Assabilonline: Sidi Bouzid, deux morts et l’armée tunisienne intervient pour imposer le couvre feu AFP: Tunisie nouveaux affrontements dans la région de Sidi Bouzid AFP: Tunisie: nouveau cas de suicide à Sidi Bouzid
Kalima: Emeutes de Sidi Bouzid: 8e jour
Nouveau Parti Anticapitaliste : Communiqué du NPA. Soutien total à la population tunisienne.
Baccar Gherib : Sidi Bouzid nous interpelle : sachons l’écouter !
Sidi Bouzid, deux morts et l’armée
tunisienne intervient pour imposer le couvre feu
Tunisie: nouveaux affrontements dans la région de Sidi Bouzid
AFP 26/12/2010 | Mise à jour : 15:00 De nouveaux affrontements violents ont eu lieu dans la nuit de samedi à dimanche dans la région de Sidi Bouzid, dans le centre-ouest de la Tunisie, faisant un blessé par balle et des dégâts matériels importants, a-t-on appris dimanche de sources syndicales Des centaines de Tunisiens ont participé à une manifestation dans la ville de Souk Jedid, à 15 km au sud de Sidi Bouzid, en proie à des troubles sociaux depuis plus d’une semaine sur fond de chômage, a indiqué à l’AFP Mongi Rnimi, syndicaliste et témoin oculaire. Des hommes de la garde nationale ont procédé à des tirs de sommation pour disperser les manifestants qui ont encerclé le poste de la garde et mis le feu à la sous-préfecture de cette ville de plus de 19.000 habitants, a-t-il ajouté. Un des gardes nationaux a été touché par erreur à la cuisse par balles, a affirmé M. Rnimi. Parallèlement, des affrontements violents ont opposé environ 2.000 manifestants à la police durant plus de six heures, de 20H30 à 02H00 heures (19H30 à 01H00 GMT) dans la ville de Regueb à 37 km au sud-est de Sidi Bouzid, provoquant des dégâts matériels importants, a déclaré à l’AFP le syndicaliste Kamel Abidi. Des jeunes réclamant le droit au travail ont mis le feu à une banque, à un tribunal et ont détruit un café appartenant à un membre du parti au pouvoir, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), a précisé la même source. Aucune information sur ces incidents n’était immédiatement disponible de source officielle. Le parti social libéral (PSL) d’opposition légale et qui dispose de 8 sièges au Parlement a dénoncé dans un communiqué transmis à l’AFP, le recours « des parties irresponsables » à la violence et au désordre au lieu du dialogue pour faire avancer des revendications sociales. D’autres partis d’oppostion légale sans siège au Parlement avaient critiqué ce weekend l’usage des armes contre les manifestants. Le ministère de l’Intérieur l’a justifié de son côté par « la légitime défense ». Ces troubles se produisent à la suite d’une tentative de suicide le 17 décembre d’un jeune vendeur ambulant de fruits et de légumes qui s’était fait confisquer sa marchandise par la police municipale, n’ayant pas les autorisations nécessaires.
Tunisie: nouveau cas de suicide à Sidi Bouzid
Sidi Bouzid, rassemblement à l’URT pour exiger la libération des personnes arrêtées
Sbeitla : Des chômeurs diplômés de la région de Sbeïtla ont commencé un rassemblement au siège de l’Union Régionale du Travail pour leur droit à l’emploi, rassemblement auquel assistent des syndicalistes de Sbeïtla. Sidi Bouzid : Samedi 25, rassemblement à l’Union Régionale du Travail pour exiger la libération des personnes arrêtées Samedi 25 décembre de nombreux syndicalistes de Sidi Bouzid se sont rassemblés au siège de l’URT pour exiger la libération des personnes arrêtées […] De même des syndicalistes de Meknessi se sont rassemblés à l’Union locale du Travail pour la libération des gardés à vue et la levée du blocus sur la ville […] Tala … des diplômés chômeurs se rassemblent devant la délégation Samedi 25 décembre, une vingtaine de chômeurs diplômés de la région de Tala se sont rassemblés devant le siège de la délégation pour exiger leur droit à l’emploi. Les forces de l’ordre, en civil, et des RCDistes étaient présents. Ce rassemblement fait suite à une série d’autres ainsi qu’à des mouvements de protestation. Observatoire des droits et des libertés syndicaux (traduction d’extraits ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)
Emeutes de Sidi Bouzid: 8e jour
Proposé par Rédaction le Dimanche 26 décembre 2010 Les émeutes qui ont éclaté le 17 décembre dans le Gouvernorat de Sidi Bouzid, suite à l’immolation par le feu d’un jeune diplômé chômeur, se poursuivent. Les violences entre manifestants et forces de sécurité dans la région de Sidi Bouzid ont pris une tournure préoccupante le vendredi 24 décembre. A Menzel Bouzayane, lors des affrontements, un manifestant a été tué par des tirs à balles réelles, et des dizaines de personnes ont été gravement blessées. Une marche massive a eu lieu dans les rues de la ville de Menzel Bouzayane, rassemblant selon des témoignages des milliers de manifestants de couches sociales différentes. La police a violemment réprimé la manifestation par un usage disproportionné des bombes lacrymogènes et des tirs à balles réelles, tuant ainsi le jeune Mohammed Al Amari, un diplômé chômeur. Ce décès a alimenté la colère des manifestants, qui ont lancé des pierres sur les forces de sécurité et mis le feu à trois voitures de la Garde nationale (gendarmerie) dont les agents lançaient des bombes lacrymogènes et tiraient à balles réelles. Certains ont également incendié le siège de la Garde nationale et celui du RCD, parti au pouvoir, selon des sources syndicales. Nous avons appris que les autorités avaient envoyé d’importants renforts de sécurité dans la ville de Menzel Bouziane, où des colonnes de fumée s’élevaient de toutes parts. Selon des sources médicales, plus de trente blessés ont été admis dans les hôpitaux du Sned et Houssine-Bouziane de Gafsa. Un nombre similaire de blessés ont également été transportés vers les hôpitaux de la ville de Sfax. Selon nos sources à l’hôpital Habib Bourguiba de Sfax, deux jeunes hommes, Mohamed Lamine (19 ans) et Rami Ouled Nasr (20 ans), se trouvent dans état très critique, tandis que la police politique a encerclé l’hôpital pour empêcher toute visite. Dans la soirée du vendredi, la police, avec l’aide d’un certain nombre de milices appartenant au parti RCD, a fait des ratissages. Elle a fouillé des logements à l’aide de chiens policiers et arrêté des dizaines de jeunes gens accusés d’avoir participé aux manifestations. D’autre part, des boutiques ont été pillées et dévastées par des policiers et des miliciens. Dans la ville de Meknassi ; le professeur Issam Elghabri a été enlevé. Il a été soumis à de graves tortures par les forces de sécurité, puis jeté dans un fossé à l’extérieur de la ville. L’Union Régionale du Travail de Meknassi a organisé un sit-in, suivi d’une marche dans les rues de la ville, qui a été réprimée par les forces de sécurité à l’aide de gaz lacrymogènes. Selon des témoins oculaires, les forces de sécurité mènent une campagne de raids et d’arrestations dans la ville assiégée, et un couvre-feu a été imposé à partir de huit heures du soir. A Bizerte également, en réaction aux événements de Sidi Bouzid, de nombreux habitants se sont rassemblés en face de l’Union Régionale du Travail en criant des slogans solidaires avec la population de Sidi Bouzid. Ils ont aussi déposé une pétition auprès du Bureau exécutif de l’Union Générale du Travail et ont exigé la formation d’une commission régionale pour activer et intensifier l’élan de solidarité avec la population de Sidi Bouzid. Enfin, depuis vendredi des rassemblements syndicaux ont eu lieu suite à l’appel des Unions Régionale de Sfax, Kairouan et Sousse. D’autres personnes se sont rassemblées place Mohammed Ali, devant le siège de l’UGTT à Tunis pour exprimer leur soutien et leur solidarité avec la population de Sidi Bouzid. Quant au ministère de l’Intérieur et du développement local, dans une communication publiée par l’Agence Tunis Afrique Presse (TAP), il a rejeté sur les manifestants la responsabilité des événements sanglants qui ont lieu à Menzel Bouzayane, en affirmant: « Les agents de la garde nationale ont essayé de les dissuader en leur adressant des avertissements et en procédant à des tirs de sommation. Ces groupes ont, toutefois, poursuivi leurs tentatives pour pénétrer dans le poste de la Garde Nationale en lançant des cocktails Molotov, ce qui a amené certains agents de la garde nationale à recourir aux armes dans le cadre de la légitime défense. Cet incident a fait un mort et deux blessés parmi les assaillants. Plusieurs agents de la Garde Nationale ont subi des brûlures.Deux d’entre eux sont dans le coma. » (Source: Le site de « Radio Kalima » le 26 decembre 2010)
Communiqué de solidarité avec le peuple tunisien
Après le décès du jeune Hussein Alfalihi à Sidi Bouzid et l’assassinat du jeune Mohammed Amari (24ans) à Manzil Bouziane qui a été abattu par des policiers qui n’ont pas hésité à tirer sur des manifestants qui sont sortis par millier pour réclamer le droit au travail et à la dignité ; et pour dénoncer la corruption du système tunisien. Ces manifestations qui continuent depuis déjà huit jours les affrontements avec les forces de sécurité tunisienne dans les grandes villes telles que : Sidid Bouzid-Almaknassi- Manzil Bouziane-jelamah-Sidi Ali Ben Aoun…ont conduit a des arrestations de centaines de manifestants d’où la Ligue Marocaine Pour la Citoyenneté et les Doits de l’Homme : ü Exprime sa solidarité totale et inconditionnelle avec le peuple tunisien dans sa légitime réclamation au droit à un emploi équitable et une vie digne. ü Dénonce le système tunisien qui ne respecte pas les droits de l’homme et réprime toutes oppositions de la part des défenseurs des droits de l’homme. ü Appelle toutes les instances de droits de l’homme maghrébines et internationales à créer des commissions de solidarité et de soutien pour les mouvements des droits de l’homme et des mouvements socio-syndicaux en vu de démocratie et le respect des droits de l’homme. ü Met engarde contre la répression croissante des droits de l’homme et des libertés au Maghreb Arabe en l’ occurrence le Maroc ,l’Algérie ,la Lybie ,la Tunisie et aussi la Mauritanie. ü Lance un appel urgent aux peuples du grand Maghreb Arabe pour imposer à leur dirigeants l’union et unir nos actions de revendication sociales, syndicales et de droits de l’homme pour un Grand Maghreb Arabe sans frontières ni répressions, et sans conflits imaginaires nourris par les ambitions de certains états en vu de fragmenter les pays maghrébins afin de les affaiblir davantage. Par le Bureau exécutif Le président : Driss Sedraoui
Communiqué du NPA. Soutien total à la population tunisienne.
dimanche 26 décembre 2010 Depuis trois ans les populations de régions déshéritées de Tunisie, exclues du « miracle économique »exhibé comme vitrine du régime, se soulèvent à tour de rôle pour exiger des emplois, la fin de la corruption et du népotisme. Après celles du Bassin Minier de la région de Gafsa, de La Skhira et de Ben Guerdane, c’est, depuis une semaine, au tour de la population du gouvernorat de Sidi Bouzid, au centre du pays, de manifester. Comme toujours, la réponse des autorités est répressive, sécuritaire, voire meurtrière: arrestations, tortures, couvre-feu, déploiement des milices du parti au pouvoir, de la police et de l’armée, tirs à balles réelles qui ont fait des dizaines de blessés et un mort, des suicides, le tout dans le silence ou la désinformation d’un blocus médiatique imposé. Des syndicalistes ont organisé des manifestations de soutien à Bizerte et Tunis, Nabeul et Sfax. Le NPA affirme son soutien plein et entier à la lutte légitime des populations pour l’emploi, exige la libération des personnes arrêtées, réclame une commission d’enquête indépendante sur la torture et les morts, le départ des forces de police et de l’armée et le rétablissement des libertés démocratiques confisquées. Le NPA dénonce le silence du pouvoir français complice de la dictature et appelle à la solidarité internationale avec le peuple tunisien en lutte. Le 26 décembre 2010.
Cachez cette misère tunisienne que le peuple français ne saurait voir
Il y a la Tunisie des plages, des grandes conférences internationales, des petits cadeaux et des amis de trente ans du régime. Celle du «miracle économique tunisien», l’expression en vogue au cœur des années 1990 pour désigner une économie tunisienne dopée par le textileoff shore et la délocalisation des centres d’appels. Et puis, il y a la réalité sociale, celle d’un pays qui coule, sous le joug d’une famille toute puissante, qui organise sans se cacher la succession d’un président malade, au pouvoir depuis 1987. Mercredi soir, un jeune Tunisien a trouvé la mort par électrocution à Sidi Bouzid, une ville du centre-ouest tunisien, située à 265 km de Tunis et en proie à des manifestations depuis le 19 décembre. «Selon les données disponibles, le jeune a été électrocuté après avoir été au contact de câbles électriques d’une puissance de 30.000 volts, lorsqu’il est monté en haut du pylône», écrit l’agence gouvernementale TAP. Selon plusieurs témoins, Houcine Neji, 24 ans, a escaladé un poteau électrique en criant qu’il ne voulait «plus de misère, plus de chômage» avant de s’électrocuter au contact de câbles de haute tension. L’homme est tombé devant une foule ahurie, raconte Attia Athmouni, un opposant en charge d’un comité de soutien aux habitants de Sidi Bouzid. Ce qui s’apparente à un suicide a eu lieu devant les locaux de la municipalité, dans un climat de tension intense. Car vendredi dernier déjà, un jeune homme avait tenté de mettre fin à ses jours pour protester contrer la confiscation par les autorités municipales des fruits et légumes qu’il voulait vendre. Mohamed Bouazizi, 26 ans, diplômé de l’université, vendeur ambulant pour nourrir sa famille, s’est aspergé d’essence pour s’immoler par le feu, selon plusieurs témoins cités par l’AFP. Grièvement blessé, il a été transféré dans un centre médical soignant les grands brûlés, près de Tunis. Dans cette région où le phénomène des «diplômés chômeurs» semble avoir pris une ampleur considérable, ce premier incident a provoqué des protestations qui ont dégénéré samedi dernier en affrontements entre la police et les habitants, quand ceux-ci ont mis le feu à des pneumatiques et scandé des slogans pour réclamer le droit de travailler. Mercredi, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) avait exprimé «sa vive inquiétude face à la situation en Tunisie après les émeutes» à Sidi Bouzid. Selon la FIDH, les affrontements entre manifestants et forces de l’ordre qui ont commencé samedi 17 décembre à Sidi Bouzid (265 km de Tunis),«se sont propagés aux villes alentour» et ont «perduré jusqu’au mardi matin». «Plusieurs dizaines de manifestants ont été arrêtés. À ce jour, trois personnes sont toujours détenues par les forces de police tunisiennes», selon la FIDH, qui réclame leur «libération» et «une enquête impartiale».
Cette détresse des habitants de Sidi Bouzid est loin de se résumer à un «incident isolé», comme le pouvoir tunisien tente de le faire accroire cette semaine. Depuis 2008, la Tunisie vit au rythme des mouvements sociaux d’une intensité sans équivalent au Maghreb, qui agitent en particulier le sud du pays, et les environs de Gafsa, une région minière où plus de la moitié des habitants ne trouvent pas de travail. Cette révolte populaire du bassin minier Gafsa, c’est l’histoire d’une grève générale de plus d’un an et demi dans toute la région sud de la Tunisie, qui n’en peut plus d’être marginalisée par le régime en place. Sous-médiatisée par la presse internationale, ce mouvement n’en a pas moins eu des conséquences dramatiques, lorsqu’à la mi-2008, l’armée intervint à Redeyef, petite ville de la région, pour réprimer une manifestation, tuant au passage un jeune homme âgé de 25 ans (pour plus de détails, lire le compte rendu des évènements par Mediapart.) Par la suite, plusieurs dizaines de militants et syndicalistes ont été condamnés à des peines de prison ferme, simplement pour avoir informé de ce qui se passait à Gafsa. Ce fut notamment le cas du syndicaliste Adnane Hajji, régulièrement cité par l’AFP et joint à plusieurs occasions par Mediapart, dont la santé devait souffrir du traitement particulier que lui réservaient policiers et gardiens de la prison où il fut enfermé pendant près d’une année… En Tunisie, cette révolte demeure d’ailleurs un tabou absolu du régime, et le mouvement de Gafsa n’en finit plus d’être utilisé par Tunis pour réprimer à tour de bras. À l’été 2010, le journaliste Fahem Boukadous notamment fut condamné à quatre années de prison ferme, simplement pour avoir informé la presse sur ce qui se passait sur place depuis la fin 2007. Face à cette réalité sociale, le gouvernement oppose les chiffres de la banque centrale tunisienne, qui continue d’évoquer une croissance annuelle supérieure à 5% et se flatte d’une inflation «contenue». Des chiffres douteux, en l’absence d’aucun organisme d’analyse économique indépendant sur le sol tunisien, et qui ne disent pas grand-chose d’une réalité tunisienne quand, dans le Sud du pays, le prix du pain et de la farine, jadis garanti par l’Etat, peut désormais varier du simple au triple d’une semaine à l’autre. Ou quand, dans des régions entières au Sud du pays, le chômage affecte plus de la moitié de la population. En octobre, suite à un entretien avec le premier ministre tunisien, le patron du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn, a pourtant jugé pertinent de louer la «vision prospective», avant de salur «les réformes» adoptées en Tunisie, qui ont «permis au pays de réduire l’impact de la crise financière et économique internationale». L’optimisme de Dominique Strauss-Kahn sur la Tunisie ne date pas de la visite du chef du gouvernement tunisien, venu présenter son plan quinquennal 2010-2014. De passage à Tunis fin 2008, quelques mois après le début des émeutes et de la grève générale de Gafsa, Dominique Strauss-Khan qualifiait déjà de «saine» la politique économique de la Tunisie. DSK estimait même que le FMI avait une «opinion très positive» de cette politique qui constituait «le meilleur modèle à suivre pour de nombreux pays émergents.» Fin 2010, le soutien français à la politique économique de Ben Ali, essentiel pour Tunis quand Paris demeure le premier partenaire économique, se veut donc toujours indéfectible. Est-il encore utile de rappeler que Nicolas Sarkozy avait été le premier, et l’un des seuls chefs d’Etat étrangers, à féliciter Ben Ali l’an passé pour sa réélection à la présidence tunisienne, pour un cinquième mandat de rang? Le soutien français au régime tunisien n’est d’ailleurs pas qu’une affaire d’élites, c’est aussi celui de chaque citoyen, quand 700.000 de nos compatriotes se rendent chaque année sur le sol tunisien pour y couler des jours heureux sur le littoral, le plus souvent au détriment de la population locale (Sur ce thème, lire l’enquête de Mediapart : En Tunisie, le tourisme devient une mécanique infernale qui brise le pays.)
Sidi Bouzid nous interpelle : sachons l’écouter !
En politique, comme ailleurs, il y a plus grave que les problèmes eux-mêmes, c’est leur déni. A en croire, en effet, l’habituelle source officielle – toujours anonyme ! – qui vient faire le point durant chaque crise, les récents événements vécus par la ville et le gouvernorat de Sidi Bouzid ne sont que les suites d’un triste fait-divers savamment exploité par « certaines parties » malintentionnées. Ainsi, ce gouvernorat ne pâtirait pas de problèmes économiques particuliers et aurait bénéficié, à l’égal des autres, des efforts d’investissement consentis par la collectivité nationale. En somme, c’est le classique « Circulez, y a rien à voir ! », qui est, hélas ! loin d’être à la hauteur de la situation. Nous pensons, en effet, que les manifestations de colère de la population et surtout des jeunes de Sidi Bouzid sont l’expression de problèmes réels, qu’ils sont autant d’appels à la nation et que, en tant que tels, ils ne doivent pas être ignorés et qu’ils méritent, au contraire, d’être écoutés avec attention, et cela pour au moins deux raisons. D’abord, parce qu’il s’agit, dans l’espace de quelques mois, après Redeyef, Skhira et Ben Guerdane, du quatrième épisode de révolte, à l’intérieur du pays, liée à la revendication d’emplois et, plus généralement, des moyens d’une vie plus digne. Ce qui remet au devant de la scène et avec une certaine urgence la problématique du développement régional. Ensuite, et surtout, parce que l’acte désespéré du jeune Mohamed Bouazizi, qui a agi comme déclencheur des événements, est hautement symbolique en ce qu’il révèle à la nation le caractère tragique d’un phénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur : le chômage des diplômés de l’enseignement du supérieur. Ceux-ci étaient, de l’aveu du Ministère de l’emploi et de la formation professionnelle, au nombre de 135.000 au mois de mai 2009, et sont, aujourd’hui, si l’on tient compte des promotions de juin 2009 et juin 2010, vraisemblablement autour de 200.000 ! Ce chiffre alarmant démontre que le chômage en Tunisie touche en premier lieu les jeunes et, parmi eux, surtout les diplômés. Mieux, une étude minutieuse de la répartition du chômage des diplômés du supérieur selon les régions montre qu’il est plus faible dans les villes du littoral, notamment à Tunis, et plus élevé à l’intérieur, avec un triste record dans les gouvernorats de Gafsa et, justement, Sidi Bouzid avec un taux de près de 50% !! Il ne sert peut-être pas à grand-chose, aujourd’hui, d’épiloguer sur les erreurs d’une politique de massification non réfléchie et hâtive dans l’enseignement supérieur, à visée essentiellement quantitative et, au surplus, tout à fait en porte-à-faux avec les capacités du tissu économique et industriel du pays. Mais il est clair que la conception de l’université comme un vaste parking retardant l’échéance du chômage n’a pas fait qu’ajourner le problème, elle l’a aggravé ! Car les attentes des jeunes munis de diplômes sont d’autant plus fortes et, face au chômage, leurs frustrations d’autant plus vives. Dès lors, il est impératif et urgent d’écouter avec attention l’appel de Sidi Bouzid, et de se pencher sérieusement sur les questions urgentes et connexes du chômage des diplômés, des jeunes et du développement régional, pour redonner l’espoir d’une vie meilleure à nos jeunes générations.
JEUNE DE SOLIDARITE AVEC FAHEM BOUKADDOUS
Le 26 décembre 2010 Fahem Boukadous, journaliste tunisien a été condamné à une peine d’emprisonnement de quatre ans pour avoir couvert le mouvement de protestation du bassin minier de 2008. Il effectue sa peine d’emprisonnement à la prison de Gafsa dans des conditions inhumaines. Atteint d’asthme, il devrait être soigné et sa place est à l’hôpital et non en prison. Chaque lundi, son épouse, Afef Bennaceur, lui rend visite en prison. Nous annonçons que nous observerons, comme chaque lundi, une nouvelle journée de jeûne demain lundi 27 décembre, et tous les lundis qui suivront jusqu’à sa libération. Sana Elmahidelli Msahli, Sarra Saïdi, Jawaher Chenna, Safa Mansouri, Karima Boussetta, Belkis Rakia, Hajer Zaatour, Mouna Harrabi, Fadhila Ben Fkih, Hannan Aroussi, Hamida Dridi, Lina Ben Mhenni, Denise Brice, Dalel Zaïbi, Ghezala M’hamedi, Zakia Dhifaoui, Faten Khlifa, Ahlem Ben Jaffal, Najoua Rezgui, Monia Abid, Radhia Nasraoui, Zina Nooman, Najet Hosni, Samia Abbou et Marguerite Rollinde ont annoncé qu’elles se joindraient à cette action en observant demain une journée de jeûne de solidarité.
Home – Accueil – الرئيسية