7] Claude Julien – Le Monde Diplomatique Décembre 1990 ————————————— FIN
Mille et une raisons de lutter contre le tabagisme
II- Pour ne pas enfumer… la femme enceinte et le fœtus… Répercussion du tabagisme pendant la grossesse
Le pourcentage de femmes fumeuses a atteint 36% en France en l’an 2000, le pourcentage de celles qui arrêtent de fumer pendant la grossesse est de 35% et 54% seulement réduisent leur consommation. Il s’ensuit une morbidité et une mortalité fœtale et néonatale importantes :
1- Mortalité fœtale et néonatale : les mères fumeuses ou enfumées sont responsables d’une augmentation de la mortalité fœtale et néonatale de 30% bien que les causes soient multifactorielles. le tabagisme pris isolément accroît la mortalité néonatale de 10%. les décès sont dus à l’augmentation de fréquence de certaines pathologies, essentiellement les hémorragies placentaires (placenta praevia, hématome, rétroplacentaire) et la rupture prématurée des membranes.
2- Morbidité fœtale : la prématurité répresente une des causes majeures de mortalité chez les fumeuses. l’augmentation du taux de prématurité serait de 10% et augmente en fonction du nombre de cigarettes consommées avec un effet potentialisateur de l’association nicotine-caféine. Les avortements spontanés sont plus fréquents chez les fumeuses (+ 80%). le tabac en élevant les résistances vasculaires placentaires versant fœtal, pourrait détériorer les échanges de l’oxygène.
Il faut rappeler que la nicotine traverse le placenta et que le CO (gaz toxique produit par la combustion du tabac) a une affinité pour l’hémoglobine (transporteur de l’oxygène vers les tissus) supérieure à l’oxygène (240 fois plus) et qu’une femme fumant plus de deux paquets de cigarettes par jour a un taux de carboxyhémaglobine (CO lié à l’hémoglobine ayant pris la place de l’O2) de 10% ,ce qui, pour le fœtus, équivaut à une diminution de flux sanguin de 60% en termes d’oxygénation.
Le tabac a été associé à une fréquence plus élevée de mort subite et cela indépendamment des autres effets du tabac sur le nouveau-né. L’effet teratogène (pourvoyeur de malformations congénitales) du tabac est sujet de controverses (plus de 30% de fentes palatines et 230% de malformations urinaires).
3. Hypotrophie : l’enfant d’une fumeuse admet un poids de naissance diminué en moyenne de 200g et proportionnel à l’importance de la consommation de tabac. Il s’agit d’effets propres et de conséquences d’effets nutritionnels avec déficit en zinc, carotène et cholestérol. La courbe de poids se normalise en 6 mois chez ces enfants
4. Lactation et allaitement : le tabac engendre une dimunition de la production de lait. La nicotine passe dans le lait, et chez les grandes fumeuses, les conséquences ont une exagération de l’irritabilité du nouveau-né, de diarrhée et de tachycardie (accélération du rythme cardiaque) et enfin un abandon plus fréquent et plus rapide de l’allaitement.
5. Maladies néonatales : comme l’asthme, les pneumonies et les bronchites, surtout pendant la première année de vie, des hospitalisations plus fréquentes. Il a été remarqué qu’il existe une augmentation des cancers avec deux fois plus de leucémies (cancer du sang) et les nephroblastomes (tumeurs des reins). Il a été mis en évidence des substances cancérigènes dans les urines de nourrissons de mères fumeuses !
Peut-être que le tabagisme passif du fœtus joue-t-il un rôle dans le développement de pathologies plus ou moins grandes dans l’enfance et même à l’âge adulte?
D’où le rôle de la prévention et une information sur les dangers du tabac doit être fournie par les équipes obstétricales et, si possible, orienter les patientes vers une consultation de sevrage.
Pour le groupe «Tabac» Dr Elyes Hassine, pneumologue-tabacologue (Source : « La Presse » (Quotidien – Tunis), le 1er juin 2007)
Nationalesdimanche 03 juin 2007 Mémoire collective – Mai 1943
Les juifs tunisiens, citoyens protégés
L’installation des juifs tunisiens au 10e siècle à la capitale était due selon une légende confirmée par de nombreux historiographes, au grand marabout et dignitaire religieux Sidi Mehrez Ibn Khalaf, qui eut le titre de patron de la médina (Soltane El Mdina). En effet, les juifs astreints à rester hors de l’enceinte de la ville, lui demandèrent d’intervenir auprès du souverain. Combien êtes-vous ? leur demanda Sidi Mehrez. « Hara » répondirent-ils, pour dire qu’ils n’étaient pas bien nombreux. Ce mot qui veut dire un quarteron, est souvent employé dans le sens figuré.
Sidi Mehrez jeta son bâton à terre et le plus loin possible en leur disant : Là où tombera mon bâton vous définirez les limites de votre Hara ». Ce fut ainsi qu’était né au 10e siècle le quartier juif de la Hara qui se trouvait non loin de ce marabout qui faisait autorité à l’époque. Quant aux livournais, ce sont les Italiens originaires de Livourne qui se sont installés El Grana (Gournis – Livournais).
Le statut des juifs tunisiens connut une amélioration considérable sous Mohamed Bey, auprès duquel le Caïd des juifs, Nessim Chamama put obtenir l’abolition de certaines contraintes auxquelles ceux-ci étaient soumis.
L’incident du juif Baïtou SFEZ qui fut condamné à mort et exécuté pour avoir au cours d’une dispute, avec un musulman, insulte la religion de la mère de celui-ci, suscita l’indignation des consuls français et anglais qui en référèrent à leurs Etats. Ce qui incita Mohamed Bey à édicter Ahd El Amane, sorte de constitution qui énonçait dans son préambule les principes de la non discrimination entre les citoyens tunisiens quelles que fussent leurs origines.
Les juifs tunisiens allaient pouvoir s’installer librement en exerçant leurs activités en toute quiétude. A l’avènement du colonialisme, certains hommes d’affaires français étaient même gênés et inquiets de la place confortable qu’occupaient les juifs sur le plan économique et surtout de cette entente qui existait entre commerçants juifs et musulmans.
Durant la seconde guerre mondiale la Tunisie en avait écopé, pour avoir été à un moment donné un champ de bataille pour les belligerants que furent à l’époque les alliés et les pays de l’axe. C’était une guerre dans laquelle la Tunisie n’était pas pourtant partie prenante, mais elle était sous « protectorat » français et c’était pour cette raison qu’elle avait subi de graves préjudices.
Les Allemands qui à cette époque occupèrent la Tunisie n’avaient pas hésité à faire subir des exactions aux juifs tunisiens, dont certains étaient déportés ou affectés à des camps de travail obligatoire et ce dès novembre 1942.
Toutefois la plupart des juifs tunisiens avaient trouvé aide, soutien et protection de la part de leur compatriotes musulmans. Les soldats allemands faisaient souvent des rondes, aussi bien dans les quartiers où habitaient les juifs que partout ailleurs, à travers la capitale et les villes et villages éloignés de la Tunisie.
Parmi ceux qui avaient vécu cette situation, racontaient ultérieurement que les commerçants de la Hafsia se sentaient en sécurité par la présence des commerçants musulmans de la médina qui les assuraient de leur soutien.
On racontait que pour cacher les juifs qui étaient persécutés et recherchés par les soldats nazis, des musulmans utilisaient des planques de fortunes telles que les grosses jarres servant à emmagasiner les semoules et les différentes épices et denrées alimentaires.
A la Marsa où se trouvait le palais de Moncef Bey (l’actuel Dar Assaâda), palais qui appartenait à sa mère la princesse Kmar Bey, il y avait non loin de là, à coté de Dar Ettaj, quartier de la garde du Bey, une forte concentration de juifs habitant dans des oukalas ou pour les plus nantis des immeubles.
Il y avait là aussi le souk de la Marsa où se trouvaient plusieurs commerçants juifs. Dans un de ses discours Moncef Bey avait déclaré qu’il n’y avait aucune différence ni ségrégation à faire entre juifs et musulmans.
A Sfax lorsque les juifs furent obligés de porter l’étoile jaune par le décret de Vichy, Moncef Bey fit pression sur le Résident Général afin que ledit décret fut outrepassé afin que les juifs cessent de porter ce signe distinctif ô combien humiliant.
A ce titre Moncef Bey se prévalait du Pacte Fondamental où Ahd El Amen, qui bien qu’il restât lettre morte sous ses prédécesseurs, il n’avait pas été pour autant amendé ou abrogé.
D’ailleurs, la fameuse convention de mai 1881, n’avait fait aucune allusion en ce sens, à Ahd El Amen, qui tient lien de constitution et dont il est énoncé à l’art : « Aucune mesure de coercition les forçant à changer leur foi, ne sera imposée à nos sujets juifs et ils ne seront pas gênés dans l’observation libre de leurs rites religieux ». Ce qui était une preuve tangible que l’accusation fallacieuse qui lui fut faite par les autorités françaises d’avoir collaboré avec les Allemands, n’était qu’un prétexte pour déposer un souverain qui dénonçait haut et fût l’atteinte flagrante à la souveranieté du pays, fût ce aux prix de son trône et de sa vie.
Ahmed YOUNES (Source : « Le Temps » (Quotidien – Tunis), le 1er juin 2007)
Mohamed Ali El Annabi : A la mémoire d’un homme illustre…
Monia Ben Smida Premier polytechnicien de Tunisie et patriote dans l’âme, Mohamed Ali El Annabi (1906-1962 s’est distingué par sa personnalité et son parcours militant. La Tunisie lui est reconnaissante d’ailleurs : trois rues portent son nom ainsi qu’un lycée à Ras Jbel d’où il est originaire. Qui est-il et comment cet homme a-t-il réussi dans sa quête de liberté ? Retour sur le parcours d’un homme qui a forcé le respect des colons. Un mot, un sourire, un regard, les échos d’une vie…Les souvenirs sont encore présents dans l’esprit de son fils Hichem El Annabi, que nous avons rencontré accompagné de son fils Farès et qui ne tarit pas d’anecdotes au sujet de son père. «On ne le voyait pas souvent et les instants qu’il partageait avec nous étaient précieux. Je me souviens d’un jour où il m’a regardé droit dans les yeux et m’a dit : l’important ce n’est pas ce que tu as mais ce que tu es. Il n’était pas présent pour nous tous les jours certes , mais il l’a été pour la Tunisie». Mohamed Ali El Annabi était un homme de sciences, qui a participé à plusieurs colloques et congrès où il se faisait le porte-parole d’un pays qu’il voulait indépendant et développé. Né à Ras Jbel en 1906, il a grandi dans une famille d’intellectuels, ce qui l’a considérablement aidé dans son parcours par la suite. Le jeune Mohamed Ali était incontestablement destiné à faire de grandes études, lui qui prenait son père pour modèle. Un père ayant toujours occupé de hautes fonctions dans l’administration durant sa carrière. Le colonialisme et la politique de favoritisme exécrée à l’époque ont incité Béchir El Annabi à donner une éducation poussée à son fils tout en lui laissant le choix des filières qu’il voulait emprunter. Son enfance, il l’a passée entre une école primaire à Bizerte et quelques escapades avec son père à Tunis. Au début des années 1917 et 1918, il intègre le Collège Sadiki puis le lycée Carnot où il obtient en juin 1926 un baccalauréat en mathématiques et en octobre de la même année un autre en philosophie, puis il se rend à Paris où il passe deux ans au lycée Saint- Louis. Reçu à l’école Polytechnique en 1929, il entre à l’École Nationale Supérieure des Mines en 1933. Entre temps il obtient sa licence ès Lettres et sa licence ès Mathématiques. Mais le jeune étudiant, avide de connaissances, ne s’est pas arrêté en si bon chemin. Il enchaîne en obtenant son diplôme à l’Ecole de Sciences Politiques en un an au lieu de trois, et ce en 1934. Fréquentant assidûment l’Université de la Sorbonne à Paris, des professeurs de l’établissement lui demandèrent d’assurer une série de conférences sur l’énergétique et la relativité ainsi que sur la physique moderne. Suite à cela, ils lui offrirent, en contrepartie de l’abandon de sa nationalité un poste permanent de professeur. Mais le patriotisme de Mohamed Ali El Annabi ainsi que son sens du devoir envers la Tunisie primaient sur ses satisfactions personnelles Au début de l’année 1934, il rentre au pays où son cas dérangeait les autorités du protectorat car il avait plus de diplômes en poche que n’importe quel haut dignitaire français. Il devient, en 1937, fonctionnaire des Travaux Publics en tant qu’ingénieur adjoint à la direction des intérêts miniers. Ceci a permis de mettre en vigueur le décret de juillet 1933 qui permettait aux Tunisiens l’accès à la fonction publique mais qui n’était jusqu’ici pas respecté. Lors d’une interview faite à Mohamed Ali El Annabi par le journal Ezzamen qui existait à l’époque, il a déclaré que l’accès à l’emploi dans les administrations tunisiennes était un droit et non un privilège pour toute personne qualifiée. C’est grâce à l’Association des Anciens de Sadiki, dont il fut le président pendant vingt ans et qui devint un cénacle du nationalisme tunisien, qu’il aide la génération montante en inculquant son esprit vers des raisonnements scientifiques lors de réunions et de conférences afin qu’elle puisse poursuivre des études à l’étranger en lui procurant des bourses comme il l’a fait pour le regretté Mokhtar Latiri, décédé récemment et qui lui en fut reconnaissant toute sa vie. Il crée et participe à plusieurs clubs de recherche comme le club pour la Recherche scientifique, le club pour la Recherche sur les problèmes économiques dont s’occupait Tahar Sfar et bien d’autres encore. C’est à la suite des incidents du 9 avril 1938, que la décision de dissoudre les associations et clubs est tombée. Mais en mars 1946, Mohamed Ali El Annabi a obtenu le droit des autorités françaises au rassemblement sous la couverture de l’Association des anciens de Sadiki. C’est ainsi qu’une lutte intellectuelle pleine d’espoir a pu voir le jour à un petit local, siège de l’association, sis à la rue Dar El Jeld où un bon nombre de militants pour l’indépendance comme Ali Belhaouane se réunissaient. « Je me souviens qu’un an plus tard, mon père avait demandé aux Imams des mosquées de parler lors du prêche du vendredi du soutien qui devait être accordé aux étudiants qui désirent poursuivre leurs études à l’étranger. C’était une première qui fut relatée dans les journaux de l’époque », nous raconte son fils avec fierté et beaucoup d’émotion. Vers la fin de l’année 1947, cet érudit a collaboré à la création de l’association des ingénieurs et techniciens tunisiens dont le but était de préparer des cadres tunisiens à des hautes fonctions dans l’administration en vue d’une libération prochaine : « La libération d’un pays se prépare et les habitants de ce pays doivent être prêts à tenir les rênes ». Telle était le credo favori de Mohamed Ali El Annabi, d’après les souvenirs de son fils qu’il a quitté alors que ce dernier n’avait que vingt-et-un ans. Afin de l’éloigner de la vie associative qui prenait de plus en plus d’ampleur à l’époque, les autorités françaises, inquiètes de son influence intellectuelle, décidèrent de le confiner à un poste de conseiller technique « aux Affaires indigènes ». Cependant, il a continué à donner des conférences sur des sujets économiques et scientifiques et à rédiger des écrits, même après l’Indépendance, pour les journaux locaux comme Essabah en 1961 où il a relaté l’économie d’énergie apportée par l’énergie solaire. Il a également participé à des recherches sur le nucléaire et à son utilisation à des fins pacifiques. Plus tard, en 1959, il est nommé commissaire de la Recherche scientifique et de l’Energie nucléaire et deviendra membre actif à l’Agence internationale de l’Energie atomique dont le siège se trouve à Vienne. Par ses recherches, il proposait l’utilisation de cette énergie à des fins agricoles et pour extraire les métaux du Sud tunisien. La Tunisie devenait membre du conseil des gouverneurs et allait enfin siéger aux côtés d’autres nations dans le domaine des sciences universelles. Quelque mois avant d’exercer au commissariat de la Recherche, Mohamed Ali El Annabi s’est rendu aux États-Unis afin de voir les expériences réalisées dans l’industrie et l’industrie lourde en tant qu’ingénieur en chef au secrétariat d’Etat pour l’Industrie et les Transports et s’est inspiré des progrès qui ont été faits en matière d’énergies solaire, hydraulique et électrique, en matière de pétrole et de contrôle du climat. De retour en Tunisie, il a participé à l’élaboration d’un laboratoire pour l’exploitation de l’énergie solaire près de l’aéroport de l’Aouina. Outre ses participations actives dans les congrès internationaux, il a organisé en 1961 une conférence sur le thème « Promesses du nucléaire en Tunisie ». C’est au cours de son discours d’introduction qu’il a laissé entrevoir la possibilité d’acquisition d’un réacteur nucléaire pour la Tunisie. Mohamed Ali El Annabi avait beaucoup d’autres projets pour la Tunisie mais le destin l’a emporté en 1962. Il n’avait que 56 ans. (Source: “Réalités” (magazine hebdomadaire- Tunis), N° 1118 du 31 mai 2007)