TUNISNEWS
7 ème année, N° 2475 du 02.03.2007
U.S. DEPARTMENT OF STATE: Imprisonment of Tunisian Activist Release Mohamed Abbou, Jailed Human Rights Lawyer in Tunisia – Take Action Mohammed Abbou entame sa troisième année de prison : Reporters sans frontières manifeste devant l’office du tourisme tunisien à Paris AFP: Manifestation RSF à Paris: Tunis dénonce un acte de « vandalisme »
Imad Daimi, Chokri Hamrouni: Mohamed Abbou ou le prix de la haine Luiza Toscane : Des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants sont menacés Luiza Toscane : Le compte à rebours a commencé en Bosnie – Des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants sont menacés Stranger : La corruption et la douane tunisienne sur Tunis7 !
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La rédaction d eTUNISNEWS Le 1er mars 2007
U.S. DEPARTMENT OF STATE Office of the Spokesman For Immediate Release March 1, 2007 2007/151 Media Note
Imprisonment of Tunisian Activist
The United States is disappointed to note that March 1, 2007, marks the two-year anniversary of the imprisonment of Tunisian activist lawyer Mohamed Abbou. Mr. Abbou was convicted in 2005 of defamation of the judicial process and assault after publishing articles on the internet critical of the Government of Tunisia. The legal processes involving his case were characterized as highly irregular by Tunisian non-governmental organizations and international observers. We urge the government to carry through on its declared intention to pursue democratic reform, including allowing greater freedom of expression and association and to release all those imprisoned for expression of free thought, including Mr. Abbou
Release Mohamed Abbou, Jailed Human Rights Lawyer in Tunisia
On March 1, 2007, Tunisian human rights lawyer and activist Mohamed Abbou will complete his second year in prison. Abbou’s supporters around the world have declared an international day of protest to call for his release from prison. He is held in harsh conditions and has suffered beatings by prison guards and other inmates. Abbou’s wife, Samia Abbou, is being persistently harassed by the security forces as a result of her struggle for the release of her husband. Last December, while on her way to visit her husband with other human rights defenders, she was brutally assaulted and beaten by a group of forty men right in front of several police officers, who looked on without intervening. Mohamed Abbou is serving a three-and-a-half year sentence for exposing torture in Tunisia in postings to a blog, and for comparing the treatment of prisoners in Tunisia to conditions in Abu Ghraib Prison in Iraq. Please participate in the International Day for the Release of Mohamed Abbou by urging the Tunisian authorities to free him immediately and unconditionally.
Learn more about the detention and persecution of Mohamed Abbou >>
Reporters sans frontières
Mohammed Abbou entame sa troisième année de prison : Reporters sans frontières manifeste devant l’office du tourisme tunisien à Paris
Des militants de Reporters sans frontières se sont rassemblés, le 1er mars 2007 à 10h30, devant l’office du tourisme de Tunisie à Paris, pour dénoncer le maintien en détention de l’avocat Mohammed Abbou, emprisonné depuis exactement deux ans pour avoir critiqué le président Ben Ali dans des articles publiés sur Internet. Une vingtaine de membres de l’organisation, suivis de journalistes, ont collé des affiches à l’effigie du cyberdissident sur les vitres de l’agence et brandi des banderoles réclamant sa libération.
« Mohammed Abbou est un prisonnier personnel du président tunisien, dont il dénonçait la politique répressive et la corruption. Son emprisonnement, et le harcèlement permanent dont est victime sa famille, n’a que trop duré. Il faut montrer aux touristes le vrai visage du régime tunisien. Car l’envers de la carte postale, c’est un Etat policier qui n’hésite pas à emprisonner les internautes qui s’opposent à lui. L’anniversaire de l’arrestation de Mohammed Abbou doit être l’occasion pour les diplomates de hausser le ton envers la Tunisie et notamment de demander la levée des mesures de filtrages mises en place contre les sites d’informations indépendants », a déclaré Reporters sans frontières.
La façade de l’office du tourisme a été entièrement recouverte d’affiches portant des inscriptions telles que « Tunisie, terre de répression » ou « Mohammed Abbou, deux ans ça suffit ». Les militants de l’organisation, accompagnés de membres d’associations de défense des droits de l’homme tunisiennes, ont scandé « Libérez Abbou » pendant près d’une heure devant le bâtiment.
L’avocat Mohammed Abbou a été arrêté il y a deux ans, le 1er mars 2005, puis condamné, quelques semaines plus tard, à trois ans et demi de prison. Il est accusé d’avoir publié sur le site Tunisnews, en août 2004, un article dans lequel il comparait les tortures infligées à des prisonniers politiques en Tunisie aux exactions de soldats américains à Abou Ghraib. Toutefois, selon de nombreux observateurs présents au procès, sa condamnation serait due en réalité à un autre article, publié sur Internet quelques jours avant son arrestation, dans lequel il critiquait l’invitation faite à Ariel Sharon d’assister à un sommet de l’ONU organisé à Tunis et dénonçait, sur un ton ironique, la corruption de la famille du Président. Pour alourdir la sentence, le dossier d’accusation a été étoffé, quelques jours avant l’audience, d’une prétendue « agression » à l’encontre de l’une de ses consoeurs, un incident qui se serait produit près de deux ans avant son arrestation.
Depuis l’incarcération de Mohammed Abbou, sa femme, Samia, et ses trois enfants sont l’objet d’un harcèlement permanent de la part de la police. Ils sont suivis dans tous leurs déplacements et sont régulièrement victimes d’insultes et de menaces. Chaque fois qu’ils tentent de rendre visite à l’avocat, détenu à 170 kilomètres de leur domicile, ils sont interpellés sur le chemin menant à la prison et parfois molestés.
La Tunisie, 148e sur 168 du classement mondial de la liberté de la presse
Les engagements du président de la République Zine el-Abidine Ben Ali en faveur d’une plus grande liberté de la presse ne sont que de la poudre aux yeux. Le pluralisme de l’information n’existe pas et les sites Internet dénonçant la politique du gouvernement tunisien sont systématiquement censurés. La libéralisation de l’audiovisuel est un mensonge et la censure administrative est toujours utilisée pour empêcher la création de médias indépendants.
Pour plus d’informations sur la liberté de la presse en Tunisie, consultez le rapport publié en 2005 par Reporters sans frontières : http://www.rsf.org/article.php3 ?id_article=14253
Manifestation RSF à Paris: Tunis dénonce un acte de « vandalisme »
AFP, jeudi 1 mars 2007 TUNIS – Les autorités tunisiennes ont qualifié jeudi de « vandalisme » la manifestation de militants de Reporters sans frontières (RSF) devant le bureau parisien de l’office tunisien du Tourisme. Une vingtaine de militants de RSF ont manifesté jeudi devant ce bureau, couvrant les vitrines d’affiches pour la libération de l’avocat dissident Mohammed Abbou emprisonné à Tunis. « Cette action constitue un acte délictuel de vandalisme visant le tourisme tunisien dont la bonne santé dérange les milieux hostiles à la Tunisie », a-t-on indiqué de source officielle à Tunis. Les autorités tunisiennes soulignent que l’avocat Abbou est « coupable de violences caractérisées à l’encontre d’une avocate (…) ce qui constitue en Tunisie comme partout dans le monde un délit de droit commun ». Me Abbou a été condamné en 2005 à un an et demi de prison pour « diffamation des autorités judiciaires et diffusion de fausses nouvelles » pour un article publié sur internet, où il comparait les tortures infligées en Tunisie aux exactions de militaires américains dans la prison irakienne d’Abou Ghraib. Il a été condamné dans le même temps à deux ans de prison pour « coups et blessures volontaires » suite à une plainte déposée par une avocate. Robert Ménard, le secrétaire général de RSF, « instrumentalise (…) de façon éhontée la cause de la liberté de presse pour tenter d’en faire un outil de sabotage de l’économie du pays », a-t-on ajouté de source officielle à Tunis. On rappelle de même source qu’il avait été condamné par la justice française pour des violences lors de l’occupation des locaux de l’office du tourisme tunisien à Paris le 28 juin 2001. M. Ménard a souligné jeudi qu’il souhaitait sensibiliser les 800.000 touristes français qui se rendent chaque année en Tunisie aux atteintes à la liberté de la presse dans ce pays. RSF avait dénoncé mardi l’interdiction de numéros de journaux français qui contenaient des articles critiquant le président tunisien, Tunis a démenti ces interdictions accusant RSF d' »allégations fallacieuses ».
Mohamed Abbou ou le prix de la haine
Deux ans maintenant depuis que notre ami Mohamed Abbou croupit injustement dans la prison du Kef. De toute l’histoire de la Tunisie, aucun autre cas de prisonnier d’opinion n’avait connu une telle médiatisation, une telle mobilisation, mais paradoxalement un tel acharnement des autorités. En écrivant les deux articles pour lesquels il avait été poursuivi, Mohamed Abbou ne pensait pas qu’il allait connaître ce triste sort et ne se doutait pas qu’il allait provoquer une avalanche de records difficiles à battre : le nombre d’articles, de déclarations, de reportages, de conférences, de sit-in, d’avocats plaidants, de militants mobilisés, de comités de défense agissant, de jours de grève de la faim observés, mais aussi de règles de droit transgressées, de militants agressés, de policiers mobilisés…Quel énorme gâchis !!! Deux ans c’est long, c’est presque éternel lorsqu’on souffre. C’est du temps de vie volé à Mohamed Abbou et sa famille, à ses amis et ses collègues, mais malheureusement aussi à la Tunisie qui aurait souhaiter battre d’autres records dont elle aurait pu être fière. Quelle analyse aussi rationnelle soit-elle peut expliquer le maintien de Mohamed en prison avec un tel prix sur l’image, la stabilité et les intérêts du pays ! Ni le pragmatisme, ni le réalisme et le bon sens n’apportent des réponses à cet épisode bouleversant. L’explication se trouve peut être en dehors de toute rationalité voulue ou suggérée. Tout d’abord, la bêtise humaine rendue possible par la haine de ce grand avocat de la liberté. Une haine incommensurable ressentie et convertie en actions de représailles et de violations caractérisées des règles de droit les plus élémentaires par ceux qui se sont sentis visés par les dits articles. Ensuite, il y a une part de destin. Un destin vraisemblablement bienveillant qui veut offrir à la Tunisie un héros, un modèle, un idéal qui rompt avec une médiocrité envahissante qui rend le pays aussi méconnaissable qu’invivable. Préférant le destin bienveillant à la bêtise humaine, nous sommes convaincus que la sortie de Mohamed de prison constituerait une délivrance collective (pour lui, sa famille, ses amis et tous ceux qui se sont mobilisés pour lui) en même temps q’une hantise pour le régime. Son incarcération les a fait trembler, sa sortie les fera frémir…Mohamed Abbou est bien plus qu’un avocat rebelle. Il est l’antidote de la dictature. Paris, le 01 mars 2007 Imad Daimi, Chokri Hamrouni
Le compte à rebours a commencé en Bosnie
Des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants sont menacés
jeudi 1er mars 2007, par Luiza Toscane Troisième partie : Mersija Topic
Des centaines de Bosniaques se sont vus retirer leur nationalité ces derniers mois. Des centaines d’autres devraient suivre. Une fois déchus de leur nationalité, ils seront renvoyés vers leurs pays d’origine, sans leurs épouses ni leurs enfants. Les demandeurs d’asile en Bosnie dont la demande n’a pas été acceptée sont renvoyés de la même façon. Le renvoi du Tunisien Badreddine Ferchichi a semé la panique chez tous les déboutés du droit d’asile et les personnes déchues de leur citoyenneté. Ces mesures s’inscrivent dans un cadre politique plus large incluant également des incriminations aussi intempestives que dénuées de tout fondement. Voici le témoignage de Mersija Topic, une femme bosniaque, restée seule en Bosnie avec ses cinq enfants suite au départ précipité de son mari tunisien qui n’a pas voulu subir le même sort que Badreddine Ferchichi : arrestation, sévices et incarcération. Ce témoignage est repris et traduit d’un article paru dans El Ouassat Et Tounisiyya [1]. Luiza Toscane
« Nous menions une vie stable, grâce à Dieu. Mon mari vivait ici en toute légalité. Son droit au séjour a pris fin en 2000, avec l’expiration de son passeport qu’il n’a pu faire renouveler, l’ambassade de Tunisie à Belgrade lui ayant opposé un refus catégorique. »
« Il m’a envoyée en Tunisie dans sa famille pour tâter le terrain. Nous étions en 2003. Je m’y suis rendue avec nos enfants. A l’aéroport, les autorités tunisiennes nous ont maltraités et se sont montrées grossières parce que je suis l’épouse de Mounir Silini. Tout le temps que j’ai passé en Tunisie, la police m’a contrôlée, suivie dans les lieux où je séjournais, on a recensé mes moindres faits et gestes et ceux de sa famille. J’ai été convoquée à plusieurs reprises au poste de police et soumise à des interrogatoires. Toutes les questions portaient sur mon mari. Ils voulaient savoir pourquoi il ne rentrait pas en Tunisie, pourquoi il nous avait envoyés nous seulement et s’il avait des activités politiques. »
« J’ai appris là-bas qu’il avait été condamné à quatre ans d’emprisonnement pour sa participation à des activités politiques à l’étranger et qu’il voulait salir le gouvernement tunisien aux yeux de l’opinion publique en utilisant ses violations des droits de l’homme.
J’ai compris que j’étais indésirable, et que j’allais causer des soucis à sa famille. J’ai eu peur pour mes enfants. J’ai fait mes valises et je suis rentrée en Bosnie. Lorsque j’ai raconté à mon mari ce qui s’était passé, il a compris qu’il ne pourrait pas faire renouveler son passeport, et partant, son droit au séjour. Il a fait le nécessaire pour présenter une demande d’asile à la fin de l’année 2005. Son titre de séjour était alors renouvelable tous les trois mois. » « Le renouvellement a eu lieu deux fois. Avant l’expiration du second trimestre, il a reçu une convocation pour un nouvel entretien dans le cadre de sa demande d’asile, le 12/06/2006, mais le 24/05/2006, notre maison a été assiégée par les forces de police, au prétexte que le gouvernement le soupçonnait de financer le terrorisme. C’était impossible, mon mari est éleveur. Il trime à longueur de journée pour nous faire vivre, occupé qu’il est entre l’élevage des poules et celui des abeilles. »
« Je pouvais tout réfuter car je connaissais mon mari et dans quelles conditions nous vivions. Ce jour-là, lorsque la police a débarqué, je venais d’avoir un différent avec lui, car nous n’avions plus rien à manger. Les policiers ont bien vu que le réfrigérateur était vide de toute nourriture, de viande, de boissons. Il n’y avait même pas de lait pour les enfants. J’ai parlé avec les policiers des épreuves que nous traversions alors que mon mari était là : que dire s’il était incarcéré ou renvoyé ! L’un des officiers de police a été touché par ma situation et m’a donné 50 marks, soit 25 euros. Il a répété des formules d’excuse et de regret, car il avait reçu des ordres d’en haut.
Mon mari a été arrêté vers onze heures du matin après que la maison ait été fouillée minutieusement, c’était sinistre. Ils ont saisi des disquettes, des cassettes audio et tout ce qui était rédigé en arabe, et même des photos de famille. »
« Des journaux, des télévisions locales et internationales m’ont contactée. L’information a été diffusée que trois personnes d’origine arabe avaient été arrêtées. C’était l’événement du jour, j’ai bien cru l’avoir perdu pour de bon. J’étais alors enceinte de cinq mois de ma fille Esma que j’ai mise au monde par la suite et qu’il ne connaît pas. Moi, je sais que mon mari n’a aucune relation, ni de près, ni de loin, avec une quelconque activité illégale. Or, l’épouse est la plus à même de connaître les moindres secrets de son mari, et tous les voisins et nos connaissances pourraient en témoigner. Je suis plus que convaincue qu’il s’est agi d’un scénario ficelé par le gouvernement pour exhiber devant le monde entier son rôle dans la lutte antiterroriste. Comme par hasard, les services de six pays des Balkans ont tenu une réunion à Sarajevo deux jours plus tard. »
« Mon mari avait reçu une convocation avant son arrestation pour son entretien pour l’asile… » « L’après-midi du même jour, alors que j’étais noyée dans ma tristesse et les larmes de mes enfants, effrayés par ce qui se passait, j’ai eu la surprise d’entendre mon mari frapper à la porte. Tous les voisins accouraient pour fêter son retour sain et sauf. L’affaire s’avérait un film concocté par les services bosniaques et le ministère de la Sûreté. »
« Le 12 juin, mon mari s’est rendu à son entretien, tout s’est passé normalement, comme si tout cela n’avait été qu’un mauvais rêve. Puis, il y eut le refus de la demande d’asile présentée par Ferchichi et son expulsion en Tunisie. Nous avons commencé à nous angoisser, d’autant plus que les trois derniers mois arrivaient à leur terme. Lors du rendez-vous, il a demandé comme d’habitude le renouvellement de son droit au séjour, mais la réponse a tardé, de façon inhabituelle, cela nous a irrités. Il craignait d’être renvoyé à l’instar de Ferchichi, qui avait été arrêté le même jour que lui. Alors, il n’est plus resté dormir à la maison et a demandé à un avocat de faire la lumière. On l’a informé que son droit au séjour était acquis et qu’il devait rendre son ancien titre pour qu’il soit archivé, mais il a su juste après qu’on lui avait refusé l’asile et qu’il ne lui restait plus qu’à quitter le pays dans un délai de quinze jours. »
« Sa présence parmi nous contribuait à nous faire oublier nos conditions de vie difficiles. Après son départ, notre vie est devenue misérable. Les enfants sont dans un mauvais état psychologique, surtout qu’à l’école, les autres, qui ont assisté à l’arrivée de la police disent à mes filles Meriem et Jamila que leur père est en prison et…. Encore autre chose, j’ai accouché de ma fille en son absence et vous voyez, elle ne va pas bien, et pour tout arranger, elle a dû être hospitalisée. La famille a été dispersée, moi à l’hôpital, le père dans un lieu inconnu et les quatre enfants chez ma mère qui vit avec une retraite de 80 euros. C’est ainsi que nous avons passé l’Aïd et le Nouvel An. Cela a joué sur le moral des enfants. Ils ont pleuré, énormément. »
« Voyez par vous-mêmes, l’élevage d’abeilles qu’il avait commencé et qui comptait cinquante ruches qui faisaient notre richesse : la majorité sont mortes, faute de soins. Moi, je n’y connais rien. En hiver, il fait moins vingt degrés. Tout son travail, tout ce qui nous faisait vivre a pris fin. Et je ne pouvais pas, moi, avec mes cinq enfants dont l’aînée à 10 ans et la plus jeune qu’il avait laissée dans mon ventre. » Nous avons contemplé le lieu en friches que madame Silini n’était pas parvenue à nous décrire. « Nous n’avons plus aucune ressource, sinon Dieu et les voisins et ceux qui compatissent à notre situation lorsqu’ils nous rendent visite, Dieu soit loué. » « Je souhaite que toutes les organisations de droits de l’homme nous tendent la main, pour l’aider à obtenir l’asile, pour qu’il puisse arracher ses enfants à leur souffrance. »
Meriem (9ans et demi) était très attachée à son père et quand nous lui avons demandé de lui envoyer un message, elle a fondu en larmes : « Mon papa que j’aime tant, reviens, rentre papa » Nous avons été impressionnés par ses mots noyés dans les larmes (…) et nous lui avons promis qu’elle le reverrait pour l’encourager à étudier.
D’ailleurs ses résultats sont excellents, d’après le bulletin scolaire que sa mère nous a montré, même si l’absence de son père a été la cause d’une baisse de niveau. Nous en avons demandé la raison à Meriem, qui nous a répondu : « Comment veux-tu que j’étudie quand les autres ont décidé pour moi que mon père était en prison ? » Jamila (7 ans) : « Nous souffrons d’être séparés de toi, papa, nous souffrons beaucoup ». Son niveau scolaire à elle aussi en a beaucoup pâti.
Chaïma (5 ans et demi) qui s’était blottie contre moi depuis notre arrivée et qui me posait de temps en temps des questions en toute innocence : « Quand est-ce qu’il revient mon papa ? »
Ibrahim (18 mois) commente dans sa langue propre, incompréhensible pour nous, sinon : « papa, papa » Esma, en mauvaise santé, si elle avait parlé, elle aurait appelé son père, aussi….. [1] Reportage et entrevue réalisée par Anouar Malek, journaliste, le 24 février 2007
(Source: « Tunisie reveille toi » mis en ligne le jeudi 1er mars 2007)
La corruption et la douane tunisienne sur Tunis7 !
Extrait de l’émission « Bikol oudhouh », Tunis 7, 1ère diffusion le 22 Fevrier 2007. L’émission « bikoll oudhouh » (en toute clarté), sur la télévision publique tunisienne, Tunis7, est l’une de ces nouvelles émissions qui s’essayent à la fameuse ouverture médiatique, que tout le monde semble constater et saluer depuis quelques temps. Le thème de l’émission était « la douane et l’entreprise en Tunisie ». L’invité de l’émission était le colonel Lotfi El Ayedi, directeur à la direction centrale des douanes. L’extrait que j’ai choisi aborde la question épineuse de la corruption au sein de la douane tunisienne. Le ton est certes nouveau et les sujets traités audacieux mais si le présentateur semble vouloir poser les bonnes questions, il ne pousse pas l’audace jusqu’à réclamer les bonnes réponses, surtout si l’invité fait partie d’un pilier du système. Malgré cela, le haut responsable était presque sympathique et les efforts qu’il a employé pour redorer l’image de la douane, presque louables. Le journaliste a également tenté de faire son travail au mieux, posant des questions délicates et relançant son inviter quand ce dernier essayait de se dérober. Cela ne marchait pas à tous les coups mais l’intention, me semble-t-il, y était. On peut même percevoir un moment de flottement (02 :00) quand le journaliste sort ses propres chiffres sur le nombre élevé des réunions du conseil de discipline qui excluraient, selon lui, 1 douanier par mois. Mais malgré ces tentatives le présentateur n’a pas pu amener le douanier à dire autre chose que ce qu’il était venu dire. A savoir que la corruption existe partout et que la douane met tout en œuvre pour traquer et éliminer les « âmes faibles » qui succombent à la tentation et les « saboteurs » et les « criminels » qui les pervertissent. Pour littéralement clouer le bec du journaliste en déclarant quasi-religieusement que « la Tunisie était un état de droit » et que par conséquence « personne ne pourrait se voir demander de contre partie pour obtenir un droit ». Nous voilà rassurer ? Pas tout à fait ! Ceci aurait pu être le cas dans un vrai état de droit ou bien évidement la corruption existerait mais d’une manière résiduelle et entre deux parties intéressées et où les recours possibles sont effectifs et efficaces. De même que l’analyse du colonel El Ayedi, quand il aborde la question de la responsabilité du citoyen dans la question de la corruption est, d’une certaine manière, pas totalement fausse, puisque celle-ci est aussi à rappeler et à condamner. Mais ce que ce responsable feint d’oublier, c’est que dans certains domaines et plus spécialement le sien, le Droit n’à plus droit de citer en Tunisie. Car le problème principal de la douane tunisienne et dont tous les autres travers découlent, est avant tout, l’impunité dont certains jouissent face à la douane en particulier mais plus généralement face à l’autorité de l’état. Au-delà des petits trafics qui permettent, dans la majorité des cas, à ceux qui les pratiquent de survivre, le plus gros de l’économie souterraine est alimenté par des filières quasi-institutionnelles qui profitent de passe-droits couverts par les autorités elles-mêmes. Pour les trafics qui génèrent le plus de manque à gagner aux caisses de l’état, les commanditaires et les principaux bénéficiaires jouissent de complicités aux plus hauts niveaux du pouvoir. Des personnes qui ne peuvent pas être inquiétées par les conseils de disciplines, même si ces derniers siégeaient quotidiennement. Toutes les mesures que le colonel EL Ayedi avance, ne servent, en fait, qu’à réprimer les conséquences de faits plus graves qui, eux, restent impunis. Un simple douanier qui surveille un entrepôt sous douane n’a pratiquement aucune chance de faire quoi que ce soit de cette responsabilité. Le poids de la hiérarchie ne lui donne aucun pouvoir réel, ni directement sur la marchandise qu’il surveille, ni sur ses supérieurs qui en quelque sorte ne lui doivent rien. Ce douanier n’a donc pratiquement aucune chance d’étendre son réseau d’influence au sein de la douane et par conséquence d’attirer des corrupteurs potentiels. Même s’il arrive à le faire le préjudice ne sera pas important et certaines mesures de contrôles peuvent facilement le démasquer et le sanctionner. Prenant maintenant l’exemple inverse : Un colonel de la douane, ou un quelconque haut gradé qui se lie d’affaire avec un membre proche du pouvoir ou une personne influente d’une manière ou d’une autre. Cette alliance peut être entre deux personnes intéressées mais aussi le résultat de pressions d’ordre hiérarchique qui ne donneraient pas trop le choix à cet officier. Cependant le résultat reste le même. Pour mettre en application les termes de l’accord convenu avec « le commanditaire », le colonel a besoin de complicités au sein de l’administration mais aussi sur le terrain. Il choisit parmi ses subordonnés une personne de confiance et lui confie la tache. Cette personne trouvera à son tour quelqu’un d’autre pour se rapprocher encore plus du terrain. Et c’est ainsi, par un effet domino, toute une ligne verticale de responsables plus ou moins importants est ainsi corrompue par l’effet d’une seule personne. D’ailleurs les tarifs pratiqués pour telle ou telle prestation intègrent la rémunération de toute la chaîne. Bien évidemment l’existence de ces pratiques ne reste pas inaperçue par les « autres » douaniers qui ne « profitent » pas de cette manne financière. Pour les plus malhonnêtes ou les plus « faibles », d’entre eux cela encourage et justifie en quelque sorte leurs petites combines personnelles qui s’ajoutent ainsi aux trafics les plus organisés. C’est un cercle infernal ou chacun justifie son action par celle de son collègue ou de son supérieur. Des supérieurs qui ne peuvent plus avoir de réel pouvoir de contrôle et de sanction étant eux-mêmes impliqués. Concernant l’envolée lyrique de l’invité de cette émission, sur le thème de « l’état de droit », elle est certes touchante mais n’apporte aucune réponse au problème. Car encore une fois ceux qui pratiquent des trafics organisés, corrompent pour augmenter leur profits et couvrir leurs actions illégales, ceux la n’on aucun problème à payer ce qu’ils ont à payer et l’intègrent dans leurs « prix de revient », si j’ose dire. Ils ne sont en aucun cas les victimes de ce système mais les principaux bénéficières. Ils n’ont théoriquement aucune raison de dénoncer ces pratiques et n’ont donc rien à faire avec le droit. Les recours énumérés par le colonel ne leur serviraient absolument à rien. Pour les autres, véritables victimes de ce système, la question est beaucoup plus délicate. Car en générale la pression exercé par le douaniers et plus sournoise sur le commun des mortels puisqu’elle ne consiste pas à lui denier un droit mais à lui faire comprendre que s’il veut l’obtenir plus vite et sans complication il aurait intérêt à « récompenser » le douanier. Le douanier se présente ainsi comme une aide précieuse pour l’usager confronté aux lenteurs de la machine administrative. Ce qu’on paye c’est donc l’obtention, dans des délais raisonnables, d’un droit. Pour le petit chef d’entreprise ou le petit commerçant qui a des clients à satisfaire, le facteur temps est primordial. Cet usagé peut parfaitement refuser de payer et aller se peindre aux autorités compétentes, mais il perdra encore plus de temps et donc d’argent. Il se retrouve ainsi obligé de recourir à ces pratiques pour ne pas être pénalisés. Bien évidement Cela n’excuse en rien ces comportements, mais il faut être d’une mauvaise foi sans mesure pour leur faire porter aux simples usagés la responsabilité du fléau de la corruption en Tunisie. Voila comment en couvrant des pratiques douteuses aux plus hauts sommets du pouvoir on contamine toute une société et on discrédite toute une institution. Beaucoup de douaniers tunisiens vivent ces passe-droits comme une insulte à leur travail et aux valeurs de l’institution qu’ils servent. Des jeunes officiers déçus du décalage entre les cours de droit à l’école des officiers et la réalité de leur travail mais également des anciens qui ne reconnaissent plus l’institution qu’ils ont contribué à mettre en place. Ces douaniers intègres tentent malgré ces dérives de servir au mieux les intérêts de leur institution. Peut être que l’invité de cette émission fait partie de ceux qui pensent encore aux intérêts du pays, je n’ai pas à en douter, mais toutes les actions et toutes les mesures qu’il a énuméré pendant cette émission ne serviront à rien tant que les plus grands « saboteurs » et corrupteurs continuent d’agir impunément sous la bienveillance intéressées des plus hauts responsables de l’état. (Source: le blog de Stranger (Malek – Paris), le 1er mars 2007 à 10h47 PM) Lien: http://stranger-paris.blogspot.com/2007/02/la-corruption-et-la-douane-tunisienne.html