TUNISNEWS
10 ème année, N°3941 du 08.03.2011
Les membres du TMG de l’IFEX célèbrent la Journée internationale des femmes avec des femmes courageuses de Tunisie
IFEX-TMG members celebrate International Women’s Day with brave women of Tunisia
AFP: A peine sortie de sa révolution, la Tunisie mobilisée pour les réfugiés
AP: Le HCR et l’OIM s’apprêtent à rapatrier 15.000 réfugiés bloqués à la frontière tuniso-libyenne
AFP: Bruxelles salue “le rôle crucial” des femmes en Tunisie et en Egypte
AFP: La démocratie, aspiration redevenue universelle avec les révolutions arabes
Houcine Ghali: Tunisie : il faut feminiser le pouvoir
REVUE DE PRESSE
8 mars 2011 Les membres du TMG de l’IFEX célèbrent la Journée
internationale des femmes avec des femmes courageuses de Tunisie
SOURCE: Le groupe d’observation de la Tunisie (TMG de l’IFEX) – 8 mars 2011 – Pour souligner le 100e anniversaire de la Journée internationale des femmes, le 8 mars 2010, les membres du Groupe d’observation de la Tunisie organisé par l’Échange international de la liberté d’expression (TMG de l’IFEX), une coalition de 20 membres de l’IFEX, saluent les courageuses femmes journalistes, activistes, avocates et juges qui n’ont jamais cessé de réclamer une plus grande liberté d’expression et un meilleur respect des droits de la personne en Tunisie, en dépit des efforts du gouvernement pour les faire taire par tous les moyens possibles. Les membres du TMG de l’IFEX ont fait parvenir un message de solidarité à l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), une organisation partenaire de l’IFEX, et ont félicité la Présidente de l’ATFD Sana Ben Achour pour sa fermeté en dépit du harcèlement ciblé et incessant, tandis qu’elle réalisait un important travail de surveillance des médias pendant les élections. À l’occasion de la Journée internationale des femmes, les membres du TMG de l’IFEX ont transmis des roses symboliques à l’ATFD, qui organise un événement à Tunis les 12 et 13 mars sur le thème des “Femmes indépendantes de Tunisie après la révolution”. “Nous avons été frappés par le dynamisme de l’ATFD, par sa ténacité et son courage absolu quand elle a pris position et dénoncé la violence contre les femmes face à l’extrême répression que devaient affronter à ce moment-là les activistes tunisiennes, quelques semaines avant la chute de Ben Ali,” a déclaré Tamsin Mitchell du PEN International. La visite en Tunisie en décembre de Mitchell et du président du TMG de l’IFEX Rohan Jayasekera, du groupe Index on Censorship, a été tenue secrète par souci de sécurité et s’est effectuée dans l’ombre d’un gouvernement oppresseur, dont la censure très sévère rendait difficile pour les voix indépendantes de se faire entendre. “Ces dernières années, nous avons profité de la Journée internationale des femmes pour dénoncer les attaques contre les femmes en Tunisie, notamment la diffamation verbale et les injures auxquelles sont soumises les femmes journalistes et les activistes en Tunisie,” dit Jayasekera. “Cette année, heureusement, nous célébrons le courage des Tunisiens qui ont contribué à tourner la page et à passer à une démocratie où les femmes peuvent s’exprimer librement sans craindre des représailles.” En décembre, le TMG de l’IFEX s’apprêtaient à collaborer avec l’ATFD pour s’attaquer aux sanctions qui visent les femmes juges indépendantes de l’Association des magistrats tunisiens (AMT), comme la secrétaire générale Kalthoum Kennou, qui ont été déplacées loin de leur famille et ont subi des réductions de salaire à la suite de leurs appels publics à une magistrature indépendante. Aujourd’hui, nous saluons la nouvelle que Kennou et d’autres femmes juges ont réintégré leurs postes à Tunis, et nous les appuyons dans la poursuite de leur important travail. Dans le passé, il y avait toute une myriade de moyens pour réduire au silence la libre expression, comme jeter en prison les journalistes au franc parler, mais Kennou et ses collègues sont déterminées à faire en sorte que les juges ne seront pas compromis lorsqu’ils entameront injustement des poursuites criminelles contre des travailleurs des médias. Tandis que la Tunisie possède en effet une longue histoire de promotion des droits des femmes alors qu’ils ont été consacrés pendant les années 1950, ces droits n’ont pas été pleinement protégés sous le règne du Président Zine El Abidine Ben Ali, lequel a commencé en 1987. Les protections formelles des droits des femmes sous la Constitution servaient à déguiser des mesures oppressives du régime, qui est allée jusqu’à tromper les diplomates occidentaux pour les amener à adopter une approche plus mesurée envers le régime. Le traitement que réserve le pays aux femmes qui prennent la parole fait que les progrès réalisés par le gouvernement en matière de droits des femmes apparaissent comme des promesses creuses. Depuis 2008, les médias favorables au gouvernement étaient mobilisés pour injurier les femmes journalistes et activistes, traiter de “prostituées” ou de “traîtresses à la solde de gouvernements ou de groupes étrangers” les femmes qui osaient critiquer le régime de Ben Ali. Parmi celles qui ont été persécutées se trouvent des femmes partenaires du TMG de l’IFEX, dont les journalistes Sihem Bensedrine et Naziha Rejiba, de l’Observatoire de la Liberté de la Presse, de l’Édition et de la Création (OLPEC), groupe membre de l’IFEX. L’un des objectifs du TMG de l’IFEX et de ses partenaires sera de collaborer à une réforme des médias où ceux-ci agissent de manière éthique et où ils ne se livrent pas à la diffamation. “Quand un pays traverse une révolution aussi considérable que ce que vient de vivre la Tunisie, et qui a bénéficié en grande partie de la participation des femmes, les nouveaux dirigeants ne doivent pas ignorer les intérêts des femmes et la variété des rôles qu’elles pourraient jouer dans l’édification d’un nouveau pays où règnent pour tous la libre expression et le respect des droits de la personne,” a déclaré l’écrivaine Elisabeth Eide, du PEN de Norvège. Les femmes journalistes devraient pouvoir écrire librement sur l’évolution de la situation sans avoir à craindre le harcèlement, la prison ou d’autres attaques. Pour en savoir plus sur le TMG de l’IFEX, consulter le site : http://ifex.org/tunisia/tmg/ ou vous pouvez trouver le TMG de l’IFEX à : http://www.facebook.com/IFEXTMG et aussi sur Twitter @TunisiaMonitor Pour tout renseignement complémentaire: Le groupe d’observation de la Tunisie Rohan Jayasekera, Chair c/o Index on Censorship London United Kingdom rj (@) indexoncensorship.org tél: +44 20 7324 2522 http://ifex.org/tunisia/tmg/ Arabic Network for Human Rights Information ARTICLE 19: Global Campaign for Free Expression Bahrain Center for Human Rights Cairo Institute for Human Rights Studies Canadian Journalists for Free Expression Cartoonists Rights Network International Egyptian Organization For Human Rights Index on Censorship Fédération Internationale des Journalistes International Federation of Library Associations and Institutions International Press Institute International Publishers Association Journaliste en danger Maharat Foundation (Skills Foundation) Media Institute of Southern Africa Norwegian PEN Association mondiale de radiodiffuseurs communautaires Association Mondiale des Journaux et des Éditeurs de Médias d’Information Writers in Prison Committee, PEN International
8 March 2011 IFEX-TMG members celebrate International Women’s Day with brave women of Tunisia
SOURCE: IFEX Tunisia Monitoring Group (IFEX-TMG) – 8 March 2011 – To mark the occasion of the 100th anniversary of International Women’s Day, on 8 March 2011, members of the International Freedom of Expression Exchange Tunisia Monitoring Group (IFEX-TMG), a coalition of 20 IFEX members, commend the brave women journalists, activists, lawyers and judges who never stopped calling for greater freedom of expression and human rights in Tunisia, despite efforts by the government to silence them through any means possible. IFEX-TMG members send a message of solidarity to partner organisation the Tunisian Association of Democratic Women (Association tunisienne des femmes democrats, ATFD) and congratulate ATFD President Sana Ben Achour for standing strong despite targeted and relentless harassment while she carried out important work such as monitoring the media during the elections. On the occasion of International Women’s Day, IFEX-TMG members are sending symbolic roses to the ATFD, which is holding an event in Tunis on 12 and 13 March on “independent Tunisian women after the revolution”. “We were struck by the ATFD’s dynamism, tenacity and sheer courage in speaking out against violence against women in the face of the extreme repression that Tunisian activists were facing at that time, weeks before the fall of Ben Ali,” said Tamsin Mitchell of PEN International. A December visit to Tunisia by Mitchell and IFEX-TMG Chair Rohan Jayasekera of Index on Censorship was shrouded by security concerns and the shadow of an oppressive government, whose heavy-handed censorship made it hard for independent voices to be heard. “Over the past years, we have used the occasion of International Women’s Day to decry attacks on women in Tunisia, including slander and abuse faced by women journalists and activists in Tunisia,” says Jayasekera. “Happily, this year, we are celebrating the brave Tunisians who have helped turn the page towards a democracy where women can speak freely without fear of reprisal.” In December, IFEX-TMG planned to work with the ATFD to address the sanctions against independent women judges from the Association of Tunisian Judges (AMT), such as secretary general Kalthoum Kennou, who were moved far away from their families and saw their salaries reduced as a result of their outspoken calls for an independent judiciary. Now we welcome the news that Kennou and other women judges have returned to their positions in Tunis, and we support them as they continue in their important work. In the past there have been myriad ways to silence free expression, like jailing outspoken journalists, but Kennou and her colleagues are committed to working to ensure judges are not compromised when dealing with criminal cases brought wrongfully against members of the media. While Tunisia indeed has a long history of promoting women’s rights since they were enshrined in the 1950s, they were not fully protected since the reign of President Zine El Abidine Ben Ali began in 1987. Formal protections of women’s rights under the constitution were used to disguise oppressive measures by the regime, even fooling Western diplomats into taking a more measured approach with the regime. The country’s poor treatment of outspoken women has made its advances in women’s rights appear as empty rhetoric. Pro-government media were harnessed to abuse women journalists and activists since 2008, calling women who dared to criticise the Ben Ali regime “prostitutes” or “traitors on the payroll of foreign governments or groups”. Among those persecuted have been women partners of the IFEX-TMG including journalists Sihem Bensedrine and Naziha Rejiba of Observatoire de la Liberté de la Presse, de L’Edition et de la Création (OLPEC), an IFEX member. One of the goals of the IFEX-TMG and its partners will be to work towards media reform where media act ethically and don’t engage in slander and defamation. “When a country goes through a momentous revolution such as Tunisia has just done, and benefited largely by women’s participation, the new rulers should not ignore women’s interests and variety of roles they could play in building a new country where free expression and human rights are enjoyed by all,” comments writer Elisabeth Eide of Norwegian PEN. Women journalists should be able to write freely about new developments without fear of harassment, jail or other attacks. For more on IFEX-TMG, visit http://ifex.org/tunisia/tmg/ or find IFEX-TMG at http://www.facebook.com/IFEXTMG and on Twitter @TunisiaMonitor For more information: IFEX Tunisia Monitoring Group Rohan Jayasekera, Chair c/o Index on Censorship London United Kingdom rj (@) indexoncensorship.org Phone: +44 20 7324 2522 http://ifex.org/tunisia/tmg/ Arabic Network for Human Rights Information ARTICLE 19: Global Campaign for Free Expression Bahrain Center for Human Rights Cairo Institute for Human Rights Studies Canadian Journalists for Free Expression Cartoonists Rights Network International Egyptian Organization for Human Rights Index on Censorship International Federation of Journalists International Federation of Library Associations and Institutions International Press Institute International Publishers Association Journaliste en danger Maharat Foundation (Skills Foundation) Media Institute of Southern Africa Norwegian PEN World Association of Community Radio Broadcasters World Association of Newspapers and News Publishers Writers in Prison Committee, PEN International
FTCR – REMDH – MIGREUROP – LDH Invitation Conférence de Presse Une Commission d’enquête en Tunisie et en Italie : « Le mouvement migratoire suite à la révolution tunisienne et le traitement réservé aux migrants par les autorités italiennes et françaises » Suite à l’enquête de terrain menée, du 19 au 26 février 2011, en Tunisie (Sud tunisien – Zarzis,,,) et en Italie (Lampedusa et Sicile) par la commission d’enquête dépêchée par la FTCR, le REMDH, LTDH et Migreurop, nous vous invitons à une conférence avec la participation de : Michel Tubiana, Claire Rodier, Omeyya Seddik, Sarah Prestiani, Mouhieddine cherbib. Le Vendredi 11 Mars 2011 à 11h30 Au siège de la Ligue des Droits de l’Homme 138 rue Marcadet 75018 Paris Contact : LDH – Anne Garacoïts – anne.garacoits@ldh-france.org tél. : 01 56 55 51 08 FTCR Mouhieddine Cherbib – cherbib@gmail.com – 06.15.57.79.14
A peine sortie de sa révolution, la Tunisie mobilisée pour les réfugiés
De Daphné BENOIT –AFP / 08 mars 2011 14h30 RAS JDIR — Tout sourire, un groupe d’étudiants offre eau et réconfort à deux Somaliens qui arrivent épuisés de Libye. Ils viennent à peine de faire “leur” révolution mais les Tunisiens font preuve d’une solidarité sans faille depuis trois semaines. Devant le poste-frontière de Ras Jdir, franchie par des grappes de migrants hagards, Wahid Abbes, 29 ans, propose tous les matins ses services au Croissant-Rouge, dont le stand grouille de volontaires. “Aider les réfugiés, pour nous c’est un examen des principes qui ont guidé notre révolution: la dignité, le respect de la personne humaine”, explique cet étudiant en troisième cycle d’anglais, un “vétéran” de la Kasbah, la place gouvernementale au coeur de Tunis et haut-lieu des manifs qui ont fait tomber le président Ben Ali à la mi-janvier. “C’est une manifestation de citoyenneté”, assure-t-il devant une petite tente où il campe avec quelques amis rencontrés à Tunis pendant les “sit-ins” organisés pour faire chuter l’ancien régime. Ils sont là depuis quelques jours, ils sèchent tous les cours mais “c’est pour la bonne cause”. Depuis le 20 février, plus de 110.000 personnes ont quitté la Libye pour la Tunisie. “On étudie pour servir notre pays. Ici, c’est ce qu’on fait aussi”, assure Ibrahim Moussa, 21 ans, étudiant en aquaculture à Bizerte, dans le nord du pays. A quelques kilomètres, au camp de Choucha, d’autres jeunes Tunisiens montent des tentes et distribuent des repas chauds à d’interminables files de réfugiés. Une aide précieuse pour l’armée tunisienne et l’ONU qui gèrent ce camp de 16.000 personnes. Essentiellement des travailleurs bangladeshis coincés là faute de moyens pour les rapatrier. “Je suis là depuis dix jours. Des locaux paient notre chambre d’hôtel”, explique Oussama Mrassi, 28 ans. Son groupe de bénévoles attend des renforts ce soir pour aider à ramasser les déchets qui jonchent le sol du camp: une trentaine de jeunes de Tunis, armés de pelles et de balais. Entre deux coups de main, il tourne des vidéos destinées à Facebook, “pour illustrer les efforts des Tunisiens” et contrecarrer selon lui les “informations fausses” d’Al Arabiya, une chaîne de télévision saoudienne qu’il accuse de dénigrer les efforts humanitaires du pays à la frontière. Ici, la vague de générosité dépasse même les besoins, assurent les volontaires. “Les boulangers du coin donnent tellement de pain qu’il en reste. Les gens des environs le récupèrent pour nourrir leurs animaux”, explique l’un d’entre eux, tout en épluchant des carottes. Plus loin, à Ben Guerdane, la ville la plus proche de la frontière, les deux garages de Salah Jennifen regorgent de cartons remplis de lait, de pâtes, de couches pour bébé. Jusqu’au plafond, les matelas s’empilent. “Un fabricant de literie de Monastir en a envoyé tout un semi-remorque”, explique ce pré-retraité de 61 ans. Lui aussi veut apporter sa pierre: il a mis ses locaux à disposition pour entreposer une partie des dons qui affluent de tout le pays. A l’étage, il prête quatre appartements aux employés du Croissant-Rouge algérien. Même les plus démunis y vont de leur contribution. “Dans un carton de dons récoltés dans un village voisin, il y avait un tout petit sac plastique contenant de la farine. C’est une femme pauvre qui a donné ce qu’elle pouvait”, raconte-t-il. Depuis fin février, le Croissant-Rouge de Ben Guerdane, 80.000 habitants, a reçu des dizaines de tonnes d’aide humanitaire et récolté autant de dons financiers en trois semaines qu’au cours des deux dernières années, selon ses responsables. “Les Tunisiens font preuve d’un fantastique élan de solidarité, alors que ce pays n’est pas habitué aux crises humanitaires”, salue Gérard Lautrédou, responsable Afrique du Nord de la Fédération internationale de la Croix Rouge.
Le HCR et l’OIM s’apprêtent à rapatrier 15.000 réfugiés bloqués à la frontière tuniso-libyenne
AP 08/03/11 19:25 TUNIS (AP) — Alors que la situation semble se stabiliser à la frontière sud de la Tunisie après le flux massif de réfugiés fuyant la Libye, les organisations humanitaires internationales se proposent de mener une action conjointe pour parachever l’évacuation de quelque 15.000 réfugiés encore bloqués dans la zone de Ras Jédir, principal poste frontalier tuniso-libyen. Ce programme a été évoqué par le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) Antonio Gutterres et le directeur général de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) William Lacy Swing, lors d’une entrevue mardi avec le ministre tunisien des affaires étrangères Mouldi Kéfi. Les responsables des deux organisations, cités par l’agence officielle TAP, ont déclaré avoir exprimé leurs “remerciements au peuple et au gouvernement tunisiens pour avoir permis l’ouverture de la frontière tuniso-libyenne aux migrants fuyant la Libye et leur avoir apporté l’assistance et la protection nécessaires”. MM. Gutterres et Lacy Swing ont également salué “les efforts déployés par la Tunisie afin de permettre l’évacuation humanitaire vers leurs pays d’origine de dizaines de milliers de ressortissants asiatiques, égyptiens et africains”. Lundi, quelque 1.800 réfugiés sont arrivés en provenance de Libye, contre une moyenne de 10 à 12.000 personnes par jour précédemment. Au total, 105.000 réfugiés dont 50.000 Egyptiens, 19.000 Tunisiens et 15.000 Bengalis ont franchi le poste frontalier de Ras Jédir du 20 février au 7 mars. Le HCR s’emploie à aider au rapatriement des ressortissants bengalis encore bloqués par milliers à la frontière. En visite sur les lieux une envoyée spéciale du ministère italien des affaires étrangères Margherita Boniver, s’est de son côté engagée à rapatrier à partir de mercredi des ressortissant bengalis, en plus de 300 Egyptiens et 60 Maliens. Malgré l’amélioration de la situation, les organisations humanitaires tunisiennes et internationales déployées au poste frontalier et dans les camps de réfugiés prévoient une intensification du flux des expatriés due à l’escalade des violences en Libye. Selon la TAP, elles craignent que ce soit un “calme qui précède la tempête”. Appréhendant “une nouvelle crise à la frontière” tuniso-libyenne, elles “s’apprêtent à faire face aux imprévus”. D’importantes aides internationales ont été acheminées ces derniers jours vers Ras Jédir d’Algérie, d’Allemagne, des Emirats arabes Unis (EAU) et du Maroc au cours de la dernière période. AP
Bruxelles salue “le rôle crucial” des femmes en Tunisie et en Egypte
(AFP) 07 mars 2011 BRUXELLES — Les femmes ont joué “un rôle crucial” dans les changements en cours en Tunisie et en Egypte, ont affirmé mardi la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton et la vice-présidente de la Commission européenne Viviane Reding, à l’occasion de la Journée internationale des femmes. “Les femmes ont joué un rôle crucial dans le déclenchement des mutations en cours en Afrique du Nord. Dans un climat de violence, elles se sont engagées dans la lutte pour le changement”, ont déclaré les deux responsables européennes. “Nous espérons que le rôle crucial que les femmes ont joué jusqu’à présent sera pleinement pris en compte dans les changements institutionnels qui font déjà l’objet de discussions dans la région. Les femmes doivent être au coeur des discussions sur le nouvel ordre qui sera mis en place”, ont-elle ajouté. Les femmes, défiant tabous et stéréotypes, se sont imposées comme des actrices essentielles dans les différents soulèvements populaires qui secouent des régimes autocratiques du monde arabe. Que cela soit en jean et T-shirt ou drapées de noir, des dizaines de milliers de femmes ont fait entendre leur voix, dans les rues de Tunis, du Caire, de Manama ou de Sanaa, réclamant des réformes dans ces pays. A Bahreïn, où des milliers de manifestants majoritairement chiites réclament la chute de la dynastie sunnite des Al-Khalifa, les femmes ont participé en masse à la mobilisation, leur traditionnelles abayas formant un océan noir au sein des manifestations où hommes et femmes défilent séparément. Dans des pays conservateurs, comme en Libye ou au Yémen, les femmes ont défié les normes sociales pour se joindre à la contestation, défilant dans la rue et parlant ouvertement aux journalistes, face à la caméra. Asma Mahfouz, une jeune Egyptienne dont le blog vidéo appelant à la mobilisation a connu un énorme succès, est considérée comme l’une des voix ayant déclenché la révolte sans précédent qui a entraîné la chute du président égyptien Hosni Moubarak le 11 février. “Ce n’est qu’en prenant des mesures énergiques aujourd’hui que nous garantirons aux femmes et aux fillettes un avenir sans discrimination ni violence, dans un monde offrant les mêmes chances à toutes et à tous”, ont estimé notamment Mmes Ashton et Reding.
La démocratie, aspiration redevenue universelle avec les révolutions arabes
AFP 08/03/11 10:37 De Sofia BOUDERBALA (AFP) – PARIS — Soif de liberté et exigence de justice: de Tunis à Bahreïn ou Tripoli, les révoltes arabes apportent un démenti sévère à l’idée, longtemps entretenue par des régimes autoritaires, que démocratie et droits de l’Homme sont des concepts occidentaux, estiment observateurs et politiques. L’occident, qui porte ces valeurs en étendard, a paru démuni tant par la soudaineté de la chute de dirigeants encore considérés il y a trois mois comme des partenaires, que par l’ampleur d’un mouvement qui a secoué la rive sud de la Méditerranée jusqu’à la péninsule arabique, berceau de l’islam. “Ce qui se passe dans le monde arabe est un démenti cinglant à tous ceux qui voulaient nous faire croire que les droits de l’Homme sont un concept occidental imposé”, affirme à l’AFP François Zimeray, ambassadeur français chargé des droits de l’Homme. “Depuis plusieurs années, on assistait à un recul de l’universalité”, dit-il, citant en exemple l’adoption par l’Organisation de la conférence islamique d’une “charte islamique des droits de l’Homme”. “On sent aujourd’hui les positions des pays changer. Ca dépasse de loin l’Afrique du Nord”, où la révolte a débuté avec la chute du Tunisien Ben Ali le 14 janvier, ajoute l’ambassadeur. Les Etats-Unis tentent de se démarquer de la “guerre préventive” de l’ère Bush et d’imposer une “doctrine Obama” qui consisterait à soutenir les élans démocratiques tout en se gardant d’une action en solo. La France multiplie les initiatives (rapatriements humanitaires, proposition à l’ONU) après de vives critiques pour son ralliement tardif à la révolution tunisienne. “Nous nous sommes peut-être laissés intoxiqués quand on nous disait que les régimes autoritaires étaient les seuls remparts contre l’islamisme”, a reconnu dimanche au Caire le chef de la diplomatie française, Alain Juppé. Pour Pierre Vermeren, auteur de “Maghreb, la démocratie impossible?”, “l’idée que la démocratie n’était pas pour le monde arabe relève de préjugés coloniaux”. “C’est sous la colonisation que les peuples se sont imprégnés des valeurs de liberté, qui ont nourri les mouvements de libération et ont été perverties par l’exercice du pouvoir après les indépendances”, explique l’historien. “Dans les années 70, la contestation était marxiste et féministe. Avec l’aide financière de l’Arabie Saoudite, les régimes autoritaires ont favorisé l’émergence de l’islamisme. Tous les dictateurs ont entretenu les dirigeants occidentaux dans l’idée que leurs peuples étaient violents, analphabètes et ingérables”, poursuit-il. Les opposants à ces régimes n’étaient audibles ni dans leur pays ni à l’extérieur. “Les dictateurs se faisaient les champions de la lutte pour le peuple palestinien. Ils jouaient du nationalisme arabe auprès de leur peuple et de la peur face à l’occident à qui on promettait soit la dictature, soit la théocratie”, affirme l’opposant tunisien Mouhieddine Cherbib. Le militant déplore des débats “absurdes” sur “la compatibilité entre islam et démocratie”, jugeant que l’islam “est comme toutes les religions du monde”. “Ce qui est important aujourd’hui, c’est de voir que les sociétés arabes bougent”, dit-il, saluant en internet “l’instrument d’une émancipation de la société civile”. “La perception change au niveau des opinions publiques européennes”, estime M. Cherbib, mais, ajoute-t-il, “c’est plus difficile au niveau des dirigeants, qui semblent plus préoccupés par le contrôle des flux migratoires que par les bouleversements en cours”.
TUNISIE : IL FAUT FEMINISER LE POUVOIR
Houcine Ghali, Genève Aujourd’ hui, 8 mars, c’ est la journée internationale de la femme. Celà fait cent ans que nous fêtons cette journée qui est devenue presque folklorique puisqu’ à l’ échec mondiale il n’ y a pas eu une grande émancipation de la femme. Durant les presque deux mois que la Tunisie vit un bouleversement politique et social où il y a eu d’ innombrables revendications, on n’ a jamais entendu quelqu’ un parler de l’ égalité entre hommes et femmes dans ce pays. Il y a eu seulement une manifestation de femmes intellectuelles et ringardes de la capitale et ses banlieus pour revendiquer la laïcité, mais ailleurs, dans toutes les régions, ni durant les deux seeting à la Casbah, personne n’ a évoqué les droits des femmes ni leur égalité avec les hommes. Il ne s’ agit pas seulement que la femme ait la même part de l’ héritage que l’ homme, qu’ elle ne soit pas obligée de porter le voile et qu’ elle s’ oppose à la polygamie, mais de déterminer sa participation entière et totale à tous les rouages du pouvoir. Il faut qu’ elle soit présente, à part égale, au sein du gouvernement, à la direction de toutes les institutions économiques, sociales, militaires, judicaires et de l’ information. Par exemple, il faut qu’ il y ait la même parité entre homm et femmes dans toutes les fonctions de PDG dans les banques, les sociétés nationales et privées et avec le même salaire pour les mêmes compétences. La femme, de son côé et pour son intérêt, il faut qu’ elle arrête de se suffir de sa féminité, sa beauté et son capital sexuel pour combattre l’ homme, cet animal dominant, imbu de lui-même et concevant sa compagne que comme objet sexuel. Houcine.ghali@bluewin.ch
Tunisie – Béji Caïd Essebsi : «Un gouvernement qui se respecte est seul maître de ses décisions»
««Monsieur le Premier ministre, quel rôle occuperait l’Union générale des Travailleurs Tunisiens (UGTT) dans les décisions du gouvernement de transition dont vous présidez aux destinées, d’autant plus que l’Union a, ces derniers temps, affirmé sa présence sur le terrain politique à tel point qu’on a fini par la confondre à un parti politique?». La question a été posée à Béji Caïd Essebsi, Premier ministre du gouvernement de transition lors de la conférence de presse organisée lundi 7 mars au Palais de Carthage pour la présentation de la nouvelle composition gouvernementale. «Pour ce qui est d’être un parti politique, je ne saurais répondre, il faudrait peut-être que ce soit l’UGTT qui y réponde; par contre, ce que je peux assurer, c’est que l’UGTT représente pour nous un partenaire de première importance. Elle a participé au mouvement national de libération, ainsi qu’à la construction de l’Etat moderne et son aide et sa contribution sont toujours souhaitables. Ceci dit, lorsqu’un gouvernement se respecte, c’est lui qui prend toujours les décisions. Parallèlement, il peut mener des concertations avec divers vis-à-vis. En ce qui me concerne, j’ai consulté différentes parties et l’UGTT particulièrement parce que j’estime qu’elle a un rôle important. La situation, comme vous avez dû le remarquer, est aujourd’hui meilleure que celle qu’elle était. Cela ne veut en aucun dire que c’est l’UGTT qui dirige le gouvernement, tant que je serai là, c’est moi qui assurerai ce rôle ainsi que le président de la République». Voilà pour rassurer toutes les personnes inquiétées de la toute puissance acquise par la centrale syndicale des travailleurs dont les déclarations fracassantes de certains hauts responsables touchant aux affaires politiques de l’Etat ont induit en erreur un grand nombre de Tunisiens quant à sa véritable mission, politique ou sociale. Les priorités les plus importantes pour le pays seraient, d’après le Premier ministre, d’ordre sécuritaire et politique. Les médias ont dans ce cadre un rôle important à jouer en la matière en étant aussi crédibles, objectifs et professionnels que possible. Informer étant avant tout une responsabilité dans la transmission des informations et la sensibilisation des différents publics par rapport aux différents enjeux politiques, sécuritaires et socioéconomiques du pays. L’ordre public rétabli, le gouvernement s’attaquera aux différents chantiers économiques: «Les investisseurs ne viendront pas dans un pays où la sécurité n’est pas assurée. Cela va venir certainement». Le Premier ministre a insisté sur le fait que lui et son gouvernement ont assumé leurs missions pour travailler et faire parvenir le pays à bon port. Ce qui implique, juillet prochain, délais désigné pour l’élection d’une Assemblée constitutive qui prendra ensuite le relais et assurera la gestion des affaires de l’Etat. Ceci dit, doit-on tous s’accorder et systématiquement sur les décisions prises par l’Etat? «Allahou awssa bi Akdhi Ra’iyi al jamaati wa la bil ijmaa» (Dieu a appelé à la contribution de tous sans pour autant exiger l’unanimité sur toutes les décisions prises par la première autorité, a tenu à préciser le Premier ministre). Ce qui implique forcément que certains pans de la société tunisienne désapprouvent quelques décisions prises par le gouvernement. Il n’en demeure pas moins que le gouvernement sera seul responsable et prendra les mesures les plus bénéfiques dans l’intérêt du pays et le peuple tunisien. Béji Caïd Essebsi a déclaré qu’il s’attend à être aussi critiqué que ses prédécesseurs. Cela ne paraît en aucun cas l’effaroucher en homme d’Etat qu’il est. Pour ce qui est des relations de la Tunisie avec la Libye, le Premier ministre du gouvernement de transition a assuré que les relations ancestrales entre les deux peuples ne sauraient souffrir aucune défaillance d’autant plus que lorsque la Tunisie a eu besoin d’aide, la Libye a répondu présente. La Tunisie est donc prête à accorder toute son aide au peuple du pays voisin sans pour autant interférer dans ses affaires internes. Béji Caïd Essebsi a essayé de rassurer les médias et à travers eux la population quant à sa volonté de remettre le pays sur pieds et de faciliter le passage vers la transition démocratique. Il a également appelé toutes les composantes de la société tunisienne à faire preuve de vigilance, à avoir confiance dans son gouvernement et sa direction et à reprendre le travail aussi vite que possible. «D’ailleurs, je ne suis pas là pour parler, je suis là pour travailler», a-t-il tenu à affirmer.. Source: “wmc” Le 08-03-2011 Lien:
http://www.webmanagercenter.com/management/article-103000-tunisie-beji-caid-essebsi-un-gouvernement-qui-se-respecte-est-seul-maitre-de-ses-decisions
Egypte/Tunisie : le tourisme repart
Les organisateurs du plus grand salon du tourisme mondial, l’ITB, qui s’ouvre mercredi à Berlin, se sont montrés mardi très optimistes pour l’Egypte et la Tunisie, destinations boudées seulement temporairement suite aux soulèvement populaires. “Les réservations (à partir d’Allemagne) pour ces deux pays augmentent à nouveau”, a estimé Jürgen Büchy, président de la fédération allemande des agences de voyage, le DRV, lors d’une conférence de presse de présentation. Il a assuré que “les révolutions pacifiques avaient rencontré beaucoup de sympathie auprès des Allemands”, réputés champions du monde du tourisme. Quelque 40,5 millions de touristes ont voyagé l’an dernier avec des opérateurs allemands, soit une progression de 5% par rapport à 2009. “L’Egypte et la Tunisie vont rapidement se remettre et reconquérir leur place sur la carte mondiale du tourisme. J’en suis persuadé”, a conclu M. Büchy. L’Egypte, qui doit être l’an prochain le pays invité du salon, après la Pologne cette année, a triplé sa surface d’exposition à Berlin et dispose pour la première fois d’une halle entière. L’édition 2010 de l’ITB voit aussi l’Irak faire son retour, pour la première fois depuis 1966, tandis que le Pakistan ainsi que l’Iran vont faire leur première apparition. Source : « Le Figaro » Le 08-03-2011 Lien :
http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2011/03/08/97002-20110308FILWWW00441-egyptetunisie-le-tourisme-repart.php
Les régions dictent l’agenda de la nouvelle Tunisie
L’a-t-on vraiment bien noté ? Les régions défavorisées sont désormais au centre des programmes de coopération entre la Tunisie et ses partenaires internationaux. Qui s’en plaindrait? Longtemps oubliées du pouvoir, les régions du centre et du centre-ouest ont été les premières à lancer la révolution tunisienne qui a chassé de l’ex-président du pouvoir, et du pays. Et c’est tout naturellement que ces régions dictent désormais l’agenda politique du pays et orientent ses plans de développement. Pour preuve: le désenclavement de ces régions par la création d’une autoroute et la réhabilitation des quartiers défavorisés des villes de Kasserine, Sidi Bouzid, Le Kef et Gafsa ont été au centre la visite éclair à Tunis, dimanche et lundi, de Nathalie Kosciusko-Morizet. Consciente de l’urgence dans laquelle vivent ces régions, la ministre française de l’Ecologie, du Développement durable, des Transports et du Logement a d’ailleurs proposé une mission d’appui d’ingénieurs pour tenter de réduire le délai d’étude de vingt-trois mois prévu par l’administration tunisienne pour les projets destinés à ces régions. L’Agence française de développement (Afd) apportera son assistance pour les quartiers défavorisés des villes du centre et du centre-ouest afin de créer des réseaux d’assainissement de l’eau, d’électrifier les quartiers et de revoir le développement urbain. Mme Kosciusko-Morizet a apporté également son soutien à un projet trilatéral associant la Tunisie, la France et la principauté de Monaco: il s’agit de l’implantation de pompes à eau solaires dans le secteur rural, par l’intermédiaire de la Société tunisienne d’électricité et de gaz (Steg). La ministre française, qui a eu des réunions avec les ministres de l’Agriculture et de l’Environnement, des Transport, et de l’Energie, a eu aussi des rencontres avec les représentants d’Ong de développement et d’environnement et de la société civile. Elle a, sur un autre plan, discuté de l’état d’avancement du projet de réorganisation du port de Rades, qui devrait améliorer la régularité du transport maritime de marchandise entre la Tunisie et l’Europe. Seulement 10% de ce projet inscrit dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée (UpM) ont été réalisés. Bien qu’il soit situé sur le littoral, ce projet requiert une certaine urgence et sa réalisation devrait être accélérée. Source : « Kapitalis » Le 08-03-2011 Lien :
http://www.kapitalis.com/kapital/34-economie/2981-les-regions-dictent-lagenda-de-la-nouvelle-tunisie.html
« La liberté des Tunisiens me réjouit ! »
Installé en France depuis une trentaine d’années, l’artiste franco-tunisien Lassaâd Métoui expose à Nantes jusqu’au 18 mars. L’artiste calligraphe Lassaâd Métoui est né, a vécu son enfance et son adolescence à Gabès : « Ce qui s’est passé et se poursuit en Tunisie est extraordinaire ! Les jeunes ont fait preuve de maturité et de responsabilité. Personne ne pouvait espérer une révolution pacifique. Pas avec le régime policier en place. Ils l’ont réussie. C’est merveilleux ! Même s’il faut rester vigilant, plus rien ne pourra être comme avant. La liberté des Tunisiens me réjouit ! » Installé en France depuis trente ans, s’il reste très attaché à sa Tunisie natale, il s’est toujours opposé au régime politique qui vient de tomber : « Je n’ai jamais accepté la moindre aide de ce gouvernement. Même à l’occasion des expositions de mes oeuvres à Tunis ou à Gabès. » Aujourd’hui, il envisage d’organiser une grande exposition dans la capitale tunisienne : « Ce n’est pas possible dans un avenir immédiat à cause de projets prévus à Paris et au Canada, mais cela se fera. » Pour l’heure, il expose douze lithographies à la galerie Arts pluriels, à Nantes : « J’ai voulu reprendre le thème du soleil et de la terre. Le bleu pour la méditation, l’intérieur de soi, la sérénité et le rouge pour la colère et la passion. » Ses illustrations calligraphiques, en noir et blanc, du livre de Khalil Gibran, « Lorsque le bonheur vous fait signe… sauvez-le », paraîtra début avril. Source: ”ouest-france” Le 08-03-2011 Lien:
http://www.ouest-france.fr/actu/actuLocale_–La-liberte-des-Tunisiens-me-rejouit-_-1719051——44109-aud_actu.Htm
Tunisie : le temps des colères sociales
Grèves, sit-in, occupations d’usines… deux mois après la chute du régime Ben Ali, les revendications se multiplient en Tunisie. Et certains redoutent que le « chaos » ne fasse fuir les investisseurs. Hervé Bauchet est prêt à lâcher les chiens. Ce chef d’entreprise a acheté quatre pitbulls pour « sécuriser l’entreprise et les gens qui y travaillent ». Il dirige Cablitec Tunisie, une société française spécialisée dans les câbles pour l’industrie automobile. Depuis le 14 janvier et la chute de l’ancien président Ben Ali, le site, installé dans la zone industrielle de Sousse, à deux heures de Tunis, connaît des débrayages à répétition. Les grévistes réclament la réintégration d’une salariée – par ailleurs représentante du personnel -licenciée en novembre. Pour « insultes, crachats et coups donnés à un autre salarié », affirme la direction. « L’UGTT (Union générale tunisienne du travail, la grande centrale syndicale du pays, NDLR) ressort des vieux dossiers pour obtenir ce qu’elle ne pouvait pas avoir avant la révolution, soutient Hervé Bauchet. Elle empêche ceux qui veulent travailler d’entrer dans l’entreprise en les intimidant et en les menaçant. Le 14 février, des salariés ont même été frappés. Nous avons sollicité l’arbitrage du gouvernorat de Sousse, puis de l’inspection du travail. » En vain. « Des grévistes m’ont dit “dégage” et on a inscrit ce slogan sur ma voiture », poursuit, amer, le patron de Cablitec Tunisie. Résultat : le 22 février, la direction commerciale du groupe, basée à Sissonne (Aisne), a suspendu la fabrication du site. « On se donne deux à trois mois avant une éventuelle fermeture », précise le dirigeant. « Pendant des années, la Tunisie a connu l’immobilisme, explique son adjoint, Tarique Essardaoui, un Tunisien. Tout cela s’est accumulé et aujourd’hui, ça explose. Ils essaient d’obtenir ce qu’ils veulent en se disant que c’est maintenant ou jamais. C’est la période des opportunistes. » Et Cablitec est loin d’être un cas isolé… « Le chaos menace en Tunisie, s’inquiète Charles Saint-Prot, directeur de l’Observatoire d’études géopolitiques. Des soviets se mettent en place dans les usines. Cette pagaille risque de faire perdre de précieux points de croissance que le pays aura du mal à rattraper. Certains investisseurs, qui comptaient investir en Tunisie, se tournent d’ailleurs déjà vers le Maroc. » Hausses de salaires A une centaine de kilomètres de Sousse, près de Zaghouan, dans le centre du pays, Jean-Marc Mercier dirige Bonna Tunisie, filiale d’une entreprise française de BTP. Il sort d’un mois de conflit avec ses salariés. « Pendant la révolution, les ouvriers ont gardé l’usine, raconte-t-il. Une semaine après, ils réclamaient 30 % d’augmentation de salaire. Quelques jours plus tard, d’anciens membres du RCD (le parti unique de Ben Ali, NDLR), des membres de l’UGTT et d’anciens employés se sont postés à l’extérieur de l’usine en disant : “personne n’entre !” Les gars de l’UGTT de l’usine étaient débordés par des membres de leur propre syndicat venus d’ailleurs pour faire de la surenchère. Il y a même eu des jets de pierres entre les deux camps. » La situation s’est dénouée grâce à l’intervention de l’inspection du travail et au prix d’une augmentation du salaire de base de 10 %. Autre exemple, Asteel Flash Tunisie, la filiale d’une entreprise française de sous-traitance spécialisée dans les cartes électroniques et implantée depuis seulement le 1er janvier dans le pays. « J’ai tout de suite accepté une augmentation des salaires de 10 % pour ne pas laisser pourrir le mouvement », explique Alain Eusebi, son directeur général adjoint. Si les entreprises françaises sont nombreuses à avoir ainsi dû concéder des hausses de salaire courant janvier, l’explosion sociale touche également les entreprises tunisiennes. Dans le centre du pays, la Compagnie des Phosphates de Gafsa (CPG) ne peut plus exporter le phosphate qu’elle exploite. « Des tentes posées sur les voies de chemin de fer bloquent toute activité, explique Mahmoud Maaref, directeur central financier de CPG. L’entreprise perd chaque jour 2 millions de dinars [environ 1 million d’euros] et le groupe chimique qui lui est rattaché, 5 millions de dinars », déplore-t-il. Depuis plusieurs semaines, une cinquantaine de chômeurs de la région de Gafsa font un sit-in devant le siège de la CPG à Tunis, dans le centre de la capitale. « Ils réclament 17.000 embauches pour les 17.000 familles qu’ils ont identifiées comme manquant de ressources dans leur bassin minier, poursuit Mahmoud Maaref. A leurs yeux, ces emplois leur sont dus : ils considèrent que la révolution qui a renversé Ben Ali a démarré avec les émeutes sociales de Gafsa en janvier 2008 et qu’elle a donc abouti grâce à eux. » Non loin du siège de la CPG, les salariés de Tunisie Telecom attendent, eux, d’être reçus par le secrétariat d’Etat aux Télécommunications. Ils demandent… le départ de 63 personnes recrutées en 2007. « Elles doivent dégager, commente le secrétaire général de la Fédération UGTT des télécoms, Mongi Ben Mbaret. Ce sont les yeux et les bras de l’ancien régime. » « Ces 63 personnes perçoivent l’équivalent du tiers des salaires des 8.500 salariés de l’entreprise !, tonne une salariée, Ahlem Ghorbel. Le PDG s’était engagé à ce qu’elles quittent l’entreprise, avant de se rétracter. On demande l’application de cette décision. On n’a plus confiance. » Titulariser les précaires A quelques mètres des barbelés entourant encore le ministère de l’Intérieur, sur l’avenue Bourguiba, la tour de l’hôtel Africa abrite des salariés qui s’estiment peu soutenus par les autorités dans le combat contre leur patron, qu’ils accusent d’être un proche de l’ancien président Ben Ali. L’hôtel a dû fermer le 10 février mais les salariés continuent d’occuper les lieux. Ils demandent « la titularisation de 60 personnes » en contrats précaires depuis parfois huit ans et plus. « On n’a jamais demandé d’augmentation de salaire. Notre seule revendication, c’est la titularisation, explique Chokri Mammami, chef de rang au room service. On n’a rien dit pendant cinquante ans. C’est maintenant l’occasion ou jamais de parler. » L’Africa n’est pas un cas isolé. « Une grande partie des hôtels sont touchés par des tensions sociales liées au travail précaire, explique Kamel Saad, secrétaire général de l’UGTT en charge du tourisme. Nous voudrions réussir à la fois la révolution et la saison touristique. Alors, il faut que les patrons nous aident. » La carte de l’apaisement Les revendications sociales seront bientôt portées au niveau national, puisqu’une grande négociation entre patronat et syndicats doit démarrer ce mois-ci. Elle portera notamment sur les augmentations de salaire. Et ceux qui ont déjà concédé de telles hausses s’attendent à devoir remettre la main au portefeuille. Mais le patronat, représenté par l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), aimerait différer la négociation en avril, « quand la situation sociale sera plus stable ». Aujourd’hui, dans les deux camps, certains jouent l’apaisement. « Les revendications salariales sont négligeables lorsqu’elles sont converties en euros », note ainsi Mohamed Ben Sedrine, le coordinateur général de l’Utica. Il a provisoirement remplacé Hédi Djilani, personnage très proche des familles Ben Ali et Trabelsi, qui a démissionné le 19 janvier. De son côté, l’UGTT ne veut pas être accusée d’affaiblir l’économie tunisienne : « Nous sommes des gens responsables. Les augmentations de salaire ? C’est très important, mais ce n’est pas si urgent, assure Mohamed Boukhari, secrétaire général adjoint de la Fédération UGTT de la STEG, l’entreprise d’électricité et de gaz du pays. Il y a d’abord des gens qui ont besoin d’un travail. » L’explosion sociale en cours ne surprend pas un diplomate français : « Le modèle tunisien, c’était des gens très bien formés, très mal payés, avec prière de la fermer. Alors, forcément, quand tout ça explose, ils revendiquent ! » Et certains s’inquiètent : « Jusqu’ici, la Tunisie attirait les investisseurs grâce à des salaires bas et à une grande stabilité sociale et syndicale, confie un proche des milieux d’affaires français… Or tout cela vole en éclats ! Une fenêtre s’est ouverte, le syndicat UGTT et les salariés se sont engouffrés dans la brèche et on a vu des demandes extravagantes d’augmentation de plus de 200 dinars pour des salaires de 250 dinars. » « Les demandes de hausse de salaire, qui touchent l’ensemble de l’économie, vont de 30 à 50 %, et nombre d’entre elles sont légitimes ; la révolution a montré qu’on peut rendre possible l’impensable », relativisait Elyès Jouini, le ministre en charge des Réformes économiques et sociales, avant de démissionner le 1er mars. Au-delà des préoccupations salariales, la vraie crainte, partout très présente, est que les caciques de Ben Ali ne gardent la mainmise sur l’économie, voire qu’ils reprennent du service politique à l’occasion des prochaines élections, annoncées pour juillet. A la veille du « vendredi de rage » qui a conduit le chef du gouvernement Mohamed Ghannouchi à démissionner, le 27 février, Asma est allée manifester à la Kasbah, sous les fenêtres du Premier ministre. Pour réclamer le départ du gouvernement des anciens de l’équipe Ben Ali. Sur la banderole qu’elle brandissait comme un étendard, on pouvait lire : « We can we do ». Source : « Les echos » Le 07-03-2011 Lien :
http://www.lesechos.fr/economie-politique/monde/dossier/0201200851388-tunisie-le-temps-des-coleres-sociales.htm
La “débénalisation” à l’oeuvre en Tunisie depuis le 14 janvier
De la révision de fond en comble de la Constitution, qui lui octroyait un pouvoir quasi-absolu, aux rues à sa gloire rebaptisées, la “débénalisation” est à l’oeuvre en Tunisie depuis la chute du président Zine ben Ali, à la mi-janvier. La semaine passée, le président du Parlement, qui assure l’intérim à la tête de l’Etat depuis le succès de la “révolution du jasmin”, a annoncé l’élection le 24 juillet d’une assemblée constituante pour tenir compte des “aspirations du peuple”. Le Parlement, dominé par les partisans de l’ex-président, est de facto dissous et les ministres qui ont survécu à sa chute, y compris le Premier ministre Mohamed Ghannouchi, ont été, l’un après l’autre, contraints à la démission. Dans le centre de Tunis, la place et la rue du 7 novembre 1987, date du renversement par Ben Ali du premier président tunisien Habib Bourguiba, ont été rebaptisées respectivement place du 14 janvier 2011 et avenue Mohamed Bouazizi. Bouazizi est le nom du jeune chômeur diplômé réduit à vendre des fruits et légumes sur les marchés et dont l’immolation par le feu est à l’origine de la “révolution du jasmin”. Le 14 janvier marque l’apogée de celle-ci, avec la fuite de Ben Ali vers l’Arabie saoudite. Interdits de longue date en Tunisie, des livres dénonçant l’ampleur de la corruption sous le règne de Ben Ali et de son influente épouse Leïla Trabelsi ont remplacé dans les librairies les ouvrages à la gloire du couple présidentiel. “Nous en vendons à tour de bras. Vous voyez celui-ci? C’est un best-seller, maintenant!” s’extasie Hajji Adel, un employé d’une grande librairie du centre en désignant la couverture du livre intitulé “Ben Ali, le ripou”. “VOUS POUVEZ IMAGINER, APRÈS 23 ANS?” Sur des murs naguère immaculés de la capitale, des tagueurs ont griffonné des slogans comme “Vive la révolution!”, “À bas le RCD!” ou “Dehors le RCD!” – références à l’ancien tout-puissant Rassemblement constitutionnel démocratique, qui monopolisait le pouvoir sous Ben Ali mais est désormais suspendu, dans l’attente de sa dissolution par la justice. Dans le même temps, huit partis politiques fraîchement créés ou interdits sous l’ancien régime ont été légalisés par les autorités transitoires, y compris le mouvement islamiste modéré Ennahda (Renaissance), impitoyablement réprimé par Ben Ali. Les portraits du “raïs de Carthage”, jadis omniprésents, ont été décrochés des murs des magasins et des administrations et, aux terrasses des cafés tunisois, les consommateurs n’ont plus peur que leurs discussions politiques soient écoutées par la police à la solde du régime. Pourtant, la présence des forces de sécurité est tout sa uf discrète sur l’avenue Habib Bourguiba, la principale artère de la capitale, qui porte encore les stigmates des affrontements entre policiers et manifestants des deux mois et demi écoulés. Le ministère de l’Intérieur et l’ambassade de France, qui donnent sur l’avenue, sont protégées par des chars et des rouleaux de fils de fer barbelés. Alentour, des éclats de vitrines brisées jonchent encore la chaussée. A la tombée de la nuit, les rues du centre se vident rapidement et les restaurants ferment tôt le soir. Depuis les troubles, les touristes ont déserté en grande partie le souk de Tunis. Mais Nasser, un marchand de tapis, se dit confiant qu’ils vont bientôt revenir et ne regrette nullement les événements. “Bien sûr que nous sommes contents du renouveau. Vous pouvez imaginer cela, après 23 ans?” Source: “Challenges” Le 07-03-2011 Lien:
http://bourse.challenges.fr/news.hts?urlAction=news.hts&idnews=RTR110307_007260B5&numligne=8&date=110307
Tunisie : sur la piste des clans Ben Ali – Trabelsi
Les uns ont réussi à prendre la fuite. Les autres ont été arrêtés et incarcérés. Certains ont été assignés à résidence. Le point sur l’enquête visant les membres des familles Ben Ali et Trabelsi, et leurs principaux affidés. Depuis la chute et la fuite de Zine el-Abidine Ben Ali, le sort réservé aux membres de son clan et de celui de son épouse, Leïla Trabelsi, intéresse tout particulièrement les Tunisiens, qui, méfiants et sourcilleux, veulent absolument savoir ce qu’ils sont devenus. Les deux clans comptent pas moins de 142 membres, y compris par filiation et par alliance. En tête des prédateurs figurent les frères et sœurs de Zine et de Leïla, une dizaine chacun, et leurs enfants. La Banque centrale (BCT) a ainsi recensé cent quatre-vingts entreprises appartenant aux deux clans. Celles-ci ont bénéficié de 2,5 milliards de dinars (1,3 milliard d’euros) de crédits bancaires, la plupart du temps sans garanties, soit 5 % des financements du secteur. Au cours des derniers mois, quatre grands projets ont mobilisé plus de la moitié de ces crédits : Carthage Cement, propriété de Belhassen Trabelsi ; une sucrerie lancée par le même Belhassen Trabelsi ; l’acquisition par Sakhr el-Materi de 20 % de l’opérateur mobile Tunisiana ; le financement des 51 % de participations du couple Cyrine Ben Ali et Marouane Mabrouk dans le capital de l’opérateur Orange Tunisie, lancé en partenariat avec France Télécom. Le grand déballage n’en est cependant qu’à ses débuts, les familles gravitant autour de Ben Ali ayant acquis des positions dominantes dans tous les secteurs de l’économie : concessions automobiles, télécommunications, banque et assurance, transport aérien, immobilier, médias, grande distribution, agriculture et agroalimentaire. Sur les 3 300 dossiers reçus à ce jour par la Commission d’investigation sur les faits de corruption et de malversations, présidée par Abdelfattah Amor, une centaine seulement ont été examinés. Mais déjà, Amor est catégorique : les familles entourant Ben Ali « avaient tous les droits : autorisations indues, crédits sans garanties, marchés publics, terres domaniales… […] Le mode de gouvernement n’était ni présidentiel ni présidentialiste, mais bel et bien totalitaire ». Aux yeux de Ben Ali, il y avait d’un côté « ses » familles, de l’autre les Tunisiens. Rien qu’à l’étranger, sans parler de Dubaï, où ils avaient l’habitude de placer leur argent, les avoirs du clan Ben Ali jusque-là identifiés sont estimés à 80 millions de francs suisses (62 millions d’euros) à Genève, et entre 10 et 20 millions de dollars canadiens (7,4 et 14,8 millions d’euros) au Canada. Mais quid de leurs détenteurs ? Lesquels d’entre eux ont réussi à s’enfuir pour échapper aux poursuites ? Lesquels ont été arrêtés et sous quels chefs d’inculpation ? Qui est en résidence surveillée ? Qui n’a pas été inquiété ? En fuite Outre Zine el-Abidine Ben Ali (74 ans) et son épouse Leïla Trabelsi (53 ans), qui ont profité de la voie de sortie que leur a offerte l’armée le 14 janvier, deux barons du clan se trouvent aujourd’hui à l’étranger : Belhassen Trabelsi, le très influent frère de Leïla, et Sakhr el-Materi, gendre de l’ex-président. Le premier, surnommé « le parrain », a pu, quelques heures avant la fuite de Ben Ali, embarquer in extremis avec son épouse, Zohra Djilani, et leurs quatre enfants, ainsi que leur nounou asiatique, à bord de son yacht, le Sophie, amarré dans le port de plaisance de Sidi Bou Saïd, à quelques minutes du domicile familial. La veille, il avait chargé le commandant du yacht, Ilyes Ben Rebeh, de faire le plein de carburant. Le matin du 14 janvier, après les formalités d’usage, le Sophie quitte le port. À peine sorti du golfe de Tunis, Belhassen ordonne au commandant de couper la radio et de ne pas répondre aux appels sur son téléphone portable, avant de lui enjoindre de mettre le cap sur le port de Trapani, en Sicile. Une fois arrivé à destination, il renverra le yacht et Ben Rebeh en Tunisie. On ne retrouvera la trace des fuyards que le 21 janvier, à l’aéroport de Montréal, au Canada, où ils atterrissent à bord d’un jet privé. Belhassen et les siens s’installent au Château Vaudreuil Suites Hôtel, dans les environs de la métropole québécoise. Mais à la suite de manifestations hostiles d’étudiants tunisiens dans la ville, ils sont obligés de quitter les lieux et résident depuis dans un lieu resté secret dans la région de Montréal. La Tunisie a demandé le gel des avoirs de Belhassen au Canada, ce qui a été fait, mais aussi son extradition, ce qui est plus long à obtenir, l’intéressé étant titulaire d’un permis de séjour permanent. Hamadi Touil, son bras droit et prête-nom dans les affaires, a quitté Tunis le 15 janvier muni d’un passeport diplomatique pour se rendre également – via Paris – à Montréal, où il est arrivé le 17 janvier. Mohamed Sakhr el-Materi, 29 ans, était au Canada le 11 janvier pour une échographie de sa femme, Nesrine, enceinte. Après avoir déposé en route son épouse et leur fille dans un hôtel proche de Disneyland, dans la région parisienne, il est retourné à Tunis le 13 janvier pour assister à la session plénière de la Chambre des députés convoquée pour apporter son soutien à Ben Ali face à la révolte populaire. Ce jour-là, Sakhr jure qu’il est prêt à rendre des comptes devant la justice à propos de son enrichissement, jugé indécent, depuis son mariage avec la fille de Ben Ali. Mais dans la matinée du 14 janvier, il quitte le pays pour Dubaï à bord du jet privé d’Aziz Miled. Après la fuite de Ben Ali en fin de journée, Materi rejoint son épouse et sa fille à Paris pour les emmener vers une destination inconnue. Ils se trouveraient aujourd’hui à Dubaï, le séjour au Canada, où ils possèdent une propriété, se révélant hasardeux. Arrêtés et/ou poursuivis La plus grosse prise est l’arrestation, le 14 janvier au soir, juste après la fuite de Ben Ali, du général Ali Seriati, patron de la garde présidentielle, et de quatre de ses comparses. Seriati est aujourd’hui détenu dans une cellule individuelle à la base aérienne d’El-Aouina, mitoyenne de l’aéroport de Tunis-Carthage. Il est accusé de « complot contre la sûreté nationale, agressions préméditées, incitation à la violence et utilisation d’armes, meurtres et pillages sur l’ensemble du territoire ». Il était notamment le chef des snipers de triste mémoire qui ont abattu de sang-froid des manifestants désarmés à Sidi Bouzid, Kasserine et Thala, au plus fort de la révolte populaire. Il est par ailleurs soupçonné d’être le planificateur d’une série d’attaques destinées à semer le chaos dans le pays, notamment contre des édifices publics et des propriétés privées. Deux semaines plus tard, c’était au tour de Rafik Belhaj Kacem d’être interpellé à son domicile, où il était en résidence surveillée. L’ancien ministre de l’Intérieur, qui avait conduit la répression sanglante de la contestation, est réputé proche de Seriati, Leïla, Abdelwahab Abdallah et Abdallah Kallel, un clan dans le clan dont on devrait reparler. D’autres arrestations ont été opérées. Le jour même de la fuite de Ben Ali, une trentaine de membres du clan, alertés par Leïla, ont tenté de prendre le premier vol pour l’étranger, mais n’ont pu embarquer faute de place. Ils ont été « cueillis » dans le salon VIP de l’aéroport de Tunis-Carthage, où l’armée les avait opportunément regroupés. Vingt-cinq d’entre eux ont été maintenus en détention à la caserne d’El-Aouina pour tentative d’exportation illicite de devises. Parmi eux figurent le neveu terrible de Leïla, Imed, l’un de ses frères, Mourad Trabelsi, ainsi que deux de ses sœurs, Samira épouse Meherzi et Jalila épouse Mahjoub. Ont également été arrêtés Kaïs et Sofiène Ben Ali, fils de feu Moncef Ben Ali, le frère de l’ex-président, condamné en France pour trafic de drogue (dans l’affaire de la « couscous connection »). Neuf membres du clan sont poursuivis pour « trafic, possession et commerce d’armes », dont Belhassen Trabelsi, Sakhr el-Materi (tous deux en fuite), Mourad Trabelsi et Hayet Ben Ali, la sœur du président déchu, qui réside en Allemagne. Enfin, douze autres sont accusés d’« acquisition illégale de biens mobiliers et immobiliers en Tunisie et à l’étranger » : Ben Ali, son épouse Leïla et des frères, sœurs et neveux de celle-ci – Belhassen, Moncef, Imed, Naceur, Adel, Moez, Jalila, Houssem et Samira. Sakhr el-Materi est également cité. En résidence surveillée Les trois principaux collaborateurs politiques de Ben Ali ont été assignés à résidence, et le bureau politique de l’ex-parti au pouvoir, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), dont ils étaient membres, a été dissous. Abdelwahab Abdallah, le « ministre de la propagande », n’était déjà plus à son bureau le jour de la fuite de Ben Ali. Il s’est caché plusieurs jours chez l’un ou l’autre de ses proches et a même fait courir le bruit qu’il avait pu fuir en France et se trouvait chez l’un de ses amis parisiens. Il sera finalement localisé dans la banlieue de Tunis une semaine plus tard et placé en résidence surveillée, mais il demeure injoignable à son numéro habituel de téléphone portable. Son épouse, Alya, a été littéralement chassée de la présidence de la Banque de Tunisie, à la tête de laquelle son mari l’avait propulsée avant qu’elle n’introduise d’autorité Belhassen Trabelsi dans le capital de la banque afin de lui permettre d’en prendre le contrôle. Abdallah Kallel, autre faucon du régime de Ben Ali, a été « démissionné » de la présidence de la Chambre des conseillers (Sénat) pour être assigné à résidence. Maître de la « cuisine politique », Abdelaziz Ben Dhia, qui se trouvait au palais de Carthage le 14 janvier, a appris la fuite de Ben Ali devant son écran de télévision. Depuis, il est chez lui sous étroite surveillance. En liberté D’autres personnalités proches de Ben Ali ont été simplement relevées de leurs fonctions, à l’instar des membres du cabinet présidentiel, dont notamment Iyadh Ouederni, ministre-directeur du cabinet présidentiel, qui était aussi au service de Leïla. Les trois filles de Ben Ali nées de son premier mariage avec Naïma, fille d’un ex-général, ainsi que leurs maris, n’ont pas été inquiétées : Dorsaf épouse de Slim Chiboub, Ghazoua épouse de Slim Zarrouk et Cyrine épouse (en état de séparation depuis un an) de Marouane Mabrouk. Néanmoins, Slim Chiboub, qui se trouvait en Libye au moment de la fuite de Ben Ali, n’est toujours pas rentré au pays. Si les principaux barons du clan et leurs proches affidés sont bien connus, les personnes qui se sont enrichies à la faveur de leurs liens avec les Ben Ali et les Trabelsi, ou qui ont été leurs complices actifs au sein des institutions, de l’administration, des banques et de l’appareil d’État le sont moins ou pas du tout. Il appartiendra à la justice de déterminer la responsabilité des uns et des autres. C’est pourquoi Mohamed Ghannouchi, Premier ministre du gouvernement provisoire, a rappelé que, conformément aux règles du droit et au principe de la séparation des pouvoirs, les autorités ne pouvaient pas livrer des noms en pâture sans décision judiciaire. Du coup, nombreux sont les Tunisiens qui, gagnés par la suspicion, se demandent si ceux qui ont failli à leur mission ou profité de leur position auront à s’expliquer un jour devant la justice pour que le « système Ben Ali » ne puisse plus renaître de ses cendres, pas même sous une forme déguisée. Source : « Jeune Afrique » Le 07-03-2011 Lien :
http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJA2616p046-050.xml0/enquete-arrestation-justice-tunisietunisie-sur-la-piste-des-clans-ben-ali-trabelsi.html
Tunisie: Ennahda s’accommoderait de l’interdiction de la polygamie
Dans un communiqué adressé à Business News, mardi 8 mars 2011 à l’occasion de la Journée internationale de la Femme, le parti « Ennahdha » se félicite du rôle de la femme dans la réussite de la dernière Révolution et dans la longue lutte contre la dictature et la répression. Dans le même communiqué, on relève notamment l’insistance sur le rôle joué par la femme au sein du mouvement d’Ennahdha et dans les différentes scènes de résistance contre l’occupant dans le monde, notamment la lutte de la femme palestinienne. Ennahdha, souligne encore le communiqué, estime que toute réforme politique et sociale doit être basée, entre autres, sur la fondation d’un Etat démocratique où sont respectés les droits et les devoirs de citoyenneté sans discrimination de quelqu’ordre que ce soit, racial, religieux ou ethnique. Il met l’accent sur la nécessité d’une relation complémentaire entre l’homme et la femme et non conflictuelle. D’autre part, le mouvement Ennahda soutient les acquis de la femme tunisienne, y compris l’interdiction de la polygamie instituée par le Code de statut personnel (CNP), a affirmé mardi 8 mars 2011, Noureddine Bhiri, membre du bureau politique d’Ennahda, interrogé par l’AFP à l’occasion de la Journée mondiale de la femme. “Nous ne trouvons rien dans le Code du statut personnel qui soit en contradiction avec nos convictions, nos principes et nos valeurs”, a-t-il déclaré
Source: “Business News” Le 08-03-2011 Lien:
http://www.businessnews.com.tn/Tunisie-Ennahda-saccommoderait-de-linterdiction-de-la-polygamie,520,23857,1
Tunisie : Les cliniques privées de Sfax tirent la sonnette d’alarme
Dans une lettre adressée au président de la Chambre syndicale nationale des cliniques privées de Tunisie, les membres de la Chambre syndicale des cliniques privées de Sfax tirent la sonnette d’alarme. «Le secteur sanitaire privé traverse une période critique, depuis le début du mois de janvier jusqu’à ce jour», regrettent les signataires de la lettre. La révolution tunisienne à la quelle s’ajoutent les émeutes libyennes ont fortement impacté l’activité des cliniques privées dans cette région connue pour accueillir des milliers de patients libyens par an. La baisse de l’activité affecte considérablement le chiffre d’affaires du secteur. Selon Youssef Ghayaza, président de la Chambre syndicale des cliniques privées de Sfax, la meilleure des cliniques réalise 30% de son chiffre d’affaire habituel, ce qui ne permet en aucun cas de faire face aux dépenses fixes. Ce qui constitue une menace sérieuse pour l’emploi dans la région. A noter que Sfax compte dix cliniques privées qui emploient directement près de deux mille personnes entre cadres médicaux et paramédicaux et ouvriers. On compte également 500 médecins en exercice. Une situation que les adhérents de la Chambre qualifient de «désastreuse», conduisant à des problèmes sociaux causées par d’éventuelles fermetures de certaines cliniques privées, voire au blocage du système sanitaire privé et au freinage d’un secteur qui n’a cessé de contribuer au développement économique de la région. M. Ghayaza affirme qu’une réunion se tinedra la semaine prochaine pour discuter des solutions et remèdes éventuels pour sortir de cette situation.
Source: “wmc” Le 08-03-2011 Lien:
http://www.webmanagercenter.com/management/article-102988-tunisie-les-cliniques-privees-de-sfax-tirent-la-sonnette-d-alarme
Combattre l’islam ou le reformer en Tunisie et ailleurs
La campagne pour une Tunisie laïque est bien compréhensible. Elle émane d’une peur d’un gouvernement islamiste qui brimerait les libertés individuelles et priverait tous les citoyens mais surtout toutes les citoyennes de leurs droits de base. Vu l’énormité du danger que constituerait un tel futur pour la Tunisie, il est compréhensible de vouloir à tout prix prendre ses distances de la religion, et vouloir utiliser les mesures qu’il faut pour empêcher les partis islamistes de gagner du terrain politique.
Plutôt que de fuir l’identité musulmane, il vaut mieux se l’approprier et la réformer. Plutôt que de laisser les extrémistes prendre la religion en otage, il faut la réclamer et l’occuper avec des voix modérées, modernes, raisonnables et raisonnées. L’état actuel des choses ou notre religion nous embarrasse est une conséquence de la politique de répression. Les extrémistes se sont épanouis grâce à l’oppression de la majorité. Les dictatures ont étouffé le centre majoritaire ne laissant survivre que les corrompus et les extrémistes. Notre silence était leur arme. Il est temps de réoccuper l’espace qui était écrasé par la dictature. Nous ne sommes pas nécessairement barbus ; nous ne sommes pas nécessairement voilées ; nous ne sommes pas en colère. Nous sommes farouchement contre l’assujettissement des femmes ; nous sommes pour les valeurs nobles telles que la tolérance, le pardon, la générosité, l’égalité, l’évolution et la flexibilité. Nous sommes pour la joie de vivre, pour la civilité, pour la fierté d’un travail bien fait. Nous sommes contre la rancune, la haine et la vengeance. Nous sommes contre tout ce qui nuit à la dignité de tout être humain quelle que soit sa position économique, ethnique ou sociale. Nous sommes de vrais musulmans mais avons laissé des extrémistes prendre l’islam en otage. Les khomeïnistes de l’Iran et les wahhabites d’Arabie saoudite n’ont pas le monopole de l’islam. Leur islam est obscurantiste et anti-rationnel. Ils représentent l’islam au même degré que les mormons fondamentalistes représentent la religion chrétienne. Il y a des sectes mormons qui pratiquent la polygamie, qui croient au don de leurs filles précoces à leur chef religieux ; leurs points de vue ne portent tort qu’à eux et non au reste des chrétiens. Cela fait au moins cinq siècles que les chrétiens ne se définissent plus comme une communauté monochrome d’accord sur tout. Ils gardent l’identité commune dont ils sont tous fiers, mais ils ont un choix large de positions, opinions et pratiques sur toutes les questions sociales, légales et politiques. Quand Martin Luther King a objecté à la corruption de l’Eglise catholique et a initié le mouvement de réforme, le résultat a été la réforme non seulement des protestants mais aussi de l’Eglise catholique traditionnelle. Il en va de même pour nous. “DÉFINISSONS NOTRE RELIGION” Oui à la laïcité, mais il ne faut pas tomber dans l’amalgame et renier notre identité culturelle et religieuse. C’est notre histoire et notre patrimoine. Il faut la regarder en face, la critiquer, la réformer, l’habiter et la définir plutôt que de la rejeter. Les mosquées nous appartiennent ; nous aurions tort de continuer à les abandonner aux extrémistes. Il est temps de réformer l’islam et le ramener au XXIe siècle. Nous avons commencé une révolution qui continue à résonner dans tout le Moyen-Orient. Réformer l’islam est une composante importante de cette révolution : définissons notre identité, notre gouvernement et notre religion. Ne laissons pas la tâche aux wahhabites et aux khomeïnistes. C’est à nous de la définir ; c’est à nous de les définir. Il n’est pas nécessaire que nous arrivions tous à la même définition ; c’est cela en quelque sorte la laïcité. Certains d’entre nous préféreront garder une version très traditionnelle ; d’autres opteront pour une forme très progressiste ; d’autres ne voudront pas de religion du tout. Vive le respect, vive la civilité, vive la démocratie.
Source: “Le Monde.fr” Le 08-03-2011 Lien:
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/03/08/combattre-l-islam-ou-le-reformer-en-tunisie-et-ailleurs_1486825_3232.html
Tunisie: le “Oui, mais” des internautes
Selon une première enquête en ligne, les Tunisiens considèrent que le gouvernement de transition est un moindre mal. Une toute jeune entreprise tunisienne spécialisée dans les études en ligne, MDWEB, a réalisé, du 29 janvier au 3 février une enquête, auprès d’un échantillon constitué de façon aléatoire, et composé d’un peu plus d’un millier d’internautes tunisiens dont la moitié (53 %) âgée entre 24 et 39 ans. Une première au sortir d’une dictature qui interdisait de critiquer le despote. Sans prétendre à la rigueur des sondages réalisés par des instituts aguerris dans des pays où cet exercice est pratiqué de longue date, leur étude n’en donne pas moins quelques tendances intéressantes. Le gouvernement transitoire n’est pas rejeté mais il ne suscite pas l’enthousiasme Un peu plus de la moitié des internautes interrogés (52 %) pensent qu’il faut laisser ce gouvernement travailler. Pour autant, plus d’un tiers (35 %) souhaitent le départ des anciens membres de l’ex-parti au pouvoir et un peu moins du quart admettent qu’ils soutiennent leurs nouveaux dirigeants, faute de mieux: “Il vaut mieux avoir un gouvernement imparfait que pas de gouvernement du tout”. Seuls 8 % affirment que le gouvernement est illégitime et doit partir. Priorité à la sécurité et au blocage des avoirs de Ben Ali. La révision de la Constitution et la préparation des prochaines élections ne sont jugées prioritaires que pour un peu plus du tiers des personnes interrogées (39 % et 34 %). En revanche, 60 % inscrivent au sommet de l’agenda du gouvernement le retour de la sécurité, plus de la moitié (52 %) cite le “redémarrage de l’économie tunisienne” et la même proportion met en avant la nécessité de “bloquer les avoirs à l’étranger de la famille et des proches de l’ancien président et les faire revenir en Tunisie”. La moitié encore (51 %) privilégie les enquêtes sur la corruption, les fraudes et les trafics et 40 % la liberté d’expression.
Un optimisme mesuré 40 % sont convaincus que le peuple tunisien saura “gérer au mieux cette période de transition” et 41 % estiment que le pays a des ressources économiques suffisantes pour repartir. Le délai de six mois avant la prochaine échéance électorale est jugé suffisant pour 58 % des internautes interrogés. Seule 1 personne sur 3 considère que le gouvernement doit être prorogé au-delà de l’été. Vive la liberté et le pluralisme Interrogés sur ce que représente pour eux la démocratie, les internautes sont 70 % à citer la liberté d’expression et une justice équitable. Plus de la moitié y ajoute le respect des droits de l’homme et de la loi ainsi que des élections libres. Plus surprenant, dans un pays arabe, ils sont 33 % à retenir la séparation de l’Etat et de la religion et 24 % la liberté de pratiquer la religion de leur choix. L’enquête de MDWEB portait aussi sur la façon dont s’informent ces internautes tunisiens. 58 % d’entre eux citent les chaînes de télévision internationales – parmi eux, 88 % regardent en priorité Al Jazeera et 70 % France 24 en arabe. Par ailleurs, 54 % s’informent via les réseaux sociaux et 40 % lisent sur Internet la presse étrangère. Les chaînes de télévision tunisiennes ne recueillent que 23 % de leurs suffrages, tandis que les journaux et magazines tunisiens ne sont lus que par 6 % des sondés.
Source : « L’express » Le 08-03-2011 Lien :
http://www.lexpress.fr/actualite/monde/tunisie-le-oui-mais-des-internautes_969647.html
Conseil national de la Ligue Tunisienne de Défense des Droits de l’Homme (LTDH) La Ligue, enfin libérée !
• Le 6ème congrès se tiendrait en mai 2011 • L’interdiction de la police politique vivement applaudie – Après plus de dix ans de crise et 34 procès intentés contre elle, la Ligue Tunisienne de Défense des Droits de l’Homme (LTDH) renaît de ses cendres. Le 17 janvier 2011, le gouvernement provisoire constitué à la suite de la Révolution du 14 janvier, a annoncé « la levée définitive de l’interdiction de l’ensemble des activités de la Ligue sur tout le territoire tunisien ». Ainsi, la LTDH a pu tenir dimanche et lundi, son conseil national. Le dernier s’est réuni sous une haute surveillance policière au siège de la Ligue, le 21 août 2005. Un débat riche et animé a caractérisé les discussions du Conseil national. Cerise sur le gâteau : l’annonce, hier, après-midi, de la suppression de la police politique a été vivement applaudie. Les participants à ce conseil ont entonné à plusieurs reprises l’hymne national. Anniversaire Présidé par Me Mokhtar Trifi, le président de la Ligue, les membres du Conseil national ont évoqué les années de « harcèlement » dont a fait l’objet la LTDH sous le régime du président déchu, puis ils ont discuté des orientations après la Révolution et ont décidé, si les moyens matériels et organisationnels le permettent, de tenir le 6ème congrès de la Ligue en mai 2011 et de préférence le 5 mai, qui coïncide avec la célébration du 34ème anniversaire de la Ligue. En effet, la LTDH a été fondée en 1976 par des personnalités progressistes et démocrates et elle a été légalisée le 5 mai 1977. Composée de juristes, de professeurs, de médecins, d’avocats et de journalistes dont l’objectif est l’observation et la défense des droits de l’Homme en Tunisie. En 2000, la Ligue a tenu son 5ème congrès. Mais, ses résultats notamment l’élection d’un comité directeur indépendant n’ont pas plu aux autorités et aux Rcédistes. Des congressistes proches de ces derniers ont introduit un recours en justice. L’annulation du congrès a été prononcée. Mais le comité directeur issu de ce congrès après une décision de la cour d’appel rendue en juin 2001, a pu, malgré une surveillance musclée des autorités, poursuivre ses activités et préparer la tenue du 6ème congrès. Il a ainsi décidé en 2005 la fusion de certaines sections. Sept de ces sections contrôlées par le RCD ont saisi la justice contre l’opération de fusion. Bien sûr, le tribunal leur a donné raison et la Ligue qui a décidé de tenir son 6ème congrès les 10, 11 et 12 septembre 2005 se trouve de nouveau bloquée, ses activités gelées et ses sièges régionaux fermés. La Révolution du 14 janvier qui a libéré le peuple de la dictature a libéré la LTHD, la doyenne des ligues des droits de l’Homme en Afrique et dans le monde arabe. Néjib SASSI Les présidents de la Ligue • 1977-1988 : Dr Saâdeddine Zmerli • 1988-1989 : M.Mohamed Charfi • 1989-1994 : Dr Moncef Marzouki • 1994-2000 : Me Taoufik Bouderbala • 2000-… : Me Mokhtar Trifi
Source: “Le Temps” Le 08-03-2011 Lien:
http://www.letemps.com.tn/article-53771.html
Entretien avec Yadh Mahjoubi
Les médias, ainsi que vous-même, utilisent souvent l’appellation « révolution par l’internet » pour qualifier la révolution tunisienne, pensez-vous que celle-ci n’aurait pas pu aboutir sans l’aide des réseaux sociaux tels que facebook, twitter, … ? C’est certainement un élément déterminant dans cette révolution. Cependant, je ne la qualifierais pas seulement de révolution par l’internet. Des soulèvements populaires dans d’autres régions ont eu lieu il n’y a pas si longtemps. La dernière en date était il y a deux ans, dans le bassin minier de Gafsa, une ville du sud tunisien où l’on retrouve une forte exploitation de phosphate. Cette révolte avait été réprimée dans le sang. Facebook et Twitter existaient déjà, cela aurait pu être le déclic, cependant, la conjoncture des événements de l’époque ne permettait pas un tel soulèvement. Les réseaux sociaux ont été déterminants mais pas exclusifs. Certes, c’est un élément qui a beaucoup aidé, mais il ne faut pas réduire cela à une « révolution par l’internet », bien que ce nom soit très attractif pour les médias. Selon vous, quels étaient les intérêts de la France de défendre et soutenir le régime de Ben Ali ? C’est une longue histoire. Malheureusement, durant les derniers mandats présidentiels français (il faut remonter jusqu’à Valéry Giscard d’Estaing), les intérêts économiques ont toujours été mis en avant, au-delà même des valeurs de la France, soutenues et érigées par De Gaulle. La France est le premier partenaire économique de la Tunisie, aussi bien sur l’import que l’export. Beaucoup de sociétés françaises sont présentes dans le pays. Il y a tout un lien historique qui lie ces deux pays. L’enseignement universitaire a souvent été favorisé par l’Etat français, notamment lorsque la Tunisie est devenue indépendante. En effet, dans certaines filières, les études supérieures se faisaient en France. Les politiques ont occulté l’élément essentiel que sont les droits de l’homme. Alors que des officiels étaient présents (par l’intermédiaire des ambassades), que différentes rencontres politiques et manifestations économiques ont eu lieu, les valeurs républicaines auxquelles aspirait le peuple tunisien n’ont pas été prises en compte. Par ailleurs, cette dernière présidence a évincé l’appareil diplomatique français traditionnel. Sarkozy a placé des hommes proches de lui, n’ayant pas cette culture diplomatique. Ils n’ont donc pas pu déceler ce qui allait se passer en Tunisie. Il persiste dans son erreur en nommant l’ambassadeur français Boris Boillon. Quelle a été votre sentiment face au communiqué de presse de l’Elysée annonçant : « prendre acte de la transition constitutionnelle annoncée par le Premier ministre Ghannouchi »? C’était une position vraiment minimaliste, où l’on ne sent pas la présence de la France aux côtés de la révolution tunisienne. C’est très décevant. Vous qui êtes tunisien, comment est perçue la France en Tunisie ? C’est un sentiment très mitigé. Les positions officielles françaises, que ce soit celles de Sarkozy, et ne parlons pas de ses ministres (Michèle Alliot-Marie, Frédéric Mitterrand, etc), sont très mal ressenties par le peuple tunisien. Cependant, vous savez bien que les officiels français ne représentent pas la France dans sa globalité. La solidarité et les messages de soutien des Français ont été appréciés à leur juste valeur par les Tunisiens. Cette révolution a été saluée par le peuple, en grande majorité je pense, alors que les politiques sont passés à côté. D’après vous, comment la France pourrait-elle améliorer son image aux yeux du peuple tunisien ? La France doit mettre en œuvre des actions concrètes, favoriser une aide économique afin de soutenir cette transition démocratique. Comme l’appui, par exemple, du statut avancé de la Tunisie au niveau de l’Union européenne. On a vu récemment des arrivées massives de Tunisiens sur les côtes italiennes, plus particulièrement à Lampedusa. Pensez-vous que le gouvernement transitoire arrivera à rétablir l’ordre ? Cela représente seulement 2 000 personnes qui ont pu profiter d’un « laisser-aller », peut-être même d’une connivence de certaines autorités locales encore en place. Tout n’a pas été démantelé après Ben Ali. Les passeurs en ont profité pour mener cette opération. Mais cela reste un « épiphénomène », la situation va se calmer. Est-ce que la mise en place d’un nouveau gouvernement et la transparence dans la gestion de l’Etat permettra de redonner confiance aux partenaires économiques de la Tunisie ? Au niveau économique, il est vrai que le monde entier est soumis aux lois de la finance internationale. Les agences de notations ont tout de suite abaissé la note de la Tunisie, la jugeant instable financièrement. Les partenaires, qui sont au fait des événements et qui ont la volonté de se mettre au courant, n’ont pas à s’inquiéter sur la stabilité du pays. Je ne m’inquiète pas sur ce point car les Tunisiens ont une base solide au niveau administratif, et que le pays a prouvé qu’une coexistence pacifique des régions et religions était possible. On observe une différence dans les manières de réagir de l’Etat et du pouvoir militaire dans les autres pays arabes qui se sont soulevés à la suite de la « révolution de Jasmin », comme l’exemple de la Libye où des raids aériens et des attaques à l’arme lourde sont perpétrés contre la population. Quel regard portez-vous sur cette situation ? Ce régime est connu depuis très longtemps pour être une dictature sans nom. Il montre son vrai visage aux yeux du monde entier en utilisant des mercenaires et assassinant des civils sans défense par les armes lourdes. Ce qui se passe en Libye est très grave. En ce qui me concerne, j’ai été personnellement impliqué dans ce régime vu la position qu’occupait mon père. Il était responsable du contre-espionnage tunisien durant plusieurs années. Au vu de ce que j’ai vécu, je n’adopterai pas seulement une position d’opposant ou démocrate tunisien, mais celle de quelqu’un plus ou moins impliqué dans la lutte contre le régime libyen. Mon père a eu à combattre ces filières d’agents qui essayaient de déstabiliser le pays, il en a fait tomber quelques uns. Lorsqu’il y eût la première tentative d’union « mort-née » Tunisie-Libye en 1974, il s’y est opposé. Kadhafi et ses agents sont revenus à la charge en 1980, en montant une révolte dans le sud tunisien. Le sud du pays a toujours été un foyer de rébellion, et c’est pour cette raison qu’ils avaient tenté d’envahir la Tunisie par cet endroit, en armant des milices et des immigrés. Ces émeutes furent réprimées par l’appareil sécuritaire tunisien, avec l’aide militaire et l’appui logistique de la France. Ce fut une défaite pour Kadhafi. Il avait publié, à l’époque, une liste de responsables tunisiens à éliminer, dont mon père faisait partie. Sa tête avait été mise à prix. J’étais alors étudiant dans le sud de la France. Mon père m’avait demandé de faire très attention car je risquais d’être agressé, ou pire encore, par les services fédéraux libyens en France. Nous connaissions la vraie nature du régime libyen, cela ne date pas d’aujourd’hui. Dans les années 1990, le président Ben Ali a monté un complot contre mon père afin de le destituer de son poste de secrétaire d’Etat à l’Intérieur. Les services secrets libyens l’ont aidé à élaborer cette accusation grossière. D’ailleurs, j’aimerais en faire part dans un récit plus développé, peut être sous la forme d’un livre relatant cette période du régime tunisien. Les Américains, les Anglais, les Français, les Italiens ; tous se sont pressés à la porte du despote libyen pour conclure des contrats faramineux. Leurs implications avec ce régime ont terni leur image dans le monde arabe. Ils ont fait « table rase » de son passé de « financeur du terrorisme ». En ce qui me concerne, je suis très content de ce qui se passe en Libye et espère de tout cœur que les revendications du peuple aboutiront. Cet élan démocratique mené activement sur la toile, peut-il, selon vous, faire évoluer les idées reçues sur la psychose autour de la montée de l’islamisme ? On comprend bien que les populations qui se soulèvent ont très peu de liens avec les islamistes. Bien que ces révoltes arabes aient été stigmatisées, au départ, de « révoltes de la faim » ou encore « révoltes du chômage », ce sont des soulèvements populaires avec des revendications politiques et une aspiration à la liberté et la démocratie. Bien entendu, les islamistes ont essayé de prendre le train en marche. En Egypte, où ils sont le plus présents, cela a été flagrant. Une plate forme commune s’est maintenant instaurée, regroupant différents mouvements, de gauche, de droite et des mouvements dits islamistes, pour composer, ensemble, dans un théâtre qui est celui de la démocratie. Bien qu’étant un exilé de longue date, je ne saurais vous dire comment cela se déclinera dans chaque pays car les situations sont très différentes, mais je reste optimiste. L’islamisme, c’est un mot « fourre-tout ». Il en est de même lorsque l’on mélange « demandeurs d’asile », « immigrés » et « étrangers ». Il faut faire la distinction entre une politique basée sur l’islam et la charia, et l’intégrisme, ou encore le terrorisme islamique. Nous sommes en présence d’un dénouement structuré, avec un peuple qui souhaite travailler dans un cadre politique connu (constitutionnel et laïc) visant à traduire l’opinion générale et non celle d’une partie de la population, comme c’est le cas en Turquie. Je pense qu’il faut rester optimiste, les peuples sont très avertis et aspirent à autre chose que de remplacer une dictature par une autre.
(Source: www.france-terre-asile.org Lundi, 28 Février 2011 16:48) Lien:
http://www.france-terre-asile.org/component/flexicontent/items/item/5116-entretien-avec-yadh-mahjoubi