14 octobre 2006

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TUNISNEWS
7 ème année, N° 2336 du 14.10.2006

 archives : www.tunisnews.net


C.R.L.D.H. Tunisie: FLASH –INFOS Khemais Chammari: Tracasseries et fouille injustifiee a l’aeroport de Tunis Carthage – Communique Mondher Sfar: Qui est le traître ? AFP: Le gouvernement tunisien stigmatise le voile islamique Presse Canadienne: Tunisie: Le verdict du procès de la LTDH reporté au 13 janvier Bakchich:Ben Ali & Co Le Figaro :À Tunis, le consulat passe au crible les postulants aux études en France Fathi Chamkhi (RAID Tunisie): Tunisie. 50 ans d’indépendance Le Journal: Agir a structurer l’opinion Webmanagercenter: De la mesure dans la mesure AFP:”Quand … on est sans pays” ou l’interdiction d’être enterré sur sa terre Le Figaro: Le réalisateur de la “Bataille d’Alger” est mort Le Monde: Les illusions arabes de Jacques Chirac Le Monde: Les sucreries du Ramadan

 
 
 
C.R.L.D.H. Tunisie Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie Membre du Réseau Euro méditerranéen des Droits de l’Homme
 
21ter rue Voltaire – FR-75011 PARIS  – Tel/Fax : 00.33. (0)1.43.72.97.34 contact@crldht.org / www.crldht.org
 
                                                                                                      Paris, le : 13/10/2006
TUNISIE
 

L’HUMILIATION, LA VIOLENCE ET L’ARBITRAIRE

 
FLASH –INFOS
Halte à ce banditisme d’Etat qui s’abat sur des innocentes citoyennes
 
Des centaines de citoyennes tunisiennes vivent depuis plusieurs mois, partout sur le territoire, un cauchemar sans fin en raison du voile qu’elles portent.
 
Des campagnes médiatiques, politiques et policières de grande envergure ont été orchestrées, des descentes organisées devant les collèges, les lycées, les universités et les entreprises pour interdire fut-ce par la force à ces femmes, jeunes et moins jeunes le droit d’accès à leurs établissements scolaires ou à leurs lieux de travail. D’autres se sont vues interdire l’accès aux hôpitaux pour se soigner ou porter assistance à un proche. Bref, une véritable chasse à la personne humaine a été déclenchée à l’encontre de ces innocentes, semant la terreur et infligeant l’humiliation en leurs déchirant en pleine rue leurs voiles et habits et en leurs empêchant l’accès à tout lieu public.
 
Cette politique de grande répression n’est pas la première dans son genre, elle se décide à chaque rentrée scolaire et ce depuis le fameux circulaire ministériel  108 de 1981, contraire aux libertés individuelles garanties par les conventions et traités internationaux, une politique qui prive ces femmes de leurs droits les plus fondamentaux à l’éducation, à l’emploi, à la santé et à la circulation… Elle survient dans un climat politique très étouffant, puisqu’une violence extrême s’applique depuis plusieurs mois sur toute la société comme seule
réponse à toute aspiration aux moindres droits et   libertés réclamés. Les associations indépendantes  de défense des droits de Humains et notamment la Ligue Tunisienne pour la défense des droits de l’Homme, sont les premières victimes et vivent depuis plusieurs années des situations d’exclusion et de marginalisation qui ne cessent de s’amplifier de jour en jour au point de se trouver dans l’incapacité totale d’assumer leurs rôles dans la protection des victimes et la dénonciation des atteintes et des violations.   Le CRLDHT, attaché à la défense de tous les droits pour toutes et pour tous,  dénonce vigoureusement ces graves violations à l’égard de ces citoyennes et considère que toute cette violence traduit une impuissance évidente quant à la gestion politique de la société.Il assure à toutes ces victimes son soutien inconditionnel dans leurs droits à la vie et à la dignité.    Le pouvoir tunisien fait la sourde oreille aux revendications légitimes des chômeurs diplômés  
 
  Les chômeurs diplômés en Tunisie se comptent en plusieurs dizaines de milliers et leurs nombres ne cessent de s’agrandir au fil des années. Plusieurs d’entre eux  vivent depuis la fin de leurs  études des conditions de grande précarité, sans logements et sans aucune source substantielle de vie. Leur cause a, depuis, pris de l’ampleur et  suscité la sympathie et la solidarité de toute la société civile tunisienne. Depuis plusieurs années, ils se sont constitués en associations autonomes et depuis peu en coordination nationale et se sont livrés à un combat courageux pour  leurs droits dans la capitale et dans plusieurs régions du pays telles que  Kairouan, Bizerte, Gafsa, Jendouba…
 
En réponse à ces légitimes revendications, le pouvoir politique tunisien n’a que la force policière pour réprimer et faire taire  toute aspiration à une citoyenneté effective. Il a fait preuve, une fois encore d’impuissance et d’incohérence manifestes traduites par une politique de plus en plus musclée et de plus en plus grotesque.
 
Le mardi 10 octobre courant au matin, des militants de la coordination nationale des chômeurs diplômés ont organisé in sit-in devant le ministère de l’éducation nationale à Tunis pour protester contre les pratiques du ministère qui leurs tourne le dos et applique une politique de favoritisme à l’égard des diplômés appartenant au parti au pouvoir.  La police politique était présente sur les lieux en nombre impressionnant pour réprimer et faire couler le sang des protestataires. Blessés, plusieurs d’entre eux ont perdu connaissance et ont été transférés d’urgence aux hôpitaux avoisinants.
 
Le CRLDHT s’élève contre cette  politique arbitraire, faite de tricherie et de favoritisme et ces méthodes musclées faites de violence et d’intimidation qui ne laissent présager rien de productif pour la Tunisie et exige l’arrêt immédiat de ces méthodes policières d’un autre âge.  Il exprime à la coordination nationale des chômeurs diplômés et à ses représentants tout son soutien et toute sa solidarité dans leur noble combat pour les droits et la dignité.
                                                                                             La censure frappe de nouveau la création artistique et culturelle en Tunisie
 
La nouvelle pièce théâtrale de Jalila Baccar et de Fadhel Jaïbi« Corps Otages » (Khamsoun) vient d’être interdite en Tunisie. Après trois mois de silence, ( la commission nationale d’orientation), un organe officiel groupant des représentants des ministères de l’intérieur, du culte et de la culture dont le rôle est de censurer et d’organiser la distribution de la production théâtrale, a refusé de délivrer à la troupe  Familia le visa d’exploitation  et de présentation.
 
« Corps otages » qui a été présentée en juin 2006 au théâtre d’odéon à Paris et a connu un grand succès, traite l’histoire de la Tunisie, cinquante ans après l’indépendance politique et les grands bouleversements qu’a connus la société tunisienne durant, avec la politique du tout sécuritaire, la menace de l’extrémisme religieux et la grande désillusion de tant de générations à l’ouverture et à la tolérance.
 
Cette mesure arbitraire de censure et d’interdiction a été prise sous prétexte que la pièce portait atteinte à la morale et à la religion des tunisiens et a exigé de son metteur en scène, Mr Fadhel Jaibi de supprimer toutes les dates, les noms des différents personnages et  lieux et d’éliminer toute référence historique ou coranique dans le texte !
 
Le CRLDHT considère que cette nouvelle censure qui frappe la liberté d’expression les créateurs artistique  et prive les tunisiens d’un grand spectacle, est une atteinte à un droit fondamental garanti par la constitution tunisienne et les conventions et traités internationaux, ratifiés par la Tunisie.
 
Le comité dénonce cette politique de désertification culturelle qui crée le vide et favorise la médiocrité ; il assure la troupe Familia et ses auteur et réalisateur Mme Jalila Baccar et Mr Fadhel Jaibi de son soutien agissant face à cette injustice qui les frappe. 
 
                                                                                                     Le CRLDHT


COMMUNIQUE                     TRACASSERIES ET FOUILLE INJUSTIFIEE A L’AEROPORT DE TUNIS CARTHAGE

 
 De retour d’un séjour en Europe[1]  j’ai eu la désagréable surprise de faire l’objet à l’aéroport de Tunis  Carthage le mardi 10/10/2006 de mesures vexatoires  et d’une fouille  systématique (de mes bagages et au corps) qui a duré 85 minutes.
Depuis plus de trois mois, je fais l’objet d’une attention particulière des services de la douane et de la police à mon départ et à mon arrivée à Tunis. Cela s’est produit huit fois (4 allers et retours).
Le comportement courtois des douaniers et des policiers m’a, toutefois incité  à  relativiser  ces tracasseries et à  ne pas en faire état publiquement Le mardi 10 octobre 2006, les choses ont pris une autre tournure.
Je suis arrivé à Tunis sur le vol Paris Tunis à 11h05 et je n’ai pu quitter l’aéroport qu’à 12h40.
Mon passeport a été confisqué dès mon arrivée et il ne m’a été restitué qu’après la fouille  systématique à laquelle j’ai été soumis en présence de trois agents de la douane et trois agents de la police en tenue civile.
Cette fouille systématique et approfondie a été suivie d’une fouille au corps dans un local attenant  au hall d’arrivée.
Si j’ai tout lieu de me féliciter du comportement courtois et calme des agents chargés de cette opération, et dont les commanditaires ont tablé vainement sur un effet d’intimidation et d’humiliation, j’ai décidé après avoir consulté  un grand nombre d’amis de rendre publique ma protestation énergique  contre  la mesure  discriminatoire  et vexatoire dont j’ai fait  l’objet sans  qu’aucune explication   m’ait  été  donnée.
A l’évidence, les commanditaires de cette opération espéraient que cette fouille injustifiée et prolongée me ferait perdre mon sang froid. Cela n’a heureusement pas été le cas. Mais le risque est réel, si ces agissements arbitraires venaient à se répéter, qu’ils débouchent à la longue sur des provocations de tous ordres contre lesquelles je voudrais, calmement mais fermement, mettre en garde.
Au terme de cette fouille, et après avoir envisagé une saisie plus importante et totalement dénuée de fondement, de livres et de documents, les services des douanes ont, en définitive, saisi le livre de Mme Béatrice Hibou : « La force de l’obéissance », qui évoque la situation en Tunisie et qui est édité par les éditions de la Découverte à Paris.
J’ai réclamé, et obtenu, un reçu dont j’ai  remis copies à Mr Zakaria Ben Mustapha, Président de l’instance gouvernementale du Conseil pour les Droits de l’Homme et des Libertés en Tunisie et à Me Mokhtar Trifi, Président de la LTDH.
Ce reçu administratif comporte d’ailleurs la mention,  cocasse en l’occurrence, du fait que « passé le délai de 4 mois, la marchandise sera mise en vente aux enchères publiques » !.
J’ai fait part de ma protestation à Mr Zakaria Ben Mustapha et j’ai écrit à Mr le Directeur Général des Douanes pour prendre acte de l’attitude courtoise et  pondérée des agents auxquels j’ai été confronté mais surtout pour protester  contre les ordres arbitraires qui leur ont été donnés.
Cette nouvelle atteinte à mes droits fondamentaux ne m’intimide nullement, mais elle m’attriste sincèrement en raison de l’image qui est ainsi donnée de mon pays et de la situation dans laquelle les services de l’administration  se voient dans l’obligation de placer leurs agents et fonctionnaires contraints à effectuer des missions contraires au droit, à la raison et à la logique.   Je voudrais, enfin, exprimer toute ma gratitude à toutes celles et à tous ceux (avocats, dirigeants associatifs et politiques et journalistes), dont la promptitude de la réaction et les expressions de solidarité m’a énormément touché.   TUNIS LE 13/10/2006   KHEMAIS CHAMMARI   [1] Je me suis notamment rendu à Genève à l’invitation de l’Union Interparlementaire ;  à Strasbourg à l’invitation du groupe du Parti  Socialiste Européen -PSE  du parlement Européen en compagnie  de sept autres invités ,dirigeants  de formations  de l’opposition   démocratique tunisienne et d’associations autonomes au sein de la société civile;   à Paris à l’invitation du CRLDH T,  puis de la FIDH sur le programme CPI  Maroc et Maghreb;  et enfin  pour participer à la réunion de l’équipe de suivi du groupe de travail sur le droit et la liberté d’association du REMDH en vue du lancement de l’étude sur l’évolution de cette question dans la région Euromed.

 

 

Qui est le traître ?

 
 Par Mondher Sfar mondher.sfar@club-internet.fr   Les agents du Premier Sioniste de Tunisie viennent de s’attaquer au Juge Mokhtar Yahyaoui. De quoi l’accuse-t-on ? Rien moins que de traîtrise contre sa patrie ! 

Ce n’est pas la première fois que la propagande benalienne a recours à ce genre d’attaque contre les résistants. A chaque fois que les militants de l’intérieur prennent contact ne serait-ce qu’avec des démocrates associatifs étrangers, on les accuse de l’infamie suprême. 

Ces attaques sont si hilarantes et si amusantes qu’on ne redemanderait ! 

 Accuse-t-on les opposants de parler avec des étrangers, comme si notre dictateur n’a jamais été à Washington, à Paris, à Rome ou même jusqu’à Malte uniquement pour redorer son blason si terni par ses crimes que mêmes ses patrons étrangers évitent son contact physique ?

Accuse-t-on les opposants de recevoir des aides pour leurs associations humanitaires assiégées par la flicaille politique vingt-quatre heures sur vingt-quatre, dont les militants sont si harcelés dans leur gagne-pain qu’ils sont littéralement affamés ? 

 Un régime qui interdit par la loi la solidarité entre Tunisiens se permet de critiquer ses citoyens pour avoir cherché de l’aide à l’étranger ! 

Mais ce régime, dont les bénéficiaires emplissent leurs poches en milliards de dollars volés de leurs concitoyens, ne cesse de faire appel à l’argent de l’étranger au risque de précipiter le pays dans la banqueroute, celle-là même qui a permis sa colonisation par les troupes étrangères en 1881. Ce crime là ne compte pas !

L’imposture ne s’arrête pas là. Ce régime se permet même de donner des leçons de patriotisme anti-sioniste à ses opposants (voir les campagnes haineuses contre un ancien secrétaire d’Etat à l’Intérieur), lui qui n’hésite pas à inviter, sans rougir, un grand criminel contre l’humanité du nom de Sharon à venir en Tunisie, terre encore ensanglantée de dizaines de victimes du même Sharon à Hammam Chott et à Sidi-Bousaid. Comment qualifier dans ces conditions ce crime benalien ? Ce n’est plus de la traîtrise, c’est de la haute trahison ! Sans parler de l’établissement en 1996 des relations avec l’entité sioniste à l’insu du peuple tunisien et sans sa consultation. Et comme pour en rajouter à l’infamie, cette ouverture de relations avec l’ennemi a été officialisée quelques heures après l’horrible massacre sioniste à Cana.

Le régime compte sur le verrouillage médiatique pour continuer à salir tranquillement l’opposition. Ses campagnes mensongères les plus féroces contre ses opposants montrent aujourd’hui qu’il a épuisé ses dernières cartouches. Et qu’il est en train de fabriquer avec la corde qui va l’étrangler.

Paris, le 14 octobre 2006.


Le gouvernement tunisien stigmatise le voile islamique

 

AFP, le 14 octobre 2006  Agence France-Presse – TUNIS – Le gouvernement tunisien a lancé une offensive contre le retour du voile islamique, “tenue sectaire d’inspiration étrangère” et l’obscurantisme, a indiqué samedi la presse tunisienne. Le ministre des Affaires étrangères, Abdelwaheb Abdallah, a stigmatisé samedi soir lors d’une réunion du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD, au pouvoir) à Nabeul (ouest) “le danger que représente la tenue vestimentaire d’inspiration sectaire, étrangère à notre pays, notre culture et nos traditions”. Le voile islamique, a ajouté M. Abdallah, qui est membre du bureau politique du RCD, est “un slogan politique affiché par un groupuscule qui se dissimule derrière la religion pour réaliser des desseins politiques”. Soulignant que la Tunisie est “fière et attachée à la religion islamique, il a ajouté qu’elle “n’a pas besoin de donneurs de leçons sur les fondements de la religion et qu’elle est un pays de modération et du juste milieu qui rejette la violence et l’extrémisme”. Face à un regain d’activisme islamiste, se manifestant notamment par le port du voile par de plus en plus de femmes, M. Abdallah a rappelé que le président Zine El Abidine Ben Ali avait insisté cette semaine sur la “nécessité de distinguer l’habit sectaire, intrus et importé, tant pour les hommes que pour les femmes, de l’habit traditionnel tunisien, témoin d’une identité enracinée dans notre histoire”. Lors d’une autre réunion du RCD, à Ben Arous, près de Tunis, le ministre de l’Intérieur, Rafik Belhaj Kacem, a dénoncé “toutes les sortes d’extrémismes qui sont des intrus dans notre société et n’ont aucun lien avec nos traditions et notre religion bénie”. Il a notamment stigmatisé “l’habit sectaire, signe distinctif d’une frange dure et renfermée sur elle-même et symbole d’une appartenance politique qui se cache derrière la religion” et qui “cherche à spolier la femme de ses droits et ses acquis”.


Tunisie: le verdict du procès de la LTDH reporté au 13 janvier

Le 14 octobre 2006 – 11:30

Presse Canadienne Reporté déjà à plusieurs reprises, le verdict du procès de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH) opposant le comité directeur à des adhérents souvent proches du pouvoir a de nouveau été renvoyé samedi et fixé au 13 janvier prochain, a-t-on appris de source judiciaire. Le tribunal de première instance de Tunis a accédé à une demande faite dans ce sens par l’avocat des plaignants pour pouvoir se procurer un document nécessaire au dossier. Intenté par 22 membres de la LTDH, dont sept présidents de section, la plupart proches du parti au pouvoir, qui accusent le comité directeur d'”abus de pouvoir” et de “violation du règlement intérieur” dans le but de les en exclure, ce procès a été à l’origine de la suspension du congrès de cette association initialement prévu en septembre 2005. La direction de la LTDH, la plus ancienne organisation du genre dans le monde arabe et en Afrique, dénonce, quant à elle, ce qu’elle considère comme une tentative des autorités de la “mettre au pas”, tandis que le pouvoir s’en défend en assurant que la ligue fait face à “une crise interne”. En tout état de cause, ce nouveau report pourrait favoriser les tractations menées par d’anciens dirigeants de la ligue en vue d’aboutir à une solution amiable.

 

Ben Ali & Co

 
Par Léa Labaye   Le gendre préféré de Leïla emprunte l’argent à une banque pour en racheter des parts La Tunisie est, à entendre certains opposants, une mafiocratie où Ben Ali fait office de parrain des parrains. Aucun business n’est laissé de côté par cette grande famille, et sûrement pas celui, juteux, 60 millions d’euros tout de même, des marchés publics. Tout le monde a droit à sa part du gâteau de la privatisation, même le tout jeune gendre du président. L’aînée de Leïla et du président Ben Ali, Nesrine, a épousé en 2004 Sakher Materi. Ce jeune homme n’est pas un inconnu de la famille. Il est le fils de l’officier Moncef Materi, un ami de promo de Ben Ali au temps de Saint-Cyr qui avait tenté de renverser Bourguiba en 1962. Une amitié de longue date que Ben Ali s’est empressé d’oublier du temps de Bourguiba puis de renouer une fois aux commandes du pays. Le rejeton Materi est moins diplômé que son père, au mieux un BTS, mais son rôle dans la privatisation de la Banque du Sud satisfera pleinement le parrain. Originellement la Banque du Peuple, la Banque du Sud fut constituée en 1964 à partir de fonds des syndicats, pour devenir par la suite une banque commerciale dotée d’un réseau d’agences florissant. Mais, comme souvent en Tunisie, elle affiche des créances douteuses exorbitantes, si bien que son coût prohibitif n’intéresse personne quand il est question de la privatiser. Son actionnaire majoritaire, l’Italien Monte De Pasche De Sienna, qui détient 16% du capital, a fini par se faire une raison. Pourtant, il y a un an, miraculeusement, l’association entre le marocain Attijariwafa Bank et la banque espagnole Sentender se porte acquéreure et devient propriétaire de la Banque du Sud.   17 millions dans la corbeille de mariages Et dans la foulée, le gendre Ben Ali, passe brillamment son examen d’entrée dans la famille. N’ayant pas mis assez de côté pour racheter les 16% de l’Italien, le rejeton a une idée lumineuse : il emprunte tout bonnement à la Banque du Sud l’argent nécessaire pour acquérir ces parts. La privatisation s’opère en un temps record de trois semaines : le gendre préféré de Leïla se tourne ensuite vers les financiers de Sentender auxquels il propose de vendre ses 16% au prix fort. En contrepartie, le gouvernement baisse de 25% sa proposition sur le reste des actions. Et comme Nesrine a le sens de la famille, il investit ses 17 millions d’euros (un peu plus de 22 millions dt) de plus-value chez le fournisseur officiel de voitures de la smala : Enakl, représentant exclusif de Volswagen, Audi et Renault véhicules industriels, et dorénavant fournisseur officiel de l’administration pendant cinq ans.   Voilà comment fabriquer un millionnaire : dans la corbeille à mariage.   (Source : Article paru dans Bakchich#3 du 06 octobre 2006) Lien: http://www.bakchich.info/article303.html

À Tunis, le consulat passe au crible les postulants aux études en France

 
De notre envoyée spéciale à Tunis MARIE-CHRISTINE TABET.   Les fonctionnaires doivent distinguer les vrais projets des intentions frauduleuses.   « VOUS voulez faire vos études en France. Expliquez-moi votre projet ». Comme pour se donner du courage, Mouna sort de son porte-documents un épais dossier, d’où dépassent ses diplômes. Elle esquisse un mince sourire, reprend son souffle et lâche en s’épongeant les mains avec son mouchoir : « J’ai trop peur ». Cette jeune femme de 24 ans, diplômée d’une école d’architecture de Tunis, veut intégrer l’École nationale d’ingénieurs de Saint-Étienne en mastère I, l’ancien niveau maîtrise. Ce rendez-vous, début octobre, avec l’auditrice du Centre pour les études en France (Cef) est la dernière étape avant le visa. Corinne, la quarantaine décontractée, conduit l’entretien. Femme d’expatriée, recrutée pour l’occasion, elle traque les parcours incohérents, les candidatures opportunistes et les faux diplômes. Mouna sait que l’avis du Cef est déterminant pour l’obtention du visa étudiant. Elle veut créer une entreprise de décoration à Tunis lorsqu’elle aura terminé l’école stéphanoise. C’est Adèle Martial-Gros, l’attachée scientifique de l’Ambassade de France, une universitaire pure sucre, qui donne le feu vert final. D’un seul clic, elle visualise sur son écran d’ordinateur le cursus de Mouna. Le dossier ne pose pas de problème. Adèle Martial-Gros transmet – toujours en ligne – un avis favorable au consulat.   Frustrations et rancoeurs Dans quelques jours, Mouna fera partie des quelque 2 500 étudiants tunisiens partant chaque année finir leurs études en France. Depuis des décennies, les bonnes familles tunisiennes envoient leurs enfants dans les meilleurs établissements français pour terminer leurs études. Un passage obligé qui fait rêver le plus grand nombre. La liste des candidats s’allonge avec l’explosion du nombre d’étudiants (36 % des 18-24 ans poursuivent des études supérieures). L’économie du pays a du mal à absorber chaque année les nouveaux diplômés (380 000 en 2006 pour une population de 10 millions d’habitants). Du coup, les jeunes tunisiens, francophones et francophiles, rêvent de traverser la Médi­terranée pour enrichir leur CV, d’autres ne songent qu’à immigrer. Aux premières heures de l’immigration choisie, le consulat doit faire le tri entre les étudiants dont la France a besoin, ceux qui rentreront dans leur pays après leurs études et ceux qui, pour détourner les règles contraignantes du regroupement familial ou de l’immigration de travail, risquent de grossir les rangs des sans-papiers… La sélection est compliquée car il ne faut pas laisser filer les meilleurs et éviter les injustices. « Je fais beaucoup d’efforts d’information, explique Serge Degallaix, l’ambassadeur, l’année dernière nous n’avons refusé que 24 % des demandes de visas étudiant. L’homme de la rue est persuadé que ce taux dépasse les 50 %. Cela génère des frustrations et des rancoeurs ». Les universités canadiennes, allemandes et russes démarchent les éléments les plus brillants. Karim, le candidat suivant audité par Corinne, aura moins de chance que Mouna. À trente ans, il a perdu du temps pendant sa scolarité et ne peut présenter qu’une maîtrise en sciences naturelles et biologie. « J’ai eu des problèmes de santé, des infections à la gorge, argumente-t-il maladroitement, j’ai dû arrêter mes études pendant un an. » Autre mauvais point pour Karim : après son bac, il voulait s’inscrire en médecine à Bizerte, mais sa vocation de carabin a tourné court.   Fausse inscription universitaire Aujourd’hui, Karim souhaite obtenir un visa pour compléter son diplôme par un mastère à dominante informatique à l’université de Corte, en Haute-Corse. Le projet de e-médecine qu’il veut mettre en oeuvre à la clef ne convainc pas. Il est recalé. Comme l’étudiante qui le suit. Et pour cause : la jeune femme à l’allure austère accompagnée jusque sur le pas de la porte par son père, est une fraudeuse. Elle présente une fausse inscription de Paris VIII. « Nous avons tout de suite eu des doutes, raconte Nicolas Duhaut, le responsable du Cef de Tunis, elle est originaire d’une ville où nous avons eu dans le passé beaucoup de faux documents. Mon assistante a appelé Paris VIII qui ne la connaît pas. » Pour le consulat général de France à Tunis, le filtre du Centre pour les études en France constitue une aide précieuse. Le poste, qui enregistre plus de 85 000 demandes de visas par an doit en permanence trouver le juste équilibre entre la gestion du risque migratoire et le « désir de France ». « Vu d’ici, la France est un département tunisien, plaisante un fonctionnaire français, ou l’inverse. Même si le visa est rétabli depuis 1976, les Tunisiens n’acceptent pas de devoir montrer patte blanche. » Pourtant, depuis le début de l’année, Paris a demandé à Tunis de reprendre 300 de ses ressortissants interpellés sans papiers en France.   (Source : « Le Figaro » du 14 octobre 2006)  

Tunisie. 50 ans d’indépendance

 
Fathi CHAMKHI (RAID Tunisie)
 
Le cinquantenaire de l’indépendance de la Tunisie, qui avait mis fin, en 1956, au « Protectorat » français établi en 1881, vient de passer dans l’indifférence générale ! Seule exception, le discours du général Ben Ali, maître absolu de la Tunisie, qu’il a débité devant quelques milliers d’« applaudisseurs professionnels », rassemblés pour l’occasion dans le Palais des congrès à Tunis, et retransmis en direct à la télévision,.
 
Dans son discours, Ben Ali s’est contenté de marteler les mêmes assertions concernant la poursuite de l’« œuvre du développement intégral », tout en inventoriant les prétendus acquis des Tunisiens sous son « Ere nouvelle ». Ces allégations cachent mal le sentiment de ras-le-bol qui règne désormais dans le pays. Les Tunisiens, d’habitude peu enclins à la révolte, se sentent poussés à bout par un système économique qui les écrase et un pouvoir politique qui les étrangle.  
Désillusionnés, ils ne croient plus en l’avenir !
 
En effet, un demi-siècle de « gouvernement national » et d’efforts de développement, n’ont pas réussi à changer la donne de façon radicale en faveur de la majorité des tunisiens. Celle-ci est aujourd’hui obligée de trimer dans des conditions économiques et sociales de plus en plus pénibles, afin d’assurer un revenu minimum. Dans le même temps, toute contestation est sévèrement réprimée.
 
Mais, face à la dictature, la majorité des Tunisiens préfère pour le moment avoir la tête ailleurs ; sa principale préoccupation, c’est de tenter de réussir à joindre les deux bouts. Les difficultés sont bien pires dans les rangs de la jeunesse qui est accablée par le chômage, la misère et le manque de perspectives d’avenir. Aujourd’hui, une majorité de jeunes n’a qu’une idée en tête : tout faire pour aller tenter sa chance en France, en Italie ou ailleurs en Europe.
 
Cette description sommaire de la situation générale en Tunisie, contraste avec une certaine image perçue de l’extérieur ; celle d’un pays qui réussit plutôt bien en affaires, qui paraît moderne et assez stable dans un environnement géopolitique contraignant. La réalité est beaucoup plus nuancée.
 
LE LIBERALISME NE FAIT QU’EMPIRER LES PROBLEMES DE LA TUNISIE
 
Au cours d’un demi-siècle d’indépendance, la Tunisie a connu deux règnes : celui de Bourguiba (1956-1987), puis celui de Ben Ali (depuis 1987). A chaque règne correspond un modèle économique et social, mais un unique mode de gouvernement : la dictature.
 
Vers le milieu des années 80, le régime de Bourguiba était empêtré dans les difficultés économiques. Pour s’en sortir, il avait décidé, en 1984, la suppression des subventions aux produits de première nécessité, ce qui provoqua contre lui « la révolte de pain », obligeant ainsi Bourguiba à faire marche arrière. Dans la foulée, le régime fut rattrapé par la crise de la dette.
 
En 1986, il avait fini par adopter le Programme d’Ajustement Structurel (PAS), qu’il refusait quelques années plus tôt. Mais la crise économique s’était entre temps doublée d’une crise politique en rapport avec la succession du « Combattant suprême ». Le coup d’État de Ben Ali (7 novembre 1987) était arrivé à point nommé pour remettre de l’ordre au sommet de l’État, afin de rendre possible la mise en application des réformes néo-libérales,
 
Assez rapidement, Ben Ali arrime la Tunisie à la mondialisation néolibérale en la soumettant au consensus de Washington : en 1990, il adhère au GATT, puis à l’OMC en 1995 et, la même année, il signe un « Accord de Partenariat » avec l’Union Européenne qui vise à intégrer la Tunisie, à l’horizon 2008, dans la zone de libre échange de celle-ci.
 
De fait, la Tunisie est devenue un pays administré par des institutions impérialistes pour le compte du capital mondial, telles que la Commission Européenne, via la « Commission de Partenariat », et surtout les institutions de Bretton Woods à travers leurs « représentations techniques ».
 
LA CENTRALITE DE LA QUESTION DE LA DETTE
 
La dette extérieure a joué un rôle éminemment important dans l’histoire moderne de la Tunisie. Elle fut, au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, le principal prétexte pour la colonisation française de la Tunisie. L’Etat Beylical fut alors appâté par des emprunts généreux, que lui proposaient les cercles financiers français. Le Bey, mal conseillé, se laissa prendre au piège. En 1876, ses finances furent mises sous le contrôle d’une « Commission financière » franco-britannique. Quelques années plus tard, la France imposa son Protectorat colonial à la Tunisie.
 
De nos jours, la dette est devenue le principal vecteur du néocolonialisme. C’est ainsi que, sous les effets conjugués de l’échec de la politique de développement et ceux de l’impact de la crise de la dette, le pouvoir de Ben Ali a été amené à se soumettre aux directives et aux exigences des différentes institutions impérialistes.
 
De source d’appoint pour le financement des programmes de développement, durant les premières années de l’indépendance, la dette est devenue aujourd’hui un fardeau économique et un argument politique de taille à la disposition de l’impérialisme.
 
Sous prétexte de sortir de la crise, de faire face aux paiements extérieurs et afin de relancer la croissance, Ben Ali s’est engagé dans un processus d’endettement massif.
 
Entre 2001 et 2003, l’encours de la dette publique extérieure a progressé de façon significative, plus de 4,6 milliards de dollars (Mrds), bien plus que pendant les onze dernières années, où il n’a progressé que de 3,2 Mrds de dollars. La charge de la dette par rapport au PNB se maintient à un niveau assez élevé ; soit 64,7%
 
Le service de la dette cumulé depuis 1980, représente 28,5 Mrds de $ ; soit plus de 8 fois le montant de la dette initiale. Dans le même temps, les prêts nouveaux contractés par la Tunisie ont représenté 27 milliards de dollars ; en d’autres termes, elle est devenue exportatrice nette de capitaux.
 
Au cours des dix dernières années, le service de la dette a augmenté selon un rythme plus élevé que celui du PIB : 62,2% contre 43,4% : le surendettement est assez clair.
 
De plus, au cours des dix dernières années, la Banque mondiale est devenue le principal créancier de la Tunisie. Ainsi, la part des crédits multilatéraux, contractés essentiellement auprès de cette institution, a progressé entre 1980 et 2003 de 12,3% à 34,4%, dans l’endettement total du pays. Cela a permis à cette institution impérialiste de tenir sous son joug des leviers essentiels de l’économie locale, et de prendre part dans la définition de la politique économique et sociale de l’Etat.
 
Enfin, l’argent des emprunts nouveaux sert d’abord à rembourser le service de la dette. La Tunisie se voit obligée de s’endetter afin de payer une dette qui ne diminue pas. Il apparaît donc bien difficile de soutenir l’assertion du régime qui justifie les nouveaux emprunts par la nécessité de financer un hypothétique développement. Rappelons à cet égard que le produit de la liquidation d’une bonne partie de l’appareil productif, à la suite de deux décennies de politique de privatisation, n’a pas excédé 1,4 Mrds de dollars ; soit une valeur inférieure au service de la dette de la seule année 2003 (1,6 Mrds de dollars). De plus, plus des trois quarts des entreprises privatisées l’ont été au profit du capital européen.
 
DEFAILLANCE GRAVE AU NIVEAU DES LIBERTES DEMOCRATIQUES
 
L’absence quasi-totale des libertés démocratiques est de nature à aggraver une situation sociale bien difficile, et de rendre la recherche d’alternatives assez hypothétique. Le pouvoir tunisien qui n’est pas à une contradiction près, continue pourtant d’affirmer haut et fort qu’il est attaché aux valeurs démocratiques et qu’il s’attelle à les concrétiser dans toutes les sphères de la vie sociale tunisienne.
 
Au lendemain de son coup d’État, en 1987, Ben Ali s’était engagé solennellement à supprimer la présidence à vie, qui fut instaurée par son prédécesseur, quelques années auparavant. Il avait même promis la libéralisation de la vie politique et l’instauration d’un État de droit.
 
Mais, dix huit ans plus tard, l’encadrement et le verrouillage policier de la société tunisienne n’ont jamais été aussi importants.
 
La société tunisienne semble aujourd’hui totalement désarmée face à la double dictature : celle du marché et celle de Ben Ali. Assez paradoxalement le dégoût des Tunisiens pour un régime en tout point haïssable, n’a d’égal que leur indifférence et leur désaffection totale des sphères dans lesquelles se décide leur avenir. Aujourd’hui, Ben Ali semble avoir gagné par KO contre la Tunisie ! L’avenir nous dira, peut être, si cette dernière a su trouver les forces suffisantes pour se redresser à nouveau.
 
(Source : texte publié sur le site www.catdm.org , le 16 septembre 2006) URL: http://www.cadtm.org


La Lettre du Journal

AGIR A STRUCTURER L’OPINION

Par M’hamed JAIBI                        La multiplication dans nos rues des tchadors, voiles et autres foulards, pose une nouvelle fois, sur fond d’exacerbation du choc des civilisations, la problématique de l’interprétation du texte coranique et des références et écoles religieuses à travers les siècles et jusqu’à nos jours. L’encerclement médiatique opéré par les chaînes satellitaires et la montée de l’intégrisme comme source désespérée de résistance à l’agresseur, ont créé dans l’ensemble des pays arabo-musulmans un état de fait pré-insurrectionnel alimenté par les forces maléfiques du néo-colonialisme anglo-saxon. Les provocations occidentales, qui se multiplient et se diversifient, attisant la flamme d’un conservatisme passéiste de façade, plus nostalgique que réellement porteur de projet, cantonnent nos opinions publiques sud-méditerranéennes dans une attitude de guerre de religion dont nous n’avons ni l’aspiration ni les moyens. Cette même guerre sainte que Bush, de l’autre côté, semble appeler de ses vœux. Dans ce magma d’incertitudes, de marasme économique et de dérive sociale, la Tunisie se distingue par des choix clairs de modernité et de progrès, qu’il serait judicieux de consolider et d’affirmer toujours plus haut et plus fort. Mais cette affirmation de nos profondes aspirations à une vie citoyenne et à une qualité de vie dignes, nécessite de voir la société tunisienne ressortir ses énergies les plus profondes, à travers l’adhésion la plus large à un projet mobilisateur qui serait l’émanation d’un libre débat national auquel s’associeraient tous les intellectuels du pays. Ce projet mobilisateur doit être la synthèse des acquis du pays et des diverses aspirations qui s’expriment ça et là. Il doit intégrer l’ensemble des problématiques politiques, économiques, sociales, culturelles religieuses et existentielles qui se dégagent à travers les réflexions, les revendications et les débats qu’enregistrent les partis politiques, les organisations socio-professionnelles, le réseau associatif, les clubs universitaires et les petits cercles de discussion, dont émanent ici et là la multitude des leaders d’opinion qui, à leur corps défendant, donnent forme à l’opinion publique nationale. Cette opinion est aujourd’hui informelle, disparate, contradictoire, marginalisée. Il serait utile de la structurer et de l’établir dans ses fonctions. Cette opinion saura alors faire la part des choses, identifier l’intérêt des Tunisiens et de leur pays, établir les faits et rétablir la vérité. Elle saura dire ce qu’il en est vraiment des aspirations populaires, elle saura orienter les comportements sociaux, elle encadrera les tendances et les us. En attendant, faut-il vraiment s’inquiéter de la poussée des «foulards islamiques» dans les rues de Tunis ? Sans doute. Mais il y a mille et une manières de s’en inquiéter. Et autant d’y réagir. Le plus judicieux ne serait-il pas d’en appeler à ces leaders d’opinion qui, tapis dans l’ombre, agissent en snipers, avec force références aux venins de certaines satellitaires. Ainsi, a-t-on, au dernier «Mouled», mis directement en cause cette fête religieuse ancestrale, sous le prétexte que chiîtes et wahabistes ne la célèbrent pas. C’est dire à quel point notre pays a besoin d’une urgente reformulation de ses certitudes, de ses références et de son projet de société, sur la base de la participation la plus large. Cela appelle un resserrement des rangs et l’association de toutes les forces et sensibilités politiques, syndicales, associatives, universitaires et intellectuelles. Sans compter la structuration d’une réelle opinion publique qui saura encadrer les foules. Et qui dira parfois non.   (Source : Editorial du « Le Journal », N°44 du 14 octobre 2006) Lien : http://www.gplcom.com/journal/fr/

 

De la mesure dans la mesure

Par Ibtissem
 
Dans cette ambiance télévisuelle ramadanesque on ne peut plus affligeante, une série de spots sur Hannibal est venue nous réveiller et nous faire un clin d’œil à intervalles réguliers. Étant simple téléspectatrice et peu versée dans ce domaine de la médiamétrie, je n’avais rien compris à ces messages qui s’adressaient à «Am Hassen» comme on s’adresse à son marchand des 4 saisons du coin pour qu’il vous laisse choisir les bonnes pommes.
 
Et comme ces spots à répétition se faisant insistants citaient une firme que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam, et à force de répéter, j’ai fini par accrocher et m’intéresser à ce sujet. C’est très simple en vérité : l’entreprise mise en cause dirigée par un éminent polytechnicien exerce parmi ses activités les mesures d’audience ; et comme en Tunisie on n’a que 2 chaînes, la nationale et la privée, elle a mesuré on ne sait ni où ni comment l’audience de ces 2 chaînes et est arrivée à une conclusion que, environ trois Tunisiens sur 4 regardent la chaîne nationale!
 
Évidement cela a un impact sur les budgets pub des annonceurs pour qui Ramadan représente plus de 30% des 100 millions de dinars annuels -je crois même savoir que les frais de l’émission Dlilek Mlek sont largement couverts par la pub ; la pub qui fait aussi vivre Hannibal et même WMC. On peut considérer la réaction de cette chaîne comme légitime, car le budget qui lui sera affecté s’en ressentira si son audience est si faible.
 
Cette situation en rappelle d’autres que j’avais vécues à l’éclatement de l’ORTF et la création de TF1 et de France 2, puis M6 et les autres. Les querelles à ne plus en finir sur les taux d’audience qui, à l’époque, étaient dans leur majorité faits par la SOFRES compagnie nationale : lorsque les taux d’écoute d’A2 étaient meilleurs que de ceux de TF1, ses résultats étaient critiqués par TF1 laquelle disait qu’une société nationale truquait les chiffres au profit d’une société nationale, et quand c’était le contraire, A2 prétendait que la SOFRES voulait encourager le groupe Bouygues qui lui avait proposé d’autres contrats pub plus mirifiques !
 
De longues années durant, ce fut un combat d’audiences, et le système évolua, se structura et se développa avec des équipements adéquats et des appareils de mesure électroniques ; actuellement, on peut, à la personne près, mesurer le taux des chaînes françaises –cf. site MSN.fr. Alors pourquoi ce déchaînement ?
 
D’abord, par principe déontologique, les attaques directes sur une firme et son responsable me dérangent même si les chiffres qu’il aligne ne reflètent pas la réalité. Ensuite, pourquoi pas une solution à la tunisienne où une autre firme locale ou étrangère -s’il le faut- ne viendrait-elle pas faire des contre-mesures et donner un autre éclairage à cette nouvelle donne ? Car, malheureusement, ces chiffres, qu’ils soient justes ou faux, ont le mérite d’exister, et j’aurais, avec tout le respect à cette chaîne et à ses efforts d’animer un paysage télévisuel amorphe, préféré qu’elle utilise d’autres moyens que ces attaques personnelles et directes sur une firme tuniso-tunisienne pour nous éclairer sur son audience.
 
A mon avis, je dirais à première vue que l’audience des 2 chaînes tunisiennes est équivalente et que le bon tiers qui reste est actuellement accroché aux chaînes moyen-orientales et occidentales et que cette quotte part ira en se développant si le ‘’lamentabilisme’’ télévisuel tunisien continue de régner sur nos chaînes …
 

La retraite à 63 ans ?

 
La retraite reculera-t-elle de 60 ans à 63 ans ? Il semblerait bien que oui si l’on se tient aux propos du quotidien arabophone Ashourouq qui évoque un projet dont l’annonce officielle est pour bientôt. Selon le quotidien, qui cite des sources dignes de foi, l’âge légal pour prétendre officiellement à la retraite sera désormais de 63 ans et non plus de 60 ans actuellement. Il sera possible, pour ceux qui le souhaitent, de partir à la retraite à l’âge de 65 ans. Cette décision, si elle est prise, est justifiée par le fait que la moyenne d’âge des Tunisiens est de 73,4 ans. Le départ à 60 ans à la retraite signifie une grande perte pour le pays au vu des compétences et grands cadres qui arrêtent ainsi et assez tôt leur activité professionnelle. L’autre raison invoquée est l’allégement des charges des caisses sociales.
 
Il se trouve cependant qu’un point n’a pas été évoqué est la question du chômage qui a dépassé en Tunisie, selon les chiffres officiels, les 14%. Le fait que l’administration ne renouvelle pas ses équipes en recrutant des jeunes qui vont remplacer le retraités ne va pas certainement pas aider l’employabilité dans le pays et notamment les diplômés de l’enseignement supérieur.
 
R.B.H.
 

“Quand … on est sans pays” ou l’interdiction d’être enterré sur sa terre

 
AFP, le 13 octobre 2006 Najeh MOUELHI   TUNIS – Le dernier souhait de Yasser Arafat d’être enterré à Jérusalem n’aura pas été exaucé, pas plus que celui d’autres Palestiniens considérés comme d’éternels réfugiés et interdits de sépultures sur “leur terre” : une situation dénoncée dans le film “Quand on est sans pays” du Palestinien Nasri Hajjaj.   Ce cinéaste et écrivain a choisi de rendre hommage à ses compatriotes morts à l’étranger et où ils reposent, la loi israélienne interdisant aux Palestiniens nés à l’étranger d’être inhumés sur leur terre, dans son film qui sera dans les salles début 2007.   “Le Palestinien restera un réfugié, même après sa mort, tant que la loi israélienne lui interdira d’être enterré dans sa patrie”, déclare à l’AFP le réalisateur, qui réside à Tunis.   Nasri Hajjaj explique qu’il a voulu souligner le problème de cette interdiction faite par la législation israélienne à un non juif d’être enterré en “terre d’Israël” y compris Jérusalem s’il est décédé à l’étranger.   Hajjaj, né lui-même dans un camp de réfugiés du Liban il y a 55 ans, a tourné en Tunisie et au Proche-Orient (Egypte, Jordanie, Liban, Syrie, Territoires occupés) mais aussi en Europe (Bulgarie, France, Grande-Bretagne) aux Etats-Unis et au Vietnam.   “Dans chacun de ces pays, dit-il, est enterrée une personnalité palestinienne importante avec une histoire particulière”.   Pour lui, le temps fort du film se déroule au moment des funérailles du président de l’Autorité palestinienne Yasser Arafat, en novembre 2004 et des images de sa sépulture “provisoire” dans l’enceinte de la Moukataa (son quartier général de Ramallah, en Cisjordanie). Les autorités israéliennes avaient refusé qu’Arafat soit inhumé à Jérusalem comme le dirigeant palestinien l’avait demandé avant de mourir dans un hôpital militaire parisien.   La disparition d’Arafat a constitué “l’évenement majeur qui a fait plonger dans le vif du sujet en raison des nombreuses questions suscitées par sa mort et le lieu de son enterrement”, estime le cinéaste palestinien.   L’idée du film lui est venue lorsqu’il s’est rendu, en 1999, pour la première fois sur la terre de ses parents dans la région d’El Khalil (Cisjordanie), qu’ils ont été contraints de quitter en 1948 pour passer le reste de leur vie dans le camp de réfugié d’Ain El Heloué.   Le tournage a démarré fin 2004 à Londres sur la tombe du caricaturiste Naji El Ali assassiné il y a près de 20 ans.   A Paris, des prises de vues ont été réalisées sur celle de Mahmoud Al Hamchari, représentant de l’OLP en France assassiné par les services secrets israéliens dan la capitale française en 1973.   D’autres scènes ont été réalisées en Syrie sur la tombe de Khalil Al Wazir (Abou Jihad), numéro deux de l’OLP et initiateur de la première Intifada dans les territoires occupés, assassiné par un commando israélien à Tunis en avril 1988.   Hajjaj s’est également rendu sur les sépultures du premier président de l’OLP, Ahmed Al Choukeiri, en Jordanie, et d’autres Palestiniens inhumés en Bulgarie, aux Etats-Unis et au Vietnam.   En Tunisie, il a aussi filmé des tombes d’exilés palestiniens tués lors d’un bombardement de l’aviation israélienne en octobre 1985 sur le quartier général de l’OLP à Hammam Chott, dans la banlieue sud de Tunis, et la tombe de Salah Khalef (Abou Iyad), bras droit et chef des services de renseignement de Yasser Arafat, assassiné en janvier 1991.   Le film montre également des images des cimetières des camps de réfugiés d’Ain El Héloué au Liban, datant du premier conflit israélo-arabe en 1948. Des séquences ont été tournées au “cimetière de l’ennemi mort”, en Israël, où reposent des combattants palestiniens tués entre 1948 et la deuxième intifada.   Le film, dont le budget est d’environ 200.000 dollars, a été produit par la société tunisienne Familia production de Fadhel Jaibi.   AFP

Les illusions arabes de Jacques Chirac

 
Patrice Claude   Au Maghreb, Mohammed VI, le roi du Maroc, trouve sa tutelle “pesante” et poursuit un rapprochement accéléré avec les Etats-Unis. Abdelaziz Bouteflika, le président algérien, qu’il a soutenu dès 1999, lui refuse ce grand traité d’amitié franco-algérienne qui mettrait enfin un terme aux vieilles récriminations. Zine Ben Ali, le maître de la Tunisie, avec qui il s’est beaucoup compromis, notamment sur la question des droits de l’homme, “tourne mal” et devient infréquentable.   Au Machrek, Abou Mazen, le successeur russophile de Yasser Arafat à la présidence de l’Autorité palestinienne, l’ignore royalement. Bachar Al-Assad, le jeune dictateur syrien sur qui le président avait tant parié pour ouvrir le régime et laisser le Liban tranquille, est devenu son ennemi personnel lorsque – Jacques Chirac en est convaincu et il n’est pas le seul – il a fait assassiner son très proche ami libanais, Rafic Hariri. Le Hezbollah, dont la France était la seule à refuser l’inscription sur la liste noire des organisations “terroristes”, n’a pas digéré la résolution 1559, qui lui fait obligation de désarmer, et que Paris, visant la Syrie, a concoctée – et fait voter à l’ONU en septembre 2004 – avec l’administration Bush.   Aux Emirats arabes unis, son “grand ami” Cheikh Zayed est mort. C’est un fils peu connu à l’Elysée qui lui a succédé. Le roi Abdullah d’Arabie saoudite l’aime bien, mais c’est d’abord la poursuite du soutien américain à la dynastie régnante qui l’obsède. Quant à l’Irak… Depuis l’invasion de mars 2003, la France, largement absente du terrain, n’y existe pratiquement plus.   Tel est le sombre – trop sombre ? – tableau d’une “politique arabe” chiraquienne par trop personnalisée autour des autocrates dirigeants, et par trop oublieuse des peuples et des grands principes, donc soumise à toutes sortes de volte-face, de zigzags et de tête-à-queue. Que restera-t-il de la “politique arabe” de Jacques Chirac dans dix ou quinze ans ?, s’interrogent les deux auteurs, journalistes à Libération. Son opposition ferme, résolue et, en l’occurrence, visionnaire à la guerre en Irak, est-on tenté de répondre. L’intervention militaire à Bagdad, que l’administration Bush préparait dès novembre 2001, “offrira l’Irak à l’Iran”, confie le président à Jean-Pierre Chevènement six mois avant l’invasion. “Les faits lui donneront amplement raison”, admettent les auteurs, qui regrettent cependant l’”outrance” du défi hexagonal à l’Amérique.   Jacques Chirac, qui avait su, avant la guerre, envoyer promener tous les “atlantistes” militants de son camp – le député UMP Pierre Lellouche notamment, qui a, depuis, recyclé ses certitudes néoconservatrices auprès de “Sarkozy l’Américain” -, a-t-il regretté son action par la suite ? Sur la forme, sûrement. Brandir son veto à la télévision au moment où la diplomatie américaine s’efforçait d’obtenir une majorité au Conseil de sécurité des Nations unies était “une connerie”, confie un de ses proches. Le président s’est-il effrayé après coup de sa témérité ? A-t-il éprouvé de l’amertume envers ces “amis arabes”, hostiles à la guerre pour la galerie mais prêts, en coulisse, à donner un coup de main à Washington, comme l’ont fait la Jordanie et d’autres au Machrek ? Ou bien a-t-il finalement conclu que, maintenant que l’Amérique est embourbée, la France est dans le même bateau ? Une chose est sûre, la “politique arabe” française a changé.   Au printemps 2006, Maurice Gourdault-Montagne, le conseiller diplomatique en chef de Jacques Chirac, a résumé la diplomatie du président d’une formule lapidaire : “Eviter toute confrontation.” Avec qui ? Les Etats-Unis. C’est un peu, écrivent Christophe Boltanski et Eric Aeschimann, “comme si, désormais, l’unique objectif (de Paris) était de faire la paix avec… Washington”.   Chirac d’Arabie : les mirages d’une politique française. Christophe Boltanski et Eric Aeschimann. Grasset, 430 pages, 19,90 ¤.   (Source : « Le Monde » du 14.10.06)

Le réalisateur de la “Bataille d’Alger” est mort

 
Le cinéaste italien Gillo Pontecorvo, décédé jeudi à Rome à 86 ans, restera dans l’histoire du cinéma grâce à son film controversé sur la guerre d’Algérie, interdit de diffusion pendant près de 40 ans en France.   Gillo Pontecorvo était reconnu comme l’un des plus grands réalisateurs italiens de l’après-guerre, deux fois candidat aux Oscars, et père de la « Bataille d’Alger ». Cinéaste engagé, Pontecorvo avait déclaré en 1983 au Guardian : «Je ne suis pas un révolutionnaire à tout prix. Je suis simplement un homme de gauche, comme beaucoup de Juifs Italiens.»   Né à Pise en 1919, Gillo Pontecorvo se lance d’abord dans des études de chimie. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il travaille comme journaliste et messager pour le parti communiste italien. Une fois la paix signée, il devient correspondant à Paris de plusieurs journaux italiens. C’est alors qu’il voit « Paisa » de Rossellini : il abandonne aussitôt son métier de journaliste, achète une caméra et commence à tourner des courts métrages documentaires.   Des films à caractère social   En 1956, « Giovanna » relate la grève des femmes dans une usine de tissus. L’année suivante, il tourne son premier long métrage, « La Grande route bleue » (La grande strada azzura), aussi exploité sous le titre «Un dénommé Squarcio». Cette adaptation d’une nouvelle de Franco Solinas, son scénariste de prédilection, décrit la vie difficile d’un petit village de pêcheurs où l’on voit notamment Yves Montand lutter pour nourrir sa famille. En 1959, « Kapo » narre l’histoire d’une jeune fille juive, internée dans un camp de concentration et qui devient l’auxiliaire des officiers nazis.   La controverse de la « Bataille d’Alger »   Fortement marqué par la guerre d’Algérie, Gillo Pontecorvo avait très vite songé à réaliser un long métrage sur le conflit, mais celui-ci ne voit le jour que trois ans après la fin des hostilités, lorsque Yacef Saadi, un des chefs militaires du FLN à Alger, lui propose l’idée d’un film basé sur ses propres souvenirs de combat.   Tourné avec des non professionnels (excepté Jean Martin, dans le rôle du colonel Mathieu à la tête des parachutistes français), « La bataille d’Alger » traite de la lutte pour le contrôle de la Casbah en 1957 entre les paras français et les hommes du FLN, avec l’usage de la torture d’un côté et les attentats aveugles de l’autre.   Interdit en France, le film finit par sortir en 1971 avant d’être très vite retiré des écrans. En 2003, le film, considéré comme un modèle d’enseignement sur la guérilla urbaine, est projeté au Pentagone en vue de préparer la guerre en Irak. Le film ne ressort en France qu’en 2004, presque 40 ans après sa réalisation.   Le colonialisme avec Marlon Brandon   Après « La bataille d’Alger » en 1965, il revient en 1971 avec « Queimada » sur le colonialisme, cette fois dans les Antilles du XIXe siècle. L’histoire du cinéma a surtout retenu les caprices sur le plateau de la star Marlon Brando. En 1979, il tourne son dernier long métrage, « Ogro », qui traite du terrorisme à travers le meurtre du successeur du général Franco, et de la fin d’une dictature.   (Source : lefigaro.fr (Avec AFP), le 13 octobre 2006)

Les sucreries du ramadan

 
Jean-Claude Ribaut   Depuis quelques semaines, les pâtisseries orientales ont ravivé leurs étalages qui, à profusion, offrent tard le soir mille et un délices sucrés et colorés. La Bague de Kenza, rue Saint-Maur à Paris, brille de tous ses feux, tandis que les épiceries spécialisées du quartier regorgent de fruits secs, épices, dattes, miel et beurre destinés à la préparation des gâteaux du ramadan. Le début du ramadan, date mobile au neuvième mois lunaire du calendrier hégirien, tombait cette année le 24 septembre, le même jour que le Nouvel An juif. Ce jour-là, comme le chantait Charles Trenet, le Soleil avait rendez-vous avec la Lune. Le ramadan est l’un des cinq piliers de l’islam, une période de jeûne destinée à commémorer la Nuit du destin au cours de laquelle le Saint Coran fut révélé au Prophète (97e sourate). Une période exceptionnelle, qui impose au croyant de ne rien absorber entre le lever et le coucher du soleil, mais lui permet de se rattraper la nuit tombée. A la différence du carême et de sa diététique pénitentielle, le ramadan, qui dure trente jours, privilégie les mets reconstituants, les gâteaux sucrés et parfumés à l’eau de rose ou à la fleur d’oranger.     Les pâtisseries du Maghreb sont les plus familières en France. Les Tunisiens disputent aux Marocains la palme des “pâtisseries orientales”, terme générique qui désigne des sucreries très raffinées, tels le makroudh (gâteau de semoule trempé dans du miel et fourré de dattes), le ghrayba (sucre, farine de pois chiches et beurre salé formant une pâte sèche) ou bien la samsa, qui est une feuille de brick farcie aux fruits secs moulus. Le baklava, d’origine turque, présente un feuilletage assez compact fourré de pâte d’amande, comme le kaak tunisien, auquel s’ajoutent les saveurs délicates de la pistache et de la noisette.   Quelques gâteaux toutefois, selon les traditions locales, sont réservés au ramadan. Le griouach (el-mkharka aux amandes) est un mélange de farine, d’oeufs, de beurre et d’huile, d’amandes moulues, de sésame grillé, d’anis et de cannelle, de safran et de fleur d’oranger, lié d’un trait de gomme arabique et relevé d’un verre de vinaigre, selon l’usage importé d’Orient. Découpée en forme de fleurs, la pâte est plongée dans la friture, puis dans le miel tiède. Le sellou est un gâteau de farine dorée à la poêle, de graines de sésame, parfumé à l’anis et à la cannelle, formant une pyramide saupoudrée de sucre glace.   A base de sucre, de lait, de farine et de pâte de sésame, coloré au curcuma et agrémenté de pignons de pin, le sfouf est un gâteau traditionnel que l’on cuit dans un four avant de le découper en carrés ou en losanges. On le trouve au Liban comme dans tout le Maghreb. La galette aux mille trous (ghrayef) trouve également son origine au Moyen-Orient. C’est une recette familiale qui n’a comme différence avec les crêpes de la Chandeleur que la semoule de blé fin tamisée, ajoutée à la farine et à la levure, largement mouillée d’eau tiède pour donner une pâte veloutée. Une demi-louche répandue d’un geste maîtrisé dans une poêle chaude suffit à confectionner une crêpe que l’on ne fera cuire que d’un seul côté. Lorsque la surface se recouvre de petits trous – d’où son nom -, la galette est cuite.   Pour confectionner le chabakya, il faut d’abord mouiller les filaments de safran avec la fleur d’oranger, puis avec la levure. La pâte est composée de farine, de sésame, fenouil, sel, gomme arabique pilée, cannelle, sucre, un demi-verre de vinaigre, l’huile d’olive, le beurre fondu, la levure, le safran et deux oeufs battus. Un pétrissage énergique permet d’obtenir une feuille très fine, découpée en carrés, puis incisée, de manière à permettre un entrelacs de lanières qui forment bientôt une rose. Plongé dans la friture puis le miel chaud, et saupoudré de sésame grillé, c’est l’un des gâteaux les plus prisés du ramadan.   Le menu de ramadan du restaurant Oum-el-Banine, à Paris (16e), servi le soir uniquement, est respectueux de la tradition. Son propriétaire, Ahmed Termidi, né à Mazagan, au sud de Casablanca, ancien du Nikko au temps de Joël Robuchon, met un point d’honneur à respecter les saveurs d’une cuisine dont il connaît les usages.   Rituellement, la rupture du jeûne est marquée par une datte servie avec un verre de lait. Viennent ensuite le chabakya, puis la galette aux mille trous. Le repas se poursuit avec la harira, un potage aux saveurs de persil, coriandre et tomate. Couscous ou tagines suivent. Mais rien n’interdit de déguster le délicat harguma, pied de veau aux pois chiches et blé concassé, finement pimenté, avec lequel la règle impose de ne boire qu’un verre de jus de fruit. Le repas sera complet avec d’autres pâtisseries ou bien une rafraîchissante salade d’orange à la cannelle. Le repas (40 euros tout compris) se termine par le thé à la menthe ou le café maure, l’un comme l’autre parfumés à la fleur d’oranger.   La Bague de Kenza. 106, rue Saint-Maur, 75 011 Paris. Tél. : 01-43-14-93-15. Ouvert jusqu’à 22 heures. L’une des meilleures pâtisseries algériennes de la capitale.   Oum-el-Banine. 16 bis, rue Dufrenoy, 75016 Paris. Tél. : 01-45-04-91-22. Cuisine marocaine très raffinée (menu du ramadan 40 euros).   (Source : Le Monde, le 11 octobre 2006)


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