3 février 2008

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TUNISNEWS
spp8 ème année, N°  2811 du 03.02.2008

 archives : www.tunisnews.net


L’Expression: Tous irresponsables ou la complainte des «ex» Le Temps :Festival du rire au Théâtre Municipal de Tunis Politis: Forum Social Maghrébin


 

Editorial

Tous irresponsables ou la complainte des «ex»

 

Ridha KEFI Quand ils quittent le pouvoir, nos hommes politiques deviennent touchants d’ingénuité. Ils se mettent à claironner, pour qui veut bien les entendre, qu’ils étaient (et sont encore du reste) de grands démocrates devant l’Eternel. Mais des démocrates contrariés, empêchés d’aller jusqu’au bout de leur élan. Empêchés par qui, par quoi ? Par des forces occultes, par le «Système» (ainsi, avec un grand «S», entité impersonnelle et évanescente, et, de ce fait, «non-traduisible» devant un tribunal) ou par quelque adversaire politique malveillant et malintentionné. Rares, en tout cas, sont ceux parmi ces chers «ex» (premiers ministres, ministres ou conseillers de l’ombre…) qui avouent avoir été derrière telle ou telle décision ayant limité les libertés ou mis à mal le processus démocratique dans le pays, et qui acceptent d’assumer totalement (ou même partiellement), en hommes dignes, leurs actes antérieurs. Dans cette sorte de dédoublement schizophrénique, c’est à peine si ces anciens «mas’ouline» (responsables) ne se dérobent pas derrière une «irresponsabilité» de confort, en affirmant n’avoir rien à voir avec ceux qui, en d’autres temps et d’autres circonstances, avaient, sous leur nom et dans leurs fonctions (les documents écrits, audio et vidéo sont pourtant là pour l’attester), commis tel ou tel acte ayant eu des répercussions négatives sur l’évolution ultérieure du pays, telles que la falsification des résultats d’élections, la dissolution d’une organisation un peu trop rebelle ou l’instruction de procès politiques contre des opposants ou des rivaux. Jamais de confessions donc, ni d’aveux, ni de repentirs. Jamais d’explications non plus, ni de clarifications, ni même de justifications. Mais une fuite en avant dans un long chapelet de démentis et de dénégations: ce n’est pas moi qui ai donné l’ordre; je n’étais pas informé ; je ne l’ai su qu’après coup; j’y étais opposé mais on n’a pas voulu m’entendre; on m’a fait endosser ceci ou cela… Bref, ce n’est pas moi, c’est l’autre: réaction d’un enfant pris en défaut et qui s’ingénie à cacher sa forfaiture. Ce comportement, qui serait pitoyable et prêterait à sourire s’il n’émanait pas de personnes qui avaient eu, dans un passé récent, d’immenses pouvoirs sur leurs concitoyens et en ont parfois largement abusé, appelle, de notre part, une série de remarques que nous exprimerons sous formes d’interrogations, façon d’inviter à la réflexion et au débat. Face à l’amnésie généralisée, qui est l’une des caractéristiques de notre système politique, peut-on raisonnablement reprocher à des Mohamed Mzali, Tahar Belkhodja, Mohamed Sayah et autres Ahmed Ben Salah, qui s’ingénient aujourd’hui, à travers livres et journaux, dans d’interminables entretiens menés par des journalistes parfois plus complaisants que soucieux d’aider à la révélation de la vérité, de vouloir donner une version idyllique de leurs parcours politiques respectifs, dans l’intention avouée de s’amender à bon compte aux yeux de leurs concitoyens et de passer pour pertes et profits leurs errements passés ? Peut-on également reprocher à ces anciens «responsables» de vouloir se dérober aujourd’hui à leurs responsabilités d’hier et de crier leur innocence des erreurs qu’ils ont commises dans une vie antérieure, quand le système politique lui-même, qui fonctionnait comme une pyramide inversée – tout le poids de la responsabilité étant porté par un seul homme, le chef de l’exécutif en l’occurrence, de qui tout émane et à qui tout revient –, les rend pour ainsi dire «irresponsables» de leurs propres actes ? Que n’a-t-on pas entendu d’anciens «responsables», interrogés sur des bavures qu’ils ont commises du temps où ils étaient aux affaires, répondre avec une étonnante bonne conscience (et une bonne dose de mauvaise foi aussi): «J’étais un simple exécutant. Je n’ai fait qu’appliquer les ordres» ? Peut-on aussi reprocher aux historiens de se dérober à leurs devoirs, scientifique et citoyen, en ne cherchant pas à démêler les inextricables écheveaux des événements, complicités, alliances et contre-alliances, qui ont marqué notre scène politique au cours des cinquante dernières années, alors que le pays dans son ensemble, Etat et société réunis, a toujours cultivé une culture de l’omerta, du non-dit et de l’amnésie volontaire, évitant de se regarder en face, de s’interroger sur lui-même et de faire son autocritique, de manière à tirer les leçons du passé et éviter de refaire aujourd’hui les mêmes erreurs d’hier ? «Tu ne te baigneras pas dans le même fleuve deux fois», disait l’ancien philosophe grec Héraclite. Sans doute, parce que l’eau du fleuve coule et change sans cesse. Sauf peut-être dans notre pays où la vie, l’amnésie aidant, est un long fleuve…  immobile.

 

(Source: Editorial de l’hebdomadaire “L’Expression” n° 16 du 1er février 2008)  


Festival du rire au Théâtre Municipal de Tunis

Baaziz un artiste précieux à l’humour sulfureux

 

 

Baaziz aurait -il arrondi les angles, et proposé un spectacle plus soft que ses précédents à El Teatro ? Peu probable. Il avoue avoir reçu quelques consignes pour y aller ” molo “. Aveu fallacieux car ce qui était plus que perceptible c’était une forte émotion au début et un vrai tract face à un public et un théâtre archi-comble.

 

Aspect touchant et somme toute peu connu de celui que l’on peut amicalement qualifier de ” grande gueule “. Cet algérien dans l’âme et tunisien de cœur a réussi le temps d’une soirée à faire de l’humour le dénominateur commun entre Tunisiens et Algériens

 

Le Festival du rire a fait succéder des humoristes de tous bords et de tous genres. Avec Baaziz, c’était tapis rouge pour une autre dimension du rire. Parce que plus proche de nous, de nos affinités et surtout avec cette musicalité chère à notre ouie. Avec son humour engagé, le spectacle était propulsé un cran au dessus. Malgré ses tentatives d’autocensure, les textes originels de coutume plus crus, plus directs et sertis d’un vocabulaire souvent plus grossier gardaient la forme expressive de cet humour à lalgérienne qui fait le style et la trempe unique de l’artiste. Cette pseudo adaptation du texte pour le théâtre n’a dévalué en rien l’aspect fantasque de son spectacle, combinant sketchs, chants et critiques. Un tantinet ” adoucit ” cette initiative n’a altéré en rien l’humour acerbe et la verve sulfureuse de l’artiste. Un je ne sais quoi de ” tunisifié ” dans le ton, des silences truffés de non-dits, qui en disaient long. Chut… vous avez saisi ce que je n’ai pas dit

 

En début de soirée, un incident malencontreux, de spectateurs retardataires qui s’obstinent à réclamer leurs places alors que l’artiste est en pleine ouverture de scène, a indisposé l’artiste. Bloqué devant cet imbroglio, Baâziz les fustigeait en boutades, histoire de dépasser l’écueil. ” Vous avez raison de ne pas vous lever, et vous, vous avez raison de vouloir vos places ” … ” Aller, gérons ça à l’arabe “. Tout le public s’enjoint à l’artiste et applaudit. Rien à faire. Face à cet entêtement taciturne, Baâziz les qualifie ” d’antisismiques “, désignant par ce sobriquet ces caractères de spectateurs qui à notre sens, ne sont perturbés, ni par leur manque de décence, ni par leur absence de civisme.

 

Outre cette parenthèse, la suite, toute la suite de la soirée a laissé libre cours à un show digne de la renommée de cet anarchiste dans l’âme mais qui ne fait pas de sa ” subversivité ” langagière un fond de commerce, juste le choix d’un ton, une posture artistique, un moyen d’exprimer un amour exacerbé pour sa patrie, les siens et tout ce qui jalonne sa vie et celle des algériens. Retours satiriques sur des épisodes douloureux du terrorisme. Super Mario and Co étaient les protagonistes, version ” remasterisée ” de ce franc tireur. Stigmatisation de la corruption des dignitaires du régime. Et parodies de tout un peuple qui aime, vit ou survit en dépit de tout. Autant de cris sarcastiques qui dénotent d’un puissant attachement à son pays, l’Algérie également écorchée vive. Baâziz se la joue anarchiste. En fait, il est trop sensible pour l’être dans les actes. En plus, il est trop honnête pour être subversif et trop authentique, surtout dans ce moment fort en émotions, dans cet hommage émouvant à son paternel. Tourner l’horreur, les drames, les coups de la vie en dérision c’est sa stratégie d’esquive. Pour notre unique bonheur.

 

Dans l’enceinte de la bonbonnière, il jubilait face à des sollicitations d’un public algérien concentré en haut, et les Tunisiens en bas. Une disparité qui a battu en éclat avec cet artiste qui par son talent et son sens de la réplique sait faire vibrer les fibres tunisiennes algériennes à l’unisson et qui comme aucun autre artiste, par la force de ses suggestions tisse et trame les liens imperceptibles de nos semblances.

 

A ses débuts, il était confiné dans l’espace feutré et intimiste d’El Teatro. Et c’est sur la scène du théâtre municipal qu’il témoigne un chaleureux hommage à ceux qui lui ont permis de devenir un artiste autant algérien que tunisien. Belle soirée fusionnelle, haute en humeur avec l’incomparable, le sulfureux, le précieux  Baâziz qui pour une fois n’était pas seul et était loin d’être mal accompagné

 

Faten AOUADI

 

(Source : « Le Temps » (Quotidien – Tunis), le 3 février 2008)


 

Forum Social Maghrébin

Karine Gantin

 

Le « Forum social marocain tourné vers le Maghreb, l’Afrique pour un Monde meilleur », les 25, 26 et 27 janvier à Bouznika au Maroc, a remporté un beau succès à la fois par son contenu et par sa fréquentation, près de 1500 participants, soit le double de celle attendue.

 

 Le forum Social Maghrébin (FSMagh), en gestation depuis trois ans, devait initialement se tenir dans les mêmes dates à Nouakchott en Mauritanie, où depuis le coup d’Etat militaire de 2005 se profilait un dégel de la société civile. Or, voilà quelques semaines, le nouveau gouvernement mauritanien a décidé souverainement de « reporter » le FSMagh. Malgré les difficultés de tous ordres, parmi lesquelles l’autonomie du FSMagh par rapport aux pouvoirs nationaux n’est pas des moindres, un Forum social transversal au Maghreb a finalement été organisé au Maroc en remplacement. Diverses rencontres se sont tenues par ailleurs à Alger et Nouakchott.

 

Parmi les réussites à mettre à l’actif de la rencontre, un débat public sur les droits humains au Maghreb a réuni la quasi-totalité de la Coordination Maghrébine des Droits humains (Comdh), qui déjà avait été créée lors de « l’Assemblée préparatoire » du FSMagh à Bouznika en janvier 2006. A l’issue de la réunion, Khadija Ryadi, présidente de l’Association marocaine des Droits de l’homme, sourit : « l’année 2008 verra certainement le décollage de la Comdh ».

 

Autres succès majeur à mettre à l’actif du Forum Social de Bouznika, la coordination des mouvements travaillant sur les flux d’immigration entre Afrique subsaharienne, Maghreb et Europe, continue de progresser. Egalement, la question du Sahara Occidental a pu être discutée avec l’ensemble des acteurs concernés, pour la deuxième fois au Maghreb, le précédent ayant eu lieu lors de l’Assemblée préparatoire du FSMagh de janvier 2006.

 

 De fait, le Forum Social a permis utilement l’expression, voire la confrontation, des identités et mouvances politiques qui travaillent le Maghreb : pro- ou anti-indépendantistes sur la question du Sahara Occidental, courants amazighs et arabophones, tendances de gauche et d’extrême gauche… Et bien sûr, omniprésent, transparaissait la ligne de fracture entre militants démocrates laïcs et ceux d’identité politique musulmane et islamiste, tous réunis pour le forum malgré l’absence des figures de proue des partis islamistes qui avaient focalisé l’attention lors des élections marocaines de l’automne dernier. Les mouvements jeunes et des quartiers populaires présents, forts d’un travail social et éducatif local impressionnant, s’accommodaient quant à eux assez naturellement d’une juxtaposition des militants de sensibilités diverses, comme l’ont prouvé les associations présentes, notamment RESAQ, réseau des associations de quartiers et bidonvilles du Grand Casablanca, forte de 400 participants au Forum de Bouznika.

 

Rares étaient les Libyens présents, « en raison de la faiblesse de la société civile dans ce pays », résume le Marocain Kamel Lahbib, fondateur de l’Espace associatif à la fin des années 90 et plus récemment du Forum Alternatives Maroc (FMAS), une organisation pivot dans l’organisation du Forum. Le secrétaire général de la Ligue des droits humains libyenne, Sliman Bouchuiguir, lui, ironise en tribune sur la situation des militants de son pays : « pardon de ne savoir bien parler, en Libye nous avons d’abord appris à écouter… En Libye, nous ne réclamons pas des élections libres, mais simplement des élections, même truquées. »

 

 La représentation algérienne était quant à elle source de batailles politiques en amont du Forum du fait de tensions autour notamment du « Forum Social Algérien », association dont la légitimité contestée. Une « deuxième délégation », composée particulièrement du RAJ (Rassemblement Actions Jeunesse) et du Collectif des familles des disparus a fait entendre cependant à Bouznika les voix des mouvements sociaux et revendications démocratiques algériennes. Les syndicats autonomes de la fonction publique, qui préparent d’importantes grèves nationales en Algérie du 10 au 12 février prochains, étaient absents.

 

A l’issue des assemblées des mouvements sociaux, du dimanche matin, deux communiqués transversaux ont été produits. L’un proteste contre le refus d’entrée sur le territoire marocain opposé à Khemais Ksila, secrétaire général de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme attendu à Bouznika. L’autre appelle à une journée de solidarité maghrébine le 15 février avec Gaza assiégé, et demande l’envoi d’une délégation par le Conseil international des forums sociaux à la frontière palestino-égyptienne ce jour-là.

 

 (Source : « Politis » (Revue française), du 30 Janvier 2008)

 


 

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