Des cris, des larmes et… des morts       à l’hôpital Mustapha        Des images insoutenables
  
 
       
 Rabah Beldjenna                     Dix heures quarante-cinq hier. Un immense bruit étrange replonge les       Algérois dans la psychose. La très forte explosion a été entendue dans       tous les quartiers de la capitale.               C’est le siège du Palais du gouvernement qui venait d’être la cible d’un       attentat kamikaze. Subitement, un gros nuage de fumée noire se dégageait       du lieu de l’explosion alors que des sirènes des ambulances et des       voitures de police retentissaient de partout. 11h passées, une file       interminable d’ambulances affluaient vers l’hôpital Mustapha acheminant       des blessés dont certains étaient dans un état grave. Certaines victimes       étaient méconnaissables tant elles étaient totalement recouvertes de sang.       Le service des urgences de cet établissement était submergé par un nombre       important de blessés. Le staff médical semble être dépassé. Un climat       morose est perceptible aux alentours du lieu où étaient pris en charge les       victimes de cet attentat. Beaucoup de femmes fondent en larmes à la vue       des corps. Au même moment, une personne appelle avec son mégaphone les       bénévoles pour des dons de sang. L’accès à l’intérieur du service des       urgences de l’hôpital est devenu impossible. « S’il vous plaît, y a-t-il       des policiers parmi les victimes ? », interroge une femme. Un officier de       police, visiblement dépassé par la foule nombreuse de personnes qui s’est       déplacée pour s’enquérir des nouvelles de leurs proches, ne bronche pas.       11h30. Le ministre de la Solidarité nationale arrive sur les lieux.       Approché, Ould Abbas nous informe qu’à ce moment il a été enregistré au       niveau de l’hôpital un seul décès et une quarantaine de blessés. Le       directeur de l’hôpital Mustapha, Dahar Yahia, annoncera une demi-heure       après 3 décès parmi les 93 blessés acheminés vers son établissement. Les       trois morts étaient tous des policiers. Notre interlocuteur a tenu à       rassurer toutefois que l’ensemble du personnel médical, y compris les       professeurs, a été mobilisé pour prendre en charge les blessés. Un       officier de la Protection civile annoncera, pour sa part, que ses éléments       ont dénombré huit morts sur la place où a eu lieu l’attentat, les Quatre       canons. Cependant, ils était difficile de connaître le nombre exact de       victimes tant le bilan pouvait à tout moment s’aggraver. Le chef du       service des urgences de l’hôpital, Guerenik Mohamed, nous a d’ailleurs       indiqué que le nombre de blessés graves avoisinerait la quarantaine.       Kamilia, une enfant d’à peine trois années, se trouvait parmi les victimes.       Elle s’en est sortie heureusement avec des blessures légères au niveau de       la tête. Elle se trouvait au moment de l’attentat dans la crèche Esplanade       située non loin du Palais du gouvernement. Selon une employée de cette       crèche, deux enfants sont encore à l’hôpital dans un état critique. 13h,       un jeune sort des urgences. Il était toujours sous le choc. Cet employé du       ministère de l’Intérieur ne comprenait pas encore ce qui venait de se       produire. « Je me trouvais à l’intérieur du ministère (ndlr, celui de       l’Intérieur), soudain j’ai ressenti que tout me tombait sur la tête. » «       J’ai cru à un tremblement », témoigne-t-il. Celui-ci, pouvant à peine       parler, ajoute : « En tous cas, ce n’était pas une bombe, ça ne pouvait       être qu’une voiture d’un kamikaze qui a foncé droit sur nous. » 13h       passées, des sources de l’hôpital faisaient état de 5 personnes qui ont       succombé à leurs blessures au niveau de l’hôpital. Ce qui faisait à la       mi-journée d’hier au total13 morts au niveau du Palais du gouvernement.                    (Source : El Watan (Quotidien – Algérie),       édition du 12 avril 2007) Lien : http://www.elwatan.com/spip.php?page=article&id_article=65541
 ANALYSE        Une menace terroriste accrue dans l’ensemble du Maghreb
       
  Reuters, le 12 avril 2007 à 15h51 par William Maclean ALGER, 12 avril (Reuters) – Les attentats       suicides perpétrés cette semaine en Algérie et au Maroc dénotent un       renforcement de la menace incarnée par les groupes islamistes armés       cherchant à établir un Etat islamique dans le Maghreb.              Mercredi dans la capitale algérienne, deux attentats suicides ont fait 33       morts et 222 blessés. L’une des explosions a emporté une partie de la       façade du Palais du gouvernement situé au coeur d’Alger.              La veille, à Casablanca, trois kamikazes présumés s’étaient fait exploser       à la suite d’une descente de police lors de laquelle un quatrième suspect       a été abattu. Un cinquième membre de cette cellule d’activistes présumés a       été interpellé ce jeudi.              L’organisation Al Qaïda cherche depuis longtemps à s’implanter dans les       pays du Magreb en raison de leur proximité avec le sud de l’Europe, qui en       fait une base arrière idéale pour lancer des attaques contre des villes       européennes.              Depuis le début de l’année, on a constaté une recrudescence des activités       des groupes islamistes au Maroc et en Algérie, donnant du poids aux       affirmations d’Al Qaïda qui prétend avoir étendu son emprise sur       l’ensemble du Maghreb.              La Tunisie, habituellement calme, a été le théâtre en décembre et janvier       derniers d’affrontements entre la police et des islamistes.              Peut-on pour autant parler d’attentats coordonnés par une seule et même       organisation ? Cela reste pour l’instant difficile à établir.              Le ministre marocain de l’Intérieur, Chakib Benmoussa, a affirmé mercredi       soir que les attentats à la bombe perpétrés au Maroc et en Algérie étaient       l’œuvre de différents groupes terroristes qui n’agissaient pas de façon       coordonnée.              PAS DE COORDINATION ?              « Le gouvernement marocain a probablement raison de dire qu’il n’y a pas de       lien clairement établi entre les explosions au Maroc et en Algérie mais       cela ne peut pas être totalement exclu », estime Magnus Ranstorp, expert en       terrorisme au Collège suédois de défense nationale.              Selon Anne Giudicelli du cabinet de conseil Terrorisc, les groupes       islamistes armés de la région partagent la même idéologie et poursuivent       les mêmes buts mais rien ne montre qu’il existe des liens opérationnels       entre eux.              « Il existe des liens entre des personnes, elles se parlent et partagent le       même point de vue (…) mais ce n’est pas opérationnel », explique-t-elle.              En janvier dernier, le principal mouvement islamiste algérien, le Groupe       salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), s’est toutefois       rebaptisé Organisation Al Qaïda au Maghreb islamique et a annoncé un       renforcement de ses liens avec la nébuleuse islamiste internationale.              Au même moment, le groupe a modifié sa stratégie en optant pour des       attentats spectaculaires dans des lieux publics. « Le lien avec Al Qaïda a       donné au GSPC une légitimité pour fédérer différents groupes dans la       région mais on ne peut pas parler d’une seule organisation », estime       toutefois Giudicelli.              De l’avis des analystes, les kamikazes d’Alger et de Casablanca se sont       inspirés des mêmes modes d’emploi pour fabriquer des bombes disponibles       sur internet et des mêmes DVD et CD contenant des sermons et vantant le       martyre.              Mais il existe des différences fondamentales entre les deux pays. La       société marocaine est pauvre mais stable et les salafistes ciblent les       jeunes au chômage vivant dans des quartiers déshérités. En Algérie, les       groupes armés sont constitués de combattants aguerris, qui se cachent dans       les montagnes et mènent depuis de nombreuses années une guérilla contre le       gouvernement.              REUTERS  
« Al-Qaida pour le Maghreb islamique »       veut désormais s’inscrire dans le djihad globalisé
       
 Piotr Smolar              Lorsqu’une multinationale change de nom, elle lance une campagne de       communication. Lorsque le Groupe salafiste pour la prédication et le       combat (GSPC), a annoncé officiellement, en janvier, qu’il devenait « Al-Qaida       pour le Maghreb islamique » (AQMI), les spécialistes de l’antiterrorisme       ont donc redouté le pire, en Algérie comme en Europe.              Ces craintes viennent de recevoir confirmation avec les attentats       kamikazes d’Alger. Selon une série de notes très récentes des services de       renseignement français, dont Le Monde a eu connaissance, le changement       d’appellation correspond à des intérêts mutuels entre la direction du GSPC       et le noyau dur d’Al-Qaida : la première profite du prestige de la marque       mondialement connue ; Al-Qaida, pour sa part, bénéficie des coups d’éclat       de ses nouveaux représentants et développe ses réseaux dans le Maghreb.              Dans la région, ces derniers mois ont été marqués par une activité       islamiste intense, comme l’a illustré le suicide de trois kamikazes       poursuivis par la police le 10 avril à Casablanca, au Maroc. « Nous sommes       face à la troisième génération d’activistes, après le FIS (Front islamique       du salut), puis le GIA (Groupes islamiques armés)-GSPC », explique le       chercheur Olivier Roy, avant d’ajouter : « Le modèle GIA, reposant sur la       lutte dans les maquis et la volonté de constituer un Etat islamique, ne       fonctionne plus. La nouvelle génération n’a aucune stratégie de ralliement       des masses ; elle s’inscrit dans un projet global, supranational. Ils sont       beaucoup trop « modernes » pour avoir un projet politique élaboré. Ils       veulent simplement frapper en ayant le plus grand impact médiatique. »              L’une des cibles choisies, le siège du gouvernement, ressemble à un       véritable défi et à une démonstration de force, qui intervient comme en       réponse à la vaste opération militaire lancée depuis deux semaines dans la       région de Bejaia, en Kabylie. « AQMI correspond à un vrai projet cohérent,       explique un haut responsable français du renseignement : il s’agit pour       eux de dépasser la dimension strictement algérienne de la lutte et de       poursuivre aussi un agenda djihadiste. »              TENTATIVE D’UNIFICATION              La volonté de déstabiliser le régime d’Alger tout en s’inscrivant dans la       mouvance islamiste internationale apparaît à travers les dernières       opérations menées. Le mode opératoire – voitures piégées – des attentats       simultanés en Kabylie, le 13 février, est une copie conforme de ceux       conduits en Irak. Le 10 décembre 2006, l’attentat contre un bus       transportant des employés de la société américaine BRC, une filiale de la       compagnie publique algérienne Sonatrach et de Halliburton, a fait un mort       à Bouchaoui, à l’ouest d’Alger. Outre le chauffeur algérien tué,       l’attentat a fait neuf blessés dont huit étrangers. Ces techniciens       victimes sont des ressortissants de pays engagés sur le front afghan ou       irakien, soulignent les services, alors que le secteur économique visé est       la clé de voûte du régime d’Alger.              Abdelmalek Droukdal (« Abou Moussab », de son nom de guerre) le chef de       l’ex-GSPC, essayerait, depuis quelques mois, de résoudre l’atomisation de       son organisation en affirmant « sa volonté de centralisme démocratique »,       selon l’expression ironique d’un haut responsable français. Il chercherait       notamment à fédérer des khatibas (compagnies) de différentes régions et à       développer les contacts dans tout le Nord-Ouest de l’Afrique, sur un arc       allant de la Mauritanie à la Libye. « La volonté d’unifier les forces       djihadistes dans la région est claire, explique Louis Caprioli, conseiller       de la société Geos et ancien sous-directeur chargé de l’antiterrorisme à       la Direction de la surveillance du territoire (DST). Mais pour l’instant,       il leur manque une âme, un coordinateur. Al-Zawahiri, le numéro deux       d’Al-Qaida, n’a pas désigné Droukdal dans ce rôle. »              Le chef de l’unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT),       Christophe Chaboud, fait preuve de la même prudence. « Le lien éventuel qui       existerait entre les islamistes dans ces pays est idéologique, et sans       doute pas opérationnel, affirme-t-il. Même si on vient d’assister en       quelques mois à des événements rapprochés, en Tunisie, au Maroc et en       Algérie, on ne peut pas dire que tout est lié, qu’une espèce de direction       centrale décide de frapper un jour là, un autre ailleurs. Au contraire,       tout parait tellement déstructuré… »               (Source : « Le Monde » (Quotidien – France),       édition du 13 avril 2007)
Edito du Monde       Al-Qaida à Alger
       
                    A coups de bombes et d’actions-suicides, Al-Qaida tisse sa toile au       Maghreb. Les sanglants attentats d’Alger, mercredi 11 avril, semblent       confirmer que le changement de nom du Groupe salafiste pour la prédication       et le combat (GSPC), devenu Al-Qaida au Maghreb, correspond, au moins en       partie, à une réalité.               Outre la revendication elle-même, plusieurs indices plaident en ce sens.       Jusqu’à maintenant, à une exception près, aucun groupe algérien       d’islamistes armés n’avait jamais eu recours à des kamikazes, alors que       c’est le mode d’action habituel de la nébuleuse Ben Laden. L’une des       cibles choisies, le palais du gouvernement, visé par une voiture bourrée       d’explosifs, en plein coeur d’un périmètre très sécurisé au coeur d’Alger,       semble témoigner d’une audace et d’une capacité logistique plus       développées que celles de l’ancien GSPC, réputé par ailleurs ne s’en       prendre qu’aux forces de sécurité, et non aux civils. La date choisie : le       11 avril, après le 11 septembre 2001 américain, le 11 mars 2004 espagnol       et les attentats déjoués programmés dans des avions au-dessus de       l’Atlantique le 11 août 2006, paraît aller dans le même sens.              Ces attentats ont donc une double signification. D’une part, à un mois des       élections législatives algériennes du 17 mai – dont on n’attend aucun       changement politique majeur -, ils sont un camouflet et un défi au pouvoir       algérien. Ils font voler en éclats la fiction d’une réussite de la       politique de « réconciliation nationale », après le référendum qui, en 2005,       était supposé tirer un trait sur la guerre civile des années 1990 et du       début des années 2000. D’autre part, ils semblent confirmer qu’Al-Qaida       applique désormais à l’Algérie une tactique déjà utilisée au Maroc : faire       pression sur les gouvernements et devenir un acteur de la politique       intérieure des pays du Maghreb, par le biais de groupes armés existants,       désormais « franchisés », qui bénéficient en retour de la médiatisation       d’Al-Qaida et de son aura dans une partie du monde musulman.              Enfin, de manière plus indirecte, les attentats d’Alger rappellent à       l’Europe, et en particulier à la France, déjà menacée par l’ex-GSPC, que       le danger Al-Qaida est tout proche. L’implantation des disciples de Ben       Laden au Maghreb, voire au Sahel, vise aussi à fournir aux terroristes des       bases opérationnelles proches du continent européen. L’ex-GSPC semble       d’ailleurs être un relais pour approcher une partie des populations       sahéliennes.              Le gouvernement algérien et le président Bouteflika ne sont bien sûr pas       responsables de la dynamique d’Al-Qaida, farouche adversaire de toute       démocratisation et modernisation des pays arabes. Mais l’immobilisme face       aux problèmes sociaux et à la désespérance d’une partie de la jeunesse, la       mise en place de démocraties de façade contribuent à fournir des prétextes       à la violence islamiste, en Algérie comme ailleurs dans le monde arabe.              (Source : « Le Monde » (Quotidien – France),       édition du 13 avril 2007)
Entretien       Hamida Layachi : « Le GSPC et Al-Qaida ont conclu une alliance »
       
 Propos recueillis par Florence Beaugé Spécialiste de l’islamisme algérien, vous préparez       un ouvrage sur le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC),       à paraître en septembre à Alger. Les attentats-suicides survenus, mercredi       11 avril, au cœur de la capitale algérienne, pourtant hautement sécurisée,       étaient-ils prévisibles ?                Ils l’étaient. J’avais d’ailleurs évoqué cette hypothèse il y a un mois       et demi dans un hebdomadaire arabophone algérien, de même que sur la       chaîne de télévision France24. Pourtant, pendant toutes les années de       terrorisme de la décennie 1990, l’Algérie n’a connu qu’un seul attentat       kamikaze, perpétré contre un commissariat d’Alger par un jeune de 17ans.       Après cette unique fois, on n’a plus entendu parler d’attentats-suicides.              Mais, au cours des quatre dernières années, le GSPC a perdu quelque 4000       hommes. La dissidence de la khatiba [compagnie] Al-Roulaba, qui a opté, il       y a deux ans, pour la réconciliation nationale [proposée par le président       Bouteflika, en échange d’une amnistie], lui a porté un coup très dur. Le       GSPC ne compte plus aujourd’hui qu’un millier d’hommes sur le terrain. Il       a en outre perdu sa légitimité auprès de la population algérienne. Il lui       fallait donc changer de stratégie. Il s’est réorganisé, a placé de       nouvelles figures à sa tête. Son nouveau « conseil » est constitué de gens       instruits sur le plan idéologique, formés pour la plupart en Afghanistan,       d’où ils ont ramené de nouvelles méthodes.              L’actuel émir [chef] du GSPC n’est plus Hassan Hattab, mais un       intellectuel pragmatique, Abou Moussab, ingénieur, spécialisé dans les       explosifs. Cet ancien « Afghan » a conclu une sorte de marché avec Al-Qaida       : il est devenu le représentant du mouvement de Ben Laden au Maghreb et,       en échange, il bénéficie de la médiatisation dont il avait besoin, en       particulier de la part des médias arabes, tels Al-Jazira. Le numéro 2       d’Al-Qaida, [Ayman] Al-Zawahiri, n’a jamais caché, ces dernières années,       tout l’intérêt qu’il portait au Maghreb.              Le GSPC et Al-Qaida ont donc conclu une alliance…                    Il n’y a pas de doute. Quand Al-Zawahiri a annoncé cette alliance, il a       publié l’organigramme du nouveau mouvement, de façon très officielle et       très crédible. Ses travaux d’approche vers le GSPC ne datent pas d’hier.       Dans les années 1990, il avait tenté cette unification, mais en vain. A       l’époque, le GSPC faisait encore partie des GIA [Groupes islamistes       armés]. Il s’en est séparé en 1996 avant de surgir, sous son appellation       propre, en 1998.              Longtemps, le GSPC a bénéficié d’une image relativement positive en       Algérie. Il était supposé épargner les civils et ne s’en prendre qu’aux       forces de sécurité algériennes…               Ce temps-là est révolu. La stratégie du GSPC a changé. Il accentue son       rejet absolu de toute réconciliation et signifie qu’il a désormais deux       ennemis : le pouvoir algérien et l’Occident, en particulier la France.       Dans l’un de ses derniers communiqués, dûment authentifié, il y a environ       trois mois, il le dit clairement. Le choix de ses cibles, mercredi, ne       doit d’ailleurs rien au hasard : le Palais du gouvernement est le cœur       même du pouvoir algérien. C’est aussi un bâtiment qui date de l’époque       coloniale française. Il abritait autrefois le siège du gouvernement       général, autrement dit les représentants du pouvoir métropolitain, et       surplombait le fameux « Forum ». C’est là qu’en 1958, le général de Gaulle a       prononcé son fameux discours – « Je vous ai compris… » – qui a été       interprété par les colons comme l’assurance que l’Algérie resterait       française. La symbolique est donc double et particulièrement forte. Si le       GSPC avait choisi de faire un millier de morts, il aurait envoyé ses       kamikazes rue Didouche-Mourad [l’une des principales artères de la ville],       par exemple. Il ne l’a pas fait, délibérément.              Quelles conséquences ces attentats-suicides       peuvent-ils avoir ?               La première, c’est la fragilisation du processus de réconciliation voulu       par M.Bouteflika. C’est un coup dur pour le président, et même un       camouflet. La population algérienne est sous le choc. Le pouvoir va devoir       réagir. Je ne crois pas qu’il puisse se limiter à une riposte purement       sécuritaire. Je m’attends à un discours musclé sur le plan politique,       peut-être même à une initiative. Les autorités vont être obligées de faire       quelque chose pour tenter de débloquer les choses et de rétablir la       confiance.              L’Algérie doit-elle s’attendre à d’autres attentats       de ce type, aussi meurtriers ?              C’est à craindre, malheureusement. L’Algérie, le Maroc et même la Tunisie       risquent d’être encore frappés. Il y a des liens entre les kamikazes       algériens et marocains. Il a été prouvé que des terroristes tunisiens,       récemment arrêtés et jugés en Tunisie, avaient fait le maquis avec le GSPC       en Algérie. Les uns et les autres ont réussi à se coordonner au Maghreb,       sous le label d’Al-Qaida.              (Source : « Le Monde » (Quotidien – France),       édition du 13 avril 2007)
  
         
 On dit que les dictateurs arabes font le lit du         terrorisme mais le contraire est aussi vrai: les terroristes donnent de         l’oxygène frais à des régimes usés par le temps. Les terroristes qui se         font sauter au milieu la foule algéroise cherchent-ils vraiment un         raccourci vers le paradis en tuant des innocents?  Ou bien sont-ils tout         simplement animés par la haine, une haine terrible, sans limites envers         soi-même et envers les autres?
         
 Les Maghrébins de la diaspora, comme moi, ne         savent plus à quel saint se vouer. On ne peut sympathiser ni avec les         juntes autoritaires d’Alger et de Tunis ni avec les terroristes qui         prétendent combattre le « taghout » (tyarannie) alors qu’il ne         font que massacrer des civils et prolonger la vie de ces régimes         corrompus et ainsi maintenir le statu quo.  
         
 Les attentats et les affrontements armés sont du         pain béni pour des régimes comme celui de Ben Ali. Plus les bombes         explosent et plus le silence de plomb s’installe. En outre, les         démocrates et les militants des droits humains au Maghreb se sentent         coupés des masses qu’ils sont senses défendre. Les raisons sont         multiples mais je les résumerais en trois:
         
 – Une majorité de jeunes Mahgrébins ne croient         plus au changement intérieur et ne rêvent plus que d’Europe ou         d’Amérique, et même – pourquoi pas? – d’un « bateau pour l’Australie »         (1). Ils ne voient pas leur avenir au Maghreb alors pourquoi         s’intéresser à ses problèmes?
         
 – Ceux qui ont une situation sociale plus ou moins         satisfaisante ne rêvent que de consommer à l’occidentale  et d’améliorer         leur sort individuel ou tout au plus familial au prix d’un compromis         avec le régime en place. Bref, ce sont ceux qui consomment et se taisent.
         
 – La prédication religieuse satelliatire qui         propage la peur de l’enfer (tarhib) sans oublier de promettre         le paradis aux moutons dociles (targhib) transfère les désirs         des couches populaires vers l’au-delà et non vers une vie meilleure         ci-bas.  
         
 Ces masses composées de jeunes desperados,         de petits-bourgeois apolitiques et d’aliénés religieux ne croient ni en         la démocratie, car ils voient de leurs propres yeux à quoi ressemble la         « démocratisation » de l’Irak,  ni aux droits humains surtout après les         images d’Abou-Gharib et de Guantanamo sans parler du régime de         l’Apartheid installé en Palestine par la soi-disant unique démocratie au         Moyen-Orient.
         
 Que faire? Se rallier aux autocrates en place sous         pretexte du danger terroriste et remettre ses revendications aux         calendes grecques? Continuer à prêcher  » la bonne parole » du haut de sa         tour d’ivoire de Montréal, Paris, Londres ou La Haye?
         
 Le grand écrivain Dostoïevsky voulait faire         quelque chose, agir, « militer » mais ne savait par où commencer vu que         les maux du monde étaient, et sont encore, innombrables. Il a avoué         devant un philosphe russe son désarroi face à la misère du monde. Le         philosophe lui a tout simplement dit:
         
 – Commence par serrer la main de cet homme assis près         de toi !
         
 Quelle belle leçon de modestie pour ceux qui         veulent changer le monde !
         
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 1- Un bateau pour l’Australie est le         titre d’un skteche de l’humoriste algérien Fellag.
         
 Omar Khayyam.
 
  
       L’emeritat académique:une distinction ou       
une faveur au profit des non-récalcitrants???
 
       
 Mourad Regaya
             L’éméritat académique est considéré partout dans le monde,essentiellement       les pays du Nord,ou dans les pays reconnaissant à sa juste valeur le       mérite scientifique,culturel,intellectuel »vraie »et non de »pacotille,de       chantage-marchandage »comme une distinction de fin de parcours,et un geste       légitime de reconnaissance pour services rendus à la communauté du savoir       en particulier,et à la communauté des mortels en général???              L’éméritat chez nous est objet de chantage,de marchandage occulte,car il       est délivré au compte-gouttes,essentiellement aux « scientifiques       souples,malléables »alignés sur les thèses »civilisationelles et       avant-gardistes du pouvoir »vrai défenseurs des valeurs et de la nature       ,des codes clairs ou cryptés nécessaires à l’émergence combien attendue de       la Tunisie de demain??deux de nos éminents       historiens,engagés »dignes »fuyant l’intimidation et le marchandage(accepté       et combien convoité par leurs collègues???)reconnus mondialement pour leur       vrai savoir,et leur clairvoyance intellectuelle n’ont pas       mérité »l’éméritat »considéré comme »non mérité »pour n’avoir pas courbé       l’echine,et dit ce que bon nombre de leurs collègues ne se permettent pas       de le dire(meme pas à eux meme et en privé) de peur de       devenir »immérites'(en fait ,ils le sont bien du fait des réseaux       mafieux,du népotisme institutionnalisé???).              Tout le monde « averti »essentiellement les avant-gardistes,et les       défenseurs de la société civile:société de plein droit,refusant tout       chantage,toute compromission de quelque nature       soit-elle???académique,politique,personnelle, les respecte et les honore       eternellement ,leur cursus politique à lui seul equivaudrait ou       depasserait amplement leur cursus académique tout aussi grandiose et       sublime.              La majorité de notre corps universitaire »gangreiné »par le soin des »taupes       académiques »aspirant à tort,et à mort à cette distinction,c’est pourquoi       ils s’automutent de jour en jour,se rendant serviable et corvéable à qui       le demande,se déplacant au péril de leur vie sur les routes non mises à       niveau selon les normes européennes en vigueur,envahissant les       médias, »emmerdant »les »bons et heureux tunisiens »par leur langue       empoisonnée vempoisonnante,de feu et de       bois??Ces »imméritants »cherchent »l’éméritat opportuniste  » réservés       aux »sans saveur »aux »écrémés »aux »rampantset parasites »académiques       chevronnés,aux mafieux du savoir,aux putchistes       pseudo-scientifiques »notoires »???              En histoire,nous nous flattons et félicitons nuit et jour d’avoir des       professeurs émérites que tout le collége(Z et B) essentiellement,honore et       respecte pour leurs services rendus depuis la création de l’édifice       universitaire tunisien,notre respect pour nos émérites chevronnés       gagnerait en ampleur,s’ils prendraient à leur compte malgré leur àge       avancé(age de la sagesse,de la clairvoyance??)de leur retraite déclarée;et       du fait de leur présence symbolique àplus d’un titre,quoique épisodique       dans les instances »pénales »universitaires:commissions       doctorales,d’habilitation,de thèse,de recrutement       administratif(essentiellement pour le collègeA)ou par l’edition de revues       spécialisées,l’organisation de tables,de colloques;et en main la       réforme »la vraie »       du cursus académique.              Nous croyons que cela ne dépasse en rien leurs       prérogatives »confisquées » »convoitées »et memes »volées »par leurs propres       disciples en ouvrant le débat direct « sans maquillage »aucun sur les mille       et une maladie de l’université:essentiellement le       népotisme,l’affairisme;le concubinage,l’hypocrisie,sans oublier bien sur       et ça va de soi l’inégalité et la non transparence « criminelle »des chances,       retardant à jamais l’avenement de l’ère universitaire démocratique???              L’éméritat n’est-il pas une responsabilité morale,bien plus que       scientifique,est-il juste que nos émérites se confinent dans un role de       second ordre face aux       « vampires mutants » qui étaient jusqu’à un proche leurs disciples et       leurs »obligés » obeissants par remote -control ou par charge electronique       tels les portables actuels,alignés totalement ou partiellement sur leur       école,et leur groupe de recherche,leurs options,et leurs points de vue sur       tous les dossiers;aussi bien scientifiques,ou métaphysiques???              Une invitation cordiale est aussi lancée à nos deux émérites »méritants »non       reconnus par l’autorité politique,mais combien respectés,et adorés par la       société civile,et les vrais »scientifiques »non par les »taupesacadémiques »de       participer à ce débat crucial sur le devenir scientifique base de toute       renaissance       politique vraie???Aurons-nous le droit et l’honneur à une participation de       nos idoles vivantes,à rompre le « silence pathologique »des universitaires       sinistrés par les réseaux mafieux,et leur népotisme criminel????        un universitaire libre des réseaux boycottant l »habilitation mafieuse »       version tunisienne.              HYPOCRISIE ET MANIPULATION »SCIENTIFIQUE » orchestrée par le collège »A »       -filiere sciences humaines-       Un passage en revue des »prouessesmafieuses » de nos »saints patrons » prenant       en otage notre institution universitaire,la gérant à leur guise,la       considérant comme un « legs perpétuel »,cherchant meme apres leur mise à la       retraite de passer leur héritage »scientifique », »disciplinaire » à leurs       enfants,ou à leurs ayant droit;formés en toute hate dans les universités       étrangères,intervenant de par leur carriérisme »douteux »,exploitant les       postes de pleine sagesse(conseillers,maitres de chaire,attachés auprès de       détachés dans différents organismes officiels et officieux)pour les       imposer aux commissions de recrutement »pleinement alignées »sur l’etat de       droit???              Nos chers maitres exploitent leurs fonctions »nobiliaires »pour faire       integrer leurs fidèles meme etant des »canards boiteux »,et pour éliminer       les »anonymes »       meme performants »non connectés »aux réseaux respectifs essentiellement       celui du président( de la commission bien sur???),une symbiose mafieuse       certaine       explique(de leur point de vue bien sur???)les dérives et déboires       enregistrés dans les différentes institutions  de notre pitoyable et       abusée université tunisienne souffrant de mille et une maladie incurables???              Les dérives et les déboires sont nombreux et multiples tels un arc en ciel       ou les parfums de la crème glacée:       interventions et échanges de services »douteux » au sein des       commissions(recrutement,doctorales,habilitation…….???).        manipulation de mémoires de masters……???        évaluation non objective(partiale??) sur ordre de  caids confirmés;de       dossiers par des non-spécialistes(médiévistes pour l’histoire       moderne,moderniste pour l’histoire contemporaine………..???        changement de décision sur la gestion de dossiers(avis négatif devenu       comme par hasard positif???).        Certains de nos »saints patrons »monopolisent des aptitudes déevaluation       tout terrain,hors normes,c’est pourquoi ils traitent les dossiers meme       hors spécialité,l’essentiel c’est la survivance,et la perrenité des       réseaux d’opportunisme et d’hypocrisie scientifique ,réseaux frauduleux.il       se peut meme que dans un prochain jour,ils seraient chargés de certains       dossiers brulants,de première importance comme celui du nucléaire       iranien,du déséquilibre écologique,de la désertification(intellectuelle……??)ou       meme de la grippe aviaire,rien n’est impossible,l’essentiel c’est de       servir selon leurs normes,et au sein des réseaux       frauduleux,d’opportunisme,et d’hypocrisie « scientifique »…..pardon »pseudo-scientifique???       Ce genre de pratiques codifiées par les « légataires du savoir universel « interesserait-il       le tribunal pénal  international de l’hypocrisie universitaire????…….
 Houcine Ghali, Genève                  On apprend davantage dans un café         populaire de Bab Souika ou d’un village tunisien que dans une faculté.         Les gens simples ont une manière de raconter fabuleuse en utilisant les         concepts d’un parler dont la portée du sens est inégalable. Le paysan de         Jebeniana raconte dans des mots simples mais précis et sans la moindre         forfaiture tout son savoir sur les oliviers, la culture des céréales,         les différentes sortes de petit-pois, l’arrivée de la pluie en scrutant         le ciel et les besoins des animaux selon leur comportement. Le pêcheur         de la Louza connait les produits de la mer de sa région, sait quand il         faut sortir pêcher ou pas, conseille les poissons de la saison et         dénonce les multiples tracasseries des pouvoirs publics qui ne cessent         de le spolier par les hausses abusives des taxes, l’augmentation         vertigineuses des prix du mazout, le racket des policiers du port et les         magouilles des acheteurs de ses produits.                  L’épicier du village est une source intarissable sur l’histoire de son         quartier, la solidarité d’antan, les cérémonies de mariage à l’ancienne,         le passage des Français et des Anglais à la poursuite des Allemands         durant la deuxième guerre mondiale et le recours à la zoophie suite à         une répression sexuelle immuable.                  Attablés autour de quelques bières dans un minable bar à Sfax, des         villageois de la région font le procès du pouvoir tunisien en se         référant à leur insupportable quotidien et en analysant leurs difficiles         conditions de vie. Ils ne font référence à aucune idéologie, aucune         connaissance livresque, aucune ligne politique. Leur vécu parsemé         d’injustices leur sert d’unique sujet pour critiquer, argumenter et         développer des idées simples et d’une justesse redoutable.                  Bchira et Mahsouna n’ont jamais fréquenté l’école et leurs enfants,         devenus cadres après des études universitaires n’ont jamais penser leur         apprendre ni à lire ni à écrire. Et pourtant, ces deux dames de la         campagne tunisienne jouissent d’une culture acquise par la pratique et         le savoir faire domestique riche de soixante ans. Elles expliquent         aisément comment préparer tel ou tel plat culinaire, la manière la plus         judicieuse de guérir une maladie ou une blessure et le comportement le         plus adéquat face à la prépondérance de l’homme. Quant à la psychologie         de la femme et aux rites du mariage, ellent en saqvent beaucoup plus que         certains érudits.                  Les gens du petit peuple ont le mot facile mais juste et exprimant         parfaitement leur pensée. Leur misère l’ attribuent au pouvoir ( el         hâkem ) sans rentrer dans les détails et cela suffit. Ils ne trichent         pas en racontant ce qu’ils savent parce qu’ils ne visent que le plaisir         de communiquer sans le moindre profit personnel. Moins bâtardisés que         les citadins, leurs références demeurent plus saines et leur conscience         plus aigüe.                  C’est pourquoi les dirigeant destouriens et surtout les leaders de         l’opposition aussi bien légale que non-reconnue devraient aller se         ressourcer auprès des classes populaires pour comprendre leurs         préoccupations et ensuite agir en connaissance de cause. Houcine Gahli, Genève         11 avril 2007