4 mai 2008

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TUNISNEWS
8 Úme année, N°  2903 du 04.05.2008
 archives : www.tunisnews.net


AISPP: Hafedh Mezhoudi, une famille assiĂ©gĂ©e ! VĂ©ritĂ©-Action: P Ă© t i t i o n  – A l’attention de Monsieur Nicolas SARKOZY Luiza Toscane: Encore un report du procĂšs de Sameh Harakati APA: La libertĂ© de la presse entre ouverture et statu quo en Tunisie Abdelaziz Agoubi: Monsieur Philippe LĂ©glise – Un grand ami de la Tunisie libre Hichem Skik : le paysage mediatique en Tunisie Le Quotidien: «Bourguiba et les MĂ©dias » : A livre ouvert


Houcine Bardi: Plaidoyer pour une « schizo-analyse » collective


Liberté pour tous les prisonniers politiques Liberté pour Abdallah Zouari, le journaliste exilé dans son propre pays Association Internationale de Soutien aux Prisonniers politiques 43 Rue Eldjazira, Tunis e-mail : aispptunisie@yahoo.fr Tunis, le 3 mai 2008

Hafedh Mezhoudi, une famille assiégée !

Des agents de la police politique de Menzel Bourguiba ont encerclĂ© vendredi 2 mai le domicile de l’ex prisonnier politique Hafedh Mezhoudi aprĂšs qu’il eĂ»t protestĂ© publiquement, aprĂšs la priĂšre du vendredi, contre la politique visant Ă  affamer sa famille : son frĂšre a Ă©tĂ© empĂȘchĂ© de travailler et sa sƓur, diplĂŽmĂ©e de Institut SupĂ©rieur de documentation depuis 1997 a Ă©tĂ© privĂ©e d’emploi Ă  plusieurs reprises Ă  cause de l’arrestation de son frĂšre. Pour rappel, sa mĂšre et son petit frĂšre souffrent d’un handicap. La famille d’Hafedh Mezhoudi a contactĂ© la Ligue Tunisienne pour la DĂ©fense des Droits de l’Homme et la fĂ©dĂ©ration de Bizerte du Parti DĂ©mocratique Progressiste, ainsi que l’association LibertĂ© et EquitĂ© et la section de Bizerte de l’AISPP aprĂšs que les membres de la police politique eurent tentĂ© d’investir le domicile. En dĂ©pit de cette tentative de kidnapping, Hafedh Mezhoudi a refusĂ© de sortir tant qu’il ne recevrait pas de convocation officielle. [
] Pour la section de Bizerte Othman Jemili (traduction d’extraits, ni revue ni corrigĂ©e par les auteurs de la version en arabe, LT)
 

Dans le cadre de sa particiation au salon international du livre Ă  GenĂšve du 30 avril au 4 mai, VĂ©ritĂ©-Action fait signer deux pĂ©titions: l’une adressĂ© au prĂ©sident français et l’autre de soutien aux journalistes grĂ©vistes. Vous pouvez signer cette pĂ©tition directement dans notre stand ou en envoyant un email sur : info@verite-action.org  

Vérité-Action

P Ă© t i t i o n 1 A l’attention de Monsieur Nicolas SARKOZY

Président de la République française  

Monsieur Le PrĂ©sident, Votre derniĂšre visite en Tunisie et les propos que vous avez tenu Ă  l’occasion de cette visite d’Etat nous a profondĂ©ment choquĂ©. Lors de cette visite, et alors que tout le monde connaĂźt ce qui passe en Tunisie, vous avez dĂ©clarĂ© que l’espace des libertĂ©s progresse et que la Tunisie n’a pas de leçons Ă  apprendre de quiconque en matiĂšre de dĂ©mocratie et de droits de l’homme. Cela a Ă©tĂ© Ă©galement le cas lorsque le reprĂ©sentant de la France, lors de l’examen pĂ©riodique universel du rapport de la Tunisie par devant le Conseil des droits de l’homme le 8 avril 2008, n’a soulevĂ© aucun reproche et a distribuĂ© des Ă©loges gratuites faisant croire Ă  un paradis des droits de l’homme.  Or, comme vous le savez certainement, Monsieur le PrĂ©sident, dans la Tunisie d’aujourd’hui les libertĂ©s sont quotidiennement bafouĂ©es, les dĂ©fenseurs des droits de l’Homme subissent une rĂ©pression sĂ©vĂšre, la justice comme la presse sont sous contrĂŽle et la dĂ©mocratie est les plus grand absent depuis maintenant plus de 20 ans du rĂšgne du prĂ©sident Ben Ali. Au vu de cette situation, nous soussignĂ©s : 1.     Manifestons par la prĂ©sente notre solidaritĂ© avec la sociĂ©tĂ© civile tunisienne ; 2.     Exprimons notre indignation et notre condamnation devant la complaisance de votre discours Ă  l’Ă©gard du rĂ©gime Ben Ali ; 3.     Appelons la France Ă  assumer ses valeurs fondatrices en soutenant le combat des tunisiens pour la dĂ©mocratie et le respect des droits de l’homme loin de tous  calculs de court terme qui ne servent qu’à renforcer la dictature. Pour signer la pĂ©tition envoyez un email Ă  : info@verite-action.org  

P Ă© t i t i o n 2

 
Depuis le dĂ©but des annĂ©es 1990, les composantes de la sociĂ©tĂ© civile tunisienne subissent les tracasseries des autoritĂ©s policiĂšres. Des journalistes, des avocats, des Ă©tudiants, des familles de prisonniers d’opinion, des personnalitĂ©s politiques, des reprĂ©sentants d’ONGs ou partis politiques et mĂȘmes des jeunes citoyens, subissent sans cesse les agressions, le harcĂšlement et les arrestations Ă  la moindre revendication ou protestation. Tout rĂ©cemment, depuis le 14 mars 2008 : quatre Ă©ditions d’Al-Maoukif, l’hebdomadaire du Parti dĂ©mocratique progressiste (PDP) ont Ă©tĂ© saisis, sans aucune explication. Les procĂšs dans le cadre de la loi anti-terrorisme se multiplient. Les nombreuses arrestations suite aux protestations populaires dans le bassin minier de Gafsa et d’autres Ă©vĂ©nements portant atteinte aux libertĂ©s. Au vu de cette situation, nous soussignĂ©s, manifestons par la prĂ©sente notre solidaritĂ© avec les composantes de la sociĂ©tĂ© civile tunisienne et appelons le gouvernement tunisien Ă  : Cesser toutes les formes de censure et de limitation de la libertĂ© d’expression et la libĂ©ration du journaliste Slim Boukhdir La rĂ©ponse aux revendications du rĂ©dacteur en chef et le directeur d’Al-Mawkif organe du parti dĂ©mocrate progressiste (PDP), Rachid KhĂ©chana et Mongi Ellouze, qui ont entamĂ© une grĂšve de la faim illimitĂ©e jusqu’Ă  la cessation des manƓuvres administratives et judicaires provoquĂ©es par le pouvoir pour Ă©touffer Al-Mawkef RĂ©pondre aux attentes et aux revendications des citoyens du bassin minier Ă  Gafsa Garantir la libertĂ© d’association, de rĂ©union, d’expression et d’opinion Mettre fin instamment aux pressions et attaques contre les dĂ©fenseurs des droits de l’homme et les militantes et militants de la sociĂ©tĂ© civile, et leur permettre de mener Ă  bien leurs activitĂ©s sans interfĂ©rence ni menace Se conformer aux dispositions de la DĂ©claration universelle des droits de l’Homme et instruments rĂ©gionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiĂ©s par la Tunisie. notamment la mise en Ɠuvre des recommandations du comitĂ© des droits de l’homme de l’ONU rĂ©uni Ă  New York en mars 2008.

 

Encore un report du procĂšs de Sameh Harakati

15 mars, 18 avril, 2 mai, le procĂšs de Sameh Harakati en appel ne s’est toujours pas ouvert. Initialement prĂ©vu pour vendredi dernier, il a Ă©tĂ© repoussĂ© au 23 mai prochain, la Cour d’Appel s’étant «aperçue » qu’un des accusĂ©s, Slim Arfaoui, n’avait pas Ă©tĂ© extrait de sa cellule pour ĂȘtre conduit au tribunal. La convocation serait parvenue Ă  la prison de Mornaguia, alors que ce dernier est maintenant incarcĂ©rĂ© Ă  Bizerte
 Pour rappel, Sameh Harakati, arrĂȘtĂ©e le 7 novembre 2006, a Ă©tĂ© condamnĂ©e Ă  onze ans d’emprisonnement dans une affaire de droit commun par le Tribunal de premiĂšre Instance et incarcĂ©rĂ©e Ă  la prison pour femmes de la Mannouba. S’estimant victime de dĂ©nonciations calomnieuses, elle a toujours clamĂ© son innocence. Elle a Ă©tĂ© battue quotidiennement Ă  la prison de la Mannouba, puis sanctionnĂ©e et privĂ©e de visites. Sameh Harakati Ă©tait mineure au moment des faits qui lui sont reprochĂ©s. Elle a maintenant vingt ans et est mariĂ©e. Elle n’a pas d’antĂ©cĂ©dents judiciaires. Luiza Toscane Se reporter aux blogs : Tunisie-harakati.mylivepage.com www.tunisie-detention.cmonsite.fr sameh.bloguez.com  

 

Voici le numĂ©ro 104 d’ELKHADRA .Bonne lecture

elkhadra@hotmail.com http://elkhadra.over-blog.com/ ***********************************************        -LA LETTRE DE L’aispp    – POETES VOS PAPIERS    – NICOLAS BEN ALI          _ LETTRE DE A. HAROUNI    _Un grand ami de la Tunisie libre    – La nĂ©buleuse    – BEN ALI SOUS LA BOTTE A SARKO…LA LIBERTE DES TUNISIENS AUSSI        – Military or Market-Driven Empire Building:    – Tunisie: Lune de miel franco-tunisienne    – Dissident tunisien Moncef Marzouki    – Haitham Sabbah, Most Famous Palestinian Blogger    – ASSABILONLINE .NET     -ELBATHA    – Des caniches Ă  vendre…    – La dĂ©mocratie plutĂŽt que Ben Ali    – Le “business” Ă©vangĂ©lique Ă  JĂ©rusalem    – Droits humains dans le monde arabe    – Droits humains dans le monde arabe    – TĂ©moins de moralitĂ© sans moralitĂ©    – Le Hamas    – FITNA RELIGIEUSE    – MĂȘme le FIGARO se pose des questions    – BAKCHICH.INFO VS SARKO/BEN ALI    – K.TRAOULI…  – Earth Hour    – AccĂšs refusĂ©    – Le prĂ©sident Sarkozy au chevet du dictateur Ben Ali    -“Saint-Empire d’Occident”


Tunisie – MĂ©dias

La liberté de la presse entre ouverture et statu quo en Tunisie

 
APA-Tunis (Tunisie) Deux responsables d’un hebdomadaire de l’opposition lĂ©gale tunisienne Rachid Khechana et Monji Ellouze, poursuivent une «grĂšve de la faim illimitĂ©e» pour dĂ©noncer les harcĂšlements dont leur journal, Al-Mawkef, fait l’objet selon eux, de la part du pouvoir, au moment oĂč la Tunisie cĂ©lĂšbre, Ă  l’instar de la communautĂ© internationale la JournĂ©e mondiale de la libertĂ© de la presse. Depuis le 14 mars dernier, quatre Ă©ditions d’Al-Mawkef, organe hebdomadaire du Parti dĂ©mocratique progressiste (PDP) ont Ă©tĂ© saisies et ses comptes en banque bloquĂ©s, sans aucune explication. En signe de protestation, des membres du personnel ainsi que des activistes du PDP ont dĂ©cidĂ© de distribuer eux-mĂȘmes le dernier numĂ©ro dans les rues de la capitale Tunis. Khechana, rĂ©dacteur en chef d’Al-Mawkef, un des trois journaux d’opposition qui subsistent en Tunisie et SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral adjoint du PDP, passera le 10 mai en justice avec Chebbi, Directeur de la publication, pour rĂ©pondre de pertes Ă  hauteur de plusieurs centaines de milliers de dollars que le journal aurait causĂ© Ă  des distributeurs d’huile alimentaire, Al-Mawkef ayant publiĂ© que leurs produits Ă©taient frelatĂ©s et demandĂ© qu’ils soient soumis Ă  des analyses. Ces sociĂ©tĂ©s rĂ©clament 500 000 dinars (274 000 Euros) de dommages et intĂ©rĂȘts. En cas de condamnation, le journal devra fermer. «La situation est intolĂ©rable, notre journal ne reçoit pas de publicitĂ©s, ne vit que de ses ventes et se retrouve aujourd’hui menacĂ© de disparition», dĂ©clarait fin avril Khechana lors d’une confĂ©rence de presse tenue au siĂšge du PDP, deux jours avant la visite de Nicolas Sarkozy en Tunisie. Khechana, 55 ans, et Ellouze, 59 ans, avaient justifiĂ© la grĂšve de la faim comme «ultime moyen de dĂ©fense», indiquant que des dirigeants du PDP, dont la SecrĂ©taire gĂ©nĂ©rale Maya Jeribi, avaient tentĂ© de vendre le journal Ă  la criĂ©e dans le rues de Tunis pour protester contre «la censure dĂ©guisĂ©e». L’Union Nationale des Journalistes Tunisiens, constituĂ©e en janvier dernier, vient de publier un manuel de formation et un guide de rĂ©fĂ©rence sur les questions liĂ©es aux « reportages sur les Droits de l’Homme ». Ce manuel, qui attendait d’ĂȘtre publiĂ© depuis 2006, n’avait reçu son autorisation de publication que le mois dernier, lorsque le gouvernement avait levĂ© l’interdiction qui frappait de nombreux ouvrages en Tunisie. «Le Code de la presse comprend entre 40 et 50 chapitres restrictifs», a dĂ©clarĂ© Ă  APA samedi un journaliste tunisien qui pense que la Tunisie devrait plutĂŽt «crĂ©er une charte nationale des mĂ©dias qui rassemble toutes les parties ». Le 3 avril dernier, une cour d’appel de Tunis a confirmĂ© la condamnation Ă  un an de prison du journaliste Slim Boukhdhir. Boukhdhir, qui travaille pour le quotidien londonien Al-Quds Al-Arabi et pour la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision Al-Arabiya, a Ă©tĂ© initialement condamnĂ© Ă  de la prison en dĂ©cembre 2007 pour «comportement insultant envers un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions » aprĂšs une altercation avec un policier qui le suivait. Certains ont rapportĂ© que le procĂšs de Boukhdhir Ă©tait «une vraie farce, le juge n’accordant aucune attention aux avocats de la dĂ©fense». Le prĂ©sident tunisien avait dĂ©clarĂ© vendredi que l’Etat s’est employĂ© Ă  «dĂ©velopper ce secteur (de la presse) Ă  la faveur des multiples dĂ©cisions et mesures qui ont touchĂ© ses diffĂ©rents aspects juridique, rĂ©glementaire et politique ». Le prĂ©sident Ben Ali estime que ceci « a permis d’enrichir le paysage mĂ©diatique en Tunisie, de consolider ses potentialitĂ©s humaines et techniques, et de le doter de tous les moyens Ă  mĂȘme de promouvoir son rĂŽle dans l’enracinement des fondements de la dĂ©mocratie, l’approfondissement de l’esprit de dialogue et de consensus, et dans le soutien de notre processus de dĂ©veloppement ». Les propos du prĂ©sident français Nicolas Sarkozy affirmant que «l’espace des libertĂ©s progresse » en Tunisie ont suscitĂ© un tollĂ© chez les dĂ©fenseurs des droits de l’Homme en France et en Tunisie. «Si des garanties ont Ă©tĂ© donnĂ©es Ă  monsieur Sarkozy pour que les libertĂ©s progressent, tant mieux ! C’est notre demande », s’est Ă©tonnĂ© Mokhtar Trifi, prĂ©sident de la Ligue tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH). «Malheureusement, sur le terrain, nous n’avons pas remarquĂ© de progrĂšs notables, c’est peut-ĂȘtre mĂȘme le contraire qui se passe en rĂ©alitĂ© aujourd’hui », a-t-il ajoutĂ©.   TM/aft/mn/APA 04-05-2008
 
(Source: L’  Agence de Presse Africaine APA le 04 mai 2006)  


 

Monsieur Philippe Léglise, Un grand ami de la Tunisie libre

M. Philippe LĂ©glise est un grand ami de la Tunisie libre, qui a ouvert les colonnes du ProgrĂšs de Lyon aux opposants tunisiens dĂšs 1991, et il s’est toujours tenu Ă  nos cĂŽtĂ©s pour briser le mur de silence Ă©rigĂ© par les mĂ©dias français qui ne voulaient pas Ă  cette Ă©poque entendre parler de l’opposition Ă  Ben Ali autrement qu’en termes de mĂ©chants « nahdaouis » ou d’anciens ministres en disgrĂące. Cette pĂ©riode est rĂ©volue, mais le souvenir ne doit pas ĂȘtre pour autant effacĂ©. Il y a quelques jours, j’ai envoyĂ© Ă  M. LĂ©glise le texte publiĂ© par Amnesty International : « Triste continuitĂ© de la politique française en Tunisie » critiquant les propos de M. Sarkozy tenus lors de sa derniĂšre visite en Tunisie. Sa rĂ©action n’a pas tardĂ©, en m’envoyant ce message oĂč il exprime sa colĂšre contre les propos du prĂ©sident français et oĂč il prĂ©sente au peuple tunisien les excuses du peuple français. Je lui ai rĂ©pondu en lui expliquant qu’il n’est pas responsable des propos de son prĂ©sident, mais dans sa rĂ©ponse il m’a expliquĂ© : «  je ne suis pas fondamentalement d’accord avec vous lorsque vous dites que les paroles de Sarkozy ne sauraient engager le peuple français. En droit français, le prĂ©sident de la rĂ©publique, quand il est Ă©lu, parle au nom de la France. C’est Ă  dire… de moi aussi. Et quand il dit de telles inĂ©pties, je me sens obligĂ© de m’en excuser auprĂšs des gens que je sais blĂ©ssĂ©s. » Tel est Monsieur Philippe LĂ©glise, un homme juste, tout d’une piĂšce. Il mĂ©rite notre admiration et notre considĂ©ration. Tous ceux parmi mes compatriotes qui souhaiteraient lui Ă©crire peuvent le faire Ă  cette adresse : pleglise@lejsl.fr Voici son premier message suivi de ma rĂ©ponse. Abdelaziz Agoubi

M. Philippe Léglise à M. Abdelaziz Agoubi

Subject: Triste continuitĂ© de la politique française en Tunisie Date: Wed, 30 Apr 2008 20:45:05 +0200 Mon cher Abdelaziz Depuis hier, je voulais vous envoyer un mail. Je suis consternĂ© par les propos de Sarkozy. Mais je ne suis pas surpris. A Dakar, l”an dernier, dans un discours, il avait dĂ©jĂ  montrĂ© son vrai visage par un discours colonialiste, mĂ©prisant et quasiment raciste envers les noirs. Cette fois-ci, ce sont les Tunisiens qui font les frais de sa politique etrangĂšre. C’est lamentable. D’abord sur le fond, puisque la France entiĂšre sait bien, depuis un moment, que la dictature tunisienne est l’une des plus fĂ©roces du bassin mĂ©diterranĂ©en. Si Sarkozy ne le sait pas, c’est qu’il ne veut pas le savoir. Alors on aurait pĂ» (peut-ĂȘtre) comprendre – mais sans l’admettre – qu’il choisisse de se taire sur la question des Droits de l’Homme, pendant ses quelques jours en Tunisie. Au lieu de ça, il fat pire Presque monstrueux. Ildonne doublement quitus Ă  Ben Ali et Ă  sa clique. D’abord en dĂ©clarant que l’espace de libertĂ©s progresse. Ce qui est un mensonge Ă©hontĂ© et  une perversion de l’esprit. Ensuite en signant des contrats dont on sait trĂšs bien que ce ne sont pas des contrats avec la Tunisie , mais avec les familles qui gravitent autour de Ben Ali.On est Ă  la limite de la pratique du grand banditisme et de la mafia. C’est rĂ©voltant. Alors, mĂȘme si je n’ai aucune lĂ©gitimitĂ© pour le faire, je vous prĂ©sente, Ă  vous et au peuple tunisien opprimĂ©, les  excuses de tous les Français qui ont trouvĂ© Sarkozy effrayant. Et je resterai Ă  vos cĂŽtĂ©s pour d’autres combats, comme ceux que nous avons menĂ©s ensemble depuis 1991. AmitiĂ© Philippe LĂ©glise, journaliste pleglise@lejsl.fr

M. A. Agoubi à M. Philippe Léglise

Cher Philippe, Permettez-moi cher ami de vous remercier du fond du coeur pour ce nouveau tĂ©moignage de sympathie avec le peuple tunisien qui souffre depuis des dĂ©cades sous un rĂ©gime qui n’a plus rien Ă  voir avec la politique au sens primaire du mot, mais comme vous l’avez bien dĂ©crit vous-mĂȘme : « On est Ă  la limite de la pratique du grand banditisme et de la mafia », une « dictature des plus fĂ©roces du bassin mĂ©diterranĂ©en ». Vous ĂȘtes bien placĂ© pour dire cette vĂ©ritĂ© que l’on oublie souvent de rappeler et de dire tout haut, y compris au sein d’une certaine opposition peu sensible au sort des hommes et des femmes qui souffrent dans leur chair depuis que cette malĂ©diction a frappĂ© notre peuple un certain 7 novembre 1987 avec ses morts, ses bagnards d’un autre Ăąge, et toute une population humiliĂ©e et terrorisĂ©e par une flicaille qui a fait de la torture et de la violence physique et morale contre tout un peuple la colonne vertĂ©brale de tout un rĂ©gime et l’arme privilĂ©giĂ©e dans la protection de la maffia prĂ©sidentielle. Vous ĂȘtes, dis-je, bien placĂ© pour le dire, vous qui nous avez soutenu la cause tunisienne depuis 1991 quand la terreur sĂ©vissait – et qui sĂ©vit encore de nos jours – dans les rues et les maisons des citoyens innocents Ă  Tunis et ailleurs, dans les villes et les campagnes arrachant hommes et femmes de leurs lits pour les violer et les torturer, sans espoir de sortir d’un trou noir dans lequel ils ont basculĂ© parce que leur nom s’est trouvĂ© par hasard sur un carnet d’adresses d’un suspect ou arrachĂ© sous la torture, ou glanĂ© dans une conversation tĂ©lĂ©phonique. Vous vous ĂȘtes rĂ©voltĂ© contre cet innomable et vous nous avez ouvert les colonnes du ProgrĂšs de Lyon pour que la voix de l’opprimĂ© puisse sourdre de dessous une chappe de silence imposĂ©e avec la complicitĂ© d’un Occident aveuglĂ© par la propagande de Carthage, et dont certains de ses dirigeants ou reprĂ©sentants sont oublieux des valeurs sacrĂ©es attachĂ©es Ă  la personne humaine pour lesquelles la France rĂ©sistante a pourtant payĂ© le prix du sang pour dire non Ă  la barbarie. Cher ami, les paroles blessantes de Sarkozy ne sauraient engager le peuple français qui a toujours Ă©tĂ© aux cĂŽtĂ©s des causes justes et dont vous ĂȘtes un des reprĂ©sentants les plus sincĂšres; elles n’engagent qu’une minoritĂ© d’affairistes et de nostalgiques de la coloniale. Ne vous excusez pas pour un acte qui viole tout d’abord la conscience et les sentiments profonds du peuple français tout entier. Notre crainte et notre obsession aujourd’hui, comme hier, c’est la perpĂ©tuation de la torture dans notre pays, une politique et un flĂ©au qui continuent Ă  humilier et Ă  briser tout un peuple. C’est un crime contre l’humanitĂ© qui est une grande hypothĂšque pour tout combat pour notre dignitĂ©, et pour tout projet d’Ă©mancipation et de libĂ©ration. La torture continue Ă  ĂȘtre pratiquĂ©e dans tous les centres de police, dans des villas banalisĂ©es et en premier lieu dans les bureaux mĂȘmes du MinistĂšre de l’IntĂ©rieur oĂč siĂšge le Ministre de l’IntĂ©rieur lui-mĂȘme. La Cour europĂ©enne vient de le reconnaĂźtre officiellement en accusant la Tunisie dans son jugement du 28 fĂ©vrier dernier de pratique « grave » de la torture, sans que malheureusement les milieux de l’opposition tunisienne n’aient jugĂ© bon de prendre bonne note de ce grand Ă©vĂ©nement qui dĂ©passe mĂȘme le cadre tunisien. Disons-le tout haut : l’urgence en Tunisie c’est l’Ă©radication de la torture, et il n’y a pas d’autre urgence, et il n’y a pas d’autre prioritĂ©. C’est notre vrai combat contre la maffia de Carthage, et notre vrai combat pour la libĂ©ration de la Tunisie. Merci du fond du coeur pour votre engagement Ă  nos cĂŽtĂ©s, et nous comptons bien, cher ami, comme nous l’avons fait depuis toujours, sur vous pour dire Ă  Sarkozy que ce n’est pas une MĂ©diterranĂ©e des dictateurs, de la police et de la torture que nous voulons, mais une MĂ©ditarranĂ©e fraternelle qui est dĂ©jĂ  en construction Ă  travers nos luttes communes pour un monde solidaire et humain. Je vous demanderais de bien vouloir me permettre de faire partager votre message de sympathie avec mes compatriotes tunisiens pour leur rappeler que la vraie France est toujours Ă  leur cĂŽtĂ©. Recevez, Cher Philippe, mes salutations les plus cordiales, Abdelaziz Agoubi Villefranche-Sur-SaĂŽne, le 1er Mai 2008


LE PAYSAGE MEDIATIQUE EN TUNISIE

 

  Le point de vue de Hichem Skik

Si on examine le paysage médiatique dans notre pays du point de vue quantitatif, on constate indubitablement une augmentation continue du nombre de media et une diversification de leur statut juridique : de nouveaux journaux paraissent, de nouvelles  stations de radio,  des chaßnes de télévision sont créées ; ces media sont publics ou privés, nationaux ou régionaux, généralistes ou thématiques etc.

 Mais, bizarrement, malgrĂ© cette multiplicitĂ© numĂ©rique et cette diversitĂ© juridique  le citoyen a la nette impression – Ă  quelques rares exceptions prĂšs, sur lesquelles je reviendrai – que le paysage mĂ©diatique est restĂ© immuable depuis plusieurs dĂ©cennies.

C’est que cette  diversitĂ© de statut est plus juridique que pratique, plus apparente que rĂ©elle. En effet :

·         les organes officiels, gouvernementaux et officieux ont certes connu des changements importants sur les plans technique, formel etc. Mais ils n’ont pratiquement rien changĂ© Ă  leur tonalitĂ©, Ă  leur discours politique .Toujours la mĂȘme prĂ©sentation idyllique de notre rĂ©alitĂ© ( il ne s’y passe que des choses positives : pas ou presque d’inondations ni de tornades ni de tremblements de terre ni d’attentats terroristes ni de rĂ©volte populaire dans le bassin minier de Gafsa
 grĂące Ă  la politique clairvoyante et Ă   la vision futuriste de nos responsables,comme en tĂ©moignent nos rĂ©alisations avant-gardistes ; le peuple est solidement resserrĂ©, dans une unitĂ© sans faille, autour de sa sage direction, le monde entier, lui aussi unanime, n’a d’autre prĂ©occupation que de faire l’éloge de notre rĂ©ussite sur tous les plans : les seules voix discordantes sont le fait d’extrĂ©mistes de mauvaise foi et de  nostalgiques de la pĂ©riode coloniale, jaloux de nos rĂ©ussites) .Toujours la mĂȘme monopolisation de toutes ces tribunes par le pouvoir et le parti au pouvoir, agissant, depuis plus de cinquante ans, comme un rĂ©gime de  parti unique, en se souvenant parfois qu’une dose de pluralitĂ© ferait bonne impression et donnant alors la parole Ă  d’autres voix, mais
 des voix qui  ressemblent comme deux gouttes d’eau Ă  la voix officielle.

·         les « privĂ©s » auxquels on attribue des autorisations ne sont pas n’importe qui : alors que plusieurs demandes de radios et de tĂ©lĂ©s privĂ©es ont Ă©tĂ© dĂ©posĂ©es depuis longtemps, les heureux bĂ©nĂ©ficiaires d’autorisations ont tous Ă©tĂ© soigneusement triĂ©s sur le volet : des « gens de confiance » dont on est sĂ»r que, non seulement ils respecteront les « lignes rouges »- qu’on leur dicte ou , le plus souvent qu’ils s’imposent  et qu’ils imposent vigoureusement Ă  leurs journalistes- mais qu’ils sauront aussi  se rendre utiles  en se faisant les thurifĂ©raires de la  politique officielle, avec la mĂȘme vision unilatĂ©rale, la mĂȘme langue de bois, les mĂȘmes tics, car puisant Ă  la mĂȘme source : l’Agence de presse censĂ©e ĂȘtre nationale, mais qui est, en fait, officielle
 comme tout le reste.

Par cet aspect, la plupart des media, anciens ou nouveaux, se ressemblent Ă©trangement, au point que, comme l’a relevĂ© le chef de l’Etat lui-mĂȘme  il y a dĂ©jĂ  plusieurs annĂ©es, et cela n’a guĂšre changĂ© depuis ! – on a souvent l’impression d’avoir affaire au mĂȘme journal, Ă  la mĂȘme station, Ă  la mĂȘme chaĂźne.

·         Faute de pouvoir montrer leur originalitĂ© sur le plan de la politique intĂ©rieure et pour attirer des lecteurs ou des auditeurs- et, surtout, de la publicitĂ©, une vĂ©ritable manne, objet d’une concurrence acharnĂ©e entre  eux-  la plupart de ces media se rabattent sur des thĂšmes moins dĂ©rangeants(pour le pouvoir,bien sĂ»r) et au succĂšs garanti : sport Ă  gogo, faits divers plus croustillants les uns que les autres
et politique internationale, rĂ©duite presque exclusivement aux conflits de Palestine, d’Irak et d’Afghanistan, eux-mĂȘmes traitĂ©s sur le mode Ă©motionnel, jouant sur les sentiments, exacerbant les ressentiments, favorisant dans le public- et particuliĂšrement chez les jeunes- le passionnel, l’irrationnel, l’extrĂ©misme.

Mais mĂȘme par cet aspect, ces media ne se distinguent que trĂšs peu les uns des autres : ils tirent Ă  qui mieux mieux sur les mĂȘmes ficelles, cherchent Ă  racoler les mĂȘmes publics et (surtout !) se livrent la mĂȘme concurrence effrĂ©nĂ©e pour la mĂȘme publicitĂ©, qui occupe chez eux le mĂȘme espace, de plus en plus considĂ©rable.

On conçoit, dÚs lors, que les Tunisiens se tournent  de plus en plus souvent vers des médias étrangers, principalement des chaßnes satellitaires qui adoptent un ton plus libre, moins stéréotypé, et donc plus persuasif et proposent les unes une information plus objective  ou plus « engagée » dans le sens souhaité par la majorité du public, les autres des variétés considérées comme plus vivantes, moins artificielles que celles des media officiels.

L’attrait exercĂ© par ce type de media ne va, cependant, pas sans « risque » , car il y a, dans tout cela, Ă  boire et Ă  manger : des programmes divertissants et des programmes abĂȘtissants, des programmes d’information et des programmes de manipulation, des programmes Ă©largissant les horizons et des programmes favorisant le dogmatisme, des programmes prĂŽnant l’ouverture , la comprĂ©hension  et le dialogue et des programmes faisant la promotion du repli, de l’intolĂ©rance et de la violence.

Face Ă  ce dernier danger, on a cru intelligent de les combattre avec les mĂȘmes armes .On a, ainsi, lancĂ© une station radio dont les programmes, exclusivement religieux, sont destinĂ©s Ă  promouvoir une conception modĂ©rĂ©e de l’islam. L’expĂ©rience est trop rĂ©cente pour en Ă©valuer les effets, mais d’aprĂšs mes observations, cette station ne concurrence, pour l’instant, que les radios nationale et rĂ©gionales, ainsi qu’une radio « privĂ©e » qui Ă©tait Ă©coutĂ©e surtout par les jeunes
et les taximen : bien mince rĂ©sultat ! Sans parler du risque de conforter, non pas le sentiment religieux -qui n’a, apparemment, besoin de l’aide de personne pour bien se porter- mais une forme de religiositĂ© austĂšre, rigoriste,bigote, hostile aux divertissements, Ă  la musique etc. : lĂ , cela serait carrĂ©ment se tirer une balle dans le pied !

Heureusement pour nous, dans le paysage mĂ©diatique, tout n’est pas  morose, voire dĂ©primant, il y a quelques Ăźlots moins sombres,  qui donnent des raisons d ‘espĂ©rer :

   -Il y a des media privĂ©s- des journaux, mais aussi, dans une certaine mesure, une chaĂźne de tĂ©lĂ©vision- qui dĂ©ploient des efforts pour faire leur travail en obĂ©issant Ă  des impĂ©ratifs essentiellement professionnels .Mais leur tĂąche est rude, les tentations trop grandes et les pressions trop fortes : il est si facile, s’ils dĂ©plaisent, de leur mettre des bĂątons dans les roues ! Les moyens sont nombreux, le plus efficace Ă©tant sans doute la fameuse publicitĂ©, qui peut se tarir brusquement


   -Il y a les media des partis d’opposition–en fait des journaux papier- . Les trois hebdomadaires -Mouatinoun, Al Mawqef et Attariq Al Jadid- constituent une rĂ©elle exception dans le paysage mĂ©diatique, du point de vue de la marge d’autonomie dont ils bĂ©nĂ©ficient (ou qu’ils se donnent) par rapport aux autres media. Cette marge s’est rĂ©cemment accrue par la suppression du dĂ©pĂŽt lĂ©gal – en fait une censure prĂ©alable. Leur existence, leur libertĂ© (relative !) de ton, la rĂ©gularitĂ© (relative aussi !) de leur parution laissent espĂ©rer qu’ils pourront contribuer Ă  crĂ©er une vĂ©ritable opinion publique dans notre pays, susceptible d’imposer le respect effectif du pluralisme en gĂ©nĂ©ral et plus particuliĂšrement dans l’information, pour qu’elle puisse jouer son rĂŽle de « contre-pouvoir ».                                                                                                             HĂ©las ! LĂ  aussi, le chemin est semĂ© d’embĂ»ches, et la vie de ces journaux est loin d’ĂȘtre un long fleuve tranquille ! Les subventions lĂ©gales et la publicité  d’Etat ne sont pas accordĂ©es Ă  tous. Responsables et rĂ©dacteurs sont toujours sous  tension, se demandant –faute d’information officielle- ce qui est « publiable » et ce qui ne l’est pas
MalgrĂ© cela,on n’est jamais Ă  l’abri de diffĂ©rentes sortes de « tracasseries » : elles viennent d’atteindre un degrĂ© de gravitĂ© intolĂ©rable pour l’un de ces trois journaux, Al Mawqef, qui subit ces derniĂšres semaine un vĂ©ritable harcĂšlement au niveau de sa distribution, ce qui risque de mettre en danger l’existence mĂȘme de notre confrĂšre et rĂ©duirait gravement l’espace de pluralisme.

          Un autre motif d’espoir est constituĂ© par les journalistes qui sont de plus en plus nombreux Ă  s’élever contre les conditions qui leur sont faites, notamment dans les media officiels et officieux. Et ils ne dĂ©noncent pas seulement leur situation matĂ©rielle et leurs conditions de travail : ils s’élĂšvent dĂ©sormais, et ouvertement, contre la censure dont ils font l’objet et « les ordres venus d’en haut » qu’on oppose Ă  leurs protestations.

            Quand on sait la toute puissance des directions des media officiels, directement sous les ordres du gouvernement, et la bienveillance dont bĂ©nĂ©ficient les patrons de presse lorsqu’il s’agit de « tenir » leurs journalistes, on ne peut que rendre hommage au courage de ces journalistes qui se lĂšvent pour dĂ©fendre leur dignitĂ© et celle de leur beau mĂ©tier.   

            Cette prise de conscience des journalistes et, surtout, leur volontĂ© de dĂ©fendre eux-mĂȘmes leurs droits matĂ©riels et moraux vient de se concrĂ©tiser par la crĂ©ation d’un syndicat des journalistes autonome, dĂ©barrassĂ© de toute tutelle: pour moi, c’est lĂ  le principal motif pour espĂ©rer que notre pays connaisse enfin une information indĂ©pendante, objective et, surtout, plurielle.

          Pour terminer, je citerai ce formidable moyen de communication qu’est internet, créé pour assurer une communication planĂ©taire, sans entrave de temps, d’espace ou de censure. Quand on sait les difficultĂ©s que connaissent les internautes dans notre pays et la vĂ©ritable tutelle qu’exercent sur nous les AutoritĂ©s pour dĂ©cider des sites qui nous conviennent et de ceux qui ne nous conviennent pas, on peut s’étonner que je classe internet parmi les motifs d’espoir. En fait, je pense surtout Ă  l’intelligence que dĂ©ploient nos compatriotes pour rĂ©ussir Ă  contourner tous ces obstacles, notamment Ă  travers les blogs, qui constituent dĂ©sormais un espace de libertĂ© auquel ont recours des jeunes -et aussi des moins jeunes, je l’avoue- de plus en plus nombreux.

     Hichem Skik

(Source L’Expression ( Hebdomadaire – Tunisie) du 02 au 08 mai 2008)


 

PLAIDOYER POUR UNE « SCHIZO-ANALYSE » COLLECTIVE

H. BARDI

« La mort naturelle de l’Esprit d’un peuple peut se manifester par la nullitĂ© politique »

Hegel, La raison dans l’Histoire, 10/18, p. 90-91.

« Si, dans un mĂȘme Sujet, deux actions contraires sont provoquĂ©es, il devra se faire un changement nĂ©cessairement, soit dans l’une et l’autre, soit dans une seule, jusqu’à ce qu’elles cessent d’ĂȘtre contraires »

Spinoza, L’éthique, Folio, p. 354.

Ce papier Ă©crit Ă  la hĂąte et qui se voudrait succinct ne vise nullement Ă  passer au crible tout le verbiage, fourni s’il en fĂ»t (on y tire Ă  boulets puantes dans tous les sens), de l’ami Hamadi, mais de rĂ©agir sereinement et de « maniĂšre constructive » —comme aimaient Ă  le rĂ©pĂ©ter mes vieux camarades— Ă  certaines questions dont il faut tout de mĂȘme lui reconnaĂźtre le mĂ©rite de les avoir effleurĂ©es…

Je retiendrai essentiellement deux idĂ©es qui me paraissent dignes d’intĂ©rĂȘt dans le flot langagier dĂ©versĂ© par Hamadi, sur pratiquement tout le monde, durant le mois d’avril. La premiĂšre porte sur la critique du stalinisme persistant chez une certaine gauche tunisienne qui se dit radicale, et la deuxiĂšme concerne l’actualitĂ© indĂ©niable de la « question sociale » en Tunisie.

D’aucuns pourraient protester de l’impertinence d’une niĂšme rĂ©ouverture du « dossier stalinien », dont l’Histoire (avec un grand « h ») s’est, depuis fort longtemps, chargĂ©e d’en sceller dĂ©finitivement le sort. Combat d’arriĂšre-garde, superfĂ©tatoire et inutile renchĂ©rissent ceux, tournĂ©s vers l’avenir, pour qui l’affaire est close et la messe bel et bien dite.

Nous n’en pensons pas moins, Ă  dire vrai. Mais il est parfois des clous rouillĂ©s (parsemĂ©s dans notre pauvre demeure qui menace de s’effondrer) qui aiment Ă  s’attirer, Ă  intervalle quasi-rĂ©gulier, les coups du marteau salvateur (celui de Nietzsche, si vous voyez ce que je veux dire). Si nous avons dĂ©cidĂ© d’en assĂ©ner celui-ci, c’est que Hamadi a fait montre de frilositĂ©, de partialitĂ© et de manque flagrant d’objectivitĂ© (on n’ira pas jusqu’à dire qu’il a frĂŽlĂ© la malhonnĂȘtetĂ© intellectuelle). D’oĂč, d’ailleurs, son Ă©chec Ă  atteindre la cible… pourtant statique ! Et comme celui qui « arrose » mal s’expose, par la force des choses, Ă  ce qu’il soit arrosĂ© Ă  son tour, nous nous donnerons Ă  cƓur joie de lui diriger ce « jet »…

Dans le premier texte (commis par « H » en rĂ©ponse Ă  un article dithyrambique sur Staline, propagĂ© par le journal en ligne Al Badil : « Staline ou « les socialisme des imbĂ©ciles » ») qui avait pour point de dĂ©part (mais seulement pour point de dĂ©part, car rapidement l’auteur Ă©gare sa boussole —si tant est qu’il en avait une !— et nous inflige un indigeste marathon labyrinthique) l’idĂ©e « juste » consistant Ă  vilipender le stalinisme Ă  la tunisienne qui s’obstine encore, non sans une particuliĂšre bĂȘtise anhistorique, Ă  nier avec une malhonnĂȘtetĂ© sidĂ©rante les crimes monstrueux commis par la dictature bureaucratique stalinienne Ă  l’encontre de millions d’hommes, de femmes et d’enfants, sacrifiĂ©s sur l’autel nausĂ©abond du « capitalisme bureaucratique d’Etat » ; cette « gauche » amnĂ©sique qui s’agrippe effrontĂ©ment, sans rougir le moins du monde, au plus grand mensonge de l’histoire de l’humanitĂ©, qui a rĂ©duit le « socialisme » Ă  une construction d’usines (l’industrialisation), relĂ©guant ainsi au magasin des accessoires futiles l’essence mĂȘme de ce que devait ĂȘtre l’idĂ©al socialiste, Ă  savoir : rĂ©volutionner les rapports humains en vue de les asseoir sur le respect de la dignitĂ© irrĂ©ductible de chacun, abolir l’exploitation de l’homme par l’homme (et non pas substituer l’exploitation bourgeoise et koulak par l’exploitation bureaucratique), et instaurer la dĂ©mocratie ouvriĂšre… au-dedans comme en dehors des partis politiques (et non pas seulement du PCUS !)

Cet idĂ©al a Ă©tĂ© foulĂ© aux pieds des TchĂ©kistes et autres GuĂ©pĂ©ou —à la solde des Staline, Zinoviev, Kamenev, Boukharine… (Avant que ces derniers ne soient, Ă  leur tour, broyĂ©s par la machine infernale stalinienne) — qui semaient la terreur d’un bout Ă  l’autre de l’URSS, emprisonnant par centaines de milliers, sous les mĂȘmes toits pĂ©nitentiaires et Ă  l’intĂ©rieur des mĂȘmes camps de concentration, les opposants de tous bords : mencheviques, socialistes rĂ©volutionnaires, sociaux-dĂ©mocrates, communistes, socialistes, anarchistes, religieux, etc. ; qu’on qualifiaient de « contre-rĂ©volutionnaires », de « saboteurs », de « petits-bourgeois », et j’en passe…

L’ami Hamadi ne va donc pas Ă  l’essentiel dans sa critique des « survivances staliniennes » chez les nostalgiques tunisiens du « soviĂ©tisme ». Il ne dĂ©veloppe guĂšre une critique radicale de l’horreur dictatoriale bolchevique. Celle-ci n’étant en fait que l’aboutissement d’une politique bureaucratique anti-prolĂ©tarienne, originairement conçue et mise sur pied par LĂ©nine lui-mĂȘme, soutenu par Trotski (qui avait dĂ©sormais pris l’habitude, depuis son ralliement au bolchevisme ambiant, de s’aligner aveuglement sur les positions du maĂźtre Vladimir Illich…). N’est-ce pas ce duo (et notamment l’exĂ©cutant, « le camarade » Trotski qui se trouvait alors Ă  la tĂȘte de l’armĂ©e rouge) qui, en 1921, a rĂ©primĂ© dans un bain de sang la rĂ©volte des marins de Kronstadt ? : Plus de dix milles en ont Ă©tĂ© froidement fusillĂ©s ! Ceux qui ont rĂ©ussi Ă  s’enfuir en Finlande ont reçu l’assurance d’ĂȘtre amnistiĂ©s Ă  leur retour en Russie. Ils furent eux aussi fusillĂ©s !

Il n’est pas dans notre intention ici d’évoquer toutes les horreurs perpĂ©trĂ©es au nom du « communisme » (qu’il soit dit « de guerre » ou autre), de la nouvelle politique Ă©conomie (NEP), du plan quinquennal, ou de nous appesantir sur les  sombres chapitres de Brest-Litovsk, des Goulags, et autres « procĂšs iniques » orchestrĂ©s par la dictature stalinienne, etc., mais seulement de rappeler modestement quelques vĂ©ritĂ©s historiques aussi Ă©lĂ©mentaires qu’évidentes pour celui qui accepte/veut/n’a pas peur de regarder la rĂ©alitĂ© en face ; la rĂ©alitĂ© non-Ă©triquĂ©e et dans toute sa complexitĂ©… hĂ©las souvent dĂ©plaisante, et dont les bornes ne peuvent ĂȘtre arbitrairement dĂ©limitĂ©es par l’évocation, teintĂ©e de « religiositĂ© profane », d’un LĂ©nine, encore moins un Trotski…

L’ami Hamadi a donc occultĂ©, sans en donner l’air, la complicitĂ© passive de Trotski qui s’est longtemps refusĂ© Ă  voir dans le pouvoir instaurĂ© au lendemain de la rĂ©volution d’octobre, une dictature bureaucratique sanguinaire qui s’est imposĂ©e au dessus (et par-dessus) des/les travailleurs par la terreur aussi gĂ©nĂ©ralisĂ©e qu’impitoyable. Cette complicitĂ© s’origine dans le dĂ©dain, qui ne s’est jamais dĂ©menti, manifestĂ© par l’auteur de « La rĂ©volution trahie » [livre dans lequel, faut-il le rappeler, Trotski considĂšre que le pouvoir alors en place est fort bien « un pouvoir ouvrier », et que les mĂ©thodes rĂ©pressives, sanguinaires et dictatoriales employĂ©es par la clique stalinienne dĂšs avant le plan quinquennal, sont « des mĂ©thodes socialistes qui ont fait leurs preuves » !!] Ă  l’égard de la classe ouvriĂšre et —surtout— de la paysannerie russe dĂ©pouillĂ©e jusqu’à l’os…

FidĂšle, en effet, jusqu’au bout des ongles au dogmatisme lĂ©niniste fait, entre autres aberrations, du systĂšme de parti unique « guide du prolĂ©tariat » et son « rĂ©dempteur », il postule avec morgue l’incapacitĂ© rĂ©dhibitoire des travailleurs Ă  s’auto-organiser et pose comme vĂ©ritĂ© « officielle absolue » leur impuissance Ă  participer librement aux affaires de l’Etat, lesquelles doivent par consĂ©quent rester Ă  jamais le domaine rĂ©servĂ© du ComitĂ© central… LĂ  rĂ©side le point commun (fondamental) entre LĂ©nine, Staline et Trotski. Les Ă©vĂšnements (et les Ă©crits post-octobre de Trotski) confirment sans l’ombre d’un doute son approbation de principe de « l’industrialisation poussĂ©e et rapide » mĂȘme au prix de l’esclavage de masses. Tant que Staline applique la politique prĂŽnĂ©e naguĂšre par « l’opposition » —disait en substance l’ancien pourfendeur du « socialisme dans un seul Etat »—, et mĂȘme s’il va « un peu trop loin » dans l’inhumaine exploitation en particulier de la paysannerie, l’on ne peut qu’approuver dans sa globalitĂ© une pareille politique, tout en « critiquant » (pour se donner bonne conscience) quelques unes de ses « dĂ©viations »…. Trotski, n’en dĂ©plaise Ă  ses fervents adorateurs, n’est au fond que le thĂ©oricien, non pas seulement d’une politique autoritariste, mais de tout un rĂ©gime dont Staline a Ă©tĂ© le fidĂšle rĂ©alisateur ! (A. Ciliga, Au pays du mensonge dĂ©concertant, 10/18).

Ceci Ă©tant dit, revenons Ă  prĂ©sent Ă  nos staliniens qui, certes ne sont —fort heureusement— guĂšre nombreux, mais leur simple persistance en marge de la scĂšne politique locale (et seulement locale) en ce dĂ©but de XXIĂšme siĂšcle n’est pas dĂ©pourvue de signification.

Ce qui est frappant dans l’attitude des staliniens tunisiens a trait Ă  ce que la psychanalyse qualifie de « refus du principe de rĂ©alité ». En effet, par crainte d’accomplir un travail de deuil (par dĂ©finition pĂ©nible et douloureux) idĂ©ologique, politique et historique (voire mĂȘme philosophique), ils refusent de prendre au sĂ©rieux les rĂ©vĂ©lations atroces faites par les contemporains des rĂ©volutionnaires russes, et encore moins celles rendues publiques par les quelques rescapĂ©s des Goulags, sans parler des nombreux tĂ©moignages authentiques d’intellectuels sincĂšres déçus de ce qu’ils ont pu dĂ©couvrir de visu, et non par ouie dire, dans le pays « des soviets ». Quand ils n’écartent pas cette littĂ©rature, aujourd’hui abondante et accessible, d’un revers de main dĂ©daigneux n’y voyant qu’« une habituelle propagande impĂ©rialiste, anti-socialiste, etc. », les inconditionnels du PĂšre/dictateur vous rĂ©torquent qu’il n’y avait guĂšre de choix, dans un contexte de guerre civile, d’agression Ă©trangĂšre (les armĂ©es blanches), et de sous dĂ©veloppement. Lorsque vous leur rappelez que l’exploitation et l’oppression, tout autant que la stratification « catĂ©gorielle » (sic) de la sociĂ©tĂ© du temps de Staline (mais pas que du temps du « PĂšre fouettard » !) n’avaient rien Ă  envier Ă  celles de la Russie tsariste, et qu’elle Ă©tait davantage encore plus inhumaine que celles des rĂ©gimes capitalistes (oĂč il est au moins permis de faire grĂšve, d’avoir des syndicats, des partis politiques, des associations, et de protester…). Il vous rĂ©pondent Ă  l’unisson : c’est le prix Ă  payer pour la construction du « socialisme », « on ne fait pas d’omelettes sans casser des Ɠufs »… Foutaises ! Nous leur rĂ©pliquons (aprĂšs C. Castoriadis, C. Lefort et E. Morin) que ce n’est nullement le socialisme qui Ă©tait Ă  l’Ɠuvre en URSS, mais la pire des barbaries… car perpĂ©trĂ©e au nom des nobles idĂ©aux progressistes, Ă©galitaires et humanitaires…

Ce qui est encore dĂ©routant chez les « stal-tun » c’est que leur amnĂ©sie volontaire se trouve doublĂ©e d’une schizophrĂ©nie (psychose, comme tout un chacun le sait, incurable !) particuliĂšrement avancĂ©e. Que dire, en effet, de ces gauchistes qui, tout en s’agrippant aussi discrĂštement qu’ils peuvent (la honte n’est pas loin !) Ă  la faucille et au marteau staliniens (le premier pour « cueillir » les tĂȘtes qui pensent mal le deuxiĂšme sert Ă  les Ă©craser), luttent actuellement avec, je pense, une sincĂ©ritĂ© qui n’est pas feinte, pour les libertĂ©s politiques, le pluralisme, la tolĂ©rance, la dĂ©mocratie et les droits de l’homme ! Le cerveau —le leur— se trouve pour ainsi dire scindĂ© en deux : une zone d’interactions neuronales primitives qui demeure fidĂšle jusqu’à la servilitĂ© au mensonge, Ă  la dictature, Ă  l’oppression, Ă  l’exploitation bureaucratique d’une sauvagerie inouĂŻe ; et une autre zone encore frĂȘle « dĂ©vouĂ©e » et dĂ©diĂ©e presque entiĂšrement Ă  la libertĂ© politique et Ă  la dĂ©mocratie « bourgeoise » ! Et il ne sert strictement Ă  rien d’inviter les concernĂ©s Ă  tenter ne serait-ce qu’une seule « association » (dans le sens toujours psychanalytique) entre ces deux mondes diamĂ©tralement opposĂ©s, et qui ne « cohabitent » pas moins au sein de cette mĂȘme unitĂ© bizarre qu’est le cerveau compartimentĂ© « stal-tun » !

Dans « SchizophrĂ©nie & sociĂ©té » (Encyclopaedia Universalis) Deleuze dit que « Le caractĂšre spĂ©cial des machines schizophrĂ©niques vient de ce qu’elles mettent en jeu des Ă©lĂ©ments tout Ă  fait disparates, Ă©trangers les uns aux autres » et l’auteur de l’Anti-ƒdipe d’ajouter « À la limite, le schizophrĂšne fait une machine fonctionnelle avec des Ă©lĂ©ments derniers, qui n’ont plus rien Ă  voir avec leur contexte, et qui vont entrer en rapport les uns avec les autres Ă  force de ne pas avoir de rapports : comme si la distinction rĂ©elle, la disparitĂ© des diffĂ©rentes piĂšces devenait une raison pour les mettre ensemble, conformĂ©ment Ă  ce que les chimistes appellent des liaisons non localisables » (l’italique est de Deleuze).

Quid alors de la logique, de la cohĂ©rence, du bon sens, autrement dit de cette « chose du monde la mieux partagĂ©e [qu’est] la puissance de bien juger, et distinguer le vrai d’avec le faux » (Descartes) ?

Comment peut-on prĂŽner, lutter, militer, pour les lumiĂšres, pour la LibertĂ© (politique entre autres) en y concĂ©dant parfois un lourd tribut (emprisonnement, torture, exil, etc.) et rester, tel le MĂ©phistophĂ©lĂšs de Goethe, l’esclave du « malin » ?

Comment pourrait-on revendiquer aujourd’hui une quelconque crĂ©dibilitĂ© dans le combat dĂ©mocratique tunisien, tout en continuant Ă  coller au plus prĂšs de l’horreur dictatoriale d’hier ?

Il est sans doute grand temps pour nos « stal-tun » de se livrer sans plus tarder Ă  une rĂ©elle « schizo-analyse » ! Ils y gagneront, croyez-moi, en clartĂ© et en cohĂ©rence. Et nous n’en serons que mieux renseignĂ©s sur leurs rĂ©elles intentions politiques !

 

Houcine Bardi Docteur en Droit Avocat au Barreau de Paris

  

 


Culture

«Bourguiba et les MĂ©dias » : A livre ouvert


Vient de paraĂźtre Ă  compte d’auteur «Bourguiba et les MĂ©dias : Dialectique du pouvoir et de la propagande» de notre confrĂšre Khaled Haddad du journal Echchourouq. Une fenĂȘtre entrouverte sur les mĂ©dias aux temps du premier prĂ©sident de la Tunisie. «Rien n’a Ă©tĂ© inventĂ©, d’aprĂšs l’auteur,  mais le tout est tirĂ© de son propre discours, unique dans son genre». Vu et revu avec le recul, quelques dĂ©cennies aprĂšs. Une lecture parmi tant d’autres qu’on respecte. Dans l’histoire des mĂ©dias de l’ancien rĂ©gime, il y a eu tant de grosses zones ombragĂ©es et une Ă©paisse toile d’araignĂ©e, tramĂ©e autour des ondes et des Ă©crans. A l’époque, c’était l’écran total. «OĂč rien (ou presque) ne filtrait qu’aprĂšs autorisation», d’aprĂšs le journaliste Khaled Haddad qui a revisitĂ© cet univers et tentĂ© de soulever le voile sur un chapitre de notre rĂ©cente histoire, celui du 4e pouvoir. Pour l’auteur, ce n’était pas la mer Ă  boire pour cette plongĂ©e sous marine qui grouille d’infos. «J’ai relu ce qu’a Ă©crit l’ancien prĂ©sident de sa propre plume pour L’Action, journal du parti. J’ai passĂ© beaucoup de temps Ă  fouiner dans les archives de cette Ă©poque. L’époque Ă©tait grandement marquĂ©e par Bourguiba, le «journaliste». Qui se voulait un orateur hors pair, et qui se voulait prĂ©sent sur tous les supports. Surtout sur le petit Ă©cran, son faible. C’était sa façon d’ĂȘtre omniprĂ©sent dans la tĂȘte de tous et de toutes», pense Ă  haute voix Khaled Haddad. Qui, aprĂšs une maĂźtrise en lettres arabes datant de 1995, s’est trouvĂ© emportĂ© par le souffle journalistique. Le fruit de ses Ă©tudes : un master en 2007 consacrĂ© aux  analyses des faits divers de l’histoire politique. L’homme s’est donc glissĂ© entre les plis des journaux Ă©cornĂ©s et jaunis par le temps. Et, Ă  travers l’humiditĂ©, il a senti l’odeur de l’encre noire qui bavait de diverses lectures. A sa maniĂšre, il a dĂ©cortiquĂ© ce qu’il avait sous les yeux. Sur Bourguiba, l’énigme de l’entre-deux guerres mondiales. L’étude lui a paru intimement liĂ©e aux activitĂ©s d’un homme, Ă  son entourage et Ă  des influences de toutes parts des annĂ©es 1930 jusqu’à 1987, la fin d’un rĂšgne, la fin d’un discours. La fin d’un autre discours. C’était toute une tranche de vie, grandement rythmĂ©e. C’était une Ă©cume de passages et de matraquages qui a Ă©chouĂ© au bord de ce livre. La jaquette Ă©lĂ©gante de cet ouvrage de format moyen scelle 344 pages. Dont cinq rĂ©servĂ©es Ă  la prĂ©face. Une sorte d’entrĂ©e en matiĂšre. Une matiĂšre Ă©talĂ©e sur deux parties. La premiĂšre passe en revue les discours Ă©crits avant 1956, annĂ©e de l’IndĂ©pendance. «En 1967, avec la tĂ©lĂ©vision, Bourguiba passe Ă  d’autres pratiques. C’est de remplir l’écran par le discours qui ne fonctionne que par et pour le gouvernement en place», prĂ©cise l’auteur. « La deuxiĂšme moitiĂ© paraphe une autre Ă©poque. Celle qui s’étalera jusqu’à1987. Bourguiba accentue les traits de sa personnalitĂ©, dĂ©jĂ  prononcĂ©s. La tĂ©lĂ©vision est devenue son espace. Il se disait, le peuple doit me voir tous les jours », commente le journaliste, qui a consolidĂ© son point de vue par une foule de tĂ©moignages vivants. Outre les avis des journalistes au sein du gouvernement de l’époque, il a passĂ© le micro Ă  d’autres confrĂšres de la presse privĂ©e, d’opposition ou tout simplement proche du parti. Ils sont les Abdelhamid Ben Mustapha, Wahid Brahem, Belhassen Ben Arfa, Abdellatif Fourati et Slaheddine Jourchi. Et ce n’est pas terminĂ©. Car il lui a dĂ» greffer Ă  son Ă©tude quelques interviews. Avec des gens qui ont cĂŽtoyĂ© de trĂšs prĂšs l’ancien prĂ©sident dans les annĂ©es 1960-70 et 80. Quatre ministres de l’époque ont rĂ©pondu prĂ©sents Ă  l’invitation de Khaled Haddad. On pense ici Ă  Mohamed Sayah, Tahar Belkhodja, Mohamed Masmoudi et autres Mustapha Filali. «L’ouvrage est une sorte d’analyse. C’est un livre documentaire. Qui raconte la vie d’un homme et par-delĂ , d’un pays», ajoute le journaliste. Vendredi 25 avril, une rencontre dĂ©dicace a eu lieu Ă  la librairie El Kitab de l’avenue Habib Bourguiba. C’était devant un parterre de gens intĂ©ressĂ©s. Ce samedi 3 mai, une autre rencontre sera organisĂ©e au stand de CĂ©rĂšs Ă  la Foire du Livre du Kram. Pour les plus curieux, ne pas s’abstenir
 Z. ABID  
(Source: Le journal “Le Quotidien ” (Quotidien – Tunis) le 03 mai 2008)

 

 

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