Je suis à Damas ! Plus exactement au jardin de la résidence de l’ambassadeur   de Tunisie. On a réussi a capter un réseau wifi du palais du président Assad   qui se trouve de l’autre cote du mur.   Il fait chaud et y a des manifestation monstres dans les rues.   On part d’un moment a l’autre à l’aéroport destination Tunis ( arrivée prévue   a 19h30).       La journée d’hier fut très éprouvante…       Départ pour l’ambassade a 7h30. Le bus était déjà là… plusieurs personnes   sont arrivées dès 6h du matin. La traversée de Beyrouth fut émouvante ! le   passage sur les ponts encore non bombardé en fut le point d’orgue. Les rues,   avenues étaient vides. Complètement désertes. On dirait un couvre feu.       On passe devant plusieurs lieux bombardés. L’émotion en fut plus grande.       Le personnel de l’ambassade était fatigué mais très dévoué. Ils ont joué la   transparence. Chacun avait le choix de partir ou de ne pas le faire. Une femme   et deux de ses filles ont décidé de ne pas le faire ( très VIP pour prendre   des risques selon certains). Le reste du monde était partant.       Une attente… pénible a commencé. il est déjà neuf heures ! Plusieurs   personnes manquent à l’appel. D’autres tunisiens viennent d’appeler ! Que   faire ? Les attendre et prendre plus de risques? Ou les laisser tomber ! Le   groupe était solide mais stressé ! Allez, on attend encore plus !       10h30 ! Ca bombarde ! la tension monte ! surtout   qu’on n’est plus à la région sécurisée. Les autres tunisiens ne sont pas   encore là ! On va acheter à manger ! on essaye de sympathiser ! Le groupe   était formé de femmes enceintes, de bébés, de petits enfants sans parents, de   tunisiens ( jet set 😉 en vacances à Beyrouth, de tuniso-libanais et de   Libanais mariés a des tunisiens. Devant une telle détresse on finit par   s’oublier et ne plus penser à soi.       12h30 ! Ca y est les derniers sont arrivés ! Ils   venaient de Sour ( Tyr). Ils ont passé 6 heures sur les routes de montagne et   ont fini par rejoindre Beyrouth ( c’est une femme et 3 enfants). Un véritable   exploit sachant l’état des routes du sud et la fréquence des bombardements.       On prend le départ pour Damas. Personne de l’ambassade ne va venir avec nous.   Je me place à côté du chauffeur et j’essaye d’aider les petites filles et les   mamans sur place. On prend une route de montagne via Baabdet, Shoueir. La   route est vide au départ et puis est devenue très chargée. On commence à   descendre la montagne, la tension monte, la vallée du Beka3 a plus grand   risque d’attaque. On est découvert et une cible facile même si les routes du   Beka3 qui ont été bombardées l’ont été sans aucune perte humaine.       On arrive a Zahlé, plusieurs membres du groupe demandent une pause   casse-croûte et pipi. Le chauffeur qui était tout le temps en contact avec ses   collègues pour connaitre les routes à suivre nous arrête à Chtoura (Bombardée   3 heures plus tard). Une atmosphère nonchalante règne sur le groupe. Mes chers   compatriotes fument, boivent du café, mangent et plaisantent ! Il nous reste   50 Km à traverser ! On prend la route ! On passe à coté du cratère laissé par   le bombardement de la route de Damas et nous voila au poste frontière libanais   de masna3.       To be continued…       (Source : le blog de « Zizou From Djerba », le 17   juillet 2006 à 03h44 AM) URL: http://zizoufromdjerba.blogspot.com/
     Ivres de leur puissance, les dirigeants israéliens actuels pensaient être   capable de redessiner la carte géopolitique de la Palestine et imposer leur   vision de ce conflit, via une pax hebraica en bonne et due forme. Patatras,   échec de cette vision unilatéraliste. Explications.      Si Sharon est encore à l’article de la mort – pour cause de coma profond et   irréversible –, le sharonisme, lui, est encore à l’œuvre en Israël. Sauf que   les héritiers, manquant de légitimité et d’autorité, sont lancés dans un   concours d'(hyper)puissance pour montrer au peuple de la région qu’en matière   d’asymétrie, l’Etat hébreu doit détenir le pouvoir absolu. Mais ce pays est en   train de tomber dans son propre piège. De quoi s’agit-il ? Après l’échec du   processus d’Oslo, censé conduire à la paix, les dirigeants israéliens se sont   laissés, progressivement, gagner par cette conviction qu’en l’absence   d'”interlocuteur valable”, du côté palestinien, Israël doit “tracer”   unilatéralement son chemin. Cette culture de l’unilatéralisme s’est forgée à   partir de deux conditions incitatrices : l’extraordinaire et unique appui de   l’Administration Bush – un tel soutien ne s’est jamais produit à ce point dans   l’histoire des Etats-Unis –, et puis, la construction du “mur de séparation”,   lequel va installer définitivement Israël, avec Ariel Sharon en architecte en   chef, dans cet état d’esprit. En effet, pour ce pays, le monde arabe n’existe   plus et ne représente plus une menace, au moins pour les cinquante ans à venir   (1). Tirant les leçons de ce rapport de force, et profitant du contexte   géopolitique régional, Ariel Sharon réactualise ainsi ses plans et renvoient   aux calendes grecques toute idée de l’Etat palestinien. De ce point de vue,   l’évacuation des colonies du Gaza et le redéploiement des implantations des   colons en Cisjordanie préfigurent ses choix et confirment cette orientation.   La disparition d’Ariel Sharon de la scène politique ne modifiera en rien cette   doctrine totalement adoptée et défendue par l’institution militaire et les   services de renseignement. Au cœur de cette équation doctrinale, deux hommes –   Dan Halutz, chef d’état-major, et Yuval Diskin, chef des services de sécurité   – mènent du bout du nez Ehud Olmert et son gouvernement. L’imprimatur   politique n’est qu’un habillage. En définitive, ce sont eux le vrai pouvoir.     Ivres de leur puissance, les dirigeants israéliens actuels pensaient être   capable de redessiner la carte géopolitique de la Palestine et imposer leur   vision de ce conflit, via une pax hebraica en bonne et due forme.   A quoi cependant a-t-on assisté ces derniers jours ? Depuis l’installation du   Hamas au pouvoir, le 29 mars dernier, l’Etat hébreu avait accéléré l’exécution   de ses plans : l’asphyxie politique du nouveau pouvoir palestinien. On peut,   sans la moindre hésitation, critiquer, regretter ou déplorer ce choix. Mais,   ce dernier, se doit-on de dire, s’est fait électoralement et démocratiquement…   par le peuple palestinien.    Et bien, non, cela n’est pas du goût d’Israël qui n’a pas perdu une seconde   pour “délégitimer” cette autorité, en entreprenant une vaste guerre   psychologique pour “isoler” internationalement le Hamas, et en poursuivant  la   politique des assassinats ciblés des dirigeants de ce mouvement.   En lançant son opération “Pluie d’été”, le 28 juin dernier, suite à une   audacieuse action militaire contre des soldats israéliens, les dirigeants de   l’Etat hébreu révèlent à quel degré ils tiennent pour “quantité négligeable”   les Palestiniens. Les moyens militaires utilisés – chars, aviation, missiles,   drones, et toute la panoplie sophistiquée de l’armada israélienne – visent à “choquer   et séduire” l’ennemi pour qu’il ne recommence plus jamais. Sauf que dans cette   volonté de rétablir son “pouvoir de dissuasion”, Israël met à nu, sans presque   se rendre compte, la négation de cet autre palestinien. Et, c’est loin d’être   une figure de rhétorique ! Toutes ces dernières semaines, l’aviation et les   missiles “ciblent” systématiquement la destruction des infrastructures civiles   – centrale électrique, routes, ponts, ministères, usines, réservoirs de   carburant, etc.- sans bien évidemment parler des frappes militaires au milieu   de la population civile, laquelle vit, ces derniers mois, au bord de la famine.   Cette situation n’émeut plus personne. Toutes les bonnes consciences – les   intellectuels moralisateurs et vigie de la barbarie humaine – ont   mystérieusement déserté les colonnes de journaux, et se sont carrément tus. Ce   qui explique bien le parti pris et l’attitude sélective en matière   d’indignation publique, particulièrement en France et aux Etats-Unis. Seuls   quelques Israéliens humanistes et courageux dénoncent, dans la presse, la   course vers l’abîme de l’Etat d’Israël.   Devant tant de violence accumulée et intériorisée en Palestine, comme toujours   dans cette aire hyperinflammable, c’est la région qui est en train de prendre   feu, après l’opération du Hezbollah contre des militaires israéliens. On peut   exprimer toutes sortes d’opinion sur l’opportunité ou non de cette action.   Mais, là encore, Israël, fidèle à son dogme – un coup porté, mille donnés en   retour – se déchaîne sur le Liban en détruisant l’essentiel de ses centres   vitaux. Sans que personne ne bouge ou dénonce ce comportement d'”enfant gâté”.     Bien évidemment, la morale en géopolitique, et particulièrement dans sa   version militaire, n’a guère sa place ici. Le cynisme et le froid calcul sont   la règle dans ce type de situation. Mais il n’empêche, l’usage disproportionné    de la force par Israël – et c’est un euphémisme – montre que les dirigeants de   ce pays ne sont plus dans le réel.    Dans ce déploiement de forces, les militaires israéliens “délivrent” leur   message, marquent les lignes rouges et préemptent les termes des discussions   politiques à venir. Les tout prochains jours vont nous permettre de voir la “profondeur   stratégique” de l’opération israélienne et comment ce pays souhaite rebattre   les cartes Hamas, Hezbollah, Syrie, Iran.   Malgré sa suprématie absolue, Israël croit qu’on peut gommer aisément la   résistance du peuple palestinien ou faire l’impasse sur lui. L’enfer que vit   ce dernier est moralement inacceptable. Il y a, dans cet aveuglement israélien,   une dimension suicidaire, parce qu’elle est bâtie sur l’autisme et la négation.   L’ethnocentrisme qui enferme ce pays est en train de se transformer en “prison   juive” (2). Qui chassera ces vieux démons de la tête des dirigeants actuels   d’Israël ? Le moment de vérité est arrivé !                 Hichem Ben Yaïche   benyaiche@hotmail.com    (1) Les Arabes n’ont apparemment plus aucune prise sur   les événements. Leurs difficultés actuelles d’agir et de trouver une position   commune confirment le jugement israélien.     (2) Lire à ce propos le livre de Jean Daniel “Prison juive” (Ed. Odile   Jacob).         Autre introduction possible   Les moyens militaires utilisés – chars, aviation, missiles, drones, et toute   la panoplie sophistiquée de l’armada israélienne – visent à “choquer et à   séduire” l’ennemi pour qu’il ne recommence plus jamais. Son pouvoir de   dissuasion tient à ce dogme. Explications.
  
 
A propos     de cette annonce de Tunisnews du 16 juillet 2006
 
     
 
 
 Biju  
  UNE VIDEO INTITULEE « TUNISPOLICE » SUR le site bien connu     www.youtube.com     A VOIR ABSOLUMENT !!!     Tunisian policemen is doing his work….     http://www.youtube.com/watch?v=oHK39S2sxAU           « Oui l’unanimisme des fois est toujours vecteur des pires conneries,il     n’y’a pas à applaudir ces dérives sensationnalistes de la pire espèce, c’est     beauf et poujadiste , mesquin à vomir. Ce pauvre con est un flic corrompu et     tout ce que l’on veut, c’est un voleur, un tortionnaire, une crapule, mais     le fond du problème reste le même c’est un pauvre imbécile qui s’est fait     stupidement piégé et je ne vois vraiment pas l’intérêt ou la victoire de     foutre ce genre de sous-fifre dans la merde, c’est une mentalité et une     morale qui est du même niveau que celle des sicaires du régime, ok on a     rigolé un bon coup, ce type le moindre mal qui puisse lui arriver c’est de     perdre son taf et le pain de ses enfants, je dis bien le moindre mal et     c’est très cher payé sur le plan humain pour ces trois secondes marrantes     certes mais irresponsables et stupides, parce qu’elles sont de la même     facture que les pratiques du système.je disais que la perte du boulot pour     cet imbécile est le moindre mal , mais qui peut garantir qu’il ne passe pas     en conseil de discipline et de se retrouver à Borj Erroumi pour un bon bout     de temps ? Qui peut le garantir? Et quel point on aurait marqué contre la     dictature ? Franchement le racolage et la multiplicité des discours de     certains finiront par désespérer tous les bouges tunisiens, là où se     trouvent des milliers comme ce connard qui danse et qui sont somme toutes     que des victimes et des otages de ben Ali. Espérant seulement que cet idiot     s’en tirera bien, ce qui vraiment m’étonnerait dans cette logique où la     dictature panique sur tout. J’espère aussi avec toute humilité que les     responsables de ce site que je respecte vraiment ont calculé les     conséquences d’un aussi dramatique dérapage, qui en tout état de cause est     plus que nuisible, et n’honore pas ses auteurs. »           C’est ce que j’avais écrit le 16 janvier 2006 lors d’un débat sur cette     vidéo sur le forum Taht Essour de NAWAAT, car cette vidéo  fut mise pour la     première fois en ligne  sur ce site  par un forumier  et aidé techniquement      par d’autres personnes. (http://www.nawaat.org/forums/index.php?showtopic=10361).           Ce qui me choque encore plus quand à sa diffusion avec autant de retard par     Tunisnews qui ne doit absolument  pas s’abaisser à ce genre de racolage     indigne, le combat  pour la démocratisation de la Tunisie est au-dessus  de     cette forme de désespoir et la fin ne justifie jamais les moyens, surtout     qu’en la circonstance,  la fin, le but atteint est plus que négatif sur le     plan de la stratégie et sur le plan encore plus important de la morale     publique.           Après nos protestations un cache fut mis  sur le visage de ce pauvre crétin     de flic suicidaire, mais c’était trop tard le mal était fait, les services     de ben Ali avaient eu tout le temps nécessaire pour localiser ce pauvre     crétin et lui faire sûrement  son affaire, ce qui est plus que sûr;  et même     en faire un cas d’école  pour  ses collègues de l’appareil répressif ,  pour     glorifier le système paternaliste et reconnaissant envers ceux qui le     servent ,   et faire des opposants  des individus irresponsables et faibles.     Comme par hasard il y a un mois  un site tunisien  confidentiel  qui joue au     légataire testamentaire avait remis cette vidéo en circulation comme si     c’était un scoop et l’affaire du siècle !            Et à ma très grande surprise voilà qu’aujourd’hui au delà de toute éthique,      l’excellent TUNISNEWS se mette de la partie et n’hésite pas de  procéder de     cette façon indigne. Ce n’est pas en jettent un pauvre flic en pâture  qu’on     réussira  à démonter la dictature,cette dernière aimerait nous fixera ses     contradictions  et nous isoler de ses forces,  qui loin de là et je n’ai     aucune peine à le croire ,ne  lui sont pas acquises corps et âme dans leur     majorité ,tous ces bidasses , tous ces gendarmes et tous ces flics sont     avant tout des tunisiens , fils du peuple  et qui ne méritent pas dans leur     immense majorité ni mépris ni haine gratuite, aucun doute là-dessus ce genre     de vidéo aide amplement la propagande de ben Ali et ses sicaires .            Je crois sincèrement que la différence entre les démocrates et  la dictature     se jouera aussi sur ce genre de détails, cette vidéo qui « suicide »     inhumainement un imbécile parmi les milliers de ses semblables qui sont au     service de la dictature par nécessité alimentaire, j’en suis certain ,a     motivé encore plus ses collègues témoins de ses malheurs pour réprimer et     considérer tous les opposants tunisiens comme des ennemis mortels , je     dirais même que cette vidéo  aussi ignoble que celles pornographiques de ben     Ali, car elle est plus qu’inutile , elle est criminelle dans le subconscient     collectif des tunisiens produit l’effet contraire de ce que d’aucuns      primaires attendent d’elle, si nous aussi ,si  notre camp n’est plus capable     d’humanité , de lucidité  et de pragmatisme , notre combat est vain, ben Ali     a gagné sur tous les plans, en usant les mêmes méthodes que lui  nous      devenons ses semblables et chez moi on dit que ceux qui se ressemblent     s’assemblent. Cette vidéo ne change rien au système mais quelque part elle     assassine un individu isolé,  et psychologiquement,  « instruit » ses     collègues quant à la véracité du discours liberticide de la dictature qui     fait de tous ses opposants des traîtres à la patrie. Encore une fois  nous     n’avons rien à gagner dans ce genre de militantisme de bricolage, de     suffisance, de facilité et de médiocrité.           La vidéo de l’AISPP  est un chef d’œuvre car sans tomber dans le  pathos      elle démontre l’âme sombre d’un système qui détruit notre nation et qui     donne naissance à des mutants  qui se limitent aux bas instincts, comme ce     débile de flic ou plus encore ceux qui se croient plus intelligents que lui,     ceux  qui ont tourné cette vidéo sans protéger l’individu aux dépens du     système, ceux qui l’ont  produite et diffusé sans aucune rigueur morale  ni     humanisme, en fait ils ont utilisé les mêmes et horribles pratiques      pédagogiques du tout au sensationnalisme et la mise en scène et qu’importe     les dégâts sur le plan humain, ils chassent l’ombre et non la proie, ils     pratiquent en quelque sorte une forme de délation  nuisible  à laquelle sont     réduits des millions de tunisiens, et qui est une des sources, voire la     source  la plus importante de la survie de la dictature.
     
     
Réponse de la rédaction de TUNISNEWS :
      
 
 Nous respectons parfaitement le point de vue de M.     Biju mais nous estimons qu’il fallait montrer cette vidéo à nos lecteurs. Il     se peut que ce policier soit sanctionné ( juste lui tirer les oreilles) par     ses supérieurs mais il se peut aussi qu’il soit même récompensé… En fait, il     a donné la preuve à ses chefs et au monde entier qu’il est un pur produit de     l’Ere nouvelle et un vrai représentant « officiel » de la Tunisie qui Chante     et Danse…  
Interdisez … interdisez…
     
 Par Zyed Krichen           En Occident, l’invention de l’imprimerie a été une grande avancée pour la     liberté de pensée. La parution du livre a permis la généralisation     progressive du savoir et de la contestation de l’ordre établi. La technique     et la liberté semblaient aller de pair.            Il faut croire que chez nous c’est l’inverse qui s’est produit.     L’introduction de l’imprimerie au milieu du XIXème siècle et la     généralisation de l’écrit au début du XXème siècle ont pourchassé des zones     de liberté de pensée.            La longue liste de la censure au nom de l’Islam (voir notre document en page     20) de 1925 à nos jours laisse rêveur. De la philosophie au cinéma en     passant par la littérature et les arts, aucun genre n’a été épargné. Aucune     violence aussi. De l’interdiction d’une œuvre à la condamnation à mort d’un     penseur on aura vu, en terre d’Islam, toutes les horreurs de l’obscurantisme.     Pour une civilisation du livre, c’est le paradoxe absolu. Pourtant, et sans     magnifier le passé, les trois premiers siècle de l’Islam, qui ont vu l’âge     d’or de sa civilisation, n’ont connu rien de tel. Les pouvoirs politiques     ont assassiné des dissidents et des révolutionnaires; mais on n’a jamais     assisté à des autodafés de livres et la liberté de pensée n’a jamais aussi     grande. Le débat philosophique et théologique n’a fait l’économie d’aucun     sujet brûlant: de la véracité de la prophétie à la nature même de la     divinité, toutes les doctrines avaient des défenseurs, des tribunes et des     leaders…            Que dire de la liberté joyeuse de la littérature arabe? On pouvait tout dire,     tout écrire tout chanter… de l’amour des femmes, du sexe, du vin et même     des garçons… de la raillerie du sacré et de la dévotion… L’âge d’or     était aussi celui d’un certain dandysme éclectique et raffiné que nous a     admirablerment rapporté Abou Hayane Attaouhidi.            A voir certaines images à la Télévision et à lire cette liste immonde de la     censure, on pourrait penser que l’Islam n’a produit que fanatisme et     intolérance.            A cette liste on pourrait ajouter une autre tout aussi longue, sinon plus,     des livres du patrimoine musulman interdit aujourd’hui en terre d’Islam.            Certains pays n’aiment pas du tout les philosophes. Ibn Rochd (Averroès),     Ibn Sina (Avicenne), Al Farabi, Ibn Baja et d’autres sont toujours prohibés     dans certains pays, sans parler de Zakaria al Razi, considéré comme un     irrévérencieux athée…            Cette géhenne des livres concerne aussi les théologiens. Les fleurons de     l’Ecole rationaliste (Mutazila) ne sont plus diffusés dans certains pays.     Même Al Ashâri, pourtant l’un des principaux théologiens de l’orthodoxie     sunnite, est considéré comme un déviant rationaliste et donc interdit     d’édition…            Quant à la littérature, il serait plus court de citer les ouvrages permis et     licites tant la liste de l’interdit est longue.            Cela touche même de grands pays comme l’Egypte et les œuvres maîtresses de     notre culture comme “Les mille et une nuits”. Abou Nawas, Bachar Ibn Bord,     Al Asfahani, Al Maâri et des centaines d’autres sont interdits de librairie     au XXème siècle.            Même les livres de l’historiographie musulmane sont suspects dans certains     pays. On médit du Grand Tabari, non dans un esprit de critique historique,     mais parce que l’on considère que certaines de ses narrations sont trop     osées et qu’il aurait dû les taire.            Ainsi ce tableau noir de la censure, qui mérite d’être complété et mis à     jour, ne concerne pas uniquement les créations contemporaines mais, aussi,     tout un pan de notre patrimoine.            Le fait que notre pays, aujourd’hui, soit épargné par ces pratiques d’un     autre âge ne doit pas occulter le danger que représente cette régression     intellectuelle.            Les Chinois —qui ont désormais la cote en ce début du XXIème siècle— disent     : “mieux vaut allumer un cierge qu’insulter l’obscurité”.            (Source : « Réalités » N° 1072 du 13 juillet 2006)
La censure au nom de l’Islam
     
 Ryadh Fékih           Depuis l’interdiction, en 1925, du livre ‘‘Islam et principes de     gouvernement’’ du cheikh d’Al-Azhar Ali Abd ar-Raziq, où ce dernier     proposait la séparation entre la religion et l’Etat, un principe de bonne     gouvernance adopté par l’humanité un siècle plus tôt, on ne compte plus,     dans le Monde musulman, les cas de censure religieuse, qui va de     l’interdiction de diffusion au bannissement, à l’emprisonnement voire à     l’exécution pure et simple.           C’est pour protester contre cette forme de censure, souvent exercée aux     prétextes d’atteinte à l’Islam, d’“humiliation” du Prophète ou de Dieu ou     d’infraction à la charia, que nous avons jugé utile d’inventorier, ici, tous     les cas d’atteinte à la liberté de pensée qui, de 1925 à nos jours, ont été     enregistrés dans le Monde musulman ou ont été attribués à des Musulmans aux     quatre coins du monde.           La liste, établie selon un ordre chronologique, est aussi longue que les     victimes de l’intolérance religieuse en pays d’Islam sont nombreuses. Elle     peut paraître exhaustive, elle n’est certainement pas complète. Aussi     invitons-nous nos lecteurs à la compléter, si nécessaire. Nous espérons     cependant qu’elle finira par s’arrêter. Inchallah !           Il faudra pour cela que nos sociétés respectent davantage la liberté de     pensée et promulguent des lois qui la protègent contre les “imams     sporadiques, ou un illettré coranique fatwatant”, selon l’expression du     psychanalyste tunisien Fethi Benslama.                       1925 :           – Le cheikh d’Al-Azhar Ali Abd ar-Raziq est radié de l’Université et     interdit de publication par ses pairs pour avoir proposé une séparation     entre la religion et l’État. Son livre incriminé, ‘‘Islam et principes de     gouvernement’’ est interdit pour hérésie.           1926 :           – Interdiction du livre de Taha Hussein ‘‘La poésie pré-islamique’’.     L’écrivain est expulsé en 1931 de l’Université par le ministre de     l’Education pour son interprétation trop rationaliste de la littérature     pré-islamique et du texte coranique.           1946 :           En Iran, l’historien, juriste et linguiste Ahmad Kusravi est accusé     d’incroyance par le groupe terroriste Fida’iyyani Islam. Il est assassiné,     en mars, au prétexte d’une fatwa pour hérésie.           1973 :           En Algérie, le poète Jean Sénac est assassiné par des islamo-nationalistes.           1975 :           Au Maroc, le 18 décembre, Omar Benjelloun, leader de l’Union socialiste des     forces populaires (USFP) et directeur du journal ‘‘Al-Mouharrir’’, est     poignardé à mort par un groupe faisant partie de ‘‘La Jeunesse islamique’’.           1977 :           En février, le président de l’Université de Damas, en Syrie, est assassiné     sur le campus par des islamistes.           1981 :           – En Egypte, le livre de Fikri Al Aqad ‘‘Histoire de la langue arabe’’ est     interdit. L’auteur écrivait que certains mots du Coran étaient d’origine     égyptienne.           1982 :           – Ata Nourian, homme de lettres et membre de l’Union des écrivains iraniens,     est exécuté en raison de ses convictions politiques anti-islamistes.           1984 :           – En Iran, Ali Dashti, auteur d’un livre très critique envers l’Islam, meurt     en prison de mauvais traitements à 83 ans.           1985 :           – En Janvier 1985, au Soudan, l’écrivain Mahmoud Mohammed Taha est condamné     à mort et pendu à Khartoum,. a plus de 80 ans. Il avait écrit un livre sur     l’histoire de l’Islam où il défendait l’idée de séparation du politique et     du religieux (traduit en français sous le titre ‘‘Un Islam à vocation     libératrice’’, éd. L’Harmattan, Paris, 2002). L’auteur défendait aussi     l’idée que le message spirituel du Prophète, tel qu’il fut révélé à La     Mecque, est universel, mais que toute la construction juridique élaborée à     côté, dans un contexte historique précis, n’était plus en phase avec la vie     des Musulmans aujourd’hui.           – La même année, le tribunal des mœurs du Caire condamne à la prison     l’éditeur et l’imprimeur des ‘‘Mille et Une Nuits’’ pour atteinte à la     pudeur et pour corruption des mœurs des jeunes. Le tribunal ordonne la     destruction de 3.000 exemplaires saisis de ce monument de la littérature     populaire, ainsi que l’emprisonnement de l’éditeur et de l’imprimeur.           1987 :           – Autodafé à l’Université d’Ispahan, en Iran : 80.000 livres jugés     attentatoires à l’Islam sont brûlés.           1988 :           – Un livre est publié en Arabie Saoudite qui jette l’anathème sur plus d’une     centaine d’écrivains arabes, morts ou vivants, accusés de scientisme,     d’apostasie sinon de haine de l’Islam: Salama Moussa, Shibli Shmmayyil,     Naguib Mahfouz, Lofti as-Sayyid, Muhammad al-Jabiri, Shakir Shakir, Saïd Aql,     Adonis etc. Ces auteurs sont toujours interdits dans le royaume wahhabite.           1989 :           – Le 14 février, le roman de Salman Rushdie, ‘‘Les Versets sataniques’’, est     déclaré blasphématoire par l’ayatollah Rouhallah Khomeyni, guide de la     République Islamique d’Iran, qui appelle au meurtre de l’auteur ainsi que     tous les éditeurs du roman. Trois millions de dollars sont offerts en     récompense à celui qui donnera la mort à Rushdie (un million seulement si     c’est un non-Iranien).           La vie de l’écrivain indien sera, pendant des années, celle d’une bête     traquée. Il a cependant la chance de bénéficier de la protection de la     police de la Grande-Bretagne, son pays d’adoption. Ses traducteurs italien     et japonais, moins chanceux, seront tués, respectivement, à Milan et à     Tokyo, en 1991. Le recteur de la Mosquée de Bruxelles et son adjoint sont     tués, à leur tour, sur les ordres des services de renseignement iraniens, le     29 mars 1989. Leur crime : ils voulaient trouver une issue théologique à la     fatwa, en déclarant simplement que Rushdie devait être jugé et se repentir     comme l’exige la juridiction islamique concernant la loi sur le blasphème et     l’apostasie.           Le livre a fait l’objet d’autodafés au cœur même de l’Europe. Des émeutes à     Bombay, en Inde, contre le livre, font douze morts en février 1989. En 1993,     des intellectuels et des poètes alévis et kurdes sont brûlés vifs dans     l’incendie d’un hôtel à Sivas, en Turquie, où une réunion se tenait avec le     traducteur des ‘‘Versets sataniques’’. Le dessinateur satiriste Asaf Koçak,     militant des Droits de l’Homme et adversaire des islamistes, y trouve la     mort.           La fatwa contre Rushdie est toujours en cours parce que déclarée irrévocable,     le seul pouvant l’abroger, Khomeyni, étant mort.           “L’appel au meurtre contre Rushdie a ouvert une jurisprudence par laquelle     il est devenu loisible à n’importe quel imam spontané de prononcer une     sentence de mort à l’encontre de n’importe quel intellectuel supposé     musulman renégat, n’importe où dans le monde ”, fait remarquer, à juste     titre, Fethi Benslama.           – En février de cette même année 1989, les écrivains iraniens Amir Nikaiin,     Monouchehr Behzadi, Djavid Misani et Abutorab Bagherazdeh sont exécutés. La     même année, deux poètes iraniens sont aussi exécutés : Saïd Soltanpour et     Rahman Hatefi. Tous pour leurs idées libérales jugées attentatoires à     l’esprit et à la lettre de l’Ilam.           1990 :           – En Egypte, Nasr Hamed Abou Zeid, professeur d’Université, qui a “commencé     à penser l’Islam de l’intérieur et à présenter une voie profondément     réformiste” (l’un des ouvrages, ‘‘Critique du discours religieux’’, a été     traduit en français, éd. Actes Sud, Sindbad, Paris 1999), est menacé de mort     par les islamistes pour avoir voulu historiciser le Coran.           1991 :           – En 1991, au Soudan, Ajjabna Mohammed est accusé d’apostasie et renvoyé de     l’Université. Rejeté par sa famille, il tente de s’enfuir. En prison, il     subit des tortures pour revenir à l’Islam.           1992 :           – En janvier, une délégation de savants d’Al-Azhar demande la saisie de huit     publications traitant de l’islam.           – Le 8 juin, l’écrivain Farag Foda, quarante-sept ans, est criblé de balles,     qui atteignent également son fils Ahmad, quinze ans, et un ami de ce dernier.     Quelques jours auparavant, l’intellectuel laïc avait été déclaré “apostat”     par le cheikh de la mosquée d’Al-Azhar au Caire. Les universitaires     d’Al-Azhar condamnent certes, les conditions du meurtre de Foda, mais ils     estiment aussi qu’il était un apostat, et qu’il méritait une mort légale.     Son assassinat est revendiqué par Al-Gamaa al-Islamiya (Groupe islamique).     En décembre de la même année, ses œuvres, rééditées en hommage, sont     interdites et saisies, sur ordre d’Al-Azhar et “au nom de l’Islam, religion     de l’État”.           – Le 3 septembre 1992, sur la grande place de la ville de Qatif, en Arabie     Saoudite, le poète Sadiq Melallah a été décapité au sabre par les autorités     de ce pays, pour crime de blasphème et d’abjuration.           – Freydoun Farrokhzad, poète et homme de spectacle iranien, est assassiné en     Allemagne, en raison de ses activités artistiques considérées comme     blasphématoires.           1993 :           – En Algérie, l’année est particulièrement mortelle pour les écrivains,     journalistes, universitaires et artistes. Parmi les victimes, assassinées     pour la plupart par des activistes islamistes, on citera Tahar Djaout (écrivain     et rédacteur en chef du magasine ‘‘Ruptures’’), Djilali Liabès (sociologue),     Ahmed Asselah (directeur des Beaux-Arts), M’hamed Boukhobza (sociologue),     Salah Djebaïli (recteur de l’université Bab-Ezzouar à Alger), Youssef Sebti     (poète et écrivain), Abdelkader Alloula (dramaturge et metteur en scène),     Mahfoudh Boucebci (psychiâtre), Salah Chouaki (inspecteur de l’Education     nationale), Azzedine Medjoubi (dramaturge), Dilalli Belkhanchir (pédiatre),     Abderahmane Faredeheb (économiste), Ferhat Cherkit, Youssef Fathallah,     Lamine Lagoui, Ziane Farrah, Abdelhamid Benmenni, Rabah Zenati, Saad     Bakhtaoui, Abderrahmane Chergou, (journalistes)… Et la liste est     malheureusement longue. Merzag Baghtache, journaliste et écrivain, a plus de     chance : il est “seulement” blessé dans un attentat.           – En Iran, un dessinateur satirique, Manouchehr Karimzadeh, est condamné à     dix ans de prison pour avoir dessiné un footballeur dont le visage     ressemblait vaguement à celui de Khomeyni. Le directeur du journal est     fouetté, de même que le dessinateur. Les peines ont ensuite été réduites.           – En Arabie Saoudite, une bande dessinée publiée dans ‘‘Arab News’’ provoque     l’arrestation de deux employés indiens. Selon les théologiens, elle     remettait en cause l’existence de Dieu. Les deux hommes sont condamnés à 300     et 500 coups de fouet. Sous la pression internationale, ils sont pardonnés     par le roi.           – Toujours en Arabie saoudite, en mai, le professeur M. Al Awaji,     intellectuel réformateur, est condamné à quatre ans d’emprisonnement, démis     de ses fonctions et son passeport confisqué.           – Le 24 septembre, un groupe d’islamistes du Bangladesh prononce une fatwa     contre Taslima Nasreen, la condamnant pour blasphème. Sa tête est mise à     prix. Sous la pression des manifestations islamistes, un mandat d’arrêt est     lancé contre elle en juin 1994. Médecin, écrivain, auteur notamment de     ‘‘Rumeurs de haine’’, ses chroniques dans la presse, ses critiques de la     condition faite aux femmes, de la religion et du pouvoir religieux, puis son     livre ‘‘Lajja’’, paru en 1993, qui relate les exactions contre la minorité     hindoue au Bangladesh au nom d’Allah, provoquent la haine des     fondamentalistes musulmans. Lors du Salon du livre de Bangladesh, ses livres     sont brûlés en public. Un comité “Détruisez Taslima” est mis en place. Elle     n’a plus le droit de se rendre au Salon du Livre. Les fondamentalistes     détruisent les librairies qui vendent ses livres. Après une campagne de     haine sans précédent, le gouvernement confisque le passeport de l’écrivain     et lui ordonne de cesser d’écrire si elle veut garder son poste de médecin     dans un hôpital public. Elle est alors contrainte de s’exiler. Depuis, elle     continue son combat pour la laïcité et pour la liberté des femmes.           1994 :           – En France, en janvier, les organisations musulmanes et dans les pays     musulmans sont scandalisés par la top model Claudia Schiffer, qui défile     avec une robe sur laquelle sont écrits des fragments de versets coraniques.     La maison de haute couture Chanel s’excuse, fait brûler les trois robes et     exige la restitution de toutes les images de la robe. Son P-DG déclare     “qu’en aucun cas son respect de la religion musulmane ne l’aurait porté à     commettre un sacrilège ou à offenser la communauté musulmane”.           – En Iran, en mai, l’universitaire et militant des droits de l’homme E.     Sahabi est arrêté pour avoir participé à un colloque en Allemagne. Il sera     jugé et condamné à la prison pour délit de “manifestation     anti-révolutionnaire”.           – En Egypte, le 14 octobre, Naguib Mahfouz, alors âgé de 83 ans, Prix Nobel     de littérature en 1988, est poignardé à la gorge, au Caire, par un jeune     intégriste. Cette tentative d’assassinat a été revendiquée par Al-Gamaa     al-Islamiya. En 1959, puis en 1988, juste après son prix Nobel, certains     romans de l’écrivain égyptien avaient été censurés par Al-Azhar.           – En Iran, Saiidi Sirjani, écrivain, essayiste et romancier iranien, est     assassiné en prison pour avoir publié à l’étranger ses ouvrages interdits en     Iran.           1995 :           – En avril, une fatwa d’excommunication est prononcée contre le poète     Mohammed Alvi par le mufti Shabbir Siddiqi d’Ahamdabad, pour une phrase dans     un poème écrit dix-sept ans auparavant : “O Dieu, si tu es trop occupé pour     nous rendre visite, envoie un bon ange pour nous guider”.           – Déclaré apostat, le 14 juin, par la Haute Cour égyptienne, qui lui ordonne     de se séparer de sa femme – celle-ci étant musulmane ne pouvait rester     mariée à un “apostat” –, l’écrivain Nasr Hamed Abu Zeid a vu sa condamnation     confirmée par la Cour de cassation du Caire en août 1996. Un mois plus tard,     le tribunal des référés de Guizeh a ordonné un “ sursis à exécution ”, mais     un avocat islamiste a interjeté appel de cette décision, qui a été confirmée     en décembre 1996 par un autre tribunal. L’écrivain et sa femme, tous deux     universitaires, se sont réfugiés depuis aux Pays-Bas.           – En Iran, Ahmad Miralai, homme de lettres et traducteur de la littérature     étrangère en persan, est assassiné en raison de ses activités littéraires.           1996 :           – En Iran, quatre et écrivains et éditeurs sont assassinés en raison de     leurs activités intellectuelles jugées subversives. Il s’agit de Ghafar     Hosseini, Reza Mazlooman, Ebrahim Zalzadeh et Ahmad Tafazoli.           – Au Koweït, l’‘‘Arab Times’’ publie une bande dessinée américaine sur le     Viking Hagar. Ce dernier y est représenté en prière et une voix sort des     nuages pour dire après un long silence : “Pardon ?”. Une émeute est     organisée contre le journal. Ses locaux sont détruits. Le directeur est     poursuivi par la foule. Il essuie même des coups de feu. De son côté, Ahmed     al-Baghdadi, enseignant d’université accusé de “dévalorisation de la     religion”, “d’insulte ou de dérision envers les préceptes de la religion” et     de “blasphème”, est arrêté et relâché à plusieurs reprises.           1997:           – L’université Al-Azhar dresse une liste de 196 livres devant être interdits     pour des raisons morales et religieuses. Parmi ces ouvrages, ‘‘Dieu du     Temps’’ d’Al-Qimany, coupable de dérision envers la religion puis hérésie de     “réécriture de la tradition musulmane”. Le livre est saisi dans les     imprimeries.           1998 :           – Au Pakistan, Ayub Masih est condamné à mort pour blasphème.           – En Egypte, l’écrivain Ala’a Hamed est poursuivi pour “injure envers     l’Islam” dans l’un de ses romans.           – En Iran, les écrivains, journalistes et universitaires Pirouz Davani,     Hamid Pour, Hajizadeh, Majid Sharif, Darius, Parvaneh Foruhar, Mohammad     Jafar Pouyandeh et Mohammad Mokhtari sont assassinés par des     fondamentalistes religieux à cause de leurs écrits.           – En Turquie, en décembre le journaliste Nuredin Sirin est condamné à vingt     mois de prison pour avoir écrit : “Nous devons soutenir les opprimés même     s’ils sont athées.”           1999 :           – En Iran, en février, le religieux réformateur Hadi Khamenei est battu à     Qom par des étudiants islamistes. En novembre, le journaliste Chamsolvaezin     est condamné à trois ans de prison pour propagande anti-islamique. Le même     mois, Hassan Eshkevari, religieux, est accusé d’apostasie, de blasphème et     d’hérésie. Il sera condamné à la prison en août 2000.           2000 :           – Au Koweït, en janvier, deux femmes écrivains, Leyla Othman et Alia Shaib,     sont condamnées à un mois de prison pour outrage aux mœurs et à la religion.           – En Jordanie, en février, le poète Mossa Hawamda est accusé d’apostasie par     un tribunal.           – En Egypte, en avril, l’écrivain Haydar Haydar est déclaré apostat par des     islamistes égyptiens et condamné à mort pour son roman ‘‘Festin pour les     algues marines’’, où l’un des personnages dit : “Les lois des divinités     bédouines, l’enseignement du Coran, c’est de la merde”. Le livre, édité pour     la première fois en 1983 à Chypre, devait alors être réédité par le     ministère égyptien de la Culture. C’est un journaliste du périodique ‘‘Ach-Chaab’’,     organe du parti de l’Action (d’obédience islamiste), qui a lancé le premier     cri de guerre contre le roman dans un article intitulé : “Qui fait le     serment de mourir avec moi ? Puissent vos mains être coupées ! Il ne reste     plus que le Coran…” Le 17 mai, l’Académie des recherches islamiques, sous     l’autorité d’Al-Azhar, émet une déclaration, diffusée par le bureau du Grand     Imam de l’université, Mohammed Sayyid Tantaoui. Le roman est considéré comme     contrevenant à l’Islam – littéralement, pour “être sorti de ce qui est connu     en matière de religion” (khuruj ‘amma hua maalum min ad-din). L’Académie     incrimine le ministère de la Culture. Des milliers d’étudiants d’Al-Azhar     manifestent. Suite à cette affaire, le ministère de la Culture interrompt     l’impression de trois autres romans condamnés pour atteinte à la pudeur.           Le recteur d’Al-Azhar appelle à un cérémonial d’autodafé du roman dans un     lieu public. “La liberté d’expression est bienvenue, mais tous les hommes de     lettres doivent comprendre que cette liberté est restreinte par le respect     de Dieu, du Prophète et des valeurs religieuses”, déclare le recteur de     l’université Al-Azhar.           – En Algérie, en juin, une fatwa de mort est prononcée contre le cinéaste     Mahmoud Zemmouri, réalisateur du film ‘‘100 % Arabica’’ consacré au raï.           – Au Pakistan, en octobre, l’universitaire Younus Shaik est arrêté et     condamné à la prison à vie pour ses écrits jugés blasphématoires.           2001 :           – En janvier, Le ‘‘Diwan’’ d’Abou Nuwas est exposé dans la Foire du Livre au     Caire, tout en étant interdit à la vente.           – Agissant comme une instance suprême de censure publique, l’Académie     d’Al-Azhar des recherches islamiques n’autorise pas la diffusion d’un livre     sur ‘‘La femme dans la pensée de Khomeyni’’ et fait appel au “Comité de la     censure sur les œuvres artistiques” pour qu’il saisisse un livre intitulé     ‘‘Appel à la réflexion et à la méditation du Coran et de la tradition du     Prophète’’.           – L’écrivain féministe égyptienne Nawal Saadaoui fait l’objet d’une plainte     formulée par les islamistes. Une audience est fixée pour le 18 juin 2001.     Elle est reconnue coupable d’atteinte à la religion. Elle est encore menacée     de mort par les intégristes.           – Toujours en Egypte, l’écrivain Salaheddin Mohsen et la prédicatrice Manal     Manea sont condamnés à trois ans de prison pour athéisme et blasphème contre     l’Islam. Ils avaient pris des libertés avec l’exégèse du texte coranique.           2003 :           – En Arabie Saoudite, le 27 mai, le rédacteur en chef d’‘‘Al-Watan’’, Jamal     Khashoggi, est limogé, moins de deux mois après sa nomination, pour avoir     autorisé la publication d’articles critiquant ouvertement l’establishment     religieux, notamment les “moutawa” (police religieuse). Le gouvernement     saoudien a cédé à la pression des religieux ultraconservateurs qui avaient     condamné le journaliste, l’accusant notamment de “se moquer […] des gens     vertueux” et de “propager le mal et la corruption”.           – En Arabie Saoudite, fin juillet, le grand mufti interdit à l’auteur     réformiste Abdulaziz al-Qasim d’exprimer ses vues dans le quotidien ‘‘Al-Madina’’.     Cette interdiction s’inscrit dans une large campagne d’intimidation des     médias saoudiens engagée après l’attentat du 12 mai à Riyad.           – Mohammed al-Harbi, enseignant saoudien, est condamné à 750 coups de fouet,     trois ans et quatre mois de prison pour “atteinte à l’intégrité de l’islam”.           – Mohammed al-Souheimi, enseignant saoudien, est condamné à 300 coups de     fouet, trois ans de prison et interdiction d’exercer pour apostasie.           – En Iran, la journaliste irano-canadienne Zahra Kazemi est assassinée     pendant sa détention, en raison de ses activités journalistiques. Elle avait     été durement torturée par les autorités policières iraniennes.           2004 :           – Ahmad Bayat Mokhtari, poète et musicien iranien, est enlevé et écrasé sous     une voiture à Chiraz, en raison de ses activités artistiques.           – Le 30 octobre, Nabil el-Fayadh, chercheur et écrivain, auteur de plusieurs     ouvrages interdits en Syrie et dans d’autres pays arabes, est arrêté par les     services de renseignements à Damas. Comme lors des précédentes     interpellations, l’incarcération fait suite aux plaintes déposées par l’un     des savants en religion les plus intégristes, Mohammed Saïd Ramadan el-Bouti,     de l’Université de la Charia de Damas. L’écrivain a par ailleurs été menacé     de mort à plusieurs reprises par le cheikh wahhabite Khatib Khodra.           – Le 2 novembre, le cinéaste néerlandais Theo Van Gogh est assassiné, à     Amsterdam, par un islamiste marocain pour avoir réalisé un film,     ‘‘Submission’’, dénonçant la soumission des femmes dans l’Islam. Les     derniers travaux de Van Gogh visaient à dénoncer le manque d’intégration des     musulmans néerlandais dans la société et le danger que constitue l’Islam     radical pour l’Europe moderne et démocrate.           Alors qu’il était à bicyclette, un fils d’immigrant marocain musulman,     Mohammed Bouyeri , l’a blessé avec une arme à feu, puis l’a poursuivi de     l’autre côté de la rue où il l’a égorgé. Il l’a alors poignardé en laissant     une liste de personnes à qui il destinait le même sort, notamment la     scénariste du film, Ayaan Hirsi Ali, députée hollandaise, d’origine     somalienne, aujourd’hui réfugiée aux Etats-Unis. Cette lettre se termine     par: “Je suis certain, O Amérique, que tu périras / Je suis certain, O     Europe, que tu périras / Je suis certain, O Hollande, que tu périras / Je     suis certain, O Hirshi Ali, que tu périras / Je suis certain, O infidèle     fondamentaliste, que tu périras”.           2005 :           – Le 30 septembre 2005, le quotidien conservateur danois ‘‘Jyllands-Posten’’     publie douze caricatures du Prophète Mohammed. S’ensuivent des demandes     d’excuses, des menaces de mort et des manifestations à Copenhague. Le 20     octobre, plusieurs ambassadeurs de pays musulmans protestent officiellement     auprès du gouvernement danois.           Le 29 décembre, la Ligue Arabe proteste. Le 21 janvier, l’Union     internationale des oulémas au Caire appelle au boycott des produits danois     et norvégiens, car un magazine norvégien vient également, devant la montée     médiatique, de publier en janvier les caricatures. Le 1er février, ce sera,     pour les mêmes raisons, au tour d’autres journaux européens de les publier.     Malgré les “excuses” et “regrets” exprimés par les journaux incriminés, et     les déclarations ambiguës des gouvernements danois et norvégiens, qui     cherchent à ménager la chèvre et le chou, les pays arabes réclament des     sanctions, rappellent leurs ambassadeurs. Pis : des émeutes éclatent et des     ambassades de pays incriminés sont brûlées au Moyen-Orient, faisant des     morts et des blessés… parmi les émeutiers musulmans. Quant aux citoyens     originaires de pays où ces caricatures ont été publiées, ils deviennent     officiellement une cible potentielle pour les intégristes.           2006 :           Le 23 janvier, la journaliste Elham Afrotan, responsable de l’hebdomadaire     ‘‘Tamadone Hormozgan’’, est emprisonnée, avec six autres collaborateurs de     son journal.           Induite en erreur par le titre d’un article émanant d’un site Internet qui     prônait la lutte contre le sida, la rédaction du journal en a fait une     reprise dans sa page “santé”. Il s’agissait d’un article satirique comparant     la venue de l’ayatollah Khomeyni au… sida. Les journalistes ont été     appréhendés à Bandar-Abbas, au sud du pays, après la publication de     l’hebdomadaire. Les médias proches du pouvoir, organisations     gouvernementales et écoles coraniques en ont profité pour organiser des     manifestations, qui ont abouti à la mise à sac et à l’incendie du siège du     journal.           – Le 12 février dernier, Ali Afsahi, critique de cinéma et ancien rédacteur     en chef de la revue culturelle et sportive iranienne ‘‘Cinama-Varzech’’ (suspendue     en 2000), a été arrêté sans motif officiel. Le journaliste avait déjà été     arrêté le 30 décembre 2000, et condamné à quatre mois de prison par le     Tribunal spécial du Clergé pour ses écrits subversifs.           (Source : « Réalités » N° 1072 du 13 juillet 2006)