7 octobre 2011

du message

TUNISNEWS
11 ème année, N°4117 du 07.10.2011
archives : www.tunisnews.net


CCTE: Demandes urgentes pour que les élections du 23 octobre 2011 soient libres et représentatives

Sihem Bensedrine: Lettre ouverte au Premier Ministre Caïd Essebsi – Aucun autocrate n’aura plus jamais de prise sur notre destinée

AP: Tunisie: la traque du clan Ben Ali-Trabelsi se poursuit

Alternatives internationales: Tunisie : Le bal des prétendants

Slate Afrique: Archives du parti de Ben Ali livrent leurs secrets

Espace Manager : Gilles Jacob Lellouche, deviendra-t-il le 1er juif tunisien élu ?

Canoe: Ottawa refuse que les Tunisiens votent

Kapitalis: Les Tunisiens, leur identité plurielle et leur nouvelle constitution

Jeune Afrique: Rachid Sfar : « La Tunisie n’a pas reçu l’appui qu’elle mérite »


 
Collectif de la Communauté Tunisienne en Europe
 
1 rue Cassini – 75014 Paris – Tél. : + 33 1 43 29 68 98

Demandes urgentes pour que les élections du 23 octobre 2011

soient libres et représentatives


 
 
 
Conscient des enjeux des élections du 23 octobre pour l’avenir de notre pays et attachés aux valeurs de dignité humaine et de liberté apportées par notre Révolution, et afin de mieux combattre les méfaits de l’ancien régime, et d’atténuer les souffrances de notre peuple, et les atteintes à sa dignité et à son intégrité physique et morale, notre Collectif demande au Gouvernement de M. Béji Caid Essebsi de :
 
1) Mettre fin immédiatement à l’état d’urgence decrété contre le peuple tunisien par Ben Ali le 14 janvier 2011, quelques heures avant sa fuite de Tunisie. Par cette mesure, le dictateur a cherché à mater la Révolution et spolier les citoyens de leur droit au rassemblement et de manifester pacifiquement. Cet état d’urgence est un résidu injustifiable et contraire à l’esprit et aux buts de la Révolution. En outre, dans le contexte d’élections libres et sereines, cet état d’urgence fait planer sur leur déroulement et surtout sur leur lendemain une ombre d’incertitude et une menace inacceptable.
 
2) La libération immédiate des jeunes révolutionnaires qui ne cessent d’être pourchassés depuis le 14 janvier jusqu’à nos jours, violentés, torturés, incarcérés, et jugés de façon inéquitable sous les gouvernements de Ghannouchi et de Caid Essebsi. De nombreux autres jeunes ont été enrôlés abusivement dans le service militaire suite aux manifestations révolutionnaires. Ces jeunes et tous les citoyens dans leur cas ont droit à participer à des élections pour lesquelles ils ont risqué et payé de leur vie. Sans leur libération immédiate et leur participation à ces élections, celles-ci seraient entachées d’une tare morale et peuvent être à juste titre considérées comme illégitimes et non représentatives;
 
3) Le Chef du Gouvernement M. Béji Caid Essebsi a tenu le 28 septembre 2011 devant Mme Catherine Ashton, la Haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères, lors de la réunion de la Task Force pour la Tunisie, des propos inacceptables en affirmant que : « Les réserves de la communauté européenne concernant les libertés et les droits de l’homme n’ont plus de raison d’être après la révolution du 14 janvier ». Il y a là un déni des violations des droits de l’homme commises depuis le 14 janvier 2011 sous les Gouvernements Ghannouchi et Caid Essebsi, notamment : – de nombreux cas attestés de tortures atroces, – la recrudescence des violences policières notamment l’usage d’armes à feu contre des manifestants pacifiques, – arrestations arbitraires, – agressions contre les militants des droits de l’homme. Tous ces abus ont pourtant été attestés par de nombreuses ONG nationales et internationales, y compris par le Rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits de l’homme dans ses déclarations du 26 mai 2011. Des mesures urgentes pour remédier à cette situation sont indispensables pour des élections sereines et apaisées.
 
M. Caid Essebsi doit prendre ces mesures d’urgence pour mettre fin aux abus commis visant des citoyens pacifiques. Nous attendons de lui la libération de centaines de jeunes révolutionnaires incarcérés et la levée de l’état d’urgence.
 
Le Bureau
 
Paris et Lyon, le 6 octobre 2011

 

 


Lettre ouverte au Premier Ministre Caïd Essebsi

Aucun autocrate n’aura plus jamais de prise sur notre destinée.


 

Monsieur le Premier ministre,

Notre peuple s’apprête à vivre ses premières élections libres. Ceci n’est pas pour plaire à ceux qui ont été accoutumés à des élections dont les résultats sont connus d’avance.  

Face à cette grande inconnue, certains paniquent et complotent contre l’unique institution légitime à naître après la révolution. Ceux d’entre eux qui sont au-devant de la scène s’ingénient à trouver des subterfuges pour limiter son mandat, sa législature et ses compétences. Ceux qui se tiennent dans l’ombre nous menacent de scénarios à l’algérienne, mobilisant les bandits du défunt RCD ainsi que les criminels de la police politique pour fomenter des actes de violences maquillés en attaques de « salafistes », dans une tentative d’accréditer la thèse éculée de Ben Ali, du rempart contre l’extrémisme islamiste.

La tentation de prolonger la vie de votre gouvernement provisoire au-delà du 23 octobre est explicable, le pouvoir est séducteur et corrupteur. Mais la volonté du peuple doit être respectée et votre gouvernement s’était engagé à le faire, même si l’adage veut que les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent. Vous auriez tort d’oublier que notre peuple a fait une révolution contre un régime dictatorial et n’est pas près de se laisser usurper sa liberté par les nostalgiques de l’ancien régime.

Ce fut une révolution pacifique, une marque distinctive qui lui valut le respect du monde entier. La passation s’est faite en douceur et notre pays n’a pas eu à déplorer de coupure d’électricité ou d’eau, d’insécurité grave, de paralysie des transports, de cessation de l’activité économique ou de banqueroute ; notre peuple s’est remis au travail, malgré tous les sabotages organisés par la vieille garde de Ben Ali sous couvert de syndicalisme, et a traversé cette période dangereuse dans la vie des peuples sans trop de dégâts, Dieu merci. Cela a été réalisé dès la première quinzaine de la transition.

Votre gouvernement provisoire avait eu pour tâche de poursuivre ce travail et de gérer les affaires courantes jusqu’à l’élection de la première institution légitime et légale, la Constituante. Après sept mois d’exercice, nous ne voyons aucune transparence dans la gestion de votre gouvernement. Et tout le monde sait que la démocratie c’est d’abord et avant tout la transparence dans la prise de décision.

 

Monsieur le Premier ministre,

Sous réserve de réalisations cachées, votre bilan parait peu reluisant :

oVous étiez supposé prendre des mesures urgentes pour protéger nos archives de la prédation. Il s’agissait de préserver la mémoire de notre pays à travers ces documents qui vont permettre au peuple de demander des comptes aux vrais criminels, aujourd’hui libres de leurs mouvements et aussi puissants que sous l’ancien régime ; au lieu de livrer à la vindicte publique ces pauvres « mounachidin » pour taire les voix qui réclament justice. Ceux qui ont osé tirer la sonnette d’alarme contre la destruction de nos archives se sont retrouvés devant les tribunaux tandis que ceux qui les ont détruites sont promus à des postes de responsabilité.

 

oVous étiez supposé prendre des mesures urgentes pour encourager la liberté d’expression, réformer les médias, éliminer les responsables traditionnels de la propagande et donner les moyens aux médias étatiques et privés d’accompagner la démocratie en marche. Au lieu de cela, les médias sont sous contrôle et les nouveaux Abdelwahab Abdallah veillent au grain, faisant la guerre aux médias indépendants, comme Radio Kalima qui n’a toujours pas de licence malgré vos promesses. Que de temps perdu par une INRIC légalement consultative, transformée en instance de lobbying et à l’occasion en autorité autoritaire de régulation. Les élections seront couvertes par un audiovisuel entièrement mis en place sous Ben Ali. C’est, indéniablement, une réalisation à mettre au crédit de votre gouvernement convaincu par la conversion des barons des médias de Ben Ali en« révolutionnaires-démocrates ».

 

oVous étiez supposé prendre des mesures urgentes pour libérer l’institution judiciaire du carcan des mandarins qui l’ont gouvernée et dévoyée de sa fonction première en la soumettant aux diktats des puissants. Au lieu de cela, vous avez maintenu en place l’équipe de Tekkari qui s’est appliquée à protéger les criminels de l’ancien régime et à abuser l’opinion en offrant des mascarades de procès, comme celui de Ben Ali, indigne de la Tunisie révolutionnaire par son non-respect des normes d’un procès équitable. Les rares affaires enrôlées à l’initiative de vos deux commissions d‘investigation alibi, retenaient des charges ridicules (consommation de drogues ou infraction aux règles de change) tandis que l’essentiel des dossiers, et notamment celui des assassins de nos martyrs, des exactions et des spoliations commises tout au long des deux décennies Ben Ali, était traité dans l’opacité la plus totale.

 

oVous étiez supposé prendre des mesures urgentes pour réformer la police, permettre à cet appareil sécuritaire de se purger des criminels qui l’ont mis au service d’une mafia et de se restructurer afin de répondre aux exigences de la Tunisie post-révolutionnaire. Mais vous avez limogé le seul vrai réformateur, Farhat Rajhi, et nommé un ministre de la réforme dont le rôle est d’enterrer toute réforme. Mises à part les entreprises de déstabilisation menées par les vestiges de l’ancien régime, le bilan sécuritaire est plutôt positif. L’armée tunisienne, qui est une armée républicaine, a joué un rôle décisif pour la protection de notre révolution et la sécurisation de nos frontières menacées par les hordes de Kadhafi. Le peuple a salué son rôle à plusieurs reprises, mais il n’acceptera jamais que l’armée se mêle de politique ou soit tentée par le pouvoir. L’opinion publique ne voit pas d’un bon œil la nomination de militaires à la tête d’entreprises publiques, d’institutions économiques ou des gouvernorats. Et j’espère que ces rumeurs qui donnent le général Ammar comme le nouvel homme fort de la Tunisie sont infondées.

 

Durant ces sept mois d’exercice, vous avez longuement communiqué ; mais jamais vous n’avez rendu compte au peuple de ce que faisait votre gouvernement avec l’argent public et celui alloué par la communauté internationale pour le redressement de la Tunisie ; vous n’avez jamais dit quelles initiatives vous avez prises pour réduire le chômage, favoriser le développement des régions marginalisées, redresser nos hôpitaux ou sauver nos écoles.

Bien au contraire, votre gouvernement provisoire a légiféré à tour de bras, là où il ne devrait pas et sans débat public, engageant l’avenir de notre pays bien au-delà de ce que votre mandat vous octroie.

Vos prises de paroles ont été une série d’injonctions à renoncer à notre liberté d’expression, acquise de haute lutte ; à cesser les manifestations publiques et les sit-in de protestations contre l’inaction de votre gouvernement face aux dossiers brûlants toujours en instance.

Vous vous êtes mis au service de la restauration et de nombreux corrompus notoires sont revenus aux affaires avec votre bénédiction ; tout ce que vous avez réussi à communiquer au peuple, c’est que les snipers sont des fantômes, les martyrs des dommages collatéraux et la révolution une erreur de parcours ;

 

Monsieur le Premier ministre,

Vous avez dernièrement prononcé le discours le plus musclé de votre mandat et menacé d’appliquer à la lettre l’état d’urgence. Notre peuple a fait cette révolution pour que l’Etat de droit soit respecté et la loi appliquée ; menacerd’«appliquer la loi » laisse entendre que votre gouvernement est en train de faillir à son respect.

De nombreux observateurs ont vu dans votre dernier discours des menaces qui me sont personnellement adressées. Outre qu’il s’agit de propos diffamatoires qui tombent sous le coup de la loi, je serais curieuse de savoir de quel crime vous m’accusez? Celui de refuser de me taire sur les méfaits de ceux qui complotent contre la révolution de notre peuple ? Ou d’avoir continué mon activité de militante de droits humains dans les sphères de contre-pouvoir de la société civile, loin de tous les honneurs et les privilèges accordés à la vieille garde de Ben Ali ?

Je mets au défi quiconque – et notamment les services de la police politique qui sont en train de ficeler des dossiers préfabriqués sur moi comme sur d’autres militants patriotes – de fournir un seul fait, un seul acte, un seul élément de preuve non falsifié, établissant mon implication dans une quelconque action de subversion contre mon pays, contre mon peuple et sa glorieuse révolution ou une quelconque activité illégale punissable par la loi tunisienne.

Je ne pourrais pas en dire autant de ceux qui vous entourent et qui se sont improvisés les nouveaux maîtres de la Tunisie révolutionnaire, pensant que les Tunisiens sont amnésiques et ne savent pas qui ils sont véritablement, ni leur niveau d’implication dans l’édification de la dictature de Ben Ali.

Ceux-là qui se sentent aujourd’hui lésés par mon activité citoyenne, en même temps qu’ils multiplient leurs campagnes vénéneuses et mensongères contre moi et les révolutionnaires loyaux, s’auto-désignent comme les rescapés du régime de Ben Ali dont ils cherchent à restaurer les privilèges et les passe-droits. Je n’ai jamais eu d’autre ennemi que ce régime despotique et mafieux. Ils ont toujours, durant des deux décennies, tenté de me salir dans leurs journaux aux ordres ; aujourd’hui encore leurs mercenaires de la plume multiplient leurs campagnes de diffamation dans leurs nouveaux journaux de caniveau comme El Massaa.

Ce sont les mêmes qui ont monté une série de dossiers préfabriqués et m’ont accusée ainsi que Hamma Hammami de « mener le pays droit au mur ». J’avoue n’avoir saisi le sens de cette formule que bien plus tard, lorsque je l’ai vu répétée in extenso dans les PV de police falsifiés, accusant injustement des manifestants qui s’étaient exprimés pacifiquement contre les politiques répressives de votre gouvernement, ou des journalistes honnêtes qui avaient eu le malheur de filmer la barbarie policière réprimant les manifestants.

Ce terme avait pris tout son sens lorsqu’il a été réutilisé lors des « aveux » filmés extorqués au jeune Oussama Achouri en détention et diffusés sur vos « deux chaînes nationales » Nessma et El Watanya, m’accusant de payer des jeunes hooligans pour organiser des violences et piller les magasins en y mettant le feu. Le lendemainAl Jazzeradiffusait le témoignage de ce même jeune, affirmant que ces « aveux »avaient été extorqués sous la torture et qu’il avait été contraint de signer des PV où il me désignait, avec Hamma Hammami, comme l’instigatrice des troubles. Evidemment, votre chaîne nationale qui ne s’est jamais excusée pour ce « reportage » préfabriqué, m’a dénié un droit de réponse, arguant du fait que je n’avais pas été explicitement nommée et m’a interdite d’antenne depuis!

Lorsque le juge Rajhi avait dénoncé un « gouvernement de l’ombre », ces mêmes services m’avaient accusée de l’avoir incité à faire ces déclarations, comme si ce magistrat avait besoin d’un maître à penser pour agir ; la suite des événements a montré l’inconsistance de ces accusations.

En fait, ce qu’ils n’ont jamais admis, c’est que le Conseil National pour les libertés en Tunisie (CNLT) s’engage activement dans un processus de réforme de la police, ce que Rajhi, durant son mandat de ministre de l’Intérieur, a favorisé, conscient du fait que cette réforme ne pouvait être menée à bien sans la participation de la société civile.

 

Monsieur le Premier ministre,

Certains parmi ceux qui vous entourent ont été« heurtés » de voir les représentants du CNLT traverser les couloirs du ministère de l’Intérieur et « accéder » prétendument aux archives de la police politique ; A ceux-là, je voudrais rappeler que c’est le rôle des ONG de droits humains de traiter avec ce ministère qui gère les principaux dossiers relatifs aux violations des libertés fondamentales héritées de l’ancien régime comme celles commises actuellement. Que le dialogue avec les autorités compétentes est une chose naturelle dans les pays démocratiques – et nous nous en sommes félicités lorsque ce dialogue existait.

Concernant l’accès aux archives, qui est un droit, ni le CNLT ni toute autre représentant de la société civile n’y a été autorisé, malgré nos alertes sur les risques de destruction dont on avait eu vent au lendemain de la révolution; Et nous sommes tristes d’apprendre que les premiers à avoir eu récemment accès aux geôles du ministère de l’Intérieur, ce furent des étrangers et non pas les Tunisiens qui ont un légitime droit de regard.

Affirmer que nous interférons d’une quelconque manière dans la vie du syndicat des forces de sécurité est un pur mensonge destiné à faire diversion. Cependant, le CNLT a déclaré publiquement que le droit syndical, pour les agents de police, est un droit fondamental garanti par les instruments internationaux. Un syndicat peut constituer un rempart propre à protéger nos policiers contre les dérives sécuritaires dont ils ont souffert durant l’ancien régime et les prémunir des« instructions » illégales qu’ils avaient reçu de leurs supérieurs pour violer la loi en toute impunité; les menacer de dissoudre leur syndicat n’est vraiment pas d’inspiration heureuse.

Nous avons essayé de promouvoir un processus de justice transitionnelle, dont notre pays a douloureusement besoin ; non seulement pour exiger des comptes des criminels qui ont tué, torturé et violé la loi, faire éclater la vérité sur les assassins de nos martyrs et réhabiliter les victimes, mais aussi afin de tourner au plus tôt la page de cette dictature et engager notre pays dans un processus de réconciliation. C’est l’objectif du Centre de justice transitionnelle fondé avec des femmes et des hommes venus de bords différents, autant de la dissidence que du système lui-même, avec en commun un désir sincère de servir notre pays. Mais votre entourage a réagi par une levée de boucliers, en cherchant à la saboter et en suscitant d’autres « initiatives » commanditées, à la manière de Ben Ali. Ces gens-là oublient que la révolution est passée par là et que toute tentation conspiratrice est vouée à l’échec.

 

Monsieur le Premier ministre,

Si vous en avez le désir, vous savez ce qu’il vous reste encore à faire pour laisser aux Tunisiens un souvenir positif de votre passage aux commandes de notre pays.

Quoiqu’il en soit, sachez, monsieur le Premier Ministre, que la peur a déserté l’esprit et le cœur des Tunisiens et qu’aucun autocrate n’aura plus jamais de prise sur notre destinée.

 

Tunis le 4 octobre 2011

Sihem Bensedrine

(Source: le site de radio “Kalima” le 6 octobre 2011)

Lien:http://www.kalima-tunisie.info/fr/News-file-article-sid-1165.html

 


Tunisie: la traque du clan Ben Ali-Trabelsi se poursuit


 
Publié le 06-10-11 à 18:40 Modifié à 18:38
 
TUNIS (AP) — Un membre de la famille de l’ex-président tunisien Zine el Abidine ben Ali, Moez Trabelsi, a été arrêté jeudi matin à Rome par l’organisation policière internationale Interpol, a annoncé l’agence officielle TAP, citant une source du ministère tunisien de la Justice.
 
Il s’agit du neveu de l’épouse du président déchu, Leïla Trabelsi. Impliqué dans plusieurs affaires de corruption, il était recherché depuis la chute du régime Ben Ali en janvier dernier et faisait l’objet d’un mandat d’arrêt international.
 
A l’instar de plusieurs membres du clan Ben Ali-Trabelsi, il est accusé d’acquisition illicite de biens meubles et immeubles à l’étranger, transactions économiques illégales, détention prohibée et exportation de devises étrangères et recyclage.
 
Selon la TAP, les autorités judiciaires tunisiennes s’attellent à constituer le dossier d’extradition pour le remettre à la partie italienne, afin de se faire livrer le prévenu et le présenter à la justice.
 
Mercredi, un beau-frère de l’ancien président tunisien, Moncef Trabelsi, a été condamné à trois ans de prison et 3.000 dinars d’amende (environ 1.500 euros) par le tribunal de première instance de Tunis.
 
Il était accusé d’avoir escroqué un homme d’affaires d’origine palestinienne après lui avoir promis d’intervenir en sa faveur pour qu’il remporte une partie d’un marché public lié aux hydrocarbures dans le sud du pays. Bien qu’ayant soutiré une somme de deux millions de dinars (près d’un million d’euros) à l’homme d’affaires, le marché a été attribué à une autre entreprise.
 
L’homme d’affaires palestinien a alors déposé plainte à la commission chargée de la lutte contre la corruption qui a transmis le dossier à la justice.
 
Un autre beau-frère de Ben Ali réfugié au Canada, Belhassen Trabelsi, a par ailleurs été récemment condamné par le même tribunal à 15 ans et deux mois de prison.
 
Il était jugé par contumace dans des affaires bancaires et douanières portant sur l’exportation de devises et de monnaie tunisienne ainsi que d’importantes quantités de métal précieux sans autorisation de la Banque centrale.
 
Selon les autorités, ces décisions de justice visent à obtenir son extradition et à geler ses avoirs à l’étranger.
 
Personnage haï par les Tunisiens pour ses malversations, tout comme Imed Trabelsi, le neveu préféré de l’ex-première dame de Tunisie qui a déjà écopé de quatre ans de prison dans des affaires de drogue, Belhassen Trabelsi est poursuivi dans une autre affaire en cours ayant trait à la possession illicite d’objets archéologiques. AP

Tunisie : Le bal des prétendants


Par Amin ALLAL

ALa majorité des partis qui se présentent aux suffrages des électeurs tunisiens pour l’élection de l’Assemblée constituante du 23 octobre sont dépourvus de base sociale.Notamment dans les régions de l’intérieur où d’anciens membres du RCD, la formation de l’ex-président Ben Ali, jouent donc les entremetteurs auprès de la population.

Quelque 110 partis en lice dont une centaine légalisés depuis la fuite de Ben Ali, 1 500 listes et une dizaine de milliers de candidats pour briguer une des 217 places de l’Assemblée constituante. Ces chiffres vertigineux des prétendants contrastent avec le faible intérêt patent des citoyens tunisiens pour ces élections du 23 octobre. Dans ce contexte, l’instance chargée de l’organisation du scrutin a même recouru à l’inscription automatique des électeurs potentiels. Ce paradoxe entre une mobilisation intensive des aspirants et l’indifférence de potentiels votants tient à deux facteurs de l’histoire politique tunisienne. D’une part, un référentiel largement partagé par les élites, de réformisme « par le haut » (1) et, d’autre part, un état de fait concomitant : la plupart des partis sont dépourvus de base sociale et déconnectés du mouvement social qui a entraîné la fuite de Ben Ali. A l’heure actuelle, les recompositions au sein du champ partisan se font comme en parallèle des mouvements protestataires portés par des multitudes de Tunisiens dont la colère, les griefs et revendications restent largement indécodables pour l’élite politique.

Sous Ben Ali, les organisations partisanes pouvaient être classées en trois catégories en fonction de leur allégeance au régime : les partis clients d’abord, les partis légaux et indépendants ensuite, et enfin les mouvements politiques non reconnus par le ministère de l’Intérieur. Les premiers étaient sans base militante et tournaient autour d’une personnalité en relation directe avec la présidence de la République et les services de sécurité. Leur rôle principal était d’entretenir la façade pluraliste du régime aux yeux des observateurs internationaux. Les seconds, les partis dits « démocrates », étaient surveillés par la police politique, leurs publications régulièrement censurées, limitant ainsi leur capacité à animer une vie politique « normale ». Enfin, les derniers, comme le Congrès pour la République, le Parti communiste des ouvriers tunisiens et le mouvement islamiste Ennahdha étaient illégaux et donc condamnés à mener leurs activités dans la clandestinité. A l’exception des islamistes au cours de la période 1981-1991 (marquée d’abord par une vague de répression de cette mouvance, puis d’une relative tolérance après 1984 et, enfin, d’une nouvelle répression, massive, à partir de 1989), ces partis n’ont jamais vraiment eu de bases populaires. Ils se caractérisaient par un recrutement limité aux classes supérieures et professions libérales des centres urbains du littoral. Il s’agissait en réalité de proto-partis bâtis autour d’un leader plus ou moins charismatique qui fonctionnaient sur un mode extrêmement personnalisé (2). L’une des raisons fréquemment avancées pour expliquer cette atrophie politique était le verrouillage sécuritaire de l’espace public. Or, cette explication néglige à la fois les clivages socio-territoriaux et le référentiel partagé par les élites tunisiennes du réformisme « par le haut », que ces élites se situent dans la sphère du pouvoir ou dans les milieux oppositionnels. À certains égards, on peut dire que le contexte actuel donne du crédit à cette hypothèse : les proto-partis, pourtant auréolés par leur rôle dans la résistance et dynamisés par le processus de libéralisation, éprouvent des difficultés à se constituer une base militante. Ils n’arrivent pas à s’implanter dans les régions de « l’intérieur » qui ont fourni le gros contingent de protestataires lors des révoltes du bassin minier de Gafsa en 2008 ou pendant les mobilisations de l’hiver 2010-2011 à Kasserine, Sidi Bouzid et Thala. La présence massive des cadres des partis « démocratiques » dans les nouvelles institutions de la « transition démocratique » n’a pas davantage renforcé leur proximité avec les citoyens ordinaires.

Le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) de l’ancien président Ben Ali officiellement dissous, les sociabilités de l’ancien parti hégémonique se convertissent bon gré mal gré à la nouvelle donne pluraliste. Plus d’une vingtaine des partis légalisés depuis mars 2011 sont en partie constitués de cadres de ce dernier. La recomposition du RCD emprunte trois trajectoires bien différenciées qui peuvent se recouper ponctuellement. Tout d’abord, on peut identifier le passage d’élites locales du RCD vers les nouveaux partis démocratiques. Il ne s’agit pas de stratégie d’entrisme mais, à des échelles différentes selon les partis, de reconversions individuelles, parfois influencées par les partis démocratiques eux-mêmes qui cherchent à récupérer les anciens réseaux clientélistes du parti quasi unique. Ensuite, on assiste à des créations de partis par d’anciens caciques du régime. Ces derniers appartenaient généralement à l’aile libérale du RCD et se présentent comme relativement éloignés de ce qu’étaient les dérives mafieuses du Palais.Deux partis jumeaux illustrent bien ce type de trajectoire : « La Patrie », créé par Mohamed Jegham – un ancien ministre et maire de la ville natale de Ben Ali –, et « L’Initiative » fondé par Kamel Morjane le dernier ministre des Affaires étrangères de Ben Ali et présenté longtemps comme « l’homme des Américains ». Les deux partis s’appuient principalement sur les réseaux d’entrepreneurs et les milieux d’affaires sahéliens, particulièrement inquiets par la dégradation de la situation économique, la montée de l’islamisme et des mouvements de jeunes manifestants à l’intérieur du pays.

Mais l’essentiel de ce processus de reconversion partisane semble se situer ailleurs. En effet, le RCD était l’acteur central de la politique clientéliste et redistributrice du régime autoritaire. Sa démarche était non seulement d’occuper le terrain de manière efficace mais aussi de relayer l’administration dans la mise en œuvre des politiques publiques. Du coup, le défunt RCD a donné naissance aujourd’hui à un groupe d’entremetteurs sociauxsusceptibles d’exploiter le contexte d’incertitude politique et économique pour vendre au meilleur prix leur pouvoir d’intermédiation auprès des nouvelles organisations partisanes post-Ben Ali qui cherchent à attirer électoralement les populations désœuvrées des régions sinistrées. C’est dans ce contexte de nouvelle concurrence pour la médiation politique au local que des conflits, trop hâtivement qualifiés de « tribaux » par la presse, éclatent dans des zones paupérisées du Sud du pays.

S’il est trop tôt pour une analyse complète du processus constitutionnel en cours, de ses effets durables sur la scène partisane et des transformations du régime politique en Tunisie, on peut tout de même noter, en s’intéressant aux partis en lice pour ces élections, que les tactiques, arrangements et mésalliances au sein de l’élite politique reproduisent la longue trajectoire du réformisme par le haut. Même l’UGTT (Union Générale Tunisienne du Travail) l’ancienne centrale syndicale unique, organisation de masse, semble désormais courir derrière les multiples manifestations et les grèves sur les lieux de travail. L’encadrement, plus ou moins réussi, de ces actions protestataires par des représentants syndicaux locaux contraste néanmoins avec le décalage avéré de la plupart des partis politiques avec le mouvement social en cours. La création du Parti du travail tunisien par des leaders du syndicat semble une tentative bien isolée et limitée d’incarner les problématiques économiques et les multiples luttes engagées en lien avec les conditions de travail. Reste que le processus constitutionnel, malgré le tropisme autocentré des élites politiques, n’est pas totalement fermé. Gageons que l’interconnexion entre les deux scènes « protestataire » et « partisane » se fera progressivement afin que la « Révolution » ne se transforme pas en une énième « transition démocratique » formelle.

1-Béatrice Hibou, « Tunisie : d’un réformisme à l’autre » in Jean-François Bayart, Romain Bertrand, Thornike Gordaze, Béatrice Hibou, Françoise Mengin,Legs colonial et gouvernance contemporaine, vol. 1, FASOPO, miméo, décembre 2005.

2-Michel Camau, Vincent Geisser,Le syndrome autoritaire. Politique en Tunisie de Bourguiba à Ben Ali, Paris, Presses de Sciences Po, 2003.

Source: ”Alternatives internationales” Le06-10-2011

Lien: http://www.alternatives-internationales.fr/tunisie—le-bal-des-pretendants_fr_art_630_55593.html

 


Archives du parti de Ben Ali livrent leurs secrets


 

Par Mehdi Farhat

Plus de huit mois après la révolution tunisienne, le bilan humanitaire des immigrés parvenus jusqu’à Paris est désastreux.

Le plan d’urgence de la Mairie de Paris s’est achevé le 31 août et le 28 septembre six clandestins parmi lesquels des Tunisiens débarqués en Europe sur l’île de Lampedusa, ont péri dans l’incendie d’un squat à Pantin, à quelques mètres du consulat tunisien.

Toutefois, malgré ce lourd constat d’échec, leur présence à Paris aura eu une conséquence heureuse et bel et bien révolutionnaire: la prise du bastion français du régime deZine el-Abidine Ben Ali, le dictateur déchu.

Des mètres cubes d’archives du RCD

A la fin du mois de mai, plusieurs migrants s’étaient installés au «36 rue Botzaris» dans le 19e arrondissement de Paris. Pour les autorités, l’immeuble abritait un «centre culturel tunisien», mais en réalité l’adresse servait de siège au Rassemblement démocratique constitutionnel (RCD), le parti politique de Ben Ali. Un haut lieu de contrôle et de renseignements.

Arguant la réappropriation d’un lieu déserté par l’ancien régime, une trentaine de migrants ont élu domicile dans les bureaux des fonctionnaires. Après plusieurs recherches, les occupants de l’immeuble ont mis la main sur des milliers de documents, photos, bilans comptables, factures, notes de frais, listes des membres, fiches d’identification et de renseignements, coupures de presse,…

Des mètres cubes de dossiers, soigneusement tenus à jour de 1987 à 2011 par les agents du RCD. L’envers du décor de la dictature tunisienne dévoilé au grand jour.

Le cadeau des migrants révolutionnaires

Plusieurs documents ont été échangés devant l’immeuble ou vendus au plus offrant. Sur les lieux, la Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR) et le Collectif des Tunisiens de France (CTF), étaient en contact permanent avec les jeunes. L’un de leur avocat, Soumaya Taboubi, 36 ans et mère de deux enfants, a commencé par offrir des consultations gratuites aux immigrés.

«Moi je suis plutôt dans la vie associative française (l’avocate est membre de l’association Eveil, ndlr). Depuis que je m’occupe du dossier Botzaris, on m’a déconseillé de rentrer en Tunisie. Dernièrement on m’a volé ma voiture à Paris.»

Interrogée par Slate Afrique, Soumaya Taboubi assure ne pas être engagée en politique. Elle a souhaité servir son pays concrètement en aidant la trentaine de Tunisiens quelque peu dépassés par l’ampleur de leur découverte:

«Les jeunes ont fait barrage et voulaient quelqu’un d’officiel, un huissier, un magistrat,… Ils disaient: « on ne veut pas qu’un parti tire profit de ces révélations, on veut quelqu’un de confiance »», se souvient-elle.

Son téléphone ne cessera plus de sonner. Dans cette cacophonie, l’un des jeunes, Ammar, se confie. Témoin de dérives et d’allées et venues suspectes, le 14 juin, ce dernier demande à l’avocate ainsi qu’à Kamel Ouriemmi, membre du CTF, de venir récupérer en urgence les archives. Au même moment, un journaliste prévient maître Taboubi d’une imminente descente de police. Les jeunes appellent alors l’avocate:

«Venez, on va vous confier les documents, les rcdistes ne doivent pas mettre la main dessus. Le consulat et l’ambassade ce sont d’anciens membres du RCD. Ils veulent récupérer la preuve de leur culpabilité. Ces preuves c’est notre cadeau. Celui des squatteurs en situation précaire et qui selon certains, n’ont rien fait pour leur révolution.»

Certains dossiers sont déjà prêts

Soucieuse de préserver ces preuves, Soumaya Taboubi et Kamel Ouriemmi décident le 15 juin 2011 de récupérer les archives du siège du RCD. Un quart des documents est empilé sur la banquette arrière d’un monospace sans être trié en direction d’un box sécurisé. Des dossiers sont à ce jour en cours d’élaboration. Les sujets sont variés, et vont du bilan du parc immobilier du RCD en France, aux rapports compromettants, sur lesquels sont cités certains magistrats tunisiens, responsables politiques et journalistes tunisiens et français.

«Il y a des débuts de preuves, de quoi ouvrir une enquête judiciaire. Certains dossiers sont prêts. On a des noms de magistrats tunisiens corrompus. En France, c’est un dossier politique», déclare l’avocate.

A l’origine, les associations avait obtenu un accord écrit cacheté de l’ambassade pour s’occuper des lieux. Le chargé d’affaires de l’ambassade,Elyes Ghariani, avait été contacté par téléphone.

«Vous faites ce que vous voulez», avait répondu l’ambassadeur par intérim.

Le 16 juin 2011, les forces de l’ordre françaises ont délogé les squatteurs. L’intervention a laissé place à un défilé de véhicules diplomatiques dans la cour de l’immeuble. Les locaux ont été vidés et l’accès interdit par la police française à la demande de l’ambassade tunisienne.

L’ambassade tunisienne au centre de la polémique

Soumaya Taboubi s’est rendue à l’ambassade avec les membres de l’association pour essayer de regrouper l’ensemble des archives.

«Il y a eu un sabotage. Le chargé d’affaire nous a dit qu’on était en retard et il ne nous a pas reçu. J’ai appris qu’on lui avait demandé de gérer « négativement » le dossier et qu’en contrepartie, il attendait sa promotion d’ambassadeur en Allemagne.»

Quelques jours après, Elyes Ghariani recevait ses lettres de créance d’ambassadeur en Allemagne. Pour l’avocate, les trois quarts restants des dossiers ont été détruits à l’ambassade. Il faut dire que le sujet dérange. En Tunisie comme en France, on craint le contenu de ces documents. Certains ont même déjà été publiés. Mais l’avocate assure détenir la majeure partie.

Les lacunes de la justice tunisienne

Sollicitée par plusieurs partis politiques tunisiens pour activer la procédure, la position de maître Soumaya Taboubi est claire:

«Rien ne doit être fait dans la précipitation. Il faut que ce soit pédagogique.»

Une attitude prudente au regarddes derniers procès qui ont révélés l’incapacité et les lacunes de la justice tunisienne en reconstruction. Par ailleurs l’avocate déplore que les officiels tunisiens actuels se désintéressent de la question. Le ministère de la Justice n’a effectivement pas cherché à la contacter. Les sollicitudes viennent plutôt de France.

«Mon bureau n’est pas fermé à la justice française. Elle sera prochainement saisie. Pour la Tunisie, on attend que les choses se rétablissent.»

D’après l’avocate, le RCD était«un modèle», un «parti-Etat observé par tout le Moyen-Orient». A ce jour, les autorités tunisiennes ont détruit les archives du RCD et le parti n’existe plus juridiquement.

«Il est dissous, la justice à mis la main sur les fonds, mais où sont les documents?», interroge l’avocate.

La révolution vécue par la dictature

Soumaya Taboubi et l’associationBotzaris, vérité et justice assurent que les archives seront rendues publiques dans un cadre légal. Une prise de recul nécessaire au moment même où les campagnes politiques tunisienne et française font rage.

 

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