22 décembre 2006

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TUNISNEWS
7 ème année, N° 2405 du 22.12.2006

 archives : www.tunisnews.net


Omar S’habou: La technologie au secours  des démocrates tunisiens Fatima Kabba: CRLDH Tunisie, Dix ans d’un  indispensable combat Aziz Krichen: 10ème anniversaire du CRLDHT – Pourquoi l´union ? Maître Hannoun: Tunisie, la pire des politiques répressives où quand l’arbitraire d’Etat redouble de férocité Tunisie, Réveille-toi : Le topo actuel de la Tunisie moderne Attariq Al Jadid: Alliance des civilisations – Une reconnaissance onusienne pour l’apport de Mohamed Charfi Divagation : Le Ministre A Toujours Le Dossier Bien En Main ! Le Temps: L’étau se resserre autour du marché parallèle AFP: L’armée britannique arrête un responsable de la police irakienne à Bassorah AFP: Français expulsés: Paris accuse Le Caire de violer les conventions FIDH: Open letter to president of the supreme court of libya


 

Questions à la une :

Tunisie: la dictature est-elle plus belle au soleil ?

Émission de la RTBF diffusée sur TV5 Résumé :Dans ce pays où les journalistes étrangers ne sont pas les bienvenus, l’équipe de « Questions à la une » a mené l’enquête et révèle la face cachée de la Tunisie. (cliquez ici pour voir la vidéo)


 

La technologie au secours  des démocrates tunisiens

 

 
 

 

Omar S’habou

La technologie vient de jouer un mauvais tour aux dictateurs. Elle vient de mettre au monde un joli bébé du nom de  « Psiphon » qui va donner des cauchemars d’autant plus effroyables à nos amis les dictateurs qu’il est pratiquement impossible à dompter. Il s’agit d’un outil informatique qui  permet, comme l’explique le quotidien « Le Monde » du 4 décembre, «  de créer un réseau privé virtuel entre l’ordinateur d’un internaute soumis à le censure et un serveur distant situé en zone libre. Ce serveur servira de relais à toutes les applications web consultables depuis un navigateur internet. Il devient alors possible de visiter les bases de données ou médias en ligne jusqu’ alors  interdits d’accès, de mettre un blog et de réagir sur un forum… ». Bref et en mots accessibles aux profanes comme moi même, « Psiphon » est destiné selon la description de Ron Dubat, directeur à l’université de Toronto, «  à permettre aux gens de naviguer sur internet avec les mêmes privilèges auxquels ont droit les gens se situant dans des endroits où il n’y a pas de censure »(1) Une authentique et fabuleuse nouvelle révolution autrement dit. Tout de suite évidement, j’ai pensé à mes compatriotes tunisiens, seuls citoyens maghrébins à subir l’asphyxiante surveillance de la cyber police de Mr Ben Ali. Les autres Etats maghrébins n’exercent aucune censure sur le net. Avec leur sens légendaire de la  «  débrouillardise » ( tadbir erras) talent qu’ils exercent de nos jours à joindre les deux bouts  par n’importe quel moyen – y compris les illicites – ils vont pouvoir désormais  le déployer à installer dans le lit de leur ordinateur le ravissant et salutaire nouveau bébé ! Gageons qu’en très peu de temps, ils en auront  fait un  compagnon, un ami et surtout un confident. Ils pourront enfin consulter librement le journal on line de référence  « Tunisnews » ainsi que  les autres sites qui leur sont  coupablement interdits comme ceux des partis d’opposition  –  les  véritables j’entends –  et les associations militant pour la démocratie comme l’AMD (www.amd-maghreb.org). Une savoureuse victoire sur la bêtise et la tyrannie. Et cela sera fait. J’en suis sûr.

Je pense aussi à Mr Zine Al Abidine Ben Ali, initiateur, organisateur et gérant de la cyber asphyxie des tunisiens. Tout le monde sait qu’’il est féru d’informatique. On nous a  tellement assené  cette vérité qu’on a fini  par   y croire. Tout le monde sait aussi qu’il est viscéralement allergique  à toute forme d’expression libre de la  pensée. Il pense – s’il en est – et c’est suffisant en soi. Il en dispense ainsi les 10 millions de tunisiens. Il a tout verrouillé. De centaines talentueux ingénieurs informaticiens ont été enrôlés à prix alléchant dans le service de la sécurité pour dompter internet et  filtrer impitoyablement  son accès. Et maintenant ? Comment va-t-il réagir ?  Je suis sincèrement curieux et désireux de savoir comment il va s’y prendre cette fois. Un sujet à la fois d’amusement et de tristesse pour moi. Tristesse que nous en soyons arrivés à ce point de décadence, au point d’être  à la remorque  du Maghreb.

Je pense  enfin à ces centaines d’ingénieurs tunisiens justement. Ils sont de toute évidence compétents, puisque sur le plan strictement technique, ils font incontestablement du beau et bon travail. Nul doute aussi  qu’ils ont accepté ce salaire amer ( khobza mourra) pour éviter le chômage que connaissent  des milliers d’autres ingénieurs informaticiens. C’est ainsi. Quel sera le sort ? Il va bien se poser à terme. Mr Ben Ali va-t-il les jeter comme il a l’habitude de faire avec ceux qui ne  servent plus  le système ? Va-t-il les recycler ? Où et comment ? Vont-ils gonfler les déjà «  gonflés à bloc »  contingents de la police nationale ? On affectera ainsi dix policiers supplémentaires pour chacun des militants pour la démocratie en Tunisie…

Il y a  matière à réflexion sur ce rapport, d’une certaine façon dialectique, entre le génie de la science  et celui des dictateurs. Jusqu’ici ces derniers ont toujours réussi à défaire ce que la science fait pour affranchir  les peuples de la désinformation, de l’endoctrinement, et de l’anesthétisation : invention de l’imprimerie, de la radio,  de la télévision, enfin de l’internet… “Psiphon” parait indomptable cette fois… Il y a de quoi se réjouir, un tant soit peu…Enfin!

(1) l’outil est téléchargeable sur le site de Psiphon au Canada. Il est multiplateforme ( windows, linux et Mac) et surtout indétectable.  PS : j’invite nos amis lecteurs tunisiens principalement à lire l’opinion de Mohammed ben chicou, le directeur du journal quotidien algérien « Le Matin » qui vient élargi  après une incarcération de deux années, publié  chez notre confrère « Le Soir d’Algérie » du 14 décembre. Une opinion de cette liberté de ton est inconcevable  en Tunisie. Et encore ! Les démocrates algériens estiment que la liberté chez eux est verrouillée ! Qu’ils s’estiment RELATIVEMENT heureux ! Quand même

(Source: Le Maghrebin Edition du 18 décembre 2006) Lien: http://www.hebdo.amd-maghreb.org/index.php?option=com_content&task=view&id=180&Itemid=27


 

 

 Le Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie

Dix ans d’un  indispensable combat

Fatima Kabba

 

En 1996, les démocrates tunisiens avaient fini par faire leur deuil de toute sincère volonté de Mr Ben Ali de réaliser ne serait ce que  le SMIG démocratique en Tunisie. Une dictature policière au vrai  sens de l’expression avait alors achevé d’établir férocement son magistère  sur les tunisiens et la Tunisie. Parallèlement, une diplomatie active soutenue par des moyens financiers et logistiques colossaux s’est  employée à vendre auprès des chancelleries occidentales le « succès du système tunisien : moderne, stable et, surtout,  efficacement dompteur de l’ogre islamiste ». D’où l’authentique perplexité qui s’était saisie –  et c’est toujours le cas – des  gouvernements membres de l’Union Européenne au sujet de la Tunisie ; ne sachant pas s’il faut  soutenir  un état  qui serait  en train de réussir là ou les autres états arabes ont échoué ou  s’il faut le condamner- voir le sanctionner – pour d’aussi  flagrantes violations des libertés et des droits de l’homme. Et c’est dans la brèche de cette perplexité que des militants démocrates tunisiens installés à Paris ont décidé de s’engouffrer pour briser le complot du silence, établir des courroies de transmission entre les forces démocratiques tunisiennes – toutes tendances confondues- de  l’intérieur du pays et les institutions  – européennes principalement –  qui ont un droit de regard, si l’on  puis  dire,  sur le pays. C’est ainsi que naquit sous l’impulsion de militants chevronnés et crédibles ( entre autres, le  respecté président du comité  Kamel Jendoubi  et la figure de proue du mouvement démocratique tunisien Khemaies Chammari)  le Comité pour le Respect des Libertés et des droits de l’Homme en Tunisie, (CRLDH). L’idée était bien inspirée,  opportune et, dans un certaine mesure, salutaire si l’on en juge par les  incontestables succès qui ont couronné les actions entreprises par le Comité depuis sa naissance  sur le front de la lutte contre la diabolique stratégie de mystification  conduite par le régime de Ben Ali et  ses thuriféraires. Dans un document-bilan rendu public, ce 12 décembre 2006,  à l’occasion du dixième anniversaire de la naissance du comité,  son équipe dirigeante a expliqué qu’elle «  a structuré son action en s’appuyant conjointement sur les dynamiques  de l’intérieur du pays d’un coté et sur les opportunités et les espaces offerts par l’agenda extérieur en France, en Europe et sur le plan international d’un autre coté ».  Dans cette optique, le comité a contribué  à  dynamiser les luttes développées  de l’intérieur du pays,  mobiliser les soutiens internationaux, briser le silence médiatique, desserrer l’étau de la répression qui enserrait les militants démocrates. Par son entremise,  les mouvements de protestation en Tunisie ont pu investir  de nouveaux espaces d’expression et d’action en occident, tandis que  plus d’une figure emblématique  du mouvement démocratique tunisien dans son ensemble ont pu nouer des relations directes  avec les  organes de décision et d’influence  européenes, ce qui a renforcé le poids des contre pouvoirs  à la dictature de Ben Ali. Quelques uns des accomplissements du Comité : La motion votée en 1996 par le parlement européen condamnant les atteintes aux libertés publiques  par le régime tunisien,  l’action initiée auprès de la commission contre la torture de l’ONU en 1998, la participation à l’organisation de la visite, à Tunis, du Rapporteur Spécial sur les libertés d’expression et d’information en 1999 ainsi qu’une inlassable action auprès du Haut Commissariat des Droits de l’Homme des Nations unies. Coup du sort : en pleine montée en puissance  le «  11 septembre »  est venu  casser la dynamique qui paraissait irréversible. Le  comité  en a été sérieusement troublé et déstabilisé dans  sa progression, tant il est vrai comme le souligne le  document bilan en question  « que  cet acte terroriste horrifiant a constitué un prétexte pour les dictatures en place, ainsi que pour les démocraties occidentales menées par les Etats-unis, pour mettre en cause les acquis historiques dans les domaines des libertés privées et publiques ».  Le régime tunisien ayant trouvé de son coté  dans ce changement d’attitude stratégique de l’occident,  la bouffée d’air qui lui manquait pour respirer, pour  se refaire une virginité et pour  desserrer l’étau qui commençait à le gêner sérieusement aux entournures. Pour l’équipe dirigeante du comité c’était la quadrature du cercle. D’autant  qu’il a fixé pour principe la défense  de   toutes les victimes de l’oppression en Tunisie, y compris les militants  islamistes. Il s’en est trouvé condamné, malgré lui, à une  pénible révision du référentiel conceptuel qui  articulait  sa  démarche  et à un redéploiement stratégique  avec les forces éclairées toujours actives en occident,  « pour rationaliser ses positions, son rôle et ses priorités ». Sans conteste, le comité parviendra à réussir sa mue.  A  preuve les nouvelles réalisations – et d’importance – que les démocrates tunisiens porteront à son crédit : le meeting du 18 mai 2002 organisé à Paris à la veille du référendum sur la Constitution ; le meeting du 16 octobre 2004, également à Paris, à l’occasion des élections présidentielles et législatives ; le colloque tenu à Bruxelles du 2 au 4 juin 2005 sur l’Accord d’Association UE-Tunisie ; la grande campagne européenne organisée entre le 12 et 17 décembre 2005 au lendemain du SMSI ( Société Mondiale sur la Société de l’Information)  et  la grève de la faim collective du 18 octobre de la même année. De toute évidence, l’équipe dirigeante  a su composer avec le temps et, sans se départir de ses objectifs fondamentaux,  a su trouver le nouvel angle d’approche et le nouvel espace de mouvement pour continuer à peser sur le cours des événements et remplir sa mission de  catharsis et de dynamo  au service de la cause démocratique tunisienne. Les deux principales actions qu’il s’assigne  à l’orée de sa deuxième décennie d’existence  sont indicatives a la fois de  son intelligence des   urgences et de son  sens de l’utilité dans la cristallisation des nouvelles approches stratégiques devant unir les mouvements démocratiques tunisiens. Le comité s’apprête à organiser  deux ateliers  autour des deux problématiques suivantes : La première : revisiter, encore une fois, les Accords de partenariat U.E-Tunisie du point de vue de la société civile. Il y sera question de s’interroger sur la légitimité et la pertinence du passage d’une « stratégie d’accompagnement critique » à d’autres alternatives, y compris celle de la demande de suspension (totale ou partielle) des dits Accords. La deuxième : la problématique de la transition démocratique en Tunisie et de ses obstacles immédiats. L’objectif étant de rechercher des éléments de réponse concrets pouvant aider à dépasser le blocage actuel.

(Source: Le Maghrebin Edition du 18 décembre 2006) Lien: http://www.hebdo.amd-maghreb.org/index.php?option=com_content&task=view&id=176

 


 

10ème anniversaire du CRLDHT POURQUOI L’UNION ?

par Aziz Krichen  

Mesdames, Messieurs, chers compatriotes,

 

Ce que je voudrais dire, d’abord, c’est combien il est agréable de vous revoir. L’autre sentiment que je tiens à exprimer, c’est ma reconnaissance à l’égard du CRLDH, dont les efforts ont rendu possible l’organisation de cette rencontre.

 

La construction d’un front commun entre l’ensemble des forces d’opposition, qu’elles se prévalent de la laïcité ou se réclament de l’islam : ce problème décisif me préoccupe depuis longtemps. J’ai pourtant hésité à intervenir dans la discussion ; je craignais que mes propos restent incompris, voire carrément inaudibles. Mais le contexte a évolué, les circonstances ont mûri et cette maturation a été grandement accélérée ces derniers mois, après le 18 octobre 2005. Les prises de position se sont multipliées depuis, et l’on peut affirmer aujourd’hui que la question de l’unité d’action est enfin devenue la question centrale du débat politique dans les rangs de l’opposition tunisienne.

 

Ce débat a mis en évidence deux positions : d’un côté, les partisans de l’unité ; de l’autre, ses adversaires. J’ai des compagnons très chers ici et là. Je comprends et respecte leurs opinions respectives. Telles qu’elles sont actuellement exprimées, dans les deux camps, je dois avouer cependant que je ne les partage pas. Je ne dis pas cela pour afficher je ne sais quelle singularité de façade, mais pour des raisons de fond.

 

Je suis farouchement en faveur de l’union nationale la plus large, pour isoler et réduire le régime Ben Ali et en débarrasser le pays. J’accepterais volontiers l’existence de divergences politiques parmi nous à ce sujet, si celles-ci renvoyaient à des divergences d’intérêts réelles. Mais je ne peux me résoudre à admettre des divergences fondées sur le fantasme, c’est-à-dire sur l’illusion et le vide.

 

Je m’explique. Considérons les thèses en présence. Que constate-t-on ? D’abord, que tout le monde se dit en accord sur la caractérisation de la situation actuelle : la Tunisie est une dictature. Ensuite, que tout le monde est en accord sur le but final : instaurer la démocratie. En revanche, là où plus personne n’est d’accord, c’est sur la manière de procéder, la stratégie à appliquer. Pour les uns, le rassemblement de l’opposition, toutes tendances confondues, est une nécessité, dictée par l’efficacité. Pour les autres, s’allier avec les islamistes serait un remède pire que le mal ; ce serait – je cite – « échanger l’autoritarisme actuel pour un totalitarisme à venir ». Dès lors, « chid mchoumeq la ijîq ma achouam », un mal connu vaut mieux qu’un plus grand mal à connaître.

 

A partir de prémisses identiques, les deux parties aboutissent ainsi à des conclusions opposées et, pour tout dire, inconciliables. Chacun étant persuadé de la vérité de ses convictions, personne ne fait le moindre pas en direction de l’autre. S’y risquerait-il qu’il serait aussitôt accusé de trahison ou de manipulation… Pareil dialogue de sourds paralyse l’opposition depuis des années, plombant le pays, obscurcissant son horizon et permettant à Ben Ali de perdurer au pouvoir. Nous sommes pris dedans comme dans un piège, dont il est pressant sortir. Non pas en apportant des arguments supplémentaires dans un débat condamné d’avance à rester stérile, mais en déplaçant les lignes de la discussion, en en changeant radicalement les termes – bref, en remettant le débat politique sur les bases qu’il n’aurait jamais dû quitter, la tête par-dessus les épaules et non l’inverse.

 

Laissez-moi vous raconter une histoire, d’origine américaine, je crois, ce qui n’est pas innocent. Cela se passe la nuit, dans une ville quelconque. Les rues sont désertes. Sur un pont, dans le rond de lumière projeté par un réverbère, un homme est penché. Il semble fouiller le sol. Arrive un passant. Il lui demande s’il a besoin d’aide. « J’ai perdu mes clefs », répond l’homme. « Où sont-elles tombées ? » « Là-bas ! » D’un geste de la main, il indique le trottoir en face. Le passant ne comprend plus. « Pourquoi les cherchez-vous ici si elles sont tombées là-bas ? » « C’est pour l’éclairage, il n’y en a pas de l’autre côté ».

 

Je me suis souvent raconté cette histoire. Je la trouve drôle et en même temps touchante, finalement très représentative de notre commune condition humaine. Souvent, nous cherchons des solutions là où elles ne se trouvent pas. Cela peut s’expliquer par la bêtise ou l’entêtement – nul n’en est dépourvu -, cela peut s’expliquer aussi par la fascination de la lumière. Celle dont notre propre vision subjective déforme la réalité extérieure ; celle dont les puissants de ce monde aveuglent nos yeux, pour précisément nous inciter à aller regarder ailleurs ; ou encore une combinaison des deux…

 

Revenons au sujet. La Tunisie est une dictature : disant cela, nous définissons le régime politique du pays, mais rien que lui. Comment caractériser les autres dimensions de notre existence collective, l’économie, la structure sociale, la culture ? Je n’avancerai que des constatations empiriques, partagées par le plus grand nombre.

 

Pour l’économie, je dirai qu’elle est désarticulée, peu et mal intégrée entre ses différents secteurs, en déficit chronique sur le plan des échanges commerciaux et de la balance des paiements, et qu’elle est traversée de part en part par une logique de clientélisme et de prédation, une sorte d’accaparement maffieux des principales sources de la richesse nationale.

 

Ce caractère difforme de l’économie se retrouve sur le terrain social, où il se traduit par une polarisation poussée à l’extrême. Un premier cercle très restreint – quelques centaines de familles -, comprenant les fortunes grosses et moyennes, parentes ou alliées des clans qui détiennent le pouvoir. Un deuxième cercle plus large mais toujours réduit et qui tend même à se contracter – quelques dizaines de milliers de familles -, jouissant d’un niveau de revenu et de consommation se rapprochant du standard européen moyen. Enfin un troisième cercle, englobant l’écrasante majorité de la population – sept à huit millions de personnes -, survivant dans des conditions précaires, sinon dans l’indigence et la misère, en particulier dans les zones rurales et l’habitat périurbain.

 

Les lignes de fracture sont tout aussi tranchées dans le domaine de la culture et des modes de comportement. A côté de conduites « modernistes » ou « occidentalisées », en perte de vitesse, les phénomènes de crispation identitaire vont, au contraire, en s’amplifiant, affectant l’ensemble du corps social. L’Etat paraît de moins en moins armé pour s’opposer à la montée de la réaffirmation religieuse.

 

La répression officielle est impuissante ici à obtenir des résultats durables, parce qu’elle n’est pas en mesure de contester les motivations des milieux qu’elle frappe – l’Etat étant lui-même otage d’une rhétorique de légitimation religieuse.

 

Sans être entièrement superposables, ces différents registres de la scène collective – la politique, l’économie, le social, la culture -, sont évidemment étroitement liés entre eux. En un mot : ils font bloc, ils forment système, et un système en fin de compte cohérent. La même figure est à l’œuvre partout : la domination de quelques-uns, l’exclusion de la plupart.

 

Bien entendu, lorsque nous parlons de la nécessité de renverser le régime Ben Ali, c’est le système tout entier que nous visons. La lutte contre la dictature, la rupture démocratique ne sauraient se limiter à un simple changement de personnel politique, laissant les autres logiques d’exclusion libres de continuer à déchirer le tissu national. Pareil changement ne serait qu’un trompe-l’œil et n’aurait d’ailleurs aucun avenir. On ne voit pas par quel miracle, en effet, la démocratie pourrait s’enraciner et se stabiliser sans un minimum de cohésion sociale, un minimum de développement économique et un minimum de sérénité dans le rapport avec l’islam.

 

Nous sommes donc confrontés à un système global. Et ses différentes expressions contribuent toutes, par leur fonctionnement convergent, au maintien des choses dans leur état actuel, qui est désastreux. Quel est alors le principe explicatif général d’un tel système ? Comment s’est-il constitué ? Où se situe sa zone d’appui principale ? Où appliquer le levier de l’action de transformation ? En d’autres termes : où se trouvent les verrous et où se trouvent les clefs ?

 

Sur le pont, rappelez-vous, il y avait deux trottoirs, l’un éclairé, l’autre pas. Dans notre affaire aussi, il y a deux directions de recherche possibles. L’explication peut se situer dans le pays : ce sont les causes internes. Mais elle peut aussi résider au dehors, plus précisément dans le type de relations, inégales et déséquilibrées, qu’il entretient avec le reste du monde, spécialement les pays occidentaux : ce sont les causes externes. Inutile de préciser quel trottoir bénéficie de l’éclairage le plus intense et celui que l’on s’efforce de maintenir dans la plus totale obscurité.

 

Quand il s’agit de décrire la crise profonde qui secoue le monde musulman en général et les pays arabes en particulier, les feux des projecteurs occidentaux sont systématiquement dirigés sur la mise en évidence des défauts de nos structures intérieures. Ces carences sont rapportées à des déterminismes enfouis dans la longue durée, et présentées comme le résultat logique nécessaire.

 

Lorsque de telles d’une histoire et d’une culture qui nous seraient propres problématiques sont reprises et relayées par des acteurs autochtones, on peut constater que ces derniers sont fortement encouragés, soutenus, applaudis et reconnus. On les publie, on les “médiatise”, on les invite, on les récompense : ils font le travail à votre place.

 

Depuis l’époque lointaine de notre jeunesse, j’ai pu connaître puis voir se succéder un nombre considérable de théories élaborées dans cette optique. Une mode chassant l’autre, chacune d’entre-elles a connu son heure de gloire. Je vais rappeler les plus récurrentes, simplement pour indiquer l’ampleur et le caractère planifié de l’œuvre de démolition engagée.

 

Aucune de nos institutions sociales n’a été épargnée, aucune n’a trouvé grâce. Je cite en vrac : pas de propriété privée de la terre, non-émergence d’une classe d’entrepreneurs, structures familiales closes sur elles-mêmes, condition inférieure de la femme, absence de villes dotées de franchises, mépris du travail manuel, mépris de la technique, refus de l’innovation, conception cyclique du temps. Je poursuis : instabilité des règles de succession dynastiques, vénalité des élites, défaillance des pratiques consultatives et électives, inaptitude à fonder et à administrer l’Etat, tyrannie (le fameux despotisme oriental), non-représentation des corps intermédiaires, impuissance militaire. Je continue : passivité et fatalisme des populations, domination de l’esprit communautaire, tendances compulsives à l’anarchie et au pillage, faiblesse du sentiment national, absence d’aspiration à la liberté, non-émergence de l’individu, non-apparition de la société civile, défaut de vraie pensée théologique, réduction de la foi à des rituels sociaux contraignants, relativisme moral, absence d’éthique intériorisée. Même la philologie a été mise à contribution dans cette entreprise de rabaissement tout azimut. Les structures de base de la langue arabe, son fonds lexical et sa syntaxe – domaines “ontologiques” par excellence – favoriseraient les seules ressources de l’imagination, au détriment de celles de la raison. C’est pourquoi la maîtrise des activités spéculatives serait interdite aux Arabes, ainsi que la construction d’œuvres de l’esprit d’une inspiration suffisamment vaste et élevée pour prétendre à l’universel…

 

Arrêtons l’énumération. Après une telle litanie, beaucoup diront que j’exagère, que je fais une fixation ridiculement anachronique, que les thèmes cités sont ceux de l’orientalisme colonial et que tout cela est définitivement derrière nous. En est-on si sûr ? Certes, dans la foulée des “indépendances”, dans la période ouverte par Bandung et la création du Mouvement des non alignés, on a eu le sentiment d’un net changement d’approche. Le regard occidental a paru s’infléchir et se modifier. Les médias et la recherche académique, notamment, adoptèrent un ton nouveau, plus nuancé, plus équilibré, poussant parfois le souci de réparation jusqu’à la prévenance et la sympathie compréhensive. L’ethnocentrisme fut dénoncé pour ce qu’il était : une perversion de la connaissance de l’autre, provenant de ce que l’on se posait soi-même comme étalon et modèle.

 

Mais l’abcès de la relation inégale ne fut jamais réellement purgé. Le discours occidental est resté marqué, sur le fond, par une volonté de domination et non par une volonté de savoir. Si les anciennes représentations idéologiques semblaient avoir quitté le devant de la scène, elles étaient toujours là, en arrière-plan, à l’affût, guettant le moment où elles pourraient rejaillir à la surface.

 

La diabolisation des pays arabes et musulmans revient à l’ordre du jour avec la guerre de juin 1967 et la hausse des prix du pétrole en 1974. Un nouveau palier est franchi avec la révolution iranienne en 1979, et un palier supplémentaire après la première guerre contre l’Iraq en 1991. Les vieilleries orientalistes sortent des placards. Elles sont relookées, recyclées et remises en service. Le point d’orgue de cette espèce de retour du refoulé est atteint quelques années plus tard, avec la publication des thèses sur le “clash des civilisations”. L’ignoble carnage perpétré le 11 septembre vient opportunément ensuite apporter les éléments de justification qui pouvaient encore faire défaut.

 

Désormais, pour l’Occident, le problème majeur dans le monde arabe et les pays musulmans, c’est l’islam lui-même. Toutes les autres difficultés lui sont subordonnées. Toutes viennent de lui, toutes y ramènent. Tout se passe comme si on s’était contenté jusque-là de frapper l’adversaire en différents endroits de son corps, en cherchant uniquement à l’affaiblir et à le réduire. Dorénavant, on vise le cœur, on vise la tête, on cherche à l’abattre définitivement. L’islam est la dernière digue. Qu’il faut rapidement faire sauter, car il y a urgence.

 

L’islam n’est plus seulement une menace interne aux pays arabes – qui les empêche de goûter aux bienfaits de la démocratie et de l’économie de marché, et donc d’accéder à la modernité -, ce n’est plus simplement une menace pour Israël – dont on nous rappelle toujours qu’il est l’unique démocratie véritable de la région -, l’islam est désormais une menace globale, pour le monde en général et pour l’Occident en particulier. Car l’islam est lui-même aujourd’hui mondialisé : sur le plan démographique, du fait de l’émigration en Europe et aux Amériques ; sur le plan des idées, grâce à Internet.

 

On ressort le vocabulaire manichéen de la guerre froide. L’islam, c’est le nouveau ennemi n° 1 du monde libre. C’est le fascisme vert, succédant aux fascismes rouge et brun. Dans ces conditions, le ton n’est plus à l’apparente neutralité ni à la modération. On est en guerre. Une guerre qui va aller en s’intensifiant. Et qui appelle un discours belliqueux, de mobilisation générale pour le combat. Deux camps se dressent maintenant face à face : celui de la démocratie et de la liberté de conscience ; celui de la dictature et de l’obscurantisme religieux. Chacun est sommé de choisir et rejoindre le sien, sans plus tarder.

 

Nous revoilà placés devant une alternative qui rappelle étrangement celle dont nous devons nous-mêmes débattre. Mais arrêtons-nous un instant pour faire le point. Reprenons les théories attribuant la crise actuelle des pays arabes à des causes internes. Qu’ont-elles en commun, par-delà tout ce qui les différencie ? Qu’est-ce qui les réunit ?

 

J’ai déjà parlé de l’ethnocentrisme. Il y a une unité plus radicale encore. L’Occident parle du monde arabo-musulman comme s’il était à part. Comme s’il formait une sorte d’univers isolé avec lequel lui-même, l’Occident, n’entretenait pas de relations significatives. Et comme si ces relations n’entraînaient pas de conséquences substantielles sur l’évolution de ce monde prétendument à part.

Sur un plan strictement rationnel, c’est la tare principale du discours occidental sur l’islam et l’Orient. Comment prétendre connaître un phénomène sans l’intégrer dans le système complexe de rapports, connexions, actions et réactions, à travers lesquels, seuls, il existe ? Dans le domaine des sciences physiques, pareille démarche disqualifierait son auteur dès le départ. Dans celui des relations internationales, il en va autrement. Ici, les règles de la simple logique ne pèsent pas lourd devant la loi du plus fort. Et quand les haut-parleurs des médias de masse occidentaux se mettent à hurler dans le même sens, il est difficile d’entendre autre chose que leurs hurlements…

 

Si vous essayiez malgré tout de tirer le débat dans le sens inverse, la parade serait d’ailleurs vite trouvée. « Eh quoi, s’exclamera-t-on, vous voulez encore ramener la colonisation sur le tapis ? Soit, vous avez été colonisés ; mais aujourd’hui, vous êtes indépendants, n’est-ce-pas ? Ce sont les vôtres qui sont aux commandes. Et nous vous accordons même des aides, de l’argent dont nous privons nos propres citoyens. Vous n’allez pas continuer à nous faire porter le poids de vos difficultés parce que vous ne savez pas comment vous en sortir ! » Là-dessus, pour vous condamner définitivement au silence, tombera le verdict des pourfendeurs professionnels de la repentance, ces nouveaux chevaliers des temps modernes – la France en possède quelques spécimens cocasses -, qui ne veulent plus entendre parler de la « culpabilité de l’homme blanc ». Ils décréteront que vous vous complaisez dans une « posture victimaire », qu’une telle attitude constitue un scandale moral. Nous refuserions d’assumer nos responsabilités. Au lieu de nous attaquer aux maux réels qui rongent nos sociétés, nous chercherions à nous défausser sur des boucs-émissaires imaginaires, sur lesquels nous déverserions notre haine et notre ressentiment. Nous ne serions plus que des ratés de l’Histoire, jaloux de la réussite des autres, et la rage engendrée par nos échecs répétés nous enfoncerait dans une dialectique infernale de violence, de nihilisme et de mort !

 

A qui pourrait se laisser impressionner par de telles imprécations, je dirai simplement que, pour ma part, je n’éprouve aucun respect pour ceux qui se satisferaient d’un rôle de victime. De mon point de vue, lorsque l’on est agressé, la seule façon morale de réagir n’est pas de gémir, mais de se défendre. Et je réaffirme tranquillement que l’on ne peut pas comprendre ce qu’il se passe chez nous si l’on ne regarde pas en même temps dans quelles conditions concrètes nous sommes insérés dans le système des rapports de force internationaux. Est-il permis d’orienter la lumière dans cette direction ? Peut-on essayer de chercher les clefs sur ce terrain ?

* * *

Commençons par un survol rapide de la distribution de la puissance à l’échelle mondiale. Une fois de plus, je n’avancerai que des propositions empiriques, admises par le plus grand nombre. Le constat de départ est que nous avons affaire à une configuration relativement récente, en même temps hiérarchisée et instable, en même temps inégale et déséquilibrée, dont la mise en place a été rendue possible par l’écroulement de l’ancien camp soviétique.

 

Au cœur du système ou à sa tête, comme l’on voudra, nous retrouvons évidemment ce que nous continuerons d’appeler par convenance l’Occident : l’Amérique du Nord, l’Europe de l’Ouest et le Japon – l’ancienne Trilatérale. Ce bloc exerce une domination globale commune sur le reste de la planète, du fait d’une emprise économique, financière, diplomatique et militaire, qui reste prépondérante. Mais l’unité de ce bloc, qui est réelle, n’est pas dénuée de contradictions ni de conflits d’intérêts. En termes économiques purs, les Etats-Unis, pays leader du groupe, sont en perte de vitesse depuis de longues années. La compétition qu’ils subissent de la part de leurs concurrents-partenaires européens et japonais est rude et ils en sortent de moins en moins souvent vainqueurs.

 

Des pans entiers de leur appareil productif sont en déclin constant et progressivement démantelés. Mais les Américains possèdent encore une avance significative dans un certain nombre de secteurs décisifs – les industries d’armement, les nouvelles technologies, l’espace, la recherche -, avance obtenue et préservée, je le note en passant, grâce à l’injection massive de fonds publics, et non pas du fait du libre jeu du marché. Et ils disposent surtout d’une supériorité financière – le dollar, dont ils déterminent l’émission et la valeur de change à leur guise – et d’une suprématie militaire qui reste pratiquement absolue : le budget de la défense US est supérieur à la somme des budgets militaires de tous les autres pays de l’OTAN.

 

Les statistiques révèlent cette situation paradoxale. Les Etats-Unis consomment plus qu’ils ne produisent ; ils importent plus qu’ils n’exportent ; ils empruntent plus qu’ils ne prêtent. Pour équilibrer leur balance courante, ils doivent lever à l’extérieur l’équivalent de deux milliards de dollars par jour, soit environ 700 milliards par an. Et ils y parviennent parce qu’ils maîtrisent l’essentiel de la circulation internationale des capitaux. On peut affirmer en toute rigueur qu’ils vivent aux dépens du reste du monde. Le trop-plein, chez eux, vient du manque et de la privation qu’ils organisent ailleurs. S’ils restent les maîtres du système de domination mondiale, ce n’est plus parce qu’ils seraient le moteur de son développement et de son progrès, c’est d’abord parce qu’ils en sont le bras armé.

 

On comprend dès lors combien la situation des autres grands pays capitalistes peut être inconfortable. Dans une majorité de secteurs économiques, ils savent qu’ils font aussi bien sinon mieux que leur chef de file. Ils savent qu’ils se font souvent gruger par ses méthodes peu orthodoxes. Ils se rendent bien compte que la fluctuation arbitraire du dollar paralyse leur croissance. Ils aimeraient bien s’émanciper et affirmer leur autonomie politique, voire militaire, pour les plus audacieux. Mais, d’un autre côté, ils sont eux-mêmes en butte à la concurrence et aux coups de boutoir provenant de tierces parties : montée en puissance des pays « émergeants », phénomène des délocalisations, perte de marchés, etc. Devant ces pressions et menaces inhabituelles, on comprend alors que la réaction spontanée de la majorité des dirigeants politiques, de droite et de gauche, soit de resserrer les rangs, de préserver l’unité du front des nantis et des privilégiés, bref de renforcer l’alliance atlantique – l’alliance des riches contre les plus démunis, sous hégémonie US. Les atermoiements tragi-comiques de la construction européenne illustrent bien ce balancement. Son blocage actuel est symptomatique d’un réalignement de fait derrière le grand frère américain.

 

D’où proviennent les nouvelles turbulences ? Aujourd’hui, principalement d’un pays, la Chine, un continent plutôt, doté d’un potentiel démographique colossal. Avec les Etats-Unis, il s’agit là du deuxième acteur global, du second pôle structurant de la scène internationale actuelle. Comment son émergence a-t-elle été rendue possible ? Par la « mondialisation » ? Oui, si l’on entend par cette notion une politique pour le monde entier, mais voulue et décidée par les Américains.

 

A la base, on trouve un arrangement, une sorte d’accord stratégique conclu dans les années 1980, et dont l’exécution s’est accélérée après la chute du Mur de Berlin. Objet de la transaction : faire de la Chine le nouvel « atelier du monde », le principal lieu de fabrication des biens de consommation de masse, en s’appuyant sur des réserves de main-d’œuvre inépuisables, relativement bien formées, disciplinées et à très bas coût.

 

Pourquoi pareil accord ? Je rappellerai d’abord qu’il y a des précédents historiques. Il est déjà arrivé qu’un pays décide de se délester de tel ou tel secteur économique où il n’est plus compétitif, pour mieux se concentrer sur les domaines où il dispose d’un avantage comparatif incontestable. C’est ce qu’a fait la Grande-Bretagne, par exemple, à la fin du XVIII s. lorsqu’elle a décidé de sacrifier son agriculture au profit de son industrie.

 

Quels sont les termes de l’association sino-américaine mise en place ? A quels intérêts réciproques, et contradictoires, correspondent-ils ? Du côté des Etats-Unis, le calcul semble évident. Leur déclin industriel est patent et paraît sans remède. Ils ont été rattrapés puis dépassés par l’Europe et le Japon dans une majorité de branches d’activités. L’arme de la production chinoise à faible prix sera utilisée contre eux en priorité, pour endiguer leur dynamisme et les mettre à leur tour en difficulté. A partir de quoi il redeviendrait possible de restaurer une domination sur des alliés affaiblis et incapables de rivaliser avec la toute-puissance américaine en matière financière et militaire.

 

Du côté chinois, l’intérêt de l’opération n’est pas moins évident : sortir le pays de l’isolement où il était jusque-là maintenu, fournir du travail et des revenus à une population exténuée par les pénuries de la période maoïste, maîtriser les technologies modernes, élargir et diversifier la base productive – et retrouver, grâce à tout cela, une place éminente dans le concert des nations. Place dont les Chinois estiment, à juste titre, qu’elle leur revient de droit.

 

Les deux visions sont diamétralement opposées du point de vue du but ultime poursuivi par chaque protagoniste. Pour les Etats-Unis, il est impératif de garder le contrôle de la manœuvre. Utiliser la force de frappe économique chinoise contre le reste du monde, dans un premier temps pour – en s’appuyant sur le caractère anormalement extraverti de la croissance, sur les tensions sociales qu’elle exacerbe, sur les tendances centrifuges qui travaillent un territoire immense, multiethnique et multinational – chercher, dans un deuxième temps, à exploiter les contradictions internes du géant asiatique, en visant sa vassalisation, sinon l’embourbement ou l’éclatement de son Etat. Pour les autorités de Pékin, la stratégie est inversement symétrique. Développer et moderniser le plus rapidement possible le pays ; veiller, par tous les moyens, y compris les plus sanglants si nécessaire, au maintien de l’unité et de la solidité de l’administration centrale et des forces armées – de façon à être capables, le moment venu, de tenir les USA en respect.

 

En attendant, le partenariat se porte à merveille. Le “made in China” est devenu un formidable rouleau compresseur qui broie tout sur son passage. Les chiffres sont hallucinants. La Chine est sur une séquence de croissance à plus de 10% par an depuis deux décennies. Cela ne s’est jamais vu auparavant, nulle part. Elle exporte à présent l’équivalent du tiers de son PNB. Et elle accumule plusieurs centaines de milliards de dollars d’excédents commerciaux chaque année. Les capitaux qui ne sont pas réinvestis sur place pour agrandir la sphère productive sont presque totalement placés aux USA – sous forme d’actions et d’obligations -, où ils servent à combler les déficits et alimenter la frénésie de consommation.

 

Dans cette partie à deux, hier encore improbable, chacun tient l’autre à la gorge. Les Etats-Unis pourraient casser à tout instant la dynamique chinoise, en stoppant leurs importations et en ordonnant à leurs alliés de les imiter. La Chine pourrait porter un coup mortel à l’économie américaine en retirant ses avoirs, ou en les convertissant en une autre devise que le dollar, l’euro par exemple. Chaque duelliste sait ce dont l’autre serait capable. La dissuasion fait son office, comme au plus fort de la guerre froide. Et comme alors, en arrière-plan, des deux côtés, on poursuit fébrilement les préparatifs militaires, en prévision du jour où les arbitrages diplomatiques ne seront plus de mise.

 

Depuis 1989, le budget alloué à l’armée chinoise augmente d’environ 15% par an, soit une fois et demi le taux de croissance de l’économie. Selon les experts, la parité stratégique avec les USA serait atteinte à l’horizon 2010-2015. Il convient de savoir, toutefois, qu’une telle éventualité est refusée d’avance par les Américains, aussi bien concernant le rival chinois que vis-à-vis de n’importe quel autre pays. L’hypothèse même d’une atteinte à leur suprématie sur ce terrain est assimilée à un casus belli. La doctrine de la guerre préventive n’a pas été conçue que pour les “Etatsvoyous” ou les terroristes…

 

Laissons ces sombres perspectives et revenons au moment présent. Quelle est la situation du reste du monde par rapport aux deux grands blocs que l’on vient de décrire ? La physionomie du troisième ensemble est très hétérogène. Les pays qui le composent se situent à des niveaux de développement fort différents. Leur capacité à faire face et à préserver leurs marges d’autonomie nationale est inégale. A des degrés divers, tous sont pris, néanmoins, entre les mâchoires du condominium mis en place. Tous en subissent les conséquences, notamment les anciens pays colonisés de l’ancien tiers monde.

 

L’assaut général a été lancé lui aussi au milieu des années 1980, avec les politiques dites d’ajustement structurel. Laissez-moi rappeler le contexte. Au lendemain du démantèlement formel de l’ancien système colonial, les tentatives d’édification nationale sont conduites par des régimes le plus souvent autoritaires, à travers une gestion de l’économie centralisée et interventionniste. Le modèle en vigueur – encouragé par les Etats-Unis à l’époque, je le rappelle -, est celui de la substitution des importations : fabriquer chez soi ce que l’on avait l’habitude d’acheter à l’étranger, c’est-à-dire en Europe.

 

Dans les années 1970, ce modèle semble partout à bout de souffle. Vaille que vaille, il avait certes permis un certain développement et assuré un minimum de progrès et de cohésion sociale – mais au prix d’un surendettement alarmant, d’une dépendance technologique accrue et d’une productivité quasi nulle. Ses possibilités de renouvellement paraissaient en tout cas plus qu’aléatoires.

 

Les politiques d’ajustement structurel sont engagées à partir de 1982-1983. Imposées par Washington – via le FMI et la Banque mondiale – à des pays en faillite financière, leur adoption ne rencontre qu’une faible résistance. Les règles appliquées sont celles du libéralisme le plus ultra. On taille dans les dépenses allouées aux activités dites non productives : éducation, recherche, santé, logement, couverture sociale, etc. On privatise et on dénationalise les entreprises des secteurs productifs : transports, télécommunications, eau, énergie, mines, navigation aérienne et maritime, etc. On gèle les salaires. On baisse les taux d’imposition. On supprime les barrières douanières. On libère les transferts de capitaux. Etc., etc.

 

En théorie, les objectifs affichés semblaient parfaitement adaptés et cohérents. Désendetter l’Etat, introduire la concurrence, attirer l’investissement extérieur, stimuler l’épargne et l’initiative privée locales – tout cela devait garantir un fonctionnement optimal des facteurs économiques et relancer la croissance. Mais la théorie est une chose, la réalité autre chose. L’idéologie inspirant l’ajustement structurel – la vieille antienne de la main invisible du marché – présupposait l’existence d’un univers homogène, peuplé de collectivités et d’individus abstraits, évoluant dans des conditions similaires : toutes réalités qui n’existent pas.

 

Ce qui existe de façon très empirique, en revanche, ce sont les rapports de force inégaux entre pays et entre groupes sociaux au sein de chaque pays. Les politiques d’ajustement vont se couler immanquablement dans ces rapports inégaux, au bénéfice des plus puissants, au détriment des plus faibles. En quelques années, le paysage économique et social d’un grand nombre de régions du Sud – suivies, après 1989, par celles de l’Est – est littéralement saccagé. Les privatisations entraînent la destruction de secteurs entiers de production et livrent au chômage des millions de salariés supplémentaires. La dévaluation des monnaies locales, loin de doper les exportations, provoque l’effondrement du cours des matières premières et des denrées agricoles et aggrave le déséquilibre des termes de l’échange. A l’intérieur, elle fouette l’inflation et fait chuter un pouvoir d’achat déjà restreint. Le sous-emploi de masse et l’effritement des niveaux de vie donnent naissance, à leur tour, à l’explosion d’activités parallèles précaires – l’économie informelle -, dont la présence même conduit à alourdir les cloisonnements et la contraction du marché national.

 

Ces mutations font, dans les pays qu’elles affectent, le malheur de la plupart, mais elles font aussi le bonheur de quelques-uns. Portées par des individus proches ou directement issus des bureaucraties au pouvoir, des fortunes privées colossales sont accumulées en quelques années, parfois quelques mois, sur les dépouilles de l’ancienne économie dirigée. N’étant plus limités dans leur voracité par des Etats en décomposition ; n’ayant pas d’autre ambition que l’enrichissement personnel ; condamnés, en raison de l’illégitimité de leur opulence, à ne se préoccuper que de gain immédiat – ces nouveaux ploutocrates vont se comporter en prédateurs et chercher à rendre irréversible la conversion imposée par la stratégie US. Le champ d’action qui leur est offert – le commerce d’import-export, la spéculation immobilière et boursière – exclue d’ailleurs toute chance de développement d’une économie nationale, par définition d’abord orientée vers la satisfaction des besoins nationaux.

 

Aujourd’hui, on ne parle plus d’ajustement structurel, mais de mondialisation ou de globalisation. Le changement sémantique n’a entraîné aucune modification dans le système d’exploitation des pays dépendants. Avec la prise en compte de la nouvelle donne chinoise, on pourrait dire, pour synthétiser l’analyse, qu’un tel système poursuit la réalisation de six objectifs principaux, concourant simultanément à sa perpétuation :

 

1.Détruire les capacités de régulation des Etats post coloniaux et post soviétiques ;

2.Détruire les structures de production nationales ;

3.Livrer les marchés intérieurs des biens de consommation de masse à la déferlante du “made in China” ;

4.Etablir des alliances privilégiés, à travers la coopération en matière de finances et de sécurité, avec les groupes dirigeants autochtones – réduits souvent à des clans familiaux et/ou maffieux – ayant abdiqué toute velléité d’indépendance et de souveraineté ;

5.Récupérer l’essentiel du produit du pillage ainsi organisé grâce au contrôle, par le dollar, des circuits d’échanges internationaux : 6.Maintenir le monde entier sous la protection ou la menace militaire.

 

Dans cette construction de l’ordre impérial américain actuel, tous les pays et toutes les régions ne sont évidemment pas logés à la même enseigne. Le facteur de distinction le plus significatif semble être celui du rôle que continue de jouer l’Etat : s’il est ou non en mesure de préserver une capacité de décision autonome. Au regard de ce critère, on peut dresser une sorte de tableau, un classement allant des pays disposant de la plus grande marge de manœuvre vers ceux soumis à l’assujettissement le plus brutal.

 

En haut de l’échelle, on trouve les pays d’Asie du Sud et du Sud Est. Ils se sont mieux protégés face aux injonctions du FMI et de la Banque mondiale. Ils ont réussi à sauvegarder le gros de leurs prérogatives publiques, malgré des liens étroits avec les Etats-Unis. Des considérations stratégiques entrent pour beaucoup dans cette situation favorable : ils ont reçu un soutien occidental massif, cette fois réel et sur plusieurs décennies, pour faire contrepoids à l’URSS d’abord, à la Chine ensuite.

Un cran plus bas, les principaux pays d’Amérique latine. Les politiques de Washington ont provoqué un vrai cataclysme au début des années 1980, mais on s’en est remis ici plus vite qu’ailleurs. La proximité géographique des USA semble générer deux tendances opposées : une plus grande vulnérabilité devant la pression, une plus longue tradition de résistance.

 

Tout en bas de l’échelle, la plupart des pays d’Afrique noire. Ce n’est pas uniquement l’économie qui a été sinistrée, la décomposition s’est attaquée à la substance même du corps social et du pouvoir politique. Dans certaines zones, la dislocation de l’Etat néocolonial a précipité la population dans une guerre civile généralisée. Les nouveaux entrepreneurs sont des chefs de bandes armées. Ils organisent la compétition pour les ressources de façon sauvage et sanglante, en attisant les clivages ethniques et tribaux et en se découpant des “royaumes indépendants”, en lutte incessante les uns contre les autres. Ailleurs, pour être moins meurtrière, l’anarchie n’est pas moins universelle. L’ordre institutionnel et légal n’a plus de consistance réelle : près de 90% des Africains survivent dans le cadre de ce que l’on continue néanmoins d’appeler l’économie souterraine. Le continent entier semble pris dans un tourbillon suicidaire, et il multiplie les tristes records : la plus forte proportion de pauvres, les taux d’analphabétisme les plus élevés, le plus grand volume de malades atteints du sida, etc.

 

Juste un cran au-dessus, les pays arabes et les pays musulmans d’Asie centrale. Ils ont en commun, en dehors de l’islam, de détenir les principaux gisements de pétrole et de gaz de la planète. On ne sait s’il s’agit là d’un bienfait d’Allah ou d’une malédiction. Les Etats-Unis considèrent, en effet, ces richesses comme leur bien, et comme un bien vital. Depuis 1991 et la première guerre contre l’Iraq, ils montrent jusqu’à quelles extrémités ils sont prêts à aller pour en garder le contrôle. Depuis lors – et les choses vont crescendo parallèlement à l’épuisement progressif des réserves -, cette région est devenue le lieu où leur pression militaire, politique, économique et idéologique est la plus lourde et la plus écrasante. C’est la ligne de front où se livre la bataille centrale pour le maintien de l’hégémonie américaine globale. Simultanément, on constate que c’est précisément dans cette partie du monde que l’on rencontre la plus forte densité de régimes dictatoriaux, les disparités sociales les plus extravagantes, les plus grands blocages au développement, les manifestations de résistance les plus dissymétriques et désespérées. Peut-on réellement croire que les deux séries de phénomènes ne sont pas directement liés ?

 

* * *

 

J’ai parlé, en commençant, de causes internes et de causes externes. C’était pour la commodité de l’exposé. Dans le capitalisme mondialisé actuel, dans la structure de domination américaine, cette distinction n’a pas de sens. Pour reprendre le jargon universitaire, je dirai qu’elle ne présente aucune pertinence cognitive. L’économie internationale est unifiée dans son fonctionnement, et c’est parce qu’elle est foncièrement inégale que ses expressions sont contradictoires, selon que l’on se trouve du côté de son pôle dominant ou de son pôle dominé. Issues d’une machinerie unique, ces manifestations sont en même temps opposées et liées entre elles. La richesse à un pôle impliquant la pauvreté à l’autre pôle ; la puissance du premier exigeant l’impuissance du second ; la liberté des uns appelant la tyrannie pour les autres. Ces figures différentes forment les deux bouts d’une même chaîne de causalité.

 

Pour comprendre ce qui nous arrive, il suffit de regarder le monde tel qu’il tourne. Il n’est pas nécessaire de partir à la recherche de fêlures intimes supplémentaires, réelles ou suggérées. Il n’est pas utile d’ajouter la culpabilité à l’agression. Et s’il faut absolument retourner l’arme de la critique contre nous-mêmes, que ce soit pour débusquer les faiblesses qui empêchent de mobiliser toutes les ressources intérieures dans le combat contre l’ordre mondial injuste qui nous asservit.

 

Ce combat est national. C’est la continuation, dans des conditions modifiées, d’une lutte déjà ancienne, entamée par les générations précédentes, et qui n’a pas encore abouti. Le combat doit être mené en Tunisie, mais son contexte stratégique naturel s’étend, selon moi, à l’ensemble du Maghreb et du monde arabe. Cette extension relève de la nécessité objective. Même si elle exprime une communauté de destin forgée par l’histoire, elle est surtout une exigence du présent et de l’avenir.

 

Il s’agit de rompre les liens de subordination qui nous enchaînent au système mondial actuel, de sortir de ce système et jeter les bases d’un développement autonome. Je ne vois pas comment il serait possible d’y parvenir avec les seuls moyens de la Tunisie, sans accumuler un minimum de masse critique, sans s’appuyer sur un mouvement d’émancipation similaire dans les autres pays arabes.

 

Ces considérations paraissent évidentes. Elles ne le sont pas pour tous. Dans le débat en cours sur l’unité des forces d’opposition, ce qui est mis en avant, c’est la question de la démocratie, jamais la question nationale. Comme si celle-ci était déjà résolue, comme si la liberté était concevable sans la souveraineté. Un tel “oubli” est symptomatique, de mon point de vue, d’une sorte d’affaissement de la conscience nationale, que l’on peut constater partout dans le monde arabe depuis les années 1970.

 

Je n’ai pas le temps d’approfondir. J’indiquerai néanmoins quelques éléments. Après les “indépendances”, nous avons connu deux formes d’opposition principales : d’abord la gauche, ensuite l’islamisme. Les forces de la gauche arabe, marxiste ou marxisante, possédaient une réelle tradition anti-impérialiste, mais généralement sans épaisseur culturelle ni identitaire. Cet héritage a reçu un coup fatal avec la mort du maoïsme et il s’est définitivement volatilisé après 1989 et l’effondrement du bloc soviétique. Beaucoup de militants se sont ensuite reconvertis dans la défense des droits de l’homme, un engagement important, mais privé de contenu politique effectif.

 

A son tour, la relève islamiste a contribué, activement, à l’obscurcissement de l’horizon national. Cela s’explique en partie par la nature de ses appuis régionaux au départ. Le soutien apporté par les Saoudiens, avec l’encouragement des USA – surtout après 1975 et l’assassinat du roi Fayçal -, exigeait des islamistes qu’ils combattent l’arabisme, au prétexte qu’il semait la division dans les rangs de la “Omma musulmane”. Mais la désertion du terrain national s’explique aussi, peut-être surtout, par une sorte d’infantilisme propre à tout mouvement politique à ses débuts, lorsque la définition de son identité prime sur le reste, lorsque l’idéologie reste perçue comme sa propre fin et que l’on s’imagine qu’elle peut se substituer sans dommage à un programme politique clairement défini.

 

S’ajoutant à la décomposition pratique et morale des politiques unitaires officielles, ces évolutions parallèles ont fait fortement reculer l’idée nationale dans une majorité de nos pays. De nombreuses années ont été perdues dans des querelles intestines, où l’on visait d’abord à préserver ou à affirmer sa singularité, sans trop se soucier de coordonner l’action contre l’ennemi commun.

 

On ne peut plus s’autoriser pareille légèreté. La multiplication des périls place désormais chacun au pied du mur. Principale force militaire arabe, l’Egypte a déposé les armes depuis la paix séparée avec Israël. La Palestine est entièrement annexée et quotidiennement martyrisée. Les troupes US ont des bases avancées dans toute la région du Golfe. L’Iraq est occupé, ses infrastructures sont détruites et il se dirige droit vers l’éclatement. La Syrie et le Liban sont pris dans la tourmente. Le Soudan évolue sous la menace d’une prise de contrôle directe par le Conseil de sécurité. L’Algérie subit d’intenses pressions ; tandis que le gouvernement libyen a monnayé sa survie contre la reddition.

 

Le danger monte de toute part ; il est mortel. La situation exige une réaction vigoureuse, qui passe par une réelle unification des efforts dans chaque pays et dans l’ensemble du monde arabe. Dans le climat de désarroi actuel, je sais combien de telles paroles peuvent paraître dérisoires. Mais regardez autour de vous. Tandis que les Etats-Unis s’acharnent sur notre région, leur étau se desserre ailleurs. C’est vrai pour la Chine ou la Russie, mais c’est le cas aussi en Amérique latine, où des élections démocratiques ont amené au pouvoir ces derniers mois – dans neuf Etats successifs ! -, des équipes ouvertement opposées à l’hégémonisme de leur voisin du Nord.

 

Tout cela présage de nouvelles difficultés pour les USA, qui se répercuteront inévitablement sur leur position internationale et, par conséquent, sur les positions des régimes arabes à leur solde. C’est dire que l’horizon n’est pas complètement obstrué, en particulier dans un pays comme le nôtre, où il n’y a pas d’intérêts majeurs liés à la taille du marché ou aux matières premières. Il faut donc travailler à réunir nos forces, apprendre à lutter ensemble autour d’objectifs précis, approfondir le débat, arrêter une tactique et une stratégie, élaborer un programme – bref, se préparer méthodiquement pour être en mesure de lancer les vraies batailles lorsque la conjoncture s’y prêtera.

 

L’unité des forces d’opposition est une priorité absolue. Surmonter la division entre laïcs et islamistes, c’est en réalité surmonter un clivage culturel qui sépare nos élites depuis de nombreuses générations. Ce serait un accomplissement majeur. Par sa charge symbolique, l’unité retrouvée aurait des conséquences politiques considérables. L’unité des élites garantit, en effet, l’unité populaire. C’est la condition d’une levée en masse contre le régime Ben Ali ; c’est la condition de la victoire.

 

Et les exigences démocratiques, dira-t-on, et la préservation des libertés individuelles, que deviennent-elles dans cette hypothèse ? Au risque d’étonner, j’avoue ne pas avoir de réelles inquiétudes à ce propos – ici aussi, pour des raisons de nécessité objective. D’abord, rien n’est figé. Si nous subissons des pressions extérieures très fortes, qui poussent instinctivement au repli et à l’archaïsme, ces mêmes pressions nous contraignent aussi à évoluer, à nous adapter, à nous transformer ; elles rendent obligatoire l’analyse et la lucidité. Ensuite, dans la mesure où la conscience nationale est appelée à se développer – et elle ne peut pas ne pas le faire avec ce que nous subissons -, il devient indispensable pour tous de prendre en compte les aspirations de l’ensemble des composantes de la nation.

 

Je pense, par exemple, à la question de l’égalité entre les femmes et les hommes. Un mouvement national authentique ne peut pas évacuer le sujet, en Tunisie moins qu’ailleurs. On sait la discussion ouverte à l’intérieur même des cercles islamistes de plusieurs pays, en particulier parmi les militantes. Des changements sont déjà perceptibles, dont je ne doute pas qu’ils trouvent une issue positive. En ce qui me concerne, en tout cas – je le dis pour ce que cela vaut -, il serait inacceptable qu’il puisse subsister parmi nous la moindre ambigüité sur ce terrain, ni pour le présent et encore moins pour le futur.

 

Mais il y a une autre question, à mes yeux aussi essentielle dans une perspective d’émancipation arabe, c’est la pleine reconnaissance du droit à l’égalité des minorités, notamment religieuses. Je pense évidemment aux rapports entre sunnites et chiites, mais je pense aussi aux Arabes chrétiens et aux nationaux de confession juive. Je ne vois pas comment un mouvement pourrait se proclamer national sans les intégrer en son sein, ni comment il pourrait les intégrer sans leur reconnaître une parfaite égalité de statut avec les autres citoyens.

 

Ce que je dois ajouter, en ne m’appuyant que sur l’histoire récente, c’est que toutes nos contradictions internes sont exploitées par nos adversaires. Si elles ne sont pas résolues, elles continueront d’être utilisées pour nous dresser les uns contre les autres et jeter le discrédit sur le sens de notre combat. Si elles étaient surmontées, on peut parier que la division changerait de camp. Devant cette alternative, je suis certain que l’intérêt national, et l’esprit de justice, finiront par l’emporter. Je suis convaincu que l’islamisme tunisien pourrait jouer un rôle précurseur à cet égard.

 

Je crois que les choses sont appelées à se mettre progressivement dans le bon ordre. La logique de l’action impose ses propres déterminismes, devant lesquels nul ne peut se dérober longtemps, sauf à se condamner à l’échec. Nous sommes invités, les uns et les autres, à passer de l’idéologie à la politique – de la tyrannie des dogmes à l’acceptation du réel et à l’intelligence des faits.

 

Nous sommes engagés sur un chemin difficile. Je vous le dis avec gravité et émotion : l’unité est notre seul bouclier. Nous devrons apprendre, ensemble, à nous laisser guider par nos propres objectifs, à nous appuyer sur notre propre héritage, au besoin en le transformant pour mieux l’adapter aux fins poursuivies. Nous devrons veiller sur lui comme sur un bien précieux et prendre garde à toute attitude d’imitation servile de qui que ce soit. Chaque culture engendre sa propre vision du monde, et donc son propre universel. Croire, en une époque inégale, que l’on doive s’armer des valeurs d’autrui pour se sauver, c’est se perdre sans rémission.

 

Tout au long du parcours, rien n’empêche d’imaginer, devant nous, la venue d’un temps différent, sans les rapports de domination qui le défigurent, où les valeurs de chaque homme seraient les valeurs de tous les hommes, parce qu’elles seraient le fruit de leur labeur commun et de leur fraternité. Nous en sommes loin aujourd’hui. Mais il est permis d’espérer, parce que nous n’avons rien d’autre que l’espérance à donner en partage.

 

Aziz Krichen Décembre 2006

 

(Source : « Tunisie, Réveille-toi », le 21 décembre 2006)

Lien: http://www.reveiltunisien.org/article.php3?id_article=2414


 

Tunisie, la pire des politiques répressives où quand l’arbitraire d’Etat redouble de férocité

Par Maître Hannoun

 

Madame, Monsieur la (le) Député(e) au Parlement Européen, Je viens de revenir d’une mission en Tunisie où j’ai enquêté notamment sur la situation des avocats défenseurs des droits humains qui exercent leur profession dans des conditions difficiles.

 

Certains d’entres eux, les plus engagés sur le terrain de la revendication politique, sont condamnés à des peines privatives de liberté, suite à des simulacres de procès, loin de la norme universelle du procès équitable.

 

Quotidiennement, à l’image des journalistes et autres défenseurs des droits humains, ils subissent des sévices et des tortures, dont l’objectif consiste à les réduire au silence, à défaut de pouvoir les soumettre au despote du moment, qui a pris racine en Tunisie depuis 19 ans, le « président » Ben Ali. Leurs familles, qui vivent sous la chape de plomb de la police politique, sont soumises à des pressions morales et physiques monstres : écoutes téléphoniques, filatures, menaces, harcèlement fiscal, agressions physiques…

 

Madame, Monsieur, Comme vous le savez, la Tunisie, tout en ayant ratifié les textes internationaux inhérents aux droits humains, ne cesse de les violer quotidiennement. Le cas des Avocats est une simple illustration de cette descente aux enfers d’un pays où la police politique fait régner la loi de la terreur, pour le maintien d’un système dictatorial mis en place depuis 1987 par le président Ben Ali. Dans cette logique répressive, toutes les voix discordantes sont indexées et mises sous la coupe répressive de la police politique. Les exemples sont légion :

 

1/ Maître Mohamed Abbou, avocat au Barreau de Tunis, est emprisonné depuis avril 2005, purgeant une peine de 3 ans et 6 mois fermes pour avoir osé dénoncer la dictature de Ben Ali dans un article diffusé sur le net. Il a observé plusieurs grèves de la faim afin d’alerter l’opinion nationale et internationale sur les inhumaines conditions carcérales que lui impose le pouvoir au sein de la prison du Kef (170 kms à l’ouest de Tunis). Sa femme, Samia Abbou, en allant lui rendre visite, le 7 décembre dernier, a été agressée par des policiers en civil qui l’ont empêchée de le voir, lui reprochant son engagement pour la libération de son mari. Jusqu’à aujourd’hui, elle est encore sous le choc d’une telle violence. Cette action commando de la police politique de Ben Ali est une énième tentative de faire taire Mme. Abbou qui continue à nous alerter, malgré les menaces, sur l’évolution de la situation de notre confrère Abbou ;

 

2/ Le professeur Moncef Marzouki, président du Congrès pour la République, parti politique d’opposition interdit par Ben Ali et sa police politique, a lui aussi été en compagnie de mme. Abbou lors de son agression le 7 décembre dernier. Il continue de payer son opposition au système dictatorial qui confisque les libertés et les droits des Tunisiens. Pour avoir lancé récemment un appel à une résistance pacifique, la machine judiciaire s’est mise en branle avec l’objectif de le priver de ses libertés de mouvements et de paroles. Il est de facto convoqué, le mardi prochain devant le juge. Considérant que la justice tunisienne n’est que le pendant hideux de la police politique de Ben Ali, il faudra s’attendre à une condamnation pour l’exemple.

 

Madame, Monsieur, Ces deux cas, tirés de l’actualité récente de la répression en Tunisie, malheureusement, ne sont aucunement exhaustifs, loin s’en faut. Ils sont deux exemples représentant une simple image de ce qu’est actuellement la Tunisie de Ben Ali qui, sous la joie des plages et des complexes touristiques offerts aux touristes, notamment européens, est une prison à ciel ouvert où la torture est érigée en mode de gouvernance.

 

Nonobstant l’accord d’association entre la Tunisie et l’U. E., où la clause de l’Etat de droit est censée être une angusticlave contre les dérives dictatoriales ; abstraction faite des protocoles internationaux pour la protection des droits humains ratifiés par la Tunisie, la communauté internationale et la France, en particulier par la voix du président Chirac, en référence à la situation politique de la Tunisie, continuent à considérer que le « premier des droits, c’est de procurer du pain pour le peuple ». C’est dans ce contexte géopolitique que le pouvoir dictatorial de Ben Ali redouble de férocité, par la torture, l’emprisonnement et les harcèlements incessants…

 

Madame, Monsieur, Connaissant votre engagement personnel pour la défense des justes causes ainsi que votre intérêt pour la promotion de la démocratie et des droits humains, je reste convaincu que vous pouvez contribuer à atténuer un tant soit peu les souffrances des Démocrates tunisiens et de leurs familles qui se sont engagés dans la voie de l’opposition pacifique à la dictature de Ben Ali et qui subissent, en conséquence, une violente répression, dans l’indifférence des Démocrates du monde.

 

Conscient que votre statut de député au Parlement Européen, qui a entre- autres permis l’adoption de la résolution du 13 juin dernier sur la situation en Tunisie, est un moyen légal vous permettant la saisine des Autorités européennes sur l’impunité dont jouit l’un des systèmes les plus répressifs du 21ème siècle, à 2h30 d’avion de Paris, je vous saurai gré de bien vouloir accorder un peu de votre temps, malgré vos importantes charges politiques actuelles, afin de vous enquérir de la détresse de nos amis Démocrates tunisiens et de prendre les initiatives y afférentes.

 

Restant à votre entière disposition pour tout élément d’information que vous jugeriez utile, je vous prie de croire, Madame, Monsieur le (la) Député(e), en l’expression de ma profonde considération et pour votre personne et pour l’important travail que vous faites.

 

Sachez qu’une minute de votre attention signifie, sûrement, le rétrécissement du champs de l’impunité et le sauvetage d’une vie torturée dans les geôles du Ministère de l’Intérieur et de sa police politique, et qui hurle contre l’infamie et l’incurie de la dictature de Ben Ali…

 

Au nom de tous ces suppliciés, femmes et hommes, merci d’avance pour votre écoute et pour toutes les actions que vous entreprendriez ! Bien à vous.

 

Votre bien dévoué, Maître Hannoun Avocat

Paris, le 08 décembre 06

 

(Source : « Tunisie, Réveille-toi », le 21 décembre 2006)

Lien: http://www.reveiltunisien.org/article.php3?id_article=2411

  

 


 

Le topo actuel de la Tunisie moderne

 

Posté sur les forums internes de Reveiltunisien.org, le 18 décembre 2006

 

ANDRE GROMYKO, le communiste en retraite, invité au congrès de L’utica quelle idée et quelle utilité pour la Tunisie ? Tout juste de la poudre au yeux ! Pour faire bien !! Jilani est confirmé pour un nouveau mandat sans passer par les urnes. Il a suffit seulement de la présence du chef comme d’habitude pour une allocation du maintien du même homme et comment ne pas se déplacer pour le boeuf de la first lady du pays.

 

Les bulletins de vote les urnes et les enveloppes ont été balancées dans la décharge de kherreddine,et les épiciers dégagés du congrès comme des moutons. Comment se passer de Jilani, le financier du régime et le créancier des causes mesquines et du parti au pouvoir ? Tiens criket pardon Jrad vient de se taper la direction de l’ugtt ce matin, confirmé lui aussi et imposé à la centrale syndicale par la même dictée : celui qu’on connaît vaut que celui qu’on ne connaît pas. Il se peut qu’il soit à l’origine d’une révolution !!

 

L’ugtt l’unique centrale cernée par le pouvoir et le parti, étouffée, sucée par les vautours affamés et alléchés par le gros magot que possède cette institution. Le syndicalisme a été tué avec hached ressuscité par habib achour et tué à jamais par l’ère du changement du 7 novembre de l’antisyndicalisme.

 

Tiens jilani lance un appel à jrad dans son congrès pour lui siffler comment trafiquoter pour réussir et surtout continuer sur le même chemin et les mêmes têtes, changement oui et changer non ceci dans le but de préparer le scénario catastrophe de 2009.

 

Jrad élu et dehors la police mate les syndicalistes libéraux et les empêchent de rentrer pour se présenter. Ce sont les vrais, ceux qui se battent pour un syndicat libre et démocratique. Jrad est apprécié au palais depuis l’histoire de la taupe mise sur jrad par ce même palais, une taupe fatiguée qui a tout dévoilé à jrad à condition d’échanges de services. jrad se fâche d’être sous surveillance et interpelle le palais qui demande des excuses contre des faveurs dont l’une est cette nomination !

 

L’odc : organisation de défense des consommateurs, le croissant rouge, l’unft, l’utap, tous les conseils ordinaux, des médecins, pharmaciens, avocats, ingénieurs, vétérinaires, experts comptables, l’association des magistrats, la TAP : cellule de renseignement ou lieu d’être au service de l’information du tunisien, les partis politiques suivants : UDU, PUP, MDS, PVP, PSL, le sport, la culture,..etc Tout cela baigne dans le même liquide rouge violacé à la sauce rcd et pourvu que les bouches soient remplies. Le but est de diviniser le chef et de verser dans le même bol en vue d’aboutir à la défaillance du pays et de détruire toutes les structures saines de la société.

 

(Source : « Tunisie, Réveille-toi », le 21 décembre 2006)

Lien: http://www.reveiltunisien.org/article.php3?id_article=2411


 

 

Alliance des civilisations

Une reconnaissance onusienne pour l’apport de Mohamed Charfi

 

Le « Groupe de haut niveau » créé par le Secrétaire général de l’ONU,M. Kofi Annan afin de produire une analyse et des recommandations pour une réponse internationale à la montée de l'intolérance, de l'extrémisme, de la violence et du terrorisme  a tenu sa dernière réunion le 13 novembre dernier à Istanboul  pour présenter son rapport final. M Mohamed Charfi, une des 18 personnalités désignées par M. Annan pour constituer ce Groupe n’ayant pas pu assister à cette réunion pour raisons de santé, le Secrétaire général de l’ONU lui a rendu un hommage appuyé pour ses contributions à l’élaboration du rapport final et a regretté son absence, en lui souhaitant prompt rétablissement.

 

Il est à noter que M. Mohamed Charfi a participé activement aux précédentes réunions du groupe en présentant des contributions substantielles, ce qui a fait dire  aux deux co-présidents du groupe, MM. Frederico Mayor et Mehmet Aydin dans une lettre qu’ils lui ont adressée : « Vos interventions et vos contributions à l’élaboration du rapport en ont renforcé les différentes parties tout au long de la dernière année ».

 

Dans une autre lettre, M. Iqbal Riza, conseiller spécial de M. Annan, a estimé que « la transformation que M. Charfi a apportée au système éducatif en Tunisie et sa vaste érudition en histoire et philosophie, dans les traditions islamiques et occidentales, ont été un atout inestimable  à l’initiative pour une Alliance des Civilisations »

 

Quant à que M. Hubert Védrine, ancien ministre français des affaires étrangères, il a estimé que les textes présentés par M.  Charfi  « sont tous très intéressants et très justes. »

 

Le 2 septembre 2005, M. Kofi Annan avait annoncé la composition du Groupe de Haut Niveau, co-présidé par l'ancien Directeur général de l'UNESCO, l'espagnol Frederico Mayor, et le ministre d'Etat et professeur de théologie turc, Mehmet Aydin –l’Espagne et la Turquie étant les deux co-parrains de l’initiative - et composé de 18 personnalités représentant les différentes régions culturelles du monde dont M. Mohamed Charfi, ancien ministre de l’éducation,  pour l’Afrique du Nord, M. Mohamed Khatami, ancien Président iranien, pour le Moyen Orient, M. Moustapha Niasse, ancien Premier Ministre du Sénégal, pour l’Afrique de l’Ouest, l’Archevêque Desmond Tutu pour l’Afrique du Sud et M. Hubert Védrine pour l’Europe de l’Ouest.

 

(Source : Attariq Al Jadid, N° 55- décembre 2006)

Lien : http://fr.blog.360.yahoo.com/blog-bawT19A8eqfODSt0dUg5c6DCYQU-?cq=1

 

 


 

 Le Ministre A Toujours Le Dossier Bien En Main !

Patriot 2005

 

Fin septembre 2005, TunisNews publiait, sur deux parties, (voir les éditions des 24 et 29 septembre 2005), un témoignage d’une « ancienne fonctionnaire du ministère de l’information » dans lequel elle étalait les frasques et les turpitudes du premier responsable de l’une des plus importantes entreprises de presse en Tunisie.

 

La dame se déclarait, à la fin de son article, tout à fait convaincue que l’actuel ministre de la communication, « un homme intègre et vertueux », avait le dossier bien en main et qu’il était déterminé à « jeter un coup d’œil » dans les affaires de cette entreprise pour sanctionner les abus et mettre fin aux exactions qui s’y opèrent. Huit mois après, qu’en est-il exactement ?

 

Le responsable en question est non seulement toujours en place mais, ayant déjà atteint l’âge de la retraite, il est en passe de bénéficier d’une année supplémentaire, sous forme de gratification. Deux autres directeurs, travaillant dans la même boite, avaient déjà bénéficié, avant lui, du même privilège, voire même doublement, pour l’un d’entre eux. C’est, semble-t-il, dans le cadre d’un nouveau mécanisme appelé « l’emploi des seniors » ou plus communément « tachghil es-chiyeb »

 

L’entreprise en question est, de nouveau, à la Une de l’actualité (voir Al Mawqef de cette semaine), à la suite d’une affaire de mœurs, harcèlement sexuel plus précisément, dans laquelle est impliqué un responsable de la rédaction travaillant dans cette entreprise et qui est, de surcroît, membre d’une importante organisation nationale censée défendre le consommateur.

 

Là encore, non seulement le coupable n’a été ni inquiété ni sanctionné, (comble de l’ignominie, il est lui-même le président du conseil de discipline), mais il est en passe de recevoir, lui aussi, une gratification, sous forme de détachement, en qualité de chargé de mission, dans un ministère qui à la charge de l’éducation de nos enfants !!!.

 

Les mauvaises langues disent que c’est son supérieur hiérarchique direct, le directeur qui joue les premières prolongations, un grand manœuvrier et un manipulateur bien connu dans les cercles des médias et de la presse, qui a incité la journaliste victime de harcèlement à porter l’affaire devant le PDG, pour se débarrasser d’un rival et dégager la voie devant l’une de ses protégées prétendante au poste de chef de desk.

 

Le second directeur, qui joue, lui, les deuxièmes prolongations, et que tout le monde appelle « le Prince de Monaco », vu que sa puissance dépasse celle du PDG, voire même celle du ministre, se trouve actuellement en Allemagne, en compagnie de sa maîtresse attitrée, pour couvrir le Mondial 2006.

 

Voilà où en est, en gros et non en détail, la situation dans l’une de nos plus importantes entreprises de presse.

 

Entre-temps, les journalistes de la boîte, les jeunes et les moins jeunes, continuent de fulminer contre la mauvaise gestion qui sévit à tous les niveaux, les injustices et les passe-droits et la dégradation effarante des rapports humains, en l’absence totale de toute forme de dialogue et de concertation au sein de l’entreprise.

 

Aux dernières nouvelles, le ministre a toujours le dossier bien en main !

 

(Source : le blog « Divagation » de Patriote 2005, le 19 décembre 2006 à 10h03 PM)

Lien : http://patriote2005.blogspot.com/

 

 


 

 

Message de « Sami III » aux lecteurs de son blog (censuré):

 

Chers lecteurs

 

Depuis deux semaines, j’ai remarqué une augmentation du nombre de visites à mon blog depuis différents pays, à qui normalement ce blog n’est pas destiné, pourquoi? Parce que je n’utilise sur ce blog que la langue française, et dans de rares cas, le dialecte arabe tunisien, donc normalement tous mes lecteurs cibles sont en Tunisie, France ou les Tunisiens en Europe, aux USA ou Canada. C’est d’ailleurs les seules sources pendant plus d’un mois, âge de mon blog. Les seuls liens sources provenaient de tn-blog, tuniblog, google ou un raccourcis direct de mon blog chez le lecteur (des amis qui aiment lire souvent mon blog). Ce qui a changé depuis deux semaines, c’est l’augmentation SIGNIFICATIVE du nombre de visiteurs par jour, de destinations orientales (Egypte, Lybie et autres états arabes) et de l’Europe (surtout la suisse). Ma première impression, était bien sur la satisfaction que mon blog s’internationalise, sauf que, et c’est ce qui m’a semblé bizarre, c’est les liens sources (nawaat.org, tunisnews.net) que je ne pouvais vérifié à cause de leur inaccessibilité en Tunisie. Ils donnaient des liens directs à mon blog, mais j’ai pas donné plus d’importance à ce sujet. Après la censure de mon blog, les principales visites provenaient de ces sites là en plus d’un certain blog (yahyaoui.rsfblog.org). A part quelques visites de tn-blog, tous mes visiteurs viennent de sources inaccessibles en Tunisie. Alors, je me suis débrouillé pour connaitre de quoi parlent ceux qui me référencent… Un message pour ces référenceurs:

 

Je vous demande de ne pas modifier mes dires et y extraire les “morceaux” qui vous servent! Moi je ne parle dans mon blog, que de ma vie et ce qui m’entoure, ET PUISQUE JE N’AI AUCUNE ACTIVITE POLITIQUE, JE NE PARLE JAMAIS DE POLITIQUE!

!!!! PAS DE POLITIQUE ICI !!!! !!!! NO POLITIC HERE !!!!  

Donc pour les lecteurs qui viennent suivre l’actualité politique, mes idées politiques ou autre sujets de ce genre IL Y A UNE CROIX ROUGE EN HAUT A DROITE DE VOTRE NAVIGATEUR? APPUYEZ DESSUS SANS HESITER, VOUS VOUS TROMPEZ D’ADRESSE! Mon action du Lundi, si j’y participe, c’est pour que je puisse parler de ce que je veux pas de ce que vous voulez!

 

Et une pensée pour eux: si vous voulez faire la politique, ne fuyez pas derrière les mers et les océans, la Tunisie est là pas ailleurs. PS: Cette note n’est pas destinée à priori aux lecteurs résidents en Tunisie. Elle est destinée à ceux qui viennent d’endroits biens précis, guidés par des liens biens précis et vers des notes bien précises.

 

(Source : le blog tunisien « SAMI III » Espace Dictateur, le 22 décembre 2006 à 13h35)

Lien : http://sami-iii.blogspot.com/index.html

 

 


 

Commerce

L’étau se resserre autour du marché parallèle

La libéralisation des échanges faussera les calculs des contrebandiers.

 

A partir du 1er janvier 2007,  la loi sur les concessions commerciales en Libye entrera en vigueur. Cette loi vise particulièrement l’organisation du secteur commercial en garantissant l’importation de marchandises de qualité et non contrefaites et en assurant des services après-vente, maintenance et pièces de rechange.

 

En plus clair, selon les maîtres de cette loi, la nouvelle réglementation est de nature à protéger les producteurs de biens, les importateurs ainsi que les consommateurs et la structure de l’économie tant en Libye qu’en Tunisie et partant éliminer le phénomène de commerce parallèle et les marchandises contrefaites.

 

Cette loi, qui vient s’ajouter aux dispositions mises en place, depuis le 1er septembre 2006, sur le traitement national de leurs produits sur les marchés tunisien et libyen, a fait l’objet d’un séminaire organisé mardi à Tunis, à l’initiative du Centre de promotion des exportations (Cepex) en coopération avec l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA) et la Chambre économique mixte tuniso-libyenne et en présence des hommes d’affaires tunisiens et libyens.

 

Ces dispositions viennent en application des recommandations du «Comité exécutif» tuniso-libyen dans sa 19ème édition (13-14 juillet 2006, à Tunis). Cette commission avait recommandé de «lever les obstacles qui entravent les échanges commerciaux, et de développer la coopération douanière». Ces recommandations, notamment celle concernant l’impulsion des échanges commerciaux, de la coopération douanière et des relations de coopération dans le domaine de la normalisation des produits, ont été au centre de la réunion tenue au mois d’août, dans la ville libyenne de Zouara, sous la présidence des ministre du Commerce dans les deux pays.

 

Les Tunisiens déplorent

 

 Même s’ils ont exprimé leur satisfaction de cette loi, dans la mesure où elle sert à diminuer le flux des marchandises « en noir » par les frontières, les participants estiment que les deux pays ne sont pas bien lancés dans la construction d’une zone de libre-échange, conformément aux principes inscrits dans l’accord de libre-échange de 2001, et  qui a mis cinq ans pour recevoir un début d’exécution.

 

Ils déplorent les récentes taxes sur les prestations aéroportuaires et des «droits sur la consommation» instaurées par la Libye. De plus, une exonération totale des droits de douanes vient d’être adoptée à la Jamahiriya pour les produits importes (tous pays d’origine confondus). Ceux-ci seront soumis seulement à une taxe de 4%.

 

Par ailleurs, ce pays impose de plus en plus de nouvelles mesures réglementaires de ses activités commerciales telle que la dernière décision libyenne exigeant les exportateurs tunisiens, dont le nombre dépasse 900, désirant écouler leurs marchandises sur le marché de la Jamahiriya arabe libyenne, de passer par les agences commerciales libyennes conformément à une décision libyenne prise dernièrement et visant à dynamiser l’activité des agences commerciales et réglementer les importations.

 

 L’industrie, le tourisme et le service stimulent les Libyens

 

 L’accord de libre-échange, signé entre les deux pays le 14 juin 2001, vise à «libérer le commerce de tous les obstacles qui pourraient entraver l’écoulement des marchandises entre les deux pays», «l’établissement d’une coopération économique et commerciale afin de parvenir à l’interpénétration des intérêts au profit des deux parties» et «l’exploitation optimale des moyens et le développement du partenariat entre les entreprises des deux pays».

 

Selon un document présenté à ce séminaire, la libéralisation des échanges concerne les produits agricoles et animaux, les matières premières et ressources naturelles, ainsi que les produits industriels fabriqués dans les deux pays. Ces derniers produits doivent avoir une valeur ajoutée -sous forme de «main-d’oeuvre, de matières premières et autres entrant dans leur fabrication»- de 40%, ou des matières premières locales ou maghrébines représentant au moins 60% du total. Et pour bénéficier des exonérations -des taxes douanières, taxes et impôts aux effets équivalents et appliquées dans les deux pays- prévues par l’accord de libre-échange (et auxquels aucune des deux parties ne peut ajouter de nouvelles après l’entrée en vigueur du traité), les produits devront «être accompagnés d’un certificat d’origine émis et signé par les organismes spécialisés du pays exportateur».

 

Ainsi, les échanges commerciaux tuniso-libyens sont passés à 1275 millions de dinars en 2005 contre 960 millions de dinars en 2004, soit une hausse de 32%. Cette tendance à la hausse s’est poursuivie durant les 11 premiers mois de 2006 avec une augmentation des exportations de 30 % atteignant 727 millions de dinars. Quant aux importations, elles ont enregistré une hausse de 55 % atteignant 911 millions.

 

Les investisseurs libyens occupent la quatrième position parmi les investisseurs arabes en Tunisie avec 39 projets dont 31 dans le secteur industriel, 5 dans le tourisme et 3 dans le service.

 

S’agissant des entreprises tunisiennes, 27 unités sont installées en Libye opérant dans les industries et les services outre la participation de 16 sociétés tunisiennes dans des entreprises libyennes. Ainsi, la Tunisie est le premier investisseur étranger en Libye.

 

Aziz ARFAOUI

 

(Source : « Le Temps » du 22 décembre 2006)

 


 

L’armée britannique arrête un responsable de la police irakienne à Bassorah

 

AFP, le 22 décembre 2006 à 12h31

 

BAGDAD, 22 déc 2006 (AFP) – L’armée britannique a arrêté vendredi à Bassorah (sud de l’Irak) un chef de la police locale et six de ses hommes au cours d’une vaste opération impliquant près d’un millier de soldats, a annoncé un porte-parole du contingent britannique, le major Charlie Burbridge.

 

Sept suspects ont été interpellés, tous membres d’une unité spécialisée de la police locale suspectée d’avoir participé à des “escadrons de la mort”, a expliqué le major Burbridge, interrogé à Bassorah (550 km au sud de la capitale) par téléphone depuis Bagdad.

 

Un millier de soldats britanniques, appuyés par des chars et des engins blindés, ont pris part à cette opération qui s’est déroulée “sans un coup de feu” et simultanément dans plusieurs quartiers de la ville.

Certains des suspects détenus pourraient être libérés prochainement mais suffisamment de preuves ont été rassemblées contre le chef du groupe, dont le nom n’a pas été révélé par le porte-parole britannique.

Cet officier de police est accusé d’avoir pris part le 29 octobre à l’attaque d’un bus transportant 17 employés irakiens de l’académie de police gérée par l’armée britannique à Bassorah.

Les 17 passagers avaient tous été tués, leur corps abandonnés dans le quartier périphérique de Shuaiba, près d’une base britannique, afin d’y intimider les populations locales.

 


 

 

Français expulsés: Paris accuse Le Caire de violer les conventions

AFP, le 22 décembre 2006 à 16h40

PARIS, 22 déc 2006 (AFP) – La France a accusé vendredi l’Egypte de violer les conventions sur la protection consulaire et la coopération judiciaire dans l’affaire des 11 Français qui ont été expulsés d’Egypte après avoir été arrêtés et soupçonnés de liens avec des organisations islamistes.

Interrogé pour savoir quelles conséquences la France comptait tirer de cette double violation, le ministère français des Affaires étrangères a répondu qu'”il y aurait une protestation” si les clarifications demandées n’étaient pas satisfaisantes.

La France et l’Egypte entretiennent traditionnellement d’étroites relations.

“Nous avons adressé le 17 décembre une note verbale aux autorités égyptiennes, pour leur rappeler la nécessité de respecter la convention de Vienne, notamment ses dispositions relatives à la protection consulaire, et l’accord franco-égyptien de 1982 et pour leur demander des éclaircissements”, a déclaré le porte-parole du ministère, Jean-Baptiste Mattéi.

L’un des 11 Français expulsés d’Egypte, Youri Sorokine, qui affirme avoir été torturé pendant sa détention, a demandé jeudi dans une lettre adressée au ministre français des Affaires étrangères que la France condamne officiellement les violations des droits de l’Homme en Egypte.

“Nous avons reçu cette lettre”, a précisé M. Mattéi, en rappelant que les consulats au Caire et à Alexandrie s’étaient “mobilisés en soutien de nos compatriotes dès qu’ils ont eu connaissance de leur détention”.

“Une visite consulaire avait été sollicitée pour chacun de nos compatriotes en application de la convention de Vienne de 1963”, a-t-il dit, ajoutant que “les autorités égyptienne n’avaient pas donné suite à cette demande”.

En outre, “contrairement aux dispositions de la convention bilatérale de coopération judiciaire en matière pénale franco-égyptienne du 15 mars 1982, la représentation consulaire française n’a pas été avertie par les autorités égyptiennes de ces arrestations, alors même que le délai de 7 jours au-delà duquel cette information devait être déférée avait été dépassé”, a-t-il dit.

Au total 11 Français, soupçonnés de liens avec des organisations islamistes, ont été arrêtés en novembre par les services de sécurité égyptiens, puis expulsés d’Egypte après avoir été interrogés au Caire. Ils ont tous été remis en liberté.

  


 

 

International Federation for Human Rights (FIDH) Libyan League for Human Rights (LLHR), Palestinian Center for Human Rights ( PCHR) Organisation Marocaine des Droits Humains (OMDH), Association Marocaine des Droits Humains (AMDH) Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH), Conseil National pour les Libertés en Tunisie (CNLT) Bahrain Human Rights Society (BHRS), Amman Center for Human Rights Studies (ACHRS) Ligue Algérienne des Droits de l’Homme (LADH), Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme (LADDH) Egyptian Organisation for Human Rights (EOHR), Association Libanaise des Droits de l’Homme (ALDHOM) OPEN LETTER TO PRESIDENT OF THE SUPREME COURT OF LIBYA

 

21 December 2006

 

Mr. President, The International Federation for Human Rights (FIDH) and its member organisations in North Africa and Middle East (1) express their deepest concern with regard to the death sentence pronounced, on 19 December 2006, by the Penal Court of Benghazi against five Bulgarian nurses and a Palestinian doctor. Our organisations welcome the decision of the Supreme Court of Libya to reexamine the case and call on the president of the Supreme Court and its members to ensure all the guarantees of a fair and impartial trial. The six medical professionals, detained since 1999, have been convicted of knowingly infecting 426 Libyan children with HIV in a hospital in Benghazi, Libya. They were tried and sentenced to death in May 2004, the decision was overturned and a retrial was ordered on 25 December 2005 by the Supreme Court on the grounds of irregularities occurred during the arrests and interrogations. A new trial has begun on 11 May 2006, ending with the Capital punishment of 19 December 2006. Both trials were considered as unfair, in particular due to allegations of torture to extract confessions used against the accused persons and the omission of evidences. Strong evidences which were presented to the Court demonstrating that the HIV outbreak most probably resulted from negligent hygienic conditions and the re-use of syringes in hospital as well as the traces of HIV presence before six medicals’ arrival were not taken into account. FIDH and its member organisations reaffirm their strong opposition to death penalty, as it fundamentally contradicts the principle of human dignity proclaimed in the Universal Declaration of Human Rights, as well as the right to life. Furthermore, our organisations reaffirm their solidarity and support to all victims. FIDH and its member organisations call upon the Supreme Court of Libya to ensure full compliance with the international human rights instruments and in particular, the International Covenant on Civil and Political Rights (ICCPR) – ratified by Libya in 1970 – which guarantees the right to a fair and impartial trial. In view of the serious shortcomings of the trial proceedings, we consider that the death penalty should clearly be overturned. Yours respectfully, Sidiki KABA, President of FIDH Press contact : Karine Appy + 33 1 43 55 25 18 / + 33 1 43 55 14 12

 

(1) The signatories are the Libyan League for Human Rights (LLHR), the Palestinian Center for Human Rights ( PCHR), the Organisation Marocaine des Droits Humains (OMDH), the Association Marocaine des Droits Humains (AMDH), the Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH), the Conseil National pour les Libertés en Tunisie (CNLT), the Bahrain Human Rights Society (BHRS), the Amman Center for Human Rights Studies (ACHRS), the Ligue Algérienne des Droits de l’Homme (LADH), the Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme (LADDH), the Egyptian Organisation for Human Rights (EOHR), the Association Libanaise des Droits de l’Homme (ALDHOM).  

Karine Appy
Attachée de presse
Press Officer
FIDH
+33 1 43 55 14 12
+33 1 43 55 25 18
+33 6 68 42 93 47
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