TUNISNEWS
5 Úme année, N° 1764 du 19.03.2005
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CNLT: Violations en sĂ©rie des des droits de la dĂ©fense dans l’affaire de MaĂźtre Mohammed Abbou AP: Tunisie: l’avocat Mohamed Abou aux prises avec la justice AP: Tunis dĂ©terminĂ© Ă abriter le SMSI en dĂ©pit de la prĂ©sence contestĂ©e d’Ariel Sharon Albadil Express : Les autoritĂ©s tunisiennes dĂ©terminĂ©es Ă empĂȘcher la tenue de la rĂ©union maghrĂ©bine “Pour un Maghreb sans prisonniers politiques”
Sami Ben Abdallah: 4 ans de prison ferme pour Taoufik Hammami dont le crime est dâĂȘtre le neveu de Hamma Hammami
palestine-info: Tunisia protests Palestinian objections to Sharon’s invitation Webmanagercenter: UE – Tunisie : bilan 2004 – Un partenariat en bonne santĂ© Houcine Ghali: L’exploitation politique de la mort de Zouhayr Yahyaoui Kamel Labidi: The death of a Tunisian brave heart
Barry Rubin: Tunisia’s tolerant Islam Nouvelle de Tunisie: Oeuvrer Ă la rĂ©ussite de la 2Ăšme phase du Sommet mondial sur la sociĂ©tĂ© de l’information La Presse : Dans les moindres dĂ©tails La Presse : la modernitĂ© est une conquĂȘte de l’homme Juan Goytisolo: Paysages de guerre avec Madrid en fond RĂ©alitĂ©s : ‘Entretien avec Ahmed Ben Salah (4Ăšme partie) : âJe nâai pas fait dâerreurs contre mon peupleâ RĂ©alitĂ©s: Les sociĂ©tĂ©s civiles et le Partenariat euro-mĂ©diterranĂ©en : Lâheure des rĂ©formes
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Violations en sĂ©rie des des droits de la dĂ©fense dans l’affaire de MaĂźtre Mohammed Abbou
MaĂźtre Mohammed Abbou, ex membre dirigeant de l’Association tunisienne des Jeunes Avocats, membre du CNLT et membre du Centre pour l’IndĂ©pendance de la Justice et du Barreau, aurait dĂ» ĂȘtre dĂ©fĂ©rĂ© le 16 mars 2005 devant le juge d’instruction en charge de l’affaire 2/98347, n’eussent Ă©tĂ© les violations dĂ©libĂ©rĂ©es perpĂ©trĂ©es par le pouvoir : 1) Mohammed Abbou a commencĂ© par ĂȘtre prĂ©sentĂ© le 2 mars 2005 au juge d’instruction Faouzi Sassi, qui s’est bornĂ© Ă dĂ©livrer un mandat de dĂ©pĂŽt Ă son encontre Ă la prison du 9 avril Ă Tunis et Ă renvoyer son interrogatoire au 16 mars 2005, contrevenant aux dispositions de l’article 79 du Code des ProcĂ©dures PĂ©nales qui dispose :” AprĂšs Ă©xĂ©cution du mandat d’amener, le juge d’instruction interroge l’inculpĂ© dans les trois jours au plus tard de son entrĂ©e dans la maison de dĂ©pĂŽt. A l’expiration de ce dĂ©lai, l’inculpĂ© est conduit d’office, par les soins du surveillant-chef, devant le Procureur de la RĂ©publique qui requiert du juge d’instruction l’interrogatoire immĂ©diat. En cas de refus ou d’impossibilitĂ©, l’interrogatoire est fait par le prĂ©sident du tribunal ou par le juge qu’il dĂ©signe, faute de quoi le Procureur de la RĂ©publique ordonne la mise en libertĂ© immĂ©diate de l’inculpĂ©. ” Les dispositions du Code des procĂ©dure prĂ©citĂ©, interdit le maintien en dĂ©tention de MaĂźtre Abbou au-delĂ de trois jours. La dĂ©cision du juge est donc entachĂ©e de nullitĂ© si l’on s’en tient aux dispositions de l’article 199 du Code des ProcĂ©dures PĂ©nales qui dispose : ” Sont annulĂ©s tous actes ou dĂ©cisions contraires aux dispositions d’ordre public, aux rĂšgles fondamentales de la procĂ©dure et Ă l’intĂ©rĂȘt lĂ©gitime de l’accusĂ©”. La dĂ©cision de renvoi de l’interrogatoire au 16 mars 2005 et le maintien en dĂ©tention sont contraires Ă son intĂ©rĂȘt lĂ©gitime, dans la mesure oĂč ils portent atteinte Ă sa libertĂ© et son contraires aux rĂšgles de procĂ©dure de l’interrogatoire. 2) Le matin du jour prĂ©vu pour l’interrogatoire, son Ă©pouse, Samia Abbou, a Ă©tĂ© empĂȘchĂ©e de pĂ©nĂ©trer dans le tribunal et de rentrer en contact avec son avocat, sans autre justification que les “directives de la police politique” ; les avocats l’ont donc aidĂ©e Ă entrer dans le palais de justice. 3) Une dĂ©lĂ©gation composĂ©e du batonnier et de quatre membres du Conseil de l’ordre et d’un reprĂ©sentant du comitĂ© de dĂ©fense de Maitre Abbou, s’est rendue au bureau du juge d’instruction en charge de l’affaire vers trois heures de l’aprĂšs midi dans le but de prĂ©senter au juge les 212 constitutions pour la dĂ©fense, en vertu de la dĂ©cision de l’assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des avocats, afin qu’ils soient tous autorisĂ©s Ă assister aux travaux de l’instruction, et ce en vertu des dispositions de l’article 72, paragraphe 4, du Code des ProcĂ©dures PĂ©nales – le nombre des constitutions avait atteint 815. Mais le juge d’instruction s’est mis en colĂšre contre cette dĂ©cision et a demandĂ© au batonnier de constituer une liste de dix avocats seulement. Le batonnier lui a rĂ©pondu qu’il Ă©tait accompagnĂ© d’une dĂ©lĂ©gation et a demandĂ© qu’elle puisse entrer. Le juge, furieux de la rĂ©ponse du batonnier, a exigĂ© qu’il quitte le bureau, a marchĂ© vers lui et l’a poussĂ© en tenant des propos attentatoires Ă sa dignitĂ© […]. Le batonnier a ouvert la porte du bureau barrĂ©e par trois agents veillant Ă ce que le reste de la dĂ©lĂ©gation reste Ă l’extĂ©rieur et qui ont assistĂ© Ă l’agression, le premier substitut au procureur de la rĂ©publique courant derriĂšre le juge pour l’inciter Ă se calmer. La dĂ©lĂ©gation a alors dĂ©cidĂ© de se retirer et de rejoindre les avocats qui s’Ă©taient constituĂ©s pour les informer. Rappelons que le pouvoir a dĂ©libĂ©rĂ©ment tendu l’atmosphĂšre : le palais de justice avait Ă©tĂ© depuis le matin encerclĂ© par de nombreux agents de la police politique, toutes ses issues avaient Ă©tĂ© bouclĂ©es l’aprĂšs midi et une camĂ©ra installĂ©e dans le couloir menant au bureau de l’instruction. La porte Ă©tait cadenassĂ©e et de nombreux agents en civil Ă©taient postĂ©s. Ces violations viennent s’ajouter Ă l’enlĂšvement de MaĂźtre Mohammed Abbou,- sans commission rogatoire et en l’absence de tout flagrant dĂ©lit-, par les milices de la police politique agissant dans l’ombre. Il en va de mĂȘme pour le vol de sa voiture qui lui a Ă©tĂ© confisquĂ©e sans procĂšs verbal, l’impossibilitĂ© pour son avocat de lui rendre visite, son transfert contraire au contenu du mandat de dĂ©pot Ă la prison du Kef distante de prĂšs de 170 km de Tunis. Pour rappel, MaĂźtre Mohammed Abbou est dĂ©fĂ©rĂ© en vertu des articles 42, 49, 51, 68 et 72 du Code de la Presse et de l’article 121 du Code pĂ©nal, pour “propagation de fausses nouvelles de nature Ă troubler l’ordre public”, “diffamation de l’appareil judiciaire”, “exhortation des citoyens Ă outrepasser les lois du pays”, et “diffusion publique d’Ă©crits de nature Ă troubler l’ordre public”. L’instruction Ă indiquĂ© que ces crimes sont relatifs Ă un article publiĂ© sur Internet , intitulĂ© “L’Abou GraĂŻeb iraquien et l’Abou GhraĂŻeb tunisien”, qui s’attaquait aux violations et aux crimes commis par la police politique et impunis par la justice. Le CNLT […] exige la libĂ©ration immĂ©diate de MaĂźtre Abbou […] exprime sa solidaritĂ© agissante avec le Conseil de l’ordre des avocats et l’Association des Magistrats tunisiens dans leur lutte commune pour l’indĂ©pendance de la magistrature. Pour le Conseil Le porte parole officiel Sihem Ben SĂ©drine (traduction d’extraits, ni revue ni corrigĂ©e par les auteurs de la version en arabe, LT)
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Tunisie: l’avocat Mohamed Abou aux prises avec la justice
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Associated Press, le 18.03.05Ă 21h18
TUNIS (AP) — L’affaire de l’avocat tunisien Mohamed Abou continue de dĂ©frayer la chronique sur fond d’accusations mutuelles entre les autoritĂ©s et le barreau, soutenu par certaines ONG.
Il est l’auteur d’un article publiĂ© sur Internet particuliĂšrement critique Ă l’endroit du pouvoir pour l’invitation adressĂ©e au premier ministre israĂ©lien Ariel Sharon Ă participer au sommet mondial sur la sociĂ©tĂ© de l’information dont la deuxiĂšme phase, aprĂšs celle de GenĂšve, est prĂ©vue en novembre prochain Ă Tunis. Il a aussi Ă©crit un autre article dans lequel il compare les prisons tunisiennes Ă celle d’Abou Ghraib, en Irak. L’avocat contestataire a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© dĂ©but mars dans des circonstances dĂ©criĂ©es par le barreau.
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Officiellement, Me Abou fait l’objet d’une instruction pour «violences caractĂ©risĂ©es suite Ă une plainte dĂ©posĂ©e Ă son encontre par l’une de ses consoeurs». Il l’aurait «rouĂ©e de coups lui occasionnant des dĂ©gĂąts corporels ayant nĂ©cessitĂ© son admission aux urgences et un arrĂȘt de travail d’un mois environ». Il est aussi poursuivi pour «incitation de la population Ă enfreindre les lois».
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AprĂšs le report de l’interrogatoire du prĂ©venu le 2 mars, l’audience prĂ©vue mercredi dernier a mal tournĂ©. Jeudi, le bĂątonnier Abdessattar Ben Moussa a dĂ©noncĂ© une «agression» dont il affirme avoir fait l’objet de la part du juge d’instruction Faouzi Moussa (Correction de Sami Abdallah: le juge s’appelle “Faouzi Sassi” et non “Faouzi Moussa”), alors qu’il s’apprĂȘtait Ă assister son collĂšgue en compagnie de plusieurs membres du conseil de l’Ordre des avocats.
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Une source officielle dĂ©ment cette accusation: «L’audition s’est dĂ©roulĂ©e conformĂ©ment Ă la loi sans qu’il s’ensuive une atteinte physique ou verbale Ă qui que ce soit». Selon la mĂȘme source, «dans le souci de veiller au bon dĂ©roulement de l’instruction», le juge a autorisĂ© 17 avocats Ă assister Ă l’interrogatoire, sur les quelque 200 qui se sont portĂ©s volontaires pour dĂ©fendre leur collĂšgue. Une dĂ©cision qui a Ă©tĂ© contestĂ©e par le prĂ©venu qui a refusĂ© de se soumettre Ă l’interrogatoire.
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Les autoritĂ©s entendent nĂ©anmoins poursuivre la procĂ©dure judiciaire engagĂ©e contre l’avocat.
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Tunis dĂ©terminĂ© Ă abriter le SMSI en dĂ©pit de la prĂ©sence contestĂ©e d’Ariel Sharon
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Associated Press, le 19 mars 2005 Ă 15h24Â Â
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TUNIS (AP) – Le prĂ©sident tunisien Zine El Abidine Ben Ali a rĂ©affirmĂ© samedi l’attachement de son pays Ă abriter la deuxiĂšme phase du Sommet mondial sur la sociĂ©tĂ© du savoir (SMSI), prĂ©vue en novembre prochain, en dĂ©pit de la vague de protestation provoquĂ©e par l’annonce de la participation du Premier ministre israĂ©lien Ariel Sharon.
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Le 25 fĂ©vrier dernier, le gouvernement israĂ©lien avait fait Ă©tat de l’acceptation par M. Sharon d’une invitation adressĂ©e par le gouvernement tunisien Ă participer au SMSI. L’information avait aussitĂŽt confirmĂ©e par Tunis, arguant du fait que le Premier ministre israĂ©lien avait Ă©tĂ© invitĂ© au mĂȘme titre que les dirigeants de tous les pays membres de l’ONU.
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Une annonce accueillie par des rĂ©actions hostiles de plusieurs partis d’opposition en Tunisie et d’ONG qui ont exprimĂ© leur refus de voir celui qu’ils considĂšrent comme «un criminel de guerre» dont »les mains sont souillĂ©es de sang palestinien» fouler le sol tunisien. Des manifestations estudiantines ont Ă©tĂ© Ă©touffĂ©es dans l’oeuf par les forces de l’ordre.
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La prise de position sans ambages du chef de l’Etat tunisien coupe court Ă toutes les spĂ©culations sur un Ă©ventuel dĂ©sistement de la Tunisie d’abriter le SMSI.
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« Notre pays est profondĂ©ment fier de l’honneur qui lui Ă©choit», a martelĂ© le prĂ©sident Ben Ali. Il y voit un tĂ©moignage de «respect et de reconnaissance mondiale» pour les progrĂšs accomplis par la Tunisie dans «ce domaine vital» des technologies de la communication et de la culture numĂ©rique.
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Il a citĂ© le classement rĂ©cemment publiĂ© par le Forum Ă©conomique de Davos qui a placĂ© la Tunisie au 31e rang mondial en la matiĂšre, la situant en tĂȘte des pays africains et «devant nombre de pays europĂ©ens, asiatiques et amĂ©ricains».
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Tunis dĂ©terminĂ© Ă abriter le SMSI en dĂ©pit de la prĂ©sence contestĂ©e dâAriel Sharon
TUNIS (AP) – Le prĂ©sident tunisien Zine El Abidine Ben Ali a rĂ©affirmĂ© samedi l’attachement de son pays Ă abriter la deuxiĂšme phase du Sommet mondial sur la sociĂ©tĂ© du savoir (SMSI), prĂ©vue en novembre prochain, en dĂ©pit de la vague de protestation provoquĂ©e par l’annonce de la participation du Premier ministre israĂ©lien Ariel Sharon.
Le 25 fĂ©vrier dernier, le gouvernement israĂ©lien avait fait Ă©tat de l’acceptation par M. Sharon d’une invitation adressĂ©e par le gouvernement tunisien Ă participer au SMSI. L’information avait aussitĂŽt confirmĂ©e par Tunis, arguant du fait que le Premier ministre israĂ©lien avait Ă©tĂ© invitĂ© au mĂȘme titre que les dirigeants de tous les pays membres de l’ONU.
Une annonce accueillie par des rĂ©actions hostiles de plusieurs partis d’opposition en Tunisie et d’ONG qui ont exprimĂ© leur refus de voir celui qu’ils considĂšrent comme “un criminel de guerre” dont “les mains sont souillĂ©es de sang palestinien” fouler le sol tunisien. Des manifestations estudiantines ont Ă©tĂ© Ă©touffĂ©es dans l’oeuf par les forces de l’ordre.
La prise de position sans ambages du chef de l’Etat tunisien coupe court Ă toutes les spĂ©culations sur un Ă©ventuel dĂ©sistement de la Tunisie d’abriter le SMSI.
“Notre pays est profondĂ©ment fier de l’honneur qui lui Ă©choit”, a martelĂ© le prĂ©sident Ben Ali. Il y voit un tĂ©moignage de “respect et de reconnaissance mondiale” pour les progrĂšs accomplis par la Tunisie dans “ce domaine vital” des technologies de la communication et de la culture numĂ©rique.
Il a citĂ© le classement rĂ©cemment publiĂ© par le Forum Ă©conomique de Davos qui a placĂ© la Tunisie au 31e rang mondial en la matiĂšre, la situant en tĂȘte des pays africains et “devant nombre de pays europĂ©ens, asiatiques et amĂ©ricains”.
Les autoritĂ©s tunisiennes dĂ©terminĂ©es Ă empĂȘcher la tenue de la rĂ©union maghrĂ©bine “Pour un Maghreb sans prisonniers politiques”
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Les autoritĂ©s tunisiennes ont multipliĂ© ces derniers jours les entraves et les pressions afin dâempĂȘcher la tenue de la rĂ©union maghrĂ©bine “Pour un Maghreb sans prisonniers politiques”.
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Cette rĂ©union prĂ©vue demain Ă Tunis, Ă laquelle ont appelĂ© les partis de la coalition dĂ©mocratique (FDTL, PCOT, PDP, CPR), “devrait” se tenir Ă lâespace El Teatro. Elle a Ă©tĂ© annoncĂ©e il y a quelques semaines et plusieurs partis politiques de Mauritanie, du Maroc et de lâAlgĂ©rie ont Ă©tĂ© invitĂ©s pour y participer. CâĂ©tait certainement sans compter sur lâattitude de la dictature tunisienne qui sâest activĂ© sur deux fronts :
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 Les invitĂ©s : Plusieurs partis politiques marocains reprĂ©sentĂ©s au sein du gouvernement de leur pays (USFP, Istiklal, …) auraient subi des pressions de la part des autoritĂ©s tunisiennes. Ils ont fini par se rĂ©tracter et dĂ©cliner lâinvitation alors quâils avaient confirmĂ© leur participation il y a quelques jours. Ce soir seuls les reprĂ©sentants de la GSU, du PJD et de lâalternative civilisationnelle du Maroc, ainsi que le FFS de lâAlgĂ©rie sont arrivĂ©s Ă Tunis.
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 Le lieu : Chaque fois que lâopposition tunisienne ou les ONG indĂ©pendantes cherchent Ă organiser une manifestation Ă Tunis, cette tĂąche relĂšve du parcours du combattant et sâavĂšre souvent impossible Ă rĂ©soudre.
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La manifestation prĂ©vue pour demain nâa pas Ă©chappĂ© Ă cette rĂšgle. En effet, chaque fois que les organisateurs ont contactĂ© un hĂŽtel pour rĂ©server une salle, ils ont eu un accord de principe dans un premier temps, avant de voir le gestionnaire de lâĂ©tablissement en question se rĂ©tracter sous les pressions policiĂšres.
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Cette fois les organisateurs ont fini par trouver un lieu, la direction de lâespace culturel El Teatro a acceptĂ© dâaccueillir la rĂ©union et les invitations ont Ă©tĂ© distribuĂ©es en consĂ©quence. Entre-temps, les pressions contre la direction dâEl Theatro se sont multipliĂ©es, allant jusquâĂ menacer de le fermer. Le consortium tunisio-koweitien pour le dĂ©veloppement propriĂ©taire de lâhĂŽtel El Mechtel, oĂč se situe lâespace El Theatro, a ouvertement menacĂ© la direction de lâespace de rompre le bail si elle permet la tenue de la rĂ©union chez elle. De son cĂŽtĂ©, la police des districts de Tunis et de Al Omrane a menacĂ© de fermer lâespace prĂ©textant du fait que ce lieu doit ĂȘtre rĂ©servĂ© aux manifestations culturelles et par consĂ©quent ne peut accueillir des rĂ©unions politiques.
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Les partis de la coalition dĂ©mocratique rĂ©unis aujourdâhui ont fermement condamnĂ© ces pratiques dâun autre Ăąge et se sont dĂ©clarĂ©s dĂ©terminĂ©s Ă se battre pour imposer leur droit Ă libre rĂ©union.
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BrĂšves :
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* Une Ă©tudiante et un Ă©tudiant de la facultĂ© de Manouba viennent dâĂȘtre condamnĂ©s Ă 6 et 9 mois de prison avec sursis. Ils ont Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s lors du mouvement de protestation contre lâinvitation adressĂ©e par Ben Ali Ă Sharon pour visiter la Tunisie.
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 * Un jugement de 4 ans de prison ferme a Ă©tĂ© prononcĂ© hier Ă lâencontre de Taoufik Hammami pour “vol avec menace de faire usage dâune arme”. Son avocate, Me Radhia Nasraoui, sâest Ă©levĂ©e contre ce verdict expĂ©ditif dĂ©nonçant une affaire montĂ©e de toute piĂšce. Ce procĂšs, comme plusieurs autres en Tunisie, sâinscrit dans le cadre dâune politique de punitions collectives. En effet, Taoufik Hammami, dĂ©tenu depuis le 14 juillet 2004, nâest autre que le frĂšre de Lotfi Hammami responsable syndical au sein de lâUGET-France. Rappelons que ce dernier a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©, torturĂ© et emprisonnĂ© Ă plusieurs reprises tout au long des quinze derniĂšres annĂ©es pour ses activitĂ©s politiques liĂ©es au parti communiste des ouvriers de Tunisie (PCOT).
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 (Source : Albadil Express [18-03-2005] )
Tunisie
4 ans de prison ferme pour Taoufik Hammami dont le crime est dâĂȘtre le neveu de Hamma Hammami
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« Taoufik Hammami, un jeune entrepreneur tunisien, a Ă©tĂ© condamnĂ© hier Ă 4 ans de prison ferme pour  vol aggravĂ© de menaces sur la victime » a dĂ©clarĂ© son avocate Radia Nasraoui aujourdâhui, jointe au tĂ©lĂ©phone.
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Pour la cĂ©lĂšbre avocate qui a Ă©tĂ© sauvagement violentĂ©e il y a deux semaines « Il sâagit dâun procĂšs inique. Lâaffaire est fabriquĂ©e de toutes piĂšces. Son dossier souffre de nombreuses contradictions et hormis les dĂ©clarations de la victime, il nây a aucune preuve contre Taoufik Hammami ».
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Elle-mĂȘme Ă©tant sous lâemprise du choc suite Ă cette condamnation, lâavocate de Taoufik Hammami explique « Je pensais que Taoufik Hammami serait libĂ©rĂ©, il est innocent et nâimporte quel juge aurait ordonnĂ© sa libĂ©ration » avant dâajouter, « cette condamnation est une preuve de plus de l’absence de plus de lâindĂ©pendance de la justice en Tunisie ».
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Persécution de la famille Hammami et du POCT
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Il est Ă rappeler que Taoufik Hammami a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© et violemment torturĂ© plusieurs fois par le passĂ©, tout particuliĂšrement dans le cĂ©lĂšbre procĂšs du POCT du 13 mars 1992.
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Le 14 juillet 2004, il a Ă©tĂ© enlevĂ© par la police politique de Ben Arous (Banlieue de Tunis) avant dâĂȘtre dĂ©fĂ©rĂ© devant le juge dâinstruction qui lui a notifiĂ© quâil Ă©tait accusĂ© pour vol aggravĂ© de menaces sur la victime.
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Il est Ă rappeler Ă©galement quâoutre MaĂźtre Radia Nasroui, tous les avocats qui ont pu prendre connaissance du dossier de Taoufik Hammami sâaccordent sur lâabsence de toutes preuves et sur le caractĂšre « politique » de lâaffaire.
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Il semble que le procĂšs qui est intentĂ© Ă Taoufik Hammami sâinscrit dans une politique de persĂ©cution insidieuse du pouvoir qui viserait la famille Ă©largie de Taoufik Hammami. Dâautant plus que depuis quâil a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©, son entreprise a coulĂ© et ses crĂ©anciers, poussĂ©s par le pouvoir, ne manqueront pas de se manifester. Par ailleurs, aprĂšs le dĂ©part de ses frĂšres Lotfi et Abdelwahab en France, Taoufik Hammami avait pris sa famille en charge et subvenait Ă ses besoins, son pĂšre Ă©tant ĂągĂ© de 75 ans
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Lotfi Hammami, frĂšre de Taoufik, est un ancien prisonnier dâopinion, il a Ă©tĂ© plusieurs fois violemment torturĂ© et emprisonnĂ© dans des procĂšs politiques. En France, il est un des militants les plus actifs et une des bĂȘtes noires du pouvoir de M. Ben Ali.
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Dans une lettre rendue publique, oĂč il rĂ©pond aux « dĂ©clarations mensongĂšres des autoritĂ©s tunisiennes » il avait prĂ©cisĂ© « Câest parce que jâai refusĂ© ce chantage et toute compromission contre mon avocate que jâai eu droit Ă toute sorte de torture pendant 14 jours. Ils ont fini par utiliser un procĂšs verbal falsifiĂ© pour transformer mon avocate en ma coĂŻnculpĂ©e »
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Rchid Trabelsi un cousin de Taoufik a Ă©tĂ© lui aussi torturĂ© et emprisonnĂ© avant de regagner la France oĂč il a obtenu le statut de rĂ©fugiĂ© politique. Lors de son interrogatoire, la police politique avait notĂ© « lâaccusĂ© a fini par avouer quâil est le neveu de Hamma Hammami » se souviens aujourdâhui Rchid Trabelsi en France.Â
Dans une autre lettre ouverte rendue publique, Rachid Trabelsi, Mohsen Chabbi et Lotfi Hammami, parents de Hamma Hammami et Radia Nasraoui, expliquent « les familles de Hamma Hammami et Radia Nasraoui ont subi 26 procĂšs contre leurs membres. 23 cas de torture dans les locaux de la police politique et de la sĂ»retĂ© de lâEtat ont Ă©tĂ© signalĂ©s. La torture a durĂ©, pour quelques membres, plus de 21 jours en mars 1992 et fĂ©vrier 1998. Pour accomplir sa rĂ©pression organisĂ©e, le rĂ©gime tunisien sâest attaquĂ© aux membres les plus proches des deux familles en provoquant 18 cas de licenciement abusif pour certains, des exclusions des lycĂ©es et des universitĂ©s pour dâautres et lâinterdiction de travailler dans la fonction publique pour lâensemble. La libertĂ© de circulation de certains membres de ces familles a Ă©tĂ© aussi bafouĂ©e puisquâelles ont Ă©tĂ© privĂ©es de leur passeport, câest le cas de Mohsen Chabbi dont le passeport a Ă©tĂ© saisi pendant 8 ans. Pendant 16 ans, ces familles ont Ă©tĂ© exposĂ©es Ă la rĂ©pression et aux sanctions collectives. Plusieurs de leurs membres souffrent toujours des sĂ©quelles de la torture subies pendant cette pĂ©riode. Les dĂ©gĂąts physiques sont aujourdâhui apparentes pour le cas de Rachid Trabelsi, Abdel Waheb Hammami, Lotfi Hammami et Chedli Hammami. Il sâagit de preuves de la barbarie du rĂ©gime tunisien qui ne peuvent pas ĂȘtre effacĂ©es ».
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Souvent montrĂ© du doigt des ONG des Droits de lâHomme et le DĂ©partement dâEtat dâamĂ©ricain pour les violations des droits de lâHomme et les procĂšs politique, le pouvoir tunisien a fini par trouver la parade en accusant ses dĂ©tracteurs en inventant des dâaffaires de « Droits commun » et en instituant le principe de la « punition collective ».
A Tunis, Radia Nasraoui, lâavocate de Taoufik Hammami assure quâun ComitĂ© verra le jour prochainement pour le dĂ©fendre, alors quâen France plusieurs consultations ont eu lieu aujourdâhui en vue de prĂ©parer une campagne mĂ©diatique et un ComitĂ© pour la libĂ©ration de Taoufik Hammami.
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Un appel signĂ© par plusieurs jeunes tunisiens paraĂźtra prochainement de la France appelant lâopinion nationale et internationale Ă exprimer leur solidaritĂ© avec Taoufik Hammami, avec un seul mot dâordre « Nous ne laisserons pas la dictature dĂ©truire nos familles, lâavenir de la Tunisie, la jeunesse, ainsi que lâespoir dâune Tunisie libre et dĂ©mocratique ».
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Jusque-lĂ , lâUnion EuropĂ©enne et les Etats-Unis avaient cautionnĂ© avec leur silence ou leurs soutiens actifs « la dictature en Tunisie ».
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Sami Ben Abdallah
Paris le 19/03/2005.
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Les personnes dĂ©sirant avoir plus dâinformations sur cette affaire peuvent contacter MaĂźtre Radia Nasraoui sur le 00.216.98.33.99.60
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Texte de la réponse des « Destouriens démocrates » à M. Chokri Yacoub
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Bonjour,
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Nous comprenons parfaitement vos raisons. Et Ă votre place, nous aurions rĂ©agi de la mĂȘme maniĂšre.
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Supposons, comme vous le proposez, que nous sortions de l’anonymat : comment pourrions-nous continuer Ă informer l’opinion publique des horreurs que la mafia de Ben ALi est en train de commettre?
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Nous avons encore beaucoup de rĂ©vĂ©lations Ă faire. Et nous ne pouvons le faire que si nous continuons Ă ĂȘtre informĂ©s par le dĂ©jĂ large et solide rĂ©seau qui est en train de s’agrĂ©ger autour de notre courant.
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Autre chose : nous vous croyons capable d’imaginer ce qu’il adviendrait – physiquement !- de nous si on nous dĂ©masquait!! En restant, pour le moment, dans l’anonymat, nous servons plus efficacement la cause de tous les tunisiens: libĂ©rer notre pays de la mafia.
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Au lieu de jeter le doute sur l’authenticitĂ© de notre courant, ne croyez vous pas qu’il serait plus utile, pour que nous puissions continuer ce travail de dĂ©stabilisation de l’intĂ©rieur, de nous soutenir et d’accueillir plutĂŽt favorablement notre courant mĂȘme si, pour le moment, nous sommes condamnĂ©s Ă l’anonymat?
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On peut ĂȘtre destouriens et dĂ©mocrates. OUI et les noms que nous avons citĂ©s dans notre premiĂšre dĂ©claration le prouvent bien… Ils ont contribuĂ© substantiellement Ă Â faire avancer les acquis dĂ©mocratiques en Tunisie. ET l’Ă©crasante majoritĂ© des militants actuels du RCD sont pour la dĂ©mocratisation du pays.
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Reste un millier au maximum de thurifĂ©raires et de mercenaires. Ne croyez vous pas que c’est dĂ©jĂ salutaire que notre courant se dĂ©cide d’agir et de commencer Ă informer l’opinion?
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Les prochaines initiatives que nous allons prendre pourront peut ĂȘtre vous amener plus Ă nous soutenir qu’Ă nous brocarder.
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Espérons-le. Cordialement.
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(*) Texte de la réaction de Monsieur Yacoub
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Destouriens et dĂ©mocrates sous le rĂ©gime dictatorial de Zebla Ben Ali ce n’est pas compatible, commencez dĂ©jĂ Ă signer vos communiquĂ©s et sortir de l’anonymat en dĂ©missionnant de vos postes au sein du RCD, et aprĂšs on en parlera.
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Mes pensées vont à la maman de mon cher regretté Zouhaier et à toute sa famille.
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Vive la Tunisie libre.
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GENEVE : SEATING A LA MEMOIRE DÂŽ ETTOUNSI
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L’EXPLOITATION POLITIQUE DE LA MORT DE ZOUHAYR YAHYAOUI
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The death of a Tunisian brave heart Â
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UPI Outside View (*):
Tunisia’s tolerant Islam
By Barry Rubin (**)
Outside View Commentator
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Herzliya, Israel, Mar. 16 (UPI) — A Saudi mother, who also happens to be a college professor, recently wrote about a remarkable experience. Shortly after Sept. 11, 2001, her son came home from 5th grade and sang the praises of Osama bin Laden, repeating what his teacher had told the class. Three years later, that same teacher was one of the Islamist terrorists who attacked the Saudi Interior Ministry.
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 Usually the linkage is not so direct, but it is quite clear that terrorists in the Arab world are often the direct product of what they were taught in school about Islam. And even if the graduates make good, pro-regime citizens, they are also inoculated against supporting political reform, democracy, or a moderate version of Islam.
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That is why a recent article by Latif Lakhdar in the March issue of MERIA Journal (meria.idc.ac.il/journal/2005/issue1/jv9no1a3.html) — and in an earlier version published in Arabic in Middle East Transparent Web site (metransparent.com)– is so important. For Lakhdar does nothing less than show how this vicious circle can be broken – and, in fact, already is being done so in one Arab country.
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Lakhdar, a Tunisian liberal who lives in Paris, simply contrasts how Islam is taught in his native country compared to the kinds of things done in places like Saudi Arabia and Egypt. In those places, Lakhdar explains, the way students are educated about Islam “instills in the younger generation a religious fanaticism which entails a phobia toward dissimilarity and a rejection of the other, even to the extent of killing.” They are taught that any change or even debate about religious precepts is an unacceptable deviation from righteousness that must be punished.
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In contrast, there is a way of teaching religious rationally, a manner that does not bar science or logic. Such an approach includes the comparative study of religions, which shows that there has been a historical development. This demonstrates not only the lack of a monopoly on piety but also the fact that change is a natural part of religion. The sociology and psychology of religion shows its social function and how this can be a tremendous benefit or be manipulated to serve the interests of unscrupulous people. Linguistics encourages the careful study of texts to show that they have always been interpreted.
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Lakhdar shows that this is in fact what has been introduced into the Tunisian school system, even at Zaitouna University, the highest institution of religious teaching in the country. Many moderate teachings and traditions exist in Islam that can be used for this purpose but which are ignored by the far stronger forces of radicalism that pick the theologians and passages they want in order to claim that their version is the only legitimate one. Students can be taught to think for themselves rather than merely worship their ancestors.
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For example, Lakhdar points to 13 different verses from Islam’s founder that show his intention was to be a preacher and influence rather than a politician or dictator. One states that if people ignore the message, nevertheless, “unto thee belongeth preaching only.” Another says, “Wherefore warn the people; for thou art a warner only.”
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At Zaitouna University, Lakhdar explains, there are three central concepts in religious studies which are vital to reforming the prevailing conception of Islam, and thus required to change society for the better. These are: “The promotion of ijtihad”–the interpretation of texts — “without any restriction on rational thinking; the reliance upon rationalist thought and the humanities … as part of learning about religious texts; and realization that Islamic consciousness must reinstate the other, particularly the Jew and the Christian.”
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To prove this point, he presents the curriculum of the university’s Higher Institute of Religious Fundamentals. Among the courses required, students must “understand the historical and scientific difficulties” of turning religious texts into legislation. On each subject, the classes stress that Islamic scholars had different opinions, as in one case saying, “Each doctrine has its own perception, closely related to the society” in which it was formulated, “with respect to time and place.”
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Another course, “Introduction to Scriptural Religions,” is defined as teaching about “Judaism and Christianity … in a manner which respects the words of their founders.” This is, of course, far different from the hostile image inculcated into students in virtually every other Arab country. Aside from a thorough grounding in Islamic sources, there are also courses on the Judeo-Christian Bible, comparing Western and Muslim concepts of freedom, human rights in Islam, both liberal and conservative Islamic theology in the past, and the varying interpretations of different Muslim sects.
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To top this all off, there is an example of a final exam at Zaitouna University in which students are asked to discuss the important Koranic saying, “Let there be no violence in religion.” It specifically speaks of how no one should be forcibly converted to Islam.
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Students are then asked, “To elaborate on the Koran’s stance on the freedom of belief, and the question of accepting the other who is different in religion.” They are told to discuss these issues, “In accordance with modern requirements to found the civil society, which prerequisites tolerance and coexistence in order to guarantee progress and security, and in accordance with the aspirations by global community to build interactions on a base of the exchange of interests, regardless of color, sex or religion.”
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The Tunisian experience shows that moderate Islam is possible but only if Arab states and societies teach their children that it is legitimate and give them the tools needed to live and believe that way.
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(**) Barry Rubin is director of the Global Research in International Affairs (GLORIA) Center, Interdisciplinary Center Herzliya (IDC), and co-author of “Yasir Arafat: A Political Biography” and “Hating America: A History” (Oxford University Press, August 2004). Prof. Rubin’s columns can now be read online at gloria.idc.ac.il/columns/column.html
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(*)United Press International’s “Outside View” commentaries are written by outside contributors who specialize in a variety of important issues. The views expressed do not necessarily reflect those of United Press International. In the interests of creating an open forum, original submissions are invited.
Smsi â PrĂ©paratifs
Dans les moindres détails
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⹠La convention de location du Palais des Expositions du Kram signée.
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⹠Campagne pour la recherche de sponsors étrangers : un site web sera probablement mis en ligne à cet effet.
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Une deuxiĂšme rĂ©union dâinformation sur les prĂ©paratifs pour la phase de Tunis du Sommet mondial sur la sociĂ©tĂ© de lâinformation( Smsi) Ă lâintention des chefs des missions diplomatiques et des reprĂ©sentants des organisations internationales sera organisĂ©e par la Tunisie le 22 mars courant Ă GenĂšve.
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A lâinstar de la premiĂšre rĂ©union ayant eu lieu, le 7 fĂ©vrier dernier, au Palais des Expositions du Kram, site du Smsi Tunis 2005, la rencontre citĂ©e sera consacrĂ©e Ă la prĂ©sentation de lâavancement des prĂ©paratifs organisationnels et matĂ©riels.
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Conduits Ă un rythme soutenu et bĂ©nĂ©ficiant dâune attention particuliĂšre de la part du Chef de lâEtat lui-mĂȘme, ces prĂ©paratifs sont nĂ©gociĂ©s Ă chaque Ă©tape avec lâUnion internationale des tĂ©lĂ©communications (UIT) chargĂ©e par lâONU du secrĂ©tariat exĂ©cutif.
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Câest ainsi que les travaux de rĂ©amĂ©nagement du Palais des Expositions du Kram vont bientĂŽt commencer, les Ă©tudes ayant Ă©tĂ© effectuĂ©es et les prestataires choisis aprĂšs les consultations dâusage.
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La convention de location du site signĂ©e tout rĂ©cemment, le ComitĂ© dâorganisation du Smsi (Cosmsi) va disposer totalement des lieux Ă partir de dĂ©but aoĂ»t afin de fignoler les prĂ©paratifs.
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Deux commissions planchent actuellement sur les deux volets restants :
La sĂ©curitĂ© de lâalimentation en Ă©nergie et le programme culturel. Ce dernier promet dâĂȘtre allĂ©chant et il est question de retransmettre la cĂ©rĂ©monie dâouverture sur des Ă©crans gĂ©ants qui seraient Ă©rigĂ©s au centre-ville.
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SĂ©curitĂ© : lâONU responsable
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PlacĂ©s sous lâautoritĂ© exclusive de lâONU, les espaces oĂč se dĂ©rouleront les travaux officiels du Smsi vont bĂ©nĂ©ficier dâun plan de sĂ©curitĂ© qui sera pilotĂ© et assurĂ© par les agents de lâONU, et ce, sur demande de lâOrganisation, elle-mĂȘme, selon les rĂšgles en vigueur pour les
sommets. Une dĂ©lĂ©gation de lâONU visitera ainsi les lieux au moment opportun et il est
prĂ©vu quâune autre sâinstalle, dĂ©but novembre sur le site lui-mĂȘme.
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A cÎté des activités de recrutement et de formation des volontaires qui atteindront bientÎt leur vitesse de croisiÚre, le Cosmsi se prépare à  lancer une campagne internationale pour le choix de sponsors, et ce, aprÚs avoir conclu un accord dans ce sens avec Tunisie Télécom qui, depuis le démarrage des préparatifs, assure cette fonction.
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Câest ainsi quâun site web sera probablement mis en ligne Ă cet effet afin de mieux faire avancer ladite campagne et lâon sâattend Ă ce que plusieurs entreprises locales ou Ă©trangĂšres rĂ©sidant en Tunisie rejoignent Tunisie TĂ©lĂ©com.
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BientĂŽt un timbre aux couleurs du Smsi
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ComposĂ© de films, de brochures, de dĂ©pliants, dâaffiches, du site web, des bulletins, et autres, lâarsenal de communication de la Tunisie sera bientĂŽt renforcĂ© par un timbre-poste.
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Un projet a, en effet, été derniÚrement choisi parmi les trois spécimens retenus et sa reproduction ainsi que sa commercialisation ne tardera certainement pas.
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Notons que la Tunisie prendra part les 21 et 22 mars courant Ă Manama au BahreĂŻn Ă la rĂ©union des ministres arabes chargĂ©s des TĂ©lĂ©communications et profitera de lâoccasion pour poursuivre son action dâinformation et de promotion en faveur du Smsi.
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Rappelons, enfin, que plusieurs autres rĂ©unions dâinformation destinĂ©es aux diplomates seront organisĂ©es par la Tunisie et prĂ©cisons que plusieurs ambassades accrĂ©ditĂ©es en Tunisie ont dĂ©jĂ dĂ©signĂ© leur vis-Ă -vis avec le Cosmsi en ce qui concerne le sommet.
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(Source : La Presse du 18 mars 2005)
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Ă LA COMMISSION DES DROITS DE L’HOMME DES NATIONS UNIES, DES MEMBRES DE L’IFEX FONT PRESSION EN FAVEUR DE RĂFORMES
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Au moment d’entamer sa session annuelle cette semaine Ă GenĂšve, la Commission des Droits de l’homme des Nations Unies se heurte de plus en plus aux critiques qui lui reprochent sa faiblesse contre les Ătats contrevenants. Human Rights Watch et Reporters sans frontiĂšres (RSF) comptent parmi de nombreuses organisations non gouvernementales qui exigent des rĂ©formes de toute urgence.
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Human Rights Watch fait remarquer que les 53 pays membres de la Commission comprennent des gouvernements comme celui du Soudan, qui porte la responsabilitĂ© de crimes contre l’humanitĂ© au Darfour. Le Soudan a Ă©tĂ© réélu Ă la Commission en 2004, en dĂ©pit des critiques de Human Rights Watch, qui l’accuse de violations flagrantes des droits de la personne (voir Ă : http://hrw.org/english/docs/2005/03/10/sudan10293.htm ).
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Ces derniÚres années, la composition de la Commission a changé considérablement, dit Human Rights Watch. Un nombre croissant de pays qui présentent des déficiences au chapitre des droits de la personne ont obtenu un siÚge à la Commission et ont utilisé leurs votes pour déjouer les résolutions qui dénoncent leurs agissements.
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Selon Human Rights Watch, la Commission doit Ă©liminer de ses rangs les pires transgresseurs des droits de la personne et insister pour que les pays qui veulent s’y joindre doivent s’engager Ă amĂ©liorer les droits de la personne (lire le rapport Ă : http://hrw.org/french/docs/2005/03/08/switze10281.htm).
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Reporters sans frontiĂšres (RSF) attire l’attention sur le fait que 70 des 99 journalistes incarcĂ©rĂ©s de par le monde le sont dans des pays qui siĂšgent Ă la Commission. Il s’agit de la Chine, de Cuba, de l’ĂrythrĂ©e et du NĂ©pal. « La [Commission] continue de se discrĂ©diter. Nous ne comprenons pas comment les dirigeants des Nations Unies tolĂšrent cela », dit RSF.
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Le groupe, qui est membre de l’IFEX, adresse directement ses critiques Ă l’Iran et fait remarquer qu’au cours des deux derniĂšres annĂ©es, le gouvernement n’a pas tenu compte des recommandations, formulĂ©es par deux experts des Nations Unies, d’amĂ©liorer la situation de la libertĂ© d’_expression et de mettre fin aux dĂ©tentions arbitraires. Avec 13 journalistes actuellement derriĂšre les barreaux, l’Iran est le premier geĂŽlier de journalistes et de cyberdissidents de tout le Moyen-Orient, dit RSF (voir Ă : http://www.rsf.org/article.php3?id_article=12874).
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Par ailleurs, le PEN International et l’Union internationale des Ă©diteurs (UIE) ont fait part de leur prĂ©occupation devant la situation de la libre _expression en Tunisie. Les deux groupes indiquent que la Tunisie, qui accueillera le Sommet mondial sur la sociĂ©tĂ© de l’information en novembre 2005, est loin de satisfaire Ă ses engagements en regard du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIRDCP).
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Les lois ont Ă©tĂ© modifiĂ©es au cours des deux derniĂšres annĂ©es afin de « restreindre considĂ©rablement la libertĂ© d’_expression », disent l’UIE et le PEN International. Entre autres sujets d’inquiĂ©tude, on note le blocage des sites web, le harcĂšlement des mĂ©dias critiques et le recours Ă la torture par les agents de sĂ©curitĂ©.
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Les deux groupes pressent le Rapporteur spĂ©cial des Nations Unies sur la libertĂ© d’_expression, Ambeyi Ligabo, de rappeler leurs obligations aux autoritĂ©s de la Tunisie aux termes du PIRDCP. Lire leur rapport Ă : http://tinyurl.com/4ev82.
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La Commission des Droits de l’homme siĂšge du 14 mars au 22 avril 2005.
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Consulter les sites suivants :
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– Commission des Droits de l’homme des Nations Unies : http://www.ohchr.org/french/bodies/chr/index.htm
– PIRDCP : http://www.ohchr.org/french/law/ccpr.htm
– RSF: http://www.rsf.org/article.php3?id_article=12849
– UIE : http://www.ipa-uie.org/
– PEN International : http://www.internationalpen.org.uk/
– International Herald Tribune : http://www.iht.com/articles/2005/03/15/news/rights.html
– Campagne en faveur d’un regroupement dĂ©mocratique aux Nations Unies : http://www.democracycaucus.net/html/unvot.html
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(Source : http://www.ifex.org/fr/content/view/full/65459/ )
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Tunisia protests Palestinian objections to Sharon’s invitation
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Occupied Jerusalem – The Tunisian government has protested criticisms voiced by some Palestinian officials of a planned visit to Tunis by Israeli Prime Minister Ariel Sharon.
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A Tunisian diplomat met with Palestinian officials Wednesday to convey the Tunisian government’s displeasure over the remarks.
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Earlier this week, a PA official was quoted as saying that the invitation extended by the government of President Zainul Abedin to Sharon to visit the north African Arab country was a “stab in the back.”
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The official castigated Arab and Muslim countries that “are harrowing to normalize with Israel.”
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“We hope that our brother Arab leaders refrain from harming the Palestinian cause by normalizing relations with Israel while the Israeli occupation is still well-entrenched in our country”
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In reaction to Tunisian objections, the PA on Thursday issued a statement asserting the “cordial and brotherly relations” with “sisterly Tunisia.”
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(Source: palestine-info.co.uk, le 10 Mars2005 Ă 18h26)
Lien web : http://www.palestine-info.co.uk/am/publish/article_10826.shtml
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Tunisie-Union européenne :
Oeuvrer Ă la rĂ©ussite de la 2Ăšme phase du Sommet mondial sur la sociĂ©tĂ© de l’information
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Au cours d’une cĂ©rĂ©monie officielle organisĂ©e mercredi, au siĂšge du Conseil de l’Union europĂ©enne, Ă Bruxelles, M. Fethi Merdassi a prĂ©sentĂ© au prĂ©sident du Conseil, M. Jean Asselborn, vice-premier ministre et ministre des Affaires Ă©trangĂšres du grand DuchĂ© du Luxembourg, les lettres l’accrĂ©ditant en qualitĂ© de reprĂ©sentant permanent de la Tunisie auprĂšs des communautĂ©s europĂ©ennes .
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M. Fethi Merdassi a soulignĂ©, au cours d’un entretien, qui a suivi la cĂ©rĂ©monie, la soliditĂ© des relations de coopĂ©ration et de partenariat entre la Tunisie et l’Union europĂ©enne, relevant la nĂ©cessitĂ© de soutenir le dĂ©veloppement du secteur textile pour faire face aux dĂ©fis majeurs dĂ©coulant de la suppression des accords multifibres .
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L’entretien a Ă©tĂ© aussi l’occasion pour le diplomate tunisien de sensibiliser le prĂ©sident du Conseil de l’Union europĂ©enne Ă l’impĂ©ratif pour la Tunisie et la communautĂ© internationale , d’oeuvrer Ă la rĂ©ussite de la 2Ăšme phase du Sommet mondial sur la sociĂ©tĂ© de l’information, mettant l’accent sur l’importance d’une participation europĂ©enne active Ă ce grand Ă©vĂ©nement .
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De son cĂŽtĂ©, M. Jean Asselborn s’est fĂ©licitĂ© de la qualitĂ© des relations Ă©tablies entre la Tunisie et l’Union europĂ©enne, exprimant son admiration pour l’expĂ©rience avant-gardiste de la Tunisie en ce qui concerne la promotion des ressources humaines et l’amĂ©lioration de la qualitĂ© de vie de tous ses citoyens et en particulier les femmes et les enfants .
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Il a Ă©galement mis en relief le rĂŽle pionnier jouĂ© par la Tunisie dans l’Ă©dification entre les deux rives de la mĂ©diterranĂ©e, d’une zone de stabilitĂ©, de paix et de prospĂ©ritĂ© partagĂ©e .
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(Source : www.infotunisie.com, le 17 Mars 2005 )
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Chaire Ben Ali pour le dialogue des civilisations et des religions :
la modernitĂ© est une conquĂȘte de l’homme
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Le dialogue entre les religions est-il encore possible ? C’est le thĂšme de la confĂ©rence donnĂ©e par le Pr M’hamed Hassine Fantar, titulaire de la chaire Ben Ali pour le dialogue des civilisations et des religions, au siĂšge de l’union des Français Ă l’Ă©tranger.
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Dans un monde en constante agitation due aux extrĂ©mismes religieux, il s’agit d’identifier ces problĂšmes sans complexe pour le dĂ©passer. «Il s’agit aussi de lire l’histoire telle qu’elle s’est dĂ©roulĂ©e et exploiter cette lecture pour un futur meilleur, dit Pr Fantar. Il faut aussi reconnaĂźtre que chaque religion a sa propre «grammaire» mais elles Ă©tablissent toutes un pont avec le sacrĂ©. Ainsi, dans l’anthropologie religieuse, il y a une unitĂ© qu’il faut mettre en valeur pour Ă©viter les mauvaises interprĂ©tations et Ă©difier les bases d’un vĂ©ritable dialogue».
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Le confĂ©rencier ajoutera que les conflits ont pris naissance parce que les adeptes de chaque religion prĂ©tendent dĂ©tenir la vĂ©ritĂ© absolue. «Il est temps de dire non Ă ce prosĂ©lytisme et de mettre nos enfants sur la voie de l’ouverture et de la tolĂ©rance. Il faut aussi que les adultes soient convaincus de la nĂ©cessitĂ© de cette ouverture et qu’ils reconnaissent que toutes les religions descendent d’Abraham».
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C’est la source commune de ces trois religions (Abraham) qui doit ĂȘtre mise en valeur pour engager le dialogue selon le Pr Fantar qui parle aussi de fait religieux conjoncturel. «Il s’agit Ă©galement d’Ă©viter le raisonnement basĂ© sur la diffĂ©rence des races et confondre les religions avec les ethnies. Il y a seulement des hommes et des cultures, ajoute le Pr Fantar, ces principes sont fondamentaux pour le dialogue des religions», un dialogue qui, selon lui, doit tenir compte de certains principes dont:
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– La nĂ©gation du prosĂ©lytisme, de l’anathĂšme et de l’exclusion,
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– Mais aussi : aucune religion n’est supĂ©rieure Ă une autre,
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– Chacun a le droit d’adorer qui il veut,
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– Nul ne peut prĂ©tendre dĂ©tenir la vĂ©ritĂ© absolue,
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– Le profane ne saurait contenir le sacrĂ©,
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– Il appartient Ă chacun de choisir son mode de se rapprocher du sacrĂ©.
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Les sociĂ©tĂ©s musulmanes sont-elles condamnĂ©es Ă l’immobilisme ? Sont-elles capables de construire une vĂ©ritable dĂ©mocratie ?. «Oui, rĂ©pondra le Pr Fantar, si Je rĂ©vise l’histoire, je constate que l’Islam a optĂ© pour le progrĂšs, le dĂ©veloppement Ă©conomique, social et culturel. L’Islam n’est pas non plus xĂ©nophobe, il a reconnu l’autre et l’a intĂ©grĂ©. L’autonomie entre Islam et dĂ©mocratie n’est donc pas structurelle. Il y a dans l’Islam les graines d’une vĂ©ritable dĂ©mocratie».
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«Il n’est pas question de faire des traditions une vĂ©ritable prison. Il s’agit de se tourner vers le futur et la sociĂ©tĂ© du savoir. Notre pays a choisi cette option mais avec une nuance : le savoir a aussi une dimension humaine basĂ©e sur la solidaritĂ©, le respect de l’autre et la tolĂ©rance. La modernisation peut s’acheter mais la modernitĂ© est une conquĂȘte de l’homme.
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Pour qu’un vĂ©ritable dialogue puisse se dĂ©velopper, on doit se dĂ©faire de tous les prĂ©jugĂ©s et se faire un vĂ©ritable diagnostic. Il s’agit de rĂ©ussir ensemble ou de sombrer ensemble. On doit aller au-delĂ de l’utopie».
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(Source : La Presse du 18 Mars 2005 )
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Petit commentaire personnel:
Le pouvoir tunisien ne reconnaĂźt pas la vertu du “dialogue” en politique. En tĂ©moigne l’agression du bĂątonnier des avocats au palais de la justice par un juge d’instruction! et l’emprisonnement d’un avocat (MaĂźtre Abou) suite Ă la parution d’un article “critique” sur Internet (si cela est le sort d’un bĂątonnier ou d’un avocat, que dire du pauvre Tunisien ordinaire?).
Alors donc que le pouvoir ne veut pas d’un dialogue avec son peuple, il y a en Tunisie des “gens” qui appellent Ă un “dialogue des civilisations”. Bref, un article Ă ne pas Ăąter…
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Sami Ben Abdallah
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Nouveau programme de lâinitiative amĂ©ricaine MEPI
LâAlgĂ©rie parmi les 5 pays bĂ©nĂ©ficiaires
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Le dĂ©partement dâĂtat a retenu lâAlgĂ©rie parmi cinq pays bĂ©nĂ©ficiaires dâun autre programme de lâInitiative de partenariat du Moyen-Orient (MEPI, Middle East Partnership Initiative), a annoncĂ© avant-hier le porte-parole du dĂ©partement dâĂtat, M. Richard Boucher.
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Ce nouveau programme porte sur lâoctroi de contributions financiĂšres dâun montant global de 2,5 millions de dollars qui seront affectĂ©s, notamment, au financement de programmes qui âpermettront de renforcer les capacitĂ©s et les qualifications professionnelles des citoyens (des pays concernĂ©s) contribuant dans lâinstauration dâune base solide pour les rĂ©formesâ, selon le dĂ©partement dâĂtat.Â
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Une grande partie de ces nouvelles mesures porte sur des programmes de formation des femmes des cinq pays.
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Ainsi, lâAlgĂ©rie et la Tunisie bĂ©nĂ©ficieront dâun programme similaire oĂč il sâagira de âdĂ©velopper les capacitĂ©s des femmes algĂ©riennes et tunisiennes en matiĂšre de gestion des affaires afin de renforcer leurs opportunitĂ©s Ă©conomiques et leur capacitĂ© Ă jouer un rĂŽle plus important dans leur pays respectifâ, prĂ©cise le dĂ©partement dâĂtat.
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(Source : le journal algérien «Liberté » du 19 mars 2005)
lien web : http://www.liberte-algerie.com/edit.php?id=36281
OUI AU PARDON ET A LA RECONCILIATION NATIONALE.NON A LA VIOLENCE
AVIS AU PUBLIC
Objet : demande de l’autorisation lĂ©gale pour la constitution de notre parti politique « LE PARTI ISLAMI TUNISIEN »
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‘Entretien avec Ahmed Ben Salah (4Ăšme partie) :
 âJe nâai pas fait dâerreurs contre mon peupleâ
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Noura Borsali
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Nous continuons, dans cette quatriĂšme partie, notre long entretien avec lâhomme fort des annĂ©es 60 (voir pour les parties prĂ©cĂ©dentes, â RĂ©alitĂ©s â n° 956 du 22 au 28/04/2004 ; n° 966 du 1er au 07/07/2004 et n° 987 du 25/11 au 1er/12/2004). Dans ce qui suit, nous avons Ă©voquĂ© essentiellement la rĂ©forme agraire trĂšs controversĂ©e, les rĂ©alisations ainsi que les rĂ©sistances Ă cette politique de dĂ©veloppement planifiĂ©e jusquâau coup dâarrĂȘt ou â la pause â de septembre 1969.
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Comme nous avons interrogĂ© Ahmed Ben Salah sur ce que des analystes avaient considĂ©rĂ©, dans leurs Ă©crits, comme des â erreurs â et des â faiblesses â dans la gestion de cette nouvelle politique qui a prĂ©valu durant la dĂ©cennie 60. â Le ministre de tout â, comme disait Edgar Faure, a-t-il appliquĂ© â de maniĂšre bureaucratique et brutale la politique coopĂ©rativiste â ?
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Sâest-il attaquĂ©, comme on lâa Ă©crit, dâabord aux petits et moyens paysans sans avoir osĂ© affronter les gros propriĂ©taires ? Y a-t-il eu, comme on lâa encore notĂ©, â une dĂ©rive de la coopĂ©rativisation vers la collectivisation â ? Ne peut-on parler que dââ Ă©chec â de la politique menĂ©e alors ?
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Nây a-t-il pas eu des rĂ©alisations dont a pu bĂ©nĂ©ficier notre pays Ă la sortie des annĂ©es 60 ainsi que les successeurs de Ben Salah, pour la plupart dâanciens collaborateurs, qui sont venus â rectifier le tirâ?
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Nous nâavons pas omis dâĂ©voquer Ă©galement, avec lâancien ministre, la question du dĂ©ficit dĂ©mocratique et de la rĂ©pression du mouvement dâextrĂȘme gauche dit â Perspectives â et du mouvement estudiantin, en Ă©bullition surtout durant les derniĂšres annĂ©es de la dĂ©cennie. Pourquoi Ben Salah nâa-t-il pas rĂ©ussi Ă rallier Ă lui les intellectuels progressistes ?
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Cela Ă©tait-il dĂ» Ă â son tempĂ©rament autoritaire â selon certains ? Est-il vrai que celui qui Ă©tait vu comme le â benjamin de Bourguiba â (au sens de second) nâa pas rĂ©ussi â Ă faire du Plan lâexpression dâune dĂ©mocratie qui nâexiste pas â (â Esprit â, novembre 1970) ?
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Quâen Ă©tait-il de la responsabilitĂ© non pas du ministre mais de tout le pouvoir de lâĂ©poque ? â La pause â de 1969 aura Ă©tĂ© une vĂ©ritable rupture qui, pour des raisons politiques et non Ă©conomiques et sociales, selon Ahmed Ben Salah, fera dire Ă notre ministre : â Ils iront loin contre moi â.
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Câest en fait dans le domaine de lâagriculture que vous avez apportĂ© les plus grands changements, en particulier par la dĂ©cision prise en 1962 de crĂ©er des coopĂ©ratives de production, regroupant autour des terres de colons celles dâun certain nombre de paysans choisis comme coopĂ©rateurs. En 1961, lâactivitĂ© agricole occupait 44% de la population active. Et, selon des Ă©tudes, lâagriculture tunisienne, compte tenu de lâariditĂ© de son climat et de lâĂ©rosion de ses sols, Ă©tait non seulement le secteur pauvre dâun pays pauvre mais aussi la plus dĂ©favorisĂ©e du Maghreb. Il y avait aussi un problĂšme liĂ© Ă lâorganisation des terres agricoles (morcellement des terres, exploitations sans droits ni titres, rĂ©gime des â Habous â initiĂ© par lâadministration beylicale).
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Dâautant que sĂ©vissait depuis deux ans la sĂ©cheresse, rĂ©duisant aux â chantiers de chĂŽmage â des propriĂ©taires de plusieurs centaines dâoliviers. Ajoutons Ă cela les consĂ©quences des Ă©vĂšnements de Bizerte. Pensez-vous, aujourdâhui et avec du recul, que le rĂ©gime des coopĂ©ratives Ă©tait la solution Ă apporter Ă tout ce marasme ? Les problĂšmes agraires et agricoles existaient bien avant, pendant la pĂ©riode coloniale. Je ne comprends pas pourquoi il existe une espĂšce dâintox. autour du mot â coopĂ©rative â. Il ne sâagit pas de dire que nous avons forcĂ© la main.
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Tout dâabord, nous ne sommes pas venus du nĂ©ant. Quây a-t-il de nouveau dans les coopĂ©ratives alors que notre gĂ©nĂ©ration connaissait la premiĂšre tentative de solidaritĂ© dĂ©fensive contre des compagnies dâexploitation des mines, organisĂ©e par Mâhamed Ali El Hami qui a mis en place des coopĂ©ratives pour contrer cette exploitation ? Nous avons parfois continuĂ© les rĂȘves des agriculteurs eux-mĂȘmes. Il existait des noyaux dâunions syndicales dâagriculteurs. Dans les annĂ©es 1930, Mohamed El Mehdi Ben Naceur, qui Ă©tait originaire de Gafsa, avocat et lâun des pionniers de lâorganisation des agriculteurs, avait proposĂ© la crĂ©ation dâune coopĂ©rative rĂ©gionale pour la mise en valeur des terres âŠDu cĂŽtĂ© libĂ©ral, commerçant et capitaliste, Mhamed Chenik a organisĂ© une coopĂ©rative. Il existe donc, chez nous, une tradition coopĂ©rativiste avec cette idĂ©e fondamentale de se protĂ©ger ensemble sur le plan privĂ© comme sur le plan Ă©tatique. Que sont les â Habous â sinon des propriĂ©tĂ©s Ă©tatisĂ©es dont dispose lâEtat ? Dâautre part, il y avait la propriĂ©tĂ© agricole traditionnelle qui Ă©tait une propriĂ©tĂ© tribale. Il y avait Ă©galement les terres collectives (appelĂ©es en arabe les â terres socialistes â) qui sâĂ©tendaient sur des millions dâhectares sans ĂȘtre exploitĂ©es et qui constituaient un grand problĂšme en Tunisie. Des procĂšs pour lâappropriation Ă©taient incessants. La colonisation en a profitĂ© pour inventer des lois afin de sâapproprier des terres. Pour y remĂ©dier, des politiques de mise en valeur ont Ă©tĂ© mises en place mais il nây avait pas eu de politique globale pour lâagriculture. Avec des experts tunisiens et non tunisiens, nous avons conçu et rĂ©digĂ© les â Perspectives dĂ©cennales â ainsi que le Plan triennal qui Ă©tait intĂ©rimaire. Auparavant, comme on le sait, la commission de lâU.G.T.T., qui a donc prĂ©parĂ© le rapport Ă©conomique et social, a relevĂ© les grands dĂ©sĂ©quilibres rĂ©gionaux de notre pays et Ă©tudiĂ© lâexploitation coloniale des terres, dâoccupation permanente. Ces colons faisaient une agriculture pour eux-mĂȘmes dâabord et des actions agricoles destinĂ©es au marchĂ© français. Ils ont refoulĂ© la population autochtone vers les hauteurs et pris les terres. Toute la rĂ©gion est devenue cĂ©rĂ©aliĂšre. On pouvait parcourir tout le Nord sans trouver de lĂ©gumes, de fruits etcâŠsi bien que la rĂ©gion Ă©tait ravitaillĂ©e Ă partir de Nabeul, Bizerte et Tunis. Alors quâaprĂšs lâIndĂ©pendance, nous avons commencĂ© Ă diversifier lâagriculture. Dans le Nord-Ouest, par exemple, oĂč il nây avait ni fruits, ni lĂ©gumes, nous avons vu se diversifier lâagriculture et naĂźtre des industries agro-alimentaires. Comme nous avons palliĂ© les insuffisances, Ă un moment donnĂ©, dans le pays, au plan de lâhuile dâolive, grĂące aux 6 millions dâoliviers plantĂ©s – du Nord au Centre- aprĂšs lâIndĂ©pendance. Il fallait donc agir contre les dĂ©sĂ©quilibres rĂ©gionaux et les insuffisances de notre agriculture, trouver les moyens de la diversifier et de quelle façon rĂ©soudre le problĂšme des terres reprises Ă la colonisation. Il ne faut pas oublier que le Plan tunisien Ă©tait basĂ© sur cinq piliers : dĂ©colonisation, promotion de lâhomme, dĂ©veloppement rĂ©gional, rĂ©forme des structures y compris les structures mentales et planification. Des agronomes tunisiens ont commencĂ© par essayer dâinventer des formes de coopĂ©ratives adaptĂ©es aux rĂ©gions et aux cultures. Au dĂ©part, le mot coopĂ©rative nâa pas Ă©tĂ© employĂ©. Il sâagissait tout au dĂ©but dââ unitĂ©s dâexploitation â pour signifier que la formule nâĂ©tait pas porteuse dâune certaine idĂ©ologie mais quâelle sâinscrivait plutĂŽt dans lâĂ©conomique et le social. Il y avait diffĂ©rentes variĂ©tĂ©s de coopĂ©ratives dans le texte officiel du Plan : des prĂ©-coopĂ©ratives, des coopĂ©ratives de polycultures, des coopĂ©ratives cĂ©rĂ©aliĂšres, des coopĂ©ratives de service etcâŠLes choix Ă©taient adaptĂ©s non seulement Ă la situation existante mais Ă©galement Ă ce que nous voulions faire de lâagriculture : une agriculture diversifiĂ©e. Il fallait surtout lutter contre les handicaps dont le principal Ă©tait le morcellement des terres et le dĂ©sĂ©quilibre rĂ©gional créés aussi par la colonisation. Donc morcellement, dĂ©sĂ©quilibres, inexistence de cultures vivriĂšres dans une trĂšs large zone du pays Ă©taient les problĂšmes auxquels nous nous sommes attaquĂ©s, sans compter la question de lâexode rural. AprĂšs le discours de Pierre MendĂšs-France du 31 juillet 1955, les colons ont commencĂ© Ă renvoyer les travailleurs de chez eux. Ce qui a engagĂ© le fameux exode rural. Par ailleurs, comme nous avons dĂ©jĂ eu lâoccasion de le dire, la Tunisie a rĂ©ussi Ă ouvrir une brĂšche dans la politique de la Banque Mondiale en amenant un financement de 18 millions de dollars pour 300 unitĂ©s de coopĂ©ratives tunisiennes. On prĂ©tend que câest du collectivisme. Câest faux. Au contraire, nous avons corrigĂ© la situation des terres collectives non exploitĂ©es. Je nâavais pas encore la responsabilitĂ© de lâagriculture. Mais je peux dire que jusquâen 1962, nous sommes allĂ©s progressivement sans vouloir faire de lois pour crĂ©er les 15 premiĂšres coopĂ©ratives de production. LâidĂ©e de crĂ©er des coopĂ©ratives de production Ă©tait fondĂ©e sur divers principes. Il sâagissait dâĂ©viter que les terres reprises aux colons ne soient rĂ©parties entre des agriculteurs individuels parce quâil fallait rĂ©soudre les problĂšmes des superficies utiles. Dans le Nord, des ingĂ©nieurs Ă©taient persuadĂ©s quâon ne pouvait pas faire des cultures intensives et avec des moyens modernes sur des superficies de moins de 500 hectares, les objectifs Ă©tant dâĂ©viter un nouveau morcellement des terres, la diversification et la crĂ©ation de cultures vivriĂšres dans le Nord ainsi que la modernisation de lâagriculture. Il fallait une nouvelle organisation de lâagriculture et donc trouver des solutions diverses, Ă©tant donnĂ© que les rĂ©gions prĂ©sentaient, sur le plan agricole, des caractĂ©ristiques trĂšs diffĂ©rentes. Nous avons maintenu dans toutes les activitĂ©s la doctrine des trois secteurs : Ă©tatique, privĂ© et coopĂ©ratif. Sur le plan agricole, nous avons choisi de ne perdre personne. Les petits paysans Ă©taient intĂ©grĂ©s, avec leurs titres fonciers, dans les coopĂ©ratives pour recevoir par la suite non seulement la part de leurs bĂ©nĂ©fices Ă©ventuels mais Ă©galement celle de la terre coloniale devenue le noyau de la coopĂ©rative. Pour organiser tout cela, nous avons utilisĂ© le militantisme des socialistes destouriens sous lâautoritĂ© des instances du parti, avec les gouverneurs, les autoritĂ©sâŠAprĂšs avoir mis en place les 15 premiĂšres coopĂ©ratives, nous avons Ă©laborĂ© la loi de 1963 en tenant compte de notre objectif dâaller progressivement. Nous avons inscrit dans cette loi que la bonne gestion des coopĂ©ratives devait aboutir Ă ce que le noyau de lâEtat soit rĂ©parti entre les agriculteurs de sorte que ceux qui ont moins dans leur titre foncier aient plus et que ceux qui ont plus aient un peu moins. Le rĂ©sultat devait aboutir Ă une coopĂ©rative non pas Ă©galitaire avec des propriĂ©tĂ©s Ă©gales mais trĂšs proches. La gestion devait ĂȘtre solidaire et lâambiance plus fraternelle et plus humaine. Nous avons commencĂ© Ă prendre les terres coloniales et tout le problĂšme venait de lĂ . Il y avait des organes dans la PrĂ©sidence ou au Parti qui donnaient ou louaient des terres Ă des individualitĂ©s. GĂ©nĂ©ralement, les Ă©quipements sâĂ©taient Ă©vaporĂ©s dans lâair et ces gens nâont jamais rien payĂ©. Mais nous avons tentĂ© de contrĂŽler tout cela en crĂ©ant un Office des Terres Domaniales. Ce qui nâa pas rĂ©solu le problĂšme. Jâai eu la responsabilitĂ© de lâAgriculture Ă ce moment, fin 1964, aprĂšs le CongrĂšs du parti de Bizerte. GrĂące Ă lâaide de la Banque Mondiale, nous avons renforcĂ© les 15 coopĂ©ratives en les Ă©tendant Ă 300 unitĂ©s en 7 annĂ©es. Dans le cadre de sa rĂ©forme agraire durant la dĂ©cennie 60, la Tunisie a pu bĂ©nĂ©ficier dâun soutien financier important, tel que celui de la Banque Mondiale, qui avait atteint 18 millions de dollars. Quelles Ă©taient les autres sources de financement ? De toute Ă©vidence, le financement ne se limitait pas Ă lâapport de la Banque Mondiale, qui nâĂ©tait quâune contribution. Dans la somme globale du financement du Plan, il y avait la part nationale qui dĂ©passait les 50%. Quatorze pays Ă©taient intĂ©ressĂ©s dâune maniĂšre continue au dĂ©veloppement de la Tunisie, depuis le Plan triennal jusquâau 3Ăšme Plan 1969-1972, soit par des prĂȘts, soit par des dons ou en proposant des coopĂ©rations techniques. La coopĂ©ration internationale nous a soutenus durant la dĂ©cennie 60 sans remettre en cause lâĂ©quilibre financier de la Tunisie, sans provoquer dâendettement insupportable parce quâil y avait dans le cadre de la politique de dĂ©veloppement lâaccroissement du financement national et aussi de lâĂ©pargne nationale. Je signale cela uniquement pour rĂ©pondre Ă des commentateurs qui prĂ©tendent que câest du collectivisme. Pourquoi lâaffirmer alors quâil y a eu intervention de la Banque Mondiale ? Nâavez-vous pas pris des risques en rattachant lâAgriculture et le Plan et en prenant donc la responsabilitĂ© du dĂ©veloppement agricole ? Je nâai jamais rattachĂ© quoi que ce soit. Je nâai arrachĂ© aucun dĂ©partement. Jâai dĂ©jĂ expliquĂ© que jâai refusĂ©, Ă trois reprises, dâĂȘtre ministre sans mettre en avant les idĂ©es qui pouvaient me motiver dans lâexercice de ces responsabilitĂ©s. Câest aprĂšs que le VIIĂšme CongrĂšs du Parti de Bizerte a approuvĂ© dâune maniĂšre Ă©clatante les rĂ©sultats de cette politique (câĂ©tait la fin du Plan triennal et le dĂ©but du quadriennal) et que jâai Ă©tĂ© Ă©lu pour la premiĂšre fois au Bureau Politique devenant ainsi un des secrĂ©taires gĂ©nĂ©raux du Parti, que Bourguiba mâa proposĂ© lâAgriculture. Jâai dâabord refusĂ© et ce nâest que sous lâinsistance du PrĂ©sident et des camarades prĂ©sents Ă la sĂ©ance de travail prĂ©sidĂ©e par Bourguiba avec les principaux dirigeants du parti que jâai acceptĂ© parce que cela exigeait de la cohĂ©sion. Mais je nâai pas fait de fusion organique entre lâAgriculture et le Plan. CâĂ©taient des dĂ©partements autonomes tout en dĂ©pendant de mon ministĂšre. Vous avez dit plus haut que le mouvement coopĂ©ratif ne sâinspirait dâaucune idĂ©ologie. Mais, durant la dĂ©cennie 60, des pays africains ont connu le socialisme, lâexpĂ©rience de la rĂ©forme agraire comme lâAlgĂ©rie ou le SĂ©nĂ©gal avec Mamadou Dia. CâĂ©tait lâĂ©poque de la dĂ©colonisation, du tiers-mondisme et plus tard du non-alignement et donc de la recherche dâune troisiĂšme voie pour les pays en dĂ©veloppement. Nous avons commencĂ© bien avant ces pays. Il nây avait pas un seul exemple dâun mouvement syndical dans le Monde arabo-africain qui ait produit un programme Ă©conomique et social. La mise en Ćuvre du Plan a commencĂ© en pleine guerre dâAlgĂ©rie. Avec le peu de moyens dont nous disposions, nous voulions construire le Maghreb. Il y a eu auparavant les premiĂšres actions agricoles avec Mustapha Filali en Tunisie dans le premier gouvernement et Abdallah Brahim au Maroc qui a entamĂ© une nouvelle politique agraire et menĂ© une politique de progrĂšs et de dĂ©colonisation mais qui a Ă©tĂ© Ă©vincĂ© par la suite. En AlgĂ©rie, Ben Bella a nationalisĂ© deux millions dâhectares. En 1964, Bourguiba a dĂ©cidĂ© dâen finir avec les terres coloniales. Le retour de ces terres au patrimoine national Ă©tait prĂ©vu dans le Plan triennal mais sans agenda prĂ©cis. Toutefois, il faut souligner que notre pays ne disposait pas de moyens pour reprendre en main et dĂ©velopper ces terres colonisĂ©es auparavant. Bourguiba nâa pas demandĂ© mon avis sur le timing. Jâai appris la nouvelle par la radio. Au SĂ©nĂ©gal, mĂȘme si les Ă©vĂšnements sont diffĂ©rents, lâexpĂ©rience menĂ©e par Mamadou Dia sâest terminĂ©e par le renversement de son gouvernement par Senghor et un procĂšs en mai 1963 qui lâa condamnĂ© ainsi que dâautres ministres Ă des peines sĂ©vĂšres. Mamadou Dia fut condamnĂ© au maximum : la dĂ©portation perpĂ©tuelle dans une enceinte fortifiĂ©e⊠Mamadou Dia Ă©tait un camarade, un ami. Il est venu en Tunisie avant Senghor. Je lâai connu. Nous Ă©tions une gĂ©nĂ©ration qui voulait aller au fond des choses. Malheureusement, il a Ă©tĂ© combattu par Senghor qui lâa emmenĂ© au supplice. Pour moi, ce qui est arrivĂ© au SĂ©nĂ©gal, au Maroc, en AlgĂ©rie et qui nâa jamais Ă©tĂ© analysĂ©, câest le rejet de la dĂ©colonisation en dĂ©pit des discours et des Ă©crits journalistiques. Des rĂ©seaux Ă©trangers et nationaux ont Ă©tĂ© Ă©tablis pour briser cet Ă©lan de dĂ©veloppement autonome. Ces derniers perdurent aujourdâhui sous dâautres formes (rachat de banques etcâŠ) Avant la rĂ©forme agraire, les petits paysans reprĂ©sentaient, en 1960, 75% des exploitants agricoles et leurs lopins de terres Ă©taient le plus souvent constituĂ©s de parcelles de moins de 3 hectares alors quâune minoritĂ© disposait de grandes Ă©tendues de terrains dĂ©passant souvent les 20 hectares. Comment expliquez-vous que la rĂ©forme ait concernĂ© dâabord les petits paysans ? Parce que, justement, câest sur les petites superficies quâon ne pouvait pas faire grandâchose. Dans le Nord, le petit paysan, qui a un demi-hectare, louait aux colons, pour quatre sous, son lopin de terre et ses bras. Pour avoir une agriculture autonome, nous avons voulu lui donner un autre statut de citoyen. Les frontiĂšres entre ceux qui avaient deux ou trois hectares, ceux qui en avaient 30 ou 40 et ceux de lâEtat allaient disparaĂźtre pour que chacun ait son titre foncier et soit actionnaire dâune entreprise agricole. Nous avons appelĂ© ce regroupement â coopĂ©rative â parce que chacun devait voter comme une personne entiĂšre. La coopĂ©rative serait une nouvelle aire, une nouvelle sociĂ©tĂ© oĂč il nây aurait plus celui qui Ă©crase et celui qui est Ă©crasĂ©. Celui qui ne disposait que dâun demi- hectare allait ĂȘtre lui aussi membre Ă part entiĂšre du Conseil de coopĂ©rative et allait avoir sa part dans la rĂ©partition de la surface du noyau domanial rĂ©cupĂ©rĂ© par lâEtat tunisien. Pourquoi devait-il exister un apartheid entre les divers possĂ©dants ? Nâest-ce pas lĂ un effort dans le sens de la promotion de lâhomme et de la rĂ©forme des structures ? Le blocage venait de ceux qui avaient les terres coloniales parce que soi-disant ils Ă©taient anciens combattants. La gĂ©nĂ©ralisation du systĂšme coopĂ©ratif ayant Ă©tĂ© annoncĂ© par Bourguiba, ils avaient alors commencĂ© Ă Ćuvrer dans lâombre. Ceci nâa rien Ă voir avec la politique Ă©conomique. Notre rĂȘve Ă©tait que ces 750.000 hectares que nous allions rĂ©cupĂ©rer soient un ferment fantastique pour le rééquilibrage de la sociĂ©tĂ© tunisienne. Malheureusement, ce rĂȘve a Ă©tĂ© brisĂ© avec acharnement et violence. Les â Chantiers de chĂŽmage â, devenus â Chantiers de lutte contre le sous-dĂ©veloppement â, ont employĂ© depuis 1960 environ 200.000 paysans. En 1962-63, une grande masse de ces paysans (150.000) ont Ă©tĂ© rĂ©cupĂ©rĂ©s dans le cadre des actions planifiĂ©es de dĂ©veloppement agricole. Pensez-vous que cette solution ait vraiment aidĂ© Ă rĂ©sorber le chĂŽmage ? JâĂ©tais, au moment de la crĂ©ation des â Chantiers de chĂŽmage â, Ă la SantĂ© publique et, aprĂšs, aux Affaires sociales. Durant les annĂ©es 1957-58-59, les services juridiques de la PrĂ©sidence ont produit un texte prĂ©voyant la mise en place de camps de travail pour tenter de rĂ©duire lâexode rural. Jâai reçu le texte qui Ă©tait, Ă mon sens, un texte dâexclusion car il sâagissait de ramasser des gens et de les obliger Ă accomplir des activitĂ©s. A lâĂ©poque, la Tunisie indĂ©pendante Ă©tait membre de lâOrganisation Interna- tionale du Travail (O.I.T.) Jâai rĂ©pondu que ce texte Ă©tait contraire aux principes de cette organisation. Et jâai rĂ©pliquĂ© par une autre note prĂ©conisant la crĂ©ation de â Chantiers de lutte contre le sous-dĂ©veloppement â. Une fois ces chantiers créés, on a fait venir Gabriel Ardant alors que câĂ©tait nous qui avions fait cela. Ces chantiers ont fini par dĂ©pĂ©rir. Quand on a créé les nouvelles unitĂ©s, nous avons donnĂ© Ă ces derniĂšres aussi bien le crĂ©dit que la main-dâĆuvre de ces chantiers. Quelles Ă©taient les activitĂ©s de ces chantiers ? Ce nâĂ©tait pas une activitĂ© Ă©conomique permanente, elle Ă©tait plutĂŽt transitoire, douloureuse pour certains mais elles sauvaient la mise pour un certain nombre de familles. Les activitĂ©s Ă©taient proposĂ©es par les municipalitĂ©s et les conseils rĂ©gionaux dans les limites dâun budget spĂ©cial. Ăa nâa pas durĂ© longtemps. DĂšs les premiĂšres coopĂ©ratives, des besoins en main-dâĆuvre se sont fait sentir. Les paysans ont Ă©tĂ© alors transfĂ©rĂ©s vers les coopĂ©ratives auxquelles nous avons allouĂ© Ă©galement un budget. CâĂ©tait une contribution pour rĂ©soudre lâexode rural. A la Haute Cour, on a considĂ©rĂ© cela comme une hĂ©rĂ©sie. Ce nâĂ©tait pas du tout un abus budgĂ©taire mais un transfert. Tahar Haouet, ingĂ©nieur et, plus tard expert Ă la FAO, a prĂ©vu Ă lâĂ©poque dans ses Ă©tudes au ministĂšre de lâAgriculture quâen 1980, le pays serait dĂ©ficitaire en main-dâĆuvre agricole en raison de la diversification agricole, du dĂ©veloppement par les unitĂ©s coopĂ©ratives et du rééquilibrage rĂ©gional. Il mâa Ă©tĂ© donnĂ© lâoccasion, quelques annĂ©es aprĂšs, de rencontrer Ă Alger des agronomes tunisiens qui Ă©taient Ă la FAO et qui venaient soutenir la rĂ©forme agraire algĂ©rienne. Lâun dâeux a fait la rĂ©volution verte Ă Sidi Bouzid. Bref, le transfert des travailleurs et du budget du chantier Ă©tait une des solutions pour rĂ©sorber lâexode rural. Il y a eu des rĂ©sistances. Certains ont refusĂ© de retourner Ă leurs rĂ©gions respectives. Ils mâont huĂ© Ă Kasserine. Je leur ai dit : â Je suis Ă Kasserine avec vous â. Mon opinion Ă©tait que ce ne sont pas les gens de Kasserine qui allaient amĂ©liorer le sort de La Marsa, mais le contraire. Comment Ă©taient payĂ©s les travailleurs? Le dĂ©marrage des chantiers a Ă©tĂ© possible grĂące aux dons ou prĂȘts en nature et en espĂšces que nous ont allouĂ©s divers pays amis. Une partie des rĂ©munĂ©rations Ă©tait en nature et lâautre partie en espĂšces. Ne pensez-vous pas aujourdâhui, avec du recul, que comme on lâa Ă©crit, â lâextension des unitĂ©s de production coopĂ©rative Ă partir de 1966-67 aux cultures fruitiĂšres et maraĂźchĂšres du Sahel et du Cap Bon constitua lâerreur la plus grave. Dans ces rĂ©gions, la mise en coopĂ©rative heurta en effet de front une longue tradition de petite propriĂ©tĂ© et de culture intensive, sans procurer aux paysans un quelconque avantage matĂ©riel ou moral â ? Câest Ă partir de 1968, aprĂšs la rĂ©union du ComitĂ© Central du Parti, et Ă la suite des diverses proclamations du PrĂ©sident prĂŽnant la gĂ©nĂ©ralisation des coopĂ©ratives, quâon a créé des coopĂ©ratives de service et quâil y a eu un dĂ©bordement rĂ©el. Je prĂ©cise que jâĂ©tais en dehors de cela et en dehors de toute initiative de crĂ©ation de coopĂ©ratives sans Ă©tude prĂ©alable. Ce qui nâa pas empĂȘchĂ© certains responsables de crĂ©er dans leurs rĂ©gions des unitĂ©s coopĂ©ratives. Personnellement, je nâen ai inaugurĂ© aucune. Jâai mĂȘme refusĂ© de le faire. Dans ces coopĂ©ratives de service, chacun Ă©tait chez soi. On fonctionnait pour les actions communes depuis le travail de la terre jusquâĂ la commercialisation. CâĂ©tait une coopĂ©rative en dehors presque des terres. A Gafsa, les gens ont pu gagner 300 hectares rien quâen supprimant les frontiĂšres entre les terres cultivĂ©es. Câest un exemple connu. Mais, dans le Sahel, le problĂšme sâest posĂ© en 1968 quand il y a eu ce dĂ©but de coopĂ©rative de service et quâon a commencĂ© Ă soulever le problĂšme de la stĂ©rilitĂ© de lâolivier sahĂ©lien par rapport Ă celui de Sfax. Lâaction technique de rĂ©novation de la forĂȘt a prĂ©cĂ©dĂ© le mouvement de coopĂ©rativisation parce que le truquage de la rĂ©forme agraire a commencĂ© avec lâerreur de la gĂ©nĂ©ralisation. Jâai mis sept ans pour crĂ©er 300 unitĂ©s. Tout le reste Ă©tait le travail des rĂ©gionaux, du Parti, des gouverneurs, dâunions rĂ©gionales de lâagricultureâŠqui organisaient les coopĂ©ratives de services. Nous avons ouvert la porte des prĂ©-coopĂ©ratives pour tĂąter le terrain. Il y avait une diversitĂ© de coopĂ©ratives comme on lâa dĂ©jĂ dit. On a grossi les choses. On a arrĂȘtĂ© quelques fomentateurs. Bourguiba a reprochĂ© au gouverneur de nâavoir pas fait appel Ă lâarmĂ©e dans le cas de MâSaken. Les machinations avaient dĂ©jĂ commencĂ© aprĂšs la maladie du PrĂ©sident. Nous avons prĂ©parĂ© le 3Ăšme Plan (1969-1972). Dans une rĂ©union du ComitĂ© Central du Parti, aprĂšs mon intervention oĂč, comme câĂ©tait Ă©crit dans la prĂ©face du Plan 1969-1972, je prĂ©conisais la progressivitĂ© dans lâintroduction du systĂšme de gestion coopĂ©ratif, câest-Ă -dire dans la crĂ©ation de coopĂ©ratives de production, Bourguiba, qui prĂ©sidait la rĂ©union, a dit : â Jâai un commentaire Ă faire Ă propos de ce que vient de dire Si Ahmed. Moi, je ne suis pas dâaccord. Je veux que la rĂ©forme soit terminĂ©e cette annĂ©e. â Cela signifiait pour moi quâil faudrait crĂ©er 3.000 unitĂ©s en sept mois. CâĂ©tait dĂ©jĂ un dossier compliquĂ© pour chaque unitĂ©. Et câĂ©tait encore plus difficile dans les rĂ©gions du Nord quand on pense aux cultures irriguĂ©es de Nabeul, de Bizerte par exemple. Mais je nâavais pas Ă remettre en cause la dĂ©cision du PrĂ©sident. Je nâĂ©tais pas contre la coopĂ©rativisation. Mais il Ă©tait nĂ©cessaire de confronter la dĂ©cision prĂ©sidentielle Ă lâeffet des Ă©tudes nĂ©cessaires que nous avons prĂ©conisĂ©es dans le texte de la loi. La dĂ©cision nâĂ©tait pas fondĂ©e sur la faisabilitĂ©. Il fallait dâabord engager des Ă©tudes de terrain. Ne fallait-il pas expliquer cela Ă Bourguiba ? Justement, nous nous sommes tout de suite rĂ©unis pour faire un texte de loi avec des phases A, B etcâŠafin dâĂ©taler lâapplication de la dĂ©cision prĂ©sidentielle jusquâen 1972. Nous avons envoyĂ© la premiĂšre mouture au PrĂ©sident. Alors on a commencĂ© Ă dire, au ComitĂ© de Coordination de Tunis, que Ben Salah voulait profiter de la maladie du PrĂ©sident. Pour calmer le jeu, BĂ©hi Ladgham a dĂ» expliquer la marche Ă suivre pour lâadoption du texte. Personnellement, je nâĂ©tais pas contre lâidĂ©e de la gĂ©nĂ©ralisation des coopĂ©ratives, mais sous des conditions, comme je lâai dit plus haut. Jâappelais tout le monde Ă crĂ©er un jardin chez eux car il nây avait aucune raison pour que lâagriculture ne soit pas une activitĂ© individuelle. Mais neuf ans, quâest-ce que câest dans la vie dâune nation ? Les objectifs attendus sur le plan macro-Ă©conomique des â Perspec-tives dĂ©cennales (1962-1971) â sont de trois ordres : un taux de croissance du produit intĂ©rieur brut de 4,5 ou 5 % par an (selon le rapport rĂ©trospectif de la Banque mondiale), soit environ 82% en dix ans; la liquidation dĂ©finitive du chĂŽmage structurel ; enfin une redistribution drastique du produit global en faveur des groupes sociaux les plus dĂ©favorisĂ©s. Ces objectifs visaient Ă©galement Ă atteindre une autosuffisance alimentaire prĂ©vue pour 1970-72. Pensez-vous que ces objectifs aient Ă©tĂ© atteints ? Et comment expliquez-vous que la production alimentaire et agricole nâait pas suivi ? On nâa pas laissĂ© les choses se faire normalement. Ajoutons Ă cela les annĂ©es de sĂ©cheresse, couronnĂ©es par dâhorribles inondations qui ont avalĂ© quelques centaines de milliers de bĂȘtes. Il sâest créé une sociĂ©tĂ© de personnages connus sur la scĂšne tunisienne pour chauffer lâatmosphĂšre Ă propos de la gĂ©nĂ©ralisation des coopĂ©ratives et pour encourager les gens Ă vendre Ă bas prix leur bĂ©tail que cette sociĂ©tĂ© achetait Ă quatre sous. Câest ce qui a fait dire Ă Bourguiba en 1970 : â Les gens ont eu peur et ont vendu leur bĂ©tail⊠â alors que câĂ©taient des manĆuvres accomplies par des gens proches du pouvoir. Pour les objectifs, est-ce quâon ne les a pas atteints ? Câest aux Ă©conomistes de le dire. DâaprĂšs Mansour Moalla, qui a Ă©tĂ© sanctionnĂ© parce quâil a dit que â le dĂ©marrage Ă©tait saisissantâ âce qui ne veut pas dire que le reste ne lâĂ©tait pasâ , la rĂ©trospective dĂ©cennale de la Banque Mondiale disait que nous avons toujours maintenu le cap de 4,5%, de 5,5% pendant cette pĂ©riode. Ce sont des faits et non des justifications. La planification sâest faite dans un contexte trĂšs difficile avec la guerre dâAlgĂ©rie, les Ă©vĂšnements de Bizerte, la rupture avec la France, les retombĂ©es de la guerre de Suez, les difficultĂ©s des relations avec lâEgypte, sans compter la guerre froide et la suspicion Ă lâĂ©gard de toute politique socialisteâŠLa Tunisie Ă©tait un pays pauvre. Nous avons presque inventĂ© le tourisme et nous avons eu la chance de connaĂźtre MatteĂŻ. GrĂące Ă son groupe, nous avons dĂ©couvert des gisements de pĂ©trole. Nous avons créé des pĂŽles de dĂ©veloppement aussi bien Ă Menzel-Bourguiba, Ă Tunis quâĂ GabĂšs et dans le JĂ©rid, que nous avons transformĂ© totalement grĂące aux puits artĂ©siens et Ă la diversification des cultures, mĂȘme sous les palmiers. CâĂ©tait le dĂ©but. Il ne faut pas oublier que la dĂ©colonisation a commencĂ© Ă ce moment-lĂ . Ce nâĂ©tait pas une action politique tranquille, plusieurs batail- les trĂšs dures Ă©taient Ă mener en mĂȘme temps. Il fallait voir Kasserine Ă cette Ă©poque, Gammouda, Sidi Bouzid et toutes ces rĂ©gions. Y avait-il de lâindustrie ? Un secteur privĂ© ? etcâŠNous avons créé tout cela. Jâallais Ă Sfax rien que pour inaugurer des petites rĂ©alisations industrielles privĂ©es afin dâencourager les gens Ă faire autre chose que de lâhuilerie. Et lâĂ©ducation ? Nous avons créé des centres de formation pour les coopĂ©rateurs. Il y avait lâĂ©cole nationale de coopĂ©ration Ă©quivalente Ă lâIHEC ainsi que des sections rĂ©gionales et des centres de formation de cadres coopĂ©ratifs. CâĂ©tait de la promotion paysanne. Cette Ă©cole de coopĂ©ration, qui a donnĂ© des cadres, a Ă©tĂ© Ă©liminĂ©e aprĂšs alors que je nâai pas supprimĂ© lâIHEC au profit de lâĂ©cole de coopĂ©ration lorsque jâĂ©tais Ă la tĂȘte de lâEducation nationale. Le fonctionnement des coopĂ©ratives a constituĂ© un sĂ©rieux problĂšme du fait du chevauchement de trois autoritĂ©s : autoritĂ© politique, autoritĂ© administrative et autoritĂ© technique. Etat et Parti se chevauchent le plus souvent. Dans ces conditions, qui dĂ©cide ? Et de quoi dĂ©cide-t-on ? â Ce sont les coopĂ©rateurs qui font les frais de cet Ă©chafaudage car sont retenus sur leurs gains le salaire du directeur et les frais des unions locales et rĂ©gionales. Or, aux dires dâun ingĂ©nieur agronome, ces cadres nâont pas grandâchose Ă faire â â ( â Les Temps modernes â, octobre 1966 ) Il y a les gouverneurs, les dĂ©lĂ©guĂ©s, les omdasâŠComme je me dĂ©plaçais beaucoup et que je voyais les choses sur place, je me suis rendu compte que les gouverneurs pensaient avoir la tutelle tout le temps alors quâelle nâĂ©tait que transitoire. Nous Ă©tions en train de crĂ©er lâorganisation des coopĂ©ratives, nous allions supprimer certains offices pour laisser lâinitiative aux coopĂ©rateurs et les prĂ©rogatives administratives au ministĂšre de lâAgriculture. Câest lâEtat qui avait fait la rĂ©forme et câest lâEtat qui devait assurer la rĂ©ussite sĂ©curitaire de la rĂ©forme. Nous pouvons retrouver les manchettes de la presse de lâĂ©poque oĂč je disais en fĂ©vrier 1968 : â Laissez les coopĂ©ratives tranquilles â. Et jâai demandĂ© dans des rĂ©unions publiques que les coopĂ©rateurs prennent leurs dĂ©cisions eux-mĂȘmes. Ăa a commencĂ© Ă se faire. Mais il y avait quelque chose de parallĂšle qui faisait autre chose. Le gouverneur de Gafsa, par exemple, nâa rien fait pour laisser se crĂ©er des coopĂ©ratives. Les ouvriers du JĂ©rid continuaient Ă toucher leur part de khamĂšs en dattes. Comme jâai vu des tĂ©lĂ©grammes envoyĂ©s au PrĂ©sident et dans lesquels on annonçait la crĂ©ation de 50 coopĂ©ratives. CâĂ©tait la pagaille. Il y avait des gouverneurs qui faisaient nâimporte quoi. On a arrĂȘtĂ©, blĂąmĂ©, sanctionnĂ©. Je ne les ai pas mĂ©nagĂ©s. Il nây a jamais eu, contrairement Ă ce que certains laissaient entendre, de rapports ou de notes me signalant quelque chose de sĂ©rieux ou de grave. Mieux encore, jusquâen novembre 1969, je nâai jamais enregistrĂ© ou entendu une seule observation sceptique ou nĂ©gative de la part du PrĂ©sident, ni de quiconque. Quâil y ait eu des coopĂ©ratives tenues par des voleurs, ce nâĂ©tait pas Ă moi dâengager des procĂ©dures ou des enquĂȘtes. Dâailleurs, la tutelle appartenait Ă lâUnion Nationale des CoopĂ©ratives qui a Ă©tĂ© créée sous la prĂ©sidence de Bourguiba. Un secteur qui devait, Ă mon sens, ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un secteur privĂ© plus dĂ©mocratique. Je dois signaler, Ă ce propos, que câest la premiĂšre fois quâun grand sĂ©minaire sâest tenu, en 1965, en Tunisie, sur lâĂ©conomie des trois secteurs. Et je peux dire maintenant que câĂ©tait la premiĂšre fois quâun parti qui se dĂ©clarait socialiste opĂ©rait une telle Ă©volution dans sa conception de la gestion Ă©conomique et de la prĂ©paration Ă la dĂ©mocratie. Mais on a cherchĂ© la petite bĂȘte, car que reprĂ©sente tout cela par rapport Ă cette Ćuvre gigantesque et Ă lâavenir? Le mouvement coopĂ©ratif nâa pas durĂ© cinq ans. On ne peut pas dire que toutes les coopĂ©ratives ne fonctionnaient pas car si cela avait Ă©tĂ© le cas, la Banque Mondiale aurait arrĂȘtĂ© son crĂ©dit. Je demeure persuadĂ© quâavec quelques annĂ©es de patience et de discipline de la part du pouvoir central et rĂ©gional, il y aurait eu une promotion formidable. Moi, comme je lâai dĂ©jĂ dit plus haut, je nâĂ©tais pas dâaccord pour gĂ©nĂ©raliser tout de suite et sans Ă©tudes. Les Ă©vĂšnements de Msaken de dĂ©cembre 1964 (aprĂšs la promulgation de la loi du 2 mai 1964 relative Ă la propriĂ©tĂ© des terres agricoles et Ă celle du 4 juin 1964 fixant le rĂ©gime des terres cultivables) ont exprimĂ© une opposition contre la constitution de coopĂ©ratives organisĂ©es par le gouvernement. Alors, pour arrĂȘter cette dissidence, Ă©crit-on (â Annuaire de lâAfrique du Nord â, 1964) : – 80 000 oliviers devenaient propriĂ©tĂ© nationale, – Sept comitĂ©s de cellules ont Ă©tĂ© dissous, – Et des cadres du parti ont Ă©tĂ© rĂ©organisĂ©s dans la rĂ©gion de Sousse. Simple incident ou sĂ©rieux avertissement ? Jâai pris les Ă©vĂšnements de Msaken trĂšs au sĂ©rieux parce quâĂ cause de cette rĂ©volution, on vivait sur le qui-vive. Msaken Ă©tait un maillon disponible oĂč certains allaient agresser mes collaborateurs, probablement parce quâils travaillaient avec moi. Jây voyais un signal de quelque chose dâorganisĂ©*. Je nâai jamais prĂ©conisĂ© de rĂ©pression. Et dâailleurs, je nâĂ©tais pas Ă un poste oĂč je pouvais rĂ©primer. Nây avait-il pas eu dâautres Ă©lĂ©ments dĂ©tonateurs comme la critique dure dâAhmed Mestiri le 26 janvier 1968 lors dâune rĂ©union du Conseil supĂ©rieur du Plan (il sera rĂ©primandĂ© et exclu du parti), ou le dĂ©part de Mansour Moalla du gouvernement en octobre 1968, ou encore les Ă©vĂšnements de Ouardanine du 25 janvier 1969 et tous les rapports dâinstitutions internationales comme le document confidentiel de la CEE (fĂ©vrier 1968) ou encore ceux de la B.I.R.D. et de lâUniversitĂ© de Harvard (des 25 mars 69, 20 juin 69 et 25 aoĂ»t 69) ? Pour critiquer la politique gĂ©nĂ©rale dâun pays, doit-on sâattaquer Ă une seule personne ? Nous sommes tous responsables. Moi, je nâai vu aucun document de la Banque Mondiale nous critiquant sĂ©vĂšrement. Il y avait certes, dans des rapports ordinaires de la Banque Mondiale, quelques lignes oĂč lâon Ă©mettait des rĂ©serves quant Ă quelques unitĂ©s de production ou dâautres remarques. On a prĂ©tendu quâil y avait un document secret que jâai camouflĂ©. On mâa reprochĂ© ce fait lors de mon procĂšs. Ces rapports sont dâordinaire envoyĂ©s Ă la Banque Centrale, au ministĂšre des Finances et Ă la PrĂ©sidence. Ceci Ă©tant dit, pourquoi ne pas Ă©voquer, par exemple, lâĂ©tude de Charles Micaud, professeur dâune universitĂ© amĂ©ricaine, qui a passĂ© trois mois en Tunisie vers la fin des annĂ©es 60 : â Leadership and development â ? Il a Ă©tĂ© trĂšs juste et trĂšs honnĂȘte en Ă©voquant lâensemble des problĂšmes de la situation politique et Ă©conomique de la Tunisie et le comportement des responsables politiques. Quant Ă ceux que vous avez citĂ©s, ils Ă©taient cette Ă©poque tous responsables dans le gouvernement ou dans les rouages officiels de la Tunisie. Ils Ă©taient acteurs pendant la pĂ©riode des annĂ©es 60 Ă un titre ou Ă un autre. Quâils aient Ă©voluĂ© dans leurs prises de position, câest leur droit. Il y a eu certes des difficultĂ©s objectives qui ont créé un climat de tension peu favorable Ă la rĂ©alisation dâun plan. Les facteurs climatiques ou politiques ont plaidĂ© en dĂ©faveur de la politique coopĂ©rativiste, comme la sĂ©cheresse qui a frappĂ© le pays de 1964 Ă 1969 ou lâembargo Ă©conomique (gel et interruption des crĂ©dits de coopĂ©ration et des prĂȘts, retraits des coopĂ©rants français de lâagriculture) dĂ©cidĂ© par la France Ă la suite de la nationalisation des terres coloniales par le PrĂ©sident Bourguiba le 12 mai 1964, qui a créé un problĂšme supplĂ©mentaire, Ă savoir celui de la gestion de ces terres. Beaucoup plus tard, en 1969, il y eut la dĂ©cision relative Ă lâaccĂ©lĂ©ration et Ă la gĂ©nĂ©ralisation des coopĂ©rativesâŠet ce que vous avez appelĂ© â les actes prĂ©mĂ©ditĂ©s â. Franchement, tous ces facteurs, constituent-ils Ă eux seuls, les explications de lâ â Ă©chec â de la politique de dĂ©veloppement menĂ©e lors de cette dĂ©cennie ? Nây aurait-il pas eu des erreurs dans lâapplication de la politique coopĂ©rativiste? Lâerreur serait dâavoir fait cela avec ces gens-lĂ . Pour moi, ce nâĂ©tait pas une erreur. Je suis militant dans un parti, dans le mouvement ouvrier. Mon devoir, câest dâagir dans mon pays avec ses maladies. Pourquoi voulez-vous que je cesse ? GĂ©nĂ©ralement, les journalistes nâĂ©voquent que les aspects difficiles et ignorent les choses positives qui ont Ă©tĂ© accomplies. Je nâai pas cessĂ© dâinaugurer des projets, de faire de la pĂ©dagogie⊠parce que câĂ©tait une bataille de prise de conscienceâŠComment se sont construites les industries touristique, chimique, pharmaceutique etc⊠? Il y avait une trĂšs grande vigilance de ma part contre les trafiquants et les corrupteurs de lâEtat. Quâil y ait eu des abus, câest possible⊠Mais je tenais Ă lâaustĂ©ritĂ© dans un pays qui devait travailler pour sâen sortir. Il ne faut pas croire Ă une quelconque mauvaise foi. Jâai fait, jâai assumĂ© parce que jâavais pensĂ© que ça allait amĂ©liorer les choses. Si câĂ©tait Ă refaire, je suis sĂ»r quâon referait mieux. Nous ne pouvions pas faire une coopĂ©rative Ă Bouraada sans faire des erreurs car les gens de Bouraada nâont jamais gĂ©rĂ© quoi que ce soit. Dâailleurs, câĂ©taient leurs femmes qui sâoccupaient de la gestion quotidienne. Jâallais moi-mĂȘme dans ces endroits. Il y a eu certainement des erreurs. Mais ne faudrait-il pas voir le pays Ă la sortie des annĂ©es 1969-1970 ? Le nombre dâenfants scolarisĂ©s, les Ă©pidĂ©mies vaincues, la diversitĂ© des cultures dans le Nord etc⊠Parmi les rĂ©sistances exprimĂ©es par les paysans, il y avait les manifestations Ă lâattachement Ă la propriĂ©tĂ© individuelle, on a portĂ© Ă votre attention â le drame de la vache â. Pour pouvoir appliquer les mĂ©thodes modernes dâĂ©levage, les autoritĂ©s ont prĂ©conisĂ© un rassemblement du bĂ©tail. â Les coopĂ©rateurs ne voulaient rien savoir et leurs femmes (qui sâoccupaient du bĂ©tail) encore moins, certaines menaçant de divorcer. Un compromis a Ă©tĂ© trouvĂ© entre les deux parties â (â Les Temps modernes â, oct.1966). Dâautre part, les paysans se sont opposĂ©s Ă lâinsĂ©mination artificielle, la considĂ©rant comme contraire Ă lâIslam. Comment avez-vous procĂ©dĂ© face Ă ces rĂ©sistances ? Nous ne nous sommes pas soumis Ă ces rĂ©sistances, que nous avons combattues grĂące Ă la pĂ©dagogie et au dialogue. Quitte Ă rĂ©pĂ©ter la formule de LĂ©on Blum : â Sâil y avait une dictature, ce serait celle de la persuasion. â Parce que, contrairement Ă ce quâon a dit, quand jâassistais Ă une rĂ©union, aprĂšs lâouverture que jâassurais, jâĂ©coutais et enfin jâintervenais. Et avant dâaller dans des rĂ©gions, jâenvoyais dâabord des gens de mon cabinet, dâanciens ENA ou IHEC pour essayer de comprendre et dâanalyser la part des problĂšmes Ă rĂ©soudre lors de mes prochaines visites. Mais jâĂ©tais dur avec ceux qui venaient faire de la provocation sans trop se camoufler parfois. Jâai dĂ©fiĂ© la Haute Cour en disant : â Trouvez-moi un seul cas dâune personne qui sâest opposĂ©e Ă moi et que jâai sanctionnĂ©e. â Il nây en avait pas. Mais je nâai pas abandonnĂ©. Le danger rĂ©sidait dans le fait que les petits paysans ne savaient pas se dĂ©fendre contre les gros. Ma vie Ă©tait en danger parce que je voulais les protĂ©ger Ă ma maniĂšre afin quâils puissent assurer eux-mĂȘmes leur promotion.. A la question : â La coopĂ©rative, elle est pour vous ou pour le pays ? â, la rĂ©ponse des petits paysans Ă©tait : â Dâabord pour nous, ensuite pour nous et ensuite pour le pays â. Il semble que les autoritĂ©s ont mis lâaccent sur lâintĂ©rĂȘt personnel du paysan qui va de pair avec le respect que lâon a en Tunisie de la propriĂ©tĂ© privĂ©e. â (â Les Temps modernes â, octobre 1966) On nâa pas supprimĂ© la propriĂ©tĂ© privĂ©e. Dâailleurs dans la loi de 1963, il est bien mentionnĂ© quâaprĂšs cinq ans, si la gestion a bien fonctionnĂ©, la totalitĂ© du noyau domanial est rĂ©parti entre les coopĂ©rateurs, comme nous lâavons expliquĂ© prĂ©cĂ©demment. Mais jâai combattu cet attachement alors que dâautres lâont utilisĂ© pour dĂ©nigrer le mouvement coopĂ©ratif. A MĂ©touia, jâai vu, de mes propres yeux, une femme entrelaçant son olivier, pleurant et criant quâelle ne lâabandonnerait jamais, Ă Matmata, Ă El Hama Ă©galement. Comment rĂ©agissiez-vous ? Je disais quâil fallait les laisser tranquilles. Tandis que dâautres , comme une famille dâAkouda, avaient acceptĂ© avec enthousiasme dâintĂ©grer leurs lopins de terre dans le systĂšme coopĂ©ratif parce que cette famille a assurĂ© la promotion de ses cinq filles grĂące Ă leur scolaritĂ©. Malheureusement, on a alimentĂ© des campagnes mais nous avons continuĂ© Ă travailler. Je rappelle que nous nâavons pas fait de loi au dĂ©part, pour rĂ©futer lâidĂ©e mĂȘme de rĂ©pression. Certains analystes (â Esprit â, mars 1970) considĂšrent que vos dĂ©tracteurs ont rĂ©ussi Ă exploiter vos â faiblesses â et vos â fautes â: – dâabord dâavoir rejetĂ© la moindre analyse marxiste â qui aurait permis de donner Ă votre vision politique les chances de sâinscrire dans la rĂ©alitĂ© â ; lâerreur aurait Ă©tĂ© â de vouloir faire le bonheur de votre peuple sans ou malgrĂ© celui-ci â, – ensuite de nâavoir pas cherchĂ© Ă vous appuyer sur les masses alors que vous Ă©tiez le successeur juridique de Farhat Hached, – et enfin de nâavoir pas cherchĂ© un appui auprĂšs des intellectuels. Ce sont des contre-vĂ©ritĂ©s. Jâallais vers les masses. Je faisais, paraĂźt-il, 5.000 km par mois. Pour aller voir qui ? Sinon les populations de toutes conditions. Il existait Ă©galement des ComitĂ©s rĂ©gionaux du Plan. Jâai fait la mĂȘme chose Ă lâEducation nationale pour assurer la rĂ©forme engagĂ©e et ce que nous croyions ĂȘtre la meilleure pĂ©dagogie qui devait inciter Ă la rĂ©flexion et non seulement Ă lâapprentissage. Qui Ă©taient mes collaborateurs ? Sinon des intellectuels. Jâallais Ă lâUniversitĂ© pour assister Ă des cours pour quâon puisse me poser des questions et discuter avec moi. Qui a signĂ© la pĂ©tition de protestation contre mon arrestation et mon procĂšs ? Sinon des intellectuels. Pour le marxisme, je regrette de ne lâavoir pas utilisĂ© et je lâai dit lors de la soutenance de ma thĂšse Ă Paris. Je nâai pas commis dâerreurs Ă lâencontre de mon peuple. Mais, jâai commis des erreurs contre moi-mĂȘme parce que jâai Ă©tĂ© Ă©levĂ© dans le respect de mes aĂźnĂ©s et de mes leaders. Et pourquoi nâen commettrais-je pas ? Je ne suis pas prophĂšte. Mais je nâai jamais commis des erreurs quant Ă une quelconque gestion financiĂšre ou abus de confiance. Jamais et jusquâĂ ce jour. On vous a reprochĂ© Ă©galement dâavoir, durant le ramadan 1963 et soucieux dâĂ©viter la hausse des prix, condamnĂ© des â petits â (des vendeurs dâĆufs) sans pouvoir vous attaquer aux â gros â qui Ă©taient Ă lâorigine du mouvement de hausse. DĂšs ma nomination au Plan, il y a eu une vague dâarrestations des plus humbles. Et câĂ©tait rĂ©voltant parce quâon a organisĂ© des procĂšs spectaculaires avec des campagnes mĂ©diatiques. Moi, je les ai appelĂ©s les procĂšs de Toufaha (la pomme) qui Ă©tait une femme qui vendait les pommes dans la rue. Jâai personnellement dĂ©criĂ© cela en ayant en tĂȘte cette manipulation qui consistait Ă vouloir montrer que la planification Ă©tait autoritaire. Jâai tĂ©lĂ©phonĂ© Ă TaĂŻeb Mhiri qui a arrĂȘtĂ© ce qui Ă©tait fomentĂ©. Ce que nous avons fait, câĂ©tait de nous prĂ©occuper de lâexode rural qui a commencĂ© dĂšs 1955 et dont le rĂ©sultat a Ă©tĂ© une espĂšce dâinflation de petits commerces plus ou moins hygiĂ©niques et plus ou moins trafiquants. Nous avons rĂ©agi par la rĂ©forme des structures du commerce en mettant en place les premiĂšres coopĂ©ratives commerciales qui ont créé les premiers magasins annonciateurs des premiers supermarchĂ©s. Certains considĂšrent que ce sont les gros commerçants et les gros possĂ©dants qui ont prĂ©cipitĂ© votre â disgrĂące â parce quâils se sentaient menacĂ©s par la gĂ©nĂ©ralisation du systĂšme coopĂ©ratif. Cela nâest pas vrai pour tout le monde. Certains ont Ă©tĂ© entraĂźnĂ©s dans la machination de ceux qui refusaient toute Ćuvre de dĂ©colonisation et de la nouvelle classe qui a bĂ©nĂ©ficiĂ© de terres. Oui, quand ces derniers ont senti que leurs intĂ©rĂȘts Ă©taient en jeu du fait de la gĂ©nĂ©ralisation des coopĂ©ratives, alors ils ont dit non aprĂšs avoir soutenu jusque-lĂ la politique coopĂ©rativiste. Il y avait aussi le sondage donnant Nixon comme PrĂ©sident des Etats-Unis avec toutes les consĂ©quences que cela pouvait avoir. Ce qui se passait en Tunisie nâĂ©tait pas seulement interne. Un discours de Bourguiba aurait tout arrĂȘtĂ©. Jâaurais Ă©tĂ© mutĂ©. Dans tous les cas et comme lâa dit HĂ©di Nouira : â Ce nâĂ©tait pas la maniĂšre utile de faire ce virage.â Le changement sâest fait tout dâun coup. CâĂ©tait un renversement, un coup dâEtat. Les motivations Ă©taient en rapport avec ce qui allait arriver au pouvoir et ne concernaient aucunement la situation Ă©conomique et sociale du pays. Je donne deux exemples Ă ce propos. Le 23 aoĂ»t 1969, tout allait bien Ă Sfax oĂč sâest tenue en ma prĂ©sence une grande rĂ©union des cadres rĂ©gionaux dont vous pouvez lire la motion alors que tout dâun coup, le 2 septembre, il fallait tout arrĂȘter sous le titre : â Il faut une pause. â Le second exemple concerne lâaprĂšs mon dĂ©part du gouvernement, le 8 septembre 1969, et la prĂ©face faite par Bourguiba pour la revue française â MarchĂ©s tropicaux et mĂ©diterranĂ©ens â de dĂ©cembre 1969 oĂč il parlait de belles rĂ©alisations du pays comme un exemple dans le monde, alors que je nâĂ©tais plus lĂ . Nous sommes donc en droit de nous poser des questions sur cette volte-face. On dit que vous Ă©tiez autoritaire. Oui, ils disaient que jâĂ©tais arrogant, agressif. Autoritaire. Oui, je donnais lâexemple. Je travaillais plus que les autres. JâĂ©tais Ă 5h30 Ă mon bureau. Oui, jâĂ©tais autoritaire dans lâexĂ©cution des choses, mais il y avait par ailleurs du dialogue. 5.000 personnes ont participĂ© Ă lâĂ©laboration du Plan. On a dâabord commencĂ© par trois gouvernorats, ensuite pour le 2Ăšme Plan avec chaque gouvernorat, et aprĂšs on est allĂ© vers les dĂ©lĂ©gations, sans compter quâon a créé des ComitĂ©s dâĂ©tudes socialistes, rĂ©gionaux et locaux. Nâest-ce pas lĂ une prise en main du rĂ©veil des masses populaires ? Qui a endormi les masses ? Ce sont les dirigeants. Certains Ă©taient venus chez moi pour me proposer de crĂ©er une opposition contre Bourguiba. Mais jâai refusĂ© car je nâĂ©tais pas disposĂ© Ă mâopposer Ă Bourguiba. vous permettez, nous allons ouvrir le chapitre de lâUniversitĂ© tunisienne. LâannĂ©e 1968 a connu une agitation universitaire (et lycĂ©enne) qui avait dĂ©jĂ commencĂ© deux ans auparavant et abouti Ă des procĂšs et condamnations. Un mouvement qui rĂ©agissait Ă©galement contre les tentatives – parfois musclĂ©es – dâendoctrinement du PSD de la jeunesse estudiantine. Vous avez Ă©tĂ© nommĂ© SecrĂ©taire dâEtat Ă lâEducation nationale en juillet 1968. â Et lâon Ă©tait en droit de penser quâappelĂ© Ă la tĂȘte de lâEducation nationale, son (votre) premier acte serait dâarrĂȘter ce scandaleux procĂšs pour opinion dâun grand nombre dâenseignants de septembre 1968 â, a-t-on Ă©crit. Je ne suis pas responsable. Je ne peux pas dire non plus que le gouvernement Ă©tait responsable. Il nây avait pas de gouvernement en Tunisie. Il y avait Bourguiba et quelques ministres. Je lâai dĂ©jĂ expliquĂ©. Il y a eu des manifestations, des arrestations. CâĂ©tait un mouvement extrĂ©miste contre le pouvoir et contre ma personne. Le PCT ainsi que le mouvement âPerspec- tivesâ ont publiĂ© des brochures contre la politique coopĂ©rativiste. LâextrĂȘme-gauche mâinsultait avec des formules telles que : â (âŠ) Monsieur Ben Salah, vous, ce que vous pouvez faire, câest aboyer en bon chien de garde (âŠ) â (â Perspectives â, no 15, octobre 1967) tandis que dâautres mâaccusaient dâavoir donnĂ© Menzel Bourguiba et Bizerte aux AmĂ©ricains LâatmosphĂšre Ă©tait tendue. Alors, jâai proposĂ© au Parti dâorganiser, Ă lâintention de ces jeunes qui ne connaissaient pas leur pays, des sĂ©minaires avec les mineurs, avec les ouvriers du transport, avec les dockers etcâŠpour rĂ©aliser une espĂšce de refonte de ces jeunes dans leur population. CâĂ©taient des Tunisiens en colĂšre sans connaĂźtre les Tunisiens. Personnellement, je ne les connaissais pas. Personne nâa demandĂ© Ă me voir ni Ă parler avec moi. Il y avait un problĂšme rĂ©el de dĂ©mocratie. Il y en a toujours eu. Moi, je ne parle pas de dĂ©mocratie mais de libertĂ©. Il y avait beaucoup de libertĂ©. La preuve, câest que les gens manifestaient en dĂ©pit de la rĂ©pression, comme ailleurs. Je nâĂ©tais pas dâaccord avec beaucoup de gens, On aurait pu imaginer un autre systĂšme politique en Tunisie. Ăa a avortĂ© complĂštement. Si on avait construit une Ă©conomie avec de plus en plus de travailleurs, de privĂ©s, dâĂ©tatiques, la base se serait Ă©largie et la dĂ©mocratie ne serait plus ni une affaire dâĂ©lite, ni celle de simples opĂ©rations Ă©lectorales. Et puis, dans la transition, nous avions la chance dâavoir un prestige, une autoritĂ© morale qui acceptait le dialogue. Pas publiquement. Jâai eu des divergences graves avec Bourguiba comme Ă propos de la planification familiale. On conduisait les gens comme des bĂȘtes pour la stĂ©rilisation forcĂ©e. On a vu Bourguiba au Kef conduire lui-mĂȘme des pĂšres de famille Ă la stĂ©rilisation forcĂ©e. Bourguiba sâest rĂ©tractĂ© et je lui ai dit que je ferais un discours pour expliquer ce quâest la planification familiale. Il y avait moyen avec Bourguiba de sâopposer et de le faire changer de position. Pour ce qui est des arrestations, je recevais quotidiennement des lettres du monde entier me demandant dâintervenir en faveur des prisonniers. Que sait-on de ce que jâai pu faire avec lâadministration des prisons ou en recevant telle ou telle personne? Jâai reçu Salah Garmadi, qui Ă©tait officiellement exclu de lâEducation nationale, pour lâintĂ©grer Ă la Commission de rĂ©forme de lâenseignement. Au Parti, on a mal rĂ©agi considĂ©rant que jâalliais la gauche Ă ma personne. Des annĂ©es plus tard, en exil, lors dâune rencontre avec Amnesty International (A.I.), nous avons parlĂ© de cela et jâai Ă©crit une lettre manuscrite Ă A.I. oĂč jâai dit que: â Je regrettais de nâavoir pas dĂ©missionnĂ© Ă ce moment-lĂ de lâEducation nationale et de tout. â Contre les arrestations et procĂšs, Jâai fait ce que jâai cru devoir faire parce que je ne pouvais rien faire en rĂ©alitĂ©. Mais solliciter Garmadi dans ce contexte Ă©tait symbolique. Ceci Ă©tant dit, je nâai jamais levĂ© le petit doigt pour une arrestation quelconque. Avec cela, je mâen veux car jâaurais dĂ» partir mĂȘme de lâEducation nationale. Pouvais-je intervenir dans un procĂšs ? Il y avait des gens gĂ©nĂ©reux qui me prĂ©venaient du volcan que prĂ©paraient dĂ©jĂ contre ma personne des forces conquĂ©rantes qui sortaient de lâambassade de France, de la PrĂ©sidence. JâĂ©tais le personnage Ă Ă©crabouiller. JâĂ©tais Ă lâEducation nationale quand jâai reçu, Ă sa demande, le chef de la dĂ©lĂ©gation de la Banque Mondiale qui mâa dit ce jour-lĂ : â Je viens de lâambassade de France et je vous assure que lĂ , on ne vous aime pas du tout . â Qui dĂ©tenait rĂ©ellement le pouvoir en Tunisie Ă cette Ă©poque, surtout aprĂšs la crise cardiaque du PrĂ©sident Bourguiba ? CâĂ©tait Bourguiba, mais, pour arriver Ă se couvrir, les gens, qui prĂ©paraient ce qui allait arriver, se rĂ©fĂ©raient toujours Ă Bourguiba ou Ă la nĂ©cessitĂ© de â protĂ©ger â Bourguiba. Moi, je mettais toujours le PrĂ©sident au courant de tout en ce qui concernait mes responsabilitĂ©s. Et lui me communiquait souvent des rapports secrets quâil recevait me concernant personnellement ou concernant mes responsabilitĂ©s. Je nâai jamais eu Ă rĂ©agir Ă une quelconque remarque rĂ©servĂ©e de Bourguiba, depuis 1956 jusquâen1969. Mais Ă partir de la crise cardiaque, on a commencĂ© Ă spĂ©culer sur lâaprĂšs-Bourguiba, en mettant en avant des personnages, probablement avec la complicitĂ© de services Ă©trangers. Depuis 1967, lâorganisation des hostilitĂ©s est arrivĂ©e Ă maturitĂ©. On a attendu lâaffaiblissement de Bourguiba. Ce qui Ă©tait important, câest quâil nây avait pas une seule rĂ©union lĂ©gale pour prendre les dĂ©cisions qui ont Ă©tĂ© prises en 1969. Il y a eu le Conseil de la RĂ©publique pour la pause. Câest tout. On vous considĂ©rait comme â le benjamin de Bourguiba â, dans le sens de second. Personnellement, je ne lâai jamais pensĂ©. Bourguiba malade, le ComitĂ© de Coordination de Tunis a cherchĂ©, Ă trois reprises, Ă connaĂźtre mon opinion sur lâaprĂšs-Bourguiba et jâai toujours rĂ©pondu que ce qui mâimportait, câest quâil nây ait pas de tremblement de terre dans mon pays et que par consĂ©quent il faudrait respecter la hiĂ©rarchie (BĂ©hi Ladgham en lâoccurrence). Donc, je nâĂ©tais concernĂ© dâaucune maniĂšre. Mais, rassurez-vous, je demeure toujours concernĂ© par lâavenir de lâAfrique du Nord, du monde auquel jâappartiens et bien entendu de la promotion rĂ©elle de la sociĂ©tĂ© de mon pays. Par un simple coup de fil, en septembre 1969, Bourguiba vous apprend lâabandon de la politique coopĂ©rativiste tout en vous maintenant Ă la tĂȘte de lâEducation nationale. Avez-vous pressenti ce retournement ? Non, il nâa pas parlĂ© dâabandon. Au contraire, il mâa dit : â Ce sont nos convictions, câest notre politique. Les gens nâont peut-ĂȘtre pas compris. Et jâai pensĂ© que BĂ©hi Ladgham pourrait rĂ©gler ce dossier. Tu restes Ă lâEducation nationale. â Alors je lâai remerciĂ© tout en lui disant : â Si ma santĂ© me le permet. â Il mâa rĂ©pondu en ces termes : â Tu ne me quitteras pas maintenant â. Ceci sâest passĂ© vers 9h30-10 heures. Vers 11h, jâai accompagnĂ© mon jeune frĂšre pour visiter une maison quâil voulait louer. Et ce matin-lĂ , jâai fait cela comme je devais le faire. Etait-ce votre dernier contact avec Bourguiba ? Non. La derniĂšre fois que le lâai vu, câĂ©tait aprĂšs les Ă©lections de novembre 1969. JâĂ©tais encore S.G. adjoint du Parti mais je nâassistais Ă rien. Ahmed Nourreddine mâa proposĂ© de lâaccompagner Ă la cĂ©rĂ©monie qui devait se tenir Ă Carthage et oĂč lâon devait fĂ©liciter Bourguiba. Il mâa demandĂ© si le Parti mâavait prĂ©venu. Jâai rĂ©pondu par la nĂ©gative mais jâai dĂ©cidĂ© de lây accompagner. CâĂ©tait assez dramatique. En entrant, jâai vu tout le monde dans le hall. Seule une seule personne sâest avancĂ©e vers moi et mâa saluĂ©. Lâaide de camp de Bourguiba, ChĂ©dli CaĂŻd Essebsi, mâa demandĂ© de lâaccompagner au bureau du PrĂ©sident. Bourguiba voulait me voir. Il portait, ce jour-lĂ , ses lunettes noires et il mâa dit : â Ne vous en faites pas, ce sont des choses qui arrivent, câest dĂ©jĂ arrivĂ© Ă Mohamed Masmoudi etc⊠â Alors, je lui ai rĂ©pondu : â Je ne suis pas Mohamed Masmoudi. Cela peut arriver mais pas au point de voir des petits sacs sortant dâune des banques de la place et remplis dâautocollants portant lâinscription : â Ahmed Ben Salah au poteau â.â Il nâa pas soufflĂ©, mot mais BĂ©hi Ladgham, qui Ă©tait prĂ©sent Ă lâentrevue, a rĂ©agi en disant : â Vous voyez, Monsieur le PrĂ©sident, Si Ahmed croit quâil y a machination â. Il Ă©tait clair que Bourguiba Ă©tait furieux aprĂšs cette interpellation. Jâai rĂ©torquĂ© : â Monsieur le PrĂ©sident, je nâai pas prononcĂ© ce mot. â Nous nous sommes levĂ©s pour rejoindre les invitĂ©s. Me voyant arriver, ces derniers pensant que tout Ă©tait rĂ©glĂ©, mâont saluĂ© un Ă un. Oui, jâai pressenti ce qui allait mâarriver et je lâai dit, ce jour-lĂ , Ă Ahmed Nourreddine : â Ils iront loin contre moi. â.
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* Note :
Certains nâĂ©taient certes pas dâaccord mais il semble quâil y avait un rĂ©seau autour de Sauvagnargues qui est restĂ© ambassadeur de France en Tunisie durant huit ans, sans compter que Bourguiba avait comme ami Edgar Faure. Pour le semi- folklore, je peux dire que câest lui qui, le 3 aoĂ»t 1969, mâa littĂ©ralement hurlĂ© au visage : â Monsieur le Ministre de tout. â Mais, je voudrais Ă©voquer la visite sur invitation de Bourguiba de MendĂšs-France en Tunisie pour donner son avis sur ce qui se passait. On a mis Ă sa disposition une voiture et un guide pour quâil puisse voir comment les choses se passaient. Une semaine aprĂšs, et lors dâun dĂźner organisĂ© en son honneur, il mâa dit : â Je dois vous dire bravo â, et ce aprĂšs avoir exposĂ© ses apprĂ©ciations sur ce quâil avait vu. Et il a fait, le lendemain, un rapport positif Ă Bourguiba. Je pense que les apprĂ©ciations positives et chaleureuses de MendĂšs- France ont Ă©tĂ© plutĂŽt mal accueillies.
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(Source : Réalités N° 1002 du 10 mars 2005)
Les sociĂ©tĂ©s civiles et le Partenariat euro-mĂ©diterranĂ©en : Lâheure des rĂ©formes.
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Par Abderrazak Attia
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Depuis le lancement en novembre 1995 du Processus de Barcelone, qui regroupe lâUE, ses Etats membres et les pays du Sud de la MĂ©diterranĂ©e, un Forum Civil euromed accompagne rĂ©guliĂšrement âmais parallĂšlementâ la confĂ©rence ministĂ©rielle euro-mĂ©diterranĂ©enne. Ainsi on compte approximativement huit forums civils qui se sont tenus, durant cette pĂ©riode, selon un mĂȘme format sur lequel on reviendra. Toutefois, une Ă©tape importante allait marquer lâĂ©volution du Forum Civil, Ă savoir lâorganisation Ă Limassol (Chypre), en juin 2004, dâune sorte dââ AssemblĂ©e GĂ©nĂ©rale â de ce Forum, rencontre qui a regroupĂ© quatre-vingt reprĂ©sentants de rĂ©seaux thĂ©matiques rĂ©gionaux, sous-rĂ©gionaux, nationaux ou locaux appartenant Ă lâespace euro-mĂ©diterranĂ©en, dans le cadre dâune initiative des anciens â organisateurs â visant à «rĂ©former» le Forum Civil euromed, Câest ce quâon a appelĂ©
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â la plate-forme non gouvernementale euromed â.
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Avant de jeter la lumiĂšre sur cette â rĂ©forme â du Forum Civil euromed, il faut souligner, tout de mĂȘme, que lâimpact de toutes les sessions du Forum Civil, Ă lâinstar du Processus de Barcelone, nâĂ©tait ni visible ni perceptible par les opinions publiques des deux rives de la MĂ©diterranĂ©e, auxquelles, pourtant, le Forum est censĂ© sâadresser pour changer un tant soit peu leur situation en termes de rapprochement socioculturel et de prospĂ©ritĂ© partagĂ©e.
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Il existe en rĂ©alitĂ©, pour schĂ©matiser, deux sociĂ©tĂ©s civiles, lâune europĂ©enne et lâautre sud-mĂ©diterranĂ©enne, qui ont des prĂ©occupations â spĂ©cifiques â ; la premiĂšre, du fait de son appartenance au monde dĂ©veloppĂ©, voulait plutĂŽt axer prioritairement le dialogue et la coopĂ©ration entre SociĂ©tĂ©s civiles, sur les thĂšmes des libertĂ©s, de la dĂ©mocratie et des Droits de lâHomme Ă cĂŽtĂ© dâautres sujets, tandis que la seconde souhaitait, de son cĂŽtĂ©, mettre davantage lâaccent sur les problĂšmes de dĂ©veloppement tels que lâĂ©ducation, la formation, le dĂ©veloppement rural, la lutte contre la pauvretĂ©, lâanalphabĂ©tisme, le racisme et la xĂ©nophobie, la migration et la circulation des personnes entre les deux rives de la MĂ©diterranĂ©e etcâŠ
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En somme, «lâinĂ©vitable» dialogue Nord-Sud que lâon connaĂźt semblait sâĂȘtre installĂ©, de fait, aussi bien au sein du Processus de Barcelone, Ă lâĂ©chelle intergouvernementale, quâau sein du Forum Civil avec tout ce que cet exercice pouvait susciter comme â dĂ©bats contradictoires â tenant Ă la volontĂ© affirmĂ©e des uns (les EuropĂ©ens) Ă vouloir â imposer â un modĂšle de conduite unique, sinon une â mission unique â, Ă ce Forum et au refus des autres (la majoritĂ© des Sud-MĂ©diterranĂ©ens) qui ne pouvaient sâen accommoder pour diffĂ©rentes raisons dâordres historique, politique, Ă©conomique et social.
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Dans ce contexte, le Forum Civil Euromed devait faire face Ă trois sortes de problĂšmes quâon peut rĂ©capituler comme suit :
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– «la prĂ©dominance» de la partie europĂ©enne sur le Forum du fait que son financement Ă©tait assurĂ© par lâUE, que son organisation a toujours Ă©tĂ© confiĂ©e Ă des ONG ou fondations europĂ©ennes et quâil sâest toujours tenu en Europe ;
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– le peu dâintĂ©rĂȘt accordĂ© par la partie europĂ©enne aux prĂ©occupations rĂ©elles des SociĂ©tĂ©s civiles de la rive sud et sa mĂ©connaissance des cadres rĂ©glementaires et organisationnels dans lesquels Ă©voluent les ONG de cette rĂ©gion ;
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– les difficultĂ©s rencontrĂ©es par les reprĂ©sentants des pays du Sud Ă obtenir les visas nĂ©cessaires pour se rendre aux sessions du Forum Civil qui se tiennent en Europe.
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Sâajoute Ă cela une approche de travail «unidirectionnelle» : en effet lâONG europĂ©enne, retenue par la Commission EuropĂ©enne pour organiser le Forum, crĂ©e un ComitĂ© de Pilotage, composĂ© lui aussi dâONG, en majoritĂ© sinon en totalitĂ© europĂ©ennes ; câest Ă ce comitĂ© quâincombait la prĂ©paration du Forum, le choix des thĂšmes figurant dans lâagenda du Forum, lâĂ©tablissement des listes dĂ©finitives des participants et enfin toute la gestion de la confĂ©rence.
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Toutes ces raisons de forme et de fond ont lourdement pesĂ© sur lâĂ©quilibre gĂ©nĂ©ral du Forum, dont les retombĂ©es sur les pouvoirs publics et les opinions publiques Ă©taient finalement presque insignifiantes.
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DĂšs lors la question qui se pose est de savoir comment le Forum Civil va se «rĂ©former» pour ĂȘtre plus en phase avec ce «vent rĂ©formiste», peut-on dire, qui souffle sur les pays de la rive sud de la MĂ©diterranĂ©e et du Monde arabe en gĂ©nĂ©ral, notamment avec le Processus de Barcelone qui doit, lui aussi, tirer les conclusions de dix annĂ©es dâexercice dont les rĂ©sultats sont, le moins quâon puisse dire, mitigĂ©s ?
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Le coup dâenvoi a Ă©tĂ© la crĂ©ation, en fĂ©vrier 2003, Ă lâinitiative des anciens organisateurs, de la Plate-forme non gouvernementale euromed, «composĂ©e dâacteurs et dâorganisations rĂ©gionales, sous-rĂ©gionales, nationales ou locales», travaillant dans les domaines sui- vants : dĂ©fense des Droits de lâHomme, promotion de la paix, environnement, la culture, Ă©galitĂ© homme / femme, dĂ©veloppement local et jeunesse .
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En juin 2004, â la Plate-forme non gouvernementale â a organisĂ©, Ă Chypre, une rencontre Ă©largie qui a regroupĂ© quatre-vingt reprĂ©sentants du Nord et du Sud et qui a abouti, notamment, aux conclusions suivantes :
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– lâadoption dâune â Charte de valeurs et de principes â dĂ©finissant les conditions dâadhĂ©sion et dâappartenance au forum civil,
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– rĂ©former â le Forum et doter la SociĂ©tĂ© civile â dâune interface permanente avec les pouvoirs publics â,
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– travailler au renforcement de la place et du rĂŽle du Forum Civil dans le partenariat euromed â,
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– la tenue dâune â premiĂšre AssemblĂ©e GĂ©nĂ©rale constitutive â en mars 2005,
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– rĂ©ussir Ă organiser le premier Forum Civil euromed dans un pays de la rive sud.
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Dans lâesprit des organisateurs, la session de Naples du Forum Civil (novembre 2003), qui a prĂ©cĂ©dĂ© la rencontre de Chypre, Ă©tait conçue pour ĂȘtre le forum de â transition â pour tester la mise en place de la nouvelle rĂ©forme du Forum qui repose dĂ©sormais sur les structures suivantes :
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– un ComitĂ© de pilotage, composĂ© de seize membres reprĂ©sentant les rĂ©seaux rĂ©gionaux, sous-rĂ©gionaux et nationaux. Ce comitĂ© de pilotage a pour mission la conception, la programmation, la mise en Ćuvre et la supervision du Forum Civil euromed ;
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– la Plate-forme non gouvernementale qui est chargĂ©e, quant Ă elle, de la phase prĂ©paratoire des sessions du Forum, dont notamment lâorganisation â et câest nouveau – des rĂ©unions de consultation avec les ONG dans les pays du Sud ainsi que la gestion des listes des participants. Il sâagit lĂ du rĂŽle clĂ© qui est assignĂ© Ă la Plate-forme non gouvernementale, Ă savoir la consultation et le choix des participants, deux composantes qui ont constituĂ© la pierre dâachoppement de lâancien Forum Ă savoir la consultation prĂ©alable des ONG des pays du Sud sur lâagenda du Forum qui nâexistait pas et la sĂ©lection des participants opĂ©rĂ©e par la partie europĂ©enne qui Ă©tait souvent contestĂ©e par la plupart des ONG des pays du Sud qui la jugeaient â arbitraire â ;
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– un groupe de suivi chargĂ© de lâexĂ©cution des dĂ©cisions et des orientations de la rĂ©union Ă©largie.
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Ainsi se dessine lâesquisse de la rĂ©forme du Forum Civil qui sâarticule, dĂ©sormais, autour dâune sorte dâengagement collectif reprĂ©sentĂ© par la Charte des valeurs et principes et de structures rĂ©novĂ©es aux missions bien dĂ©finies.
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Il est important de sâarrĂȘter sur le document fondamental que constitue la Charte des valeurs et principes qui lie les membres adhĂ©rents en soulignant notamment : â
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– lâattachement Ă la dĂ©mocratie, lâĂ©galitĂ© entre hommes et femmes, la gestion sociale, la transparence et la bonne gouvernance ;
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– la primautĂ© de la libertĂ© de conscience, dâexpression et de crĂ©ation, dâinformation, de circulation et dâassociation ;
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– lâautonomie de la SociĂ©tĂ© civile Ă lâĂ©gard des pressions politiques, Ă©conomiques et religieuses ;
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– la prioritĂ© du dĂ©veloppement durable et de lâĂ©radication de la pauvretĂ© dans la rĂ©gion ;
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– les droits humains universels dans leur indivisibilitĂ© et leur interdĂ©pendance.
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Cette mĂȘme Charte souligne la nĂ©cessitĂ© de redĂ©finir les objectifs et prioritĂ©s du Processus de Barcelone en plaçant notamment au centre des dĂ©bats et des actions :
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– «la dĂ©mocratisation des sociĂ©tĂ©s et des Etats,
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– la lutte contre la corruption financiĂšre et administrative,
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– les politiques migratoires, les politiques de frontiĂšre et de droit dâasile,
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– la promotion du dialogue social en tant que facteur essentiel de dĂ©veloppement et de justice sociale,
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– le dĂ©veloppement durable,
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– la gestion dĂ©mocratique de lâaccĂšs Ă lâinformation.»
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Enfin, la Charte souligne le caractĂšre solidaire des ONG, syndicats, associations ou groupes organisĂ©s en rĂ©seaux pluriels qui font partie de la Plate-forme non gouvernementale euromed et reconnaĂźt Ă celle-ci le rĂŽle essentiel quâelle doit jouer en tant quâinterface avec les pouvoirs publics euro-mĂ©diterranĂ©ens.
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Commentaires et réflexions
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La rĂ©forme en cours du Forum Civil euromed a permis dâores et dĂ©jĂ de clarifier la rĂšgle de jeu de ce forum Ă travers :
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– la crĂ©ation de la Plate-forme non gouvernementale devant accueillir les reprĂ©sentations des sociĂ©tĂ©s civiles euro-mĂ©diterranĂ©ennes,
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– lâadoption dâune charte des valeurs et des principes fixant les conditions dâadhĂ©sion et dâappartenance Ă cette plate-forme,
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– la mise en place des structures de fonctionnement du Forum Civil qui sont le ComitĂ© de pilotage et le ComitĂ© de suivi dont on connaĂźt les attributions et la composition,
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Au mois de mars 2005 se tiendra la premiĂšre AssemblĂ©e GĂ©nĂ©rale constitutive de la Plate-forme non gouvernementale, ce qui reprĂ©sente une Ă©chĂ©ance capitale pour toutes les SociĂ©tĂ©s civiles qui doivent y ĂȘtre reprĂ©sentĂ©es par leurs ONG, associations ou rĂ©seaux etcâŠ
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On sait aussi que la rencontre de la Plate-forme non gouvernementale qui sâest tenue Ă Chypre en juin 2004 a arrĂȘtĂ© les modalitĂ©s dâadhĂ©sion Ă cette plate-forme qui reste ouverte Ă â toute personne physique ou morale qui Ćuvre dans le cadre du partenariat euro-mĂ©diterranĂ©en et adopte sa charte â.
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Il est dit notamment que â lâadhĂ©sion se fait auprĂšs du groupe de suivi et / ou par dĂ©lĂ©gation auprĂšs des rĂ©seaux nationaux â, que â la demande dâadhĂ©sion doit ĂȘtre faite un mois au moins avant la rĂ©union du groupe de suivi et quâelle doit faire lâobjet dâune validation par la rĂ©union Ă©largie de la plate-forme.
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Le Forum Civil de Naples de novembre 2003, appelĂ© «Forum de transition», a Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©, en guise de prĂ©paration, dâune sĂ©rie de consultations nationales auprĂšs des SociĂ©tĂ©s civiles de chaque pays sud-mĂ©diterranĂ©en, dont le but Ă©tait de les associer â Ă lâĂ©laboration de lâagenda du Forum et de contribuer au processus constitutif de la Plate-forme non gouvernementale â.
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OĂč en sont de tout cela les sociĂ©tĂ©s civiles des pays sud-mĂ©diterranĂ©ens ?
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Dâabord, ont-elles Ă©tĂ© suffisamment reprĂ©sentĂ©es au forum de Chypre qui a rĂ©uni la premiĂšre Plate-forme non gouvernementale Ă©largie et qui a jetĂ© les bases de tout ce processus de rĂ©forme ?
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Ont-elles pris conscience de lâenjeu des consultations nationales qui ont eu lieu dans chacun de leurs pays Ă lâinvitation des initiateurs de cette rĂ©forme ? Sây sontâils organisĂ©s en consĂ©quence, notamment sons la forme de rĂ©seaux thĂ©matiques ?
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Ont-elles exigĂ©, pour remĂ©dier Ă la prĂ©dominance europĂ©enne, le respect de la paritĂ© dans la constitution des structures du Forum Civil, en lâoccurrence le ComitĂ© de pilotage et le ComitĂ© de suivi ?
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Ont-elles nĂ©gociĂ© les prioritĂ©s et domaines dâintervention du futur forum civil pour quâil soit tenu compte de leurs prĂ©occupations spĂ©cifiques ou gĂ©nĂ©rales ?
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Autant de questions qui interpellent les SociĂ©tĂ©s civiles sud-mĂ©diterranĂ©ennes qui aspirent Ă devenir des partenaires Ă part entiĂšre dans ce partenariat euro-mĂ©diterranĂ©en et Ă ĂȘtre associĂ©es, en tant que co-dĂ©cideurs, dans tout ce qui sâentreprend et se rĂ©alise dans ce cadre.
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De leur cĂŽtĂ©, les acteurs europĂ©ens, initiateurs de ce processus de rĂ©forme ont-ils sensibilisĂ©, suffisamment Ă temps, leurs partenaires du Sud sur la portĂ©e et lâenjeu de leur dĂ©marche en prĂ©vision des «consultations nationales» quâils comptaient organiser chez eux et avec chacun dâeux dans son propre pays?
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Dâaucuns pensent que lâintention des organisateurs Ă©tait certes bonne mais que les lacunes et contraintes de temps liĂ©es Ă la prĂ©paration du Forum de Naples, dont ils avaient la charge, nâont pas permis Ă leurs interlocuteurs du Sud de bien se prĂ©parer Ă ces consultations et dâen saisir les enjeux et les consĂ©quences.
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A la lumiĂšre de toutes ces interrogations, comment peut-on agir pour corriger le tir et essayer de rattraper le cours des choses aussi bien chez les uns que chez les autres ? A cet Ă©gard, on ne peut quâĂ©mettre certaines rĂ©flexions :
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– lâopportunitĂ© Ă saisir par toutes les SociĂ©tĂ©s civiles euro-mĂ©diterranĂ©ennes est la prochaine rĂ©union de lâAssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale constitutive de la Plate-forme non gouvernementale prĂ©vue au mois de mars 2005 ;
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– il faut faire appel Ă lâesprit dâouverture et Ă lâengagement de toutes les parties pour que EuropĂ©ens et Sud-MĂ©diterranĂ©ens, se mettent dâaccord, lors de cette rencontre, sur les prioritĂ©s Ă assigner au forum et donc sur son agenda en veillant, en cela, Ă lâĂ©quilibre Ă trouver entre les exigences des uns et les prĂ©occupations des autres ;
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– en lâoccurrence, il existait, dans lâancienne formule du Forum Civil, des organisations et rĂ©seaux qui avaient des positions dominantes et dont les voix comptaient au sein du ComitĂ© de pilotage. Ils usaient, de ce fait, de leur influence pour Ă©liminer la participation de certaines ONG et associations sud-mĂ©diterranĂ©ennes du Forum Civil sous prĂ©texte quâelles â collaborent â avec les pouvoirs publics dans leurs propres pays. Pour Ă©viter Ă lâavenir de tels Ă©carts qui faussent la rĂšgle du jeu du Forum, il serait plus juste et plus dĂ©mocratique que les membres du ComitĂ© de pilotage et ceux du ComitĂ© de suivi du forum soient dorĂ©navant Ă©lus pour une pĂ©riode dĂ©terminĂ©e par lâAssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de la nouvelle Plate-forme non gouvernementale euromed ;
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– par ailleurs, il y a lieu de souligner, Ă lâintention des â organisateurs europĂ©ens â que dans les pays du Sud, les ONG et les pouvoirs publics travaillent de plus en plus en partenariat et mĂšnent des actions communes. A titre indicatif, si la femme bĂ©nĂ©ficie dâun statut avancĂ© en Tunisie, câest en grande partie le rĂ©sultat dâune collaboration Ă©troite entre lâEtat et les associations fĂ©minines appartenant Ă la SociĂ©tĂ© civile.
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Sur un autre plan et, comme cela a Ă©tĂ© signalĂ©, les ONG et associations dans les pays du Sud Ă©voluent dans des cadres rĂ©glementaires et organisationnels qui ne sont pas forcĂ©ment identiques Ă ceux des pays europĂ©ens, ce qui ne doit pas servir de prĂ©texte pour quâelles soient mises Ă lâĂ©cart ou frappĂ©es dâexclusion.
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Pour toutes ces raisons, on estime que lâadoption de la Charte des valeurs et principes, et celle de la nouvelle procĂ©dure dâadhĂ©sion du Forum, en clarifiant toutes les deux la rĂšgle du jeu du Forum, vont certainement constituer une base Ă©quitable et transparente pour Ă©viter Ă lâavenir â les blocages â de toutes sortes dont se plaignaient les reprĂ©sentants des SociĂ©tĂ©s civiles sud-mĂ©diterranĂ©ennes.
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Toutefois et pour revenir Ă la Charte des valeurs et principes, il est essentiel de la soumettre Ă nouveau Ă lâapprobation dĂ©finitive de lâAssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de la Plate-forme non gouvernementale et, le cas Ă©chĂ©ant, dây procĂ©der Ă certains amĂ©nagements ; faut-il rappeler que cette charte a Ă©tĂ© adoptĂ©e en lâabsence de plusieurs ONG et associations sud mĂ©diterranĂ©ennes ? Il sâagit, Ă©galement, de redĂ©finir, de façon consensuelle, les domaines dâintervention et les prioritĂ©s du Forum qui doivent faire lâobjet dâaccord prĂ©alable entre toutes les parties, tout en soulignant bien Ă©videmment lâimportance fondamentale Ă accorder aux domaines des libertĂ©s et des Droits de lâHomme sans lesquels le Forum Civil euromed perdrait, en effet, tout son Ă©quilibre et toute sa signification.
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En effet, les SociĂ©tĂ©s civiles sud- mĂ©diterranĂ©ennes ont atteint un degrĂ© de maturitĂ© politique qui leur permet aujourdâhui de travailler dâĂ©gal Ă Ă©gal avec leurs homologues europĂ©ennes et ont besoin pour cela dâĂ©voluer dans des cadres rĂ©glementaires et organisationnels plus souples et plus ouverts pour pouvoir mieux sâimpliquer dans le partenariat euroâmĂ©diterranĂ©en et mieux servir leurs intĂ©rĂȘts.
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Dans cet ordre dâidĂ©es, il est mĂȘme souhaitable que les deux piliers du partenariat euro-mĂ©diterranĂ©en que sont le Processus inter -gouvernemental de Barcelone et le Forum Civil puissent se rencontrer en confĂ©rence annuelle informelle pour Ă©valuer ensemble les progrĂšs accomplis par lâun et lâautre et Ă©tablir entre eux un dialogue direct et constructif pour mieux consolider le partenariat euro-mĂ©diterranĂ©en dans lâintĂ©rĂȘt de la rĂ©gion et des peuples de la rĂ©gion. Dans cette hypothĂšse, le Forum Civil pourrait ĂȘtre reprĂ©sentĂ© Ă cette confĂ©rence par les membres du ComitĂ© de pilotage et ceux du ComitĂ© de suivi.
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En conclusion, on peut dire que la prochaine rĂ©union de lâAssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale constitutive de la plate-forme non gouvernementale dĂ©tient toutes les cartes pour rĂ©nover le Forum Civil sur des bases plurielles, dĂ©mocratiques et Ă©quilibrĂ©es et permettre Ă toutes les SociĂ©tĂ©s civiles de lâespace euro-mĂ©diterranĂ©en dâaffirmer ensemble leur responsabilitĂ© et leur engagement pour relever les dĂ©fis anciens et nouveaux qui se posent au partenariat euro-mĂ©diterranĂ©en, et ce dans une complĂ©mentaritĂ© quâon espĂšre intelligente et innovatrice avec le Processus intergouvernemental de Barcelone.
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(Source : Réalités N° 1003 du 17 mars 2005)
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Paysages de guerre avec Madrid en fond  Emarrakech – UsĂ©s jusquâĂ la corde, les dĂ©bats nourris qui ont eu lieu Ă propos de ce qui est dit ou pas dans le Coran, qui ont suivi le 11 septembre 2001, ont repris de plus belle aprĂšs les attentats meurtriers de Madrid du 11 mars 2004.  Juan Goytisolo – Traduction Abdelatif Ben Salem  |
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Les politologues en ont fait leurs les discours thĂ©ologiques sans apporter dâavantages dâexplications sur les causes dâune telle barbarie et dâun tel aveuglement suicidaire. Comme nous le savons, les exhortations divines Ă la violence ne sont pas une exclusivitĂ© de lâislam : Les fĂ©rus de JĂ©hovah avec le fameux â je ne suis pas venu apporter la paix, mais la guerre â ou les visions hallucinantes de lâApocalypse ont alimentĂ© au cours des siĂšcles la longue sĂ©quence de conflits politiques et idĂ©ologiques sous couvert des croisades, un peu Ă lâimage de celle qui a ensanglantĂ© notre PĂ©ninsule durant mon enfance. Les messages de paix lĂ©nifiants livrĂ©s par les trois religions du Livre coexistent avec la brutalitĂ© quotidienne des systĂšmes inquisitoriaux et des rĂ©gimes oppresseurs. âLe manteau dâobscuritĂ© religieuse / jetĂ© pour voiler la tyrannie â, magnifiquement Ă©voquĂ© par le poĂšte Juan de Mena a Ă©tendu son ombre pendant des siĂšcles, ravageant la terre chrĂ©tienne jusquâĂ la signature du traitĂ© de Westphalie. De nos jours, le recours au Dieu justicier, lui aussi marchandisĂ©, agglutine des personnages aussi dissemblables, aux objectifs aussi divergents que le PrĂ©sident Georges Bush et Ousama Ben Laden. Mais ce qui importe, ce nâest pas le Texte, toujours contradictoire et objet dâinterprĂ©tations, ce sont les raisons pour lesquelles la violence virtuelle contenue dans ce dernier est soudainement rĂ©activĂ©e pour sâimposer avec une nettetĂ© implacable. Quels sont les mĂ©canismes qui dĂ©clenchent de tels basculements ? quel est le dispositif agissant comme dĂ©tonateur ? Pourquoi les aiguilles des horloges du troisiĂšme millĂ©naire se figent-elles brusquement pour se mettre Ă tourner, dans les cerveaux de certains individus ou groupes minoritaires, en arriĂšre Ă la fin du VII siĂšcle Ă contre-courant de la marche de la civilisation et de lâĂ©volution des mĆurs, Ă la fin du VII siĂšcle ? les causes sont plus complexes quâon ne pouvait le croire, elles sâexpliquent par une accumulation de raisons internes et externes quâil nous faut dĂ©chiffrer. 2. Ce quâon a convenu dâappeler islamisme aujourdâhui, existait dans les pays musulmans rĂ©cemment libĂ©rĂ©s du joug colonial Ă lâĂ©tat de phĂ©nomĂšne marginal dans les annĂ©es soixante : En ces temps des leaders du Tiers-monde tels que Nasser, Ben Bella ou Sukarno incarnaient le modĂšle politique majoritaire. Le wahabisme saoudien Ă©tait quant Ă lui pĂ©riphĂ©rique encore, le salafisme et la doctrine des FrĂšres musulmans manquaient des capacitĂ©s de mobilisation, en comparaison Ă celles du nationalisme laĂŻc et populiste du FLN algĂ©rien, au socialisme nassĂ©rien ou Ă lâidĂ©ologie baasiste primaire. DĂ©guisĂ© en grand seigneur arabe, la voyageur barcelonais Domingo BadĂa alias Ali Bey al-Abbassi, arabisant et agent de Godoy favori de Charles IV, a entrepris Ă lâaube du XIX un pĂ©riple Ă travers la PĂ©ninsule arabique qui lâa conduit Ă la Mecque et MĂ©dine. TĂ©moin de la victoire de BĂ©douins de Muhammad AbdelwahĂąb ; il avait prĂ©dit non sans raison que les idĂ©aux religieux et sociaux de ce dernier, rĂ©duits Ă la stricte observance de la Sharia, auront bien du mal Ă se propager dans les villes et les rĂ©gions musulmanes plus riches et plus avancĂ©es en raison du rigorisme de leurs prĂ©ceptes, incompatible avec les coutumes des nations ayant goĂ»tĂ© aux bienfaits de la civilisation. â De sorte que, concluait Badia, si les wahabites ne lĂąchent pas du lest et nâinflĂ©chissent pas la rigueur de leurs dogmes, il me paraĂźt impossible que leur doctrine puisse un jour sâĂ©tendre Ă dâautres pays situĂ©s au-delĂ du DĂ©sert â. Certes, Ali Bey ne pouvait pas deviner que dans les annĂ©es vingt du siĂšcle dernier, la dĂ©couverte des gisements pĂ©troliers allait transformer la dynastie fĂ©odale dâIbn SĂ©oud, pĂ©nĂ©trĂ©e des dogmes thĂ©ocratiques du wahabisme, en une grande puissance Ă©conomique, dont les pĂ©trodollars serviront Ă financer un grand nombre de mosquĂ©es, de medersas et de fondations pieuses Ă travers lâensemble des pays musulmans. La victoire Ă©clair dâIsraĂ«l en 1967, la disparition de Nasser et lâembargo pĂ©trolier de 1973, marquent en effet le dĂ©but dâun tournant radical avec la diffusion de la doctrine rigoriste saoudienne Ă travers le Maghreb, lâEgypte, le Soudan, le Pakistan, la Malaisie et la PĂ©ninsule indienne. La politique dâarabisation forcĂ©e prĂŽnĂ©e par BoumĂ©dienne, et lâappel massif qui sâensuivit aux enseignants originaires du Proche-Orient, formĂ©s dans le respect des prĂ©ceptes fondamentaux du wahabisme a eu, comme jâai pu le constater moi-mĂȘme au cours de mes voyages en AlgĂ©rie, des consĂ©quences insoupçonnables : lâarabisation Ă marche forcĂ©e a bel et bien Ă©chouĂ©, mais la graine de la doctrine rigoriste Ă pris racine au sein dâune population déçue par les choix prĂ©tendument rĂ©volutionnaires, brandis par lâoligarchie militaire, et confrontĂ©e Ă une situation Ă©conomique sans issue : bureaucratie, chĂŽmage, corruption, difficultĂ©s grandissantes pour Ă©migrer dans lâancienne mĂ©tropole. La victoire Ă©lectorale du FIS, le coup dâEtat militaire et la guerre civile qui a causĂ© la mort de 150.000 AlgĂ©riens et AlgĂ©riennes furent la consĂ©quence directe de cette dĂ©rive politico-religieuse perceptible dĂ©s la fin du rĂšgne du dictateur. Les milliers des jeunes qui criaient dans les stades vers la fin des annĂ©es quatre-vingt â rĂąna dĂąayĂźn, eddouna l-FalastĂźn ! â (« nous sommes foutus, envoyez-nous en Palestine ! ») allaient devenir la base aguerrie et vengeresse de lâavant-garde jihadiste. La mĂȘme chose, mais dans une moindre mesure allait survenir au Maroc. La toute-puissance du Makhzen, le discrĂ©dit jetĂ© sur les partis politiques manipulĂ©s par le tout-puissant ministre de lâintĂ©rieur Driss Basri pendant le rĂšgne de Hassan II, la misĂšre et lâabandon Ă leur sort des zones rurales et lâextension croissante des ghettos ceinturant les grands centres urbains, sont devenus des bouillons de culture des discours extrĂ©mistes diffusĂ©s dans plusieurs mosquĂ©es et lieux de priĂšre financĂ©s souvent par lâargent saoudien. MĂȘme si lâexpĂ©rience sanglante des voisins fut pour quelque chose dans la modĂ©ration du radicalisme des mouvements islamistes lĂ©gaux ou tolĂ©rĂ©s, la doctrine de Ben Laden nâen pas moins rĂ©ussi Ă recruter des nouveaux adeptes au sein des franges les plus dĂ©munies et dĂ©semparĂ©es de la population ; la majoritĂ© des membres du commando suicide ayant perpĂ©trĂ© lâattentat du 16 mai Ă Casablanca lâannĂ©e derniĂšre, sont originaires de Sidi Moumen, lâun des faubourgs les plus misĂ©reux des bidonvilles ceinturant la ville. Pour lâobservateur attentif des mutations sociales survenues au Maghreb et au Proche-Orient, lâengrenage mental qui Ă dĂ©clenchĂ© la mise en place du dispositif jihadiste sâĂ©tait mis en marche dĂšs le dĂ©but des annĂ©es quatre-vingt-dix, avec les consĂ©quences quâon pourrait aisĂ©ment deviner. 3. Quelques semaines aprĂšs lâattentat contre les tours jumelles, alors que je zappais Ă la recherche dâinformations, je suis tombĂ© par hasard sur un programme de la BBC, me semble t-il, dans lequel un â expert en terrorisme et islamologie â dĂ©crivait le profil ou le portrait robot des militants dâAl-Qaida rĂ©fugiĂ©s en Afghanistan : ils dĂ©fendaient tous la cause palestinienne, Ă©taient passĂ©s par la Bosnie, par lâAlgĂ©rie et par la TchĂ©tchĂ©nie. FlattĂ©, mais inquiet jâai dĂ©couvert inopinĂ©ment que je rĂ©pondais aux conditions requises du prototype de suspect idĂ©al. Mon nom figurait-il dĂ©jĂ – jâignore si câest une grĂące ou un chĂątiment – sur la liste des terroristes recherchĂ©s par Interpol ? Quâest ce qui peut conduire un Ă©crivain comme moi, la soixantaine passĂ©e, et dĂ©testant de surcroĂźt les aventures guerriĂšres, Ă intervenir en tant que tĂ©moin dans certains conflits parmi les plus durs qui ont agitĂ© la dĂ©cennie Ă©coulĂ©e, conflits dont les vicissitudes et les consĂ©quences sont encore visibles, dâune maniĂšre ou dâune autre, de nos jours ? La rĂ©ponse est trĂšs simple, le dĂ©sir de chercher la vĂ©ritĂ©, et si ce nâest pas LA vĂ©ritĂ©, quâelle soit au moins MA vĂ©ritĂ© des Ă©vĂšnements. Une vĂ©ritĂ© occultĂ©e par la gigantesque manipulation dont nous fĂ»mes tous victimes pendant la vidĂ©oguerre du Golfe : intox, trucages de photos, euphĂ©mismes obscĂšnes, informations passĂ©es Ă la trappe et communiquĂ©s neutres dâune brutalitĂ© insupportable. Au cours de mes trois voyages Ă Sarajevo assiĂ©gĂ©e, jâai pu vĂ©rifier la rĂ©alitĂ© dâune telle manipulation : un siĂšge moyenĂągeux avec des armes ultramodernes mis devant une ville europĂ©enne et cosmopolite, dont les habitants, sociologiquement musulmans, payaient pour lâĂȘtre un tribut monstrueux, un siĂšge menĂ© dans lâindiffĂ©rence de lâopinion publique occidentale. Peu lui importait que le gouvernement bosniaque dĂ©fende les valeurs dâune citoyennetĂ© fondĂ©e sur des credos diffĂ©rents contre lâinvocation de la puretĂ© de la race, du sang clĂŽt et des affronts sĂ©culaires brandis par Karadzic et ses sicaires. Comme dans le cas des terroristes de New York, de Bali, de Casablanca, dâIstanbul et de Madrid, les aiguilles des horloges sont revenues plusieurs siĂšcles en arriĂšre : Lâinvasion ottomane, la dĂ©faite de la bataille du Champs-des-Merles, le prince Lazare, la â destruction de la Serbie cĂ©leste â Ă©taient vĂ©cus comme des Ă©vĂšnement contemporains par les partisans dâun criminel, toujours en fuite mais proclamĂ© par lâEglise orthodoxe de son pays, fils Ă©lu du Christ. Le 14 juillet 1995, dans lâenclave de Srebrenica, thĂ©oriquement protĂ©gĂ©e par les Nations Unies, les tueurs de Mladic massacrĂšrent 7.000 musulmans bosniaques, soit plus que le double des victimes du World Trade Center, sans que personne nâintervienne ni ne fournit la moindre information sur ce qui se passait. Il a fallu attendre deux mois avant que la rĂ©alitĂ© de la tuerie ne soit rendue publique Ă travers le monde entier. GrĂące aux tĂ©moignages dâune demi-douzaine de rescapĂ©s recueillis Ă lâhĂŽpital Kosovo de la citĂ© assiĂ©gĂ©e, jâai pu briser ce silence dans lâarticle intitulĂ© (â Un dĂ©luge de feu sâest abattu sur nous â) paru dans El PaĂs du 24 aoĂ»t 1995. Les grandes agences de presse ne diffuseraient lâinformation que quinze jours plus tard. A supposer que la complicitĂ© ouverte de la Forpronu avec les assiĂ©geants â que jâavais dĂ©noncĂ© preuves Ă lâappui lors dâune rĂ©union organisĂ©e par le Monde Diplomatique â nâallait pas entraĂźner des rĂ©percussions sur la fracture dĂ©jĂ profonde entre les dĂ©mocraties occidentales et le monde musulman, elle nâen a pas moins constituĂ© un cas flagrant dâaveuglement et de politique de lâautruche. A lâaĂ©roport de Split, Ă lâhĂŽpital sarajĂ©vien et au siĂšge de lâassociation de bienfaisance saoudienne toute proche de la magnifique mosquĂ©e de la ville, jâai croisĂ©, avant lâhorreur et lâimpunitĂ© du gĂ©nocide, quelques moujahidĂźnes qui ont volĂ© au secours de leurs coreligionnaires assiĂ©gĂ©s. Comme nous le savons, la Bosnie fut le baptĂȘme de feu pour les quelques milliers de combattants accourus des tous les horizons de lâislam et qui, peu aprĂšs les accords boiteux de Dayton ont soit pliĂ© bagage et sont retournĂ© dans leur pays dâorigine, soit ont convergĂ© vers lâAfghanistan. Le mĂȘme scĂ©nario se produira en TchĂ©tchenie, dans cette petite rĂ©publique du Caucase, ou la barbarie quotidienne de lâoccupation russe sâexerce par la terreur et par la politique de la terre brĂ»lĂ©e. Au milieu des ruines de Grozny, les enlĂšvements et les disparitions des indĂ©pendantistes supposĂ©s ou rĂ©els constituent le lot quotidien de la population. La presse occidentale ne couvrait que sporadiquement le martyr endurĂ© par les TchĂ©tchĂ©nes. Au cours de mon sĂ©jour, je nâai rencontrĂ© quâune seul journaliste : il Ă©tait occupĂ© Ă filmer de loin les sinistres points de filtrage : il sâappelait Ricardo Ortega, rĂ©cemment assassinĂ© en HaĂŻti. Des contacts locaux, nouĂ©s par lâintermĂ©diaire de la correspondante du quotidien El Pais Ă Moscou Pilar Bonet, mâont informĂ© de la prĂ©sence de moujĂąhidĂźnes turcs et arabes rĂ©unis autour du charismatique chef guerrillero Chamil BassaĂŻev. Jâai demandĂ© Ă le rencontrer dans la rĂ©gion de Vedeno et de Bamut, mais les pluies torrentielles en ont dĂ©cidĂ© autrement. Depuis â huit ans environ â lâextermination sĂ©lective de la population se poursuit sans tĂ©moin : Poutine a rĂ©duit au silence les clameurs des victimes, et diluĂ© lâidentitĂ© des combattants tchĂ©tchĂšnes dans la â nĂ©buleuse du terrorisme international â. Plus tard, les enquĂȘtes rĂ©vĂšleront que certains parmi les auteurs du carnage du 11 mars Ă Atocha, se sont aguerris dans les montagnes du Caucase. Le dĂ©sir de revanche et lâappĂąt de rĂ©tributions ont brouillĂ© lâesprit de ceux qui, faute de sâen prendre aux vĂ©ritables coupables, se sont acharnĂ© froidement, sans misĂ©ricorde sur des citoyens innocents et exempts de toute responsabilitĂ© dans les horreurs dont ils Ă©taient tĂ©moins. Si nous ajoutons Ă cela les scĂšnes de violence insoutenable â chĂątiments collectifs, mur dâapartheid, meurtres ciblĂ©s dans les Territoires occupĂ©s quotidiennement retransmis par les tĂ©lĂ©visions arabes, nous aurons un tableau complet des circonstances â en rien attĂ©nuantes pour les crimes commis par Al-Qaida â qui rĂ©activĂšrent la violence virtuelle des rĂ©fĂ©rences coraniques dans lâesprit des kamikazes de New York, de Bali, de Casablanca et de Madrid. 4. je ne le rĂ©pĂ©terais jamais assez, lâ_expression fourre-tout de â terrorisme â renferme plusieurs significations et varie en fonction de lâangle â Ă©poque, lieu etc.. – quâadoptent ceux qui en font usage. Le rĂ©sistant français contre lâoccupant Ă©tait qualifiĂ© de terroriste par les Nazis, mais Ă la LibĂ©ration de la France par les AlliĂ©s, il est devenu hĂ©ros et martyr. Le mĂȘme phĂ©nomĂšne touche les groupes terroristes sionistes pendant le mandat britannique qui ont perpĂ©trĂ© un attentat Ă la bombe contre lâhĂŽtel King David, Ă JĂ©rusalem, provoquant la mort dâune centaine de personnes, il concerne aussi les hĂ©ros et les hĂ©roĂŻnes du FLN algĂ©rien Ă la signature des Accords dâEvian : les uns et les autres sont adulĂ©s comme des pĂšres de la nation en IsraĂ«l et en AlgĂ©rie. Câest en raison de cela que la comparaison inepte de lâex-ministre des Affaires Ă©trangĂšres Josep PiquĂ© entre le â terrorisme palestinien â et celui de lâETA, et lâassentiment sournois dâAznar au parallĂšle rĂ©voltant tracĂ© par Poutine entre les Etarras et les TchĂ©tchĂšnes mâont paru comme un cadeau inadmissible et trouble offert Ă la bande terroriste, devenu dâun seul coup comparable Ă ceux qui luttent dĂ©sespĂ©rĂ©ment pour la survie de leurs peuples. La rĂ©sistance armĂ©e Ă lâoccupant que ce soit en Palestine, en TchĂ©tchĂ©nie ou en Irak, nâest pas du terrorisme. Une chose est dâorganiser des attentats contre les militaires et les milices armĂ©es qui envahissent et occupent un pays, une autre est dâassassiner aveuglement des civils innocents. Ni les victimes des Tours jumelles, ni celles des sac Ă dos-bombes posĂ©s sous les siĂšges des trains dâAtocha nâavaient quoi que ce soit Ă voir avec lâappui inconditionnel de Bush Ă Sharon ou avec le portrait dâAznar souriant pendant le sommet grotesque des Açores. Pour ce qui concerne ce dernier cas, le peuple madrilĂšne avait manifestĂ© Ă plusieurs reprises avec dignitĂ© et courage son opposition Ă lâentrĂ©e de lâEspagne dans la coalition d’envahisseurs. Câest pour cela que la tragĂ©die nâen fut que plus odieuse et injuste. Le dĂ©rĂšglement mental de ceux qui se sont ensuite immolĂ©s au cours dâune apothĂ©ose suicidaire, est condensĂ© dans leur message saisissant : une Espagne ramenĂ©e Ă la splendeur dâal-Andalus et au temps du mythique TĂąriq Ibn ZiĂąd, et Ă son invasion tout aussi mythique â car les choses ne se sont pas passĂ©es comme on le croyait ! â qui sert de signal annonciateur dâun enfer de sang et de larmes dâune poignĂ©e dâhallucinĂ©s obstinĂ©ment accrochĂ©s Ă leur invraisemblable achronie. A prĂ©sent, la nĂ©cessitĂ© impĂ©rieuse dâanalyser les raisons de la crise sĂ©vissant dans le vaste et hĂ©tĂ©rogĂšne monde musulman qui se dĂ©ploie de lâAtlantique au sud de lâArchipel des Philippines, sâimpose avec force. 5. Depuis leur Ă©mancipation plus ou moins dans la violence de la domination coloniale, les peuples arabes ont Ă©tĂ© gouvernĂ© dâune façon continue par des rĂ©gimes fĂ©odaux-thĂ©ocratiques et par des dictatures implacables, souvent sanguinaires. Certaines se sont maintenues pendant des dĂ©cennies sans que les anciennes mĂ©tropoles, ni lâempire nord-amĂ©ricain Ă©mergeant ne disaient mot, dĂ©s lors que le statu-quo favorisait leurs intĂ©rĂȘts. Lâoccupation illĂ©gale de Gaza et de la Cisjordanie par les troupes israĂ©liennes, le despotisme du clan dâIbn Saoud, pour ne citer que ces deux exemples, nâont suscitĂ© aucune rĂ©action favorable Ă lâapplication des rĂ©solutions de Nations Unis ou Ă la dĂ©fense des droits humains. Alors que les dissidents de lâEurope de lâEst Ă©taient soutenus dans leur combat contre le systĂšme de type soviĂ©tique et reçus en hĂ©ros Ă leur sortie des prisons, les dĂ©mocrates arabes nâont jamais bĂ©nĂ©ficiĂ© du soutien de qui que ce soit. EmprisonnĂ©s, sĂ©questrĂ©s, exĂ©cutĂ©s, leur lutte ne leur a jamais valu lâappui solidaire accordĂ© aux Russes, aux Hongrois, aux Polonais et aux TchĂšques. Leur sort nâintĂ©ressait personne. Ce renoncement aux principes dĂ©mocratiques de la part de ceux qui ont le devoir dâĂȘtre Ă lâavant-garde dans leur dĂ©fense, nâa fait que renforcer les gouvernements thĂ©ocratiques et dictatoriaux et tuĂ© toute critique et rĂ©flexion, depuis longtemps bannies du champ politique et religieux. Lâanalyse rigoureuse de la crise par des intellectuels et des penseurs arabes de lâenvergure dâAbdallah Laroui, de Hichem DjaĂŻt, et dâEdward SaĂŻd en particulier, fut menĂ©e dans un contexte dĂ©favorable et nâa pu dĂ©boucher sur une autocritique efficace et porteuse sur ses origines, ni sur la modernisation des pouvoirs factices en place. Si nous ajoutons Ă cela les pesanteurs sociologiques des traditions oppressives, la discrimination envers la femme, le sous-dĂ©veloppement Ă©conomique, lâanalphabĂ©tisme etc., nous comprendrons mieux la voie de garage dans laquelle se sont engagĂ©s ces peuples Ă la dĂ©rive se sont pour lesquels seule la religion demeure lâissue salvatrice unique Au cours des annĂ©es quatre-vingt, la rĂ©islamisation sâest propagĂ©e au sud comme au nord de la MĂ©diterranĂ©e : dans les pays du Maghreb, au Pakistan, en Egypte et au sein de lâimmigration musulmane installĂ©e en Europe. Les difficultĂ©s dâadaptation aux nouvelles rĂ©alitĂ©s sociales, les prĂ©jugĂ©s racistes de certains secteurs des populations dâorigine, lâaugmentation du chĂŽmage, lâĂ©chec scolaire de la majoritĂ© des jeunes issue de lâimmigration, se sont conjuguĂ©s pour renforcer les rĂ©flexes de rĂ©sistance Ă lâintĂ©gration des groupes minoritaires avec tout ce que cela entraĂźne de claustration Ă lâintĂ©rieur des structures identitaires que Jean Daniel a nommĂ© Ă juste titre â prison â. Le temps historique sâefface alors pour laisser place Ă une sorte dâessentialisme atemporel, pareil Ă celui auquel sont cramponnĂ©s les juifs ultraorthodoxes et les extrĂ©mistes basques. La thĂšse de Huntington sur lâaffrontement des civilisations â amplifiĂ©e actuellement par ses attaques lancĂ©es Ă lâencontre de la communautĂ© hispanique dont la vigueur et lâexubĂ©rance constitueraient, Ă ses yeux, une menace pour la suprĂ©matie des WASP ( blancs anglo-saxons protestants) â a suscitĂ© Ă son tour des rĂ©actions plus viscĂ©rales encore que celles dâOriana Fallaci et ses prĂȘches apocalyptiques, en parfaite syntonie avec le message des suicidĂ©s de LeganĂ©s sur lâinvasion islamique, et sur lâimpĂ©rieuse nĂ©cessitĂ© dâune nouvelle croisade destinĂ©e Ă la contrer. Les parallĂšles historiques sont souvent trompeurs et pĂȘchent de toute maniĂšre par imprĂ©cision chaque fois quâil sâagit de manier les mots. Dans la situation dans laquelle nous vivons, il est inutile de recourir au langage thĂ©ologique, objet depuis longtemps dâinterminables controverses opposant les diffĂ©rents rites et Ă©coles juridiques ainsi que les 71 ou 73 sectes musulmanes dĂ©nombrĂ©es par Ibn Hanbal, jurisconsulte de la plus rigoureuse dâentre elles. Dans le cadre des Constitutions europĂ©ennes, nous devons parler en terme de droits et de devoirs, qui doivent ĂȘtre appliquĂ©s Ă©quitablement aux nationaux comme aux rĂ©sidents Ă©trangers. En ce qui concerne le monde musulman, la politique du nouveau Gouvernement de lâEspagne doit ĂȘtre lâexact opposĂ© de celle qui fut conduite par Aznar : rapprochement Ă©conomique et culturel avec le Maroc, soutien aux intellectuels et aux partis dĂ©mocratiques, abandon de la confrontation tatillonne Ă propos du problĂšme du Sahara (ex-espagnol), souplesse dans la signature des contrats de travail dont notre Ă©conomie a besoin, substitution dâune politique claire dâamitiĂ© et de coopĂ©ration Ă lâarrogance des va-t-en guerre. Pour ce qui concerne le Proche-Orient, il faut appuyer de concert avec lâensemble des pays de lâUnion europĂ©enne, une solution Ă©quitable au conflit israĂ©lo-palestinien et la dĂ©cision de retrait, confirmĂ©e par Rodriguez Zapatero dĂ©s sa prise de fonctions, de notre contingent militaire en Irak; une mesure qui nâest ni dâapaisement, dictĂ©e par la peur ni encore moins de reddition aux forces coalisĂ©es du nationalisme sunnite et des insurgĂ©s de lâArmĂ©e du Mahdi autoproclamĂ©e, comme les faucons de la Maison Blanche tentent de le faire croire dans le Wall Street Journal, mais une dĂ©cision obĂ©issant au plus Ă©lĂ©mentaire bon sens qui recommande de cesser de jeter de lâhuile sur le feu qui menace de sâĂ©tendre Ă tout le Moyen-Orient. Si on ajoute Ă cela lâaccord cynique passĂ© entre Bush et Sharon Ă propos de lâavenir des Palestiniens qui se fera encore une fois sur le dos des intĂ©ressĂ©s â parquĂ©s dans des bantoustans misĂ©reux et non-viables – et sur les meurtres ciblĂ©s des leaders de Hamas et qui sait, de Yasser Arafat lui-mĂȘme â terrorisme dâEtat contre terrorisme de bricole â nul besoin dâĂȘtre prophĂšte pour prĂ©dire le renforcement des rangs de MoujahidĂźnes et lâintensification des attentats en terre â croisĂ©e â et dans le monde musulman supposĂ© alliĂ© Ă lâOccident. 6. La distinction entre lâancien colonialisme anglo-français et celui impĂ©rial de lâactuelle superpuissance amĂ©ricaine est instructive Ă plus dâun titre. Lorsque les Français imposĂšrent leur Protectorat au Maroc, le marĂ©chal Lyautey avait une meilleure connaissance du pays que nâimporte quel Marocain, de sa religion, de ses coutumes, de ses lois et des institutions sur lesquelles il devait sâappuyer, et des ennemis quâil lui fallait combattre. Quelques dizaines de milliers de Britanniques avaient aussi rĂ©ussi Ă gouverner lâInde pendant deux siĂšcle en jouant habilement des rivalitĂ©s religieuses, ethniques et tribales⊠La dĂ©cision de Bush dâenvahir lâIrak, motivĂ©e par les intĂ©rĂȘts pĂ©troliers et encouragĂ©e par les fondamentalistes religieux et les nĂ©o-cons partait dâune ignorance absolue du pays (â libĂ©rĂ© â). la fabrication des mensonges et les manipulations de la Maison Blanche ont dĂ©bouchĂ© sans dĂ©lai sur une catastrophe programmĂ©e : spirale de violence, attentats suivis de reprĂ©sailles, dĂ©saffection croissante de la population, menaces continuelle de guerre civile et, in fine, la promesse dâun nouveau Vietnam. Les prĂ©tendus liens avec Al-Qaida du tyran dĂ©posĂ© manquaient de toute crĂ©dibilitĂ©. Dans lâIrak de Saddam, personne ne pouvait bouger le petit doigt sans que ses services de sĂ©curitĂ© omniprĂ©sents ne le sachent. Mais au bout dâune annĂ©e dâoccupation, le pays est devenu un vivier de violence en tout genre comme le fut avant cela lâAfghanistan. Le mirifique commerce pĂ©trolier se dissipe comme un mirage Ă cause de la guerre et de lâinsĂ©curitĂ© rĂ©gnante. La faillite est totale. Contrairement aux rĂȘves de grandeur et aux dĂ©lires mĂ©galomanes dâAznar, lâEspagne nâavait rien a gagner en allant en Irak, rien ne justifie donc le maintien de son armĂ©e Ă Diwaniya sous commandement militaire amĂ©ricain. La tĂąche de sortir le pays de la violence et lâentreprise de la reconstruction de lâIrak ne peuvent ĂȘtre conduite Ă bonne fin quâavec un mandat politique clair de lâONU. Vouloir Ă tous prix le contraire serait ajouter un nouveau maillon Ă la longue chaĂźne dâabsurditĂ©s inaugurĂ©e par la dissolution de lâarmĂ©e de Saddam et lâaccord tacite sur le pillage du MusĂ©e ArchĂ©ologique et le sac de la BibliothĂšque de Bagdad pendant que lâarmĂ©e amĂ©ricaine gardait jalousement le MinistĂšre de pĂ©trole. En clair, aprĂšs la phrasĂ©ologie religieuse de Bush sur â le bien et le mal, la libertĂ© et la servitude, la vie et la mort â nous avons dĂ©couvert au matin du 11mars que le futur de notre planĂšte est encore plus vulnĂ©rable et plus incertain quâavant lâinvasion de lâIrak. |
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* PubliĂ© aprĂšs les attentats de Madrid dans le quotidien Le Monde en date du 27 avril 2004, dans une version courte en raison des contraintes dâĂ©dition, cet article paraĂźt pour la premiĂšre fois dans son intĂ©gralitĂ©. Juan Goytisolo a reçu derniĂšrement Ă Mexico le Prix Juan Rulfo pour lâAmĂ©rique latine et les CaraĂŻbes pour lâensemble de son Ćuvre. Abdelatif Ben Salem est lâun des traducteurs de lâĆuvre dâessai de Juan Goytisolo. Il est par ailleurs membre du Conseil National Pour les LibertĂ©s en Tunisie. PubliĂ© avec l’aimable autorisation du traducteur |
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(Source: alerte de Sami Ben Abdallah dâaprĂšs le portail marocain âEmarrakechâ, le 18/03/2005)
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