26 janvier 2012

TUNISNEWS
11 ème année, N°4227 du 26.01.2012
archives : www.tunisnews.net
 


FIDH: Procès Nessma TV : Une audience sous tension

SOS Tunisie : Les libertés menacées !

Le Parisien: Tunisie: les islamistes au pouvoir confrontés à la pression salafiste

Mediapart: Constituante en Tunisie… les craintes

Le Telegramme: Ben Ali. Son avion cherche un nouveau propriétaire

Jeune Afrique: Tunisie : des salafistes évacués de l’université de la Manouba près de Tunis

Espace manager: Tunisie: Hammadi Jebali nous rappelle les discours d’il y a un an

Kapitalis: Tunisie. Jebali se défend et dénonce des semeurs de troubles

Business News: Tunisie – Sadok Chourou persiste sur ses déclarations haineuses

Tekiano: Tunisie : Que faire des archives de la police politique ?

Le Temps: La chronique de Youssef SEDDIK – Propos ouverts à «Si» Rached GHANNOUCHI… « Il faut l’égorger !… »

 


Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH)  

Communiqué de presse

Procès Nessma TV : Une audience sous tension

 

 

 

Paris, Tunis, le 25 janvier 2012 – A l’issue de sa mission d’observation judiciaire de l’audience du 23 janvier dans le cadre du procès intenté à l’encontre du directeur de la chaîne satellitaire privée Nessma TV et de deux co-accusés, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) s’inquiète du climat de tension qui entoure cette affaire en Tunisie. Après la diffusion par la chaîne Nessma TV du film d’animation Persépolis doublé en dialecte tunisien suivi d’un débat sur l’intégrisme, des poursuites ont été déclenchées à l’encontre du directeur de la chaîne Nabil Karoui sur le fondement des articles 44 et 48 du code de la presse (« offense commise (…) envers l’un des cultes dont l’exercice est autorisé ») alors en vigueur et des articles 226 et 226 bis du code pénal (outrage public à la pudeur et atteintes aux bonnes mœurs et à la morale publique). Le responsable du visionnage au sein de Nessma TV et la personne responsable du doublage du film, Nadia Jemmel, Présidente d’une association de défense des droits des femmes sont également poursuivis dans le cadre de cette affaire pour complicité. Une première audience tenue le 17 novembre 2011 avait été reportée au 23 janvier 2012, à la demande de la défense. « Cette audience a été marquée par un certain nombre de pressions exercées par la présence d’une foule devant le palais de justice qui brandissait le drapeau noir et qui s’en est prise physiquement à quelques personnes » a déclaré Karim Lahidji, Vice-président de la FIDH et l’un des observateurs de la FIDH au procès. Les manifestants rassemblés devant le tribunal scandaient des slogans à l’encontre des accusés, les traitant de « mécréants » et de « vendus à l’Occident ». Plusieurs personnes venues exprimer leur solidarité aux accusés ont été violemment prises à partie par les manifestants et deux d’entre elles, un journaliste, Ziad Krichen et un universitaire, Hamadi Redissi, ont été frappées par les manifestants sans que les agents de police présents n’interviennent. Les observateurs ont également relevé des dysfonctionnements dans la salle d’audience. « Il est regrettable que les autorités judiciaires tunisiennes n’aient pas pris leurs responsabilités pour garantir que cette affaire sensible soit jugée sereinement et conformément au droit » a souligné Antoine Garapon, magistrat également mandaté par la FIDH pour observer ce procès. L’organisation du procès a été de façon générale déficiente. Alors que la première audience tenue le 17 novembre 2011 avait suscité une forte mobilisation politique et des affrontements autour de cette affaire, aucune mesure n’a été prise pour disposer d’une salle d’audience plus vaste, ni pour organiser les débats de la façon la plus sereine possible. La constitution de plus d’une vingtaine de nouvelles parties civiles à l’audience du 23 janvier a renforcé la confusion qui régnait dans la salle d’audience. Suite à une demande des parties civiles, l’audience qui s’est tenue devant la Chambre criminelle du Tribunal de première instance de Tunis, a été reportée au 19 avril 2012. Deux motifs ont été invoqués par les parties civiles pour justifier leur demande de report : la possibilité pour les nouvelles parties civiles constituées de prendre connaissance du dossier et la demande au Ministère public de se saisir pour requalifier les faits reprochés aux prévenus sur la base d’une nouvelle incrimination prévue par le nouveau code de la presse. En effet, le 2 novembre 2011, un nouveau code de la presse a été promulgué. Ce code de la presse aujourd’hui en vigueur, a abrogé l’intégralité des dispositions de l’ancien code de la presse et ne comprend plus dès lors les dispositions des articles 44 et 48, sur lesquelles les poursuites étaient jusqu’alors en partie fondées. Le décret loi n°115 du 2 novembre 2011 portant nouveau Code de la presse a introduit un article 52 qui prévoit « Est puni d’un à trois ans de prison et une amende de 1000 à 3000 dinars quiconque appelle à la haine entre les races, les religions ou la population et ce en incitant à la ségrégation ou en utilisant des moyens hostiles ou violents ou en propageant des idées racistes ». La FIDH dénonce une nouvelle fois cette procédure qui constitue une violation flagrante de la liberté d’expression. Elle prend bonne note des déclarations du chef du gouvernement affirmant l’attachement des autorités tunisiennes à la protection de la liberté d’expression et dénonçant les violences perpétrées à l’encontre de journalistes et personnes venues soutenir les prévenus. Alors que d’autres violences similaires ont été enregistrées à plusieurs reprises ces dernières semaines et continuent aujourd’hui encore d’être perpétrées, notamment à Sejnane et à l’université de la Manouba où des individus identifiés comme appartenant à des groupes salafistes ont forcé les portes de salles d’examen pour empêcher le déroulement de ceux-ci, la FIDH appelle les autorités tunisiennes à prendre les mesures nécessaires afin que de tels actes ne puissent plus être commis en toute impunité et pour garantir la liberté d’expression conformément aux obligations internationales de la Tunisie, en particulier l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.  

Contacts presse : Arthur Manet +33 6 72 28 42 94 (à Paris) Karine Appy +33 6 48 05 91 57 (à Paris) Suivez nous sur Twitter : @fidh_fr
 


SOS Tunisie : Les libertés menacées !

 

L’état des libertés publiques en Tunisie appelle à la vigilance et à la mobilisation. Nous apprenons au quotidien des violations et des atteintes répétées aux libertés fondamentales : à la liberté d’expression, à la liberté de la presse, à la liberté d’information, à la liberté de création. et à la liberté de pensée. Nous tunisiennes et tunisiens de l’Etranger, signataires de cet appel, sommes inquiet(e)s de la dégradation des libertés acquises par la Révolution tunisienne dont la revendication essentielle était la liberté ! le travail et la dignité. Nous sommes inquiet(e)s parce que chaque jour apporte son lot d’atteinte et de violation des libertés publiques et en particulier de la liberté de la presse.. Ce lundi 23 janvier se tenait un procès, celui d’une chaîne de télévision, procès qui n’aurait pas du exister et qui nous rappelle les sombres moments de la dictature de l’ancien régime. Quels que soient les reproches « légitimes » d’une partie de l’opinion exprimés lors de la projection d’un film ou d’une création artistique, ceux-ci ne justifient ni la violence ni les menaces. Ces reproches ne justifient pas non plus la poursuite judiciaire d’une chaîne de télévision dans l’exercice de son travail. Les médias, quelle que soit leur nature, publics ou privés, doivent jouir de la pleine liberté de diffusion et d’expression dans un pays libre et démocratique. Lors de ce procès, Abdelhalim Messaoudi, Hamadi Redissi, Zyed Krichen, Salah Zeghidi, Saïda Garrach , Youssef Seddik… (journalistes, universitaires et militant des droits de l’homme ), présents aux abords du palais de Justice, ont subi des agressions et des humiliations de la part d’un groupe de personnes dites « salafistes ». Les libertés fondamentales avec l’indépendance de la Justice sont les piliers et les garants d’une société réellement démocratique. Il est inadmissible qu’une société démocratique ne soit pas capable d’assurer l’ordre public et son maintien, de surcroît lors d’un procès qui semble mobiliser le ban et l’arrière ban de la partie qui l’a provoqué. Est-ce normal que la sécurité des citoyen(ne)s ne soit pas assurée et que la police restée inerte dans un tel contexte? Nous ne pouvons rester silencieux devant cette violence et nous nous joignons à toutes les voix qui, en Tunisie, se sont élevées contre ses méthodes qui nous rappellent de tristes souvenirs. Nous exprimons notre soutien et notre solidarité aux victimes de ces agressions et déplorons l’absence de sécurité dans ce contexte qui exigeait un minimum de prévention ! Nous signataires de cet appel demandons aux autorités publiques d’assumer leur responsabilité de garant du maintien de l’ordre public et de la sécurité des citoyen(ne)s. Nous regrettons que la police attende des ordres qui ne viennent pas ! Après les incidents subis par la faculté de La Manouba et le tâtonnement dans le traitement du problème par les autorités compétentes, nous voilà à nouveau, aujourd’hui, en présence d’une inertie des autorités en matière de maintien de l’ordre public. Nous demandons aux autorités publiques de mettre tout en œuvre pour rechercher les auteurs de ces violences, de les traduire devant les tribunaux et d’assurer sans délai la sécurité des personnes menacées. Nous rappelons que la démocratie ne peut se construire dans un climat d’intolérance et de violence et en l’absence du respect des libertés fondamentales (libertés publiques et individuelles). Premiers signataires : Hichem ABDESSSAMAD, Chercheur Khaled ABICHOU, ancien syndicaliste. Najoua AGREBI, Juriste Samia HATHROUBI, enseignante, Militante associative Noureddine BAABOURA, militant associatif, FTCR Houcine BARDI , porte parole Parti tunisien du Travail Tarek BEN HIBA, président de la Fédération Tunisienne des Citoyens des deux Rives,(FTCR) Almi BEN AMEUR, militant associatif Alia BENSAID, Collectif des Femmes Tunisiennes Féthi BENSLAMA, Professeur, Doyen de l’UFR d’Etudes psychanalytiques, Université Paris Diderot, IPAD Adnane BEN YOUSSEF, membre du bureau politique du PDP Sophie BESSIS, journaliste et universitaire Fatma BOUVET de la MAISONNEUVE, psychiatre, essayiste, élue municipale Montrouge Hédi CHENCHABI (Militant associatif) et au nom de AIDDA Mohieddine CHERBIB, président du Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie, (CRLDHT) Mohamed-Lakhdar ELLALA, président de l’Association des Tunisiens en France (ATF) Chedly ELLOUMI, militant associatif, Grenoble Mohamed-Chérif FERJANI, universitaire, islamologue à Lyon 2 Mohamed Mrad Ghadoumi, PTT France Gérard HADDAD, psychiatre, psychanalyste, écrivain Abderrazak HORCHANI BOUAZIZI Président de l’ADTF- Association Démocratique des Tunisiens en France Jamel JANI , Association des droits de la personne au Maghreb-Canada Nacer JALLOUL, PTT Hédi JILANI, PTT Jalel MATRI Union des Tunisiens de Suisse Ali MEZGHANI, universitaire, Paris 1 Nidhal MIZOUNI, militante Droits de l’Homme en Tunisie, Grèce Najet MIZOUNI, universitaire, Paris 8 Tarek TOUKABRI, ancien candidat PDP à la Constituante Chadli ZAIDI, coordinateur général du Mouvement des Patriotes Démocrates en France (MOPAD), ancien candidat à la Constituante —————————– Merci d’adresser vos signatures à : Najet Mizouni : najlin@voila,fr Mouhieddine Cherbib : cherbib@gmail,com

 

 


Tunisie: les islamistes au pouvoir confrontés à la pression salafiste

Face aux pressions de plus en plus fortes de la mouvance salafiste, le parti islamiste Ennahda, qui domine le gouvernement tunisien, va devoir rapidement sortir de l’ambiguité vis à vis de sa base radicale, estiment des analystes. Depuis les élections, les radicaux regroupés dans la nébuleuse salafiste se manifestent à tout bout de champ: dans les universités pour imposer le port du niqab, devant les tribunaux pour fustiger une chaîne de télé accusée d’avoir diffusé un film blasphématoire, dans les manifestations où des journalistes ont été agressés.

Accusé d’inertie depuis sa prise de fonction le 23 décembre, le gouvernement de l’islamiste Hamadi Jebali a adopté ces derniers jours un ton plus ferme et son parti Ennahda a pris des positions inhabituellement claires. Mardi, les autorités sont intervenues pour faire lever le sit in de partisans du niqab (voile islamique intégral) qui entravait depuis deux mois le fonctionnement de la faculté de lettres de la Manouba, près de Tunis. La veille, Ennahda avait publié un communiqué sans précédent pour affirmer son attachement à la liberté d’expression et se désolidariser des poursuites judiciaires contre Nessma TV dans l’affaire Persepolis. Et dans un discours devant l’Assemblée nationale constituante, le Premier ministre a assuré sa détermination « à faire appliquer la loi » et a dénoncé les agressions contre des journalistes survenues lors d’une manifestation anti-Nessma. « Le gouvernement est acculé. De mon point de vue, la confrontation est imminente entre les +islamistes modérés+ d’Ennahda et les radicaux salafistes », estime le journaliste Ali Laïdi Ben Mansour, rédacteur en chef à Nessma et au site webmanagercenter. « Jusqu’à présent les salafistes, qui sont certes une minorité mais qui sont capables de mobiliser et d’agir, ont su profiter des hésitations du gouvernement. Mais je pense qu’Ennahda n’a pas intérêt à avoir ce boulet aux pieds », déclare-t-il à l’AFP. Un boulet qui met au grand jour les contradictions d’Ennahda, « tiraillé entre faucons et colombes », souligne-t-il. Composés d’un noyau pur et dur d’environ 200 personnes, les salafistes ont entre 5 et 7000 sympathisants, selon les estimations. « Il y a parmi eux de vrais salafistes et d’autres manipulés et instrumentalisés, notamment par les anciens du RCD (parti dissous de Ben Ali). Mais il n’empêche qu’une grande partie de la base d’Ennahda est proche de cette doctrine », souligne le chercheur Alaya Allani, spécialiste des mouvements islamistes au Maghreb. Du coup, le parti islamiste tunisien « se trouve dans une situation très difficile. Il ne voulait pas entrer en guerre avec les salafistes, car il ne veut pas perdre cette base avant les prochaines élections. Mais il ne va plus pouvoir jouer trop longtemps sur l’ambiguité », estime le chercheur. L' »exercice d’équilibriste » d’un parti qui a tenté de « ménager la chèvre et le chou » ne va pas pouvoir se prolonger, estime également le site tunisien Businessnews dans un article en une mercredi. Pour l’avocat Slah Ourimi, membre de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, les signaux envoyés par le gouvernement et Ennahda sont encore « trop timides » face aux radicaux d’extrême droite qui « lancent des ballons d’essai et « testent » la société tunisienne. « Des étudiants agressés, des journalistes tabassés, des examens perturbés: ce qui se passe est très grave et très dangereux. Le gouvernement a fait des petits pas ces derniers jours. Mais nous voulons une position claire, tranchée et que le gouvernement se démarque totalement de ces groupes radicaux qui sont contre la république et contre la démocratie », demande-t-il.

Source: “Le parisien” Le 25-01-2012

Lien: http://www.leparisien.fr/flash-actualite-monde/tunisie-les-islamistes-au-pouvoir-confrontes-a-la-pression-salafiste-25-01-2012-1829004.php


Constituante en Tunisie… les craintes

Certes comparaison n’est pas raison, mais cette première année de la révolution en Tunisie m’en rappelle une autre, notamment l’enjeu de la Constituante d’avril 1848 en France! La réaction catholique et sa propagande dans la presse mais aussi dans les églises, ont été particulièrement efficaces, déterminantes en milieu rural.

Ainsi l’analyse d’Abderrazak Lejri d’octobre dernier aurait pu s’écrire en mai 1848 : « L’échec des modernistes est en partie explicable par le clivage certain entre une élite lettrée et citadine et une majorité de la population rurale de l’intérieur et par l’enlisement dans le piège du débat identitaire dans lequel Ennahdha les a entrainés. »

1848, ce fut pourtant une belle et généreuse révolution.Elle fut assassinée par des bourgeois réactionnaires et des républicains « modérés » au bout de quatre mois!

Pour mémoire:

Le gouvernement révolutionnaire de Février 1848 n’a proclamé que provisoirement la République. Néanmoins le suffrage universel (masculin) est instauré par le décret du 5 mars et le nombre des électeurs passe ainsi d’environ 250 000 à 9 millions. Des élections sont prévues le 9 avril pour désigner les députés d’une Assemblée Constituante. Les républicains « de la veille » sont conscients que le monde rural ne connaît pas les idées républicaines, et que, dans de nombreuses régions, l’immense majorité des français est sous la domination économique de possédants et les bons conseils des curés. Une longue campagne de débats et d’information est nécessaire. D’autant plus que des rumeurs inquiètent les populations rurales mal informées. Une première manifestation ouvrière, à Paris, le 17 mars, obtient le report des élections au 23 avril. Ce qui est jugé insuffisant par les socialistes (Louis Blanc) et les communistes (Blanqui). Le 16 avril, une autre manifestation qui réclame donc un second report, est écrasée par Ledru-Rollin.

Comme l’avait prévu Blanqui, les élections du 23 avril donnent une majorité aux modérés (monarchistes camouflés et républicains modérés). Les républicains « avancés » sont nettement battus. La nouvelle assemblée qui se réunit le 4 mai, proclame la République et met fin à l’existence du Gouvernement provisoire du 24 Février. Bien entendu la Commission exécutive (de 5 membres) élue temporairement par la nouvelle Assemblée constituante, a exclu les éléments les plus progressistes (Louis Blanc et Albert) du gouvernement provisoire. C’est cette Commission qui donnera les pleins pouvoirs à Cavaignac pour assassiner des milliers d’ouvriers et de petits artisans de Paris en juin 1848. La suite conduit à la Présidence de Louis-Napoléon Bonaparte qui piétine la Constitution pour voler au secours du Pape chassé par les républicains italiens (1849) puis au coup d’Etat de décembre 1851.

Source: “Mediapart” Le 25-01-2012

Lien: http://blogs.mediapart.fr/blog/jean-michel-paris/250112/constituante-en-tunisie-les-craintes


Ben Ali. Son avion cherche un nouveau propriétaire

Qui aurait cru que la révolution tunisienne engendrerait un tel dommage collatéral ? Depuis quelques semaines, un Airbus 340 aménagé VIP reste cloué au sol. L’ex-heureux propriétaire aurait déjà cet avion s’il ne s’était pas appelé Ben Ali.

L’Airbus A340 qui stationne aujourd’hui sur le parking de Sabena Technics, à Mérignac, devrait déjà être en Tunisie auprès de son ex-propriétaire Ben Ali, mais l’Histoire en a voulu autrement. Quand les événements tunisiens ont éclaté, les travaux de transformation pour lequel l’avion était en Gironde avaient bien commencé. Et d’après nos confrères du Sud-Ouest, il ne pouvait être question d’arrêter le chantier à mi-chemin.

Un avion de luxe Dans sa version commerciale, cet avion pouvait accueillir plus de 300 passagers, mais quelques arrangements ont été faits en Gironde. Depuis les transformations, l’avion dispose, en effet, d’une chambre et de salons. Cependant, sachez en tant que potentiel acquéreur que cet appareil ne dispose pas de leurres antimissiles. En attendant de trouver acheteur, ce paquebot de l’air stationne sur le parking de Sabena Technics et il pourrait y rester jusqu’à ce qu’il ait trouvé un client.

Source: “Le Telegramme” Le 25-01-2012

Lien: http://www.letelegramme.com/ig/generales/france-monde/ben-ali-son-avion-cherche-un-nouveau-proprietaire-24-01-2012-1576750.php


Tunisie : des salafistes évacués de l’université de la Manouba près de Tunis

La police a été contrainte d’intervenir pour mettre fin à l’occupation de la faculté des Lettres de la Manouba par des salafistes remmettant en cause l’interdiction du port du voile islamique intégral à l’université. Une quinzaine d’entre eux ont été évacués mardi 24 janvier.

Une quinzaine de partisans du port du voile islamique intégral qui occupaient le premier étage et le rez-de-chaussée de la faculté des Lettres de la Manouba près de Tunis et s’y étaient installés pour passer la nuit, « ont été évacués (mardi 24 janvier) par la police à 18H30 », a affirmé Habib Kazdaghli, doyen de l’établissement tunisien.

« Le calme est de retour »

C’est à sa « demande » que « le procureur de la République s’est déplacé constater la situation » et a ensuite ordonner l’évacuation des manifestants présents depuis près de deux mois dans l’enceinte, a précisé Habib Kazdaghli. « On a relevé, grâce à la fermeté des professeurs, le défi d’organiser les examens. La faculté est évacuée, le calme est de retour. Mais le problème ressurgira si ces manifestants ne sont pas poursuivis en justice », a-t-il mis en garde.

« On n’a pas voulu jouer l’épreuve de force pour ne pas donner l’occasion à Kazdaghli de nous envoyer en prison et d’en finir avec notre combat pour le niqab », a déclaré pour sa part Mohamed Bakhti, le porte-parole du sit in. « On va se réunir ce soir pour décider de la suite de notre mouvement, mais les filles vont continuer leur grève de la faim », a-t-il assuré, en référence à quatre étudiantes qui ont entamé il y a quelques jours un jeûne en dehors de la faculté.

Violences et sit in

Mardi, des étudiants ont tenté de forcer les portes et d’escalader les grilles de l’établissement pourtant déclaré « centre d’examens fermé » à l’occasion du début des évaluations semestrielles. La présence d’une quinzaine de gardiens universitaires, appuyés par des professeurs portant un brassage rouge, n’a pas suffi à dissuader les salafistes qui ont notamment cassé la porte des locaux du département d’arabe, molesté et insulté des enseignants, selon des témoins.

À l‘occasion de cette session d’examen, des jeunes filles en niqab devaient signer un engagement selon lequel elles découvriraient leur visage une fois arrivées dans la salle d’examen, faute de quoi l’entrée leur était refusée. L’incident s’est produit à l’intérieur du campus (interdit à la presse) à la suite de l’expulsion d’une étudiante qui refusait d’ôter son niqab, ont rapporté des témoins.

Des dizaines de manifestants, en majorité non étudiants, selon la direction de la faculté, organisent depuis le 28 novembre un sit in permanent dans l’enceinte des bâtiments et perturbent le déroulement des cours, ce qui avait entraîné la fermeture administrative de l’établissement. Début janvier, un accord avait été trouvé pour sa réouverture et l’organisation des examens, mais les manifestants sont restés sur place.

Le gouvernement critiqué

Depuis le début de cette affaire, l’administration et le corps enseignant ont dénoncé l’ « inertie » de leur ministère de tutelle dans le gouvernement islamiste. « Le gouvernement Jebali nous laisse face à la terreur et à la violence, les enseignants sont les seuls à faire le sale boulot », s’est indignée mardi une enseignante, Fadila Laouini.

Lundi, dans un discours devant l’Assemblée nationale constituante, le Premier ministre Hamadi Jebali avait pourtant déclaré que son gouvernement était déterminé à « faire appliquer la loi » contre les « sit in sauvages », citant notamment les universités. Le président de la République Moncef Marzouki a de son côté condamné mardi les incidents à la faculté, et s’est prononcé pour « la neutralité de l’université qui doit rester loin des conflits confessionnels et politiques ».

Source: “Jeune Afrique” Le 25-01-2012

Lien. http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAWEB20120125095708/tunisie-manifestation-laicite-democratietunisie-des-salafistes-evacues-de-l-universite-de-la-manouba-pres-de-tunis.html


Tunisie: Hammadi Jebali nous rappelle les discours d’il y a un an

A l’Assemblée Constituante, le chef du gouvernement, Hamadi Jebali a affirmé, mardi, que le pays est actuellement à la croisée des chemins, ce qui commande aux partis politiques qu’ils soient dans le gouvernement ou dans l’opposition à resserrer les rangs. Cet appel aux partis de travailler ensemble afin d’instaurer « une légitimité consensuelle » qui permet de relever les défis, est peut-être l’unique point positif de la déclaration de M. Jebali dans sa réponse aux interrogations des constituants. En effet, dans ses autres réponses et notamment celle relative au laxisme du gouvernement et la non-application de la loi face aux sitinneurs M. Jebali n’a pas apporté de réponses claires et n’a pas rassuré les constituants et par ricochet les tunisiens ! A la fois flou et mou quand il s’agit de la sécurité du pays, le chef du gouvernement indique « si on appliquait la loi on sera accusé de retour à la dictature et si on évite ce choix on est accusé de laxisme ». Il s’agit là « d’une équation difficile » à laquelle le gouvernement provisoire aimerait trouver une solution, a-t-il dit. Toujours sur le sujet de la situation sécuritaire, M. Jebali tombe encore plus bas et nous rappelle les discours d’il y a un an. En effet, pour faire en sorte que les tunisiens prennent conscience du danger de la situation, M. Jebali n’a pas trouvé mieux que de désigner un « ennemi à combattre ». Et le nom est vite trouvé. Il s’agit des milices du RCD ! « Le danger réside dans le risque de voir se reconstituer les anciennes milices du parti dissous (RCD) à l’intérieur et à l’extérieur du pays » a mis en garde M. Jebali, évoquant « des financements et un appui de certaines parties ». Et Rebelotte on se croirait en janvier 2011. Bien qu’il n’est pas possible d’évaluer l’action du gouvernement au bout de quelques semaines, Une chose est sûre, M. Jebali et son équipe doivent assumer pleinement leur responsabilité et apporter en urgence des solutions sécuritaires à même de calmer et de rassurer le tunisien.

Source. ”Espace manager” Le 25-01-2012

Lien. http://www.espacemanager.com/politique/tunisie-hammadi-jebali-nous-rappelle-les-discours-d-il-y-a-un-an.html

 


Tunisie. Jebali se défend et dénonce des semeurs de troubles

«Nous sommes devant de grands défis économiques, sociaux, sécuritaires et en matière de développement», a déclaré, mardi à l’Assemblée constituante Bardo, Hamadi Jebali.

Selon le chef du gouvernement provisoire – qui a pris le temps qu’il faut pour expliquer aux constituants les difficultés que traverse actuellement la Tunisie -, le pays est à la croisée des chemins, et il est impératif que tous les partis au gouvernement ou dans l’opposition resserrent les rangs. Il était temps de travailler la main dans la main pour pouvoir instaurer «une légitimité consensuelle» permettant de relever les défis posés et d’assurer le succès de l’expérience démocratique naissante en Tunisie.

En réponse aux interrogations des élus du peuple sur la situation difficile actuelle, M. Jebali a déclaré que son gouvernement assume pleinement sa responsabilité pour ce qui est des choix adoptés dans cette étape de transition.

«Nous sommes devant de grands défis économiques, sociaux, sécuritaires et en matière de développement», a-t-il rappelé, appelant l’opposition à éviter les surenchères et de continuer à accuser le gouvernement d’être responsable de la hausse des taux de chômage et de la pauvreté dans le pays. Et d’avertir que «l’échec du gouvernement mènera à un échec du processus de la révolution en Tunisie».

M. Jebali a, par la même occasion, appelé l’ensemble des Tunisiens à contribuer aux efforts pour trouver des solutions aux problèmes qui se posent.

Un gouvernement hésitant

En réponse aux critiques adressées au gouvernement pour n’avoir pas appliqué la loi face aux sit-in, M. Jebali a expliqué: «Si on appliquait la loi on serait accusé de retour à la dictature et si on évitait ce choix on serait accusé de laxisme». Il s’agit là «d’une équation difficile» à laquelle le gouvernement provisoire aimerait trouver une solution, a-t-il dit.

Evoquant le dossier des personnes impliquées dans des affaires de corruption sous l’ancien régime, M. Jebali a indiqué qu’il s’agit d’un dossier complexe qui ne peut être examiné que par la justice dans le cadre d’un procès équitable. A cet égard, le chef du gouvernement provisoire a souligné qu’il n’a été possible de répertorier que 250 millions de dinars alors qu’on prévoit un total de 5 milliards de dollars.

 

M. Jebali a dénoncé, dans ce contexte, le manque de coopération des pays européens et arabes rappelant la décision de son gouvernement de charger des magistrats spécialisés ainsi que des bureaux d’avocats pour assurer le suivi de ce dossier.

Le chef du Gouvernement a dénoncé, dans ce contexte, le manque de coopération des pays européens et arabes rappelant la décision de son gouvernement de charger des magistrats spécialisés ainsi que des bureaux d’avocats pour assurer le suivi de ce dossier.

Qui se cache derrière les troubles?

A propos des sit-in et des troubles dans les régions, pas de réponse claire de la part de M. Jebali qui accuse plusieurs parties sans nommer aucune. Il a toutefois souligné que, malgré «une amélioration» de la situation sécuritaire, certains sit-in se poursuivent dont celui de la région de Mateur où 6.000 postes d’emploi sont menacés, accusant sans le nommer «un syndicaliste proche de l’ancien régime corrompu» d’être l’instigateur de ce mouvement de protestation.

«Le danger réside dans le risque de voir se reconstituer les anciennes milices du parti dissous (Rcd) à l’intérieur et à l’extérieur du pays», a mis en garde M. Jebali, évoquant «des financements et un appui de certaines parties».

«Les Tunisiens sont appelés à faire preuve de cohésion autour des objectifs de la révolution qui sont éternels et non pas autour du gouvernement qui n’est que de passage», a-t-il dit.

Le gouvernement présentera, lors de l’examen du projet de budget en mars prochain, un programme détaillé, a annoncé M. Jebali tout en assurant la mobilisation des financements nécessaires.

Source. “Kapitalis” Le 25-01-2012

Lien. http://www.kapitalis.com/fokus/62-national/7976-tunisie-jebali-se-defend-et-denonce-des-semeurs-de-troubles.html


Tunisie – Sadok Chourou persiste sur ses déclarations haineuses

Sadok Chourou, député d’Ennahdha, a créé la polémique suite à son intervention lors de la séance de lundi après-midi 23 janvier 2012. En effet, s’appuyant sur un verset du Coran, M. Chourou a demandé à sévir contre les sit-inneurs et les bloqueurs qui doivent être punis, selon ce verset, par mort, par crucifixion, par démembrement ou bannissement, incitant de ce fait à la haine, selon certains députés. Dans une déclaration à Mosaïque Fm mardi, le député a persisté sur ses dires expliquant que «c’est juste un simple constat de ce qui se passe maintenant : ce n’est pas un appel à la haine mais un appel à mettre fin à ces faits qui sont un crime envers le peuple et méritent un châtiment des plus sévères. Mohamed El Hamdi, député du PDP, a condamné les propos de Sadok Chourou qui, selon lui, incitent à la haine et le peuple à intervenir dans ce qui ne peut être que la mission des forces de l’ordre qu’elles seules possèdent la légitimité d’user de la force pour mettre fin aux dépassements. En outre, M. El Hamdi a indiqué que pour lui les bloqueurs et les sit-inneurs, malgré certains dépassements, ne sont pas ni contre Dieu ou le prophète, ni contre la révolution et ne méritent pas la mort, la crucifixion, ou autre châtiments pour autant ! Pour sa part, Samir Dilou a précisé que le gouvernement n’a pas besoin de « Fatwa » pour légitimer la violence et sa politique repose sur ce qu’elle annonce et non pas sur ce qui est annoncé à la Constituante, soulignant que chaque député est responsable de ses dires. Maya Jeribi a, pour sa part, affirmé qu’il n’y avait aucun malentendu et que les propos de Sadok Chourou étaient clairs et dirigés contre les sit-inneurs, et qu’en cela, ils étaient condamnables sans ambigüité, appelant le parti au pouvoir à prendre ses responsabilités quant aux propos tenus par ses élus. Elle a, en outre, déclaré que ces personnes que Sadok Chourou appelle à punir sévèrement sont ceux qui ont fait la révolution et qu’ils n’étaient bons, semble-t-il, que lorsqu’il était question des élections.

Source: “Business News” Le 24-01-2012

Lien: http://www.businessnews.com.tn/Tunisie-%C3%82%E2%80%93-Sadok-Chourou-persiste-sur-ses-d%C3%83%C2%A9clarations-haineuses,520,28939,3


Tunisie : Que faire des archives de la police politique ?

La vidéo-scandale d’Ali Laârayedh a suscité l’intérêt de certains organismes de la société civile dont «Le Labo Démocratique». Très active sur la question des archives de la police politique, l’association revient à la charge avec un communiqué, publié le soir du samedi 21 janvier et signé par Farah Hached, avocate et présidente du «Labo Démocratique».

Suite à la diffusion sur Internet de la vidéo du Ministre de l’Intérieur, le Labo’ Démocratique tient à rappeler l’urgence d’adopter une réglementation en ce qui concerne les archives de la police politique, et ce en se basant sur 8 principes essentiels:

1) La question des archives de la police politique doit être abordée avec sérénité et faire l’objet d’une réglementation adéquate et adaptée.

2) Cette réglementation doit être adoptée le plus tôt possible car plus le temps passe, moins les nouveaux gouvernants font l’effort de régler cette question.

3) Cette réglementation doit se faire en concertation entre toutes les parties : autorités publiques, société civile, experts, partis/mouvements politiques.

4) La question des archives de la police politique doit être séparée de l’idée de vengeance. Elle doit être liée à la notion de transparence lorsqu’il s’agit de personnes publiques : les citoyens ont le droit de savoir si la personne qu’ils veulent élire était ou non liée (politiquement ou économiquement) à l’ancien régime.

5) La vie privée des citoyens (y compris des hommes et femmes publics), qui se trouve dans ces archives, doit être protégée contre la curiosité malsaine et les utilisations malveillantes, qu’elles soient à des fins politiques ou des fins de chantage financier.

6) Les citoyens doivent avoir le droit d’accéder à leur propre dossier pour consultation s’ils le souhaitent.

7) Les personnes qui s’occupent de ces archives doivent être soumises à des procédures strictes correspondant aux standards préconisés par les Nations-Unies, et dignes d’une démocratie.

8) Un système de classification moderne doit être mis en place pour préserver la sécurité de l’Etat et des citoyens tout en établissant un climat de confiance et de transparence.

Le Labo’ Démocratique est un incitateur d’idées qui veut modestement contribuer à la transition démocratique en créant un débat constructif sur une question essentielle pour notre démocratie. Nous avons, avec l’aide du Centre de Genève pour le Contrôle Démocratique des Forces Armées (DCAF), organisé une conférence-exposition et une projection d’un documentaire inédit sur le thème : « les archives de la police politique : un défi pour la transition démocratique ? » les 12 et 13 novembre 2011.

Dés le mois de mars, nous commencerons un travail approfondi avec un groupe restreint d’experts (psychologue, historien, juriste), militants des droits de l’homme (LTDH, CNJT, Nawaat) et représentants des autorités publiques (police, défense, justice) afin d’aboutir à des recommandations concrètes que nous transmettrons à l’Assemblée Constituante.

Source: “Tekiano” Le 25-01-2012

Lien: http://www.tekiano.com/ness/20-n-c/4693-tunisie-que-faire-des-archives-de-la-police-politique-.html


La chronique de Youssef SEDDIK

Propos ouverts à «Si» Rached GHANNOUCHI… « Il faut l’égorger !… »

 
La phrase, cet appel au meurtre, a fusé au milieu d’un énorme Brouhaha quand j’ai quitté le Tribunal de premier Instance où s’est ouvert le procès de la chaîne Nessma et de son directeur. Je reconnais avoir entendu, des voix plus timides : « Laissez-le passer, ne le touchez pas… ». Mais, je n’ai pas fait trois pas qu’une véritable chorale a entonné mes prénom et nom sciemment déformés pour « la cause » : « Youssef Sandiq !…
Youssef Sandiq (Sandiq : littéralement zoroastrien, dénomination générique à l’âge arabe classique pour désigner tous les penseurs, hommes de lettres ou simples sujets du Califat qui ne suivent pas l’idéologie dominante de l’Islam officiel). Et c’est là où j’ai été encerclé par des jeunes qui me bombardant de questions qui n’attendant nulle réponse, qui exprimant son étonnement de n’avoir devant lui que cette personne âgée qui n’affiche aucune espèce d’agressivité. J’ai décidé d’affronter la meute, malgré les injonctions de mon jeune accompagnateur qui me pressait de quitter le cercle et de m’éloigner. Ignorant les multiples voix qui me sermonnaient, me demandaient de retourner à Dieu et de me repentir, qui me conseillaient d’aller rendre visite au Cheikh Rached Ghannouchi pour chercher auprès de lui « le chèque de la repentance » ( çakkat-tawba ) et j’ai empoigné de l’épaule celui qui m’a posé enfin un reproche précis et a semblé attendre une réponse : « Comment vous n’avez pas peur de la tourmente de l’au-delà ( Adhâb al-âkhirâ ), en comparant l’Envoyé de Dieu à Shakespeare, j’ai commencé à m’expliquer avec cette patience, cette passion dont seuls les vieux enseignants connaissent encore les secrets : « Je n’ai jamais dit ça, et je ne peux l’avoir dit ! J’ai tout simplement dit que Dieu inspire à tous et à tout, ce qu’il est et ce qu’il produit ; il inspire son comportement à la fourmi, le séisme au sol, le miel à l’abeille, la parole devenant pour nous divine à ses Envoyés. Le poète génial tel que Shakespeare est parmi ces innombrables cas de l’inspiration divine généralisée qui est le monde. L’Envoyé porteur d’une parole que tel ou tel peuple considère comme divine construit une religion et accumule des adeptes et n’a plus rien à voir de ce fait avec le poète qui ne prétend à rien de semblable… ». Le jeune homme semblait s’attendrir et même s’adoucir, ma main lui serrait toujours l’épaule. Mais un autre énergumène, craignant que ce compagnon succombe à la netteté de l’exposé, intervient : « Ne l’écoute pas, ce n’est qu’une bûche de l’enfer… » Je ne renonçais pas à échanger seulement de tactique, abandonnant l’exposé théorique pour l’information que je considérais massue : « Vous n’avez pas honte de traiter ainsi un homme de l’âge de vos grands-pères qui, plus et, a traduit les Hadiths du Prophète Muhammad et le Mûatta de l’Imam Malek. Et c’est là que j’ai perdu définitivement désespérément mon jeune interlocuteur. Celui-ci, totalement récupéré par les siens m’a décidé de jeter l’éponge, de ne plus rien essayer, et de répondre enfin aux pressions de mon accompagnateur pour quitter les lieux et assurer ma sécurité. Car, à la citation de ces deux points de ma bibliographie, il m’a laissé coi en me lançant : « Comment osez-vous traduire les propos du prophète et l’Imam Malek alors que vous êtes imberbe ( Halîq) ».
 
Voilà « Si » Rached la description exacte, les propos fidèlement traduits, style reportage vécu, d’une scène comme s’en reproduisent depuis des mois partout dans les quartiers et les villes de notre pays. J’ai prévenu depuis longtemps, du grave péril qu’on court en Tunisie de tels phénomènes qui sont essentiellement dus à ceux qui se croient ou se disent à tort ou à raison vos adeptes et les adeptes du mouvement que vous avez fondé. Votre silence et celui de vos collaborateurs et élites de votre mouvement ont rarement pris l’initiative de dénoncer fermement, clairement, pédagogiquement et abondamment de tels agissements, pseudo-pensées et fausses dévotions. Avant les élections du 23 octobre qui vous ont donné une part prépondérante du pouvoir, et pratiquement la totalité du pouvoir exécutif, j’avais mis vos tergiversations, vos silences sur le compte d’une tactique électorale qui ne pouvait se permettre de perdre des voix même quand elles sont « pourries ». Aujourd’hui, quand vous et votre mouvement tenez la barre d’un bateau ivre, vous n’avez pas le droit de le laisser chavirer et sombrer par le fait que ces groupes qui ne connaissent de l’Islam que la vocifération et la haine. Montez sur le pont, si vous aimez la Tunisie comme vous le dites et comme je vous crois, montez de vos cales feutrées où on vous voit échanger avec les seuls Youssef Karadhaoui et grand « pop » de l’Islam dogmatique, et débarrassez-vous, débarrassez-nous de ce cancer qui risque non seulement de « métastaser » la nation, ses institutions et la paix civile mais aussi l’Islam dont vous dîtes être le rénovateur en ces temps de confusion, de violence et d’irrationalité entretenue.
 
(Source: “Le Temps” (uotidien – Tunisie) le 24 janvier 2012)

 

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