23 janvier 2009

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TUNISNEWS

8 Úme année, N° 3167 du 23.01.2009

 archives : www.tunisnews.net  


CNLT: Le Coordinateur de la COMDH refoulĂ© Ă  l’aĂ©roport de Tunis AFP: Djerba: un tĂ©moin confirme la proximitĂ© entre Ganczarski et ben Laden AFP: Tunisie: aggravation du dĂ©ficit commercial en 2008 (bilan) Xinhua: La Tunisie mobilise 29,85 millions de dollars pour la promotion du tourisme en 2009 AFP: Gaza: Tunis envoie 16 tonnes de mĂ©dicaments et d’Ă©quipements sanitaires AFP: Lampedusa: manifestation contre un centre d’identification des clandestins AFP: Dominique Schroeder Le HCR est prĂ©occupĂ© par la situation humanitaire Ă  Lampedusa, en Italie Heritage: LibertĂ© Ă©conomique dans le monde: Le classement de la Tunisie dans l’index de 2009 de « Heritage Foundation » Tunisiawatch: Habib Bourguiba Ă©tait-il franc-maçon ? Bourguiba Ă©tait-il franc-maçon?  – Un entretien avec l’historien Adel Ben Youssef CETRI: Un islamisme ouvert sur sa gauche : – L’émergence d’un nouveau tiers-mondisme arabe ?


Liste actualisĂ©e des signataires de l’initiative du Droit de Retour : http://www.manfiyoun.net/fr/listfr.html Celles et Ceux qui veulent signer cet appel sont invitĂ©s Ă  envoyer leur: Nom, Pays de rĂ©sidence et AnnĂ©e de sortie de la Tunisie sur le mĂ©l de l’initiative : manfiyoun@gmail.com
 

 
Conseil National pour les Libertés en Tunisie
 
Tunis le 23 janvier 2009

Le Coordinateur de la COMDH refoulĂ© Ă  l’aĂ©roport de Tunis

 
Ce matin 23 janvier Abdelhamid Amine, coordinateur de la Coordination maghrĂ©bine des organisations de dĂ©fense des droits humains (COMDH) a Ă©tĂ© refoulĂ© Ă  son arrivĂ©e Ă  l’aĂ©roport de Tunis Carthage Ă  11.30 par la police des frontiĂšres ; Aucune raison n’a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e par les autoritĂ©s tunisiennes Ă  monsieur Amine pour cet acte hostile, les autoritĂ©s se sont contentĂ©s d’affirmer qu’il Ă©tait persona non grata ! Monsieur Amine venait Ă  Tunis dans le cadre d’une mission de la COMDH pour rencontrer la sociĂ©tĂ© civile ainsi que les autoritĂ©s tunisiennes Ă  l’invitation des membres tunisiens de la COMDH , la Ligue tunisienne de dĂ©fense des droits de l’homme et le Conseil national pour les libertĂ©s en Tunisie. Le second membre de la dĂ©lĂ©gation, Mohamed SMAÏN reprĂ©sentant de la LADDH est arrivĂ© la veille et a pu entrer dans le territoire tunisien. Cette mission avait Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©e lors de la 5Ăšme rĂ©union du bureau de la CMODH tenue Ă  Rabat le 19 dĂ©cembre dernier. Cette tournĂ©e, qui a dĂ©jĂ  dĂ©marrĂ© au Maroc le 17 janvier dans de bonnes conditions, avait pour objectif de rencontrer les sociĂ©tĂ©s civiles des 5 pays du Maghreb et de prĂ©senter la COMDH aux autoritĂ©s et aux diffĂ©rents partenaires. Le CNLT –         DĂ©nonce vigoureusement cet acte hostile injustifiĂ© de la part des autoritĂ©s tunisiennes qui violent ainsi les accords de l’Union du Maghreb Arabe (UMA) qui garantit la libre circulation des citoyens du grand Maghreb sur tout le territoire des 5 pays. –         Il considĂšre cet acte indigne comme un affront fait Ă  la sociĂ©tĂ© civile tunisienne et un manquement Ă  la tradition d’hospitalitĂ© des Tunisiens. –         Il assure monsieur Abdelhamid Amine de son entiĂšre solidaritĂ© et lui promet qu’un jour viendra oĂč la Tunisie libĂ©rĂ©e de la dictature l’accueillera chaleureusement, comme elle le fera pour tous les amis de la Tunisie maghrĂ©bins et europĂ©ens qui ont subi le mĂȘme sort auparavant (Patrick Beaudouin, Donatella Rovera, Robert MĂ©nard, Amina Bouayach et d’autres
.) –         RĂ©affirme sa dĂ©termination Ă  Ɠuvrer pour l’édification du Maghreb des droits de l’homme et des peuples dans le cadre de la COMDH. Pour le Conseil La porte parole Sihem Bensedrine

 

Djerba: un témoin confirme la proximité entre Ganczarski et ben Laden

 
AFP, le 23 janvier 2009 Ă  17h15 Par Michel MOUTOT PARIS, 23 jan 2009 (AFP) – Le tĂ©moignage de l’islamiste australien repenti Jack Roche, devant la cour d’assises spĂ©ciale de Paris, a mis vendredi en lumiĂšre la proximitĂ© avec Ben Laden de l’Allemand converti Ă  l’islam Christian Ganczarski, sans toutefois rien apporter sur l’attentat de Djerba. InterrogĂ© par vidĂ©o-confĂ©rence depuis la ville australienne de Perth, oĂč il est en libertĂ© conditionnelle aprĂšs avoir Ă©tĂ© condamnĂ© Ă  neuf ans de prison dont il a purgĂ© la moitiĂ©, Jack Roche n’a apportĂ© aucun Ă©lĂ©ment sur l’accusation principale contre Ganczarski, la complicitĂ© dans l’attentat contre la synagogue de Djerba (Tunisie) en 2002. Il a en revanche dressĂ© le portrait d’un jihadiste convaincu, bien introduit dans l’organisation dont il connaissait et frĂ©quentait les dirigeants. L’Australien a notamment racontĂ© son sĂ©jour dans un camp d’Al-QaĂŻda en Afghanistan, en mars 2000, au cours duquel il affirme que Ganczarski lui a servi de guide, avant de s’assoir pour dĂźner Ă  la gauche de ben Laden. “Il avait de toute Ă©vidence des liens Ă©troits avec ben Laden, parce qu’il s’est assis prĂšs de lui et lui a transmis la petite note que Khaled Cheikh Mohammed” (cerveau prĂ©sumĂ© des attentats du 11 septembre 2001) m’avait donnĂ© pour lui” a-t-il dĂ©clarĂ©, avec l’aide d’un interprĂšte. “Il m’a aussi semblĂ© proche de Khaled Cheikh Mohammed, que j’avais rencontrĂ© en sa compagnie dans sa maison, Ă  Karachi”, a ajoutĂ© Jack Roche. Lors de ce voyage entre Karachi et le camp d’Al-QaĂŻda prĂšs de Kandahar, via la ville pakistanaise de Quetta, Khaled Cheikh “m’a dit que Ganczarski allait m’escorter”, a ajoutĂ© l’Australien. “Il avait les contacts, j’avais l’impression qu’il faisait le trajet souvent. PrĂšs de Kandahar, c’est l’un des fils de ben Laden qui est venu nous chercher Ă  un poste des talibans”. “J’ai passĂ© quelques jours avec lui: il m’a semblĂ© qu’il faisait le lien entre l’Europe et l’Afghanistan… Il avait aussi des compĂ©tences en informatique et en radiocommunications”, a-t-il ajoutĂ©. Il Ă©tait aussi l’un des rares autorisĂ©s Ă  porter une arme Ă  la ceinture en prĂ©sence du “cheikh Oussama”. Comme de coutume dans l’action clandestine islamiste, les deux hommes ne se connaissaient que par des pseudonymes: celui qu’utilisait Ganczarski Ă©tait “Abou Mohammed” (pĂšre de Mohammed). Debout dans son box aux vitres blindĂ©es, filmĂ© en gros plan pour que l’image parte Ă  l’autre bout du monde, Christian Ganczarski a lancĂ© Ă  Jack Roche: “Suis-je la personne que vous connaissez sous le nom d’Abou Mohammed ?”. “Yes”, a rĂ©pondu l’Australien. “Et bien moi, je ne vous connais pas” a affirmĂ© l’accusĂ© en allemand, traduit par une interprĂšte. Selon Me SĂ©bastien Bono, l’avocat de l’Allemand, le tĂ©moignage de Jack Roche est sujet Ă  caution: il le soupçonne d’avoir Ă©changĂ© une rĂ©duction de sa peine contre un accord pour collaborer avec la police et la justice australienne. Mais l’Australien de 55 ans, nĂ© en Grande-Bretagne et converti Ă  l’islam au dĂ©but des annĂ©es 90 pour combattre un problĂšme d’alcool, a fermement dĂ©menti. Si ce tĂ©moignage n’apporte rien concernant l’attentat de Djerba, dont Christian Ganczarski est accusĂ© d’avoir donnĂ© le feu vert par tĂ©lĂ©phone, il pourrait s’avĂ©rer crucial pour Ă©tayer l’autre chef d’inculpation, celui “d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste”. Christian Ganczarski est jugĂ© depuis le 5 janvier Ă  Paris avec deux autres hommes pour leur complicitĂ© prĂ©sumĂ©e dans l’attentat de Djerba en avril 2002, qui avait fait 21 morts dont 14 touristes allemands, 5 Tunisiens et 2 Français. C’est la prĂ©sence de Français parmi les victimes qui a permis le dĂ©clenchement d’une procĂ©dure en France.


Tunisie: aggravation du déficit commercial en 2008 (bilan)

AFP 23.01.09 | 16h18 Le dĂ©ficit commercial chronique de la Tunisie s’est Ă©tabli Ă  6,6 milliards de dinars (1 dinar= 0,56 euro) en 2008 contre 5,02 milliards de dinars en 2007, selon un bilan officiel publiĂ© vendredi Ă  Tunis. En 2008, les importations ont augmentĂ© de 23,7% (30,2 milliards de dinars) en 2008 et les exportations de 21,8% (23,63 milliards dinars), soit un taux de couverture de 78,2% (79,4% en 2007), selon les chiffres du ministĂšre du Commerce. L’aggravation du dĂ©ficit commercial est dĂ» notamment Ă  la hausse des prix des hydrocarbures et des produits alimentaires, outre une augmentation du volume des importations de matiĂšres premiĂšres et produits semi-finis. Le ministĂšre prĂ©voit un ralentissement des exportations en 2009 sous l’effet d’un recul attendu de la demande dans le contexte de la crise mondiale. Les exportations devraient progresser seulement de 8,7% en 2009 et les importations augmenteraient de 8,9%, selon les projections du ministĂšre. Le Gouvernant table sur une diversification des marchĂ©s et des opportunitĂ©s d’ouverture sur les marchĂ©s maghrĂ©bins et africains, la Tunisie effectuant 79% de ses Ă©changes avec l’Union europĂ©enne, la France en tĂȘte. Le taux d’inflation s’est situĂ© Ă  5% en 2008, l’objectif du gouvernement Ă©tant de le ramener Ă  3% cette annĂ©e.

La Tunisie mobilise 29,85 millions de dollars pour la promotion du tourisme en 2009

2009-01-23 08:35:57       TUNIS, 22 janvier (Xinhua) — La Tunisie a mobilisĂ© 40 millions de dinars (29,85 millions de dollars) pour la promotion du  tourisme tunisien au cours de l’annĂ©e 2009, a annoncĂ© jeudi le  ministre tunisien du Tourisme KhĂ©lil Lajimi.       S’exprimant au cours d’un sĂ©minaire national sur “l’Ă©conomie Ă  la lumiĂšre des mutations internationales”, KhĂ©lil Lajimi a fait  savoir que cette dĂ©marche s’inscrit dans le cadre campagne de  promotion complĂ©mentaire au profit du tourisme tunisien en vue de  mieux faire connaĂźtre la destination Tunisie en Europe.       En abordant les probables rĂ©percussions de la crise financiĂšre internationale actuelle sur le secteur touristique en Tunisie, le  ministre a dĂ©clarĂ© “jusqu’Ă  prĂ©sent il n’y pas de diminution des  rĂ©servations mais plutĂŽt un manque de visibilitĂ©”.       Il a prĂ©cisĂ© que le touriste europĂ©en est devenu Ă  la lumiĂšre  de la crise financiĂšre Ă  l’affĂ»t des destinations touristiques les plus compĂ©titives (dont la Tunisie) en choisissant les  rĂ©servations et les voyages “derniĂšre minute” au dĂ©triment des  rĂ©servations Ă  l’avance qui se font parfois avant 6 mois de la  date du voyage.       Le ministre tunisien a conseillĂ© les professionnels du secteur sur la nĂ©cessitĂ© de “prĂ©server la qualitĂ© des services, de ne pas  baisser les prix et de rĂ©sister face aux agences de voyages et  tours opĂ©rators” qui essayent d’ exploiter la situation pour  diminuer les prix.       En dĂ©pit du ralentissement de ses marchĂ©s europĂ©ens, le  tourisme qui est l’un des secteurs Ă©conomiques clĂ©s de la Tunisie  et le deuxiĂšme plus grand employeur aprĂšs l’agriculture, a montr Ă© une croissance rĂ©guliĂšre en 2008, avec des recettes records.       Les chiffres officiels publiĂ©s le mois dernier ont montrĂ© que  les recettes touristiques de la Tunisie ont augmentĂ© de 9% sur un  an pour atteindre environ 1,8 milliard de dollars sur les neuf  premiers mois de 2008.       Le secteur du tourisme, qui constitue Ă©galement pour la  Tunisie la plus grande source de revenu en devises Ă©trangĂšres,  emploie prĂšs de 16,6% de la main-d’oeuvre tunisienne avec plus de  500.000 emplois en 2008.       Le tourisme contribue directement Ă  prĂšs de 7% de l’ensemble  du produit intĂ©rieur brut (PIB).Toutefois, selon le Conseil  Mondial du Tourisme (WTTC), lorsque l’impact total du secteur sur  la croissance Ă©conomique est pris en compte, le tourisme ainsi que les recettes affiliĂ©es atteignent 17,7% du PIB total de la Tunisie, ce qui reprĂ©sente 6,45 milliards de dollars.

Gaza: Tunis envoie 16 tonnes de mĂ©dicaments et d’Ă©quipements sanitaires

AFP 23.01.09 | 11h50  La Tunisie a envoyĂ© un troisiĂšme avion d’aide humanitaire composĂ©e de 16 tonnes de mĂ©dicaments et Ă©quipements sanitaires pour secourir les Palestiniens Ă  Gaza suite Ă  l’offensive israĂ©lienne, a rapportĂ© vendredi l’agence tunisienne TAP. Cette aide vise Ă  “allĂ©ger les souffrances endurĂ©es par les frĂšres palestiniens qui vivent des conditions sanitaires et humanitaires dramatiques depuis le dĂ©clenchement de l’offensive israĂ©lienne”, a indiquĂ© l’agence. Elle a ajoutĂ© que l’envoi de ce troisiĂšme avion d’aide “traduit la sollicitude accordĂ©e depuis des dĂ©cennies par le gouvernement et le peuple tunisiens Ă  la cause palestinienne”. Tunis avait acheminĂ© en janvier deux aides humanitaires pour la population de Gaza et organisĂ© des collectes de sang et de fonds. DĂ©but janvier, des manifestations autorisĂ©es avaient rassemblĂ© des milliers de Tunisiens contre les opĂ©rations israĂ©liennes dans la bande de Gaza.

 
Dominique Schroeder
Agence France-Presse Paris AprĂšs l’alimentation, les cosmĂ©tiques, les vĂȘtements visibles et autres Ă©lĂ©ments de notre environnement, le bio se glisse dans les petites culottes et balconnets pour une lingerie qui se veut Ă  la fois Ă©co-responsable et sexy. «Si vous ne savez pas ce qu’il y a dans votre petite culotte, devriez-vous la porter ?», demandait un fabricant dans un court film diffusĂ© au salon international de la lingerie qui s’est achevĂ© mercredi Ă  Paris. La marque anglaise Eco-Boudoir entendait ainsi attirer l’attention sur une industrie restĂ©e trĂšs polluante. Selon elle, pour une petite culotte, l’empreinte Ă©cologique est de 18 kilos d’Ă©quivalent carbone et 20 000 litres d’eau sont nĂ©cessaires pour fabriquer un kilo de coton, lui-mĂȘme cultivĂ© avec d’innombrables pesticides. La lingerie et le «loungewear», ces vĂȘtements douillets que l’on porte pour flĂąner chez soi, s’affirment de plus en plus souvent «écolo». Mais surtout pas «baba», comme dans les annĂ©es 70. L’heure est Ă  la sophistication, avec des finitions travaillĂ©es, des formes sexy. «Aujourd’hui, ĂȘtre green, c’est glam», affirme Karine Lebreton, du bureau de style Promostyl. C’est en tous cas le credo d’Eco-Boudoir: «nous avons vraiment voulu crĂ©er une collection de lingerie complĂštement naturelle, complĂštement Ă©cologique, qui soit saine, belle, sexy et qui fasse mentir tous les prĂ©jugĂ©s sur le dĂ©veloppement durable», explique sa fondatrice, Jenny White. La griffe propose slips, soutiens-gorge et autres nuisettes dĂ©licates que rien ne distingue des produits exposĂ©s ailleurs, si ce n’est leur composition: uniquement de la soie et du coton bio, du bambou ou une fibre de bois. La lingerie est fabriquĂ©e en Grande-Bretagne pour Ă©viter la pollution due au transport et les imprimĂ©s sur soie sont rĂ©alisĂ©s selon un procĂ©dĂ© utilisant moins d’eau que les mĂ©thodes traditionnelles. De son cĂŽtĂ©, Jina Luciani, qui a créé la marque Occidente il y a sept mois, ne propose que des piĂšces en coton bio issu du commerce Ă©quitable, colorĂ©es avec des teintures respectueuses de l’environnement. Sa petite sociĂ©tĂ© propose des nuisettes, soutiens-gorge bordĂ©s de dentelle, bolĂ©ros rĂ©versibles, culottes bouffantes, leggings et pyjamas dans des coloris doux, avec des boutons en bois recyclĂ©. «C’est plus mignon que sexy», reconnaĂźt Jina Luciani. «La prioritĂ© premiĂšre, c’est que ça soit confortable», l’objectif n’est pas de sĂ©duire mais d’«ĂȘtre bien avec soi» ou entre copines, dit-elle. Les vĂȘtements «sont fabriquĂ©s en Tunisie par une sociĂ©tĂ© familiale, conformĂ©ment Ă  une charte Ă©thique». La crĂ©atrice envisage de dĂ©velopper sa ligne et d’utiliser d’autres matiĂšres «bio mais haut de gamme», par exemple «du bambou avec une touche de soie». La lingerie bio «est un marchĂ© trĂšs, trĂšs porteur, qui va s’Ă©tendre et prendre de l’ampleur», pronostique Florence Peyrichou, de Promostyl. «AprĂšs toutes ces annĂ©es de fioritures, d’excĂšs, d’extravagance, de bling-bling, de choses ultra, on a envie de revenir Ă  des choses plus douces, plus naturelles». Le fabricant de sous-vĂȘtements masculins Eminence l’a bien compris. Une ligne en coton bio «labellisĂ©e Max Havelaar» (Ă©quitable) est disponible en boutique depuis dĂ©cembre, indique Estelle Ribe, directrice des exportations. «On s’est aperçu que le consommateur est de plus en plus sensible» aux questions Ă©cologiques et de commerce Ă©quitable, explique-t-elle. Au point que la marque envisage d’Ă©toffer cette ligne bio-Ă©quitable qui pour l’instant ne comprend que des slips, shortys et tee-shirts gris, noirs ou blancs.

Le HCR est préoccupé par la situation humanitaire à Lampedusa, en Italie

Vendredi 23 janvier 2009 GENEVE – Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les rĂ©fugiĂ©s a fait part aujourd’hui de sa prĂ©occupation croissante face aux conditions auxquelles sont confrontĂ©s prĂšs de 2 000 boat people, parmi lesquels des demandeurs d’asile, actuellement entassĂ©s dans un centre de rĂ©ception sur l’üle de Lampedusa, dans le sud de l’Italie. Le centre, dont la capacitĂ© est prĂ©vue pour 850 personnes seulement, ne peut pas accueillir un nombre aussi Ă©levĂ© d’individus. De ce fait, des centaines de personnes dorment actuellement en plein air, sous des bĂąches en plastique, et la qualitĂ© de l’accueil ne peut ĂȘtre maintenue. Le centre de rĂ©ception de Lampedusa avait Ă©tĂ© Ă©tabli afin d’hĂ©berger temporairement les personnes secourues en mer, le temps que soient effectuĂ©s les prĂ©paratifs nĂ©cessaires avant leur transfert, dans le sud de l’Italie, vers divers centres mis en place pour passer leur situation et leurs besoins en revue. Jusqu’à prĂ©sent, ces dispositions Ă©taient considĂ©rĂ©es comme un modĂšle en termes de gestion responsable des flux migratoires mixtes. La pratique c onsistait Ă  accueillir les demandeurs d’asile dans des centres ouverts et leurs demandes d’asile Ă©taient examinĂ©es par la commission territoriale de dĂ©termination du statut de rĂ©fugiĂ©. En dĂ©but d’annĂ©e, le gouvernement a apportĂ© des modifications Ă  ces dispositions. En vertu de celles-ci, tous les migrants et demandeurs d’asile doivent demeurer Ă  Lampedusa jusqu’à ce que soit prise une dĂ©cision sur leur sort. La surpopulation du centre de rĂ©ception temporaire sur la petite Ăźle engendre une situation humanitaire prĂ©occupante qui complique aussi le travail du HCR et des autres organisations Ɠuvrant sur place, dans le cadre d’un projet financĂ© par le MinistĂšre de l’intĂ©rieur et la Commission europĂ©enne. « Depuis plusieurs annĂ©es, le HCR travaille Ă©troitement avec les autoritĂ©s italiennes pour amĂ©liorer le systĂšme de gestion des flux mixtes de demandeurs d’asile et de migrants arrivant Ă  Lampedusa par la mer », a expliquĂ© Pirkko Kourula, directrice du bureau pour l’Europe au HCR. « Nous lançons un appel pressant aux autoritĂ©s italiennes pour qu’elles prennent toutes les mesures nĂ©cessaires afin de gĂ©rer la situation humanitaire difficile qui est en train de se dĂ©velopper Ă  Lampedusa. » Les statistiques disponibles montrent que de nombreuses personnes arrivĂ©es Ă  Lampedusa par bateau sont originaires de Somalie et d’ErythrĂ©e. Selon les chiffres prĂ©liminaires pour 2008, quelque 75 pour cent de ceux qui sont arrivĂ©s par la mer en Italie l’annĂ©e derniĂšre ont dĂ©posĂ© une demande d’asile, et environ 50 pour cent de ceux qui ont demandĂ© l’asile se sont vu accorder le statut de rĂ©fugiĂ© ou une protection pour d’autres raisons humanitaires. FIN Pour consulter ce communiquĂ© de presse sur le site web du HCR:www.unhcr.fr/communiques
 

 

Lampedusa: manifestation contre un centre d’identification des clandestins

LAMPEDUSA (Italie) – Plus de la moitiĂ© des habitants de l’Ăźle italienne de Lampedusa (sud) ont manifestĂ© vendredi pour protester contre l’ouverture d’un centre d’identification des clandestins qui doit permettre des expulsions plus rapides, a constatĂ© un photographe de l’AFP. Quelque trois mille des six mille habitants de la petite Ăźle se sont rendus devant le centre de premier accueil oĂč se trouvent actuellement 1.677 immigrĂ©s, pour manifester leur hostilitĂ© Ă  la construction d’un nouveau centre. Jusqu’Ă  prĂ©sent, les clandestins dĂ©barquĂ©s Ă  Lampedusa n’y restaient que quelques jours avant d’ĂȘtre dirigĂ©s vers d’autres centres de rĂ©tention pour qu’il soit statuĂ© sur leur sort. Devant l’afflux d’immigrĂ©s ces derniĂšres semaines, le gouvernement a dĂ©cidĂ© d’accĂ©lĂ©rer les procĂ©dures d’expulsion. Le ministre de l’IntĂ©rieur Roberto Maroni a annoncĂ© vendredi Ă  Rome la mise en service d’un Centre d’identification et d’expulsion (CIE) des clandestins dĂ©barquĂ©s sur l’Ăźle “afin de “pouvoir procĂ©der aux rapatriements directement depuis Lampedusa”. “Le but est de boucler d’ici quelques semaines ce plan de rapatriement des clandestins dĂ©barquĂ©s Ă  Lampedusa. Depuis le 1er janvier, nous avons rapatriĂ© directement depuis Lampedusa environ 150 personnes”, des Egyptiens et des NigĂ©rians, a dĂ©clarĂ© le ministre de l’IntĂ©rieur lors d’une confĂ©rence de presse. Vendredi, 250 clandestins ont Ă©tĂ© Ă©vacuĂ©s vers d’autres centres de rĂ©tention en Italie afin de dĂ©sengorger Lampedusa, a indiquĂ© Ă  l’agence Ansa le directeur du centre Cono Galipo. “Les habitants protestent car ils Ă©taient habituĂ©s Ă  ce que le problĂšme soit traitĂ© ailleurs. Mais notre politique de fermetĂ© fera du bien Ă  tout le monde, y compris aux habitants de l’Ăźle, et sera dissuasive pour les candidats Ă  l’immigration”, a rĂ©sumĂ© M. Maroni, haut responsable du parti anti-immigrĂ©s de la Ligue du nord. Dans un communiquĂ©, le Haut Commissariat des Nations unies pour les rĂ©fugiĂ©s (HCR) a fait part vendredi de sa “prĂ©occupation croissante pour la situation humanitaire” des clandestins du centre d’accueil, qui se trouvent “dans des conditions de surpopulation extrĂȘme”. “Des centaines de personnes sont contraintes de dormir avec des bĂąches de plastique pour seul abri”, a dĂ©noncĂ© le HCR, qui appelle “les autoritĂ©s italiennes Ă  faire le nĂ©cessaire pour rĂ©soudre la situation humanitaire difficile qui s’est créée Ă  Lampedusa”. Selon le ministĂšre de l’IntĂ©rieur italien, prĂšs de 31.700 immigrants ont dĂ©barquĂ© Ă  Lampedusa en 2008, une augmentation de 75% par rapport Ă  l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente. (©AFP / 23 janvier 2009 18h51)

Liberté économique dans le monde:

Le classement de la Tunisie dans l’index de 2009 de « Heritage Foundation »

World Rank: 98

Regional Rank: 11 of 17

Tunisia’s economic freedom score is 58, making its economy the 98th freest in the 2009 Index. Its score is 2.1 points lower than last year, reflecting decreased scores in three of the 10 economic freedoms. Tunisia is ranked 11th out of 17 countries in the Middle East/North Africa region, and its overall score is just below the world average.

Tunisia has pursued economic reforms aimed at maintaining a prudent macroeconomic framework, liberalizing domestic prices and controls, and reducing the public sector’s role in economic activity. However, progress has been mixed.

Tunisia scores well in business freedom and government size. Regulation has become more efficient and streamlined. Property rights are largely respected even though the executive branch is the supreme arbiter. Tunisia scores low in trade freedom and investment freedom. Excessively high tariffs, import restrictions, and licensing requirements limit trade freedom. Protectionist investment policies and cumbersome bureaucracy stifle foreign investment. Inflation remains moderate, but the state can set prices in some circumstances. Income and corporate tax rates remain burdensome despite a tax cut in 2007. The financial sector is subject to political influence, and corruption remains significant.

Pour une vue détaillée et exhaustive, cliquez sur ce lien:

http://www.heritage.org/Index/Country/Tunisia


Habib Bourguiba était-il franc-maçon ?

La Franc-maçonnerie en Tunisie : Tout le monde en parle mais peut de donnĂ©e concrets ont pu ĂȘtre documentĂ©s jusqu‘à prĂ©sent. Si la situation d’infiltration de cette loge de notre pays aujourd’hui ne fait plus aucun doute la controverse continue sur son importance et son Ă©tendu. Dans le dernier numĂ©ro de l’hebdomadaire RĂ©alitĂ©s Adel Ben Youssef l’historien-chercheur en histoire contemporaine Ă  la FacultĂ© des Lettres de Sousse l’historien livre dans une longue interview en avant premiĂšre d’un livre qu’il est en train de prĂ©parer sur la question le rĂ©sultat de ses recherches sur la question et sur les arguments crĂ©ditant l’appartenance du prĂ©sident Habib Bourguiba Ă  cette loge depuis les nĂ©gociations de l’indĂ©pendance de la Tunisie et son initiation lorsqu’il Ă©tĂ© emprisonnĂ© Ă  l’üle La Galite depuis 1953.

Le texte reproduit plus bas représente une partie de cette interview « Maçonnerie en Tunisie : Bourguiba était-il franc-maçon? ».

Nombreuses sont les hautes personnalitĂ©s tunisiennes qui ont adhĂ©rĂ© Ă  la Franc-maçonnerie. On y trouve mĂȘme des personnalitĂ©s de proue de l’Administration et du mouvement national tunisien et mĂȘme parmi les membres de la famille beylicale. A titre d’exemple, on peut citer parmi eux MM. Slaheddine Baccouche, Mohamed Salah Mzali, (deux Premiers ministres), Tahar Ladjimi, Hmida Doulatli et Ahmed Haddad (CaĂŻds), Mohamed Aziz Ben Hassen Sakka (Khalifa)
, Abdeljelil Zaouech, Salah Belajouza, Jalloul Ben ChĂ©rifa
, (des nationalistes) et plusieurs avocats, mĂ©decins, pharmaciens et surtout instituteurs ou inspecteurs tunisiens, entre autres : Abdeljelil Ben Ali, TaĂŻeb Basly, Daly Yahia …

CĂŽtĂ© français, nombreux sont les francs-maçons français ayant pris en mains les destinĂ©es de la Tunisie sous le Protectorat. Nous pouvons citer parmi eux MM. Etienne Flandin, Stephen Pichon, Marcel Peyrouton, Jean Mons
 (rĂ©sidents gĂ©nĂ©raux), Pierre Bertholle, RenĂ© ClĂ©ment, Paul De Gourlet
, (contrĂŽleurs civils), Le Theuff (haut fonctionnaire de la Direction de l’IntĂ©rieur), Lucien Paye (Directeur de l’Instruction publique), Gabriel MĂ©rat (Directeur du CollĂšge Sadiki) etc.

Bourguiba était-il franc-maçon ?

Avant de parler de Bourguiba, il est Ă  noter qu’en 1931 le docteur Mahmoud Elmateri, en tant que SecrĂ©taire GĂ©nĂ©ral de «L’Association des Amis de l’Etudiant», prĂ©sidĂ©e par le docteur Mohamed Tlatli depuis sa crĂ©ation au dĂ©but de 1928, a dĂ» faire recours aux membres influents de la Franc-maçonnerie française en Tunisie afin qu’ils interviennent auprĂšs de la RĂ©sidence GĂ©nĂ©rale de France Ă  Tunis en vue d’obtenir l’autorisation officielle de cette association.

Pour ce qui est de Habib Bourguiba, l’historienne Julliette Bessis rapporte le fait suivant : «Habib Bourguiba s’est liĂ© avec FĂ©licien Challaye et a mĂȘme assistĂ© au CongrĂšs de la Ligue des Droits de l’Homme Ă  Vichy, en mai 1931. Est-il, comme l’affirment diffĂ©rents tĂ©moignages, affiliĂ© depuis cette Ă©poque Ă  la Franc-maçonnerie ?».

De son cĂŽtĂ© Roger Peyrefitte, dans son livre exhaustif sur la Franc-maçonnerie, ses initiĂ©s et ses obĂ©diences, retraçant habilement les activitĂ©s des loges maçonniques en Afrique du Nord avant l’indĂ©pendance, Ă©crit : «Les ateliers de Tunisie figuraient encore sur le papier, mais avaient reçu de la rue Cadet l’instruction de ne remuer ni pied ni patte. Bourguiba, qui avait Ă©tĂ© maçon, n’était pas plus favorable que Nasser, protecteur nominal de la Grande Loge d’Égypte, Ă  ce qui lui semblait une idĂ©ologie judĂ©o-chrĂ©tienne et un souvenir du colonialisme».

Mais dans le volumineux Dictionnaire de la Franc-maçonnerie, rĂ©alisĂ© sous la direction de Daniel Ligou et auquel ont collaborĂ© cent quarante spĂ©cialistes de la maçonnerie, nous en apprenons un peu plus sur le passĂ© maçonnique de Bourguiba. L’article sur l’historique de la franc-maçonnerie en Tunisie, signĂ© par H.C. et R.P., ne laisse planer aucun doute sur la fidĂ©litĂ© de Bourguiba, longtemps aprĂšs l’indĂ©pendance : «Le PrĂ©sident Bourguiba lui-mĂȘme, outre sa formation universitaire, eut, pendant une astreinte Ă  rĂ©sidence forcĂ©e, un haut fonctionnaire français franc-maçon comme compagnon et mentor politique, chargĂ© de parfaire sa formation de futur homme d’État».

Nous pensons surtout Ă  la dure pĂ©riode de son incarcĂ©ration Ă  l’üle La Galite (du 21 mai 1953 au 20 mai 1954), oĂč le leader du NĂ©o-Destour a Ă©tĂ© initiĂ© par le mĂ©decin de la Marine, un certain Laize, installĂ© sur l’üle avec sa femme et ses deux matelots de service Ă  la radio et bien entendu l’inspecteur de police Messa qui ne le quittait jamais.

Selon certains tĂ©moignages, c’est un certain Laize qui lui a fait connaĂźtre les secrets de la Franc-maçonnerie, son influence sur la scĂšne politique française et internationale. AprĂšs la rude Ă©preuve de La Galite, Habib Bourguiba a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© Ă  l’üle de Groix en Bretagne puis au chĂąteau de la FertĂ© au village d’Amilly dans le Loiret (dĂšs le 17 juillet 1954).

Durant cette pĂ©riode, le chĂąteau de la FertĂ© devint le lieu de pĂšlerinage de la plupart des Tunisiens rĂ©sidants Ă  Paris. Sur ordre des responsables de la cellule et de la fĂ©dĂ©ration destourienne de Paris et en particulier Mohamed Masmoudi, certains Ă©tudiants tunisiens, se rendaient de temps Ă  autre le soir sur des vespas vers le lieu de rĂ©sidence de Bourguiba. Ils empruntaient la porte de derriĂšre pour faire sortir le leader qui les attendait avec impatience pour le conduire au domicile du docteur Ahmed SomĂŻa oĂč se trouvaient Ă©galement ses deux amis, Raja BerraĂŻs (alias BeurĂ©) et Pierre MendĂšs France, pour discuter de l’autonomie interne de la Tunisie. Tous ces trois Ă©taient des francs-maçons notoires, membres de la mĂȘme loge «Bienfaisance et progrĂšs» de Paris. Selon le tĂ©moignage de d’un de ses anciens internes Ă  l’hĂŽpital franco- musulman de Bobigny, le docteur Ahmed SomĂŻa Ă©tait liĂ© d’une amitiĂ© sans faille avec le PrĂ©sident du Conseil et tenait Ă  rencontrer Bourguiba et connaĂźtre son point de vue avant son dĂ©part pour Tunis et son cĂ©lĂšbre discours au palais de Carthage, le 31 juillet 1954. Ce n’est pas par hasard que quelques mois seulement aprĂšs l’accĂšs de la Tunisie Ă  l’indĂ©pendance qu’on va assister Ă  la promulgation du Code de Statut Personnel (le 13 aoĂ»t 1956), la proclamation de la RĂ©publique (le 25 juillet 1957), la mise en place d’un enseignement laĂŻc et moderne (novembre 1958)


On peut aussi consulter sur le sujet :

– Khalifa Chater: La Franc-maçonnerie en Tunisie Ă  l’épreuve de la colonisation (1930-1956) – Cahiers de la MĂ©diterranĂ©e – vol. 72–2006, La Franc-Maçonnerie en MĂ©diterranĂ©e (XVIIIe – XXe siĂšcle) – L. MIZOURI: La naissance de la franc-maçonnerie dans la Tunisie prĂ©coloniale – IBLA,1994 , N° 1, vol. 57, de la page 69 Ă  la page 80 – Antoine SFEIR : La franc-maçonnerie en terres d’islam. Interview de l’hebdomadaire “l’Express” recueillis par Christian Makarian, publiĂ© le 29/05/2003

(Source : «Tunisiawatch », le blog de Mokhtar Yahyaoui, le 22 janvier 2009)

Lien : http://tunisiawatch.rsfblog.org/

La Franc- maçonnerie en Tunisie :

 Bourguiba Ă©tait-il franc-maçon? Un entretien avec l’historien Adel Ben Youssef

Par Fayçal ChĂ©rif La Franc-maçonnerie reste ambiguĂ« dans l’esprit des gens. Elle est synonyme d’intrigues, de sociĂ©tĂ© secrĂšte, de manipulation de coulisses et de complot pour tout dire. Combattue et dĂ©noncĂ©e, elle ne cesse d’attirer des questions sur ses origines, ses ramifications dans nos sociĂ©tĂ©s et surtout les buts qu’elle poursuit. Nous avons interrogĂ© un historien spĂ©cialiste sur la question pour nous Ă©clairer sur la Franc-maçonnerie en gĂ©nĂ©ral et son prolongement en Tunisie en particulier. Adel Ben Youssef est historien-chercheur en histoire contemporaine Ă  la FacultĂ© des Lettres de Sousse. Auteur d’une thĂšse de doctorat intitulĂ©e : «L’élite tunisienne moderne : le cas des Ă©tudiants tunisiens de l’UniversitĂ© française 1880-1956» (en langue arabe), avril 2000. Membre d’une unitĂ© de recherche «Histoire Ă©conomique et sociale de la Tunisie». Auteur de plusieurs Ă©tudes et publications dans des revues paraissant en Tunisie et Ă  l’étranger sur les thĂšmes suivants : les Ă©lites tunisiennes, l’enseignement moderne, les associations culturelles et le Mouvement national en Tunisie durant l’époque coloniale (en langues arabe et française), Adel ben Youssef se penche depuis quelques annĂ©es sur l’étude de la Franc- maçonnerie et des sociĂ©tĂ©s secrĂštes en Tunisie sous le Protectorat français et prĂ©pare actuellement un ouvrage sur ce thĂšme combien d’actualitĂ©. Interview. Qu’est-ce que la Franc- maçonnerie? D’aprĂšs Larousse, «La franc-maçonnerie est une association, en partie secrĂšte, de personnes qui professent des principes de fraternitĂ©, se reconnaissent entre elles Ă  des signes et Ă  des emblĂšmes, se divisent en groupes appelĂ©s Loges». La Franc-maçonnerie a Ă©tĂ© aussi dĂ©finie par l’assemblĂ©e des grands maĂźtres europĂ©ens en 1952 comme «une institution d’initiation spirituelle au moyen de symboles». L’article 1 des constitutions de la Grande Loge de France l’a dĂ©finie comme «un ordre initiatique traditionnel et universel fondĂ© sur la fraternité». Elle a pour but le perfectionnement de l’homme et de l’humanitĂ©. Ses membres se recrutent par cooptation selon des rites initiatiques. Elle se fixe pour but de rĂ©unir en son sein les «hommes libres et de bonnes mƓurs», qui veulent travailler Ă  l’amĂ©lioration matĂ©rielle et morale ainsi qu’au perfectionnement intellectuel et social de l’humanitĂ©. Elle se veut universelle : les vicissitudes de son histoire l’ont pourtant divisĂ©e en de multiples obĂ©diences. La discrĂ©tion dont elle entoure ses activitĂ©s et qu’elle impose Ă  ses membres n’en fait pas, pour autant, une sociĂ©tĂ© secrĂšte : elle se manifeste souvent publiquement et ses «secrets» ont Ă©tĂ© depuis longtemps dĂ©voilĂ©s au monde profane par d’innombrables ouvrages. L’existence de la secte remonte au temps de Salomon selon certains, et au temps des Pharaons selon d’autres. Que peut-on dire briĂšvement de son histoire ? La premiĂšre loge maçonnique, «La Grande Loge de Londres», est apparue en Angleterre dĂšs 1717. DĂšs lors, des loges ont commencĂ© Ă  prendre naissance en Europe et dans le monde. En France, la Franc-maçonnerie fut introduite entre 1725-1726 et se dĂ©veloppa rapidement. En 1740, on comptait une dizaine de loges Ă  Paris et une quinzaine en province. En 1789, le Grand Orient de France en contrĂŽlait 60 Ă  Paris, 448 en province, 40 dans les colonies, 19 Ă  l’étranger et 68 dans l’armĂ©e royale, regroupant quelque 70.000 membres. Les loges parisiennes prennent part Ă  la RĂ©volution française de l’ancien rĂ©gime. Le mot maçonnerie (de maçon : bĂątisseur) est liĂ© Ă  la construction du Temple de Salomon. Bien que la secte regroupe des membres de tous bords, ses fondateurs ainsi que ses hauts dirigeants sont d’origine exclusivement juive. En apparence, l’organisation affiche des objectifs humanitaires visant Ă  cultiver l’amour entre les hommes, Ă  la recherche de la paix, du bien et du progrĂšs de l’humanitĂ©. La fameuse devise de la RĂ©publique Française “libertĂ©, Ă©galitĂ©, fraternitĂ©â€â€” est d’origine maçonnique. Cet idĂ©al philanthropique lui a permis d’étendre son influence partout dans le monde et de gagner la sympathie d’un nombre considĂ©rable de hautes personnalitĂ©s notamment en Occident. Mais certains lui imputent des visĂ©es machiavĂ©liques C’est vrai. Certains estiment que le but vĂ©ritable de la Franc-maçonnerie serait de prĂ©parer l’avĂšnement du gouvernement juif pour diriger le monde, lequel, selon les enseignements du Talmud, interviendrait en temps de crises et de dĂ©liquescences gĂ©nĂ©ralisĂ©es. Dans le souci de contribuer Ă  la crĂ©ation des conditions de cet Ă©vĂšnement, la secte s’emploie Ă  dĂ©truire la religion et la morale. D’oĂč l’anarchisme, le communisme, la laĂŻcitĂ©, bref, tous ces systĂšmes et ces doctrines immoraux et libertaires inventĂ©s par des Juifs franc- maçons. L’organisation comporte trois structures (ou niveaux) superposĂ©es, le 1er : la franc-maçonnerie symbolique, le 2Ăšme : le Pacte royal et le 3Ăšme : la Franc-maçonnerie universelle. Chaque structure comprend 33 Ă©chelons, chaque Ă©chelon correspond Ă  un grade dĂ©terminĂ©. Pour passer d’une structure Ă  l’autre, le membre doit gravir les 33 Ă©chelons. Une pyramide surmontĂ©e d’un oeil au sommet symbolise le temple en voie de construction. L’organisation est soumise Ă  une discipline de fer, fondĂ©e sur le respect de la hiĂ©rarchie et des rĂšgles de conduite, et ce dans le secret le plus absolu. Tout manquement peut entraĂźner la mort du prĂ©sumĂ© coupable. La promotion d’un Ă©chelon Ă  l’autre est fonction de l’engagement du membre et des services qu’il a rendus Ă  la secte. Ses rĂ©unions sont secrĂštes, elles se tiennent gĂ©nĂ©ralement de nuit et dans des lieux placĂ©s sous haute surveillance. Les membres de la secte utilisent un langage particulier formĂ© de mots de passe, de signes et de symboles incomprĂ©hensibles aux profanes. Ses activitĂ©s sont particuliĂšrement axĂ©es sur la dĂ©fense de la laĂŻcitĂ©, des droits politiques et culturels des minoritĂ©s, de la libertĂ© de la femme… Des actions sont Ă©nergiquement menĂ©es pour l’instauration de l’égalitĂ© entre les hommes et les femmes J’ai personnellement dĂ©couvert ce monde par coĂŻncidence. En interviewant un des anciens Ă©tudiants de l’UniversitĂ© française durant les annĂ©es 1990, ce dernier m’a informĂ© sur les rencontres secrĂštes entre Bourguiba et MendĂšs France en juillet 1954 (sur lesquelles nous reviendrons) qui avaient lieu dans la maison d’un Tunisien franc-maçon, le docteur Ahmed SomĂŻa. DĂšs lors, je me suis intĂ©ressĂ© Ă  ce monde profane, secret, en vue de le dĂ©voiler et mieux comprendre son fonctionnement et ses relations avec le monde extĂ©rieur. Comment la Franc- maçonnerie est-elle venue en Tunisie ? En Tunisie comme dans la plupart des pays arabes de la rive sud de la MĂ©diterranĂ©e, la Franc-maçonnerie est le reflet des influences que subit la RĂ©gence de la part des pays europĂ©ens. A l’influence livournaise en Tunisie, il convient d’ajouter l’influence marseillaise. Le docteur Louis Franck, mĂ©decin d’Etat- major, qui veilla sur la santĂ© de Hamouda Pacha Bey en 1806, sous l’Empire, tĂ©moigne des liens que les marchands français tissĂšrent entre la France et la Tunisie. Ce n’est pas par hasard que la premiĂšre loge tunisienne fut créée par les maçons marseillais, en 1812, relevant de l’obĂ©dience de la loge mĂšre «La Loge Ecossaise de Marseille», au titre distinctif «Loge de Saint – Jean d’Ecosse l’ImpĂ©riale, Amis FidĂšles du Grand NapolĂ©on». Au total, entre 1812 et 1881, treize loges ont Ă©tĂ© créées dans la Tunisie prĂ©coloniale et si la Franc-maçonnerie europĂ©enne a trouvĂ© un champ d’activitĂ© trĂšs prospĂšre, c’est grĂące Ă  l’importance du nombre d’EuropĂ©ens, essentiellement les rĂ©fugiĂ©s italiens installĂ©s dans les grandes villes de la RĂ©gence depuis le dĂ©but du XIXĂšme siĂšcle. Cette situation va sans doute favoriser davantage l’implantation de loges françaises aprĂšs l’établissement du Protectorat français le 12 mai 1881 et l’adhĂ©sion de Tunisiens musulmans Ă  ces loges. Avec le protectorat, en 1881, l’activitĂ© maçonnique va-t-elle s’intensifier en Tunisie ? Le TraitĂ© du Bardo, signĂ© entre la France et le Bey de Tunis, va assainir le climat politique et Ă©claircir le panorama maçonnique avec la multiplication des loges françaises Ă  Tunis et dans les grandes villes de la RĂ©gence. Les Français, qui Ă©taient venus s’installer massivement en Tunisie, dĂ©posĂšrent auprĂšs du Grand Orient de France une demande de patente pour la crĂ©ation d’une loge au titre distinctif «La Nouvelle Carthage». Celle – ci fut créée le 27 avril 1885 et fut l’une des loges les plus brillantes parmi celles qui furent créées Ă  l’Orient de Tunis. Elle battit maillet jusqu’en 1960, et fut reconstituĂ©e Ă  Paris en 1988. Quelques annĂ©es plus tard, d’autres loges virent le jour : «L’Aurore du XIX Ăš siĂšcle» Ă  l’Orient de Bizerte (le 17 dĂ©cembre 1900), «La Nouvelle HadrumĂšte» Ă  l’Orient de Sousse (le 9 novembre 1903), «Le Phare de Tyna» Ă  l’Orient de Sfax (le 9 novembre 1903), «Tacapes» Ă  l’Orient de GabĂšs, «La Nouvelle Utique» Ă  l’Orient d’Utique 1908, «La Nouvelle Carthage et SalammbĂŽ RĂ©unies», (le 21 avril 1909), «L’Etoile de Carthage» (le 13 dĂ©cembre 1931), «Travail, LibertĂ©, ProgrĂšs» (le 29 novembre 1924), «Abdelkader» (le 12 dĂ©cembre 1955), toutes Ă  l’Orient de Tunis. Quant aux Italiens, ils se sont contentĂ© de crĂ©er la loge «Concordia», ordre de Tunis, qui Ă©tait trĂšs active au dĂ©but des annĂ©es 1920. La Grande Loge de France crĂ©e quant Ă  elle «La Volonté» (en 1903), «VolontĂ© et VĂ©ritas» (en 1926), Ă  l’Orient de Tunis puis «LumiĂšre et ProgrĂšs» Ă  l’Orient de Sousse (en 1926). Quant Ă  l’ObĂ©dience Mixte Internationale, le Droit Humain, elle installa une loge en 1904, dite «Loge 201», mais elle ne fut guĂšre active avant 1914. En somme, la pĂ©riode coloniale a vu la crĂ©ation de quatorze loges, dix relevaient du Grand Orient de France, trois de La Grande Loge de France, et une seule de l’ObĂ©dience Mixte Internationale. À la suite de la promulgation de la loi 1959 sur les associations par le prĂ©sident Habib Bourguiba, la plupart de ces loges vont cesser de fonctionner aprĂšs soixante-et-onze ans d’activitĂ©. Seule «La Nouvelle Carthage» continue Ă  battre maillet jusqu’en 1964. Quels sont les prĂ©curseurs tunisiens Ă  adhĂ©rer Ă  ce mouvement ou «secte»? MĂȘme si l’on ne dispose pas d’un chiffre exact du nombre de Tunisiens musulmans ayant adhĂ©rĂ© Ă  ces loges europĂ©ennes fondĂ©es dans la RĂ©gence et leurs noms, on dispose quand mĂȘme du nombre total d’adhĂ©rents Ă  la loge «Ancient Carthage n° 1717». A cĂŽtĂ© de ses sept fondateurs cette loge comptait en 1880, 135 adhĂ©rents, dont cinq seulement sont des Musulmans (soit 3.7%), contre 75 Catholiques (soit 55.5 %), 35 Juifs (soit 26 %), 18 Protestants (soit 13.3 %) et deux Grecs orthodoxes (soit 15 %). Un des rapports de la loge «La Nouvelle Carthage» nous informe que «Le GĂ©nĂ©ral de Division Mustapha Ben SmaĂŻl, ancien Premier Ministre du Bey, Grand Croix de la LĂ©gion d’Honneur, qui n’a dĂ» qu’à ce vice sa haute fortune, qui a Ă©tĂ© dit-on initiĂ© Ă  Paris, mais qui se prĂ©sente avec un bref de R.C. et une patente de 30 Ăš dĂ©livrĂ©s par la Grande Loge d’Angleterre, ne sera jamais affiliĂ© Ă  notre Loge. S’il se prĂ©sentait Ă  nos travaux nous prononcerions immĂ©diatement la clĂŽture. Nous ne pouvons agir autrement par dignitĂ© pour notre ordre et pour ĂȘtre respectĂ©s Ă  Tunis». En vertu de leurs statuts les loges françaises implantĂ©es en Tunisie dĂšs 1881, n’étaient pas fermĂ©es aux non-Français, aux Juifs et surtout aux «indigĂšnes», mais la rĂ©alitĂ© Ă©tait autrement. Dans ce sens le franc-maçon Nunez dĂ©nonçait en 1907 les agissements de la doyenne des loges françaises «La Nouvelle Carthage», dĂ©pendante du G.O.D.F., qui ne refusait pas officiellement les demandes de profanes non-Français, mais elle leur fermait la porte. Idem pour la loge «Volonté», dĂ©pendante de la G.L.D.F., qui dĂ©fend en application de son statut intĂ©rieur, «l’entrĂ©e Ă  ceux qui ne sont pas Français». Ce qui explique l’implication de leurs dirigeants dans la dĂ©fense des privilĂšges de la colonie française. Cumulant les statuts de VĂ©nĂ©rable de la loge «La Nouvelle Carthage», celui de chef d’entreprise et de ReprĂ©sentant de la communautĂ© française Ă  la ConfĂ©rence Consultative de la Tunisie, Duclos rĂ©clame en 1911, «l’institution d’un Conseil Colonial, Ă©lu au suffrage universel et aux membres desquels exclusivement Français qui serait attribuĂ© des pouvoirs dĂ©libĂ©ratifs». Notons cependant, le souci de Duclos «d’attirer des IsraĂ©lites et des indigĂšnes fort intelligents, animĂ©s d’un esprit Ă©levĂ© et tolĂ©rant». Mais cette volontĂ© d’ouverture —dans le cadre d’un paternalisme colonial !— est mise en Ă©chec, au sein des francs-maçons, par «l’ostracisme des prĂ©jugĂ©s de race», que Duclos dĂ©nonce. Selon un Ă©tat de l’atelier de la loge «VolontĂ© et VĂ©ritas RĂ©unies», et d’aprĂšs l’examen des noms patronymiques des affilĂ©s (puisque les nationalitĂ©s n’étaient pas indiquĂ©es), permet de constater que sur 76 francs-maçons affiliĂ©s en 1945, une majoritĂ© juive, pour la plupart Livournais et une poignĂ©e de Français de souche et trois Musulmans. L’étude des procĂšs-verbaux de cette loge atteste que ses membres n’étaient pas totalement intĂ©grĂ©s dans la sociĂ©tĂ© coloniale française, puisqu’ils se plaignaient du freinage du mouvement de naturalisation et relevaient que de «nombreux intellectuels tunisiens dignes et honnĂȘtes voient leurs requĂȘtes repoussĂ©es ou Ă©ternellement laissĂ©es en suspens». De leur cĂŽtĂ© les prĂ©pondĂ©rants ont, de 1891 Ă  1907 et mĂȘme aprĂšs, largement critiquĂ©, dans leurs journaux l’adhĂ©sion des Musulmans Ă  des loges maçonniques. MalgrĂ© toutes les manƓuvres françaises Ă  l’encontre des «indigĂšnes», provenant de l’intĂ©rieur ou bien de l’extĂ©rieur du monde maçonnique, les loges maçonniques françaises dĂ©pendant du G.O.D.F ou celles de la G.L.D.F. ont pu attirer Ă  leurs ateliers durant 75 ans de prĂ©sence française en Tunisie, prĂšs d’une cinquantaine de profanes musulmans. Pour quelles raisons ces Musulmans ont-il adhĂ©rĂ© Ă  des loges maçonniques, alors que la Franc-maçonnerie Ă©tait fermement contestĂ©e par la totalitĂ© de la sociĂ©tĂ© tunisienne musulmane conservatrice, et ce en raison de son origine judĂ©o-chrĂ©tienne ?
L’image retenue de la Franc-maçonnerie par la population europĂ©enne locale est celle d’une sociĂ©tĂ© de bienfaisance. Dans le mĂȘme temps le souci des francs-maçons Ă  l’égard des populations autochtones se renforce : les frĂšres fondateurs estiment que la Maçonnerie pourrait servir Ă  «amalgamer les Arabes, les Kabyles, les Turcs, les Juifs et les ChrĂ©tiens, c’est Ă  dire les vainqueurs et les vaincus», comme le dĂ©clare le frĂšre H. de Brivazac. L’assimilation est «le seul but lĂ©gitime de la conquĂȘte». La date d’initiation du premier Arabe en AlgĂ©rie remonte Ă  1839. L’initiation, en 1864, de l’Emir Abd el Kader est Ă  la mesure de cette aspiration d’un rapprochement souhaitable entre les communautĂ©s et aussi de l’admission de musulmans dans les loges. Mais si les idĂ©es maçonniques ne rebutent pas des Musulmans ayant appris le français, les populations arabes ignorent, d’une façon gĂ©nĂ©rale, jusqu’à l’existence de la Franc-maçonnerie. Pour eux, les ateliers maçonniques supplĂ©ent, en partie, Ă  l’absence des salons et des acadĂ©mies que la sociĂ©tĂ© du XVIIIĂšme siĂšcle apprĂ©cie. D’une façon gĂ©nĂ©rale, les ateliers deviennent des «lieux de fraternité» qui Ă©vitent aux «pĂ©rĂ©grins» un isolement mal vĂ©cu. A part les principes et les slogans trompeurs de la Franc-maçonnerie, nombreux sont les Tunisiens qui ont adhĂ©rĂ© Ă  des loges maçonniques pour servir des intĂ©rĂȘts purement personnels : Ă  la recherche d’une promotion professionnelle dans l’Administration tunisienne ou d’un poste politique dans l’appareil de l’Etat. Le secteur de l’enseignement constitue un trĂšs bon exemple de l’ambition des frĂšres tunisiens. Etant donnĂ© que l’enseignement public en Tunisie Ă©tait contrĂŽlĂ© par «Le Cercle Tunisien de La Ligue Française de l’Enseignement», son fondateur, le docteur Bertholon, ancien mĂ©decin militaire, Ă©tait profondĂ©ment laĂŻque certes, mais d’esprit trĂšs libĂ©ral, entourĂ© de plusieurs maçons influents. Mais Ă  partir de 1895, la Ligue de l’Enseignement entre en sommeil et ses activitĂ©s ne devaient reprendre qu’en fĂ©vrier 1901 sous la direction de Victor Communaux qui fit alors de «La FĂ©dĂ©ration des Cercles de la RĂ©gence» un instrument de combat en faveur de la laĂŻcitĂ© dans la lutte scolaire qui faisait rage Ă  l’époque en France et qui allait bientĂŽt s’étendre en Tunisie. A partir des annĂ©es 1920, l’influence des francs-maçons s’élargit davantage dans tous les rouages et secteurs de la RĂ©gence et en particulier dans l’enseignement public qui devient le bastion des FrĂšres, Ă  tel point que la nomination de directeurs d’écoles ou de collĂšges ou lycĂ©es, d’inspecteurs d’enseignement primaire ou secondaire, de chefs de service de la D.I.P. (Direction de l’Instruction Publique)
, ne se fait qu’aprĂšs l’approbation du «lobby» maçonnique de Tunis, voire mĂȘme de Paris et notamment du G.O.D.F. Cela voudrait-il qu’il n’y avait pas des Tunisiens convaincus par l’idĂ©al maçonnique ? Sans donner un tableau noir sur les francs-maçons tunisiens musulmans, nous disons qu’il y a eu certainement parmi eux de bons maçons qui voulaient sans doute servir les intĂ©rĂȘts publics tunisiens et la cause nationale de leur pays. Se rĂ©fĂ©rant aux tenues des loges, aux convents des obĂ©diences, aux congrĂšs rĂ©gionaux et inter- obĂ©dientiels, les revendications des francs-maçons tunisiens musulmans Ă©taient trĂšs variĂ©es et touchent tous les domaines de la vie des Tunisiens. Dans le domaine social et culturel, les FrĂšres tunisiens revendiquaient la propagation de l’enseignement public dans toute la RĂ©gence, la crĂ©ation d’écoles primaires, de collĂšges et lycĂ©es, notamment dans les rĂ©gions dĂ©favorisĂ©es et non habitĂ©es par les EuropĂ©ens, la rĂ©vision des impĂŽts, l’amĂ©lioration des conditions matĂ©rielles des classes dĂ©pourvues de ressources, notamment les ouvriers et les paysans, la suppression de Khemmasat (le mĂ©tayage) et de l’impĂŽt de capitation
 Dans le domaine Ă©conomique, ils revendiquaient la mĂ©canisation de l’agriculture, l’introduction de nouvelles mĂ©thodes et techniques dans l’industrie, la modernisation du commerce et des banques en Tunisie
 Dans le domaine politique et judiciaire, ils revendiquaient le suffrage universel pour tous les Tunisiens, la crĂ©ation d’un Conseil GĂ©nĂ©ral Ă  capacitĂ© budgĂ©taire, la crĂ©ation de municipalitĂ©s dans tout le territoire de la RĂ©gence, la possibilitĂ© pour les Musulmans de choisir entre les juridictions tunisiennes ou françaises
 Y a-t-il eu des personnalitĂ©s tunisiennes Ă©minentes qui ont adhĂ©rĂ© Ă  la Franc-maçonnerie sous le Protectorat ? Nombreuses sont les hautes personnalitĂ©s tunisiennes qui ont adhĂ©rĂ© Ă  la Franc-maçonnerie. On y trouve mĂȘme des personnalitĂ©s de proue de l’Administration et du mouvement national tunisien et mĂȘme parmi les membres de la famille beylicale. A titre d’exemple, on peut citer parmi eux MM. Slaheddine Baccouche, Mohamed Salah Mzali, (deux Premiers ministres), Tahar Ladjimi, Hmida Doulatli et Ahmed Haddad (CaĂŻds), Mohamed Aziz Ben Hassen Sakka (Khalifa)
, Abdeljelil Zaouech, Salah Belajouza, Jalloul Ben ChĂ©rifa
, (des nationalistes) et plusieurs avocats, mĂ©decins, pharmaciens et surtout instituteurs ou inspecteurs tunisiens, entre autres : Abdeljelil Ben Ali, TaĂŻeb Basly, Daly Yahia … CĂŽtĂ© français, nombreux sont les francs-maçons français ayant pris en mains les destinĂ©es de la Tunisie sous le Protectorat. Nous pouvons citer parmi eux MM. Etienne Flandin, Stephen Pichon, Marcel Peyrouton, Jean Mons
 (rĂ©sidents gĂ©nĂ©raux), Pierre Bertholle, RenĂ© ClĂ©ment, Paul De Gourlet
, (contrĂŽleurs civils), Le Theuff (haut fonctionnaire de la Direction de l’IntĂ©rieur), Lucien Paye (Directeur de l’Instruction publique), Gabriel MĂ©rat (Directeur du CollĂšge Sadiki) etc. Bourguiba Ă©tait-il franc-maçon ? Avant de parler de Bourguiba, il est Ă  noter qu’en 1931 le docteur Mahmoud Elmateri, en tant que SecrĂ©taire GĂ©nĂ©ral de «L’Association des Amis de l’Etudiant», prĂ©sidĂ©e par le docteur Mohamed Tlatli depuis sa crĂ©ation au dĂ©but de 1928, a dĂ» faire recours aux membres influents de la Franc-maçonnerie française en Tunisie afin qu’ils interviennent auprĂšs de la RĂ©sidence GĂ©nĂ©rale de France Ă  Tunis en vue d’obtenir l’autorisation officielle de cette association. Pour ce qui est de Habib Bourguiba, l’historienne Julliette Bessis rapporte le fait suivant : «Habib Bourguiba s’est liĂ© avec FĂ©licien Challaye et a mĂȘme assistĂ© au CongrĂšs de la Ligue des Droits de l’Homme Ă  Vichy, en mai 1931. Est-il, comme l’affirment diffĂ©rents tĂ©moignages, affiliĂ© depuis cette Ă©poque Ă  la Franc-maçonnerie ?». De son cĂŽtĂ© Roger Peyrefitte, dans son livre exhaustif sur la Franc-maçonnerie, ses initiĂ©s et ses obĂ©diences, retraçant habilement les activitĂ©s des loges maçonniques en Afrique du Nord avant l’indĂ©pendance, Ă©crit : «Les ateliers de Tunisie figuraient encore sur le papier, mais avaient reçu de la rue Cadet l’instruction de ne remuer ni pied ni patte. Bourguiba, qui avait Ă©tĂ© maçon, n’était pas plus favorable que Nasser, protecteur nominal de la Grande Loge d’Égypte, Ă  ce qui lui semblait une idĂ©ologie judĂ©o-chrĂ©tienne et un souvenir du colonialisme». Mais dans le volumineux Dictionnaire de la Franc-maçonnerie, rĂ©alisĂ© sous la direction de Daniel Ligou et auquel ont collaborĂ© cent quarante spĂ©cialistes de la maçonnerie, nous en apprenons un peu plus sur le passĂ© maçonnique de Bourguiba. L’article sur l’historique de la franc-maçonnerie en Tunisie, signĂ© par H.C. et R.P., ne laisse planer aucun doute sur la fidĂ©litĂ© de Bourguiba, longtemps aprĂšs l’indĂ©pendance : «Le PrĂ©sident Bourguiba lui-mĂȘme, outre sa formation universitaire, eut, pendant une astreinte Ă  rĂ©sidence forcĂ©e, un haut fonctionnaire français franc-maçon comme compagnon et mentor politique, chargĂ© de parfaire sa formation de futur homme d’État». Nous pensons surtout Ă  la dure pĂ©riode de son incarcĂ©ration Ă  l’üle La Galite (du 21 mai 1953 au 20 mai 1954), oĂč le leader du NĂ©o-Destour a Ă©tĂ© initiĂ© par le mĂ©decin de la Marine, un certain Laize, installĂ© sur l’üle avec sa femme et ses deux matelots de service Ă  la radio et bien entendu l’inspecteur de police Messa qui ne le quittait jamais. Selon certains tĂ©moignages, c’est un certain Laize qui lui a fait connaĂźtre les secrets de la Franc-maçonnerie, son influence sur la scĂšne politique française et internationale. AprĂšs la rude Ă©preuve de La Galite, Habib Bourguiba a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© Ă  l’üle de Groix en Bretagne puis au chĂąteau de la FertĂ© au village d’Amilly dans le Loiret (dĂšs le 17 juillet 1954). Durant cette pĂ©riode, le chĂąteau de la FertĂ© devint le lieu de pĂšlerinage de la plupart des Tunisiens rĂ©sidants Ă  Paris. Sur ordre des responsables de la cellule et de la fĂ©dĂ©ration destourienne de Paris et en particulier Mohamed Masmoudi, certains Ă©tudiants tunisiens, se rendaient de temps Ă  autre le soir sur des vespas vers le lieu de rĂ©sidence de Bourguiba. Ils empruntaient la porte de derriĂšre pour faire sortir le leader qui les attendait avec impatience pour le conduire au domicile du docteur Ahmed SomĂŻa oĂč se trouvaient Ă©galement ses deux amis, Raja BerraĂŻs (alias BeurĂ©) et Pierre MendĂšs France, pour discuter de l’autonomie interne de la Tunisie. Tous ces trois Ă©taient des francs-maçons notoires, membres de la mĂȘme loge «Bienfaisance et progrĂšs» de Paris. Selon le tĂ©moignage de d’un de ses anciens internes Ă  l’hĂŽpital franco- musulman de Bobigny, le docteur Ahmed SomĂŻa Ă©tait liĂ© d’une amitiĂ© sans faille avec le PrĂ©sident du Conseil et tenait Ă  rencontrer Bourguiba et connaĂźtre son point de vue avant son dĂ©part pour Tunis et son cĂ©lĂšbre discours au palais de Carthage, le 31 juillet 1954. Ce n’est pas par hasard que quelques mois seulement aprĂšs l’accĂšs de la Tunisie Ă  l’indĂ©pendance qu’on va assister Ă  la promulgation du Code de Statut Personnel (le 13 aoĂ»t 1956), la proclamation de la RĂ©publique (le 25 juillet 1957), la mise en place d’un enseignement laĂŻc et moderne (novembre 1958)
 Quelle influence exerce la Franc-maçonnerie sur les dĂ©cideurs et quelles sont les personnalitĂ©s internationales connues comme franc- maçonnes ? S’il y a des interfĂ©rences entre la Franc-maçonnerie et le monde politique, c’est parce que, tout d’abord, le franc-maçon est un citoyen engagĂ©. Partant de ce principe, de trĂšs nombreuses personnalitĂ©s ont appartenu Ă  la Franc-maçonnerie. Parmi les plus connues et les plus souvent citĂ©es figurent : Voltaire, Montesquieu, Goethe, Benjamin Franklin, Mozart, George Washington, ThĂ©odore Roosevelt, FrĂ©dĂ©ric II, Jules Ferry, Simon Bolivar, Sir Winston Churchill, F.D. Roosevelt, Harry Truman, Pierre MendĂšs-France, Jean Moulin, Guy Mollet, LĂ©on Gambetta, FĂ©lix Faure, ThĂ©ophile DelcassĂ©, Paul Doumer, Henry Ford, Georges VI, l’Emir Abdelkader, Mustapha Kamel «Ataturk», Jamel Eddine Afghani, Moulay Abdelhafidh (ancien roi du Maroc) et bien d’autres. Les francs-maçons sont aujourd’hui plus de sept millions de par le monde. Ils ne cessent de hanter l’imagination de leurs contemporains. Ils ont donnĂ© naissance Ă  des mythes gĂ©opolitiques importants. On leur a successivement prĂȘtĂ© la paternitĂ© des rĂ©volutions amĂ©ricaine, française et russe ainsi que la destruction de l’Autriche-Hongrie, la crĂ©ation de la S. D. N. etc. DĂšs le XIXĂšme siĂšcle la franc-maçonnerie s’est scindĂ©e en deux courants, l’un traditionnel, l’autre politisĂ©. La maçonnerie n’attache aucune valeur durable aux frontiĂšres, aux patries, aux nations… Elle est mĂȘme portĂ©e Ă  considĂ©rer comme un recul provisoire le dĂ©veloppement du sentiment patriotique qui s’est fait dans tous les peuples depuis un peu plus d’un siĂšcle, et le rĂ©veil des nationalitĂ©s qui en a Ă©tĂ© la consĂ©quence. Elle suppose l’effacement progressif de l’injustice Ă  l’intĂ©rieur de la sociĂ©tĂ© et de mĂȘme l’effacement des frontiĂšres nationales. Mais ça, c’est lointain… trĂšs lointain… En somme la Franc-maçonnerie est un «lobby» ou un groupe de pression lĂ  oĂč il se trouve. Cependant, le fait que de nombreuses personnalitĂ©s haut placĂ©es font partie d’une loge maçonnique ne veut pas dire que les franc- maçons «font le monde» ! Si la Franc-maçonnerie est toujours interdite dans la plupart des pays arabes et musulmans, elle commence nĂ©anmoins Ă  ĂȘtre reconnue et autorisĂ©e dans certains d’entre eux Ă  l’instar du Liban, du Maroc, de la Turquie
, oĂč le nombre de maçons et de loges ne cesse d’augmenter d’une façon vertigineuse. Dans le reste des pays arabes oĂč la franc-maçonnerie est strictement interdite, les instances maçonniques internationales essayent de s’y Ă©tablir sous couvert d’organismes internationaux. La Franc-maçonnerie reste ambiguĂ« dans l’esprit des gens. Elle est synonyme d’intrigues, de sociĂ©tĂ© secrĂšte, de manipulation de coulisses et de complot pour tout dire. Combattue et dĂ©noncĂ©e, elle ne cesse d’attirer des questions sur ses origines, ses ramifications dans nos sociĂ©tĂ©s et surtout les buts qu’elle poursuit. Nous avons interrogĂ© un historien spĂ©cialiste sur la question pour nous Ă©clairer sur la Franc-maçonnerie en gĂ©nĂ©ral et son prolongement en Tunisie en particulier. Adel Ben Youssef est historien-chercheur en histoire contemporaine Ă  la FacultĂ© des Lettres de Sousse. Auteur d’une thĂšse de doctorat intitulĂ©e : «L’élite tunisienne moderne : le cas des Ă©tudiants tunisiens de l’UniversitĂ© française 1880-1956» (en langue arabe), avril 2000. Membre d’une unitĂ© de recherche «Histoire Ă©conomique et sociale de la Tunisie». Auteur de plusieurs Ă©tudes et publications dans des revues paraissant en Tunisie et Ă  l’étranger sur les thĂšmes suivants : les Ă©lites tunisiennes, l’enseignement moderne, les associations culturelles et le Mouvement national en Tunisie durant l’époque coloniale (en langues arabe et française), Adel ben Youssef se penche depuis quelques annĂ©es sur l’étude de la Franc- maçonnerie et des sociĂ©tĂ©s secrĂštes en Tunisie sous le Protectorat français et prĂ©pare actuellement un ouvrage sur ce thĂšme combien d’actualitĂ©. Interview. Qu’est-ce que la Franc- maçonnerie? D’aprĂšs Larousse, «La franc-maçonnerie est une association, en partie secrĂšte, de personnes qui professent des principes de fraternitĂ©, se reconnaissent entre elles Ă  des signes et Ă  des emblĂšmes, se divisent en groupes appelĂ©s Loges». La Franc-maçonnerie a Ă©tĂ© aussi dĂ©finie par l’assemblĂ©e des grands maĂźtres europĂ©ens en 1952 comme «une institution d’initiation spirituelle au moyen de symboles». L’article 1 des constitutions de la Grande Loge de France l’a dĂ©finie comme «un ordre initiatique traditionnel et universel fondĂ© sur la fraternité». Elle a pour but le perfectionnement de l’homme et de l’humanitĂ©. Ses membres se recrutent par cooptation selon des rites initiatiques. Elle se fixe pour but de rĂ©unir en son sein les «hommes libres et de bonnes mƓurs», qui veulent travailler Ă  l’amĂ©lioration matĂ©rielle et morale ainsi qu’au perfectionnement intellectuel et social de l’humanitĂ©. Elle se veut universelle : les vicissitudes de son histoire l’ont pourtant divisĂ©e en de multiples obĂ©diences. La discrĂ©tion dont elle entoure ses activitĂ©s et qu’elle impose Ă  ses membres n’en fait pas, pour autant, une sociĂ©tĂ© secrĂšte : elle se manifeste souvent publiquement et ses «secrets» ont Ă©tĂ© depuis longtemps dĂ©voilĂ©s au monde profane par d’innombrables ouvrages. L’existence de la secte remonte au temps de Salomon selon certains, et au temps des Pharaons selon d’autres. Que peut-on dire briĂšvement de son histoire ? La premiĂšre loge maçonnique, «La Grande Loge de Londres», est apparue en Angleterre dĂšs 1717. DĂšs lors, des loges ont commencĂ© Ă  prendre naissance en Europe et dans le monde. En France, la Franc-maçonnerie fut introduite entre 1725-1726 et se dĂ©veloppa rapidement. En 1740, on comptait une dizaine de loges Ă  Paris et une quinzaine en province. En 1789, le Grand Orient de France en contrĂŽlait 60 Ă  Paris, 448 en province, 40 dans les colonies, 19 Ă  l’étranger et 68 dans l’armĂ©e royale, regroupant quelque 70.000 membres. Les loges parisiennes prennent part Ă  la RĂ©volution française de l’ancien rĂ©gime. Le mot maçonnerie (de maçon : bĂątisseur) est liĂ© Ă  la construction du Temple de Salomon. Bien que la secte regroupe des membres de tous bords, ses fondateurs ainsi que ses hauts dirigeants sont d’origine exclusivement juive. En apparence, l’organisation affiche des objectifs humanitaires visant Ă  cultiver l’amour entre les hommes, Ă  la recherche de la paix, du bien et du progrĂšs de l’humanitĂ©. La fameuse devise de la RĂ©publique Française “libertĂ©, Ă©galitĂ©, fraternitĂ©â€â€” est d’origine maçonnique. Cet idĂ©al philanthropique lui a permis d’étendre son influence partout dans le monde et de gagner la sympathie d’un nombre considĂ©rable de hautes personnalitĂ©s notamment en Occident. Mais certains lui imputent des visĂ©es machiavĂ©liques C’est vrai. Certains estiment que le but vĂ©ritable de la Franc-maçonnerie serait de prĂ©parer l’avĂšnement du gouvernement juif pour diriger le monde, lequel, selon les enseignements du Talmud, interviendrait en temps de crises et de dĂ©liquescences gĂ©nĂ©ralisĂ©es. Dans le souci de contribuer Ă  la crĂ©ation des conditions de cet Ă©vĂšnement, la secte s’emploie Ă  dĂ©truire la religion et la morale. D’oĂč l’anarchisme, le communisme, la laĂŻcitĂ©, bref, tous ces systĂšmes et ces doctrines immoraux et libertaires inventĂ©s par des Juifs franc- maçons. L’organisation comporte trois structures (ou niveaux) superposĂ©es, le 1er : la franc-maçonnerie symbolique, le 2Ăšme : le Pacte royal et le 3Ăšme : la Franc-maçonnerie universelle. Chaque structure comprend 33 Ă©chelons, chaque Ă©chelon correspond Ă  un grade dĂ©terminĂ©. Pour passer d’une structure Ă  l’autre, le membre doit gravir les 33 Ă©chelons. Une pyramide surmontĂ©e d’un oeil au sommet symbolise le temple en voie de construction. L’organisation est soumise Ă  une discipline de fer, fondĂ©e sur le respect de la hiĂ©rarchie et des rĂšgles de conduite, et ce dans le secret le plus absolu. Tout manquement peut entraĂźner la mort du prĂ©sumĂ© coupable. La promotion d’un Ă©chelon Ă  l’autre est fonction de l’engagement du membre et des services qu’il a rendus Ă  la secte. Ses rĂ©unions sont secrĂštes, elles se tiennent gĂ©nĂ©ralement de nuit et dans des lieux placĂ©s sous haute surveillance. Les membres de la secte utilisent un langage particulier formĂ© de mots de passe, de signes et de symboles incomprĂ©hensibles aux profanes. Ses activitĂ©s sont particuliĂšrement axĂ©es sur la dĂ©fense de la laĂŻcitĂ©, des droits politiques et culturels des minoritĂ©s, de la libertĂ© de la femme… Des actions sont Ă©nergiquement menĂ©es pour l’instauration de l’égalitĂ© entre les hommes et les femmes J’ai personnellement dĂ©couvert ce monde par coĂŻncidence. En interviewant un des anciens Ă©tudiants de l’UniversitĂ© française durant les annĂ©es 1990, ce dernier m’a informĂ© sur les rencontres secrĂštes entre Bourguiba et MendĂšs France en juillet 1954 (sur lesquelles nous reviendrons) qui avaient lieu dans la maison d’un Tunisien franc-maçon, le docteur Ahmed SomĂŻa. DĂšs lors, je me suis intĂ©ressĂ© Ă  ce monde profane, secret, en vue de le dĂ©voiler et mieux comprendre son fonctionnement et ses relations avec le monde extĂ©rieur. Comment la Franc- maçonnerie est-elle venue en Tunisie ? En Tunisie comme dans la plupart des pays arabes de la rive sud de la MĂ©diterranĂ©e, la Franc-maçonnerie est le reflet des influences que subit la RĂ©gence de la part des pays europĂ©ens. A l’influence livournaise en Tunisie, il convient d’ajouter l’influence marseillaise. Le docteur Louis Franck, mĂ©decin d’Etat- major, qui veilla sur la santĂ© de Hamouda Pacha Bey en 1806, sous l’Empire, tĂ©moigne des liens que les marchands français tissĂšrent entre la France et la Tunisie. Ce n’est pas par hasard que la premiĂšre loge tunisienne fut créée par les maçons marseillais, en 1812, relevant de l’obĂ©dience de la loge mĂšre «La Loge Ecossaise de Marseille», au titre distinctif «Loge de Saint – Jean d’Ecosse l’ImpĂ©riale, Amis FidĂšles du Grand NapolĂ©on». Au total, entre 1812 et 1881, treize loges ont Ă©tĂ© créées dans la Tunisie prĂ©coloniale et si la Franc-maçonnerie europĂ©enne a trouvĂ© un champ d’activitĂ© trĂšs prospĂšre, c’est grĂące Ă  l’importance du nombre d’EuropĂ©ens, essentiellement les rĂ©fugiĂ©s italiens installĂ©s dans les grandes villes de la RĂ©gence depuis le dĂ©but du XIXĂšme siĂšcle. Cette situation va sans doute favoriser davantage l’implantation de loges françaises aprĂšs l’établissement du Protectorat français le 12 mai 1881 et l’adhĂ©sion.
 
 

 

 

Un islamisme ouvert sur sa gauche : L’émergence d’un nouveau tiers-mondisme arabe ?

 

 par Nicolas Dot Pouillard, Centre Tricontinental (CETRI)

Doctorant en Ă©tudes politiques Ă  l’EHESS (Paris) et Ă  l’UniversitĂ© libanaise (Beyrouth).

 Islamismes, mouvements de gauche radicale et nationalismes arabes ont longtemps semblĂ© s’opposer. Des alliances se sont pourtant nouĂ©es entre eux, recomposant profondĂ©ment le champ politique en Palestine, au Liban et en Egypte.

Les dĂ©bats sur la place du religieux et du politique sont souvent biaisĂ©s par des perceptions idĂ©ologiques et culturelles subjectives. L’apprĂ©hension du phĂ©nomĂšne islamiste en France reste ainsi trĂšs largement dominĂ©e par une sĂ©rie de paradigmes trĂšs abstraits, qui ne laissent pas la place Ă  une analyse concrĂšte et mĂȘme factuelle du champ politique moyen-oriental. Une dichotomie arbitraire est dessinĂ©e entre « laĂŻcs » et « religieux », « islam modĂ©ré » et « islam extrĂ©miste », « progressiste » et « rĂ©actionnaire ».

Des typologies sont ainsi créées, correspondant en rĂ©alitĂ© Ă  une rĂ©alitĂ© imaginĂ©e du politique : le politique tel qu’on aimerait qu’il soit, non tel qu’il est. Le champ politique moyen-oriental apparaĂźt comme fondamentalement retors aux simplifications historiques, qui dessineraient une ligne de clivage irrĂ©mĂ©diable entre des islamistes identiques les uns aux autres, de Al-QaĂŻda au Hezbollah libanais, et des laĂŻcs naturellement attentifs aux droits de l’homme et de la femme. Ces catĂ©gorisations apparaissent en effet aujourd’hui comme partiellement fausses : en Palestine, c’est bien le Fatah « laĂŻc » qui est l’auteur d’une des lois les plus rĂ©actionnaires sur les droits de la femme, limitant Ă  six mois les peines d’emprisonnement pour les auteurs de crimes d’honneur. C’est que l’on confond souvent laĂŻc et progressiste. De mĂȘme, on imaginera les laĂŻcs comme forcĂ©ment persĂ©cutĂ©s par les intĂ©gristes musulmans. Vrai dans certains cas, cette assertion se rĂ©vĂšle fausse dans d’autres. Il faut alors comprendre par exemple comment le Parti communiste libanais noue des alliances avec le Hezbollah, ou comment le Front populaire de libĂ©ration de la Palestine (FPLP) marxiste travaille souvent avec le Hamas ou le Djihad islamique, et se laisser interroger politiquement et mĂ©thodologiquement par ces nouvelles rĂ©alitĂ©s.

Il y a toujours une tendance rĂ©currente Ă  la simplification du dĂ©bat, selon des lignes idĂ©ologiques tenaces, qui considĂšrent les acteurs politiques islamiques comme des catĂ©gories fixes, incapables de se transformer politiquement et idĂ©ologiquement. Le mouvement islamique a aujourd’hui pratiquement quatre-vingts ans d’existence au Moyen-Orient. L’imaginer comme un ensemble uni, homogĂšne et sans diffĂ©renciation, c’est comme supposer que la gauche recoupe un spectre large allant des anciens de la bande Ă  Baader Ă  Tony Blair, ou que la droite est un tout homogĂšne regroupant indiffĂ©remment la dĂ©mocratie chrĂ©tienne allemande et les nĂ©o-fascistes italiens. Il y a une histoire des droites, une histoire des gauches. Et il doit bien y avoir une histoire des islamismes, car ce rĂ©fĂ©rent politique s’est considĂ©rablement pluralisĂ©. L’exemple des recompositions politiques au Moyen-Orient arabe, et la production d’un islamisme politique de type nationaliste aujourd’hui ouvert vers les gauches et les mouvements nationalistes arabes n’est pas sans poser certaines questions thĂ©oriques et politiques.

Un nouveau modùle d’alliance politique en Palestine et ailleurs

Les premiĂšres Ă©lections municipales en Cisjordanie depuis 1976, qui se sont tenues le 23 dĂ©cembre 2004, constituaient Ă  l’époque un sujet d’interrogation : le Hamas prendrait-il le pas sur le Fatah ? Quel serait l’état du rapport de force politique entre les islamistes, le mouvement nationaliste et la gauche Ă  l’issue du scrutin ? La rĂ©ponse n’était pas Ă  sens unique : les Ă©lections municipales n’ont pas Ă©tĂ© l’objet d’une structuration claire du champ politique. Au contraire, certaines coordonnĂ©es ont Ă©tĂ© bouleversĂ©es, et des tendances ont semblĂ© se confirmer. PlutĂŽt qu’à une indĂ©fectible opposition entre des camps clairement dĂ©limitĂ©s – Fatah, Hamas, FPLP, FDLP, PPP [1] -, localement de nouvelles alliances se sont nouĂ©es, fluctuantes et conjoncturelles. À Bnei Zayyaid, tout comme Ă  BethlĂ©em, c’est une alliance entre le FPLP et le Hamas qui permit de contester au Fatah la prĂ©dominance politique au sein du Conseil municipal. À Ramallah, un an plus tard, ce fut une femme membre du FPLP qui fut Ă©lue Ă  la tĂȘte de la mairie, les trois voix du Hamas s’ajoutant aux six voix du FPLP, mettant en minoritĂ© les six conseillers municipaux du Fatah.

Ces alliances inĂ©dites se sont Ă©galement dessinĂ©es dans le domaine des opĂ©rations militaires : les branches armĂ©es du FPLP — les Brigades Abou Ali Mustapha — ont rĂ©guliĂšrement opĂ©rĂ© depuis 2001 dans la Bande de Gaza au cĂŽtĂ© des Brigades Ezze-dine al- Quassem — la branche armĂ©e du Hamas — et des Brigades al-Quds — celle du Djihad islamique. Enfin, des Ă©lĂ©ments dissidents du Fatah, structurĂ©s autour de la nĂ©buleuse des ComitĂ©s populaires de la rĂ©sistance (CPR), se sont peu Ă  peu rapprochĂ©s de la direction gazaouite du Hamas : ce dernier, aprĂšs sa victoire aux Ă©lections lĂ©gislatives de janvier 2006, nomma un des principaux activistes des CPR, Jamal Samhada-na [2] , ancien militant du Fatah, Ă  la tĂȘte des nouveaux services de sĂ©curitĂ© palestiniens formĂ©s par le gouvernement Hamas : il s’agissait alors de faire contrepoids, surtout dans la Bande de Gaza, aux forces de sĂ©curitĂ© tenues par Mohammad Dahlan, dirigeant du Fatah. Samhadana symbolise cette frange du Fatah qui s’est peu Ă  peu Ă©loignĂ©e de la direction du parti, et qui confirme son Ă©clatement progressif, accĂ©lĂ©rĂ© par la mort de Yasser Arafat le 11 novembre 2004, dont l’aura symbolique permettait d’assurer encore un minimum d’unitĂ© interne. C’est ainsi que Saed Siyyam, le nouveau Ministre de l’intĂ©rieur palestinien, membre du Hamas, choisit un ancien membre du Fatah, soit un Ă©lĂ©ment politique issu du nationalisme palestinien, et non du mouvement islamique lui-mĂȘme, pour diriger des services de sĂ©curitĂ© n’ayant d’autres buts
que de concurrencer sur le terrain la prĂ©dominance armĂ©e de la SĂ©curitĂ© prĂ©ventive, attachĂ©e Ă  la direction du Fatah.

Les affrontements Fatah-Hamas des deux derniĂšres annĂ©es correspondent Ă  une divergence politico-stratĂ©gique, Ă  une diffĂ©rence quand au positionnement Ă  adopter face Ă  IsraĂ«l et Ă  la communautĂ© internationale, non Ă  une querelle idĂ©ologique sĂ©culariste- croyants. Et lorsque les deux partis hĂ©gĂ©moniques Fatah-Hamas favorisent par leur combat fratricide un processus de guerre civile latente, c’est le FPLP et le Mouvement du Djihad islamique (MJIP), soit une organisation de gauche et une organisation islamique, qui jouent communĂ©ment le rĂŽle d’intermĂ©diaire. Si le FPLP reste ainsi aujourd’hui trĂšs critique envers le Hamas, c’est essentiellement parce qu’il lui reproche de s’enfermer dans un tĂȘte Ă  tĂȘte armĂ© Hamas-Fatah, qui bride l’unitĂ© nationale palestinienne, et qui risque de plonger les territoires palestiniens dans le chaos sĂ©curitaire. Et encore une fois, cette position, le FPLP la partage avec le Djihad islamique, avec qui il a pu manifester dans les rues de Gaza lors des Ă©vĂ©nements de juin 2007.

La cartographie politique palestinienne n’est pas une exception : le champ politique arabe semble ĂȘtre en pleine recomposition, et les clivages traditionnels, notamment ceux qui avaient vu s’opposer un camp religieux Ă  un camp sĂ©culier, voir laĂŻc, se sont peu Ă  peu estompĂ©s Ă  l’échelle de la rĂ©gion. L’islam politique subit une phase dĂ©sormais accĂ©lĂ©rĂ©e de nationalisation et de rĂ©gionalisation, tandis que les secteurs issus de la gauche et du nationalisme arabe, baathiste ou nassĂ©rien, en perte de modĂšle politique et de partenaire stratĂ©gique, en proie Ă  une crise structurelle et militante, tentent peu Ă  peu de redĂ©finir leurs modĂšles idĂ©ologiques et pratiques, et se retrouvent obligĂ©s de complexifier leur rĂ©seau d’alliance, en privilĂ©giant dĂ©sormais le partenaire islamiste. Depuis 2000, une phase de recomposition politique s’est ouverte dans le monde arabe, selon des rythmes et des temporalitĂ©s hĂ©tĂ©rogĂšnes selon les pays et les espaces, tirant certains traits d’union avec le passĂ©, amenant de nouvelles problĂ©matiques et des ruptures inĂ©dites.

Cette recomposition politique se fait autour de la question nationale arabe et de la question dĂ©mocratique : dans un contexte politique marquĂ© par l’Intifada palestinienne de septembre 2000, par l’offensive amĂ©ricaine sur l’Irak en 2003, ainsi que par la rĂ©cente « guerre des trente-trois jours » entre le Hezbollah et IsraĂ«l, la question nationale est reposĂ©e dans le monde arabe, et dĂ©termine les modĂšles d’action et de contestation, les formes de recomposition politique et les diffĂ©rents modes d’alliance tactiques entre les courants opposĂ©s au plan amĂ©ricain de « Grand Moyen-Orient ». S’y ajoute la question dĂ©mocratique : dans la mesure oĂč les systĂšmes politiques arabes souffrent trĂšs majoritairement d’un modĂšle fondĂ© sur l’autoritarisme et le nĂ©potisme politiques, et oĂč la majoritĂ© d’entre eux, de l’Égypte Ă  la Jordanie en passant par l’Arabie saoudite et les principales pĂ©tro-monarchies du Golfe, se retrouvent liĂ©s organiquement aux diffĂ©rents intĂ©rĂȘts amĂ©ricains et europĂ©ens dans la rĂ©gion, la contestation de la politique israĂ©lienne et amĂ©ricaine passe souvent par une dĂ©nonciation des systĂšmes politiques internes : en Égypte, tout au long des annĂ©es 2000 Ă  2006, ce sont les mĂȘmes cadres politiques et les mĂȘmes structures de mobilisation qui vont tour Ă  tour passer de la mobilisation en faveur des Palestiniens et des Irakiens Ă  celle en faveur de la dĂ©mocratisation du rĂ©gime.

Question nationale arabe et question dĂ©mocratique tracent donc une sĂ©rie de rapprochements transversaux entre l’espace panarabe focalisĂ© historiquement sur la problĂ©matique palestinienne et l’espace national interne : depuis 2000, une interaction constructive entre la dimension panarabe du politique et son expression nationale interne, une transversalitĂ© accrue entre question nationale arabe et question dĂ©mocratique, favorisent une sĂ©rie de mutations politiques aboutissant Ă  une sĂ©rie d’alliances tactiques et/oĂč stratĂ©giques entre la gauche radicale, les secteurs issus du nationalisme arabe nassĂ©rien ou baathiste, et enfin les formations islamo-nationalistes. Cette interaction entre diffĂ©rents espaces – nationaux, rĂ©gionaux, globaux- tout comme cette transversalitĂ© entre des courants politiques autrefois opposĂ©s, laissent se dessiner peu Ă  peu une reformulation du nationalisme arabe, une recomposition politique lente et progressive du champ politique qui commence Ă  peine Ă  bouleverser les donnes politiques, et qui rompt singuliĂšrement avec les cadres d’action issus de l’histoire du XXe siĂšcle.

Du « concordisme politique » à la dynamique unitaire

La gauche marxisante, les nationalismes arabes de diverses obĂ©diences, et enfin les secteurs centraux de l’islam politique semblent aujourd’hui collaborer Ă©troitement. Il n’en fut pas toujours ainsi : les diffĂ©rents types de nationalisme arabe se sont distinguĂ©s pendant plusieurs dizaines d’annĂ©es par des politiques rĂ©pressives vis-Ă -vis des courants issus des FrĂšres musulmans, que cela soit dans l’Égypte de Nasser ou dans la Syrie de Hafez el-Assad ; l’islamisme politique, dans sa phase montante des annĂ©es 1980, Ă  la suite de la rĂ©volution iranienne de 1979, s’est quant Ă  lui caractĂ©risĂ© par un systĂšme de rĂ©pression directe des groupes de gauche, lorsque ceux-ci faisaient entrave Ă  leur dĂ©veloppement, et plongeaient leur racine dans certains secteurs clĂ©s du monde universitaire, politique, syndical ou associatif : au Liban, le Hezbollah s’en prit physiquement, tout au long des annĂ©es 1980, aux militants chiites du Parti communiste libanais, lorsqu’ils s’agissaient de leur disputer l’hĂ©gĂ©monie de la rĂ©sistance nationale au sud- Liban. Deux de ses plus brillants intellectuels, Mahdi Amil et Hussein Mroue, furent assassinĂ©s par des militants proches de la mouvance islamique [3].

En Palestine, les groupes Ă©voluant dans la nĂ©buleuse des FrĂšres musulmans, qui allaient donner naissance au Mouvement de la rĂ©sistance islamique (Hamas) en 1986, s’en prirent Ă©galement aux militants du FPLP et du PPP. Le docteur Rabah Mahna, qui est aujourd’hui le nĂ©gociateur du Bureau politique du FPLP dans les discussions inter-palestiniennes, et qui est ainsi amenĂ© rĂ©guliĂšrement Ă  trouver des points d’accord autant avec le Hamas qu’avec le Djihad islamique, fut par exemple la victime d’une tentative d’assassinat par des militants du Hamas en 1986. Mais la vision qu’il a du mouvement islamique est dĂ©terminĂ©e par la rĂ©alitĂ© politique actuelle, non par celle du passé : s’expliquant au sujet du Hamas, il en souligne les points d’avancĂ©e et de stagnation, les deux se combinant plus ou moins diffĂ©remment selon la conjoncture politique : « Il y a eu une certaine Ă©volution dans Hamas. Depuis 1988, il s’est en effet peu Ă  peu transformĂ© d’une organisation de type FrĂšres musulmans en un mouvement de libĂ©ration nationale islamique. Nous, on a poussĂ© depuis Hamas Ă  intĂ©grer l’OLP, d’ĂȘtre un mouvement de libĂ©ration nationale au sein de l’OLP. Mais sa non- reconnaissance de l’OLP derniĂšrement Ă©tait trĂšs suspect pour nous (
) Nous ne mettrons donc pas la pression sur le Hamas, et nous le reconnaissons en tant que courant de la rĂ©sistance, et deuxiĂšmement en tant que gouvernement Ă©lu. Mais au- delĂ , nous on ne veut pas que le Hamas reste enfermĂ© dans une vision fermĂ©e, idĂ©ologique, de type FrĂšres musulmans : c’est pourquoi les forces politiques mondiales et arabes qui soutiennent la cause palestinienne mais qui ne sont pas d’accord avec tout ou partie du programme du Hamas doivent nous aider Ă  les faire sortir d’une vision enfermĂ©e, Ă  continuer leur Ă©volution. Sinon, en les isolant, ils risquent de retourner en arriĂšre, de retourner vers un mouvement de type intĂ©griste, comme avant 1988 [4]. »

S’il y a bien eu par le passĂ© affrontements, les diffĂ©rents modes d’opposition entre nationalistes, islamistes et gauche radicale peuvent ĂȘtre historiquement relativisĂ©s par une sĂ©rie de passages dynamiques, d’emprunts discursifs et idĂ©ologiques, de circulation militante entre ces trois secteurs politiques-clĂ©s du monde arabe : dĂ©jĂ , le sociologue Maxime Rodinson rappelaient qu’entre le nationalisme arabe, l’islam et le marxisme, existaient un « concordisme », qui favorisait la circulation des idĂ©es et des pratiques : « l’incompatibilitĂ© doctrinale incontestable des idĂ©ologies le cĂšde Ă  divers procĂ©dĂ©s de conciliation quand les considĂ©rations de stratĂ©gies internationales font pencher vers une attitude amicale entre les deux mouvements (communistes et musulmans). Il y a emprunt d’idĂ©es Ă  l’idĂ©ologie communiste par les Musulmans quand ces idĂ©es correspondent Ă  ce que leur rĂ©clame leur idĂ©ologie implicite, mĂȘme en dehors de cette attitude amicale. [
]. Quand on va plus loin, il y a normalement rĂ©interprĂ©tation des notions, des idĂ©es, des symboles musulmans comme Ă©quivalents d’idĂ©es ou de thĂšmes communistes courants. L’opĂ©ration est souvent faite par les communistes qui veulent pousser Ă  l’alliance. Quand l’effort de rĂ©interprĂ©tation est particuliĂšrement forcĂ©, on obtient ce qu’on a appelĂ© du concordisme. Le terme pourrait ĂȘtre peut-ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ© pour dĂ©signer un ensemble systĂ©matique de rĂ©interprĂ©tation [5] . »

Ce qu’Olivier CarrĂ© nommait pour sa part les « secteurs mĂ©dians » entre religion et nationalisme [6] se constate tout au long du siĂšcle et de l’émergence et du dĂ©veloppement de ces trois courants. La gĂ©nĂ©ration des fondateurs du mouvement national palestinien et du Fatah – Yasser Arafat, Khalil al Wazir, Salah Khalaf-, ont cĂŽtoyĂ© de prĂšs les FrĂšres musulmans, dans le cours des annĂ©es 1950 et 1960. Le nassĂ©risme lui-mĂȘme n’est pas exempte, dans les premiĂšres annĂ©es suivant la rĂ©volution de 1952, d’un rapport complexe Ă  l’islam politique. À ces parcours personnels, s’ajoutent une rĂ©utilisation et une rĂ©interprĂ©tation systĂ©matique des diffĂ©rents types de discours religieux ou politiques par un ensemble de mouvements, une circulation permanente des ensembles sĂ©mantiques et conceptuels. Par exemple, le Parti communiste irakien (PCI) n’a pas hĂ©si-tĂ© Ă  se rĂ©fĂ©rer aux fondements doctrinaires du chiisme, peu aprĂšs la rĂ©volution de 1958 et la prise du pouvoir par Abdel Karim Kassem. La perspective rĂ©volutionnaire fut associĂ©e, dans le discours du PCI, aux fondements millĂ©naristes et messianiques du chiisme, tandis que les dirigeants du Parti jouaient ardemment sur la proximitĂ© des termes shii’a (« chiite ») et shouyou‘i (« communiste » en arabe). Quand au terme « socialiste » (ishtarĂąkii), il fut abondamment utilisĂ© et transformĂ© par certains cadres et idĂ©ologues des FrĂšres musulmans comme Sayyid Quotb ou Muhammad al-Ghazali, dans la perspective d’un « socialisme islamique ».

Ainsi, on assiste depuis prĂšs d’un demi-siĂšcle Ă  une circulation dynamique et Ă  une mutation continue du vocabulaire politique. C’est dire combien l’idĂ©ologie elle- mĂȘme est soumise Ă  des processus complexes de passage, d’emprunts, et de rĂ©interprĂ©tations, toujours en mouvement une fois mise dans la pratique du politique. La temporalitĂ© du nationalisme des pays du tiers- monde est en effet une temporalitĂ© politique diffĂ©renciĂ©e, oĂč le passĂ©, les traditions culturelles et les hĂ©ritages idĂ©ologiques font figure de principes constituants dans la conscience nationale : le nationalisme anti- colonial est un espace hybride, en interaction avec les Ă©lĂ©ments des modernitĂ©s politiques, mais les critiquant en mĂȘme temps par la rĂ©cupĂ©ration, le recyclage et le rĂ©investissement d’élĂ©ments tirĂ©s du passĂ©. Les « concordismes » entre nationalisme et islam ont correspondu Ă  une actualisation politique et idĂ©ologique de l’islam, qui Ă©tait alors moins une survivance du passĂ© qu’un Ă©lĂ©ment culturel hĂ©ritĂ©, vivant et pratique, en interaction et en mĂ©tissage permanent avec le prĂ©sent politique, mĂȘme et y compris quand ce dernier Ă©tait d’essence sĂ©culiĂšre et laĂŻque. Le nationalisme anti- colonial, fondĂ© historiquement sur une sĂ©rie de concordisme, n’est pas l’envers de la modernitĂ©, mais sa reprise et son dĂ©tournement dans le contexte particulier d’un espace qui se sent dominĂ© tant politiquement que culturellement.

La dĂ©cennie des annĂ©es 1980 est essentiellement marquĂ©e par le passage croissant et spectaculaire de militants marxistes, souvent maoĂŻstes, ou nationalistes arabes, vers l’islamisme politique. C’est particuliĂšrement visible au Liban, ou, alors que l’OLP est peu Ă  peu amenĂ©e Ă  quitter le Pays des CĂšdres, et oĂč l’axe « palestino- progressiste [7] » disparaĂźt sous le coup de divisions internes et des pressions syriennes, de jeunes cadres entrent dans le Hezbollah, nĂ© entre 1982 et 1985. Il en va ainsi de la majoritĂ© des combattants de la Brigade Ă©tudiante, la Katiba Tullabiya , corps militaire attachĂ© au mouvement palestinien Fatah, qui s’engage peu Ă  peu dans la rĂ©sistance militaire islamique du « Parti de Dieu », ou dans d’autres structures Ă  caractĂšre islamique, sous les effets de la RĂ©volution iranienne.

L’expĂ©rience de cette tendance de gauche du Fatah nĂ©e au dĂ©but des annĂ©es 1970 est particuliĂšrement intĂ©ressante : bien avant la rĂ©volution iranienne, de jeunes militants libanais et palestiniens tentent d’articuler islam, nationalisme et marxisme arabe, preuve s’il en est que la question des rapports entre les trois Ă©tait dĂ©jĂ  posĂ©e. Saoud al Mawla, aujourd’hui professeur de philosophie Ă  l’UniversitĂ© libanaise de Beyrouth, ancien membre de la tendance de gauche du Fatah, est passĂ© au Hezbollah dans les annĂ©es 1980. Il l’a quittĂ© depuis. Il explique : « Dans les annĂ©es 1970, on a commencĂ© Ă  s’intĂ©resser aux luttes des peuples musulmans. C’était une mixture de nationalisme arabe et d’islam, ou bien de communisme arabo-islamique, de marxisme arabo-islamique. On a essayĂ© de faire comme les communistes musulmans soviĂ©tiques des annĂ©es 1920 : Sultan Ghaliev. Et on a commencĂ© Ă  Ă©tudier l’islam. On avait dĂ©butĂ© cela dĂšs que l’on a commencĂ© Ă  appliquer les principes maoĂŻstes : il faut connaĂźtre les idĂ©es du peuple, s’intĂ©resser au peuple, Ă  ce qu’il pense
. Il faut connaĂźtre les traditions du peuple. Et on a commencĂ© Ă  s’intĂ©resser aux traditions populaires, aux idĂ©es populaires, Ă  tout ce qui constitue la vie des gens. Et l’islam est venu comme Ă©tant le fondement de cette sociĂ©tĂ©, censĂ©e la mobiliser. Et c’était dans un sens militant, pragmatique, prendre et utiliser des facteurs qui peuvent mobiliser les gens dans la lutte. Et c’est comme cela qu’on s’est approchĂ© de l’islam : Ă  partir du maoĂŻsme, d’un point de vue thĂ©orique, et Ă  partir de l’expĂ©rience quotidienne (
.) Et c’est pour cela, quand la rĂ©volution iranienne est venue, on Ă©tait dĂ©jĂ  lĂ . Et mĂȘme cela ne s’est pas fait sur des bases idĂ©ologiques ou religieuses. C’est-Ă -dire qu’on a vu dans l’islam une force de civilisation, et de politique, un courant civilisationnel, qui peut regrouper des chrĂ©tiens, des marxistes et des musulmans, comme une rĂ©flexion, une riposte, un chemin de lutte, contre l’impĂ©rialisme, pour donner un chemin de lutte, pour renouveler nos approches, nos idĂ©es, nos pratiques politiques [8] ». Si les annĂ©es 1970 peuvent encore s’accommoder d’une rĂ©flexion thĂ©orique et politique chez certains militants sur l’articulation entre marxisme, islam et nationalisme, la dĂ©cennie des annĂ©es 1980, marquĂ©e par les effets politiques rĂ©gionaux idĂ©ologiques et politiques de la rĂ©volution iranienne, et par l’hĂ©gĂ©monie politique de l’islamisme politique, ne laisse plus la place Ă  ces Ă©laborations.

En l’occurrence, les annĂ©es 1990 marquent une rupture, et le systĂšme tacite qui avait vu s’allier concordisme et opposition violente s’est peu Ă  peu transformĂ© en une dynamique unitaire, ou le concordisme est d’autant plus favorisĂ© par un processus d’alliances tactiques entre ces diffĂ©rents courants. En effet, avec la guerre du Golfe, les tentatives de rĂšglement du conflit israĂ©lo-palestinien au travers de la ConfĂ©rence de Madrid et des Accords intĂ©rimaires d’Oslo en 1993, avec la fin de la bipolarisation Est-Ouest et la rĂ©unification du YĂ©men, un monde s’effondre. La phrasĂ©ologie rĂ©volutionnaire et nationaliste est Ă  bout de souffle, qu’elle soit islamiste ou marxiste ; cela n’est pas Ă©tranger non plus Ă  l’abandon progressif du discours messianique et tiers-mondiste par le rĂ©gime de TĂ©hĂ©ran, sous l’impulsion du nouveau PrĂ©sident Rafsandjani.

Les coordonnĂ©es politiques sont changĂ©es. Il faudra dĂ©terminer en quoi il y a eu un triple Ă©chec : de l’islam politique, du nationalisme arabe, de la gauche. Mais, au-delĂ , c’est bien sĂ»r les dĂ©combres des grandes utopies et des mythologies multiples du siĂšcle finissant que va peu Ă  peu se reconstruire et se recomposer le champ politique arabe. Les dynamiques Ă  l’Ɠuvre ne sont plus unilatĂ©rales : si, dans les annĂ©es 1980, l’islamisme rĂ©coltait les gains des dĂ©ceptions politiques et sociales du monde arabe, on assiste depuis 1991 Ă  une plus grande interaction et Ă  une plus large transversalitĂ© des dynamiques politiques : gauche, nationalisme et islamisme sont dĂ©sormais dans un processus complexe de réélaboration idĂ©ologique et programmatique, de croisements des problĂ©matiques, face Ă  un sentiment d’échec et d’impasse du monde arabe.

Cela se constate, en tout premier lieu, en Palestine : peu aprĂšs les accords d’Oslo, en octobre 1993, une « Alliance des forces palestiniennes » se constitue, composĂ©e d’élĂ©ments ayant rompu avec le Fatah, mais surtout du FPLP marxiste et du Hamas [9] . Des cadres progressifs de discussion se crĂ©ent entre nationalistes, marxistes, et islamistes : la Fondation Al-Quds , Ă  leadership islamiste, et surtout, la ConfĂ©rence nationaliste et islamique, lancĂ©e en 1994 Ă  l’initiative du Centre d’études pour l’unitĂ© arabe (CEUA) de Khair ad-Din Hassib, basĂ© Ă  Beyrouth, qui se rĂ©unit tous les quatre ans, destinĂ©e Ă  trouver des points d’accords tactiques et/oĂč stratĂ©giques, et Ă  redĂ©finir les liens, mĂȘme et y compris d’un point de vue idĂ©ologique entre la gauche, le nationalisme et l’islamisme. Le CEUA a ainsi tenu, en mars 2006, Ă  Beyrouth, une ConfĂ©rence gĂ©nĂ©rale arabe de soutien Ă  la rĂ©sistance, oĂč les principales directions des organisations nationalistes, marxisantes et islamistes (notamment le Hamas et le Hezbollah) Ă©taient fortement reprĂ©sentĂ©es.

Question nationale et question démocratique

Depuis 2000, les rythmes de recompositions politiques entre nationalisme, gauche radicale et islamo-nationalisme se sont accĂ©lĂ©rĂ©s : sous le coup de la Seconde Intifada et de l’intervention amĂ©ricaine en Irak, les convergences tactiques entre eux se sont accentuĂ©es. Elles tournent particuliĂšrement autour de la question nationale et de la question des « occupations », de la Palestine Ă  l’Irak en passant par le Liban, et de la dĂ©nonciation conjointe des politiques amĂ©ricaines et israĂ©liennes.

C’est d’abord sur le terrain que se rĂ©alisent ces alliances, dans le domaine pratique, non pas dans le domaine thĂ©orique : lors de la « guerre des trente-trois jours » entre le Liban et IsraĂ«l, en juillet et aoĂ»t 2006, le Parti communiste libanais (PCL) a rĂ©activĂ© certains de ses groupes armĂ©s au sud Liban et dans la plaine de Baallbeck, et a combattu militairement au cĂŽtĂ© du Hezbollah. Dans certains villages, comme Ă  Jamaliyeh, oĂč trois de ses militants sont morts lors d’une attaque d’un commando israĂ©lien repoussĂ©, c’est lui qui a pu prendre l’initiative militaire et politique, mĂȘme si le Hezbollah garde de facto le leadership politique, militaire et symbolique de cette guerre. Un Front de la rĂ©sistance s’est créé, regroupant pour l’essentiel le Hezbollah et la gauche nationaliste, du PCL au Mouvement du peuple de Najah Wakim [10] , en passant par la TroisiĂšme force de l’ancien Premier ministre SĂ©lim Hoss : fondĂ© sur le principe du droit Ă  la rĂ©sistance et dĂ©fendant les revendications principielles de Hezbollah, Ă  savoir la libĂ©ration des prisonniers libanais en IsraĂ«l et le retrait israĂ©lien des territoires libanais de Chebaa et de Kfar Chouba, ce Front avait comme dĂ©nominateur commun la question nationale et le positionnement par rapport Ă  IsraĂ«l : ce n’était pas, par exemple, un front prosyrien – le Parti communiste ayant pour sa part une longue tradition de lutte contre la tutelle et la prĂ©sence syrienne au Liban.

Mais l’accord tactique sur la question nationale ne permet pas de parler a priori de « recomposition politique ». Toute la question est alors de savoir si l’accord tactique peut se transformer en accord plus ou moins stratĂ©gique, et comprendre une vision Ă  long terme de la sociĂ©tĂ©, de l’Etat, des politiques Ă©conomiques. Or, c’est lĂ  que la transformation du champ politique arabe semble ĂȘtre la plus profonde : de 2000 Ă  2006, la sĂ©rie d’accords politiques entre gauche, nationalistes et islamistes s’est peu Ă  peu Ă©largie Ă  un ensemble de thĂ©matiques, ce qui est tout Ă  fait nouveau par rapport aux cadres d’alliances des annĂ©es 1980 et 1990.

La question nationale permet en effet de passer et d’effectuer une sĂ©rie de passages conceptuels, pratiques et politiques d’un domaine Ă  l’autre : en Egypte, la dĂ©nonciation des politiques amĂ©ricaines et israĂ©liennes cachait en effet une critique latente mais explicite du rĂ©gime du PrĂ©sident Moubarak. Rapidement, les cadres de mobilisation sur la question palestinienne et irakienne ont donnĂ© naissance Ă  une autre sĂ©rie de cadres politiques transversaux, touchant notamment Ă  la question dĂ©mocratique : des campagnes de dĂ©nonciation de la loi d’urgence de 1982 aux Ă©lections syndicales de novembre 2006, qui ont vu les FrĂšres musulmans, les radicaux de gauche du groupe Kefaya et les nassĂ©riens du mouvement al-Karamah s’allier pour contester la prĂ©dominance des listes du parti au pouvoir, le Parti National DĂ©mocratique, en passant par les campagnes de soutien au mouvement de protestation des juges Ă©gyptiens qui avaient dĂ©noncĂ© la fraude Ă©lectorale en mai 2006, le champ d’action et d’alliances est passĂ© rapidement de la question nationale Ă  la question de l’élargissement des droits dĂ©mocratiques.

Au Liban, le Mouvement du peuple, l’Organisation populaire nassĂ©rienne, sunnite, et dont le dirigeant, Oussama Saad, est dĂ©putĂ© de SaĂŻda, le CongrĂšs populaire arabe de kamal Chatila, une formation nassĂ©rienne, sont au cƓur du mouvement de protestation initiĂ© par Hezbollah et le Courant patriotique libre du GĂ©nĂ©ral Aoun en dĂ©cembre 2006, un mouvement trouvant sa voie dans le quotidien de gauche al- Akhbar : ici encore, la mobilisation de l’opposition ne touche pas qu’à la question nationale et aux « armes de la rĂ©sistance ». Les traits communs entre les organisations de l’opposition au gouvernement de Fouad Siniora touchent tant Ă  la question de la rĂ©forme de la loi Ă©lectorale et du systĂšme confessionnel, qu’à celle de la dĂ©finition d’une politique Ă©conomique d’état de type rĂ©gulateur, ou keynĂ©sien, sans pour autant remettre en cause les mĂ©canismes du marchĂ©, toutes options qui ne sont pas celles de la majoritĂ© parlementaire actuelle, trĂšs marquĂ©e par l’ultralibĂ©ralisme [11] . Un bon exemple en est le nouveau journal al-Akhbar, quotidien de gauche trĂšs proche du Hezbollah, dont le premier numĂ©ro est paru en aoĂ»t 2006, et qui cherche Ă  crĂ©er, de fait, des passerelles thĂ©oriques et politiques entre la gauche, le nationalisme et l’islam. Le PCL, qui a Ă©tabli au fur et Ă  mesure des annĂ©es une sorte de partenariat avec le Hezbollah, soutient l’opposition sur la question de la chute du gouvernement Siniora, considĂ©rĂ© comme pro- amĂ©ricain. Cependant, il ne cache pas que son alliance avec Hezbollah et des partis de l’opposition est un soutien critique : pour le PCL, le programme avancĂ© par Hezbollah n’est pas encore assez radical, tant sur le plan politique qu’économique, pour remettre en cause le systĂšme libanais, fondĂ© sur le confessionnalisme politique. PrĂȘt Ă  faire un front commun, il ne mĂ©nage pas ses critiques vis-Ă -vis de Hezbollah, mais d’une maniĂšre autre que dans les annĂ©es 1980 : dĂ©sormais, il s’agit de dĂ©finir une politique de gauche indĂ©pendante prĂȘte Ă  Ă©tablir une complĂ©mentaritĂ© et un Ă©change constructif avec le mouvement islamique chiite.

La question nationale joue donc aujourd’hui par extension : alors que dans les annĂ©es 1990 les alliances entre gauche, nationalistes et islamistes Ă©taient simplement fondĂ©es sur la reconnaissance d’un commun ennemi, en l’occurrence IsraĂ«l, la collaboration longue entre ces courants dĂ©bouche Ă  terme sur un Ă©largissement du champ d’action politique, allant de la question nationale Ă  la question dĂ©mocratique, et de la question dĂ©mocratique Ă  la question de l’Etat, des institutions et des formes sociales Ă  adopter. Le « concordisme » et les mĂ©diations entre les organisations et les courants se sont peu Ă  peu transformĂ©s en une dynamique d’action unitaire, qui, si elle n’est que trĂšs peu thĂ©orisĂ©e et conceptuellement pensĂ©e, prend une ampleur certaine dans la pratique politique quotidienne.

Cette recomposition politique n’est pas indĂ©pendante des nouvelles dynamiques politiques mondiales Ă  l’Ɠuvre, avec un mouvement alter-mondialiste installĂ© dans le paysage politique, mais aussi et surtout avec l’apparition d’un pĂŽle nationaliste de gauche en AmĂ©rique latine, symbolisĂ© par Hugo Chavez et Evo Morales. Un mouvement islamo-nationaliste comme le Hezbollah pense son rĂ©seau d’alliance sur un modĂšle tiers-mondiste : Hassan Nasrallah ne cesse de faire rĂ©fĂ©rence au prĂ©sident vĂ©nĂ©zuĂ©lien, tandis que son organisation a invitĂ©, avec le Parti communiste libanais, prĂšs de 400 dĂ©lĂ©guĂ©s issus de la gauche mondiale et du mouvement altermondialiste Ă  Beyrouth, du 16 au 20 novembre 2006, dans le cadre d’une ConfĂ©rence de solidaritĂ© avec la rĂ©sistance, et dont le communiquĂ© final fixait trois points stratĂ©giques : la question nationale et la lutte contre les occupations, la dĂ©fense des droits dĂ©mocratiques et la protection des droits sociaux [12]

Ce sont ces dynamiques de recomposition politique Ă  l’Ɠuvre qui sont aujourd’hui mĂ©sestimĂ©es : la question libanaise n’est gĂ©nĂ©ralement perçue que par le prisme syrien et iranien, en sous-estimant les dynamiques internes propres Ă  la sociĂ©tĂ© politique libanaise. La mouvance islamique subit elle-mĂȘme des tournants programmatiques profonds : le Hezbollah adopte un discours tiers-mondiste, fondĂ© sur l’opposition sud- nord et Mustakbar (arrogants) [13] / musta’adafin (opprimĂ©s), certains cadres des FrĂšres musulmans sont tiraillĂ©s entre leurs alliances avec la gauche et leur dĂ©fense principielle de l’économie de marchĂ©. Comme l’écrit Olivier Roy, « le jeu d’alliances (des islamistes) va dans deux directions possibles : d’une part, une coalition sur les valeurs morales (
.), et, d’autre part, une alliance sur des valeurs politiques essentiellement de gauche (anti-amĂ©ricanisme, altermondialisme, droits des minoritĂ©s), oĂč la ligne de clivage est clairement la question de la femme [14]

Et encore, mĂȘme la question de la femme est sujette aujourd’hui Ă  dĂ©bat : au Liban comme en Palestine, les associations fĂ©ministes issues de la gauche n’hĂ©sitent plus Ă  mener des campagnes communes avec les associations de femmes islamistes, notamment sur la question du droit au travail et de la dĂ©nonciation des violences faites aux femmes. Pour Islah Jad, militante fĂ©ministe palestinienne et chercheuse sur le mouvement des femmes en Palestine, il ne s’agit pas d’opposer les femmes laĂŻques aux femmes islamistes, mais de dĂ©velopper un discours fĂ©ministe sĂ©culier et radical tout en discutant et en travaillant communĂ©ment avec des cadres femmes du mouvement islamique : « Les islamistes ont admis que les femmes Ă©taient persĂ©cutĂ©es et victimes de l’oppression sociale, en le mettant sur le compte non pas de la religion mais des traditions qu’il faut faire Ă©voluer. Selon eux, l’Islam demande que les femmes s’organisent pour libĂ©rer leur pays, qu’elles soient Ă©duquĂ©es, organisĂ©es et politisĂ©es, actives pour le dĂ©veloppement de leur sociĂ©tĂ©. Le paradoxe est qu’il y a 27 % de femmes dans l’organisation du parti islamique et 15 % au sein du « politburo », plus que dans l’OLP (
) Comme je l’ai dĂ©jĂ  dit, le fait que les femmes islamistes ne cherchent pas Ă  bĂątir leur discours en s’appuyant sur des textes religieux donne des possibilitĂ©s aux femmes laĂŻques d’influencer la vision et les discours des islamistes, d’éviter les blocages. Nous ne pouvons pas demander nos droits en les isolant du contexte politique. C’est une Ă©tape trĂšs importante pour Ă©tablir une relation de confiance entre les tendances laĂŻques et les islamistes. Le fait que les islamistes acceptent de reconnaĂźtre que les femmes sont opprimĂ©es ouvre des perspectives sur les mesures Ă  prendre pour faire Ă©voluer la sociĂ©tĂ©. Il y aura toujours des conflits idĂ©ologiques et politiques, et c’est souhaitable. On ne sera pas totalement d’accord, mais, Ă  mon avis, les femmes laĂŻques peuvent peser dans le dĂ©bat idĂ©ologique avec les islamistes [15]. »

Cette interaction pratique entre gauche arabe, nationalisme et islamisme, si elle est nouvelle, et dĂ©sormais avĂ©rĂ©e tant dans le domaine syndical, associatif, Ă©lectoral et militaire, n’en est encore qu’à ses dĂ©buts. Des points d’accord sur la question nationale, la dĂ©mocratie ou la dĂ©fense des droits sociaux ne constituent pas encore un corpus assez clair et stable pour savoir jusqu’à quel point peut allier cette alliance. C’est qu’il y a justement un Ă©cart entre le pratique et le thĂ©orique : les concordismes se sont approfondis, mais il n’y a pas encore eu, dans le domaine intellectuel et thĂ©orique, de dĂ©finition claire et d’élaboration d’un langage commun. Les alliances sont encore majoritairement du domaine de l’empirique et du pratique, et manquent ainsi d’assises thĂ©oriques et d’un vĂ©ritable processus d’homogĂ©nĂ©isation. Encore une fois, le Liban fait plus ou moins exception. DerniĂšrement, il existe encore une disjonction entre les espaces nationaux : l’alliance entre la gauche, les nationalistes et les islamistes la plus forte se trouve aujourd’hui au Liban, dans la tentative de dĂ©finir ce que la gauche et le Hezbollah appellent une « sociĂ©tĂ© de rĂ©sistance » et un « Etat de rĂ©sistance ». En Palestine, les alliances entre le FPLP et le Hamas, par exemple, sont loin d’ĂȘtre aussi approfondies, les deux organisations gardant une mĂ©fiance rĂ©ciproque. En l’occurrence, le partenariat FPLP/Djihad islamique est quand Ă  lui Ă©tabli pleinement. En Egypte, une certaine mĂ©fiance persiste entre les FrĂšres musulmans et la mouvance de gauche. Or, cette question de la recomposition politique et des nouvelles alliances Ă  l’Ɠuvre dans le monde arabe est loin d’ĂȘtre secondaire : elle redessine en effet le visage du nationalisme panarabe, et pourrait Ă  terme constituer un redoutable dĂ©fi stratĂ©gique pour les rĂ©gimes en place, tout comme pour les Etats-Unis, et les puissances europĂ©ennes. L’ouverture du mouvement islamo-nationaliste sur sa gauche peut en effet ouvrir Ă  un nouveau nationalisme panarabe en mutation une redoutable ouverture stratĂ©gique et internationale : il peut aboutir Ă  la réémergence d’un pĂŽle tiers-mondiste et nationaliste Ă  l’échelle internationale, comme le suggĂšre symboliquement cette sĂ©rie d’affiches rouges collĂ©es dans les rues de Beyrouth depuis septembre 2006, et qui voit se cĂŽtoyer les trois portraits de Nasser, de Nasrallah et de Chavez. Il ne s’agit donc pas de postuler l’émergence d’un islamisme de gauche, il n’y en a pas. Mais il s’agit de comprendre que le dĂ©veloppement d’un islamisme ouvert sur sa gauche et ses dimensions nationales change quelque peu la donne politique, et enclenche des processus longs de recomposition politique, stratĂ©gique et idĂ©ologique. Les vingt derniĂšres annĂ©es ont vu le rĂ©fĂ©rent politique islamiste se pluraliser, avec un islamisme fondamentaliste dĂ©territorialisĂ© sur le modĂšle du rĂ©seau Al-QaĂŻda, la soumission d’un nĂ©o-fondamentalisme islamique aux modĂšles du marchĂ©, l’apparition d’un islamisme turc gouvernemental s’apparentant plus au modĂšle consensuel de la dĂ©mocratie chrĂ©tienne des annĂ©es 1950 qu’à celui de l’islam comme modĂšle d’Etat. Encore Ă  ses dĂ©buts mais en dĂ©veloppement exponentiel, l’émergence d’un pĂŽle islamiste ouvert tout autant sur sa gauche que sur ses dimensions nationalistes et arabes constitue un phĂ©nomĂšne politique qui est Ă  mĂȘme, lui aussi, de recomposer durablement la scĂšne politique moyen-orientale.

Notes:

[1] Le Fatah, Mouvement national de libĂ©ration de la Palestine , est l’organisation historique du nationalisme palestinien. Le FPLP (Front populaire de libĂ©ration de la Palestine ), et le FDLP (Front dĂ©mocratique de libĂ©ration de la Palestine ), sont les deux organisations principales de l’extrĂȘme gauche. Le Hamas – Mouvement de la rĂ©sistance islamique-, est la premiĂšre organisation islamiste, en terme de forces militantes. Enfin, le PPP (Parti populaire palestinien), est l’ancien Parti communiste.

[2] Jamal Samhadana a depuis été exécuté dans une opération ciblée israélienne, en juin 2006.

[3] Certaines sources libanaises accusent directement le Hezbollah. Cependant, des dirigeants du Parti communiste laissent aujourd’hui le doute subsister, et n’écartent pas la thĂšse d’assassinats perpĂ©trĂ©s par des groupes intĂ©gristes sunnites.

[4] Rabah Mhana, membre du Bureau politique du FPLP, entretien avec l’auteur, Paris, 2 mai 2006.

[5] Maxisme RODINSON, « Rapport entre islam et communisme », Marxisme et monde musulman, Seuil, 1972, pp 167- 168.

[6] A ce sujet, cf. Olivier CARRE, L’Utopie islamique dans l’orient arabe, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1994.

[7] L’axe que l’on a communĂ©ment appelĂ© « palestino- progressiste » est constituĂ© des organisations de la gauche libanaise (Parti socialiste progressiste, Organisation d’action communiste du Liban), et des forces palestiniennes au Liban (Fatah, FPLP, FDLP). Dans les annĂ©es 1970, c’est lui qui s’oppose principalement, dans le cadre de la guerre civile, aux milices chrĂ©tiennes, les Phalanges libanaises.

[8] Saoud al Mawla, entretien avec l’auteur, Quoreitem, Beyrouth, 27 mars 2007.

[9] L’ensemble de ces organisations s’unissent sur le principe du refus inconditionnel des Accords intĂ©rimaires d’Oslo, signĂ©s en 1993 par le leader de l’OLP, Yasser Arafat.

[10] Le Mouvement du peuple est une organisation nationaliste arabe de gauche. Son leader, Najah Wakim, ancien député nassérien de Beyrouth, est une figure politique nationale, réputé notamment pour ses campagnes de luttes contre la corruption.

[11] Le point de vue de l’opposition concernant la rĂ©forme du systĂšme libanais sur le modĂšle d’un Etat « fort et juste » peut notamment ĂȘtre compris au- travers de deux documents clĂ©s : premiĂšrement, le Document d’Entente mutuelle entre le Hezbollah et le Courant patriotique libre du 6 fĂ©vrier 2006, et, deuxiĂšmement, le document commun produit par le Parti communiste libanais et le Courant patriotique libre : Comment rĂ©soudre la crise politique au Liban ? Les points communs entre le Parti communiste libanais (PCL) et le Courant patriotique libre (CPL), 7 dĂ©cembre 2006.

[12] La sĂ©ance d’ouverture de la ConfĂ©rence , le 16 novembre 2006, au Palais de l’Unesco Ă  Beyrouth, Ă©tait symbolique de cette convergence progressive entre la gauche mondiale et alter- mondialiste et la mouvance islamo- nationaliste : parmi les intervenants d’ouverture, se trouvaient notamment Mohammad Salim, membre du Parlement indien et du Parti communiste indien, Gilberto Lopez, du Parti de la rĂ©volution dĂ©mocratique mexicain, Victor Nzuzi, agriculteur et leader syndicaliste congolais, Georges Ishaak, dirigeant de Kifaya et militant de la gauche Ă©gyptienne, Khaled Hadade, SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du Parti communiste libanais, et enfin Naim al-Quassem, SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral adjoint et numĂ©ro deux du Hezbollah libanais. .

[13] L’opposition Arrogants/ OpprimĂ©s renvoie tout droit Ă  la RĂ©volution iranienne de 1979, ainsi qu’au principe doctrinaire du chiisme. Dans le vocabulaire politique de la premiĂšre pĂ©riode de la RĂ©volution de 1979, le couple Arrogants/ OpprimĂ©s signifiait l’opposition entre les pauvres et les riches, mais aussi entre le sud « colonisé » et le nord « impĂ©rialiste ». Cette catĂ©gorisation Ă©tait autant adoptĂ©e par les Mollahs autour de Khomeyni que par les groupes de gauche et nationaliste.

[14] Olivier Roy, « Le passage Ă  l’ouest de l’islamisme : rupture et continuité », Islamismes d’occident. Etat des lieux et perspectives, sous la direction de Samir Amghar, Lignes de repĂšres, 2006.

[15] Islah Jad, entretien avec Monique Etienne, revue Pour la Palestine , mars 2005.

(Source : Site du Centre tricontinental (CETRI), Belgique, le 20 janvier 2009)

Lien :http://www.cetri.be/spip.php?article1022

Le Centre tricontinental (CETRI), organisation non gouvernementale fondĂ©e en 1976 et basĂ©e Ă  Louvain-la-Neuve (Belgique), est un centre d’Ă©tude, de publication, de documentation et d’Ă©ducation permanente sur le dĂ©veloppement et les rapports Nord-Sud. Le CETRI a pour objectif de faire entendre des points de vue du Sud et de contribuer Ă  une rĂ©flexion critique sur les conceptions et les pratiques dominantes du dĂ©veloppement Ă  l’heure de la mondialisation nĂ©olibĂ©rale. Il s’attache en particulier Ă  la comprĂ©hension et Ă  la discussion du rĂŽle des acteurs sociaux et politiques du Sud en lutte pour la reconnaissance des droits sociaux, politiques, culturels et Ă©cologiques.

Les activitĂ©s du CETRI sont de quatre types : Ă©tude, formation, publication, documentation. Le rĂŽle des mouvements sociaux dans le Sud, la dynamique du mouvement altermondialiste, l’Ă©volution des dĂ©mocraties en AmĂ©rique latine, la portĂ©e des alternatives sociales et politiques dans le Sud, les logiques et consĂ©quences des ajustements structurels et de l’aide au dĂ©veloppement… constituent les principaux thĂšmes des travaux de ces derniĂšres annĂ©es.

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