29 octobre 2010

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TUNISNEWS
10 ème année, N° 3811 du 29.10.2010
archives : www.tunisnews.net 


AISPP: Procès des 27 et 28 octobre

Françoise Zeller: Lettre au Directeur de la prison de  Borj Er Roumi

Afef Bennaceur &  Luiza Toscane: Communiqué

TTU Monde Arabe: La succession de Ben Ali ouverte ? 

TTU Monde Arabe: Tunisie : un fond de solidarité suspect

Libération: La femme d’un opposant tunisien battue

AFP: La Tunisie et la Libye lèvent les entraves à la circulation et au commerce

AP: Un plan solaire tunisien pour plus de deux milliards d’euros

Alaa al-Aswany: Voici pourquoi eux, ils progressent et nous, on régresse


 
Association Internationale de Soutien aux Prisonniers Politiques
43 rue Eldjazira, Tunis
Tunis, le 28 octobre 2010


·Aujourd’hui, jeudi 28 octobre 2010, Omar Ben Béchir Ben Hamida Romdhani, né le 4 mars 1987, Ahmed Ben Hassouna Ben Hédi Cherni, né le 18 février 1987, Bahaeddine Ben Ali Ben Khemaïs Amdouni, né le 7 décembre 1985, Tarek Ben Abdallah Ben Hamda Abbassi, né le 20 mai 1985, Ramzi Ben Noureddine Ben Ammar Ayadi, né le 6 mars 1986, Karim Ben Ahmed Ben Salah Klaï, né le 29 juin 1975, Lotfi Ben Khelifa Ben Mohamed Elmay, né le 21 septembre 1981 et Mohammed Ben Azzeddine Ben Hassen Guenouni, né le 2 novembre 1980, ont été déférés en état d’arrestation devant la deuxième chambre criminelle du Tribunal de Première Instance de Tunis, présidée par le juge Abdelmajid Chouchène dans l’affaire 20894 pour adhésion à une organisation ayant fait du terrorisme un moyen de réaliser ses objectifs, tenue de réunions non autorisées, et non révélation. Lors de leur interrogatoire, les jeunes déférés ont nié ce qui leur était imputé. Puis la commission de la défense à plaidé, composée de Maîtres Abdelfattah Mourou, Abderraouf Ayadi, Samir Ben Amor, Hassen Bader et Mourad Ayari. La défense a demandé un non-lieu et à l’issue des plaidoiries la séance a été levée pour le délibéré et le prononcé du jugement. […]
 
·Hier, mercredi 27 octobre 2010, la quatrième chambre criminelle du Tribunal de Première Instance de Tunis, présidée par le juge Mehrez Hammami, a examiné l’affaire n°20940 dans laquelle sont déférés Faïçal Abidi, Taïeb Bouthouri, Issam Bouzazi, Mohammed Khdhiri, Aymen Mosbah, Aymen Hosni, Mohammed Abderraouf Yansi, Hamza Mejri, Bilel Riabi, Lassaad Bouthouri, Aymen Labidi, Oualid Saïd, Mohammed Ali Oueslati et Oualid Hermi (en état d’arrestation), ainsi que Saïfeddine Ben Gomra, Ouejdi Arfaoui, en liberté, et Bilel Chaouachi, en fuite, pour tenue de réunions non autorisées. Le premier est également accusé d’incitation à la commission d’infractions terroristes et à l’adhésion à une organisation terroriste. Le tribunal a décidé de reporter l’affaire au 10 novembre 2010 à la demande de la commission de la défense composée de Maîtres Farida Labidi, Lotfi Ben Youssef, Abdelfattah Mourou, Saïda Akrami, Mohammed Nasseur Ben Boubaker, Imène Triki, Abdelhak Borchani, Karima Nefzi, Olfa Ben Romdhane et Othman Labidi.
 
· Hier, mercredi 27 octobre 2010, le jeune Anouer Marzouki, a été déféré en état d’arrestation devant la treizième chambre criminelle de la Cour d’Appel de Tunis, présidée par le juge Tahar Yafreni, pour incitation à la commission d’infractions terroristes et à l’adhésion à une organisation ayant fait du terrorisme un moyen de réaliser ses objectifs. A la suite de l’interrogatoire du jeune, qui a nié ce qui lui était imputé, la parole a été donnée à son avocat, maître Abderraouf Ayadi, qui a demandé l’annulation du jugement en premier ressort condamnant son client à une peine d’emprisonnement de six ans, et à ce qu’il soit innocenté. A l’issue du délibéré, la Cour a confirmé le jugement en prononcé en première instance tout en abaissant sa peine à une durée de trois ans.
Pour la commission de suivi des procès politiques
 
Le secrétaire général
 
Maître Samir Ben Amor
 
(traduction d’extraits ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)
 

   Monsieur le Directeur
 
 Prison de  Borj Er Roumi
 70000 Bizerte
 
Monsieur le Directeur,
 
Membre de l’ACAT-France (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture) je tiens à vous exprimer mon inquiétude sur le sort du jeune prisonnier d’opinion Hassan Nasri.
Il a commencé dans votre établissement une grève illimitée de la faim pour protester contre les agressions à répétition et les mauvais traitements que lui infligent les agents de votre administration pénitentiaire.
Récemment, il a été privé de lit et transféré dans une cellule qui n’a pas les critères de salubrité  minimum.
 
Conformément au code pénal tunisien, je vous prie instamment, Monsieur le Directeur,de  rétablir des conditions de détention décentes pour le jeune Hassan Nasri.
 
Il est de votre responsabilité de veiller à  l’intégrité physique et psychologique des détenus,     veuillez donc user de votre autorité pour que  le personnel pénitentiaire  n’effectue pas des actes   humiliants et maltraitants vis-à-vis des détenus.
La prison ne peut être une zone de non-droits.
Les engagements internationaux  de la Tunisie doivent être respectés dans votre établissement, en particulier la Convention internationale contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, ratifiée par votre pays en 1988.
Monsieur le Directeur, je vous prie donc, avec la plus extrême insistance, de veiller à ce que Hassan Nasri ne soit plus agressé et soumis à de mauvais traitements de la part du personnel pénitentiaire.
Dans cette attente, je vous prie d’agréer, Monsieur le Directeur, l’expression de ma considération respectueuse.
                                                                                                                                                                           
Françoise Zeller                                                            
23 rue Gramme 75015 Paris

Communiqué
Gafsa – Paris

Le 29 octobre 2010
Fahem Boukadous, journaliste tunisien a été condamné à une peine d’emprisonnement de quatre ans pour avoir couvert le mouvement de protestation du bassin minier de 2008. Il effectue sa peine d’emprisonnement à la prison de Gafsa dans des conditions inhumaines. Atteint d’asthme, il devrait être soigné. Il est actuellement en grève de la faim et ne peut plus prendre de médicaments. Sa vie est en danger.
 
Chaque lundi, son épouse, Afef Bennaceur, lui rend visite en prison.
 
Lundi 25 octobre, nous avons observé une journée de jeûne pour exiger sa libération.
 
Nous annonçons que nous observerons une nouvelle journée de jeûne lundi 1er novembre, et tous les lundis qui suivront jusqu’à sa libération.
 
Afef Bennaceur,  (00 216) 23 696 300
Luiza Toscane, (00 33)  06 77 80 68 80

LA SUCCESSION DE BEN ALI OUVERTE ?


 
Une délégation parlementaire tunisienne a effectué une visite aux Etats- Unis le 20 octobre.
Conduite par Mohamed Sakhr El-Materi, président de  l’Association d’amitié tuniso-américaine et gendre du président Ben Ali, cette  délégation a eu des entretiens au Pentagone et au Département d’Etat. Les Américains ont été surpris par l’attitude de Materi, qui, au cours des entretiens,  s’est exprimé libre ment sur l’évolution de la situation en Tunisie (islamisme,  terrorisme et sécurité), se posant en candidat potentiel à la succession de Ben  Ali. Ce qui constitue un change ment par rapport à la posture qu’il avait adoptée  dans toutes ses interventions officielles, où il insiste sur le rôle du président Ben Ali et appelle à sa réélection en 2014. Selon certaines sources, des membres  de la délégation parlementaire tunisienne se sont montrés eux-mêmes surpris  par le ton et les propos de Materi. Le Département d’Etat américain n’a pas  manqué d’en conclure que la succession de Ben Ali se préparait actuellement  en Tunisie.
Rappelons que Mohamed Sakhr El-Materi avait sollicité, il y a deux  ans, la nationalité américaine. Ayant essuyé un refus, il s’est alors tourné vers  le Canada, avec plus de succès, faisant l’acquisition d’une villa sompteuse dans  ce pays. Publiée dans un journal canadien, cette information a dû être retirée de  son site internet, sous la pression de l’intéressé. Elle avait suscité des réactions négatives en Tunisie, certains observateurs ayant pointé du doigt les dépenses  inconsidérées de Materi et les sorties de capitaux de pays. 
 
(Source : TTU Monde Arabe (Lettre hebdomadaire d’informations stratégiques – France) Numéro 664, Jeudi 28/10/2010)

TUNISIE : UN FOND DE SOLIDARITÉ SUSPECT


Il y a dix-huit ans, à l’initiative de la présidence tunisienne, le Fonds de  solidarité nationale voyait le jour. Ce fonds est connu sous le nom de 26-26, en  référence au compte courant créé à cet effet. Le 8 décembre a été proclamé  “journée nationale de la solidarité”. A cette occasion, une journée de salaire est  prélevée pour chaque travailleur, afin de financer les activités du Fonds au profit  des plus démunis. Depuis sa création, il est géré par la présidence, sans être  soumis à des règles administratives et comptables transparentes, ce qui  l’expose à des critiques. Pour les plus gros contribuables, ce serait ainsi un  moyen d’échapper à certaines charges fiscales, en gagnant les faveurs de la  présidence grâce à leurs “généreuses” donations à ce fond.
 
A l’inverse, ceux qui ne versent pas leur obole s’exposeraient à un contrôle fiscal musclé. Face à ces  critiques, Tunis a décidé la création d’une Banque tunisienne de solidarité,  spécialisée dans le microcrédit pour la création de PME. Cependant, cette  banque est confrontée à d’importantes difficultés financières, ce qui expliquerait  sa fusion attendue avec la Société tunisienne des banques, l’un des plus grands établissements de crédit du pays. Par ailleurs, la disparition de la Banque  tunisienne de solidarité paverait la voie à la Banque Zitouna, qui veut s’affirmer  dans le financement des PME. Cette banque, fondée par Mohamed Sakhr  El-Materi, qui a ouvert ses portes en mai dernier, travaille en coopération avec  l’association “Zitouna, le Bien pour Tous”, une fondation caritative créée par le gendre du président  tunisien en mars 2010.
 
(Source : TTU Monde Arabe (Lettre hebdomadaire d’informations stratégiques – France)Numéro 664, Jeudi 28/10/2010)
 


La femme d’un opposant tunisien battue


 
Par CHRISTOPHE AYAD
 
Afef Ben Naceur est la femme du journaliste tunisien Fahem Boukadous, condamné à quatre ans de prison et en grève de la faim depuis vingt jours pour obtenir sa libération. Elle a été battue hier, en plein centre de Gafsa, par des agents de police qui la suivent en permanence. Elle venait demander à des enseignants en grève de soutenir son mari, dont le seul tort est d’avoir informé sur l’agitation sociale dans cette région minière, en 2008.
 
(Source: « Libération” (Quotidien – France) le 28 octobre 2010)


La Tunisie et la Libye lèvent les entraves à la circulation et au commerce


(AFP) – le 29 octobre 2o1o
 
TUNIS — La Tunisie et la Libye se sont mis d’accord sur la suppression des entraves à la circulation des biens et des personnes et ont décidé la création d’une zone économique franche à leur frontière commune, a annoncé vendredi à Tunis le Premier ministre libyen.
 
Le chef du gouvernement libyen Al-Baghdadi Ali Al-Mahmoudi a fait cette annonce vendredi après avoir été reçu par le président tunisien Zine El Abidine Ben Ali, à l’issue d’une visite de 24 heures en Tunisie.
 
« Nous sommes convenus d’un ensemble de mesures dont la levée de tous les obstacles entravant la libre circulation des citoyens entre la Libye et la Tunisie, en particulier, les restrictions administratives et financières », a-t-il déclaré.
 
Ces décisions, entérinées lors d’une réunion mixte vendredi sous la présidence de M. Al-Baghdadi et son homologue tunisien Mohamed Ghannouchi, portent également sur création d’une zone économique franche entre Ben Guerdane (Tunisie) et Zouara (Libye).
 
« Cette zone libre de toute entrave est destinée à augmenter le volume des investissements mixtes », a précisé le responsable libyen, cité par l’agence gouvernementale TAP.
 
Il est également question d’une restructuration des investissements libyens en Tunisie et de la mise en oeuvre d’un projet commun de raffinerie à Skhira (sud tunisien), ainsi que d’autres projets dans les secteurs du tourisme et des services.
 
La Tunisie et la Libye ont en outre signé un document sur l’entrée en vigueur de leur reconnaissance mutuelle des labels de qualité et de certification des produits.
 
Avec 2 milliards de dollars d’échanges en 2009, la Libye est le premier partenaire de la Tunisie au niveau régional et le 5e à l’échelle mondiale après la France, l’Italie, l’Allemagne et l’Espagne.
 
Les accords annoncés vendredi interviennent deux mois après la fermeture par la Libye de l’unique poste frontalier avec la Tunisie, qui avait provoqué en août des affrontements à Ben Guerdane, une région frontalière vivant du commerce avec la Libye voisine.
 
La fermeture de ce passage, sans explication de la Libye, avait provoqué la colère des habitants, déjà mécontents de l’imposition d’une taxe de 150 dinars (80 euros) à l’entrée en Libye.

Un plan solaire tunisien pour plus de deux milliards d’euros


29/10/10 20:51
TUNIS (AP) — Une conférence internationale sur le plan solaire tunisien (PST), comportant 40 projets pour une valeur de plus de deux milliards d’euros, s’est ouverte vendredi à Tunis avec la participation de plusieurs bailleurs de fonds internationaux.
 
Des représentants de la Banque mondiale, de la Banque européenne d’investissement (BEI), de la Banque africaine de développement (BAD), ainsi que des Agences françaises de développement (AFD) et des agences allemandes de coopération « KFW » et « GTZ » assistent à cette conférence.
 
De hauts responsables arabes, européens et asiatiques, notamment de France, d’Allemagne, d’Italie, d’Espagne et du Japon, ont aussi fait le déplacement à Tunis pour prendre connaissance des composantes du PST. Celui-ci qui prévoit la réalisation de mégaprojets utilisant les énergies solaire et éolienne, dont une partie est destinée aux besoins énergétiques de l’Europe.
 
Pays aux ressources pétrolières limitées par rapport à ses voisins algérien et libyen, la Tunisie a opté pour l’hybridation solaire-gaz dans sa stratégie de développement des énergies renouvelables.
 
Le PST vise à produire 1.000 mégawatts à l’horizon 2016, contre 144 MW actuellement, tout en réalisant une économie de 24% de demande en énergie primaire, soit environ trois millions de tonnes équivalent pétrole.
 
Selon ses promoteurs, il s’insère dans le cadre de projets internationaux similaires, tels que le « plan solaire méditerranéen » et « Desertec », un consortium initié par les Allemands qui regroupe de grandes sociétés européennes et méditerranéennes. AP

Voici pourquoi eux, ils progressent et nous, on régresse


 
par Alaa al-Aswany
 
19 octobre 2010
 
Je suis en train d’écrire cet article du haut du 17ème étage de l’hôtel Crowne Plaza au centre de Chicago. De mon balcon, je vois des gratte-ciel immenses et une toile imbriquée d’autoroutes.  C’est la ville où j’avais vécu, étudié et découvert un monde nouveau et passionnant que j’ai décrit dans mon roman qui porte le même nom que la ville. Il y a exactement vingt-cinq ans, j’ai obtenu ma maîtrise en médecine dentaire à l’Université d’Illinois à Chicago. Cette année j’ai été surpris d’apprendre que la direction de l’université m’a décerné le prix de performance des anciens étudiants, le plus important prix destiné aux plus éminents parmi ces derniers. De tous les 600 000 anciens étudiants de l’Université d’Illinois, seule une poignée d’élus a eu droit à cette distinction. Je suis le 43ème lauréat dans l’histoire de cette université, et le premier Égyptien et le premier Arabe à recevoir ce prix.
 
Comme j’étais fier lorsque j’ai entendu le nom de l’Égypte résonner dans les couloirs de l’une des plus grandes universités d’Amérique. La direction de l’université m’avait préparé un programme de célébration magnifique. Ils m’ont emmené à un tour de ville, pendant lequel j’ai vu les rues où j’avais marché et me suis assis dans les lieux que j’avais fréquentés, il y a un quart de siècle. J’ai même vu le foyer universitaire où j’avais vécu. Il était exactement à état où je l’avais laissé. J’ai regardé le balcon de la chambre où j’avais habité, et – oh! mon Dieu – lorsque j’étais en train de réviser sur ce balcon, je n’avais jamais imaginé qu’un jour je reviendrais ici pour recevoir le prix de performance de l’université. Le jour suivant, je suis allé visiter la faculté de médecine dentaire et j’ai trouvé le doyen, Bruce Graham, qui m’attendait, accompagné par ses assistants, les docteurs Valentino et Bike. Lorsqu’ils m’ont fait visité la faculté, mon esprit fut submergé par les souvenirs. Voici la clinique où j’avais travaillé et le laboratoire où j’avais effectué des recherches de maîtrise. Le doyen m’a fait un rapport détaillé sur les améliorations qu’il avait apportées à la faculté afin qu’elle suive les progrès scientifiques. Mais le plus beau des cadeaux fut la venue des professeurs qui m’avaient enseigné, il y a vint-cinq ans, et que l’université a pris la peine de chercher et d’inviter à ma rencontre : Dr. Dale Eisenmann, Dr. Abdel Moneim Zaki et Dr. Denis Weber. J’étais très ému lors de nos retrouvailles.
 
Aussi longtemps que je serai en vie, je n’oublierai jamais la gentillesse de ces hommes merveilleux. Ils m’ont enseigné et pris soin de moi lorsque je n’étais qu’un étudiant étranger abandonné à son sort. Ils m’avaient soutenu jusqu’à l’obtention de ma maîtrise. Les voilà maintenant devant moi. Malgré leur retraite et leur âge avancé, ils ont pris la peine de se déplacer pour participer à la cérémonie de remise du prix. La direction de l’université a organisé un séminaire au cours duquel j’ai parlé de littérature arabe dans la salle bondée de la bibliothèque. J’ai pris part, avec la participation du public, à un débat riche et agréable sur la culture et la politique.  La cérémonie a eu lieu hier. Devant des dizaines d’invités américains, le président de l’Université d’Illinois a fait l’éloge de ce qu’il appelé mes performance extraordinaires dans le domaine littéraire et a dit que l’université était fière de m’avoir parmi ses anciens. Ensuite, il m’a appelé à recevoir le prix pendant que les applaudissements résonnaient dans la salle. J’ai prononcé un bref discours pour dire que ma réussite doit beaucoup à l’Université d’Illinois, car elle m’avait enseigné que le seul chemin pour accomplir quoi que ce soit est pavé de sueurs et de discipline. J’ai dit au public que j’ai reçu plusieurs prix littéraires internationaux, mais que ce dernier prix  m’a procuré une joie particulière, parce qu’il m’a été décerné par l’université où j’avais fait mes études, et que j’avais le sentiment d’avoir reçu cette distinction des membres de ma famille.
 
Après la cérémonie, tout le monde est venu me féliciter. J’ai demandé aux responsables de l’université comment les lauréats de ce prix étaient sélectionnés. Ils m’ont dit qu’il y a un département spécial dans chaque faculté qui fait le suivi des carrières des anciens étudiants, et que lorsqu’ils tombent sur quelqu’un qui a réalisé quelque chose de remarquable, ils transmettent son nom pour proposer sa candidature au prix de l’université. Chaque faculté sélectionne un candidat par vote interne, puis il y a un deuxième vote, au niveau de l’université, pour choisir un lauréat parmi les candidats sélectionnés par les différentes facultés. Je leur ai demandé la raison pour laquelle l’université s’intéresse tellement à suivre les activités de ses anciens étudiants, alors que plusieurs parmi eux vivent dans des contrées lointaines et avaient perdu le contact avec l’université depuis de longtemps. La réponse était que les liens entre  l’université et ses anciens étudiants ne devraient jamais cesser, car tous ses étudiants deviennent des membres de la famille universitaire dès l’obtention de leur diplôme. Toute réalisation faite par l’ancien(ne) étudiant(e) ajoute de la crédibilité à l’université, et cette dernière devrait en être fière.  J’étais au comble du bonheur à Chicago jusqu’à ce qu’une triste nouvelle m’arrive d’Égypte à propos d’une étudiante de la section de Zagazig de l’Université al-Azhar, qui s’appelle Somaya Ashraf. J’ai vu sa photo. EIle avait l’air d’une modeste fille égyptienne voilée, comme des millions d’autres.
 
Un jour, arrivée à sa faculté,  elle est interpellée par un officier de police, le capitaine Amr Abdel Azim. Il veut vérifier le contenu de son sac, mais elle a refuse. L’officier se jette sur elle et la roue de coups. Il la fouette avec un tuyau d’arrosage, la gifle, lui donne des coups de poing, puis il commence à la frapper violemment sur le ventre. Je ne comprends pas ce que cette pauvre fille a fait pour mériter de telles brutalités et quel droit avait-il pour battre avec une telle cruauté cette fille sans défense. L’officier est allé même plus loin: il a empêché une ambulance de transporter Somaya à l’hôpital jusqu’à ce que son état se détériore. Suite à une hémorragie interne, elle continue de recevoir des soins. Ce que le capitaine Amr Abdel Azim a fait – un enregistrement de ses actes est disponible sur internet – constitue non pas un crime mais plusieurs selon le code pénal égyptien. Mais les lecteurs savent, comme moi, que personne ne demandera des comptes à cet officier. Au contraire, il sera probablement promu pour avoir agressé Somaya Ashraf.
 
La chose la plus étrange est que le recteur de l’Université al-Azhar, Dr. Abdullah al-Husseini, a fait des commentaires en faveur de l’officier agresseur. Je ne peux m’empêcher de comparer: l’Université d’Illinois suit attentivement les activités de ses anciens étudiants où qu’ils se trouvent, récompense ceux qui ont réussi, les fait monter sur le podium et les considère comme une progéniture qu’elle avait élevée et éduquée. Alors qu’à l’Université al-Azhar, la plus vieille université islamique au monde, un officier de police peut battre violemment une étudiante et empêcher l’arrivée d’une ambulance, sous la bénédiction du recteur de l’université. Qu’est ce qui fait que le traitement accordé à leurs étudiants soit effroyablement différent d’une université à l’autre ? La réponse est simple: le régime politique. Le président de l’Université d’Illinois est choisi par plusieurs commissions selon une procédure de sélection rigoureuse. Ses performances sont ensuite suivies de près par un comité de spécialistes qui rédige un rapport annuel où ses fautes sont énumérées. Il peut être relevé de ses fonctions à tout moment. L’Université d’Illinois a une direction complètement indépendante de toute influence du gouvernement. Même s’ils le voulaient, ni le président Obama ni personne d’autre ne peut démettre le président de l’université de ses fonctions. Ce dernier, toujours au service des enseignants et des étudiants, travaille pour éduquer.
Le recteur d’al-Azhar, par contre, est nommé seulement après avoir été approuvé par les organes de sécurité, et un seul rapport de police peut mener à sa révocation. S’il prend une position ferme pour soutenir ses étudiants agressés, il serait démis de ses fonctions sur-le-champ. Le capitaine Amr Abdel Azim sait qu’il a plus de pouvoir que le recteur de l’université. Comme tout ceux qui travaillent dans les organes de sécurité en Égypte, il a carte blanche pour battre et humilier les Égyptiens aussi longtemps que ces pratiques maintiennent le régime au pouvoir. En réalité, le recours à la violence contre les opposants du régime est le chemin sûr qui mène vers la promotion. Nous avons encore en mémoire Ahmed Zaki Badr, l’ancien recteur de l’Université Ain Shams, qui a fait venir des voyous, munis de couteaux, pour les lâcher contre les étudiants. Il a été ensuite nommé  ministre de l’enseignement supérieur pour le récompenser de sa dévotion le régime. Les universités dans les pays démocratiques apportent le progrès qui mène au développement du pays. Mais les universités égyptiennes sont en retard et se détériorent de jour en jour, car l’enseignement est le dernier de leurs soucis. Tout ce que les intéresse est de plaire aux organes de sécurité et de montrer leur loyauté au régime. La  différence entre ce qui se passe à l’Université d’Illinois et l’université al-Azhar est la différence entre pays où le peuple exerce l’autorité et où la loi est souveraine, et un pays où le dirigeant est souverain et exerce a l’autorité, alors que le peuple n’a aucune dignité et aucun droit. 
 
(Traduit de l’anglais par O. K.)
Texte original:
 

This Is Why They Are Progressing And We Are Falling Behind

 
By Alaa Al-Aswany
 
October 19, 2010
 
I am writing this article high in the sky on the 17th floor of the Crowne Plaza Hotel in the middle of Chicago. When I look out from the balcony I see vast skyscrapers and a dense network of interlocking highways. This is the city where I lived and studied and discovered a new exciting world which I wrote about in a novel which bears the city’s name. Exactly twenty-five years ago I obtained a master’s degree in dentistry from the University of Illinois in Chicago. This year the university administration took me by surprise by naming me as the winner of this year’s alumni achievement award, the university’s main award for prominent alumni. Out of the 600,000 University of Illinois alumni, only a few have received the award. I was the 43rd winner in the history of the university and the first Egyptian or Arab to receive this honour.
 
How proud I felt when I heard the name of Egypt ring out in the corridors of one of America’s largest universities. The university administration prepared for me a splendid programme of celebrations. They took me on a tour of Chicago and I saw the streets where I walked and sat in the places I frequented a quarter of a century ago. I even saw the dormitory where I lived and found it exactly as it had been. I looked at the balcony of the room I lived in, and, my God, when I was studying on that balcony I never imagined I would come back twenty-five years later to receive the university’s achievement award. The next day I went to visit the college of dentistry and found the dean, Bruce Graham, waiting for me, along with his assistants, Drs Valentino and Bike. They took me on a tour of the college and my mind was flooded with memories. Here was the clinic I used to work in and here was the laboratory where I did research for my master’s. The dean briefed me in detail on the amazing improvements he has made to the college to keep it up to date with scientific progress. But the most beautiful thing was that the university administration sought out the professors who taught me twenty-five years ago and invited them to attend – Dr Dale Eisenmann, Dr Abdel Moneim Zaki and Dr Denis Weber. I was deeply moved by what I saw.
 
As long as I live I will never forget the kindness of these fine men. They taught me and looked after me when I was a helpless foreign student. They supported me until I graduated and here they were again, although retired and advanced in years, taking the trouble to come and take part in the award ceremony. The university administration organized a seminar at which I talked about Arabic literature and for which the library hall was packed. I took part in a rich and enjoyable debate with the audience on culture and politics. Yesterday the award ceremony took place. In front of dozens of Americans guests the president of the University of Illinois lauded what he called my extraordinary achievement in literature and said the university was proud of me as one of its alumni. Then he called on me to receive the award and the hall resounded with applause. I gave a short speech saying I was indebted to the University of Illinois for my success because it had taught me that hard work and discipline were the only way to accomplish anything. I told them I had received many international literary prizes but this award gave me special joy because it was from the university where I studied, and I felt if I were being appreciated by members of my family.
 
After the ceremony everyone came to congratulate me and I asked the university officials how the winner of the alumni achievement award was selected. They told me there was a special department in each college to track alumni and when they come across someone who had done something remarkable they submit the name as a candidate for the award. Each college selects a candidate by internal vote and then there is a second vote at the university level between all the candidates selected by the various colleges. I asked them why the university is so interested in tracking the activities of its alumni when many of them live in far-away countries and have had nothing to do with the university for ages. The answer was that the university’s links with its alumni should never end, because everyone who graduated became a member of the university family; everything he or she achieved brought credit to the university and the university should be proud of it. I was happy as can be in Chicago until I heard distressing news from Egypt about a female student at the Zagazig branch of al-Azhar University by the name of Somaya Ashraf. I saw her picture and she looked like a meek Egyptian girl wearing hijab, like millions of others. When she went to college one day, the security officer, Captain Amr Abdel Azim, asked to search her bag and she refused. The officer then attacked her and gave her a brutal beating. He whipped her with a hose, slapped her, punched her and started to kick her in the stomach with all his strength. I do not understand what the poor girl had done to deserve this brutal attack and what right he had to hit this weak and defenceless girl with such cruelty. The officer went even further: he prevented an ambulance from taking Somaya to hospital until she was in terrible condition and had internal bleeding for which she is still receiving treatment. What Captain Amr Abdel Azim did, a recording of which is available on the Internet, constitutes several crimes under the Egyptian penal code, but readers know as well as I know that no one will ever hold this officer to account. On the contrary, he may be promoted to reward him for attacking Somaya Ashraf.
 
The strangest thing is that the rector of al-Azhar University, Dr Abdullah al-Husseini, made remarks supporting the officer in his attack on the student. I cannot help comparing: the University of Illinois carefully tracks the activities of its alumni all over the world, rewards those that succeed, celebrates them and sees them as offspring that the university has brought up and educated, whereas at al-Azhar University, the oldest Islamic university in the world , a security officer can brutally attack a student and prevent an ambulance from coming, and the rector of the university agrees with the officer. What is it that makes for this appalling difference in the way universities treat their students? The answer is simple: the political system. At the University of Illinois the president of the university is chosen by various committees through a rigorous selection process. His performance is then monitored by a specialist committee which writes an annual report on his mistakes, and he can be dismissed at any moment. The University of Illinois has an administration completely independent of government influence. Even if they wanted, neither President Obama nor anyone else could dismiss the university president, who works for the sake of learning, at the service of the teaching faculty and the students.
 
The rector of al-Azhar, on the other hand, is appointed only after the security agencies have approved him and a single security report can lead to his dismissal. If he took a serious position in support of students who are assaulted, he would be dismissed immediately. Captain Amr Abdel Azim knows that he is much more powerful than the rector of the university. Like everyone responsible for security in Egypt he has free rein to beat and humiliate Egyptians as long as that keeps the regime in power. In fact using violence with the government’s opponents is the sure road to promotion. We still remember how Ahmed Zaki Badr brought thugs into Ain Shams University when he was rector and  used them to attack students with knives. He was appointed minister of higher education as a reward for his devotion to serving the regime. Universities in democratic countries bring about academic progress which leads to development for the whole country. But universities in Egypt fall behind and deteriorate every day because the rectors do not have the slightest interest in learning.  All they are interested in is pleasing the security agencies and proving their loyalty to the president and the regime. The difference between what happens at the University of Illinois and al-Azhar University is the difference between a country where the people have authority and the law is sovereign, and a country where only the ruler has authority and is sovereign, while the people have no dignity and no rights.     
(Source le blog  de Alaa Al-Aswany le 19 octobre 2010)
 

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