30 avril 2008

Home – Accueil

 

TUNISNEWS
8 ème année, N°  2899 du 30.04.2008
 archives : www.tunisnews.net


Amnesty International: Triste continuité de la politique française en Tunisie AISPP: Communiqués 1 – 2 Liberté et Equité: Communiqué Luiza Toscane: Il a arraché sa libération – Battez-vous pour son émancipation AP: Droits de l’Homme en Tunisie: Moscovici dénonce la « trahison » de Sarkozy AP: Sarkozy salue de nouveau les progrès de la Tunisie en matière de liberté et de tolérance Reuters: Nicolas Sarkozy loue encore Ben Ali sur les droits de l’homme AFP: Nicolas Sarkozy salue une nouvelle fois les progrès de la Tunisie Reuters: Sarkozy under fire for ignoring rights in Tunisia AFP: Sarkozy quitte la Tunisie en défendant l’Union pour la Méditerranée AP:Sarkozy: l’Union pour la Méditerranée « changera le monde » Reuters: Sarkozy – Le conflit Israël-Palestine ne doit pas entraver l’UPM La France « ne transigera pas avec la sécurité d’Israël », affirme Nicolas Sarkozy à Tunis Yahyaoui Mokhtar: Accès refusé Mahmoud Ben Romdhane: Ces choses que l’on ne voudrait point exhiber ! Zineb Dryef: Sarkozy chez Ben Ali: mais où est passée Rama Yade? Afrik.com: Sarkozy en Tunisie : « un appui total à la dictature de Ben Ali » Afrik.com : Sarkozy en Tunisie : les droits de l’homme passent à la trappe Infosud :Khadija Cherif, « En Tunisie, la cause des femmes recule » Tribune de Genève : Sarkozy sert son cocktail contrats-droits humains à Tunis Libération : En Tunisie, Sarkozy enfonce le clou sur les droits de l’homme Libération: Sarkozy, la «main-d’œuvre» tunisienne et «l’intelligence» française Syfia : Tunisie : les livres sous la coupe de la censure Le Monde: A Tunis, Nicolas Sarkozy vante son projet d’Union pour la Méditerranée Greenpeace: Accord nucléaire en Tunisie : Nicolas Sarkozy termine son « Atomic Tour » de la Méditerranée


 

Amnesty International

 

DECLARATION PUBLIQUE

30 Avril 2008

SF 08 M 39

Triste continuité de la politique française en Tunisie

 

Depuis toujours, la diplomatie française a fait passer ses intérêts économiques  avant ceux des droits de la personne humaine. On pouvait donc craindre que la vente d’airbus ne soit guère propice à de franches explications sur les récentes conclusions du Comité des droits de l’homme de l’ONU sur la Tunisie. Examinant en mars le rapport que lui avait soumis Tunis sur son application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le comité s’inquiétait notamment des détentions arbitraires, de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il revenait sur le sort réservé à plusieurs organisations et défenseurs des droits de l’homme qui ne peuvent exercer librement leurs activités et sont victimes de harcèlements et d’intimidations, parfois d’arrestations. Le Comité des droits de l’homme avait aussi rappelé aux autorités tunisiennes que « la définition des actes terroristes ne devrait pas conduire à des interprétations permettant de porter atteinte, sous le couvert d’actes terroristes, à l’expression légitime des droits consacrés par le Pacte » .

Mais pourquoi douter a priori de la volonté d’un Président qui dans son discours d’investiture  proclamait qu’il «  ferai[t] de la défense des droits de l’homme et de la lutte contre le réchauffement climatique les priorités de l’action diplomatique de la France dans le monde. » Encore candidat, il osait même : « Je ne passerai jamais sous silence les atteintes aux droits de l’homme au nom de nos intérêts économiques. Je défendrai les droits de l’homme partout où ils sont méconnus ou menacés… » Juste un an plus tard, notre héraut  refuse donc de se poser en donneur de leçon comme si se préoccuper des droits de la personne humaine était faire autre chose que d’accomplir l’obligation de l’article 1er de la Charte des Nations unies « d’encourager le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous ». Dans de telles dispositions d’esprit, un  silence contrit à défaut d’être contraint serait sans doute un moindre mal. Mais il n’a pas suffi au Président français. C’est que  les intérêts sécuritaires français lui paraissent exiger une franche défense du régime tunisien. Ainsi  invite-t-il chacun à réfléchir : « Qui peut croire que si demain, après-demain, un régime du type taliban s’installait dans un de vos pays au nord de l’Afrique, l’Europe et la France pourraient considérer qu’elles sont en sécurité ? » Et de soutenir qu’en Tunisie « aujourd’hui l’espace de libertés progresse ».   La liberté progresse-t-elle quand les associations qui déplaisent ne peuvent se faire enregistrer, quand les avocats aux dossiers sensibles sont sous constante pression policière ? Quand y compris des associations, syndicats ou partis reconnus ne peuvent agir que sous contrôle permanent et restent à la merci d’une procédure judiciaire ou d’une interdiction de réunion de dernière minute ? Existe-t-il une télévision libre en Tunisie ? Une presse non gouvernementale aux  moyens dérisoires est-elle la marque de la liberté ?  Qu’en pense Slim Boukhdir condamné en novembre à un an ferme pour un outrage prétendu afin de mieux réprimer son insolente liberté de parole ? Et le Président français de rendre hommage à la «  lutte déterminée » des autorités tunisiennes contre le terrorisme. Sans doute précise-t-il : « Et je sais aussi qu’on ne combat pas les terroristes – j’ai été ministre de l’Intérieur – avec les méthodes des terroristes.» Mais il ajoute : «  Et c’est pourquoi je suis si attaché à la coopération entre nos services.»  Singulier appel à la coopération quand la Cour européenne des droits de l’homme a jugé le 28 février que la remise (par l’Italie) d’un ressortissant tunisien poursuivi pour terrorisme dans son pays violerait son droit à ne pas être pas soumis à la torture. Et la France ne dit mot des – et  semble donc consentir aux – arrestations arbitraires,  détentions au secret,  tortures systématiques des personnes arrêtées au titre de la loi contre le terrorisme du 10 décembre 2003. La France ne saurait non plus protester devant des procès inéquitables menés, sans garantie constitutionnelle d’indépendance. Trop souvent, des magistrats statuent après des interrogatoires sommaires, sur la  base de procès-verbaux aux dates falsifiées et d’aveux obtenus sous la torture, et sans que la défense soit admise, sauf exception rarissime, à faire entendre ses témoins. Et, au delà du rappel bienvenu à l’observance d’un strict moratoire en matière de peine capitale, la France ne parle qu’à demi-mot quand la Cour de Tunis condamne à mort,  en février dans l’affaire dite de Soliman, au nom de la lutte contre le terrorisme. En Tunisie, ce voyage officiel consterne les combattants de la liberté. La France étant au seuil de la présidence de l’Union européenne, Amnesty International France rappelle les propos du Président lorsqu’il s’engageait  « à se battre pour une Europe qui protège, parce que c’est le sens de l’idéal européen. » L’Union pour la Méditerranée que veut M. Sarkozy se construira-t-elle ainsi dans le déni des droits humains ? Ne pas dénoncer leurs violations et, plus encore, prétendre à tort que leur respect progresserait, revient à les déconsidérer. C’est ainsi que l’on fait le lit de ceux que l’on dit combattre. Réfléchissez-y, Monsieur le Président.

 

Pour plus d’informations : Aurélie Chatelard & Michael Luzé Service Presse Amnesty International France Tel. : + 33 1 53 38 65 41 – Portable : + 33 6 76 94 37 05

 

 

Liberté pour tous les prisonniers politiques Liberté pour Abdallah Zouari, le journaliste exilé dans son propre pays Association Internationale de Soutien aux Prisonniers Politiques 43 rue Eldjazira, Tunis e-mail : aispptunisie@yahoo.fr Tunis, le 29 avril 2008  
 
La vingt septième chambre criminelle de la Cour d’Appel de Tunis, présidée par le juge Mannoubi Hamidane, a examiné aujourd’hui, mardi 29 avril 2008 : – l’affaire n°11042 dans laquelle sont déférés Khaled Layouni, Khaled Ghannoudi, Mohammed Ali Talbi, Monji Mansouri, Chaker Jendoubi, Makram Dakhlaoui, Mounir Eucchi, Mohammed Rabbah et Saber Ksila, en vertu de la loi anti terroriste du 10 décembre 2003 dite « antiterroriste ». L’acte d’accusation comprenait les chefs d’adhésion sur le territoire de la République à une organisation terroriste ayant fait du terrorisme un moyen de réaliser ses objectifs, d’entraînements militaires en Tunisie et à l’étranger en vue de commettre des infractions terroristes sur le territoire de la République, d’utilisation du territoire de la République pour recruter et entraîner des personnes en vue de commettre une action terroriste sur le territoire de la République, de fourniture d’armes, d’explosifs, de munitions et autres produits et équipements analogues à une organisation en rapport avec les infractions terroristes. Maîtres Abderraouf Ayadi, Abdelfattah Mourou, Anouar Aouled Ali, Radhia Nasraoui, Samir Ben Amor et Samir Dilou se sont présentés pour les défendre. Après une pause d’une heure et demie, la Cour a « découvert » l’un des accusés (Monji Mansouri) et au terme d’une délibération le juge a décidé de commettre d’office Maître Houda Hamza pour sa défense et de repousser l’examen de l’affaire au 2 mai 2008. En première instance, les peines d’emprisonnement allaient de 2 à 10 ans – l’affaire n°10898 dans laquelle sont déférés Bader Ben Rahma, Mohammed Haykel Ben Mena, Salem Abich, Ramzi Msalli, Salah Chaouch, Nabil Babah, accusés d’adhésion sur le territoire de la République à une organisation terroriste ayant fait du terrorisme un moyen de réaliser ses objectifs, d’entraînements militaires en Tunisie et à l’étranger en vue de commettre des infractions terroristes sur le territoire de la République, d’utilisation du territoire de la République pour recruter et entraîner des personnes en vue de commettre un acte terroriste sur le territoire de la République. Maîtres Mohammed Fadhel Saïhi, Fethi Mouldi, Ali Grissa et Mourad Belibech se sont présentés pour les défendre. A l’issue des plaidoiries, le juge a décidé de lever la séance pour le délibéré et le prononcé du jugement. – l’affaire n°10953 dans laquelle sont déférés Jamel Bouali, Tarek Naji et Ali Cherif, accusés d’adhésion sur le territoire de la République à une organisation terroriste ayant fait du terrorisme un moyen de réaliser ses objectifs, d’entraînements militaires en Tunisie et à l’étranger en vue de commettre des infractions terroristes sur le territoire de la République. Maîtres Soufiane Miled, Mounia Bouali et Samir Ben Amor se sont présentés pour les défendre. A la demande des avocats, l’examen de l’affaire a été reporté au 9 mai 2008. Pour la commission de suivi des procès Le secrétaire général de l’Association Maître Samir Dilou (traduction ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)  

Liberté pour tous les prisonniers politiques Liberté pour Abdallah Zouari, le journaliste exilé dans son propre pays Association Internationale de Soutien aux Prisonniers Politiques 43 rue Eldjazira, Tunis email : aispptunisie@yahoo.fr Tunis, le 29 avril 2008  
 
La cinquième chambre criminelle du Tribunal de Première Instance de Tunis, présidée par le juge Touhami Elhafi, a examiné aujourd’hui, lundi 29 avril 2008 : – l’affaire n°15247 dans laquelle est déféré Mouammar Chendoul, accusé d’adhésion sur le territoire  de la République à une organisation terroriste. Après la plaidoirie de Maître Ben Amor, son avocat, le juge a décidé de lever la séance pour le délibéré et le prononcé du jugement. – l’affaire n°15169 dans laquelle sont déférés Khaled Dridi, Nizar Laskri, Houssine Gmati, Karim Kharroubi, Salem Dridi et Issam Ben Aïssa, accusés d’adhésion sur le territoire de la République et à l’étranger à une organisation terroriste, d’utilisation du territoire de la République pour recruter des personnes en vue de commettre une action terroriste sur le territoire. Maître Hatem Ben Amor, Samir Ben Amor et Kelthoum Zaoui se sont présentés pour les défendre. Le juge a décidé à l’issue des plaidoiries de délibérer de l’affaire et de prononcer le jugement. Pour la commission de suivi des procès Le secrétaire général de l’Association Maître Samir Dilou (traduction ni revue ni corrigée par les auteurs de la version originale, LT)  

Sauvez la vie du prisonnier politique Ridha Boukadi Liberté pour Slim Boukhdhir, la plume libre Liberté et Equité Organisation de droits de l’homme indépendante 33 rue Mokhtar Atya Tel/Fax : 71 340 860 liberte_equite@yahoo.fr Tunis le 26 avril 2006 FELICITATIONS  
 
L’organisation Equité et Liberté présente ses chaleureuses félicitations à Monsieur Ajmi Lourimi, ex prisonnier politique, qui a passé avec succès son examen de première année du magistère de philosophie et lui souhaite plein succès dans la poursuite de ses études Pour le bureau exécutif de l’organisation Le Président Maître Mohammed Nouri (traduction ni revue ni corrigée par l’auteur de la version en arabe, LT)  

Il a arraché sa libération Battez-vous pour son émancipation

Abdellatif Bouhjila, arrêté en 1998, avait été condamné à onze années d’emprisonnement et à cinq ans de contrôle administratif. En prison, il s’est battu, jour après jour, contre l’arbitraire, l’oppression, les mauvais traitements, la torture, la négligence sanitaire. Il a tenté d’arracher ses droits, dès le début, en entamant une des plus longues grèves de la faim, celle qui fit de son procès celui resté dans l’histoire comme «  le procès des agonisants ». Il a poursuivi ses grèves de la faim en prison, sans relâche, soutenu dans son combat par ses parents, par son père notamment, qui lui a rendu visite, mardi après mardi, bravant les interdictions de visite, la distance, la fatigue, qui fut l’un des membres fondateurs de l’AISPP, qui est venu jusqu’à Paris en 2007 défendre la cause de son fils et celle de tous les prisonniers politiques. Le résultat : Abdellatif Bouhjila est sorti de prison au bout de neuf ans et demi, le 7 novembre 2007. Il s’agit d’une libération conditionnelle. Il lui reste à effectuer la peine de contrôle administratif; Le décret d’application de cette condamnation dispose : « Article 1 : Abdellatif Abdelmajid Mustapha Bouhjila qui a bénéficié d’une libération conditionnelle le 7 novembre 2007 est astreint à résider 20 bis rue Ahmed Tlili à Mégrine, Ben Arous pendant les cinq années de contrôle administratif en vertu du jugement cité plus haut » Article 2 : L’intéressé n’a pas le droit de changer sans autorisation e lieu de sa résidence tel que déterminé par l’article 1 Article 3 : une infraction au décret de contrôle administratif entraînerait les poursuites judiciaires prévues à l’article 150 du Code pénal Article 4 : le directeur général de la Sûreté Nationale et le directeur général commandant de la garde nationale sont chargés d’appliquer ce décret Tunis, le 12 novembre 2007 » (1) ; ce document dûment signé par le ministère de l’Intérieur et du développement local et le directeur général des prisons et de la rééducation, ne comporte aucune autre précision. Abdellatif Bouhjila a respecté la consigne concernant son domicile, mais il reçu quelques jours après sa sortie de prison une convocation (2) du poste de police de la cité Chaker, à laquelle il s’est rendu, et là, il a appris qu’il devait se présenter tous les jours pour émarger dans le registre du poste, ce qu’il a refusé et qu’il continue de refuser malgré les menaces de renvoi en prison, toutes formulées oralement. Abdellatif Bouhjila s’en est expliqué longuement dans une lettre envoyée à la presse : « […] je suis sorti de prison, gravement malade, j’ai eu des attaques cardiaques, subi une intervention chirurgicale au rein […] j’ai réintégré ma famille, le corps épuisé, porté par des béquilles […] je ne sortais pas de chez moi, même pas pour les choses courantes de la vie, et là, passées deux semaines, on m’a obligé à me présenter tous les jours au poste de police local pour signer […] je l’ai fait spontanément, persuadé qu’il s’agissait d’une mesure légale […] lorsque j’ai obtenu un exemplaire du décret de contrôle administratif, l’obligation d’émarger tous les jours n’y figurait pas […] Pour ces raisons, la fatigue et le harcèlement […], sans compter les dépenses de transport qui s’accumulent sur mon père âgé […] c’est déjà énorme ce qu’il a dut dépenser pendant toutes mes années de prison, et maintenant il doit faire face à des dépenses pour me faire soigner, pour mes traitements […]  j‘en appelle à toutes les organisations de défense des droits de l‘homme […]» (3). Persuadé de son bon droit, Abdellatif Bouhjila espère un jour guérir, retravailler, et dans l’attente, il a demandé un passeport le 9 avril dernier (4). Abdellatif Bouhjila a arraché sa libération, répondez à son appel, battez-vous pour son émancipation. Luiza Toscane (1) Décret de contrôle administratif n°17957 (traduit de l’arabe) (2) Ministère de l’Intérieur, administration de la Sûreté nationale, poste de la cité Chaker, convocation, 5 novembre 2007(traduit de l’arabe) (3) Traduit de l’arabe. (4) Poste de police de la Cité Chaker, reçu n°117 (traduit de l’arabe)


 

Droits de l’Homme en Tunisie: Moscovici dénonce la « trahison » de Sarkozy

 
 AP – Mercredi 30 avril, 15h48 PARIS – Le député socialiste Pierre Moscovici a dénoncé mercredi la « trahison des démocrates tunisiens » par Nicolas Sarkozy lors de sa visite en Tunisie. « Aujourd’hui, l’espace des libertés progresse (en Tunisie). Ce sont des signaux encourageants que je veux saluer », a déclaré lundi soir le président français à Tunis. « C’est une contre-vérité absolue que de prétendre cela », a affirmé M. Moscovici lors des Questions au gouvernement à l’Assemblée nationale. « Après la visite consternante du président (libyen Mouammar) Kadhafi (…), après les félicitations à Vladimir Poutine » à la suite des élections législatives en Russie, et « les très molles protestations contre les violations des droits de l’Homme en Chine » et au Tibet, le député socialiste a dénoncé « une démarche volontaire, délibérée (…) d’ignorer superbement la question des droits de l’Homme », s’est indigné M. Moscovici. « La Tunisie n’est pas la Corée du Nord », lui a répliqué le secrétaire d’Etat aux Affaires européennes Jean-Pierre Jouyet. « Nous n’avons jamais caché que la France souhaitait qu’une évolution politique accompagne maintenant les succès du développement économique st social », mais « cette ouverture, c’est aux Tunisiens eux-mêmes d’en fixer le rythme, le contenu, les modalités », a-t-il ajouté. Et « ce n’est pas en s’érigeant en donneur de leçons que l’on fait avancer les choses ». AP


 

Sarkozy salue de nouveau les progrès de la Tunisie en matière de liberté et de tolérance

Par Bouazza ben Bouazza AP – Mercredi 30 avril, 17h34 TUNIS – Nicolas Sarkozy persiste et signe. Au dernier jour de sa visite d’Etat en Tunisie, le président français a souligné une nouvelle fois les progrès réalisés par ce pays dans les domaines des droits humains et de la tolérance, en dépit des menaces des « fondamentalismes, des obscurantismes et des fanatismes ». « Tout n’est pas parfait en Tunisie certes, tout n’est pas parfait en France aussi. Beaucoup de choses restent à accomplir ou à améliorer. Mais quel pays peut s’enorgueillir d’avoir avancé autant en un demi-siècle sur la voie du progrès, sur la voie de la tolérance et sur la voie de la raison? », a-t-il relevé mercredi dans un discours à l’INSAT de Tunis. Dans cette Tunisie, devenue selon lui le « laboratoire d’une civilisation arabo-musulmane ouverte et respectant son identité », il aussi cité l’émancipation de la femme et la « constitution d’une vaste classe moyenne, l’émergence d’une élite intellectuelle, scientifique et technique dont la compétence est reconnue dans le monde entier ». « Dans un monde où la barbarie de nouveau fait peser sur chacun de nous une menace mortelle, la civilisation est une fois de plus un combat », a analysé Nicolas Sarkozy qui a assuré que « dans ce combat, la France sera aux côtés de la Tunisie ». « Je voudrais que chacun qui regarde la Tunisie et qu’il la juge garde toujours présent à l’esprit l’importance de ce qui se joue ici », a-t-il insisté. Peu après son arrivée lundi à Tunis, le président français avait jugé que « l’espace des libertés progresse » et relevé « des signaux encourageants » dans ce sens, qui « s’inscrivent sur un chemin étroit et difficile, mais essentiel, celui de la liberté et du respect des individus ». « Ce chemin, aucun pays ne peut prétendre l’avoir entièrement parcouru et personne ne peut se poser en censeur », avait-il plaidé en s’interdisant de s’ériger en « donneur de leçons ». Ces propos avaient été mal accueillis par nombre de défenseurs des droits humains. Le président de la Ligue tunisienne de défense des droits de l’Homme (LTDH), Mokhtar Trifi, s’est ainsi déclaré « un peu déçu » au sortir d’une entrevue avec la secrétaire d’Etat aux droits de l’Homme, Rama Yade, qui accompagnait le président Sarkozy à Tunis. Selon lui, « la situation ne s’est pas améliorée » en Tunisie en matière de libertés et de droits de l’Homme. « J’ai dit à Mme Rama Yade qu’on compte sur l’amitié de la France pour que cette situation s’améliore et que ce ne soit pas seulement des effets d’annonce, ce qui est le cas actuellement », a-t-il dit à la presse, espérant que « les promesses faites par le gouvernement tunisien devant les instances internationales soient tenues ». La présidente de l’association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), Khadija Chérif, dont le rendez-vous avec Rama Yade a été annulé pour des « raisons de calendrier », s’est dite également « déçue » par les déclarations de Nicolas Sarkozy. « Il ne s’agit pas de donner des leçons mais de reconnaître la réalité », a-t-elle déploré, accusant le président français d’avoir pour « priorité le commerce ». Avant son départ de Tunis, Rama Yade a reçu deux représentantes d’ONG opérant en Tunisie ainsi que deux membres de la LTDH, dont l’avocat Chédli Ben Younès, opposés par un différend à l’actuel comité directeur présidé par Me Trifi. AP


Nicolas Sarkozy loue encore Ben Ali sur les droits de l’homme

Reuters – Mercredi 30 avril, 16h21 TUNIS (Reuters) – Le président Nicolas Sarkozy a de nouveau décerné un brevet de bonne conduite au président tunisien Zine el Abidine Ben Ali, malgré les protestations des défenseurs des droits de l’homme. Dans un discours devant les étudiants de l’Institut national des sciences appliquées et de technologie de Tunis, il a néanmoins invité les dirigeants tunisiens à considérer avec « lucidité » ce qui restait à accomplir dans leur pays, où « tout n’est pas parfait ». « Quel pays peut s’enorgueillir d’avoir autant avancé en un demi-siècle sur la voie du progrès, sur la voie de la tolérance et sur la voie de la raison ? » a-t-il déclaré. « C’est le grand mérite du président Ben Ali d’avoir continué sur cette voie sans se laisser décourager par les obstacles de toute sortes (…), sans se laisser intimider par le fondamentalisme qui est notre ennemi commun, sans se laisser intimider par l’obscurantisme, par les fanatiques et le fanatisme qui rêvent d’un retour en arrière », a-t-il ajouté. « Alors tout n’est pas parfait en Tunisie, certes, tout n’est pas parfait en France non plus, certes également », a poursuivi Nicolas Sarkozy. « Beaucoup de choses restent à accomplir, c’est certain, beaucoup de choses restent à améliorer, c’est certain, et ce n’est pas faire preuve de faiblesse que de le dire. Quand on est fort, on regarde la situation avec lucidité. » A Paris, le socialiste Pierre Moscovici a interpellé la droite sur la « complaisance » du président de la République à l’égard du régime tunisien lors de la séance de questions d’actualité à l’Assemblée. « C’est une contrevérité absolue que de prétendre » que l’espace de liberté progresse en Tunisie, a déclaré le député du Doubs, citant la phrase prononcée lundi soir par Nicolas Sarkozy. La visite « consternante » de Mouammar Kadhafi à Paris, les félicitations adressées par le chef de l’Etat à Vladimir Poutine et les « très molles protestations » face aux violations des droits de l’homme en Chine sont autant de preuve que Nicolas Sarkozy a renoncé à ses promesses de campagne présidentielle sur la politique étrangère, a-t-il estimé. « LA TUNISIE N’EST PAS LA CORÉE DU NORD! » « Il n’y plus de tâtonnements, il n’y a plus d’erreur de début de mandat. Il y a une démarche volontaire, délibérée, consentie en tout cas d’ignorer superbement la question des droits de l’homme », a accusé Pierre Moscovici. « La Tunisie n’est pas la Corée du Nord », a répliqué le secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes, Jean-Pierre Jouyet. « Nous n’avons jamais caché que la France souhaitait qu’une évolution politique accompagne maintenant les succès du développement économique et social » en Tunisie, a-t-il fait valoir. « Cette ouverture, c’est aux Tunisiens eux-mêmes d’en fixer le rythme, le contenu, les modalités mais elle est aujourd’hui indispensable et possible », a-t-il poursuivi dénonçant ceux qui s’érigent « en donneurs de leçons ». Les organisations de défense des droits de l’homme accusent régulièrement le pouvoir tunisien d’atteintes aux libertés fondamentales sous le couvert de la lutte contre le terrorisme et contre l’extrémisme religieux. Elles se sont dites déçues par les déclarations du président français pendant sa visite d’Etat, dont elles attendaient un discours plus offensif sur la question des droits de l’homme. Les défenseurs tunisiens des droits de l’Homme accusent notamment Nicolas Sarkozy d’avoir donné la priorité aux relations économiques entre la France et la Tunisie. « Je suis dans le camp des amis de la Tunisie parce ce qui se joue ici est plus important que la Tunisie, est plus important que la France. C’est l’ouverture d’esprit, la tolérance, la foi et la raison », leur a répondu mercredi le président français. « Et je voudrais que chacun, à chaque fois qu’il regarde la Tunisie et qu’il la juge, car la Tunisie doit acceptée d’être jugée également, garde toujours présente à l’esprit l’importance de ce qui se joue ici. » Emmanuel Jarry


 

Nicolas Sarkozy salue une nouvelle fois les progrès de la Tunisie

 AFP, le 30 avril 2008 à 11h41

TUNIS, 30 avr 2008 (AFP) – Le président français Nicolas Sarkozy a une nouvelle fois salué mercredi les progrès accomplis par la Tunisie en matière de liberté et de tolérance, au cours d’un

discours prononcé à l’Institut national des sciences appliquées et de technologie (Insat) de Tunis.

 

« Tout n’est pas parfait en Tunisie, certes. Tout n’est pas parfait en France non plus (…) mais je veux le dire aussi parce que je le pense, quel pays peut s’enorgueillir d’avoir autant avancé

en un demi-siècle sur la voie du progrès, sur la voie de la Tolérance, et sur la voie de la raison ? », s’est exclamé M. Sarkozy au dernier jour de sa visite d’Etat.

 

En arrivant lundi soir en Tunisie, Nicolas Sarkozy avait affirmé que « l’espace des libertés progressait » en Tunisie, suscitant un tollé de la part des défenseurs des droits de l’Homme.

 


Sarkozy under fire for ignoring rights in Tunisia

Wed 30 Apr 2008, 12:09 GMT   By Francois Murphy PARIS (Reuters) – French President Nicolas Sarkozy drew strong criticism on Wednesday for failing to press the issue of human rights on a visit to Tunisia, the latest of many trips where he has been accused of putting money before morals. Sarkozy swept to power a year ago pledging to put human rights at the heart of French foreign policy, but his dealings with countries like China and Libya, which have yielded numerous business deals, have led many to argue that promise was hollow. On a three-day trip to Tunisia, Sarkozy said the country had made progress on rights and he had not come to give it a « lecture ». Tunisia is the Maghreb’s most westernised state but rights groups accuse the government of muzzling the press and beating and jailing opponents. The authorities deny the accusations. « One year on, the former candidate has watered down his views. After criticising (his predecessor) Jacques Chirac, who preferred to talk about human rights away from the television cameras, he now behaves the same way, » said French daily Le Parisien, which is neither strongly for or against Sarkozy. Sarkozy’s trip to North Africa’s wealthiest country, during which state-owned Tunis Air signed a deal to buy 19 Airbus planes for more than one billion euros, has followed a similar pattern to previous visits. On a trip to China in November, Sarkozy oversaw the signing of a pact to sell 160 Airbus planes and an 8 billion euro deal for France’s Areva to sell two nuclear reactors and fuel. During the presidential campaign, Sarkozy said he opposed lifting a European Union arms embargo against China because Beijing had not made enough progress on human rights. But on his trip to China, his team said he now agreed with Chirac that the embargo, which was imposed after China’s 1989 crackdown on student protests at Tiananmen Square, should end. HOME IS WHERE THE HEART IS Valerie Niquet, director of the Asia centre at the French Institute of International Relations, said Sarkozy’s campaign pledge was mainly about domestic politics. « During the campaign he made these grand statements on human rights in general — it was his speech on a ‘break’ with the past, but it was totally linked to domestic politics and his relations with Chirac, and not so much linked to foreign reality which in my view was not at all his priority, » Niquet said. The French president came under more pressure in December, when he rolled out the red carpet for Libya’s Muammar Gaddafi, who is also widely accused of silencing opponents through torture and imprisonment. Gaddafi, who stayed for five days, said human rights were not discussed when he met Sarkozy, which French officials denied, later saying Gaddafi gave them « guarantees ». France’s junior minister for human rights, Rama Yade, strongly criticised Gaddafi ahead of his visit. But she was not invited to China and has kept a low profile in Tunisia. In Tunisia as with Gaddafi, Sarkozy said it was important to foster strong ties with the government for strategic reasons — Libya is seeking to shed its pariah status after abandoning its weapons of mass destruction programmes, and Tunisia is a stable country in a region that has seen a rise in militant Islam. But that has not been enough to silence the critics. « From Jacques Chirac to Nicolas Sarkozy. relations between Paris and Tunis have not changed one iota, » said left-wing daily Liberation, which generally opposes Sarkozy.

Sarkozy quitte la Tunisie en défendant l’Union pour la Méditerranée

 
TUNIS (AFP) – 30/04/2008 16h04   Le président français Nicolas Sarkozy a achevé mercredi sa visite en Tunisie par un plaidoyer en faveur d’une Union pour la Méditerranée (UPM) élevée au rang de « rendez-vous avec l’histoire », dont il a souhaité qu’elle contribue au règlement du conflit israélo-palestinien. A deux mois et demi de son lancement solennel le 13 juillet à Paris, Nicolas Sarkozy a une nouvelle fois défendu son projet de partenariat entre l’Union européenne (UE) et ses voisins du sud de la Méditerranée, cette fois devant un amphithéâtre d’étudiants tunisiens. « Ce jour-là, pour tous, il s’agira d’être au rendez-vous de l’histoire. Manquer ce rendez-vous historique, ce serait prendre une responsabilité immense vis-à-vis de nos enfants, vis-à-vis des générations à venir », a-t-il déclaré. Faisant un exemple de la « relation apaisée et féconde entre le monde musulman et l’Occident » qui existe entre la France et la Tunisie, le président français a estimé qu’il était temps « de l’étendre à toute la Méditerranée » pour éviter « le choc des civilisations et la guerre des religions ». A cet argumentaire connu, Nicolas Sarkozy a ajouté mercredi l’espoir de faire de son initiative un facteur d’accélération du règlement du conflit entre Israël, appelé à participer à l’UPM, et les Palestiniens. « Je sais parfaitement que tout ceci est en arrière plan de l’Union pour la Méditerranée, mais ça ne doit pas nous empêcher d’agir, ça doit nous encourager à agir (…) si l’Union pour la Méditerranée devient une réalité, cette Union, elle changera le monde », a-t-il même promis. A l’intention de pays de l’UE qui ont longtemps douté de son initiative avant de s’y rallier, Nicolas Sarkozy a lourdement insisté sur l’échec du dialogue euro-méditerranéen de Barcelone lancé en 1995. « Barcelone, c’est bien parce que c’est le Nord qui aide le Sud. Mais Barcelone, je suis désolé de le dire, ce n’est pas le partenariat entre les peuples (…) c’est la poursuite du dialogue nord-sud, tel qu’il s’est instauré après la décolonisation, c’est-à-dire sur la base d’une relation inégalitaire où l’un décide et l’autre reçoit », a-t-il estimé. A son homologue tunisien Zine El Abidine Ben Ali qui a souhaité « une participation plus large » des pays du Sud, le président français a promis que l’UPM serait « fondée sur une égalité des droits et des devoirs ». Il a également décrit la nouvelle structure comme une « union à géométrie variable où chacun participera comme il le souhaite » autour de « projets concrets », parmi lesquels il a cité la dépollution de la Méditerranée. Nicolas Sarkozy n’a pas détaillé l’architecture de la future Union, qui devra être définie d’ici au 13 juillet. Mais selon un scénario susurré de source française, Tunis pourrait être récompensée de son soutien de la première heure au projet français en accueillant le secrétariat général, et la France et l’Egypte hériter de la coprésidence tournante. Balayant toutes les critiques, le président français a enfin profité de son dernier discours sur le sol tunisien pour renouveler son satisfecit au régime du président Ben Ali sur le terrain controversé des droits de l’Homme. « Tout n’est pas parfait en Tunisie, certes (…) mais je veux le dire aussi parce que je le pense, quel pays peut s’enorgueillir d’avoir autant avancé en un demi siècle sur la voie du progrès, sur la voie de la tolérance, et sur la voie de la raison ? », s’est-il exclamé. Cette question a plané sur tout le séjour tunisien de Nicolas Sarkozy, qui a suscité un tollé chez les défenseurs des droits de l’Homme. Il avait en effet affirmé à son arrivée lundi que « l’espace des libertés » avait « progressé » en Tunisie, pays pourtant souvent critiqué pour ses atteintes aux libertés.  


Sarkozy: l’Union pour la Méditerranée « changera le monde »

Par Bouazza ben Bouazza AP – Mercredi 30 avril, 16h31 TUNIS – Ncolas Sarkozy a consacré mercredi le dernier jour de sa visite d’Etat en Tunisie à un long plaidoyer sur son projet d’Union pour la Méditerranée (UPM) qui, « si elle devient une réalité, changera le monde », a-t-il prédit. Après avoir visité les vestiges romains de Carthage en compagnie de son épouse Carla, en robe gris perle, le président français s’est adressé aux étudiants de l’Institut national des sciences appliquées et de technologie (INSAT) de Tunis, créé grâce à la coopération scientifique franco-tunisienne. « Ce qui se joue en Méditerranée, c’est la survie d’une certaine idée de la personne humaine qui reste vivante dans l’âme et dans le coeur de tous les hommes qui vivent sur son rivage et qui ne peuvent s’empêcher depuis 1.500 ans de faire le même rêve d’unité », a-t-il dit. Dans l’esprit de l’initiateur de l’UPM, cette unité ne se fera pas par la conquête ou la croisade, ni par la domination, ni encore par la force ou la violence. L’UPM est « l’idée d’une union entre tous les pays de la Méditerranée fondée sur l’égalité des droits et des devoirs », a-t-il souligné en notant que le dialogue Nord-Sud, tout comme le processus de Barcelone, n’a fait que « creuser dangereusement le fossé entre les deux rives ». Nicolas Sarkozy propose que son projet méditerranéen s’organise autour de projets concrets s’inspirant de la démarche des pères fondateurs de l’Europe. Une nuance cependant: « l’UPM n’a pas la même finalité que l’Union européenne, (car) il ne s’agit pas de réaliser l’intégration politique de la Méditerranée mais d’organiser entre les peuples la coopération la plus étroite en suivant la même méthode pragmatique qui a rapproché les peuples européens après tant de déchirements ». Ce faisant, il s’agira de « créer, pas à pas, les conditions de la réconciliation, qui est la seule vraie condition de la paix et du développement ». « Jamais la Méditerranée n’a été autant au centre des préoccupations de l’Europe », a-t-il ajouté en se félicitant de l’adhésion de ses partenaires européens à l’UMP après quelques réticences notamment côté allemand. L’UPM doit être officiellement lancé le 13 juillet à Paris à l’occasion d’un sommet qui réunira tous les pays de l’UE avec ceux de la rive sud. « Ce jour-là, il s’agira, pour tous, d’être au rendez-vous de l’histoire », a-t-il avancé sur un ton solennel. Parmi les projets qu’il juge prioritaires, il a cité celui de la gestion et du partage de l’eau, car « tous les pays méditerranéens ont un problème d’eau et qu’avec l’eau c’est la vie elle-même qui est en jeu ». Il suggère en outre de s’attaquer à la dépollution de la Méditerranée « pour en faire la mer la plus propre du monde ». « Ce sera le plus grand défi de l’UPM et un échec serait dramatique », a-t-il averti. Nicolas Sarkozy a aussi évoqué un « plan solaire » qui permettrait à tous l’accès à l’énergie et limiterait les émissions de gaz à effet de serre. Il a, dans ce sillage, défendu de nouveau son approche sur l’accès au nucléaire civil que « la France veut promouvoir ». Il a avancé l’idée de la création « sur une base volontaire d’une organisation qui faciliterait les transferts de technologies et de compétences nucléaires et qui contribuerait à la gestion des déchets et à la sécurité du nucléaire civil ». Autres projets envisagés: un conservatoire du littoral méditerranéen, des autoroutes maritimes reliant les grands ports de la Méditerranée, de la coopération en matière de protection civile pour faire face aux catastrophes naturelles, ainsi que dans les domaines de la formation pour créer des emplois. Il a été chaudement applaudi par les étudiants lorsqu’il a préconisé la mise en place d’un « espace scientifique méditerranéen » qui ouvrirait les portes de toutes universités méditerranéennes à tout étudiant d’un pays riverain et favoriserait ainsi la compréhension mutuelle. Sur la circulation des personnes, il s’est opposé à la fois au « mythe » de l’immigration zéro et à l’ouverture totale des frontières, plaidant pour une gestion concertée de la migration, à l’instar de l’accord signé avec la Tunisie dans ce sens. « Le pacte européen pour l’immigration sera l’une des priorités de la présidence française de l’UE » à partir du 1er juillet prochain, a-t-il avancé. L’UPM est, à ses yeux, « l’expression d’une volonté politique de faire bouger en profondeur les sociétés, les économies, les cultures, pour créer des richesses, de la solidarité », dans le but de réduire le fossé entre les deux rives ainsi que « le plus fort écart de revenu au monde ». AP

 

 

 

Sarkozy – Le conflit Israël-Palestine ne doit pas entraver l’UPM

par Emmanuel Jarry TUNIS, 30 avril (Reuters) – Le président Nicolas Sarkozy a souhaité mercredi que le conflit israélo-palestinien ne soit pas une entrave à la construction de l’Union pour la Méditerranée (UPM) et a défendu de nouveau sa vision de ce projet. « Je sais que dans le projet de l’Union pour la Méditerranée, il y a la question d’Israël et la question de la Palestine », a-t-il déclaré aux étudiants de l’Institut national des sciences appliquées et de technologie de Tunis. « Je sais parfaitement que tout ceci est en arrière-plan (…) mais ça ne doit pas nous empêcher d’agir, cela doit nous encourager à agir. » Les 27 pays de l’Union européenne et tous les pays riverains du Sud et de l’Est de la Méditerranée, ainsi que la Jordanie et la Mauritanie, sont invités le 13 juillet à Paris au sommet qui doit lancer l’UPM. La persistance du conflit israélo-palestinien fait cependant planer un doute sur le niveau de la participation de pays comme la Syrie ou la Libye. « Manquer ce rendez-vous historique, ce serait prendre une responsabilité terrible vis-à-vis de nos enfants, vis-à-vis de toutes les générations à venir », a averti Nicolas Sarkozy, pour qui l’UPM « changera le monde », si elle devient réalité. Le président français, dont le pays assumera alors aussi la présidence de l’Union européenne, réfléchit à l’organisation le 14 juillet, après le sommet du 13, de réunions « par groupes et par sous-groupes pour tenir compte de toutes les sensibilités et de toutes les familles méditerranéennes », dit-on à l’Elysée. D’ici là, a dit Nicolas Sarkozy, les futurs pays membres de l’UPM devront se mettre d’accord sur les compétences de ses coprésidents désignés pour deux ans – un pour la rive Nord et un pour la rive Sud – et de son secrétariat permament, désigner les premiers titulaires et choisir le siège du secrétariat. Un des scénarios qui semblent se dessiner est que la première coprésidence soit confiée à la France et à l’Egypte. La France milite par ailleurs pour que le siège du secrétariat soit situé dans un pays du Sud et ne cache pas une préférence pour Tunis. Si le choix de la Tunisie est confirmé, le Maroc, qui est aussi candidat, pourrait nommer un secrétaire général adjoint, dit-on de source diplomatique française. La future UPM, initialement proposée par la France et amendée sous la pression de l’Allemagne, vise à renforcer la coopération entre l’UE et les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée en améliorant le processus dit de Barcelone. LA TUNISIE EN EXEMPLE Dans sa configuration initiale, le processus de Barcelone faisait « l’erreur » de se fonder sur « une relation inégalitaire où l’un décide et l’autre reçoit », a estimé Nicolas Sarkozy. Il s’est efforcé de rassurer ceux qui, en Europe, craignent que l’UPM concurrence l’UE : il ne s’agit pas de « réaliser l’intégration politique de la Méditerranée mais d’organiser une coopération la plus étroite possible », a-t-il dit. « Je la vois comme une union de projets, une union à géométrie variable où chacun participera comme il le souhaite, ou nul ne sera obligé de participer mais où nul ne pourra empêcher ceux qui le veulent d’avancer et d’agir. » Les premiers projets de coopération doivent être sélectionnés d’ici le sommet du 13 juillet. Nicolas Sarkozy a assuré que la France n’avait pas l’intention d’imposer ses propres propositions – « Que chacun reste bien calme. On n’impose pas, on propose, on ne s’énerve pas, on explique ! » Il n’en pas moins énuméré toute une série de propositions – gestion et partage de l’eau, dépollution de la Méditerrranée, « plan solaire », accès au nucléaire civil, protection du littoral, sécurité maritime, protection civile, coopération scientifique et universitaire, formation professionnelle, etc. Nicolas Sarkozy a fait des relations entre la France et la Tunisie, qui ont paraphé à l’occasion de sa visite un accord cadre de coopération dans le nucléaire civil, un exemple à suivre pour la construction de l’UPM. « J’ai voulu qu’avec le président Ben Ali nous soyons les piliers de l’Union pour la Méditerranée », a-t-il déclaré mardi lors d’une réception avec la communauté française. « Nous avons le devoir de faire de l’amitié entre la Tunisie et la France l’exemple même de ce que peut être une relation apaisée et féconde entre le monde musulman et l’Occident », a-t-il renchéri mercredi. « Ce que nous avons fait (…) le moment est venu de l’étendre à toute la Méditerranée. » La visite de Nicolas Sarkozy a également été marquée par l’annonce d’un accord sur la vente à Tunis Air de 19 Airbus A320, A330 et A350, dont 16 fermes et trois en options, et du renforcement de la présence de sous-traitant du consortium aérononautique européen en Tunisie, avec la création de 2.000 emplois à la clef./EJ

La France « ne transigera pas avec la sécurité d’Israël », affirme Nicolas Sarkozy à Tunis

AP – Mercredi 30 avril, 12h50 TUNIS – La France « ne transigera pas avec la sécurité d’Israël », a affirmé mercredi à Tunis le président Nicolas Sarkozy, tout en se faisant l’avocat d’un futur Etat palestinien « moderne, démocratique et viable ». La France « ne transigera pas avec la sécurité d’Israël », affirme Nicolas Sarkozy à Tunis « Il n’y a pas de raisons d’attendre (…) il faut un Etat moderne, démocratique, viable pour les Palestiniens et jamais on ne trouvera la solution si on ne reconnaît pas cela », a-t-il déclaré dans un discours à l’Institut national des sciences appliquées et de la technologie (INSAT) sur son projet d’Union pour la Méditerranée (UPM). « J’irai le dire en Israël au mois de juin prochain », a lancé le président français, pour qui « la garantie de la sécurité d’Israël, c’est qu’Israël ait à ses frontières un Etat viable, un Etat démocratique, un Etat moderne, un Etat où il y aura la Cisjordanie et Gaza ». Nicolas Sarkozy assure pour cela soutenir « de toutes (ses) forces le président de l’Autorité palestinienne Abou Mazen (nom de guerre de Mahmoud Abbas, NDLR) », notamment dans son action pour le développement des Territoires et la formation des jeunes. « En même temps, je le dis ici dans un pays arabe, la France ne transigera pas avec la sécurité d’Israël, parce qu’il y a la Shoah, parce qu’il y a l’histoire du XXe siècle et parce que c’est un fait politique majeur », a-t-il souligné avec gravité. « De la même façon, j’ai dit à nos amis israéliens qu’il fallait mettre un terme à la colonisation, qui ne renforçait pas l’intérêt d’Israël. » Si la question israélo-palestinienne ne s’inscrit qu' »en arrière plan » du projet d’UPM, « cela ne doit pas nous empêcher d’agir », a insisté M. Sarkozy en clôture de sa visite d’Etat en Tunisie. « Cela doit nous encourager à agir parce que tous ceux qui nous ont précédés ont échoué à faire la paix et que tous ceux qui nous disent qu’il faut attendre sont des fatalistes », a-t-il insisté. « Parce que le temps travaille contre la paix et parce qu’il y a eu trop de souffrances et qu’il est temps de mettre un terme à toute cette souffrance. » AP

Accès refusé

Yahyaoui Mokhtar

 

Ce mercredi, on vient de me couper ma connexion Internet. Ainsi ça recommence encore pour  la énième fois pendant les dernières années. Ainsi je ne pouvais plus depuis ce jour tenir mon journal en ligne « TUNISIA Watch » ni poster les notes que j’écris parfois sur mon blog. Bien que censuré en Tunisie, je trouve de mon devoir de continuer à apporter une autre image de mon pays, celle que la censure et la propagande cherche à occulter. L’intérêt que reflète le nombre des lecteurs, essentiellement d’Europe et du Maghreb, ne fait que m’encourager à persévérer. Aujourd’hui d’autres amis collaborent avec moi en postant directement leurs textes. J’espère que d’autres se joindront à eux par solidarité en participant à son contenu.

 

Je commence par ce qu’aurait fait normalement tout citoyen. J’appelle mon fournisseur d’accès pour signaler le dérangement. La voix qui me répond à l’autre bout du fil me demande les coordonnées nécessaires pour s’assurer de la validité de mon abonnement. Soudainement la ligne est coupée. C’est normal, cela arrive souvent ici, je recommence à appeler une autre fois le même numéro. C’est une autre voix qui me répond, je lui fais signaler que j’étais avec son collègue et que je viens juste d’être coupé. La personne avec courtoisie me demande les mêmes indications sans prêter attention à ma remarque. Elle me dirige ensuite sur une page pour réviser les coordonnées de mon abonnement. Tout semblait en règle, elle me demande à la fin d’accéder par le login et le mot de passe inscrits sur le bon de mon abonnement. Rien à faire, accès refusé. Elle me demande d’essayer une autre fois en faisant attention aux majuscules, minuscules et espaces comme ils sont inscrits. Elle va jusqu’à me demander de compter le nombre d’étoile avant d’appuyer sur le lien d’accès mais sans succès à chaque fois.

 

Alors on me demanda de patienter un peu et de rappeler dans une heure. Qu’est ce que j’ai d’autre à faire ? Une heure largement passée après, je reprend le téléphone et je compose le même numéro. C’est une troisième voix qui me répond. J’essaye de rappeler l’historique de ma réclamation. La personne me fait comprendre que c’est l’équipe de l’après midi et qu’elle va tout recommencer avec moi depuis le début. En bout de compte on arrive au même résultat. Mon téléphone fonctionne normalement, mon abonnement est payé à l’avance pour un an il y a juste un mois et l’accès fourni par mon opérateur est toujours refusé. La personne chargée normalement de me dépanner se trouve ainsi bloquée sans moyen convaincant pour justifier une telle situation, elle me demande alors avec toute la gentillesse qu’on peut imaginer de patienter encore et de rappeler dans une heure tout en raccrochant sans attendre mon consentement.

 

Personnellement je ne peux plus le refaire pour me trouver avec une nouvelle opératrice qui me mène en bateau jusqu’au même résultat. J’ai arrêté, c’est ma femme qui a pris le relais pouer aboutir enfin à une promesse de leur part de faire une réclamation auprès de la compagnie de téléphone et de lui répondre dans quelques jours.

 

Wait and see

 

En fait ce n’est pas la première fois que ça m’arrive. Aujourd’hui je ne compte plus le nombre de nouvelles lignes téléphoniques auxquelles j’ai du souscrire au cours des cinq dernières années sous diverses identités pour pouvoir accéder à un service public normalement garanti sur le même pied d’égalité à tout tunisien. La dernière fois j’ai du attendre plus de six mois le rétablissement de la connexion Internet sur ma ligne téléphonique sans résultat avant de souscrire la nouvelle ligne qui vient d’être coupée aujourd’hui. C’est ainsi qu’on agit pour établir les règles sur lesquelles se fonde la dictature de Ben Ali. Il y a au dessus de la loi des règles non écrites auxquelles on vous apprend à vous plier. Pour chaque mot, pour chaque geste, on vous apprend à réfléchir par deux fois avant de le prononcer ou d’agir avant de subir les conséquences de votre inadvertance.

 

Ainsi on a abouti à l’installation, dans l’esprit de chaque tunisien, de son propre surveillant au service de Ben Ali, de sa dictature et des intouchables autour de lui. On doit rester à un seuil peu élevé et agir sur une plateforme restreinte comme le disent très bien les expérimentés. Respecter les tabous sacrés de la dictature, ne pas franchir les lignes rouges et se complaire dans un discours de mécontent lâche qui fait pitié. Ainsi on est étroitement tenu en laisse par notre oppresseur sans jamais pouvoir rien changer à notre sort ni moins encore à celui de notre pays.

 

Yahyaoui Mokhtar – Mercredi 26 Avril 2008

 

(Source : « Tunisia Watch », le blog de Mokhtar Yahyaoui, le 26 avril 2008)

Lien : http://tunisiawatch.rsfblog.org

 

Ces choses que l’on ne voudrait point exhiber !

 

Publication de l’enquête nationale sur le budget des ménages de 2005

 

Une si longue attente… des choses que l’on ne voudrait point exhiber

 

Par Mahmoud Ben Romdhane

 

Sans effet d’annonce, dans la discrétion la plus absolue, avec un très grand retard, vient d’être publié et mis en vente le Rapport de l’Enquête nationale sur le budget, la consommation et le niveau de vie des ménages de 2005.

 

Et pour cause: ses résultats ne sont pas bons. Ils sont gênants à plus d’un titre: même en référence au seuil de pauvreté de 1980, devenu aujourd’hui anachronique, la pauvreté n’a, pour ainsi dire, pas reculé et la distribution des revenus (plus précisément des budgets des ménages) s’est détériorée.

 

Sur le front, de la lutte contre la pauvreté, la Tunisie a réalisé, dans le Passé, des percées remarquables. Jusqu’en 1985, du moins. Car depuis que des enquêtes statistiquement significatives sont réalisées (la première étant celle de 1965-1968), le taux de pauvreté et le nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté absolue ont baissé de manière spectaculaire : d’une enquête à l’autre, le taux est passé de 33,8 % en 1965-1968, à 22 % en 1975, 12,9 % en 1980, et 7,7 % en 1985 et l’effectif des personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté absolue a reculé de 300 mille à chaque fois.

 

Depuis 1985, l’élan est brisé: le taux ne baisse plus que de manière imperceptible et l’effectif des très pauvres ne recule, pour ainsi dire, Plus: au cours des vingt dernières années, il est passé de 554 mille à 376 mille: soit une diminution moyenne de 9mille par an contre 50 à 60 mille durant les deux décennies

 

Evolution des principaux indicateurs relatifs à la pauvreté absolue en Tunisie

 

 

 

Evolution des principaux indicateurs relatifs à la pauvreté absolue en Tunisie

 

Effectifs

Taux de pauvreté

Rapport du 9e au 1er décile

1965-68

1 533 000

33,8%

 

1975

1 223 000

22%

7,3

1980

823 000

12,9%

7,0

1985

554 000

7,7%

6,6

1990

544 000

6,7%

6,2

1995

559 000

6,2%

6,7

2000

399 000

4,2%

6,2

2005

376 000

3 ,8%

6,7

Source : Enquête nationale sur le budget, la consommation et le niveau de vie des ménages. INS – Tunis

 

 

 

Entre 1985 et 1990, l’effectif des très pauvres a pratiquement stagné et, entre 1990 et 1995, il a même augmenté. Pour cacher cette évolution, l’Institut National de la Statistique a reçu pour instruction de ne publier, ni les informations relatives à la pauvreté de 1995, ni les informations relatives à la distribution des ménages selon leur niveau de dépense. Ces informations, nous les connaîtrons quelque temps plus tard à travers une publication de la Banque mondiale. En 2000, parce que l’évolution est positive, la publication est complète: comme les précédentes (sauf celle de 1995), elle passe en revue toutes les dimensions: budget, structure de la consommation et distribution des ménages selon leur niveau de dépense. Sa présentation est faite en grande pompe: conférence de presse du Ministère du Développement Economique: reprise dans tous les médias, communiqués de presse, … et dans des délais très rapides.

 

L’enquête qui a été réalisée en 2005 ne connaît pas le même sort: ses résultats sont reportés de mois en mois. Et ce n’est que ce 11 avril, soit près de deux ans et demi après son achèvement que ses résultats sont publiés. Elle sera pratiquement amputée detout ce qui concerne la distribution des ménages par niveau de dépense: aucune comparaison ne sera faite avec la situation des périodes précédentes et on ne fournira aucune analyse concernant l’évolution des indices relatifs à l’équité ou à l’iniquité de la répartition des revenus (plus précisément des budgets) comme l’indice de concentration ou le rapport du 9è  décile au 1er  décile. Mais ces informations, un économiste ou un statisticien un peu rodé peut les reconstituer et c’est ce que nous avons fait. Voici ce qu’on voulait cacher:

 

le rapport entre le  9è décile (le budget moyen des personnes situées dans les 10 % les plus riches) et le 1er décile (le budget moyen des personnes situées dans les 10 % les plus pauvres) a augmenté entre 2000 et 2005, passant de 6,2 en 2000 à 6,7 en 2005,ce qui signifie un accroissement des écarts entre riches et pauvres et un effacement des progrès accomplis sur ce front depuis 1980; la masse des dépenses réalisées par les 20 % de la population ayant les dépenses les plus faibles est tombée de 6,9 % à 5,9 %, tandis que celles réalisées par les 20 % de la population ayant les dépenses les plus élevées a augmenté, passant de 47,3 % à 48,0%.

 

Quant au nouveau seuil de pauvreté, il rapproche le niveau communal du niveau non communal (ce qui est correct), mais sans prendre en considération le (plus que) doublement du niveau de vie des tunisiennes et des tunisiens et les nouveaux besoins devenus vitaux; il reproduit, pour ainsi dire, le seuil de 1980. Il est difficile de trouver un seuil si faible à l’échelle mondiale pour un pays ayant atteint le niveau de revenu de la Tunisie. Son utilité analytique est bien douteuse, sa capacité à éclairer la conduite de la politique sociale de lutte contre la pauvreté est bien faible; sa vertu est à rechercher ailleurs : la propagande

 

Mahmoud Ben Romdhane – Attarik Al Jadid – Samedi 19 avril 2008

 

(Source : « Tunisia Watch », le blog de Mokhtar Yahyaoui, le 28 avril 2008)

Lien : http://tunisiawatch.rsfblog.org

 


 

Sarkozy chez Ben Ali: mais où est passée Rama Yade?

Par Zineb Dryef

 

En visite officielle en Tunisie, Nicolas Sarkozy a déclaré n’avoir pas de leçons à donner en droits de l’homme au président Ben Ali.

 

Nicolas Sarkozy exagère. En visite officielle en Tunisie, il a déclaré n’avoir pas de leçons à donner en matière de droits de l’homme au président Zine El Abidine Ben Ali avant d’user de la même rhétorique que les chefs d’Etats autoritaires:

 

    « Et quant aux questions de sécurité et de terrorisme, qui peut penser que l’Europe serait plus heureuse avec un régime taliban en Algérie, en Tunisie, sans parler du Maroc? »

 

Dans la blogosphère franco-tunisienne, l’humeur est à la consternation.

 

Soit t’es d’accord avec moi, soit t’es pas en désaccord

 

La secrétaire d’Etat aux Droits de l’homme est bien du voyage mais elle a annulé une rencontre avec l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD). Un lapin qui a fait bondir la présidente de l’association, Khedija Chérif, pas dupe du prétexte invoqué: soucis d’agenda.

 

www.madjidenblog.fr .Sur son blog, Madjid [1]imagine une Rama Yade dans son rôle:

 

     » Avant son voyage en Tunisie, elle s’est entretenue plusieurs fois avec

    la Fédération tunisienne des droits de l’homme ainsi que les représentants d’Amnesty International et de Human Rights Watch. Elle s’est particulièrement engagée aux côtés de Radia Nasraoui, avocate militante des droits de l’homme, littéralement harcelée par la

    police politique de Ben Ali (…). Forte de ses convictions et de ses soutiens, Rama Yade a donc prévenu qu’elle n’irait pas en Tunisie pour faire de la figuration. Arrivée sur le tarmac de l’aéroport, elle a, en signe de soutien et de solidarité avec les victimes de la répression policière orchestrée par Ben Ali, refusé de serrer la main à son homologue, ce qui lui a valu une réprimande de la part de Sarkozy lui-même, qui lui aurait dit: ‘soit t’es d’accord avec moi, soit t’es pas en désaccord!’ A quoi elle aurait répondu: ‘Je reste fidèle à mes convictions en les trahissant’. C’est une foule nombreuse qui a accueilli Rama Yade dehors, en scandant: ‘Merci Rama, grâce à toi les libertés vont avancer!’. »

 

Ben Ali n’aime pas Internet

 

www.bakchich.fr .Nos confrères de Bakchich [2] en avertissaient leurs lecteurs dès lundi 28 avril: leur site est inaccessible depuis la Tunisie:

 

    « Une poignée de privilégiés -diplomates? militaires?- y ont néanmoins accès, comme le révèlent les statistiques de Google Analytics, qui tracent les connexions à Bakchich de par le monde entier. »

 

Les sites de partage de vidéos, YouTube [3] et Dailymotion [4], sont également absents des ordinateurs tunisiens. De nombreuses vidéos tournant au ridicule le président et sa femme Leïla Trabelsi (ou plus engagées) y sont régulièrement postées:

 

www.tunisiawatch.rsfblog.org  .TunisiaWatch [5], l’un des plus importants sites d’opposition au régime de Ben Ali, rencontre également des couacs de connexion:

 

    « En fait, ce n’est pas la première fois que ça m’arrive. Aujourd’hui, je ne compte plus le nombre de nouvelles lignes téléphoniques auxquelles j’ai dû souscrire au cours des cinq dernières années sous diverses identités pour pouvoir accéder à un service public normalement garanti sur le même pied d’égalité à tout tunisien. La dernière fois j’ai dû attendre plus de six mois le rétablissement de la connexion Internet sur ma ligne téléphonique, sans résultat, avant de souscrire la nouvelle ligne qui vient d’être coupée aujourd’hui. C’est ainsi qu’on agit pour établir les règles sur lesquelles se fonde la dictature de Ben Ali. Il y a au-dessus de la loi des règles non écrites auxquelles on vous apprend à vous plier. Pour chaque mot, pour chaque geste, on vous apprend à réfléchir par deux fois avant de le prononcer ou d’agir avant de subir les conséquences de votre inadvertance. »

 

Immigration, droits de l’homme et Union

 

samitriani.hautetfort.com  .Samitriani [6]commente le voyage de Nicolas Sarkozy en usant quasiment de la même formule que lui; gagnant-gagnant:

 

    « La Tunisie, que l’on le veuille ou pas, est un pays pauvre… On a besoin de l’aide de la France, du co-développement, de cette foutue Union méditerranéenne et on

    n’a pas trop le choix si on veut évoluer. Il faut laisser un peu de

    coté al chahama (ndlr: honte) ou le sentiment de fierté… Il faut être pragmatique! »

 

Quelques lignes plus loin, le blogueur reconnaît être gêné par l’absence de discours sur les droits de l’homme.

 

www.afrik.com .Interviewée par Afrik.com, Sihem Bensedrine, présidente du Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT) a fermement condamné la visite de Nicolas Sarkozy:

 

    « La société civile est bien sûr très déçue par Sarkozy, qui a parlé de confiance totale à un homme qui n’a rien fait pour son pays. C’est vrai que la France n’a pas à donner des leçons à la Tunisie mais on comptait sur elle pour faire passer des recommandations fermes à Ben Ali (…). En ce qui me concerne, je n’attends plus rien d’elle ni de l’Europe. J’ai bien compris la leçon. Apparemment, la dictature, c’est bien pour nous, les Tunisiens, mais pas pour eux, les Français. Les bougnoules n’ont pas le droit à la démocratie: voilà le message que délivre Nicolas Sarkozy. »

 

Une certaine presse comblée

 

www.lapresse.tn .Mais il serait injuste de ne citer que les mécontents. L’enthousiasme de certains s’est même fait sans limites. La Presse [7] a rendu hommage aux déclarations de Nicolas Sarkozy sur les droits de l’homme et enfilé les clichés:

 

    « Et en indiquant que la France est fière d’être le premier partenaire de la Tunisie dans tous les domaines, le président Sarkozy confirme que la France entend le rester pour accompagner l’œuvre de modernisation et de développement de notre pays sur les principes de la confiance, du respect, de l’estime et de l’amitié. »

 

www.lequotidien-tn.com .Sur le même ton, l’éditorialiste du journal Le Quotidien [8] s’emballe pour l’Union pour la Méditerranée, grand projet de Nicolas Sarkozy:

 

    « Un sentiment partagé par le Président Ben Ali et tout le peuple tunisien qui lui ont réservé hier un accueil chaleureux qui traduit la profondeur des relations bilatérales… »

 

Et si on s’arrêtait?

 

 

Liens:

[1]http://www.madjidenblog.fr/post/2008/04/29/RAMA-YADE-A-SEVEREMENT-CRITIQUE-LE-PRESIDENT-BEN-ALI-QUALIFIANT-SON-REGIME-DE-DICTATURE-AUTOCRATE

[2]http://www.bakchich.info/

[3]http://www.youtube.com/

[4]http://www.dailymotion.com/fr

[5]http://tunisiawatch.rsfblog.org/

[6]http://samitriani.hautetfort.com/archive/2008/04/29/sarkozy-en-tunisie-et-mon-passeport.html

[7]http://www.lapresse.tn/index.php?opt=10&categ=7

[8]http://www.lequotidien-tn.com/detailarticle.asp

 

(Source : « Rue89.com » (France), le 30 avril 2008)

Lien:http://www.rue89.com/2008/04/30/sarkozy-chez-ben-ali-mais-ou-est-passee-rama-yade

 

 


 

Sarkozy en Tunisie : « un appui total à la dictature de Ben Ali »

 

Interview de Sihem Bensedrine, présidente du Conseil national pour les libertés en Tunisie

par Hanan Ben Rhouma                                                                                 

 

« Tout va bien, circulez ». Nicolas Sarkozy n’a rien à redire à son homologue tunisien sur l’Etat de droit. Les déclarations du président français durant sa visite officielle, lundi, ont irrité les militants des droits de l’Homme qui comptaient beaucoup sur lui pour discuter de la situation avec Zine El Abidine Ben Ali. Sihem Bensedrine, présidente du Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT) fait partie de ces « désillusionnés ».

 

L’Etat tunisien est régulièrement critiqué pour ses nombreuses atteintes aux droits fondamentaux. Selon plusieurs organisations nationales et internationales, la torture, les arrestations et condamnations arbitraires sont monnaie courante dans le pays. Les libertés d’expression, de réunion et de manifestation, entre autres, sont bafouées. Mais le président Ben Ali a toujours réfuté ces critiques. C’est pourquoi les ONG ont beaucoup espéré de Nicolas Sarkozy, qui déclarait pourtant avoir préparé un chapitre des droits de l’homme pour sa visite. Sihem Bensedrine, présidente du Conseil national pour les libertés en Tunisie et farouche opposante au régime tunisien, a souhaité réagir.

 

Afrik.com : Quelles sont vos réactions à l’issue des déclarations de Nicolas Sarkozy lundi ?

Sihem Bensedrine : Je considère cette visite comme un appui total à la dictature de Ben Ali. Je ne suis pas vraiment surprise de l’attitude de la France. Depuis que Sarkozy est arrivé au pouvoir, aucun signe fort n’a été envoyé sur la question des droits de l’homme en Tunisie comme dans d’autres pays. Il a prétendu qu’il y avait un chapitre des droits de l’homme pour sa visite ici mais c’était juste de quoi faire taire les journalistes et peut-être l’opinion.

 

Afrik.com : Avez-vous eu des échos de la visite de Rama Yade (secrétaire d’Etat aux droits de l’Homme) auprès des organisations de défense des libertés ? Vous a-t-elle invité ?

Sihem Bensedrine : La CNLT n’a reçu aucune invitation et ça ne m’étonne pas. Les associations reconnues ont déjà énormément de mal à être entendues alors imaginez un peu l’état dans lequel se trouvent les associations non reconnues comme la nôtre ! Néanmoins, Rama Yade avait rendez-vous ce matin au local des Femmes démocrates (ATFD). Mais une heure avant, des officiels du ministère des Affaires étrangères ont appelé les responsables de l’association pour annuler le rendez-vous sans aucune explication. Puis la secrétaire d’Etat a refusé de se rendre au local de la LTDH (Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme), prétextant des « problèmes internes » et a demandé à Mokhtar Trifi (président de la LTDH) de se rendre à son hôtel. C’est un manque de respect flagrant des institutions aussi reconnues que sont l’ATFD ou la LTDH. Aujourd’hui, les droits de l’homme deviennent un sujet de rhétorique. C’est bien d’en parler et ça fait « bien » de ramener une secrétaire des droits de l’homme dans ses bagages. Mais rien n’est fait pour avancer sur le terrain des libertés en Tunisie.

 

Afrik.com : Quel bilan tirez-vous de cette visite ?

Bensedrine : La société civile est bien sûr très déçue par Sarkozy, qui a parlé de « confiance totale » à un homme qui n’a rien fait pour son pays. C’est vrai que la France n’a pas à « donner des leçons » à la Tunisie mais on comptait sur elle pour faire passer des recommandations fermes à Ben Ali. La France, que l’on dit « pays des droits de l’homme » se disqualifie du dossier. Je dirais que les ONG sont désillusionnées plutôt que déçues des déclarations du président français. J’ajoute même que la France a voté pour Ben Laden : en donnant un coup de pied aux droits de l’Homme, elle a encouragé le terrorisme à l’intérieur du pays. Là, tous les espoirs se sont envolés et les combats pour la liberté et la justice reçoivent une belle gifle. En revanche, ce sont les contrats qui étaient mis en avant.

 

Afrik.com : Voyez-vous finalement cette visite comme une simple opportunité économique pour la France ?

Sihem Bensedrine : Oui, et pourtant la situation financière en Tunisie est catastrophique ! On sera bientôt en rupture de stocks de blé, sans doute au mois de mai, on aura bientôt plus de quoi faire du pain en Tunisie, les prix ont flambé et la situation va en empirant avec le contexte de crise alimentaire mondiale. Je ne vois pas comment on va payer le milliard engagé par la Tunisie avec Airbus. Finalement, on voit que deux sujets seulement intéressent la France : faire du business et combattre le terrorisme international.

 

Afrik.com : Nicolas Sarkozy a loué les progrès de la Tunisie concernant l’économie et les droits de l’homme. Estimez-vous qu’il y ait eu une quelconque amélioration de la situation pendant ces 20 dernières années ?

Sihem Bensedrine : Non. On a fait un recul historique si l’on devait comparer la situation à celle dont l’on jouissait 20 ans auparavant. L’arrivée au pouvoir de Ben Ali a été une vraie catastrophe politique pour la Tunisie. Certes, il y a eu une amélioration de la situation économique mais elle n’est pas due à Ben Ali. C’est grâce aux quelques entrepreneurs dynamiques qui ont su mettre les chances de leur côté. Ben Ali met ses tentacules sur tout ce qui bouge et empêche le développement du secteur privé. Sa dictature a tout bloqué et a grandement fragilisé la société. On ne sait pas ce qui nous attend, surtout en cette période économique incertaine. On ne parle décidemment pas la même langue que la France !

 

Afrik.com : On cite toujours le statut des femmes en Tunisie comme exemple. Qu’avez-vous à dire à ce sujet ?

Sihem Bensedrine : En tant que femme tunisienne, j’ai des droits, mais ils existent depuis 1956. Mais ce n’est pas parce qu’on possède des acquis démocratiques qu’on a plus le droit de progresser. On prend toujours le prétexte du statut des femmes pour justifier le blocage de la société sur tous les autres droits fondamentaux. On oublie la torture, les emprisonnements arbitraires et bien d’autres choses encore. La société tunisienne est complètement verrouillée à tel point qu’on ne peut plus respirer. La liberté d’expression n’existe pas. C’est la cinquième fois depuis 1999 qu’on demande l’autorisation de publier notre journal « Kalima » (en arabe « le mot »), et cinq refus essuyés. On refuse même de prendre le dossier de nos mains car les instructions viennent de plus haut. Pendant ce temps, deux journaux complaisants à l’égard de la dictature ont vu le jour récemment, dont l’un a le cœur d’insulter les défenseurs des droits de l’homme.

 

Afrik.com : Qu’attendez-vous maintenant de la France ?

Sihem Bensedrine : En ce qui me concerne, je n’attends plus rien d’elle ni de l’Europe. J’ai bien compris la leçon. Apparemment, la dictature, c’est bien pour nous, les Tunisiens, mais pas pour eux, les Français. Les « Bougnoules » n’ont pas le droit à la démocratie : voilà le message que délivre Nicolas Sarkozy. Je sais maintenant que je ne peux plus compter sur le pays « des droits de l’homme » qu’est sensé être la France. On va devoir compter sur nous-mêmes et la société civile tunisienne et étrangère.

 

(Source : « Afrik.com » (Quotidien en ligne – France), le 29 avril 2008)

Lien :http://www.afrik.com/article14199.html


 

Sarkozy en Tunisie : les droits de l’homme passent à la trappe

Entre les libertés fondamentales et les contrats, le président français a vite tranché

 

par Hanan Ben Rhouma                                                                                 

 

 

A l’occasion du premier jour de la visite d’Etat de Nicolas Sarkozy en Tunisie lundi, de juteux contrats commerciaux ont été signés. Le président français a marqué le coup le soir même en louant son homologue tunisien Ben Ali pour les progrès accomplis en matière de libertés. « La Tunisie a fait le choix volontaire de la démocratie » et la France n’a donc pas à « donner de leçons », a-t-il déclaré. Pourtant, le régime tunisien est régulièrement pointé du doigt par les organisations non gouvernementales (ONG) pour ses atteintes aux libertés et aux droits de l’homme. Retour sur l’entame d’une visite ponctuée de déceptions.

 

« Des trois pays du Maghreb, la Tunisie est celui avec lequel nous entretenons la relation la plus dense et la plus apaisée ». Ce sont les mots qu’a prononcé Jean-David Lévitte, conseiller diplomatique de Nicolas Sarkozy, quelques jours avant le départ du président français lundi en Tunisie. Une raison pour le gouvernement d’éluder la question qui fâche : celle des droits de l’homme dans le pays où règne en maître depuis 20 ans Zine El Abidine Ben Ali. Pourtant, M. Sarkozy déclarait l’an dernier, lors de sa campagne présidentielle, qu’il voulait d’une « diplomatie des droits de l’homme ». Un an après, ces mots sonnent plus creux que jamais. Après le passage remarqué de M. Sarkozy en Chine en novembre dernier et la visite controversée du président libyen en France le mois suivant, on a bien compris : les contrats commerciaux passent en premier. Pendant deux jours, rien ne doit obscurcir l’entente franco-tunisienne. Rama Yade, secrétaire d’Etat aux droits de l’Homme, est prévenue : elle risque gros si elle sort du rang. Les ONG tunisiennes de lutte des droits de l’Homme, à l’image du Conseil National des Libertés en Tunisie (CNLT) et de sa présidente Sihem Bensedrine, affirment aujourd’hui être « déçues » et même « désillusionnées » par les déclarations faites par Nicolas Sarkozy la veille.

 

Sarkozy « Pleinement confiant » dans la politique de Ben Ali

 

Lors de son dîner d’Etat lundi soir, Nicolas Sarkozy a affirmé devant un parterre d’officiels français et tunisiens être « pleinement confiant » dans les efforts de son homologue tunisien en matière des droits « universels ». Les louanges se sont multipliées à son égard. « L’espace des libertés progresse », a déclaré M. Sarkozy, avant d’évoquer le statut des femmes tunisiennes comme étant le plus progressiste du Maghreb. Puis il a expliqué « qu’aucun pays ne peut avoir entièrement parcouru » le chemin « de la liberté et du respect des individus ». Par conséquent, « je ne vois pas au nom de quoi je me permettrais dans un pays où je suis venu en ami et qui me reçoit en ami de m’ériger en donneur de leçons », conclue t-il. Pour lui, c’est simple. Le débat est clos.

 

Rama Yade en veilleuse

 

Autre déception pour les ONG qui attendaient mardi, de pied ferme, un geste de Rama Yade. Elle avait prévu de rencontrer les responsables de l’Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD) ainsi que le président de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH) Mokhtar Trifi. Elle a tout bonnement annulé son rendez-vous avec l’ATFD « sans aucune explication » et a proposé à M. Trifi de la rencontrer à son hôtel et non plus dans son local. Pressions du président français, tunisien ou simple lâcheté ? En tous cas, « c’est un manque flagrant de respect vis-à-vis des institutions reconnues que sont l’ATFD ou la LTDH », a déclaré Sihem Bensedrine à Afrik.com. Rama Yade et son ministre de tutelle, Bernard Kouchner, font partie du voyage en tant que simples bagages présidentiels, semble-t-il. « Ca fait bien d’emmener une secrétaire pareille dans ses bagages mais rien n’est fait pour avancer sur le terrain des libertés en Tunisie », explique Mme Bensedrine. Jusque là, aucune déclaration n’a été prononcée publiquement et il y a peu de chances de voir la situation se retourner d’ici mercredi, date du retour en France de Nicolas Sarkozy et de son équipe.

 

Dans la lignée de ses prédécesseurs

 

Jacques Chirac, qui a cédé sa place de chef d’Etat français en 2007, affirmait en 2003 lors de sa visite en Tunisie que le premier des droits de l’homme était « de se nourrir ». Une déclaration qui est restée en travers de la gorge des défenseurs des libertés en Tunisie. Ils espéraient la « rupture » tant annoncé par M. Sarkozy lors de sa campagne présidentielle. Tel le « fils spirituel » de Jacques Chirac, l’actuel président français est soucieux de préserver d’excellentes relations avec le maître du pays tout en profitant du « miracle économique tunisien ». Preuve en est, les contrats juteux signés lundi avec Airbus et Alstom, l’un pour la livraison d’une dizaine d’avions et l’autre pour la construction d’une centrale thermique. Mais Mme Bensedrine ne voit pas comment la Tunisie « va payer le milliard » pour Airbus, sachant que la situation économique est, selon elle, « catastrophique ». « On n’attend plus rien de la France (…), le pays des droits de l’homme » et « on va devoir compter sur nous-mêmes et la société civile », conclut Mme Bensedrine.

 

(Source : « Afrik.com » (Quotidien en ligne – France), le 29 avril 2008)

Lien : http://www.afrik.com/article14198.html

 

 


 

« En Tunisie, la cause des femmes recule »

 

Pour Khadija Cherif, la liberté de la femme doit se conjuguer avec démocratie. La présidente de la plus ancienne association de femmes tunisiennes était en avril à Genève pour suivre l’évaluation des droits de l’homme de son pays par ses pairs à l’ONU. Interview.

 

Carole Vann/Tribune des droits humains –

 

Fondée en 1989, l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD) constitue avec la Ligue tunisienne des droits de l’homme, l’Association contre la torture, le Conseil national pour les libertés, les principaux, voire uniques, mouvements d’opposition au régime du président Ben Ali. Mais l’ATFD, la dernière des ONG indépendantes à être légalisée en Tunisie, essaie de trouver des terrains de dialogue avec le gouvernement. Ce choix lui vaut de nombreuses critiques. Interview de sa présidente Khadija Cherif.

 

La Tunisie a la réputation d’être très avancée en matière de droits de la femme. Partagez-vous ce point de vue ?

 

La Tunisie passe pour être l’exception en matière de liberté de la femme dans le monde arabe. C’est vrai dans un certain sens, mais cette question est instrumentalisée à des fins politiques et pour l’image extérieure du pays. Et cela dessert les femmes. Dans la réalité, il y a peu d’espace où les femmes peuvent faire entendre leur voix et les associations comme les nôtres ont des difficultés à mener leurs activités. Notre liberté de ton dérange. Nous n’avons pas la même vision que le pouvoir. Pour nous, le droit de la femme se conjugue avec la démocratie et les libertés.

 

Pourtant, avec le code du statut personnel, les Tunisiennes ont des acquis juridiques incontestables.

 

Le code du statut personnel promulgué en Tunisie il y a cinquante ans a été révolutionnaire par rapport à la région. Mais ce code n’a jamais consacré l’égalité de la femme avec l’homme. Ce dernier reste le chef de famille, il détient seul l’autorité parentale, la succession est toujours gérée selon la loi islamique (les filles héritent moitié moins que les garçons). En cas de divorce, la femme peut avoir la tutelle des enfants, mais uniquement si le mari est jugé défaillant. Actuellement le code marocain, la moudawna, est plus évolué : par exemple, l’autorité parentale est partagée.

 

Et même si les Tunisiennes ont des acquis, surtout juridiques, leur vécu est semé d’embûches : le repli identitaire, les références religieuses, l’absence de démocratie sont autant d’obstacles à l’émancipation de la femme. En réalité, les Tunisiennes rencontrent les mêmes problèmes que les femmes du reste du Maghreb. On observe d’ailleurs une régression ces dernières années… Les violences domestiques sont un sujet tabou. Il n’est pas rare d’entendre des hommes, même des juges, dire que si les femmes sont battues, c’est qu’elles doivent être éduquées. C’est dire s’il y a encore du chemin à parcourir.

 

Votre gouvernement vous a consultées pour établir son rapport destiné à ce nouveau mécanisme de l’ONU, l’EPU. Vos recommandations ont-elles été prises en compte ?

 

Quand le gouvernement a voulu nous consulter pour son rapport pour l’EPU, nous avons hésité. Puis nous nous sommes dit que la politique de la chaise vide était contre–productive, d’autant que nous avons toujours cherché à être associées dans les prises de décisions. Donc nous avons joué le jeu. Et cela s’est bien passé. Ils nous ont écoutées et ont enregistré nos recommandations. Nous avons demandé que la Ligue des droits de l’homme, la plus ancienne ONG en Tunisie, soit enfin débloquée ; que le gouvernement révise sa loi sur les libertés d’associations et les critères d’enregistrement des ONG ; et qu’il adapte sa législation à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Nous avons aussi demandé une loi pour protéger les femmes victimes de violence. Et nous avons retrouvé certaines de nos revendications dans le rapport. Ce qui est positif, il faut le reconnaître. Maintenant, nous attendons leur concrétisation dans les faits.

 

Mais j’ai été très déçue de la manière dont s’est passée l’évaluation de la Tunisie par ses pairs. En dépit des points positifs que je viens de décrire, il est inconcevable d’entendre cette autosatisfaction et ce consensus sur les libertés, les médias, etc, alors que la situation est tout autre et très grave.

 

La plupart des ONG indépendantes vous reprochent de jouer le jeu du régime. Que leur répondez-vous ?

 

Il y a dix ans, mon association aurait probablement refusé d’entrer en matière pour l’EPU par exemple. Mais, avec l’expérience, nous avons choisi de prendre ce qu’on nous donne et de nous en servir pour élargir nos revendications. Nous ne sommes pas dupes, nous savons que nous pouvons être utilisées. Mais nous restons fidèles à nous-mêmes, et continuons à travailler en toute indépendance. Faut-il se départir de ses revendications ou convictions de peur d’être instrumentalisées ?

 

Un exemple : en 2003, nous avons sorti un communiqué sur le port du voile, qui exprimait notre inquiétude. Nous avons appelé les femmes à prendre conscience que le voile est un symbole d’enfermement. Le régime a repris à son compte nos arguments. On nous a alors reproché de faire le jeu du pouvoir. Mais pour nous, l’important, c’est de gagner du terrain au profit des femmes.

 

De toute façon, que l’on joue le jeu ou pas, on est instrumentalisé. La ligue des droits de l’homme n’a pas été consultée pour l’EPU, mais elle a été citée dans le rapport comme un acquis national parce que cela faisait « démocratique. »

 

Quel danger majeur guette les femmes en Tunisie aujourd’hui ?

 

La régression des mentalités et la montée de l’intégrisme qui sont favorisées par l’absence de démocratie. Les risques sont sérieux.

 

Il y a deux ans, une étude a montré que 80% des femmes voilées qui ont été interrogées le font aujourd’hui parce qu’elles veulent retrouver leur identité. Elles font ce choix pour marquer leur désaccord avec le gouvernement tunisien et les pays occidentaux qui ne respectent pas les droits de l’homme notamment dans la guerre en Irak.

 

L’étude montre aussi que cette régression est liée à la multiplication des chaînes satellitaires dans le pays. Vu la situation internationale et l’absence de libertés chez eux, les Tunisiens se tournent vers ces chaînes qui sont pour la plupart islamistes. La chaîne Iqra, par exemple, appelle au port du voile pour mieux contrer l’Occident, et elle a une audience importante. Le danger est là !

 

(Source : Agence Infosud (Suisse), le 13 avril 2008)

Lien :http://www.droitshumains-geneve.info/En-Tunisie-la-cause-des-femmes,2998

 


 

 

Sarkozy sert son cocktail contrats-droits humains à Tunis

 

Le président français en visite d’Etat au pays de Zine ben Ali. Difficile équilibre entre l’économie et les principes.

 

Le cocktail contrats-droits de l’homme que sert traditionnellement à ses hôtes Nicolas Sarkozy paraît de plus en plus amer après les épisodes malencontreux en Libye et en Chine.

 

Néanmoins, le président français va proposer cette potion – qui n’a plus rien de magique – lors de sa visite d’Etat qui se déroule actuellement en Tunisie[100]. Dans une interview au quotidien Le Temps de Tunis, il énumère les principaux objectifs de sa rencontre avec le chef d’Etat tunisien, Zine El Abidine ben Ali.

 

Tout d’abord, «la gestion des migrations» entre la France et la Tunisie[100]. L’une facilite l’entrée des Tunisiens qui veulent se former; l’autre aide la France à combattre l’immigration illégale. Ensuite, les discussions rouleront sur l’Union pour la Méditerranée, chère au cœur des deux présidents.

 

Nicolas Sarkozy veut y assurer la prééminence française, même si cette idée qu’il a lancée sera développée par l’ensemble des Etats de l’Union européenne et non pas par les seuls pays riverains de la Grande Bleue.

 

Et Ben Ali manœuvre à plein régime pour que Tunis devienne le siège de cette future Union pour la Méditerranée. Enfin, la France et la Tunisie[100] «vont conclure un important accord de partenariat dans le domaine du nucléaire civil». Le président français veut décrocher à Tunis la vente d’Airbus et d’équipements de centrale thermique pour le groupe Alstom.

 

Et les droits de l’homme? A l’Elysée, on promet qu’ils ne seront pas laissés pour compte. D’ailleurs, la secrétaire d’Etat aux droits de l’homme Rama Yade – qui n’a pas sa langue aiguisée ni son drapeau démocratique dans sa poche – fait partie cette fois-ci du voyage en Tunisie[100]. En novembre dernier, elle avait été écartée du déplacement de Nicolas Sarkozy en Chine en raison de son franc-parler concernant la politique chinoise.

 

Que dira-t-elle en Tunisie[100]? Que fera-t-elle pour conforter les démocrates tunisiens particulièrement malmenés par le pouvoir? C’est l’un des enjeux de ce déplacement qui suscite bien des espoirs du côté des opposants à Ben Ali. «M. Sarkozy, marchez sur les pas de Pierre Mendès France !» (le chef du gouvernement français qui, en 1954, avait décrété l’autonomie interne de la Tunisie[100]), écrit Wicem Souissi sur le site du Parti démocrate progressiste tunisien.

 

Nicolas Sarkozy sur les traces de Mendès France? C’est peut-être un peu trop demander…

 

Jean-Noël Cuénod, Paris

 

(Source : « Tribune de Genève » (Quotidien – Suisse), le 29 avril 2008)

 

 

 

 


 

 

En Tunisie, Sarkozy enfonce le clou sur les droits de l’homme

 
De notre envoyé spécial à Tunis, CHRISTOPHE AYAD.
 
Face à la polémique soulevée en France par ses félicitations au régime Ben Ali dans le domaine des droits de l’homme («L’espace des libertés progresse en Tunisie»), Nicolas Sarkozy est revenu ce matin sur le sujet devant les étudiants tunisiens. Il a souligné les réalisations incontestables en matière d’«émancipation de la femme», de «constitution d’une vaste classe moyenne», d’«émergence d’une élite intellectuelle» et d’«élévation du niveau de vie».
En revanche, il s’est livré à un panégyrique plus contestable de la lutte contre «le fondamentalisme, qui est notre ennemi commun, l’obscurantisme et tous les fanatismes», Cautionnant ainsi les méthodes plus que musclées employées par le régime au nom de la lutte antiterroriste, au point qu’un juge américain s’était opposé au transfert d’un détenu tunisien de Guantanamo vers son pays d’origine où il risquait de connaître un sort pire que dans la prison d’exception américaine, bien que lavé de toute accusation. «Je voudrais que chacun, à chaque fois qu’il regarde la Tunisie et qu’il la juge, garde toujours présente à l’esprit l’importance de ce qui se joue ici», a-t-il conclu. Pendant ce temps, Rama Yade a rencontré des organisations féministes, tentant de rattraper sa gaffe de la veille, lorsqu’elle avait annulé sa visite à l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), l’une des seules indépendantes du pays. La présidente de l’association, l’opposante Khadija Chérif, a fini par recevoir, juste avant le départ de la délégation française à Paris, un coup de téléphone d’un membre du cabinet de Rama Yade pour s’excuser de ce faux pas.
(Source : « Libération » (Quotidien – France), le 30 avril 2008)


 

Sarkozy, la «main-d’œuvre» tunisienne et «l’intelligence» française

 
Nicolas Sarkozy, à Tunis mardi (Reuters).

Le président français souhaite unir les «formations françaises» aux Tunisiens qui demandent «à être formés». Mercredi, il a renouvelé ses félicitations au président Ben Ali en matière de liberté.
 
Le président tunisien Ben Ali peut commencer une collection de bons points. Ce mercredi, Nicolas Sarkozy a une nouvelle fois salué les progrès accomplis par la Tunisie en matière de liberté et de tolérance. Si le président français a convenu que «tout n’est pas parfait en Tunisie», c’était seulement pour ajouter: «Tout n’est pas parfait en France non plus». Et de demander, au risque de faire rougir son hôte tunisien: «Quel pays peut s’enorgueillir d’avoir autant avancé en un demi-siècle sur la voie du progrès, sur la voie de la tolérance, et sur la voie de la raison?»

 

Pour ceux qui en doutaient encore, l’éloge de «l’espace des libertés» qui «progresse» en Tunisie n’était donc pas un dérapage. Pas plus que la proposition d’unir l’«intelligence» et les «formations» françaises à une «main-d’œuvre [tunisienne] qui ne demande qu’à être formée» faite mardi devant des patrons des deux pays à Tunis. La tête et les jambes à la sauce Sarkozy en somme.

Souci de clarté

Pour Nicolas Sarkozy, l’idée est de concurrencer l’Asie en créant «un pôle gagnant-gagnant». Quelques minutes plus tard, le Président martèle: «Ensemble, avec votre main-d’œuvre, avec nos écoles, nos universités, avec ce que nous échangerons, nous pouvons créer un modèle qui triomphera dans le monde entier.» Mais attention, Sarkozy ne voudrait pas que l’on pense que l’échange est inégalitaire: «Gérons ensemble les flux migratoires pour que vous, Tunisiens, soyez assurés qu’on ne pille pas vos élites. Et que nous, nous puissions accueillir ceux à qui nous pouvons donner un travail et un logement.»

Par souci de clarté sans doute, le chef de l’Etat a tenu à dénoncer une vision dépassée des relations bilatérales: «Il y a un rivage où l’on invite, il y a un rivage où l’on est invité si on est bien élevé. C’est une négation de ce qu’est le monde aujourd’hui. Il n’y a pas les pays en première division et les pays en seconde division. Il y a des pays qui sont égaux en droit et en devoir.»

«La France essaie de comprendre des réalités»

Et au sujet des droits, toujours audacieux et briseur de tabous, Sarkozy n’a pas hésité à évoquer ceux… de l’homme: «La France sera entendue des autres sur toutes les questions, y compris les plus sensibles, y compris les droits de l’homme, si, elle-même, fait des efforts.» Faut-il comprendre qu’elle n’en fait pas et qu’il est lui donc impossible d’aborder le sujet hors de ses frontières ?

De toute façon, Sarkozy répète son nouveau credo: la France ne donne pas de leçons, «la France essaie de comprendre des réalités». La France ne pointe pas les problèmes, elle indique que «sur tel point ou sur tel autre, nous pensons que le bon chemin, c’est celui-ci».

Mais le modeste président français s’est révélé plus assuré sur un autre sujet: «La France est le premier partenaire économique de la Tunisie. (…) Nous sommes là pour vous dire que nous sommes prêts à nous battre pour la conserver et pour la conforter.» Ouf.

(Source : « Libération » (Quotidien – France), le 30 avril 2008)

 


 

Tunisie : les livres sous la coupe de la censure

Fethi Djebali/Syfia Tunisie –

 

Moins visible et reconnue que face à la presse, la censure touche aussi la littérature en Tunisie. Alors que la foire du livre de Tunis s’ouvre ce 24 avril, une cinquantaine de livres d’écrivains tunisiens sont bloqués chez les imprimeurs sur ordre du pouvoir. Seuls des exemplaires photocopiés circulent sous le manteau.

 

Pour Jalloul Azzouna, rien ne justifie la censure de son livre. « La littérature est subversive par essence », s’époumone ce trublion de la littérature tunisienne, qui a fait sienne la défense de tous les livres interdits en Tunisie. Il compte parmi la trentaine d’écrivains du pays dont les ouvrages sont censurés. Il y a quelques années, il a créé la Ligue tunisienne des écrivains libres, qui n’est toujours pas reconnue par le pouvoir du président Ben Ali, car elle se pose en alternative à l’Union des écrivains tunisiens, instance aux ordres du régime.

 

Jalloul ne désespère pas de voir un jour son livre Littérature et liberté, même identité dans les rayons des librairies. Militant malgré lui, Le pain amer, Quand est-ce que j’étais vivant pour mourir ?, Dit en marge de l’interrogatoire, Un témoin a dit ou encore Les enfants d’Allah sont parmi la cinquantaine de livres interdits des librairies tunisiennes. Le dernier en date, Un capitaliste qui a réussi, d’Habib Hamdouni écrit en arabe, remonte à 2006. Des proches du pouvoir s’y seraient reconnus.

 

Fadhila Chebbi, qui édite à compte d’auteur depuis 15 ans, n’a cessé, depuis la censure de son dernier livre, de le relire comme si elle ne l’avait pas écrit, à la recherche du passage qui expliquerait cette décision. C’est souvent une phrase, une allusion ou un fait sans aucune corrélation directe avec des faits réels qui est à l’origine de la censure. Selon Azzouna, il est probable que l’histoire du livre de Fadhila, celle d’un général qui, par erreur, signe l’ordre de castrer toute l’armée, est à l’origine de l’interdiction de son livre, bien que l’auteure n’indique pas de pays.

 

D’autres livres sont ouvertement engagés pour une cause ou prennent le contre-pied de la politique menée par le pouvoir, comme Notre femme à travers les fatwa. Certains, interdits du temps de l’ancien régime de Bourguiba, le sont toujours sous Ben Ali, malgré le caractère obsolète de leurs critiques. « Certains livres sont interdits non pas à cause de leur contenu, mais à cause de l’engagement politique de leurs auteurs dans la vie publique et parfois même d’un de leurs proches », explique Jalloul Azzouna.

 

La machine de la censure

 

Pendant des années, Jalloul a essayé de remonter la chaîne de la censure. Qui en décide ? Pour quelles raisons ? À qui s’en remettre : à la justice, au ministère de la Culture, au ministère de l’Intérieur ? La plupart de ses questions sont restées sans réponse. L’écrivain est constamment renvoyé aux « services compétents », une expression qu’il abhorre aujourd’hui, censée désigner une instance invisible qui décide du sort des livres.

 

Le mécanisme concret est efficace. L’imprimeur est tenu de déposer un nombre donné d’exemplaires auprès des ministères de la Culture et de l’Intérieur, ainsi que de la Bibliothèque nationale. En retour, il doit recevoir, selon la loi qui ne précise pas de délai, un récépissé de la part de l’administration, sans lequel il ne peut délivrer la totalité des exemplaires imprimés à l’éditeur. Mais il est rare que celui-ci lui parvienne.

 

En cinquante ans d’indépendance, certaines imprimeries tunisiennes sont devenues de vraies prisons à livres. Des maisons d’édition audacieuses ont fini par mettre la clé sous le paillasson après avoir pris le risque financier d’éditer plusieurs livres qui ont fini par être censurés. « Les éditeurs sont devenus frileux », témoigne Fadhila.

 

Aujourd’hui disparue, la maison Aloés, de Sihem Ben Sedrine, n’a vu aucun de ses livres passer entre les mailles du filet. Taoufik Ben Brik, l’écrivain qu’elle fut la première à éditer, a fini par se tourner vers les maisons d’édition françaises. A l’instar de Mohammed Talbi, Ben Brik compte parmi les quelques écrivains considérés aujourd’hui comme « totalement exportateurs » dont les oeuvres demeurent largement méconnues dans leur pays.

 

« Maquis de l’édition »

 

En attendant la levée officielle de l’embargo sur ces livres, Jalloul Azzouna les distribue sous forme de photocopies. « Nous le faisons dans un but de sensibilisation, par lot de cinquante exemplaires », explique-t-il. Une formule de distribution qu’il qualifie de « maquis de l’édition » et qui lui permet, pour le moment, de faire fi un tant soit peu de l’avis des autorités. Dans un Tunis avide de livres polémiques, ces exemplaires trouvent vite preneurs et leurs heureux possesseurs s’empressent de les photocopier à leur tour. D’autres initiatives ont permis d’exposer ces photocopies sur des stands, en marge des foires du livre de Paris ou de Berlin. Les appels à la libération du secteur de l’édition, comme celui lancé par l’organisation internationale des éditeurs, n’ont pas manqué ces dernières années, sans réelles avancées.

 

En 2007, le président Ben Ali avait promis de libérer tous les livres interdits. Aujourd’hui, une année après, les mots du Président sont restés lettres mortes. Jalloul, lui, continue son combat.

 

(Source : Agence Syfia (France), le 28 avril 2008)

Lien : http://www.droitshumains-geneve.info/Tunisie-les-livres-sous-la-coupe,3053

 

 

 


 

 

A Tunis, Nicolas Sarkozy vante son projet d’Union pour la Méditerranée

 

Tunis, envoyée spéciale

 

 

C’est par un vibrant plaidoyer en faveur de l’Union pour la Méditerranée (UPM) – projet qui lui est cher et qu’il portera sur les fonts baptismaux, le 13 juillet, lors du sommet de Paris – que Nicolas Sarkozy a conclu, mercredi 30 avril, sa visite d’Etat de trois jours en Tunisie. Dans un discours prononcé à l’Institut national des sciences appliquées et de technologie (Insat) de Tunis, le président français a appelé les pays du bassin méditerranéen « à ne pas manquer ce rendez-vous avec l’Histoire » par égard pour les générations futures.

 

 Cette Union, M. Sarkozy la voit dotée d’une coprésidence tournante assurée simultanément par un pays de la rive nord et un pays de la rive sud. Quant au siège du secrétariat de l’UPM, il sera installé au sud. En Tunisie, comme cela a été évoqué ? Le chef de l’Etat français ne s’est pas prononcé.

 

Pour M. Sarkozy, les pays du bassin méditerranéen doivent s’associer pour lutter ensemble contre « la barbarie », une menace persistante contre la civilisation. Dans la Tunisie, « pays engagé depuis un demi-siècle sur la voie du progrès, de la tolérance et de la raison », le président français voit un exemple possible « pour tous les peuples menacés par le fondamentalisme et l’obscurantisme ». Passant du lyrique au concret, M. Sarkozy devait ensuite citer quelques projets possibles de l’UPM : la gestion et le partage de l’eau; la dépollution de la Méditerranée « pour en faire la mer la plus propre du monde »; la sécurité maritime; l’organisation d’un Centre méditerranéen de la recherche scientifique, ou encore la mise au point pour les pays méditerranéens d’un programme d’échanges universitaires Erasmus.

 

La veille, devant 500 chefs d’entreprise français et tunisiens, M. Sarkozy avait dit, une fois encore, qu’à ses yeux, le développement des pays méditerranéens était un gage de stabilité pour l’Europe et surtout un rempart « contre le terrorisme et un régime taliban en Tunisie, en Algérie ou au Maroc ». Et c’est à ce titre de combattant du terrorisme que M. Ben Ali a eu droit aux louanges répétées du président français.

 

LES DÉFENSEURS DES LIBERTÉS AMERS

 

Les défenseurs tunisiens des libertés ne cachent pas leur amertume à l’issue de cette visite de M. Sarkozy. Ils rappellent que le candidat Sarkozy s’était engagé à faire de la défense des droits de l’homme « un pilier de la politique étrangère de la France » au cas où il entrerait à l’Elysée.

 

Rama Yade, secrétaire d’Etat aux droits de l’homme, n’a pas réussi à adoucir leur amertume. Elle a même annulé à la dernière minute un entretien prévu depuis samedi avec une figure de la société civile, l’universitaire Khadija Cherif, présidente de l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD). Officiellement, l’emploi du temps de Mme Yade était « trop chargé ».

 

La secrétaire d’Etat s’est contentée de recevoir l’avocat Mokhtar Trifi, président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH), dont les activités sont paralysées depuis 2000. Me Trifi, autant que Mme Cherif, se sont dits « choqués » par les propos de M. Sarkozy, qui a affirmé, lundi soir, lors du dîner officiel offert en son honneur au palais de Carthage, qu’en Tunisie « l’espace des libertés progresse ».

 

« La priorité de M. Sarkozy, c’est le commerce, mais il devrait savoir que le développement ne peut être seulement économique », a estimé Khadija Cherif, qualifiant les propos du président français de « marque de mépris pour la société civile tunisienne ». De son côté, Mokhtar Trifi a souligné que « l’enfermement, l’avis unique, la voie unique » faisaient le lit de l’extrémisme. Pour lui, une Tunisie démocratique serait « le meilleur rempart » contre le terrorisme et les « talibans » que semble tant redouter M. Sarkozy.

 

Florence Beaugé

 

(Source : « Le Monde » (Quotidien – France), le 1er mai 2008)

 


Accord nucléaire en Tunisie : Nicolas Sarkozy termine son « Atomic Tour » de la Méditerranée

28 avril 2008
 

Paris, France — Greenpeace dénonce le nouvel accord de coopération nucléaire que devraient signer, lundi 28 avril au soir, les Présidents français et tunisien à l’occasion de la visite officielle de Nicolas Sarkozy en Tunisie. Après l’Algérie, la Libye et le Maroc, le président de la République/VRP du nucléaire boucle ainsi sa tournée du pourtour méditerranéen. Selon l’Elysée, cet accord prévoit la formation d’ingénieurs et déboucher, à long terme, sur la construction d’une centrale nucléaire.

« C’est à chaque fois la même rengaine : sous couvert de lutter contre les changements climatiques et de défendre le droit de tout pays d’accéder au nucléaire civil, la France développe, notamment au Maghreb, un néo-colonialisme nucléaire, s’indigne Frédéric Marillier, en charge de la campagne Énergie à Greenpeace France. Le nucléaire comme un outil de développement est une véritable aberration, aussi bien sur le plan énergétique et que sur le plan industriel ». Pourquoi généraliser le nucléaire dans le pourtour méditerranéen ? On peut s’interroger sur la volonté de certains États de se lancer dans une technologie très risquée et très coûteuse, qui les mettra sous dépendance technologique et énergétique de la France et d’Areva, alors qu’ils disposent de toutes les conditions pour passer directement à un modèle énergétique propre, notamment fondé sur les énergies renouvelables. Par ailleurs, de nombreux experts, même dans les rangs des défenseurs de l’atome, s’interrogent sur l’intérêt du recours au nucléaire dans des pays qui ne disposent pas des infrastructures nécessaires, et notamment d’un gros réseau électrique capable absorber la production d’un ou plusieurs réacteurs. Ainsi l’ultra pro-nucléaire Jean Syrota, prédécesseur d’Anne Lauvergeon à la tête du leader mondial du nucléaire, à l’époque où Areva s’appelait encore Cogema, estime qu’« il existe peu de réseaux de 20°000 MW dans le monde, et donc peu de pays où le développement du nucléaire est économiquement justifié ». Dans la revue Politique étrangère (voir l’article « L’avenir du nucléaire civil », in Politique étrangère, 2008/1, printemps, p.161-171), Jean Syrota ajoute que le nucléaire « représenterait un moyen de production d’électricité non compétitif qui, de plus, serait le plus capitalistique, alors que souvent ces pays manquent de capacité d’investissement. Il faudrait donc trouver d’autres raisons que le souci d’une gestion efficace et raisonnable d’un système électrique ». Aberration énergétique, irrationalité industrielle… Mais comment Nicolas Sarkozy justifie-t-il ces accords de coopération nucléaire qu’il signe avec de nombreux pays, notamment dans une région du monde où une généralisation du nucléaire poserait de sérieux risques de prolifération ? Ces accords ne sont jamais débattus, leur contenu n’est jamais dévoilé, ni dans les pays signataires, ni en France. Greenpeace dénonce cette opacité et réclame toute la lumière sur les accords de coopération nucléaires signés par la France. « Il serait aberrant que les gouvernements du pourtour méditerranéen misent sur l’énergie nucléaire pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, reprend Frédéric Marillier. En essayant de vendre des projets nucléaires partout dans le monde, de Flamanville à Tripoli, Areva et la France jouent un jeu dangereux, qui ne fait que détourner l’attention des solutions économiques, propres et garantes de paix, disponibles dès aujourd’hui dans la lutte contre le défi climatique. »
 
(Source: Le site de « Greenpeace » le 28 avril 2008)
 
 

 

 

Home – Accueil الرئيسية

Lire aussi ces articles

6 août 2008

Home – Accueil TUNISNEWS 8 ème année, N° 2997 du 06.08.2008  archives :www.tunisnews.net   Reuters:Putsch en Mauritanie après le limogeage

En savoir plus +

26 juin 2008

Home – Accueil   TUNISNEWS  8 ème année,N° 2956 du 26.06.2008 archives : www.tunisnews.net El Watan:Amnesty international: Carton rouge pour la

En savoir plus +

Langue / لغة

Sélectionnez la langue dans laquelle vous souhaitez lire les articles du site.

حدد اللغة التي تريد قراءة المنشورات بها على موقع الويب.