Le REMDH et l’Observatoire: TUNISIE : des magistrats indépendants empêchés de participer au congrès de l’Association des Magistrats Tunisiens Index on Censorship: Tunisie: Justice assujettie – Jugement clément envers les juges politisés de Tunis
OLPEC: La police interdit par la force aux journalistes de couvrir les événements de Sidi Bouzid AP: Tunis dénonce une « manipulation » des troubles de Sidi Bouzid AFP: Tunisie:/violences à Sidi Bouzid: le pouvoir regrette « un incident isolé » Slim Bagga: Zine El Abidine benaleone!!! Maghreb Emergent: Disparition de cargaisons de blé, la Tunisie en risque de pénurie Le Temps Suisse : Affolant le négoce lémanique, RIAS Trading court après ses stocks de blé Le Matin Dimanche: NÉGOCE – Une nouvelle plainte a été déposée contre l’Ukraine – Les cas de blé «volatilisé» vont se multiplier à Genève Tunivisions: Polémique sur l’appel à la prière : réponse de la députée – La députée Ryadh Zghal explique sa position Jeune Afrique: Algérie – WikiLeaks : la presse se régale Le Temps d’Algerie: 3 harragas racontent l’odyssée de Tabarka
Copenhague, Genève, Paris, le 21 décembre 2010. Le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme (REMDH) et l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme – un programme conjoint de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) – condamnent fermement la persistance d’actes de harcèlement et les atteintes à la liberté de mouvement à l’encontre de plusieurs magistrats indépendants à l’occasion de la tenue du congrès de l’Association des Magistrats Tunisiens (AMT).
Organisé dimanche 19 décembre dans la banlieue de Tunis, le 13ème congrès de l’Association des Magistrats Tunisiens (AMT) a une nouvelle fois été marqué par l’absence des magistrats membres du bureau exécutif démocratiquement élu de l’association, évincés depuis 2005 après avoir publiquement pris position en faveur d’une plus grande indépendance du judiciaire en Tunisie.
Les jours précédents le congrès, M. Ahmad Al Rahmouni, Mme Kalthoum Kennou, Mme Wassila Kaabi, Mme Raoudha Karafi, Mme Leila Bahria, Mme Noura Al Hamdi ont fait l’objet de filatures rapprochées. Leurs domiciles ont été encerclés par des policiers les empêchant de se déplacer pour accéder au lieu où se tenait le congrès. Le 19 décembre, M. Hamadi Al Rahmani, également membre du bureau légitime de l’AMT, a été empêché d’accéder à l’hôtel où était organisé le congrès par des membres des forces de l’ordre en civil qui lui ont indiqué « agir sur instruction » du ministère de l’Intérieur.
Ces restrictions font écho aux mesures prises par les autorités tunisiennes lors des derniers congrès de l’AMT en 2006 et 2008 visant à empêcher les structures démocratiquement élues de l’association de faire entendre leur voix auprès de leurs confrères. En 2006, le règlement intérieur de l’association était même modifié afin d’empêcher ces magistrats de se porter candidats au comité exécutif de l’Association.
Ces nouvelles atteintes aux libertés de mouvement et d’association font également suite aux mesures arbitraires et au harcèlement dont les magistrats du bureau exécutif démocratiquement élu de l’AMT sont systématiquement la cible depuis des années (mutations arbitraires en violation du principe de l’inamovibilité, blocage de l’avancement, ponctions injustifiées sur salaire etc.). Le REMDH et l’Observatoire constatent avec inquiétude que les directions successives de l’AMT n’ont jamais pris la défense de leurs confrères, en contradiction avec le mandat de cette association.
Le REMDH et l’Observatoire demandent aux autorités tunisiennes de :
· mettre un terme au harcèlement des juges indépendants en Tunisie, et cesser toute forme d’ingérence dans les élections et les activités de l’AMT
· se conformer en toutes circonstances aux Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature et notamment de son article 8 qui dispose que « les magistrats jouissent, comme les autres citoyens, de la liberté d’expression, de croyance, d’association et d’assemblée; [qu’ils exercent] de manière à préserver la dignité de leur charge et l’impartialité et l’indépendance de la magistrature. »
· mettre la législation et la pratique en conformité avec les standards internationaux relatifs à la profession de magistrat notamment en réformant la composition, les attributions et les règles de fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM), en assurant le passage automatique des magistrats d’un grade à l’autre, et en consacrant la principe de l’inamovibilité des juges dans la Constitution.
Alors que l’Union Européenne négocie actuellement le rehaussement de ses relations avec la Tunisie par l’octroi du « statut avancé » dans le cadre de la politique de voisinage, le REMDH et l’Observatoire :
· rappellent que le respect des droits humains constitue un « élément essentiel » de cette relation,
· demandent à l’UE de prendre publiquement position sur les actes de harcèlement contre les magistrats indépendants dans ce pays,
· appellent les institutions de l’UE à intégrer de façon effective dans les négociations avec la Tunisie la question de l’indépendance de la justice.
Contact,
shaimaa Aboul El khir,+020101077207, shy@euromedrights.net, (Anglais,Arabe)
18 décembre 2010
Des observateurs cyniques pourraient conclure que le gouvernement tunisien s’en est tiré à bon compte, lorsque l’Association Internationale des Juges (AIJ) avait récemment émis son jugement sur le système judiciaire tunisien, assujetti et manipulé par le régime.
Le contrôle majoritaire exercé par le régime au sein du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) – l’organisme qui nomme les juges, décide de leur affectation et assure la discipline interne – enfreint non seulement tous les principes fondamentaux de l’indépendance du corps judicaire, condition sine qua non de l’État de droit, mais bafoue aussi les droits constitutionnels fondamentaux de la Tunisie et contredit de façon flagrante les principes directeurs de l’AIJ.
Ceci a suscité chez certains l’espoir que le dédain affiché par le CSM envers les normes de l’AIJ provoque une sanction de la part de cette dernière. L’Ivoirienne Fatoumata Diakite, présidente de l’AIJ, a plutôt préféré accorder au régime un non-lieu, en se retirant du débat et en qualifiant la série d’abus perpétrés par le CSM tunisien d’« affaire interne ».
Ce qui ne veut pas dire que l’AIJ n’est pas au courant des mauvais agissements du CSM. En effet, la direction de l’AIJ, présidée par Diakite, déclare que si le CSM était conduit par une majorité de juges élus par leurs pairs et non désignés par le pouvoir, et que si le ministre de la justice n’en était pas le vice-président, tout cela « consoliderait l’État de droit dans le pays, et tous les juges, ainsi que la société civile, en tireraient un grand bénéfice. » Mais la direction de l’AIJ ne semble pas trop se soucier de cette situation.
Depuis que le juge Mokhtar Yahyaoui a écrit sa lettre ouverte en 2001 pour mettre en garde contre l’ingérence du pouvoir politique dans les affaires du corps judiciaire, menaçant ainsi l’État de droit – Yahyaoui a été renvoyé, censuré et sa famille a payé le prix de son acte – le régime a œuvré pour que les juges prononcent les verdicts dictés par lui à l’encontre des opposants pris pour cible.
Lorsque l’Association des Magistrats Tunisiens (AMT) a adopté la position de Yahyaoui, son siège a été fermé par le Ministère de la Justice et des mesures ont été prises pour évincer les défenseurs de l’indépendance de la justice. Pendant le mois courant, Index on Censorship et PEN International, présents en Tunisie à l’occasion de la Journée Internationale des Droits Humains, ont rendu visite à quelques victimes.
Parmi ces dernières se trouve Kalthoum Kennou, mutée pra l CSM, contre son gré, à Tozeur, une ville du sud, en guise de punition pour sa position en faveur de l’indépendance de la justice. Beaucoup de femmes juges de l’AMT, comme Kennou, ont été particulièrement victimes de mesures de rétorsion. Pourtant, bien qu’elle admette « que la permanence des juges dans leurs fonctions est un principe fondamental », l’AIJ s’est jusqu’ici refusé à les défendre.
Index préside Échange international de la liberté d’expression: le Groupe d’observation de la Tunisie. (en anglais:IFEX-TMG), une alliance de vingt organisations de défense de la liberté d’expression. Le TMG a rapporté de nombreuses distorsions de la loi visant à punir les journalistes et museler la liberté d’expression. Ainsi des juges inféodés au régime accordent-il de la crédibilité à des accusations ridicules et à des preuves qui ne tiennent pas.
Le journaliste Fahem Boukaddous a été jeté en prison pour avoir « constitué une association criminelle susceptible de porter atteinte aux personnes et à leurs biens », alors qu’il n’a fait que des reportages sur les mouvements de protestation publics contre le chômage et la corruption dans la région minière de Gafsa, en 2008. Le reporter de Radio Kalima Mouldi Zouabi a été attaqué en avril, mais peu de temps après, la police l’a bizarrement accusé, lui qui était victime, de « violences aggravées et injures publiques » envers son agresseur.
Index on Censorship a recommandé à l’AIJ de reprendre sa précédente enquête, franchement décevante, effectuée en 2008 avec la participation de Mme Diakite, pour s’enquérir de la situation en Tunisie, mais cette fois-ci avec un regard plus fouinant. L’AIJ doit exiger, au moins, que l’AMT de tienne fermement aux principes d’Indépendance de la Justice, établis par l’AIJ, ainsi qu’à la Charte Universelle du Juge, approuvée en 1999, et aussi que le CSM agisse pour aligner la législation tunisienne sur les normes internationales.
Il est improbabale que les sessions de l’AMT, réunie ce week-end à Tunis, discutent de l’érosion progressive de l’indépendance de la justice, ou qu’elles daignent jeter un regard sur la panoplie de persécutions auxquelles sont soumis les juges indépendants: mutation vers des régions éloignées de la capitale, déni de promotion, coupes de salaire injustifiées, interidction de voyager etc. L’obeïssance silencieuse au Ministère de la Justice permettra à certains juges de conserver leur poste et évitera à leurs enfants de perdre leurs droits à l’éducation et au voyage.
La question pour 2011 ce n’est pas de savoir si les juges, à l’intérieur comme à l’extérieur de la Tunisie, continueront à ignorer les exactions du régime, mais si l’Union Européenne s’y intéreressera de près. La Tunisie est en train de courtiser l’UE pour conclure avec elle un arccord spécial sur le commerce et l’aide économique.
Les cyniques pourraient arguer que les affaires priment sur les droits humains , si l’on se place dans un horizon plus large. Mais qui, en dehors d’un juge tunisien indépendant, peut protéger les investisseurs de l’UE de cette sorte de corruption aléatoire, récemment évoquée par des diplomates américains cités par WikiLeaks ?
Les intérêts d’affaires, impliquant le placement sommes énormes entre les mains de la Tunisie, pourraient être le meilleur argument en faveur d’une justice indépendante en Tunisie. (Traduit de l’anglais par O. K.) Original anglais:http://www.indexoncensorship.org/2010/12/politicised-tunis-judges-get-a-light-sentence-from-their-peers/
Tunis le 21 décembre 2010
Depuis le déclenchement des émeutes populaires à Sidi Bouzid (260 km Sud Est) le 17 décembre, qui ont fait suite à l’immolation par le feu d’un jeune diplômé chômeur, d’importantes forces de police ont bouclé la ville interdisant tout accès. La majorité des journalistes qui ont essayé de se déplacer pour couvrir les événements ont fait face à une violence policière.
· L’après-midi du17 décembre, Zouhayr Makhlouf, correspondant de Assabilonline a été passé à tabac par des agents de la police politique devant son domicile parce qu’il a refusé d’obtempérer à l’interdiction de sortir et rejoindre la ville de Sidi Bouzid qu’ils lui avaient faite. La scène s’est déroulée sous les yeux de sa jeune fille et de sa femme.Zouhayr Makhlouf souffre de nombreuses contusions et hématomes sur son visage et son corps.
· Depuis le 19 décembre, de nombreux journalistes indépendants ont été placés sous une surveillance policière collante avec interdiction de quitter leur ville de résidence. Ismail Dbara, correspondant de Elaph, a été victime d’une mesure similaire et les policiers ont civil ont utilisé un langage ordurier pour lui signifier cette interdiction. Nizar Ben Hassen, correspondant de radio Kalima, a été pris en chasse par trois voitures de police banalisées stationnées aux accès de son domicile à La Chebba et lui ont clairement dit qu’il était hors de question de se rendre à Sidi Bouzid en vue de couvrir les émeutes.
· Le 20 décembre, Moez El Bey, correspondant de Radio Kalima à Sfax, lui aussi sous surveillance policière, est allé interviewer un blessé de Sidi Bouzid, admis en urgence à l’hôpital de Sfax pour des soins aux yeux ; il a été cueilli à sa sortie, emmené au poste de police de l’hôpital où il a subi une fouille corporelle humiliante ; les policiers ont pris son appareil d’enregistrement et lui ont restitué après avoir effacé tous les enregistrements ; ils ont également pris son appareil photo dont ils retiré la carte mémoire qu’ils ont gardé et l’ont menacé de représailles s’il s’entête à couvrir les événements relatifs à Sidi Bouzid.
Au moment où les journalistes indépendants sont interdits de faire leur travail, les médias officiels sont sortis de leur mutisme concernant les émeutes de Sidi Bouzid pour les qualifier de « rumeurs infondées » citant une source officielle qui s’indigne « des tentatives de certaines parties d’instrumentaliser cet incident isolé, de le dévier de son véritable contexte et de l’exploiter à des desseins politiques malsains, en en faisant, dans un objectif de manipulation et de provocation, une affaire de droits de l’Homme et de libertés, et en mettant en doute les acquis de développement de la région.”
L’Observatoire
· Dénonce les violences exercées contre les journalistes qui n’ont fait qu’exercer leur métier.
· Estime que l’attitude de déni de la réalité dans laquelle s’enferme le pouvoir n’est pas une politique intelligente et que la persécution des journalistes qui veulent faire la lumière sur ces événements et informer l’opinion publique de manière honnête, est le meilleur démenti aux allégations des autorités officielles qui cherchent ainsi à cacher aux Tunisiens la réalité en utilisant les procédés de désinformation.
· Considère que ces actes constituent une violation des engagements de l’Etat tunisien en matière de liberté d’expression et notamment l’article 19 du Pacte Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui énonce « Toute personne a droit à la liberté d’expression; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix.”
Tunis dénonce une « manipulation » des troubles de Sidi Bouzid
AP 21/12/10 16:52 TUNIS (AP) — Les autorités tunisiennes ont dénoncé mardi une « manipulation » et une « instrumentalisation à des desseins politiques malsains » des troubles de ces derniers jours dans la région de Sidi Bouzid (centre-ouest) à la suite d’une tentative de suicide d’un jeune vendeur ambulant qui s’est immolé par le feu devant le gouvernorat (préfecture). Cet acte de « désespoir » a donné lieu à des accrochages entre la police et des habitants en colère, causant des dégâts matériels et plusieurs blessés parmi les forces de l’ordre. De nombreux manifestants ont été interpellés. Un communiqué transmis à l’Associated Press en attribue la cause à la persistance du vendeur ambulant qui « exerçait son activité commerciale dans un lieu non autorisé », dans son « refus de se conformer aux règlements ». Diplômé de l’université, Mohamed Bouazizi, 26 ans, a tenté de mettre fin à ses jours en s’aspergeant d’essence et en y mettant le feu après la saisie de sa marchandise, des fruits et légumes, par des agents municipaux. Selon une source de l’opposition, c’était le seul moyen de subsistance du jeune homme et de sa famille; dont il était l’unique soutien. Transféré au centre de traumatologie et des grands brûlés de Ben Arous, près de Tunis, il se trouve dans « un état critique ». Tout en « regrettant ce douloureux incident », les autorités « s’indignent des tentatives de certaines parties d’instrumentaliser » ce qu’elles qualifient d »’incident isolé », en allusion notamment au Parti démocratique progressiste (PDP). Pour cette formation de l’opposition légale, la multiplication de tels incidents dans plusieurs régions du pays illustre un état « d’injustice sociale » et de « fort mécontentement » qui appelle une « révision des choix économiques et sociaux et l’ouverture des domaines de la libre expression pour tous les Tunisiens ». Le gouvernement les accuse de « dévier (l’incident) de son véritable contexte et de l’exploiter à des desseins politiques malsains ». Il s’insurge contre la volonté d’en faire « dans un objectif de manipulation et de provocation, une affaire de droits de l’Homme et de libertés ».
Tunisie:/violences à Sidi Bouzid: le pouvoir regrette « un incident isolé »
D’après AFP 20/12/2010 à 22:50:56 Les autorités tunisiennes ont affirmé lundi que les heurts qui ont opposé la police à des manifestants à Sidi Bouzid (265 km au sud de Tunis) ne sont qu’un « incident isolé » et dénoncé son exploitation à des fins politiques « malsaines ». Ces accrochages ont eu lieu samedi entre des forces de sécurité et des habitants en colère pour avoir été empêchés de rencontrer le gouverneur (préfet) de Sidi Bouzid, après la tentative de suicide d’un jeune vendeur ambulant auquel les agents municipaux avaient saisi sa marchandise de fruits et légumes, avait annoncé la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’homme (LTDH). Les forces de sécurité ont procédé à des arrestations et utilisé des lacrymogènes pour disperser la foule observant un sit-in de protestation devant de la préfecture et scandant des slogans pour réclamer le droit de travailler, en soutien au jeune commerçant. Dans une première réaction lundi soir, les autorités ont affirmé que ce vendeur ambulant « exerçait son activité commerciale dans un lieu non autorisé » et avait « refusé de se conformer aux règlements » et de changer d’endroit. « Lorsque les agents municipaux ont tenu à appliquer la loi, le vendeur s’est obstiné dans son refus et a tenté de se suicider en s’immolant par le feu », ont expliqué les autorités dans un communiqué publié par l’agence gouvernementale TAP. Mohamed Bouazizi, âgé de 26 ans, diplômé de l’université et seul soutien de sa famille, a voulu récupérer sa marchandise saisie, mais il a été « agressé » par un agent de la municipalité, selon un témoin. Désespéré et empêché de déposer une plainte à la préfecture, il a tenté de s’immoler par le feu. « Autant nous regrettons ce douloureux incident, autant nous nous indignons des tentatives de certaines parties d’instrumentaliser cet incident isolé, de le dévier de son véritable contexte et l’exploiter à des desseins politiques malsains », ont ajouté les autorités. Outre la LTDH, le Parti démocratique progressiste (PDP, opposition légale) a évoqué l’incident en saluant dans un communiqué le mouvement de protestation à Sidi Bouzid, et appelé à la libération des personnes arrêtées et au retrait des forces de sécurité qui encerclent la ville. Selon une source syndicale locale, les manifestations de protestation se sont poursuivies lundi dans plusieurs quartiers de Sidi Bouzid et d’autres se sont déclenchées spontanément dans la localité proche de Meknes, alors que Mohamed Bouazizi était transféré au centre médical des grands brûlés à Ben Arous, près de Tunis. Les médias locaux n’ont pas évoqué ces incidents, seule la télévision satellitaire Al-Jazira a diffusé dimanche et lundi des images de manifestations jetant des pierres aux forces de sécurité et d’attroupement devant la préfecture.
ZINE EL ABIDINE BENALEONE!!!
par Slim BAGGA Il y a une vingtaine d’années, un charretier qui essayait de gagner sa subsistance a tenté de s’immoler par le feu sur la place publique à Kairouan. Le gouverneur, Noureddine Hafsi, auourd’hui disparu, ne voulait plus voir les charrettes dans la ville d’Okba, à quelques jours de la visite de Zine El Abidine Benaléone. Aux yeux de ce gouverneur, qui avait fait ses preuves en tant que barbouze dans la localité sensible d’El Ouardia, le progrès et le développement de la ville de Kairouan sont avant tout cosmétiques. En débarrassant la ville des charrettes, elle accède au progrès et à la prospérité. Et peu importe si une ou plusieurs familles de cette région, frappée depuis des lustres par un taux de chômage effarant, qui ne vivaient que de leurs charrettes, étaient condamnées à la faim. Le geste désespéré du charretier de Kairouan avait provoqué un tel émoi et une telle colère dans la ville qu’on dut limoger le gouverneur Hafsi. Et limoger, dans l’esprit du Parrain Benaléone, ne veut jamais dire sanctionner, mais protéger voire promouvoir. Ainsi, celui qui voulait falsifier et maquiller la réalité économique de la ville de Kairouan a-t-il été bombardé chef du RCD à Paris, avec salaire mirifique, voiture de fonction et tutti quanti. Plus récemment, la semaine dernière, et alors même que la blessure des événements du Bassin minier de Redeyef est loin d’avoir cicatrisé, voilà qu’un jeune diplômé tente de s’immoler par le feu dans un geste qui ressemble fort à un ultime appel à la résistance contre la mafia policière des Benaléone. Le silence étourdissant de la junte au pouvoir et ses propagandistes dignes de Goebbels qui a entouré cette affaire en dit long sur les craintes de Carthage que ce message de protestation ne fasse tâche d’huile. Et pour cause: le geste de Mohamed Bouazzi n’était pas ou pas seulement un acte désespéré d’un jeune en difficulté. C’était un message d’amour de la vie, un appel pressant à ce qu’on ouvre enfin les yeux pour prendre notre destin en main et chasser cette dictature. Une dictature qui n’est devenue fatalité que par notre silence complice, nos peurs et notre lâcheté. Aujourd’hui plus que jamais, la population, les jeunes, les damnés par la tyrannie 7 novembriste peuvent inverser la situation. Il n’y a rien à attendre des partis politiques sclérosés et amorphes ni des représentants des Organisations dites de la société civile calculatrices et accrochées autant à leurs téléphones qu’à leurs statuts de notables. Le combat de la liberté pour la Tunisie et de la dignité pour les Tunisiens se joue dans la rue. ZINE EL ABIDINE BENALEONE et la mafia policière ne tiendraient pas une semaine. Il suffit de relever la tête et de le vouloir… Slim BAGGA
Disparition de cargaisons de blé, la Tunisie en risque de pénurie
Écrit par Yassin Temlali Lundi, 20 Décembre 2010 14:14 Des cargaisons de 350.000 tonnes de blé destinées à la Tunisie et à l’Egypte ont disparu sans laisser la moindre trace, révèle « Le Matin Dimanche » qui paraît à Lausanne. Ces deux pays risquent de ne pas les obtenir, précise le journal suisse. Le trader russe RIAS Trading, basé en Suisse, n’est pas en mesure de les livrer, du moins pas dans les délais fixés initialement. Un responsable de RIAS Trading cité par le journal a reconnu que cette quantité de blé n’était tout simplement pas disponible. Pourtant, note « Le Matin Dimanche », pas plus tard que le 11 novembre dernier, une société de surveillance a bien validé l’existence et la qualité des cargaisons pour rassurer les banques qui ont financé leur acquisition par le trader, en attendant qu’il soit payé par les commanditaires. Les quatre banques concernées sont la BNP Paribas (Suisse), exposée à un défaut de remboursement à hauteur de 80 millions de francs suisses, la Banque Cantonale de Genève (BCG) pour quelque 8 millions de francs, la Banque Cantonale Vaudoise (BCV) et une « autre banque suisse », pour des montants qui n’ont pas été divulgués.La BCG a implicitement reconnu la véracité de l’affaire. « Le Matin Dimanche » indique qu’elle a diffusé un avertissement sur ses résultats 2010 en baisse de 25% expliquant que l’une des causes de ce recul réside dans « les tensions sur les marchés des denrées agricoles de première nécessité [qui] ont entraîné des difficultés pour quelques sociétés de négoce opérant dans l’arc lémanique [l’aire urbaine autour du lac Léman, NDLR]». La piste russe Comment une aussi grosse quantité de céréales a-t-elle pu s’évanouir dans la nature alors que son existence et sa qualité sont censées avoir été établies par une firme spécialisée ? Le journal helvétique estime qu’aucune piste ne doit être négligée : « une fraude de la part du trader, un manquement de la société de surveillance à sa tâche ou une saisie inattendue du blé par le gouvernement russe ». « Le Matin Dimanche » semble néanmoins privilégier cette dernière piste. Il rappelle qu’en août 2010, Moscou « a décrété un embargo total sur les exportations de céréales russes, qui court jusqu’au 31 décembre prochain ». Cet embargo, explique-t-il, visait à « contenir la hausse des prix du blé sur le marché intérieur, engendrée par l’effondrement des récoltes en raison de la canicule estivale ». Il se peut donc « que cette cargaison ait été interdite de sortie par le gouvernement russe », conclut-il en citant une source au courant du dossier. 2 millions de tonnes à importer Cette affaire n’occasionnera pas des préjudices aux seules banques suisses qui ont financé l’achat de ces cargaisons par RIAS Trading. Elle en occasionnera également aux pays commanditaires, la Tunisie et l’Egypte, qui se trouvent ainsi dans une situation difficile, incapables de satisfaire une demande locale pressante. Pour rappel, la Tunisie doit importer au total 2 millions de tonnes de céréales pour compenser le déficit qui a affecté la récolte de l’été 2010. Cette récolte a enregistré un recul de 56% par rapport à celle de 2009. Elle n’a pas dépassé 1,1 millions de tonnes (contre 2,5 millions de tonnes l’année dernière), de quoi couvrir la consommation locale jusqu’au mois de janvier ou février 2011.Une récente dépêche de l’agence Reuters citant un haut responsable de l’Office des céréales de Tunisie (OCT) souligne que les autorités tunisiennes envisageraient sérieusement la libéralisation progressive des importations de blé et d’orge, actuellement monopole d’Etat. Cette libéralisation pourrait être achevée dans un délai de cinq ans, selon ce responsable qui a affirmé qu’un cabinet de conseil étudiait actuellement les différents scénario pour la conduire. (Source: « Maghreb Emergent » le 21 decembre 2010) Lien: http://maghrebemergent.info/economie/73-tunisie/1685-disparition-de-cargaisons-de-ble-la-tunisie-en-risque-de-penurie.html
Affolant le négoce lémanique, RIAS Trading court après ses stocks de blé
Pierre-Alexandre Sallier L’antenne lausannoise de Rosinteragroservis – un groupe basé à Krasnodar – menace quatre banques d’une perte de 100 millions de francs. UBS serait touchée. Plus de 350 000 tonnes de blé ont disparu selon «Le Matin». La responsabilité du vérificateur Control Union serait aussi en cause. L’affaire secoue depuis dix jours le monde du commerce de céréales lémanique. Basée à Lausanne, la société de négoce d’origine russe RIAS Trading aurait, selon les révélations du Matin Dimanche, «perdu» la trace d’une énorme cargaison de blé destinée à l’Egypte et à la Tunisie. Un incident qui fait planer la menace de 100 millions de francs de pertes sur les quatre banques ayant financé l’opération. Selon le journal dominical, BNP Paribas serait exposée à un risque de 80 millions de francs. Suivrait la Banque Cantonale de Genève – à hauteur de 8 millions – et la Banque Cantonale Vaudoise. «L’autre établissement suisse piégé est UBS; des banques russes et turques sont aussi impliquées», souffle un spécialiste du négoce genevois, exigeant l’anonymat en raison du caractère sensible de l’affaire. UBS se refuse à commenter une telle implication. «Il n’y a pas de perte avérée», réplique, de son côté, un porte-parole de BNP Paribas. Le plus gros établissement de financement de négoce de la place «procède à l’analyse juridique de l’ensemble de la documentation, en particulier les garanties reçues et contrats d’assurance». Sans confirmer le montant évoqué par Matin. La BCGE refuse de valider ses liens avec RIAS Trading – ou le montant évoqué. Et assure «continuer son travail pour identifier ce qui est récupérable». Dans des incidents similaires, les chances de retrouver l’argent prêté auraient tourné «entre 35 et 65%». Vendredi, la banque cantonale avait déjà prévenu que ses bénéfices nets diminueraient «d’environ 25%» en 2010, en partie en raison de «difficultés pour quelques sociétés de négoce dans l’Arc lémanique». Cette affaire «dépasse de loin une simple cargaison; si ces chiffres se vérifient, on parle d’au moins 350 000 tonnes de blé!» prévient le patron d’une maison de négoce genevoise. Equivalant à sept «petits» cargos Handymax, un tel volume dépasserait le dernier appel d’offres organisé par l’Egypte sur le blé. Premier importateur au monde, ce pays était, l’an dernier, le plus important acheteur d’épis russes. L’opacité entoure pourtant toujours la nature exacte des problèmes de RIAS Trading, l’un des plus gros négociants de blé de l’ex-URSS. Les responsables de cette antenne lausannoise de RosInterAgroServis – un groupe basé à Krasnodar – se contentent d’invoquer «certaines incertitudes liées à des stocks de céréales situés au sud de la Russie». Et assurent que «les enquêtes en cours devraient permettre d’en savoir plus cette semaine». Tout en refusant de s’expliquer plus en détail. La cargaison annoncée aux banques était-elle inexistante? Ceci refléterait également un dysfonctionnement de la société chargée de vérifier son stockage. Il s’agirait, selon nos informations, de Peterson Control Union. Contactée, cette société néerlandaise n’a pas donné suite à nos appels. Alternativement, le problème est-il lié à un blocage du chargement par les autorités russes, en raison de l’arrêt des exportations décrété le 15 août? Lors du forum genevois «Global Grain», Brian Perrott, avocat du cabinet londonien Holman Fenwick & Willan, mettait déjà en garde le mois dernier contre les «chausse-trappes juridiques liées à [cet] embargo». Notant que «des clients font face à des difficultés avec les autorités, en tentant de faire exécuter des contrats signés juste avant l’embargo». La difficulté de l’affaire actuelle reste que «les problèmes peuvent venir à la fois de RIAS Trading et d’OZK – le géant étatique russe des grains», estime un des négociants contactés. «L’activité avec le sud de la Russie est notoirement délicate», prévient-il, dans une allusion à peine voilée à Krasnodar, la région de la maison mère de RIAS Trading. (Source: « Le Temps » (Quotidien – Suisse), le 14 décembre 2010)
Une nouvelle plainte a été déposée contre l’Ukraine
Les cas de blé «volatilisé» vont se multiplier à Genève
Les enquêtes en cours n’ont pas permis de retrouver la cargaison de la société RIAS Trading. Un autre stock du trader genevois Gran Trade a, à son tour, disparu en Ukraine, faisant perdre 30 millions de dollars aux banques lémaniques. «Ce n’est qu’un début», avertit un expert. «On nous refuse toujours l’accès aux silos. Nous ne pouvons dès lors pas vérifier l’existence des stocks que nous avions certifiés»: Bob Danvers, directeur de la société de surveillance Control Union Commodity Services, sise à Genève, ne cache pas son impuissance. «Cette situation rend incontestablement les banques créancières très nerveuses. » Suite aux révélations du «Matin Dimanche»du 12 décembre,la communauté des traders lémaniques de matières premières est en émoi. Et pour cause: les quatre banques (BNP Paribas, UBS, la BCV et la BCGE), qui ont octroyé des prêts à la société de négoce lausannoise RIAS Trading, pourraient perdre 100 millions de francs. Voire davantage. Toutes sont aujourd’hui à la recherche d’un stock de blé à farine, qui, au vu des montants engagés, s’élève à 350 000 tonnes de blé. Depuis deux semaines, elles investiguent activement auprès de leur client. En vain, pour l’heure. Enquêtes tous azimuts Control Union avait pourtant certifié le 11 novembre dernier encore que le blé – qui fait office de gage en contrepartie des prêts – existait bel et bien. Bob Danvers confirme que c’est bien sa société qui a dû avertir les banquesde son incapacité subite à mettre physiquement la main sur la cargaison de céréales gagées… «Des enquêtes internationales sont actuellement en cours, affirme-t-il à l’agence Reuters. Pour notre part, nous avons mandaté des inspecteurs externes de Moscou», pour accéder aux entrepôts situés dans la région de Krasnodar, sur les bords de la mer Noire. Et enquêter auprès des vendeurs russes «afin de savoir si les stocks ont même jamais existé». L’inquiétude des sociétés de trading lémaniques est d’autant plus grande que cette semaine, une autre société de négoce de grains, Gran Trade, établie à Genève, a, elle aussi, révélé qu’elle avait porté plainte pour la disparition d’un stock de blé ukrainien de 130 000 tonnes, valant 30 millions de dollars. Plusieurs banques de Genève, actives dans le financement de matières premières(commodity finance),pourraient là aussi perdre leur mise. «J’ai porté plainte en Ukraine en septembre dernier auprès du procureur général», confirme ainsi le directeur de Gran Trade, Olivier Broun. Les plaintes sont dirigées contre plusieurs céréaliers ukrainiens, ainsi que contre la société de surveillance, Inspectorate, filiale du groupe français Veritas. Comme Control Union, Inspectorate avait émis des certificats garantissant l’existence des stocks gagés en échange des 30 millions de dollars de prêts bancaires. Dès lors, tout le monde se demande aujourd’hui si une «épidémie» de grains volatilisés ne serait pas en cours. Un courtier établi à Genève, contacté par «Le Matin Dimanche», en est pour sa part convaincu: «Pour les banques touchées, c’est peut-être une grande première. Mais ces deux cas ne seront très certainement pas les derniers qui vont survenir dans la région de la mer Noire. » Les grands établissements bancaires pourraient dès lors retirer une partie de leurs billes en Russie et en Ukraine; et, surtout, se montrer beaucoup plus prudentes envers les céréaliers de ces deux Etats. L’art des bilans gonflés Et pour cause. Depuis que Moscou et Kiev ont, cet été, imposé un embargo total sur les exportations de céréales jusqu’au 31 décembre, la situation s’est terriblement dégradée. Selon une autre source, «cela a toujours été très dur de travailler dans cette région. Et surtout de vérifier l’existence des stocks mis en garantie. » Plusieurs cas, connus de la communauté lémanique, prouveraient même l’établissement de bilans gonflés (c’est-à-dire basés sur des cargaisons largement surévaluées), afin d’obtenir des crédits surdimensionnés de la part des banques. (Source: « Le Matin Dimanche » (Hebdomadaire – Suisse), le 19 décembre 2010)
Polémique sur l’appel à la prière : réponse de la députée
La députée Ryadh Zghal explique sa position
La grande polémique suscitée sur Facebook suite à l’intervention de Mme la députée Ryadh Zghal, à propos du volume des mégaphones dans les mosquées n’est pas près de connaître son épilogue. En effet, la députée a demandé a ce que le volume de l’appel a la prière soit amené à 70 dB, chose qui a choqué l’opinion publique qui a vite fait de réagir sur le réseau social Facebook, allant même jusqu’a demander que l’immunité parlementaire et la nationalité tunisienne lui soient retirées. La députée a tenu à apporter une mise au point et a déclaré sur les colonnes d’Assabah que ses propos ont été mal interprétés, et qu’elle voulait juste proposer une feuille de route et un plan d’espacement entres les mosquées afin qu’il n’y ait pas une interférence entre l’appel d’une mosquée à une autre, et préserver par le fait une certaines harmonie et sur le plan sonore et sur le plan architectural. Concernant la campagne qui a été menée contre sa personne et les appels à son excommunication, elle déclare qu’il ne faut pas donner une chance à certaines personnes, ennemies de la pensée, de s’attaquer aux acquis de la Tunisie. L’on ne sait pas encore, si c’est le fait de baisser le volume, ou c’est le terme de «nuisance sonore » qui ont offusqué cette frange de la population. Une note du ministère des affaires religieuses a été adressée à deux reprises, en 2005, et au cours du mois de ramadhan 2010, aux imams de mosquées afin de ramener le volume à la norme, de façon à ce que l’appel à la prière soit audible mais pas trop fort, vu la proximité et la promiscuité de certaines mosquées par rapport à certains établissements scolaires, de santés ou à certains foyers. (Source: “Tunivisions” Le 21-12-2010) Lien: http://www.tunivisions.net/polemique-sur-l-appel-a-la-priere-reponse-de-la-deputee,10987.html
WikiLeaks : la presse se régale
3 harragas racontent l’odyssée de Tabarka
Il y a une quinzaine de jours, deux barques de fortune, transportant 36 clandestins d’Annaba, tentant de joindre de nuit les côtes italiennes, étaient prises dans un orage et ont dérivé pendant trois longues journées vers la ville balnéaire de Tabarka (Tunisie) avant d’être repérées et arraisonnées par les gardes-côtes tunisiens. Les occupants des deux esquifs ont ainsi survécu à l’expédition périlleuse, mais ils resteront à jamais marqués par ces trois nuits terribles. Ce drame de l’immigration clandestine méritait à nos yeux que l’on recueille un témoignage, et c’est ce qui nous a poussés à aller à la rencontre des rescapés. C’est l’histoire poignante de ces jeunes âgés de 20 à 30 ans qui, comme tant d’autres, au péril de leur vie, n’hésitent pas à embarquer sur des barques de fortune pour fuir la misère ou tout simplement la tristesse de leur quotidien. Sans faire dans le mélodrame, avec la précision et la sensibilité requises, nous avons plongé dans l’univers de ceux qui luttent pour leur survie et rêvent d’un autre monde, un eldorado porteur de tant d’espoirs. Ces harraga s’appellent Samir, Réda et Abdelkrim. Ce ne sont pas des personnages de fiction. Ce sont les vrais prénoms de ces rescapés que nous avons rencontrés sur les 36 qui ont comparu mercredi devant le procureur de la République de Souk Ahras après que les autorités tunisiennes les eurent remis à la police algérienne. Il y en a un, Abdelkrim, dont j’ai mis deux jours à localiser et à avoir un rendez-vous programmé par l’entremise de son propre frère, cadre dans une institution bancaire. Le contact s’est fait facilement, mais une grande angoisse due certainement aux émotions passées par Abdelkrim se lisait dans son regard. Il avait peine à parler, car le simple fait d’évoquer son histoire de vive voix avec un étranger, un inconnu, réveille trop de traumatismes en lui. Ce garçon à l’allure désinvolte est très timide pourtant. On devine dès le premier abord qu’il a de l’éducation, de plus, il a fait des études. Un bac avec mention et des études universitaires interrompues en 2008 par dépit, explique-t-il. Doucement, il nous relate comment il a préparé son «voyage» avec deux de ses copains de l’Elisa, son quartier. «Nous avons commencé à économiser la somme (800 euros chacun) demandée par le passeur en mars dernier et nous étions prêts au début du mois de Ramadan. Il se fait que durant cette période, le raïs ne voulait pas embarquer car les côtes étaient sévèrement surveillées, nous disait-il. Nous nous étions résignés à attendre patiemment parce que nous savions qu’il était le meilleur et qu’il a une dizaine de harga à son actif, une pointure dans le domaine», rapporte Abdelkrim. Et de dire comment il a préparé son cabas, les vêtements chauds recommandés, son gilet de sauvetage, sa torche de plongée et même les victuailles la veille du jour, plutôt de la nuit fixée finalement pour le grand départ. Rendez-vous à la plage d’El Battah «On nous avait recommandé de nous rendre à 21h à la plage d’El Battah par groupe de trois au maximum pour ne pas attirer l’attention, et une fois sur place, le raïs qui nous attendait nous a demandé de nous cacher loin de la plage jusqu’à ce qu’il nous fasse signe. Ce que nous fîmes sans poser de questions.» Poursuivant son récit, Krimo, comme l’appelle son frère, indique que le regroupement s’est étalé sur plusieurs heures, jusqu’à minuit exactement et qu’à partir de ce moment, ses compagnons d’infortune et lui-même commencèrent à s’installer dans l’embarcation traditionnelle. «Ce fut un moment irréel car j’étais en présence de gens que je ne connaissais pas, excepté les deux ouled el houma et certains avaient une mine peu engageante, mais je ne pouvais rien faire à part assumer la situation vaille que vaille», se rappelle le jeune homme. Puis, ce fut l’appareillage sans incident notable, assure-t-il, jusqu’à cet incident soudain qui lui donna la plus grande frayeur de sa jeune existence. «J’ai bien cru que c’était la fin, surtout que mis à part notre raïs, tous les autres passagers s’étaient mis à prier fiévreusement, certains vomissaient leurs entrailles, moi aussi car la barque prise par la houle comme une noix montait et descendait et nous nous accrochions comme nous pouvions, manquant de nous noyer à plusieurs reprises», avoue-t-il. Son récit prit plus d’une heure, et il ne s’arrêtait que pour siroter une gorgée de café. Nous apprîmes ainsi que le calvaire que les 19 occupants de la barque avaient enduré se prolongea jusqu’à l’aube et que, lorsque la nature s’apaisa enfin, personne n’était capable de situer leur position. Ensuite, ce ne furent que des phases de somnolence et de réveils brutaux pour tous alors que le moteur de 40 CV de la barque ne fonctionnait plus, les livrant à une dérive en haute mer. Dans l’après-midi du troisième jour, c’est l’approche des côtes tunisiennes et l’intervention musclée des forces navales. Des moments qu’il dira se remémorer avec un «grand creux d’estomac» et notamment avec le sentiment d’avoir frôlé la mort. Pas de regrets pour le «baznassi» Samir, que nous avons rencontré à Sidi Salem, dans un café, était moins enclin à s’épancher sur sa harga. Plus âgé qu’Abdelkrim, il a pour lui une autre expérience de la vie pour avoir galéré entre Annaba, sa ville natale, et la capitale. Cet ancien baznassi à la mine bourrue dit ne pas regretter le moins du monde sa tentative avortée de se rendre en Sardaigne. Il tente même de justifier la folle entreprise de ses compagnons. «Ils ont besoin de partir, c’est une question de survie. Ceux que j’ai rencontrés et beaucoup d’autres qui sont partis, qui ont réussi à franchir la mer et vivent maintenant en Italie ou en France, crevaient de faim ici. Ils partent sans savoir que les conditions de vie qui les attendent dans un premier temps aux Etats-Unis sont aussi très dures. Mais, ils sont prêts à le faire, parce qu’au moins là-bas il y a l’espoir de s’en sortir. C’est ça qui est le moteur principal de ces voyages. C’est bien la volonté d’avoir une meilleure vie, mais c’est surtout la volonté de chercher de l’espoir.» Il préférera ne pas évoquer comment il a organisé sa propre traversée, craignant certainement de compromettre une autre harga à la faveur de la belle saison. Le troisième jeune homme que nous avons pu approcher par le truchement d’un de ses plus proches amis réside dans un quartier de la périphérie d’Annaba. Il nous fait d’ailleurs promettre que nous ne donnerons pas de détails sur sa situation familiale. Du haut de ses 22 ans, il nous confiera qu’il est attiré par l’image de succès d’autres qui sont partis depuis longtemps. Il est aussi poussé par ses parents qui sont pauvres et vivent dans la misère. Pour sa famille, il représente une sorte d’investissement. (Source: ”Le Temps d’Algerie” Le 21-12-2010) Lien: http://www.letempsdz.com/content/view/50083/1/
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