Tunisie: recul de 7,8% du PIB au premier trimestre 2011
AFP / 03 juin 2011 10h25
TUNIS – La Tunisie, où une révolte populaire a fait chuter en janvier le régime du président Ben Ali, a vu son PIB chuter de 7,8% au premier trimestre 2011, plombé notamment par la chute des revenus touristiques, selon l’Institut national de la statistique (INS) cité par l’agence officielle TAP.
Au quatrième trimestre 2010, la Tunisie avait enregistré un taux de croissance de 1,6%.
En glissement annuel, la croissance de l’économie tunisienne a régressé de 3,3% à prix constants au premier trimestre 2011.
L’INS impute ce net recul à la baisse respective de la valeur ajoutée des secteurs des industries manufacturières (-4,6%) et non manufacturières (-8,6%).
L’activité économique dans le secteur des services a quant à elle baissé de 6,1% au premier trimestre sur un an, sous l’effet notable du recul de l’activité dans les secteur liés au tourisme.
D’après l’INS, la valeur ajoutée dans les services hôteliers, cafés et restaurants a affiché une baisse de 35% sur la période, et le secteur des transports a enregistré une diminution de 18,5%.
Le secteur agricole, a, pour sa part, contribué de manière positive à l’allègement de la baisse du rythme de la croissance économique nationale, note la TAP, sans fournir de chiffres.
Arrestation en Tunisie d’une soeur de Ben Ali
AFP Vendredi 3 Juin 2011
Tunis – L’une des soeurs de l’ex-président tunisien Zine El Abidine Ben Ali, Najet Ben Ali, a été arrêtée jeudi soir dans la région de Sousse, à 150 km au sud de Tunis, selon une source autorisée auprès du ministère de l’Intérieur, cité par l’agence officielle TAP.
Najet Ben Ali faisait l’objet d’un mandat d’amener, souligne la TAP sans préciser pour quel motif.
Le président déchu est réfugié en Arabie saoudite depuis sa fuite le 14 janvier. Plusieurs pays européens ont gelé ses avoirs et ceux de sa famille, qui s’était considérablement enrichie sous sa présidence.
Trente-trois membres de son clan et de celui de sa seconde épouse Leila Trabelsi avaient été interpellés dans les jours suivant la chute de son régime.
Ali Chaouch devant le juge d’instruction
L’ancien ministre Ali Chaouch a été interrogé hier par le juge d’instruction du 5ème bureau. L’interrogatoire a tourné autour de la période durant laquelle Ali Chaouch était secrétaire général du RCD et à propos de personnels de différents ministères détachés auprès de l’ancien parti au pouvoir et des privilèges en nature (voitures notamment) qu’obtenaient ces personnes. Après l’avoir interrogé durant 2h15, le juge d’instruction a décidé de laisser Ali Chaouch en liberté, après lui avoir fait remplir une fiche anthropométrique.
(Business News)
(Source: “Le Temps” (Quotidien – Tunisie) le 3 juin 2011)
L’avocat de Zine El Abidine Ben Ali écrit à Business News
03/06/2011 Suite à l’article « Zine El Abidine Ben Ali lance des menaces via son avocat », publié dans nos colonnes le jeudi 2 juin 2011, Me Akram Azoury, du cabinet Azoury et associés, et avocat de l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali, nous a envoyé de Beyrouth en date du vendredi 3 juin, un courrier dans lequel il affirme que son client nie catégoriquement posséder des biens matériels ou immobiliers à l’étranger. Voici le courrier de Me Azoury tel que nous l’avons reçu et en téléchargement le communiqué de presse qu’il a publié en langue arabe. Messieurs, Je vous remercie d’avoir publié ma déclaration concernant l’annonce par certaines autorités nationales du gel des avoirs du Président Zine El Abidine Ben Ali et tiens néanmoins à préciser que ma déclaration du 1er juin 2011 avait pour objet de nier l’existence d’avoirs appartenant au Président Zine El Abidine Ben Ali en dehors de la Tunisie et par conséquent d’exhorter les différentes autorités qui annoncent des mesures conservatoires de gel d’identifier à l’opinion publique les avoirs qu’elles sont présumées avoir gelés en application de l’obligation d’impartialité de toute autorité publique car publier une mesure de gel sans en informer le public de son résultat porte le public à croire que les avoirs prétendument gelés existent effectivement, alors qu’en réalité les prétendus avoirs n’existent pas. Vous trouverez ci-joint à toute fin utile le texte intégral de ma déclaration.
(Source: “Business News” le 3 juin 2011)
9ème Congrès des femmes démocrates Egalité, citoyenneté et dignité
Sous le double signe « La marche des femmes continue pour l’égalité, la citoyenneté et la dignité » et « Démocratie et parité ». L’Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD) organise, aujourd’hui, à 15 heures, à l’Hôtel Africa, à Tunis, son 9ème congrès. Après l’allocution de la présidente de l’Association Mme Sana Ben Achour, un sondage sur les attentes politiques des femmes sera présenté et suivi par les prises de paroles des invités. Quant aux élections du comité directeur elles se dérouleront demain au siège de l’Association, on s’attend à ce que l’alternance à la tête de l’ATFD soit respectée comme ce fut le cas lors des précédents congrès. Lutte Signe de temps et grâce à la Révolution, ce congrès ne sera pas sous haute surveillance policière et ne se tiendra pas dans les locaux étroits du siège de l’Association comme c’était le cas avant le 14 janvier. L’ATFD était interdite d’organiser ses réunions, ses conférences de presse et ses congrès dans les lieux publics. L’ATFD a été fondée par le mouvement autonome des femmes qui, depuis les années 1970 a eu, à travers différentes structures, des formes d’expression diverses. Mais l’association a été légalisée en 1989. Elle œuvre depuis à la réhabilitation de la lutte des femmes, à la transformation des mentalités patriarcales, à la participation des femmes à la vie civile et politique et à la reconnaissance sans restriction de leur pleine citoyenneté.
Ennahdha, et les scénarios américains pour la Tunisie
Vendredi, 03 Juin 2011 08:08 Les Etats-Unis ne sont pas indifférents au processus de transition en Tunisie. Quel est leur scénario préféré pour notre pays? Ce scénario a-t-il pour nom: le parti islamiste Ennahdha? Par Ridha Kéfi
C’est, en tout cas, ce qu’affirment nos confrères de ‘‘Maghreb Confidentiel’’, en soulignant les contacts au plus haut niveau qu’a eus récemment Hamadi Jebali, le secrétaire général d’Ennahdha, au cours de sa visite à Washington. M. Jebali a participé à un forum organisé le 9 mai par le Center for the Study of Islam & Democracy (Csid), dirigé par le Tuniso-américain Radwan Masmoudi et financé par le Département d’Etat américain, le National Endowment for Democracy, l’US Institute of Peace, etc., entre autres think tanks proches des cercles de décision à Washington. Que M. Jebali ait ou non rencontré, comme l’affirme ‘‘Maghreb Confidentiel’’, les deux sénateurs Joe Libermann et John Mc Cain, les responsables américains les plus impliqués dans l’accompagnement de la transition démocratique dans le monde arabe, l’équipe du membre du Congrès John Kerry, ou encore Margaret Nardi, la directrice de l’Office of Maghreb Affairs au Département d’Etat, cela ne démontre rien et, du reste, importe peu. Ce qui est essentiel, en revanche, c’est de constater un regain d’intérêt de l’administration américaine pour les mouvements islamistes dans le monde arabe en général et en Tunisie en particulier.
Une force politique montante Les Américains seraient-ils disposés à avaliser et à accompagner l’arrivée d’un parti islamiste modéré et vaguement ouvert à la tête d’un pays arabo-musulman, la Tunisie en l’occurrence, le pays de la région le plus ouvert à la modernité occidentale? Pourquoi les Américains accepteraient-ils d’adouber Ennahdha, fut-il l’un des partis islamistes les plus modérés au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, après l’Akp au pouvoir en Turquie? On pourrait avancer les raisons suivantes:
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les mouvements islamistes sont les plus populaires et les mieux implantés dans la région. Au terme de plusieurs décennies de combat, au cours desquelles ils ont été durement réprimés, avec la complicité passive des Occidentaux, ils ont gagné de haute lutte la reconnaissance voire la sympathie de larges franges de la population qui, hier encore, ne leur étaient pas acquises ou leur étaient franchement opposées;
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après la chute des dictatures, en Tunisie et en Egypte, et bientôt en Libye, en Syrie et au Yémen, les capitales occidentales ont découvert une scène politique quasi-désertique, ou éclatée, ou inconsistante, en tout cas sans expérience de gouvernement, et où seuls émergent, par leurs qualités mobilisatrices, les islamistes;
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en Tunisie, le parti Ennahdha, longtemps soupçonné de propension à la violence, ne cesse de montrer patte blanche, affichant le visage avenant d’un mouvement ouvert, modéré, consensuel, prêt à toutes les concessions et, surtout, favorable à une transition sans heurts;
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Ennahdha et la plupart des autres partis islamistes autorisés en Tunisie depuis la chute de la dictature semblent bien placés pour faire une entrée en force dans la prochaine Assemblée nationale constituante; ce qui en fait des acteurs de premier ordre de la scène politique tunisienne au cours des prochaines années. Ils sont, pour ainsi dire, incontournables, et les Américains, dont le pragmatisme s’encombre rarement de partis-pris idéologiques, semblent disposés à rattraper le temps perdu et à nouer des liens utiles avec une force politique montante;
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dans sa communication politique, Ennahdha ne montre plus aucune animosité à l’égard de l’Occident, alors qu’il a de bonnes raisons d’en vouloir à cet Occident qui a longtemps soutenu les dictatures soi-disant laïques. Mieux: le parti islamiste tunisien proclame aujourd’hui haut et fort son attachement à la liberté religieuse et ne fait pas mystère de ses options libérales en matière économique. Contrairement à de nombreux partis de gauche, il ne porte aucun grief contre l’économie de marché. Ce qui constitue, on s’en doute, un gage de crédibilité et de respectabilité aux yeux des Américains;
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last but not least, les Américains observent la région comme un ensemble géopolitique où l’effet domino peut fonctionner dans un sens comme dans l’autre. Avant, les dictateurs de service – qui étaient, accessoirement, des agents de la Cia et des porte-drapeaux de la normalisation avec Israël – leur ont fait comprendre qu’il n’y a de choix qu’entre la dictature et le terrorisme, entre Ben Ali et Ben Laden, pour emprunter l’expression d’un célèbre éditorialiste parisien. Or, leurs analystes se rendent compte aujourd’hui, un peu tardivement il est vrai, que la dictature est le terreau même du terrorisme, l’une nourrissant l’autre et s’en nourrissant elle-même en retour.
Le pari sur l’islamisme soft à la turque Je me suis échiné, en différentes occasions, au cours des dix dernières années, à vouloir expliquer cette équation à des responsables politiques et des diplomates occidentaux, qui ne voulaient rien en entendre. Ils sont nombreux aujourd’hui à vouloir nous l’expliquer… à leur tour! Vu de Washington, le pari sur l’islamisme soft à la turque pourrait être une solution pour la crise politique qui s’installe dans la région, et la Tunisie pourrait en être le laboratoire. Par sa taille, son histoire, ses spécificités démographiques, culturelles et politiques, la Tunisie est le pays arabo-musulman qui présente les meilleures dispositions pour une rapide sortie de crise. Notre pays a offert le mode d’emploi de la révolution aux autres pays de la région. Il pourrait leur offrir aussi le mode d’emploi d’une transition sans heurts: tous les Occidentaux y croient, les Américains plus que les autres. Il n’y a que nous qui en doutons encore… Qu’on nous comprenne: les Américains n’ont pas nécessairement de préférence s’agissant de la force politique qui prendra en main demain le destin de la Tunisie. Mais ils préfèrent avoir de bonnes relations avec toutes les forces existantes, y compris les islamistes. (Source: “Kapitalis” le 3 juin 2011)
Lien:http://www.kapitalis.com/fokus/62-national/4203-ennahdha-et-les-scenarios-americains-pour-la-tunisie.html
Partis/ Nouvelle identité et nouveau discours d’Ennahdha … «Même les femmes non voilées sont les bienvenues», déclare Hammadi Jébali
Une nouvelle identité visuelle pour le parti Ennahdha c’est aussi une manière de dire que le parti se fait à l’évolution qui s’opère dans le monde et est à l’écoute du pouls d’une société avide de changements. Sauf que là, le secrétaire général d’Ennahdha précise que cette rencontre est purement culturelle ! Soit. Et comme tout est culture, ou presque, il était question de prouver qu’Ennahdha développe la culture de la communication, en nous montrant l’art et la manière. Et comment ! On dépêche un jeune communicateur qui donne un exposé en arabe et en français (quoique bourré de fautes). Celui-ci montre point par point les phases de préparation de cette nouvelle identité visuelle « On doit se démarquer des autres partis qui deviennent assez nombreux. En plus Ennahdha veut communiquer avec les jeunes. Autant être porteur de leurs valeurs et de leurs aspirations aux changements. » avance-t-il. Une colombe, une étoile et un olivier L’identité visuelle du parti telle qu’elle a été présentée par ce jeune nahdhaoui, nous renvoie à l’image d’une colombe dirigée vers le haut se préparant au décollage, complétée d’une branche d’olivier symbolisant paix et prospérité. Le tout forme un cercle étreignant une étoile, illustrant les cinq préceptes de l’Islam. Les couleurs laissent parler un camaïeu de couleur bleu rappelant le ciel bleu et la couleur pure et cristalline de l’océan se mariant à la couleur rouge sang de notre drapeau national. Il y a lieu de remarquer que malgré la portée symbolique de ce logo il est un peu trop chargé pour être facilement assimilé tout comme c’est le cas souvent de certains propos tenus par les dirigeants du parti. A commencer par cette nouvelle orientation du parti où l’on remarque, pantois, la présence d’une femme non voilée placée à la tribune. « Est-ce une image de façade ou est-ce le signe avant-coureur d’un changement qui concerne aussi bien le fond que la forme ? » demande le journal Le Temps- Hammadi Jébali qui y répond souligne qu’ Ennahdha est avant toutes choses « un parti civil». « Le voile est un choix personnel et on croit aux libertés individuelles et collectives. Même un père ne doit pas imposer à sa fille le Hijab. » fait remarquer notre interlocuteur. Et même si le secrétaire général du parti a insisté sur le fait que le politique est absent de cette rencontre, cela n’a pas empêché les journalistes présents de lui poser quelques questions portant notamment sur le financement d’Ennahdha dont les ressources sont nettement supérieures à d’autres partis fragilisés de par leur manque de moyens matériels à déployer. Hammadi Jébali invoque pour cela le fait que son parti retire sa légitimité dans le militantisme de sa base où 30 000 nahdhaouis ont été réprimés, opprimés et persécutés à souhait de par le passé. Côté financement du parti, Jébali se dit non obligé de présenter des justificatifs en ce sens, puisque les autres partis ne le font pas. « Il faut demander des comptes à tous les partis. Dans ce cas je le ferais volontiers.» dit-il. Autre question qui dérange ? Il y en a bien entendu. Cette fois-ci cela concerne la campagne menée par certains partisans d’Ennahdha contre tous ceux qui critiquent leur parti sur Facebook. Hamadi Jébali en bon orateur, a pu encore une fois tirer son épingle du jeu. « Ces internautes qui traitent de mécréants ceux qui désapprouvent Ennahdha ne représentent en rien les valeurs de notre parti qui se veut à l’écoute de toutes les critiques. On peut se tromper et rectifier le tir. On n’est pas des anges.»dit-il. Au diable les préjugés. Et sans pour autant en émettre un, le parti Ennahdha semble donner un discours qui se veut au diapason mais jusque-là il n’est pas assez convaincant.
Quand Ennahdha deviendra t-il un parti comme les autres ?
2011 est d’ores et déjà une année exceptionnelle pour le mouvement Ennahdha. C’est l’année du trentenaire, l’année de la sortie de la clandestinité après des années de répression et de la légalisation. Sera-t-elle aussi l’année du triomphe électoral, comme l’espèrent secrètement les militants ? Pour le moment, les dirigeants d’Ennahdha savourent leur revanche : « Ben Ali n’est plus là, le RCD n’est plus là, par contre, notre mouvement est bien présent et ne s’est jamais aussi bien porté », commentera Hamadi Jébali, jeudi lors de la réunion de présentation du logo du parti.
« La Tunisie a changé. Le monde a changé », n’a cessé de répéter le Secrétaire général du mouvement au cours de cette réunion. Pourquoi dès lors, « le parti ne changerait-il pas ? ». Ce changement pour Ennahdha se décline sous différentes formes : « nous voulons être un parti moderne dans sa gestion, dans son fonctionnement interne, dans les prises de décision » dans son identité visuelle à travers le nouveau logo : un aigle déployant ses ailes prêt à s’envoler formant un cercle avec des feuilles d’olivier avec au milieu une étoile rouge représentant les cinq piliers de l’islam et au dessous le nom du parti et sa devise : Liberté-justice-développement, histoire de se démarquer des autres partis. Changement aussi dans le look de ses cadres et de ses militants. Ils avaient fière allure ces dirigeants bon chic bon genre, rasés de près, la mise bien soignée avec, à l’extrémité de la tribune, telle une pasionaria, une jeune demoiselle, Asma, au visage avenant comme celui que voudrait se donner le parti, « maîtrisarde en criminologie », précise t-elle, avec sa chevelure bouclée, son jean serré et son gilet modern fashion. Se doute t-elle un instant qu’elle pourrait servir d’alibi à un parti qui, quoiqu’il dise, n’a pas encore fait sa révolution copernicienne en matière d’émancipation féminine, et de bien d’autres sujets en s’en remettant à tout propos, comme référant, au « salaf essalah », en continuant à séparer les hommes des femmes dans ses meetings, en envisageant à demi-mots la légalisation de la polygamie « dans certains cas », en multipliant les petites phrases pour, aussitôt, se déjuger devant la levée de boucliers qu’elles provoquent à propos notamment du travail des femmes, de la mixité et de bien d’autres acquis. Asma n’en a cure. Son engagement au sein d’Ennahdha « est mûrement réfléchi et n’a été pris sous aucune contrainte ».
En excellent dialecticien, Hamadi Jébali essaye de rassurer, faisant face au feu roulant des questions des journalistes avec beaucoup de détermination, mais sans pour autant emporter la conviction. Il est vrai que l’assistance, où la gent féminine était bien représentée, était décidée à lui porter la contradiction en se référant à des exemples précis comme la multiplication des excommunications تكفير décrétées par des internautes se réclamant d’Ennahdha sur facebook, les agressions contre les femmes dans les lieux publics, le hiatus flagrant entre la rhétorique et la pratique. Le dirigeant nahdhaoui désavoue, invoque le manque de discipline de certains militants, sauf qu’au détour d’une phrase, il évoque les «thawabet», les constantes, un terme suffisamment imprécis pour autoriser tous les abus, toutes les volte-faces, toutes les dérives
Le parti des 30000 prisonniers. C’est en ces termes que Hamadi Jebali qualifie son parti pour rappeler la répression bien réelle qui s’est abattue sur lui depuis les années 80. Cela n’est pas sans rappeler « le parti des 76000 fusillés », comme se définissaient les communistes français au lendemain de la 2ème guerre mondiale. Le PCF a mis 61 ans pour devenir un parti de gouvernement (sans tenir compte du Front Populaire où il s’était contenté d’appuyer le gouvernement Blum sans y participer et du court intermède de la libération) et au prix d’une révision déchirante de son idéologie (abandon de la lutte des classes, du matérialisme historique, rejet du centralisme démocratique et en s’en remettant au jeu démocratique). Le mouvement Ennahdha est-il en mesure aujourd’hui de changer réellement, non pas en se contentant d’un simple toilettage, mais en procédant à un véritable aggiornamento, en cédant sur des points sur lesquels une grande partie de la population n’est pas près de transiger comme le montrent les multiples interpellations dont les Nahdhaouis sont l’objet de la part des citoyens et, in fine, en cessant de se considérer comme le seul exégète autorisé (par qui ?!) de la parole divine ?
K. Omrane
(Source: www.leaders.com.tn 2011-06-02)
Lien: http://www.leaders.com.tn/article/quand-ennahdha-deviendra-t-il-un-parti-comme-les-autres?id=5364
Constituante/ Présence d’observateurs internationaux
Formalité «initiatique», selon les Tunisiens
La présence des observateurs internationaux à l’élection de l’Assemblée constituante en Tunisie a été présentée comme une simple invitation à la communauté internationale à assister à cette fête électorale organisée, pour la première fois, après la chute de la dictature, dans une ambiance absolument démocratique, ont indiqué, ce jeudi 2 juin 2011, à Tunis, des partenaires et acteurs tunisiens directement impliqués dans ce processus dont le porte parole de la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la Révolution , de la réforme politique et de la transition démocratique, Ghazi Ghrairi.
Une conférence internationale de deux jours s’est ouverte, ce jeudi 2 juin 2011, à Tunis sur ‘’le rôle des observateurs internationaux pour des élections transparentes’’, à l’initiative du Centre des études méditerranéennes et internationales (CEMI), en partenariat avec la fondation allemande Konrad-Adenauer Stiftung. Or, la Tunisie compte faire appel à des observateurs internationaux, spécialement de l’Union européenne, pour suivre le déroulement de l’opération électorale relative à l’élection de l’Assemblée constituante, à une date encore indéterminée, le gouvernement l’ayant fixé au 24 juillet, alors que la Haute Instance indépendante des élections a proposé celle du 16 octobre.
Or, d’après le débat qui s’est instauré à cette occasion, une participation internationale à un processus électoral national, dans des situations pouvant être jugées de ‘’critiques ‘’ et ‘’incertaines’’, sous certains angles, comme celle que vit la Tunisie, dans le sillage de la Révolution du 14 janvier, peut connaître des dérives et des dérapages, allant jusqu’à l’intervention directe et la prise en main par la Communauté internationale des élections pour en garantir la crédibilité, comme il est arrivé en Côte d’Ivoire, ou encore à Haïti et au Cambodge.
Le Conseil de Sécurité de l’ONU a pris des résolutions qui qualifient ‘’de délits et de crimes’’ les atteintes au processus électoral démocratique, et peut donc décider des interventions pour rétablir le droit , comme il s’est produit à Haïti où les Etats-Unis s’étaient intervenus au nom de la Communauté internationale et du droit international pour rétablir dans ses droits le président haïtien Arstide qui a été démocratiquement élu, mais a été évincé du pouvoir par un coup d’Etat militaire. Le même scénario s’est produit dernièrement en Côte d’Ivoire.
A cet égard, Ghazi Ghrairi a écarté totalement des scénarios et issues aussi tragiques pour le processus démocratique en Tunisie et s’est dit confiant dans la capacité du peuple tunisien à réussir la transition démocratique, dans les meilleures conditions, avec ses propres moyens.
Selon lui, la présence des observateurs internationaux, aux prochaines élections en Tunisie, ne serait même pas du domaine de l’assistance technique et logistique, ni non plus pour étayer la validité des élections, mais une participation à une fête » initiatique » consacrant une Révolution populaire pacifique qui a suscité la sympathie et le soutien dans tous les pays et chez tous les peuples du monde entier.
C’est ce qui explique qu’il y a eu beaucoup de demandes émanant de diverses personnalités et organismes à l’étranger pour être accrédités comme observateur international aux élections de la Constituante en Tunisie.
Les observateurs internationaux participent d’ailleurs, de façon régulière, au suivi des élections organisées dans les démocraties occidentales traditionnelles et leur contribution est devenue tellement ordinaire qu’on n’en parle même pas.
D’après le professeur Chafik Saïd, doyen honoraire de la Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis, la participation des observateurs internationaux à l’organisation des élections nationales revêt soit la forme d’une assistance technique demandée par l’Etat concerné, soit la forme d’une intervention internationale directe et d’une prise en charge totale de l’opération par la Communauté internationale représentée par l’ONU, dans des situations critiques. Cette intervention directe s’est produite dans de nombreux pays, du Mexique au Pakistan, en passant par d’autres pays en Afrique et même en Europe (au Kosovo, entre autres).
L’observation n’est pas le contrôle
A cet égard, il faut distinguer le contrôle des élections et leur observation. Les deux procédures diffèrent totalement.
Ghazi Ghrairi a assuré que le contrôle des élections de la Constituante sera effectué par des éléments tunisiens à tous les niveaux et à tous les étapes, en allant de l’établissement des listes des électeurs, et la validation des listes des candidats à ces élections, au contrôle des procès-verbaux des bureaux de vote et la proclamation des résultats définitifs.
Aux côtés des observateurs internationaux, il va y avoir également des observateurs nationaux, et à ce niveau également, on a enregistré beaucoup de demandes à cet effet, émanant, notamment, d’associations de défense des valeurs citoyennes en général .
Selon Ghazi Ghrairi, la transparence de ces premières élections tunisiennes post révolutionnaires est déjà garantie, a priori, par les mesures prises d’un commun accord et sur la base d’un consensus national entre les différentes parties prenantes, en ce qui concerne leur organisation, notamment la décision de charger de l’opération, une Autorité publique indépendante du gouvernement et de toutes les autres institutions publiques, en l’occurrence, la Haute Instance indépendante pour les élections, outre la décision relative au mode de financement de la campagne électorale qui stipule que ce financement sera exclusivement public. Il a admis que la politique et l’argent interfèrent.
C’est la Haute Instance indépendante pour les élections qui octroie les accréditations d’observateurs nationaux et internationaux.
Or, comme l’a fait remarquer Ahmed Driss, directeur du CEMI, le rôle des observateurs internationaux est problématique, car ils peuvent cautionner des élections qui ne soient pas transparentes, tandis que certains en Tunisie voient dans leur présence aux élections une ingérence dans les affaires intérieures, confondant, souvent, mission d’observation et mission de contrôle et de surveillance.
Chafik Saïd a souligné la nécessité de ne pas focaliser abusivement sur l’opération électorale qui n’est qu’un élément parmi tant d’autres dans le processus de transition démocratique. Il s’agit d’une œuvre de reconstruction politique générale, selon lui.
De son côté, Klaus D.Loetzer, nouveau représentant de la Fondation Konrad-Adenauer Stiftung, en Tunisie , qui a, néanmoins, séjourné plus de trente ans dans divers pays africains, s’est déclaré persuadé que le peuple tunisien qui a su accomplir avec éclat une Révolution pacifique exemplaire contre la dictature et le despotisme, réussira à relever le défi de la transition démocratique, avec l’appui et le soutien matériel et moral de la Communauté internationale, comme ce fut le cas de l’Allemagne, sous la conduite du chancelier Konrad Adenauer, après la chute de la dictature nazie, à le fin de la deuxième guerre mondiale.
Des experts et des spécialistes de Tunisie et de plusieurs pays européens dont d’anciens observateurs d’élections, ont été invités à animer cette rencontre.
Salah BEN HAMADI
(Source: “Le Temps” (Quotidien – Tunisie) le 3 juin 2011)
Elections — Présence d’observateurs étrangers Ingérence démocratique
Peut-on avoir confiance en les observateurs internationaux qui supervisent les élections de l’Assemblée nationale constituante ? Les observateurs internationaux, bien qu’objectifs et neutres, pourraient néanmoins valider des élections qui ne seraient pas transparentes et démocratiques, contrairement aux exigences des normes internationales.
Quelles garanties à mettre en place afin que les observateurs internationaux ne refassent pas le coup de leurs prédécesseurs qui exprimaient leur admiration et leur considération pour les élections organisées, durant plus de 23 ans, par le régime déchu et cautionnaient à l’unisson leurs résultats avec leurs taux amplifiés ?
Ces interrogations et ces problématiques ont dominé le débat lancé, hier, à la faveur de la conférence internationale sur «Le rôle des observateurs internationaux pour des élections transparentes» organisée par le Centre des études méditerranéennes et internationales en partenariat avec la fondation allemande Konrad-Adenauer.
Aussi, le Pr Ahmed Driss, directeur du Cemi (Centre des études méditerranéennes et internationales), pose-t-il d’emblée la problématique «d’accepter ou de ne pas accepter la présence d’observateurs internationaux à l’occasion de l’élection de l’Assemblée constituante qui représente un événement majeur pour la définition du futur démocratique de la Tunisie».
«Le gouvernement transitoire a déjà tranché, souligne-t-il, en appelant l’Union européenne à dépêcher une mission d’observateurs qui auront pour charge d’accompagner l’opération électorale de la future Constituante durant toutes ses phases : inscription sur les listes électorales, proclamation des résultats, affichage des listes électorales, oppositions exprimées par les personnes dont les noms auraient été omis, campagne électorale proprement dite, couverture médiatique selon les normes internationales, organisation des bureaux de vote, opération de vote elle-même et dépouillement des bulletins».
Quels avantages, quels inconvénients ?
Dans son rapport introductif, le Pr Chafik Saied, doyen honoraire de la faculté de Droit et des Sciences politiques de Tunis, a essayé de brosser un tableau historique des différentes formes d’observation internationale des élections dans le monde, plus particulièrement dans les pays qui ont vécu ces dernières décennies des transitions démocratiques, à l’instar des pays de l’Europe de l’Est, de l’Amérique du Sud et de l’Afrique.
«La résolution onusienne 45150 relative à l’observation internationale vise à renforcer le principe de l’organisation d’élections périodiques et honnêtes, loin de tout esprit d’atteinte ou de violation de la souveraineté des pays où se déroulent ces mêmes élections, souvent à leur demande dans la mesure où ils sollicitent une assistance technique pouvant prendre plusieurs formules : observation, accompagnement de toutes les étapes de l’opération électorale (budget, logistique, formation du personnel, etc.», précise-t-il.
Quels avantages un Etat solliciteur de l’assistance électorale pourrait-il en tirer ?
Le Pr Chafik Saied évoque la validation des élections, l’affirmation de la légitimité politique du pouvoir en place.
Quant aux inconvénients qu’on pourrait déceler à travers les missions d’observation, on pourrait évoquer les incidences négatives qui peuvent résulter du comportement des observateurs outrepassant leurs prérogatives et exerçant une réelle ingérence attentant à la souveraineté du pays cible (exemple : l’opération «Restaurons la démocratie à Haïti»).
Le Pr Ghazi Ghraïri, porte-parole de la Haute instance de la réalisation des objectifs de la révolution, est on ne peut plus clair, transparent et convaincant : «Il ne peut y avoir d’élections libres, transparentes et démocratiques sans la présence d’observateurs internationaux. Il y a un lien organique entre l’observation et la transparence des élections».
L’Instance supérieure indépendante pour les élections, qui est une autorité publique agissant en toute autonomie et liberté, va accréditer des contrôleurs tunisiens qui seront chargés de la validation des résultats issus de l’opération de vote, des observateurs étrangers et des observateurs tunisiens qui seront recrutés parmi les associations citoyennes (l’Isie commence déjà à recevoir les demandes d’accréditation exprimées par les associations tunisiennes).
Et le Pr Ghraïri d’ajouter que la loi électorale qui régira l’élection de l’Assemblée constituante dispose que «les observateurs internationaux doivent témoigner d’une expérience avérée et d’appartenance à des organisations et associations spécialisées qui ont fait leurs preuves. Toutefois, ces mêmes observateurs n’auront aucun droit de validation des élections».
Il tient à clarifier la confusion qui règne dans certains esprits à propos des contrôleurs et des observateurs. Ainsi, insiste-t-il, les élections de la Constituante «se dérouleront sous le contrôle exclusif des contrôleurs tunisiens alors que les observateurs étrangers assureront une mission de supervision et de suivi ni plus ni moins».
Un processus de partenariat et d’accompagnement
M. Sorin Mihail Tanasescu, ambassadeur de Roumanie à Tunis, a relevé dans son intervention qu’une élection «bien organisée confère une grande légitimité au gouvernement qui en résulte et que les élections transparentes donnent beaucoup de force à l’Assemblée constituante».
«Dans l’Union européenne, nous voulons que la transition démocratique tunisienne réussisse. La présence des observateurs étrangers ne comporte aucune atteinte à la souveraineté de la Tunisie. Ce n’est point un processus intrusif d’ingérence mais bien un processus de partenariat et d’accompagnement», affirme-t-il en soulignant sa conviction que la classe juridique tunisienne «réputée pour sa compétence et son savoir-faire saura trouver les solutions idoines aux problèmes liés à l’organisation des élections de la Constituante».
Pour M. Samir Taïeb, membre de la Haute instance de réalisation des objectifs de la révolution, «la présence des observateurs étrangers contribuera à faire connaître les normes internationales en matière de transparence, renforcer la crédibilité, la légalité et la légitimité du processus électoral et fera atténuer la violence et les dérives».
«Toutefois, les observateurs étrangers, ajoute M. Taïeb, doivent remplir certaines qualités dont en premier lieu le respect de la souveraineté du pays où ils exercent, l’objectivité et la non-intervention dans le débat politique national. Ils doivent éviter également de livrer des jugements sur des événements auxquels ils n’ont pas assisté et essayer de se tenir à l’écart des conflits d’intérêts».
MM. José Antonio de Gabriel et Emmanuel Geny experts internationaux en matière d’élections, ont essayé de lever les inquiétudes et les doutes persistant dans certains esprits quant à la réalité des objectifs des missions des observateurs internationaux et aussi quant à leur indépendance.
Ils ont notamment souligné que «cette inquiétude est légitime et compréhensible. Seulement, il faut lui répondre par la transparence et montrer que les observateurs sont réellement indépendants et œuvrent dans un cadre d’objectivité et de neutralité absolues, qualités essentielles des observateurs qui exercent leur mission comme l’entendent les normes internationales et le guide des bonnes pratiques, ainsi qu’un code de bonne conduite que tout observateur est appelé à signer avant d’entamer sa mission».
M. Geny a annoncé que la mission d’observation de l’Union européenne sollicitée par le gouvernement provisoire comptera 66 observateurs, soit 32 équipes (chaque équipe comportant un observateur et une observatrice) qui proposeront au terme de leur mission un rapport général contenant leurs observations sur la marche des élections et leurs recommandations en vue d’apporter les rectifications requises et d’introduire les améliorations qui s’imposent.
Auteur : A. DERMECH
(Source: “La Presse” (Quotidien – Tunisie) le 03-06-2011)
Une démocratie tronquée: La marginalisation des tunisiennes et tunisiens résidents à l’étranger.
Par: Mansour EL Feki, universitaire, Montréal, Canada Une première entorse à la démocratie au détriment des tunisiennes et tunisiens résidents à l’étranger, 218 sièges seront désignés au sein de l’Assemblée Nationale Constituante dont 19 seront réservés aux Tunisiens à l’étranger.
Les tunisiens de la diaspora représentent un peu plus que 10% de la population tunisiennes et par conséquent, ils doivent occuper 10% des sièges de l’Assemblée Nationale Constituante; minimalement, dans une structure démocratique, 22 sièges leurs reviennent systématiquement; je ne sais pas par quel calcul statistique la commission aboutit a 19 sièges. Notez que les tunisiens et tunisiennes au Canada et aux états unis ne seront pas représenté tandis que 3 sièges sont réservé à nos concitoyens qui sont supposés être en Libye, faut il informer la vénérable institution, que, de fait, ils sont en Tunisie et vont voter en Tunisie. Il serait plus équitable d’octroyer minimalement 2 sièges par continent, le reste serait octroyer au prorata du nombre de la population résidente, ainsi, il ne peut y avoir de personne non représenté et en même temps une prise en charge du nombre de résidents.
Les tunisiennes et tunisiens de la diaspora sauront prendre leurs responsabilités, après avoir été un alibi de l’office des tunisiens à l’étranger de l’administration déchue, aujourd’hui, la situation n’est pas meilleur, ils sont marginalisés d’une façon déclarée, après les tergiversations des islamistes qui voulaient exclure les binationaux on assiste à la marginalisation de 10 % de la population. Au moment ou des démocraties confirmées tel que la France, l’Italie, … font tout pour consolider le lien d’appartenance de leurs ressortissants et les faire participer dans la vie politique de leur pays d’origine, le replie identitaire des islamistes et leur frilosité idéologique veule donner une inflexion à la tunisianité pour que celle-ci devienne idiosyncrasique, petite et mesquine, à l’image de leur référentiel idéologique. Toute démocratie bâtie de la sorte sera tronquée! Mansour EL Feki
Soutien financier à la Tunisie : le compte est bon
La révolution de la dignité en Tunisie comme en Egypte a été menée par des peuples réclamant plus de liberté, d’égalité, de solidarité et de justice sociale ; des valeurs partagées par les pays de la rive nord de la Méditerranée ainsi qu’outre-Atlantique. Dans cette phase critique qu’est la transition d’un régime dictatorial à un régime démocratique, il est donc impérieux que ces pays soutiennent la Tunisie, qui peut apparaître comme un exemple, un laboratoire pour la fondation d’une démocratie dans un pays dont une des cultures est arabo-musulmane. Au-delà des yeux du monde qui sont tournés vers la Tunisie, les pays de la région observent attentivement l’évolution de cette transition, qui selon l’enlisement ou la réussite de l’expérience, pourra créer des incitations à renforcer un pouvoir autocratique ou à engager des réformes. L’investissement pour la transition, condition qui garantira le succès de l’établissement d’un régime démocratique en Tunisie – qui peut être considérée comme un bien public mondial, selon la formule utilisée par le Premier Ministre Mr Caïd Essebsi – sera porteur d’effets collatéraux positifs de toute part. C’est le sens de l’initiative Invest in Democracy et de la tribune publiée dans le quotidien français « Le Monde » le 18 mai et signée par des économistes de renommée mondiale, qui soulignent notamment l’important potentiel économique de la Tunisie et appellent à soutenir le pays. Par ailleurs, ces économistes, au premier rang desquels Stiglitz, Attali, Aghion, estiment le coût d’un plan de soutien à 20 à 30 milliards de dollars sur cinq ans, soit 2 à 3% du coût de la réunification allemande et inférieur au coût d’un à deux mois de la guerre en Irak, ce qu’avait par ailleurs déjà relevé Elyès Jouni lors d’un entretien sur le même quotidien, le 19 avril. Le Premier Ministre tunisien accompagné du Ministre des Finances, a ainsi appelé les dirigeants du G8, réunis les 26 et 27 mai à Deauville, a adopter un plan d’appui à la révolution tunisienne d’un coût de financement de 25 milliards de dollars sur cinq ans, soit 5 milliards par an. Ainsi, à l’issu de ce sommet, les chefs d’Etats du G8, ont décidé de mobiliser 40 milliards de dollars pour l’Egypte et la Tunisie sur les trois prochaines années. Ce financement se décompose en trois volets : 20 milliards de dollars de financements multilatéraux (dont 5 milliards par la Banque Européenne d’Investissement, plus de 6 milliards par la Banque Mondiale), 10 milliards de dollars d’engagements bilatéraux (dont 1 milliard par la France) et 10 milliards promis par les pays du Conseil de Coopération du Golfe. La contribution du FMI, qui n’est pas incluse dans le financement qui vient d’être relevé, devrait s’élever à 35 milliards de dollars pour l’Egypte et la Tunisie. En définitive, ce sont 75 milliards de dollars qui devraient être mobilisés pour financer des plans de soutien transitoires aux deux pays qui tentent de parachever leur révolution de la dignité. Dans la mesure où les montants alloués à chacun de ces deux pays sera décidé en fonction des projets et programmes présentés, il paraît peu évident de faire une évaluation par rapport aux besoins exprimés par la Tunisie. En revanche, depuis le 14 janvier, divers montants de différents bailleurs ont été communiqués. Que représentent-ils, à quoi serviront-ils ? Sont-ils nécessaires ? Divers financements pour soutenir la Tunisie en 2011
La Banque Européenne d’Investissent (BEI) a été une des premières institutions multilatérales à procéder à un renforcement de l’aide en faveur de la Tunisie, lors d’une visite de son vice-président à Tunis, le 3 mars. Ainsi, après avoir engagé 480 millions d’euros en 2010, la BEI propose une enveloppe comprise entre 600 et 870 millions d’euros pour l’année 2011. Ces fonds seront mobilisés pour finaliser une série de projets déjà contractés et d’en développer de nouveaux, comme un programme visant à développer et moderniser les infrastructures routières à l’instar de l’axe Tunis-Sidi Bouzid-Gafsa, pour un montant de 163 millions d’euros. Le financement de projets de zones défavorisées est aussi au centre de ce soutien avec un engagement à hauteur de 310 millions d’euros. La Banque Mondiale (BM) et la Banque Africaine de Développement (BAD) se sont engagées dans le cadre d’un appui budgétaire d’urgence à hauteur de 1 milliards de dollars pour 2011, pour absorber le chômage des jeunes et soutenir la société civile. Ce sera un crédit à long-terme, à un taux d’intérêt flottant autour de 3%, selon les options du gouvernement tunisien et dont le remboursement sera échelonné en fonction de l’évolution de l’activité économique. Le contrat de 500 millions de dollars de la BM sera d’ailleurs signé avant la fin du mois de juin, selon le président du Groupe de la Banque, Robert B. Zoellick, qui a précisé qu’une enveloppe supplémentaire de 700 millions de dollars pourrait être constituée par d’autres contributeurs. Selon l’avancée de la voie de la modernisation de l’économie de la Tunisie, la BM a affirmé qu’elle serait prête à octroyer un financement d’un montant de 1,5 milliard de dollar pour 2011-2012 et qui aurait pour objectif de renforcer le soutien au budget tunisien et d’appuyer des projets d’investissements, notamment dans les régions du centre-ouest.
L’Agence Française de Développement (AFD) a annoncé un financement de 350 millions d’euros autour de deux axes d’interventions : favoriser l’activité économique et développer le volet emploi-formation. Deux conventions ont été signées à Deauville par le Ministre des Finance tunisien M. Jaloul Ayed et le Directeur général de l’AFD, M. Dov Zerah, pour le financement destiné à l’appui à la relance de l’économie tunisienne de 185 millions d’euros et 15 millions d’euros pour la construction de l’Ecole nationale d’ingénieurs de Bizerte. Cette première tranche de 200 millions d’euros est un prêt à décaissement rapide qui va permettre d’appuyer les priorités définies par le gouvernement tunisien. Enfin, d’autres bailleurs pourront apporter leur soutien financier à la Tunisie, à l’instar de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) qui devrait prochainement pouvoir intervenir en Afrique du Nord, après avoir révisé ses statuts. Aussi, la BERD aurait l’intention d’investir 2,5 milliards d’euros par an dans les pays du sud de la Méditerranée, au premier rang desquels, la Tunisie. Au total et parmi les montants identifiables, plus de 3 milliards d’euros, soit environ près de 4,5 milliards de dollars, seraient injectées cette année en Tunisie. On est proche des 5 milliards de dollars demandés par le Premier Ministre pour 2011. Cependant, il faut que les engagements promis soient effectivement signés et que ce soutien envers la Tunisie ne s’érode pas. Des sources de financements nécessaires et bienvenus
L’ensemble des financements qui ont été annoncés ne sont pas des dons pour la Tunisie, mais bien des prêts. Ce soutien financier de la part de la communauté internationale a donc un coût, ce que fustigent certains groupes qui considèrent caricaturalement que la Tunisie sera dilapidée et vendue aux bailleurs de fonds. Rappelons que depuis la Révolution, la confiance des marchés privés envers les perspectives économiques de la Tunisie s’est altérée, ce qui s’est traduit par la dégradation de la note souveraine du pays par les agences de notations internationales (Moody’s, Fitch Rating, Standard and Poor’s). La conséquence de ce manque de confiance est qu’il en coutera plus cher à la Tunisie de lever des fonds sur les marchés internationaux. Or, le pays doit gérer le contexte critique de la transition pour édifier un régime démocratique et pour répondre aux aspirations de la Révolution. Cela à un coût et les marges de manœuvre sont limitées, compte tenu de sa situation budgétaire fragilisée à cause de la morosité de l’activité économique[1], d’une part et parce qu’elle doit honorer le remboursement de sa dette d’autre part. Le recours aux banques de développement et autres bailleurs de fonds, est donc celui qui est le moins coûteux pour la Tunisie pour deux raisons principales : il permet l’accès à divers financements à un coût du crédit bien moins onéreux que sur les marchés financiers. Ajoutons aussi que le financement qui sera accordé à la Tunisie est exceptionnel. En effet, le manque de visibilité et l’incertitude vis-à-vis de l’évolution économique et politique d’un pays, est un argument souvent avancé par les institutions financières internationales pour justifier leur parcimonie face aux situations de crises. Enfin, il est parfois avancé que l’aide bilatérale (de pays à pays) ne sert que les intérêts des pays donateurs. L’aide liée c’est-à-dire une aide octroyée si le bénéficiaire fait appel pour son utilisations aux biens et services du donateur, est une pratique peu commune depuis plus d’une décennie[2]. Cependant, il convient d’ajouter que l’aide publique au développement est une des composantes de la politique extérieure d’un Etat et qu’on ne peut attendre qu’elle soit complètement désintéressée. Ce qui importe ce sont bien les bénéfices certains que la Tunisie va pouvoir retiré de ce soutien pour répondre à des problématiques de court terme et de moyen terme, et qu’ils soient supérieurs au coût de l’emprunt. Si des événements exogènes ne viennent pas créer une grande instabilité en Tunisie, alors il est raisonnable de penser que cette confiance, si nécessaire, des instituions financières internationales et des Etats, va se renforcer et va alors appeler des investissements privés. Il en va aussi de l’intérêt des nations du monde libre. Outre le soutien à des valeurs communes que sont la liberté, l’égalité dans un pays démocratique, le potentiel de codéveloppement entre la Tunisie et l’Europe notamment, est très important. La Tunisie, comme ses partenaires, devront donc mutuellement s’entre-aider en démontrant à l’ensemble du monde, que le choix de la démocratie est un choix gagnant.
Slim Dali pour El Mouwaten http://www.elmouwaten.com/modules.php?name=News&file=article&sid=128
[1]Depuis la Révolution, les prévisions de croissance de l’économie tunisienne pour l’année 2011, sont passés de 2% à 1,3% puis moins de 1% actuellement. Le taux de chômage pourrait passer de 13% à 20% de la population active portant le nombre de chômeurs à 700 000 dont 170 000 diplômés de l’enseignement supérieurs, selon le ministère tunisien des affaires sociales. [2]L’aide liée est une pratique interdite à l’AFD. Aussi, selon l’OCDE, 88% de l’aide publique au développement mondiale en 2007 était déliée