20 juin 2006

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TUNISNEWS
7 ème année, N° 2220 du 20.06.2006

 archives : www.tunisnews.net


Tribune des droits de l’Homme: Des ONG arabes très en colère !

El Maoukif : Derrière les barreaux – Le prisonnier du Net :  Ali Ramzi Bettibi

TF1: Terrorisme : un imam ( D’origine tunisienne) de Clichy-sous-Bois interpellé

Le Matin Dimanche : Nizar Sassi a passé trente mois dans le camp de Guantánamo: «Les GI nous pissaient dessus» AFP: Mondial – Lemerre garde l’espoir d’une qualification AFP: Mondial-2006 – Tunisie: Jaziri, une lueur dans le chaos

AFP: Pléiade d’artistes arabes et internationaux au 42è Festival de Carthage

AFP: Le fléau de la désertification en chiffres AP: L’UNESCO ne désespère pas de venir à bout du fléau de la désertification AFP: Les bloggers du Golfe: une nouvelle lignée d’activistes Taïeb Moalla: Ahmed Nabil Al-Hilali (1928 – 2006) Réalités : Combattants tunisiens de la deuxième Guerre Mondiale, Capitaine Hédi Abdelkader : Un Tunisien engagé volontaire dans la Résistance française

 

Des ONG arabes très en colère !

Carole Vann – InfoSud L’Arabie saoudite, le Bahrein, la Jordanie, le Maroc, l’Algérie, la Tunisie sont membres du Conseil des droits de l’homme… et pourtant responsables de milliers de détentions arbitraires, de disparitions, de tortures, d’assassinats… « …Et on donne trois ans à de tels régimes pour défendre et promouvoir les droits de l’homme dans le monde ! Vraiment pas sérieux », assène Mohamed Zitout, porte-parole de Al-Karama à Londres. Cette association panarabe, forte de 7’000 membres, a été créée en 2003 à Genève. Elle est intervenue des centaines de fois auprès de l’ONU pour dénoncer des cas de tortures. Zitout dénonce aussi l’Algérie : « Quinze mille disparus et des milliers de personnes torturées avec des méthodes immondes : électricité, violences sexuelles ou système du chiffon (consiste à gaver la personne d’une eau chargée de matières fécales. » Il enchaîne : « Et l’Arabie saoudite ! Arrestations arbitraires, détenus torturés et parfois tués. Depuis les années 1960, on enferme tous ceux qui ne partagent pas le point de vue du royaume wahabite, ceux qui n’acceptent pas la présence militaire américaine dans le Golfe. C’est bien pire depuis le 11 septembre 2001. » « Tous les Etats arabes violent les libertés » Aujourd’hui, avec d’autres ONG arabes, Al-Karama clame haut et fort sa déception. Dans une conférence organisée lundi à Genève, des défenseurs des libertés en Syrie, en Libye, en Afrique du Nord et dans les pays du Golfe ont dénoncé les politiques répressives de leurs gouvernements. Tous les Etats arabes violent les libertés, insistent-ils. Comment se fait-il donc que six d’entre eux – Arabie saoudite, Algérie, Bahreïn, Jordanie, Maroc, Tunisie – soient membres du nouveau Conseil des droits de l’homme ? « C’est comme si on faisait appel à des criminels notoires pour faire la police dans le monde », compare Zitout. Façade démocratique Et les militants de rappeler qu’une façade démocratique peut cacher une sévère répression comme au Maroc, en Tunisie, en Jordanie ou au Bahreïn. Mais, poursuivent-ils, les paradoxes ne sont pas l’apanage de l’ONU. Exemple : « l’incroyable métamorphose » de la Libye. « Comment est-il possible que ce régime, considéré il y a quelques années comme l’un des pires pays terroristes, soit devenu un ami de l’Occident ? On lui change sa réputation alors que ses citoyens sont toujours maltraités », s’insurge Khaled Mesrati du Comité libyen Vérité et Justice. Déçus mais pas vaincus. Les militants arabes se disent partagés. Entre l’espoir de voir naître un nouvel organe et le choc de voir sa composition. « On est en train de répéter les mêmes erreurs de la Commission des droits de l’homme, avertit Zitouni. Même s’il y a la possibilité de suspendre les Etats tortionnaires au sein du Conseil, nous savons beaucoup de doutes sur son application. » Jouer le jeu, mais sans illusion « Nous ne nous faisons aucune illusion : les pays arabes viennent squatter le Conseil. Mais nous allons quand même jouer le jeu », promet le militant arabe. « Nous allons faire semblant de croire qu’il est possible de recourir à ces mécanismes. Chaque fois que nous aurons des cas de torture, nous allons continuer à les soumettre aux rapporteurs spéciaux. Même si la plupart de nos pays n’ont pas ratifié les pactes internationaux. Même si ceux qui l’ont fait – comme l’Algérie ou la Libye – ne les respectent pas. » (Source : le site « Tribune des droits de l’Homme » (Suisse), le 19 juin 2006) URL: http://www.humanrights-geneva.info/article.php3?id_article=364

Derrière les barreaux

Le prisonnier du Net :  Ali Ramzi Bettibi

 

La police a arrêté le jeune Ali Ramzi Bettibi le 15 mars 2005, a fouillé son domicile et confisqué ses papiers personnels, livres et disquettes. Le tribunal l’a accusé d’avoir reproduit un communiqué trouvé sur le net menaçant la Tunisie d’attaques terroristes, et de l’avoir renvoyé à des forums de discussions (Ikhlass) dont il participe à l’administration, et ce, en protestation contre la venue en Tunisie de l’ex Premier ministre Ariel Sharon. Le tribunal s’est fondé sur l’article 222. Le tribunal ne l’a pas accusé d’avoir écrit le communiqué qu’il a publié sur le net, mais de l’avoir copié et envoyé à deux sites électroniques et il a considéré que ce fait constituait une menace claire contre le gouvernement tunisien, et qu’il s’agissait d’un crime. Il a été condamné le 28 mars 2005 à cinq ans d’emprisonnement et à une amende de 1000 dinars. Il est actuellement à la prison de Borj Er Roumi. Il souffre de douleurs à l’estomac, à la jambe droite, et de difficultés respiratoires. Bettibi est né le 31 août 1976. Il a eu son bac. Le jour de son arrestation, il travaillait dans un cybercafé public. Les ONG de défenses des droits de l’hommes, tant nationales qu’internationales, ont exigé sa libération immédiate, car il n’a fait qu’exercer sa liberté d’_expression. Human Rights Watch a dit dans un courrier envoyé au chef de l’Etat le 15 mars 2006 que le dossier était vide de base tangible pour accuser Monsieur Bettibi et qu’il s’agissait d’un message envoyé aux Tunisiens : ils s’exposeraient à l’emprisonnement s’ils échangeaient sur le Net des informations considérées par le gouvernement comme extrémistes.   (Source : El Maoukif n°364 du 16 juin 2006)   (traduction ni revue ni corrigée par les auteurs de la version en arabe, LT)

 

Terrorisme : un imam de Clichy-sous-Bois interpellé

 
Dhaou Meskine a été interpellé lundi avec seize de ses proches pour être entendu dans le cadre d’une enquête préliminaire sur le financement du terrorisme islamiste. Leur garde à vue devait être prolongée de 48 heures mardi soir. C’est une personnalité influente de la communauté musulmane. Dhaou Meskine, secrétaire général du Conseil des  Imams de France et imam à Clichy-sous-Bois, a été interpellé lundi avec seize de ses proches dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte il y a un an par le Parquet de Paris pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » et « financement du terrorisme ». Et leur garde à vue devait être prolongée de 48 heures mardi soir, a-t-on appris de source judiciaire. La justice soupçonne l’existence d’un système de blanchiment d’argent qui aurait pu servir la cause islamiste. Ces interpellations ont été opérées par des policiers de la sous-direction antiterroriste de la police judiciaire et de l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière (OCRGDF), selon le Parisien qui a rapporté mardi l’affaire. Parmi lse gardés à vue figure un fils de l’imam, Malek Meskine, 24 ans, qui dirige la SCI Brise normande, l’une des structures visées par l’enquête judiciaire. Proche des pouvoirs publics D’origine tunisienne, Dhaou Meskine est le fondateur du premier collège privé musulman de France, « l’école de la Réussite » implantée depuis 2001 à Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis. Ce collège est en attente d’un agrément des pouvoirs publics. Ses dirigeants ont  assuré mardi que « tout l’argent qui entre est tracé » et que l’école n’a « jamais »  été financée par des organisations étrangères. « Je le connais très bien, je connais ses convictions antiterroristes et antifondamentalistes », explique pour sa part à l’afo Abderrahmane Dahmane, président du Conseil des démocrates musulmans de France et secrétaire national de l’UMP chargé des relations avec les associations des français issus de l’imigration. D’après lui, il s’agit d’une « magouille » visant à ne pas permettre d’obtenir l’agrément. Iman traditionaliste, Dhaou Meskine, selon Le Parisien, est considéré par les services de renseignements comme un religieux « rigoriste », mais qui n’affiche pas ouvertement de convictions radicales. Initiateur du dialogue inter-religieux, entre chrétiens, juifs et musulmans, en Seine-Saint-Denis, il a défendu les valeurs de la République dans l’affaire du foulard et a été consulté à plusieurs reprises par Nicolas Sarkozy sur les dossiers concernant la communauté musulmane de France, selon des proches. Il milite pour la construction d’une mosquée dans cette commune de Seine-Saint-Denis.
 
(Sourc: Le site de TF1 mis à jour le 20 juin 2006 à 18h22 )


SUICIDES Nizar Sassi a passé trente mois dans le camp de Guantánamo

«Les GI nous pissaient dessus»

TÉMOIGNAGE Arrêté au Pakistan alors qu’il fuyait l’Afghanistan, Nizar Sassi a été emprisonné à Guantánamo. Il ne croit guère que des prisonniers, enfermés dans des cages, surveillés 24h sur 24, puissent parvenir à se suicider Ian Hamel Pour la première fois depuis l’ouverture du camp de Guantánamo en 2002, trois prisonniers, deux Saoudiens et un Yéménite, ont réussi à se suicider dans leur cellule en se pendant à l’aide de draps et de vêtements en fin de semaine dernière. Né à Lyon en 1979, d’une famille originaire de Tunisie, Nizar Sassi connaissait deux d’entre eux. Il les a côtoyés dans ce camp américain installé dans une enclave sur l’île de Cuba. «Des tentatives de suicides, j’en ai vu beaucoup. Mais les Américains arrivaient presque aussitôt. Comment voulez-vous vous cacher lorsque vous êtes enfermé dans une cage de 2 mètres sur 1,80 mètre?», s’étonne ce grand garçon, qui a été emprisonné deux ans et demi par les Américains (d’abord en Afghanistan, puis à Guantánamo) et, à son retour dans l’Hexagone en 2004, dix-huit mois par les Français. Inculpé pour «association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste», Nizar Sassi sera jugé à Paris en juillet prochain. Lui, en revanche, n’a pas cherché à se supprimer. «J’avais trop envie de vivre, ou du moins de survivre. Mais si j’étais resté plus de trente mois à Guantánamo, aurais-je tenu le coup?», s’interroge cet ancien agent de médiation dans le métro de Lyon. Dans «Prisonnier 325, camp Delta (*)», qu’il vient d’écrire, Nizar Sassi raconte en détail les supplices et les humiliations endurés. «Les passages à tabac étaient tellement fréquents! Il suffisait de ne pas donner la bonne réponse à ceux qui nous interrogeaient jour et nuit», raconte-t-il. Les prisonniers se font pisser dessus, des femmes soldats leur maculent le visage avec leur sang au moment de leurs règles. «Ces femmes pétaient et rotaient devant nous. Moi, je suis Français. Il en faut plus pour m’émouvoir. Mais imaginez un jeune Saoudien!», se souvient le Lyonnais. Et lui, pourquoi a-t-il pourri quatre années derrière les barreaux? «L’amour des armes», répond cet ancien agent de sécurité, ni politisé ni très religieux. Un homme à Lyon lui raconte qu’en Afghanistan, on peut manier la kalachnikov comme d’autres jouent aux cartes dans son quartier. Il pense vivre une aventure l’espace d’un été. «Je ne connaissais même pas le nom d’al-Qaida», jure Nizar. Seulement voilà, le 11 septembre 2001, il se retrouve au mauvais endroit avec les mauvaises personnes. «Les Américains payaient très chers pour capturer des terroristes. Certains Afghans et Pakistanais s’enrichissaient en arrêtant n’importe qui, un pauvre berger, un chauffeur de taxi ou moi», raconte encore Nizar qui a trouvé un emploi dans une société agroalimentaire, grâce au maire de Vénissieux, sa commune. Note: (*) «Prisonnier 325, camp Delta. De Vénissieux à Guantánamo», Nizar Sassi. Editions Denoël. 214 pages. (Source : « Le Matin Dimanche » (Suisse), le 18 juin 2006)


 

Mondial – Lemerre garde l’espoir d’une qualification

par Martyn Herman AFP, le 20 juin 2006 à 15h14 STUTTGART, 20 juin (Reuters) – La Tunisie s’est inclinée lundi face à l’Espagne, mais au vu de sa performance, son sélectionneur Roger Lemerre garde espoir d’une qualification pour les huitièmes de finale. Alors que le nul 2-2 concédé face à l’Arabie Saoudite avait semé la consternation dans le petit pays du Maghreb, la défaite 3-1 contre l’Espagne a alimenté la frustration tant le score final est loin de refléter la qualitié de l’équipe tunisienne. Après avoir ouvert le score dans les premièrs instants de la rencontre, les Aigles de Carthage ont bataillé pour conserver leur avantage, ne cédant pour la première fois aux attaques ibériques qu’à la 71e minute.
Mais cette défaite n’a pas anéanti les espoirs de Lemerre qui prépare déjà ses troupes pour le dernier match, vendredi face à l’Ukraine. Lundi, la sélection d’Oleg Blokhin a laminé l’Arabie Saoudite 4-0 après avoir été battue par l’Espagne sur le même score. « Je ne suis pas optimiste, je suis réaliste, » a déclaré l’ancien sélectionneur de l’équipe de France.
« Cette performance nous donne de l’espoir et nous devons en tirer un résultat contre les Ukrainiens. » « Si nous gagnons, nous pourrions être qualifiés. » « Ce sera très difficile. Les deux équipes sont dans la même situation. » Mais pour gagner, il faut marquer, et les options offensives de Lemerre sont assez réduites surtout en l’absence du buteur vedette tunisien, Santos, qui peine à revenir d’une blessure au tibia. « Pour l’instant, la réponse est non, » a indiqué Lemerre a propos de son attaquant d’origine brésilienne, avant de préciser que son banc était « presque aussi bon » que ses titulaires. Jaziri, buteur face à l’Espagne, a promis que la Tunisie ferait tout pour l’emporter face à l’Ukraine. « Il nous reste un match et rien n’est fini, » a-t-il déclaré.
« Nous allons nous mettre au travail dès demain. » /NDE
REUTERS

Mondial-2006 – Tunisie: Jaziri, une lueur dans le chaos

AFP, le 19 juin 2006 à 23h25 STUTTGART, 19 juin 2006 (AFP) – Malgré la déroute de la Tunisie face à l’Espagne (1-3), l’attaquant tunisien Jaziri, déjà étincelant face à l’Arabie saoudite, a étalé une nouvelle fois tout son potentiel, sans réussir à sauver les siens, lundi à Stuttgart en  match du groupe H du Mondial-2006 de football. « Il y a surtout un joueur à surveiller: Jaziri. Il bouge bien et est efficace devant le but », avait répondu le sélectionneur espagnol Luis Aragones, interrogé sur les forces de la Tunisie. Le sage avait vu juste.
Le joueur de Troyes (1re div. française), qui ne put malgré tout rien faire pour éviter la défaite de son équipe, avait donné des indices sur ses capacités de nuisance lors du premier match des
Aigles de Carthage face à l’Arabie Saoudite (2-2): un but sur une reprise de volée acrobatique, et une passe décisive pour Jaidi. Peut-être quelque peu effacée par le nul des Tunisiens, sa performance n’était cependant pas passée inaperçue, comme celle face à l’Espagne.
Les défenseurs ibériques n’ont pas mis longtemps à comprendre que leur soirée s’annonçait compliqué. En guise d’amuse-bouche, le petit joyau tunisien, entouré de trois joueurs, démontrait qu’il savait taquiner le ballon en s’en sortant avec quelques roulettes.
Au millimètre
Mais le plus beau était à venir. Sur un contre, il récupérait un ballon après s’être virilement débarrassé de Puyol – ce qui n’est pas rien -, avant de sortir le grand jeu. Un, deux, puis trois joueurs espagnols effacés dans la surface, avant de calibrer au millimètre son centre pour Mnari qui s’y prenait à deux fois pour tromper Casillas (8). Toujours à la limite du hors-jeu, dans un rôle a priori ingrat, esseulé en attaque, Jaziri n’a jamais compté ses efforts. Tout près de récupérer un ballon devant Casillas (16), son pressing incessant, ses appels déroutants faisaient tourner en bourrique une défense espagnole quelque peu fébrile, à l’image d’un Puyol inhabituellement peu tranchant. Jaziri aurait même pu tenter une course impossible, après avoir récupéré un ballon en effaçant Pernia dans le camp tunisien, avec un boulevard devant lui. Mais l’arbitre décidait de siffler la mi-temps à ce moment-là. L’attaquant tunisien, sevré de ballons en deuxième mi-temps, était sans doute trop seul pour sauver une Tunisie contrainte de battre l’Ukraine pour se qualifier.
AFP


L’UNESCO ne désespère pas de venir à bout du fléau de la désertification

par Bouazza ben Bouazza Associated Press, le 19 juin 2006 à 19h22
 TUNIS (AP) — L’avancée inexorable des déserts menace plus du tiers de la surface de la terre, soit quatre milliards d’hectares, y compris dans l’hémisphère Nord, mais l’UNESCO, qui organise une conférence internationale sur ce sujet à Tunis de lundi à mercredi, ne désespère pas de venir à bout de ce fléau.  Selon le Fonds des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), la désertification menace 1,2 milliards de personnes dans 110 pays de la planète, du fait notamment de la pauvreté et de la surexploitation des ressources naturelles.
 Première manifestation de l’année internationale des déserts et de la désertification proclamée par l’ONU, la rencontre de Tunis rassemble plusieurs centaines d’experts, de scientifiques et de décideurs concernés par « l’avenir des terres sèches ». En dépit des efforts déployés depuis plus d’un demi-siècle, la désertification continue d’avoir des « effets dévastateurs », comme l’a souligné le secrétaire général de l’Union du Maghreb arabe (UMA), le Tunisien Habib Ben Yahya.
 Si l’Afrique, l’Asie et l’Amérique Latine sont « les régions les plus gravement menacées », environ 30% des Etats-Unis et de l’Espagne sont également touchés. Et parmi les populations affectées dans l’Afrique sub-saharienne, on estime que 60 millions de personnes se déplaceront vers l’Afrique du Nord et l’Europe d’ici 2020.  L’impact économique « considérable » de la dégradation des sols engendre des pertes agricoles estimées à 42 milliards de dollars (€33,4 milliards) par an, un problème « susceptible d’empirer », selon les experts. Pour M. Ben Yahya, seul « un élan de solidarité internationale » peut permettre « d’affronter les grandes menaces écologiques qui pèsent sur l’avenir des terres sèches, voire de l’humanité ».
 Ambassadrice de bonne volonté de l’UNESCO, la star du cinéma Claudia Cardinale a quant à elle préconisé « une révolution écologique » pour préserver « la beauté de nos déserts en péril et le futur de ses populations incertain ». Pour l’actrice italienne née en Tunisie, « il incombe à la femme de transmettre les bonnes pratiques sur la conservation et le développement durable des terres sèches pour le bien des générations futures ».  Les participants plancheront également sur la rareté de l’eau et sa gestion, ainsi que sur la gestion des catastrophes naturelles et des risques spécifiques aux régions arides. Les propositions visant la préservation de ces écosystèmes particulièrement vulnérables devront être soumises à un sommet de chefs d’Etat et de gouvernement prévu sur ce thème en octobre 2006 en Algérie, selon le secrétaire exécutif de l’UNCCD, Hama Arba Diallo. 
Associated Press  

Le fléau de la désertification en chiffres

AFP, le 20 juin 2006 à 13h01 TUNIS, 20 juin 2006 (AFP) – Un milliard deux cents millions de personnes vivant dans 110 pays parmi les plus pauvres du monde sont menacées par l’avancée du désert, un fléau planétaire auquel les Nations unies ont consacré l’année 2006.
Le phénomène affecte directement plus de 250 millions de personnes, a souligné une conférence internationale sur « l’avenir des terres arides » organisée cette semaine à Tunis par l’Unesco. Soixante millions d’entre elles devraient être contraintes d’abandonner les zones désertiques d’Afrique sub-saharienne pour gagner le nord du continent et l’Europe d’ici à 2020, selon les prévisions et les études statistiques des Nations unies. Un tiers de la population mondiale vit sur des terres arides, qui constituent environ 41% de la surface du globe. Dix à vingt pour cent de ces terres sont dégradées ou improductives.
En Afrique, où la population subsiste essentiellement grâce aux ressources du sol, les terres arides couvrent les deux tiers du continent et en 2025, deux tiers des terres arables en 1990 auront disparu. Le quart de l’Amérique latine et des Caraïbes et plus du tiers des Etats-Unis sont désertiques ou arides. Le fléau de la désertification frappe tous les continents puisque l’Europe méridionale (sud de l’Espagne, de l’Italie et du Portugal) se désertifient.
En Amérique latine, comme en Asie, les terres arables vont diminuer d’un tiers d’ici à une quinzaine d’années. Concernant l’eau, sur 19 pays à zones arides d’Afrique et d’Asie, la quantité d’eau disponible par personne sera réduite de moitié d’ici à 2025.
Les pertes agricoles sont estimées à 42 milliards de dollars par an et le coût annuel du combat contre l’avancée du désert à 2,4 milliards. Espèces en danger: l’Union mondiale pour la nature estime que le nombre de gazelles dama (Gazella dama) du Sahara a diminué de 80% depuis dix ans. Les antilopes asiatiques connaissent un sort analogue du fait du recul de leur habitat naturel et du braconnage.
AFP
 


 

Pléiade d’artistes arabes et internationaux au 42è Festival de Carthage

AFP, le 20 juin 2006 à 13h26 CARTHAGE  (Tunisie), 20 juin 2006 (AFP) – Une pléiade d’artistes arabes mais aussi des comédiens du théâtre « No » japonais, le ballet national cubain, des artistes allemands et le chanteur canadien Roch Voisine se produiront au Festival international de Carthage, du 15 juillet au 16 août. La 42è édition du festival de la cité antique de la banlieue Nord de Tunis sera composée comme chaque année encore de spectacles de musique, chant, danse, poésie, théâtre et cinéma, ont annoncé mardi les organisateurs.
Des vedettes de la chanson arabe tiennent le haut de l’affiche, a indiqué le directeur du festival, Rauf Ben Amor, cité par l’agence Tunis Afrique Presse. Il s’agit notamment des Egyptiens Fadhl Chaker et Oumaima el Khalil, du Syrien Nour Mhenna, de la Koweitienne Nawal et des Tunisiens Lotfi Bouchnak, Saber Rebai, Amina Fakhet, Soufia Sadok et Mohamed Jebali.
Des chanteurs tunisiens vivant en France comme Abir Nasraoui et Naoufel Jouini, ou au Maroc (Tarek Jihad) se produiront aussi dans l’amphithéâtre romain de Carthage. Des hommages seront rendus aux poètes palestinien Samih El Kacem, sénégalais Léopold Sedar Senghor et espagnol Federico Garcia lorca. Des films nouveaux seront projetés durant le festival dont « La télévision  arrive » du Tunisien Moncef Dhouib, le premier dessin animé tunisien, « Elombara » d’Ali Labidi, « Parole d’homme » du Tunisien Moez Kammoun, et « Halim » du réalisateur égyptien Chérif Arafa.
Des éditeurs, écrivains et journalistes de plusieurs pays arabes participeront en marge du festival à un colloque intitulé « Ecriture et outils électroniques modernes ».
AFP

Les bloggers du Golfe: une nouvelle lignée d’activistes

Par Sam DAGHER AFP, le 20 juin 2006 à 06h15 DUBAI, 20 juin 2006 (AFP) – De plus en plus de citoyens du Golfe créent des blogs pour réclamer, via internet, des droits politiques et des libertés civiles et afficher leur frustration des restrictions sociales et religieuses.
Les bloggers se démarquent des éditorialistes des sites et bulletins sur internet, aux tendances généralement islamistes. Des bulletins comme « Al-Sahat » (Forums), basé à Ras al-Khaïma aux Emirats arabes unis ainsi que « Omania.net » basé à Oman, autorisent leurs visiteurs à afficher des questions et des réponses.
Les blogs, par contre, sont un journal intime admettant seulement leurs créateurs et un petit groupe de personnes. « Sommes-nous destinés à entendre seulement les nouvelles des changements majeurs dans le monde et à attendre une bonne action de notre roi », s’interroge un blogger saoudien de 33 ans.
Le Golfe compte aujourd’hui un millier de bloggers environ, cinq fois le nombre existant en 2004, selon Haitham Sabbah, un blogger basé à Bahreïn et rédacteur pour le Proche-Orient de Global Voices, programme lancé en 2005 par le Centre Berkman pour l’internet à la Faculté de droit de Harvard (USA) et qui suit les blogs à travers le monde.
Ahmad al-Omran, un étudiant saoudien de 22 ans, blogue depuis deux ans sous le pseudonyme « Saudi Jeans » pour exposer les questions touchant sa génération, dans l’espoir que le changement viendra un jour. Selon lui, l’Arabie saoudite compte près de 300 bloggers saoudiens – dont plus de 50% de femmes – sur 23 millions d’habitants. « Les Saoudiens ne sont pas politiquement actifs par nature et ils craignent de s’exprimer, alors ceci (le changement) prendra du temps », déclare-t-il à l’AFP. « Farah’s Sowaleef » et « A Thought in the Kingdom of Lunacy » (Une pensée dans le royaume de l’aliénation) figurent parmi les blogs féminins saoudiens les plus populaires. Ils emploient un vocabulaire explicite pour ridiculiser leur société machiste.
Un blogger saoudien vivant en Grande-Bretagne s’est investi de la mission d’exposer l’hypocrisie, selon lui, de la police religieuse chargée d’imposer le respect du strict code moral islamiste.
« La police religieuse incarne ce qui est mauvais dans mon pays », accuse-t-il sur son blog « Le policier religieux », bloqué par les autorités saoudiennes. Comme d’autres gouvernements du Golfe, Ryad censure tout ce qui peut porter atteinte aux valeurs religieuses et morales ou à la sécurité. La majorité des blogs saoudiens ont été brièvement bloqués l’année dernière. Un groupe de bloggers, dirigés par Raed al-Saïd un étudiant de 21 ans, pratiquent l’autocensure en s’abstenant de critiquer le gouvernement ou les figures religieuses. Aux Emirats arabes unis (EAU), deuxième pays par le nombre de bloggers après l’Arabie saoudite, un blogger a été bloqué pendant une semaine après avoir lancé son journal « Terre de sable » en 2004.
Il a par la suite continué à afficher ses attaques contre les hommes de religion et leur influence croissante aux Emirats. « Ils infiltrent le gouvernement, les médias, les écoles et les lois. Ils islamisent notre monde, notre esprit et notre vie », affirme-t-il à l’AFP. A Bahreïn, une petite mais active communauté de bloggers regroupe d’anciens prisonniers politiques comme Tawfik al-Riyachi et Mahmoud al-Youssef, qui a mené campagne sur internet contre le monopole de la société de télécommunications Batelco. Au Koweït, les bloggers ont contribué au lancement de la virtuelle révolution orange le 27 avril. Trois étudiants universitaires ont transmis sur leur site, « Sahat al-Safat », l’appel des députés réformateurs à réduire les circonscriptions électorales de 25 à 5, ce qui a rassemblé devant le Conseil des ministres, des centaines de manifestants brandissant des bannières oranges, une campagne qui a conduit à la dissolution du Parlement. Mais, la politique n’est pas toujours l’enjeu. Dans son blog, « Le boudoir de Jewaira », une Koweïtienne brise les tabous et publie des épisodes d’un récit érotique.


Ahmed Nabil Al-Hilali (1928 – 2006)

Taïeb Moalla Journaliste tunisien indépendant résidant à Québec tmoalla@yahoo.com  
« Et Al-Hilali se leva On lui enleva sa robe d’avocat Du manteau d’accusé, on l’habilla Et la « justice » seulement aux pauvres s’appliqua ». (*)
Traduction libre d’un extrait de poème d’Ahmed Foued Nejm composé en 1975. L’avocat et militant de la gauche égyptienne, Ahmed Nabil Hilali, a tiré sa révérence ce dimanche 18 juin 2006. C’est un exemple d’engagement, de courage et de générosité qui vient de nous quitter.  Le 15 mars 1978, le poète Ahmed Foued Nejm et le chanteur Cheikh Imam Issa sont déférés devait un tribunal militaire (!). Imam – un vieux sexagénaire non-voyant – est accusé d’avoir frappé un agent de police ! Pour montrer le ridicule de la situation et le côté politique des charges, Me Al-Hilali prononce un des plus beaux plaidoyers de sa carrière.  En voici des extraits traduits de l’arabe : « Ce n’est ni le poète Nejm ni l’artiste Imam qui figurent aujourd’hui dans le box des accusés. C’est l’art populaire égyptien et l’esprit moqueur et taquin de tout un peuple qui sont jugés. Nejm et Imam sont les dignes héritiers des poètes et des écrivains égyptiens qui ont exprimé, à travers les temps, l’âme et la souffrance de leur peuple. Ce sont les descendants de Yacoub Sanou, de Abdallah Al Nadim et de Beïram Ettounsi… On dirait bien que l’histoire se répète inlassablement. « Nejm-Imam » sont poursuivis comme l’ont été Sanou, Al-Nadim et Ettounsi. Tous ces poètes et artistes de renom ont payé un lourd tribut pour la parole libre et pour la critique sociale constructive. C’est pour cela qu’ils ont été poursuivis et traqués pendant des dizaines d’années. Le peuple et l’histoire leur rendent hommage. Et il y a un consensus chez les historiens et les critiques pour souligner leur apport dans notre histoire artistique et nationale ». Al-Hilali – qui s’est récemment prononcé contre le legs du pouvoir à Jamel Moubarak – a été de tous les procès politiques de l’Égypte contemporaine. Paix à son âme.
 

(*) والهلالي لما قام

قلعوه روب المحامي

و لبسوه توب الإتهام

و النيابه ع الغلابة

طبقت بند اللجام

 

أحمد فؤاد نجم- 1975

 

Combattants tunisiens de la deuxième Guerre Mondiale, Capitaine Hédi Abdelkader :

Un Tunisien engagé volontaire dans la Résistance française

Dhouib Med Noureddine, Ingénieur ESE  Dans le cadre du 61ème anniversaire de la fin de la deuxième guerre mondiale, et afin de bien marquer l’apport, pour un idéal de liberté, de la Tunisie à cet important évènement de l’histoire, nous avons choisi de décrire l’itinéraire d’un ancien combattant tunisien, le Capitaine Hédi Abdelkader, qui a contribué à la résistance contre l’occupation allemande en France et a apporté au péril de sa vie l’aide nécessaire à des militaires français venant d’Afrique du Nord, et dont quelques-uns étaient de confession juive .Il leur a ainsi évité la capture et donc une mort certaine. Nous avons estimé intéressant d’examiner le cas du Capitaine Hédi Abdelkader, dans la mesure où dans aucun livre d’histoire sur la Résistance française, on ne relate ou mentionne la contribution de Maghrébins. Cette omission est -elle volontaire ou s’agit-il d’un simple oubli de l‘histoire parmi tant d’autres ? Nous invitons les historiens à se pencher sur cette question pour nous éclairer davantage. C’est, encore une fois, grâce à l’aide apportée par le service français des Anciens combattants que nous avons pu prendre contact avec le Capitaine Hedi Abdelkader. C’est avec beaucoup de chaleur et de sympathie qu’il nous a reçus avec son épouse, dans leur maison au Bardo. Nous avons été très surpris par la quantité de documents de grande valeur historique dont il dispose. Il conserve avec beaucoup de soin une quantité impressionnante de photos, d’attestations officielles françaises et tunisiennes. Parmi ces documents nous avons relevé des lettres manuscrites de reconnaissance émanant de personnes ayant été aidées par le capitaine pendant la guerre. Faisons tout d’abord connaissance avec le Capitaine Hédi Abdelkader. Il est né le 20/03/1918 à Douar Chott (actuelle Carthage Byrsa), d’une famille modeste de marchands de fruits et légumes. Son père, Beji Ben Ali Abdelkader, après avoir servi dans la Garde beylicale, a fait la 1ère Guerre Mondiale et fut un des rares à en revenir sain et sauf. L’admiration pour les faits de guerre décrits par son père, pèsera beaucoup dans son choix futur de la carrière militaire.Dés son jeune âge, Hédi Abdelkader était préoccupé par une injustice présente. En effet il n’admettait pas, par exemple alors premier de sa classe, que lui, le petit Tunisien, mangeât de la galette de blé imbibée d’huile d’olive tandis que ses petits camarades français ou italiens mangaient du pain blanc avec du beurre et de la confiture. Cette situation l’amenait alors à des échauffourées avec ses camarades, causant ainsi son exclusion définitive de l’école. On n’aimait pas à cette époque les petits Tunisiens récalcitrants ! Faute d’ emploi chez les particuliers, il dut se résoudre, pour entrer dans la vie active, à vendre des légumes frais sur une brouette qu’il avait confectionnée lui-même avec des roues récupérées de sa bicyclette. Féru de football, il voulait pratiquer ce sport, mais compte tenu des mentalités de cette époque, son père refusa tout net. Il put finalement le convaincre en lui promettant de ne jamais fumer ni boire, promesse qu’il tiendra jusqu’à ce jour. Il s’inscrivit alors à l’Olympique Football Club du Kram et devint capitaine de l’équipe junior à l’âge de 16 ans. Un jour il décida de réaliser un rêve d’enfant en choisissant une carrière militaire, et s’engagea dans l’armée le 9 novembre 1936. Ce choix était aussi motivé par des considérations de justice. Pour lui, aussi bien sur le plan vestimentaire qu’alimentaire, dans l’armée il y a au moins une certaine égalité entre les individus. Il accepte toutefois l’inégalité des salaires et il dit avec philosophie à propos de la France : “ Elle ne peut traiter de la même manière son fils et son beau-fils ”. Le jeune Hédi obtint son titre de caporal faisant fonction de chef de groupe, en décembre 1938, à l’âge de 19 ans, à Ferryville (Menzel Bourguiba) et fut par la suite affecté avec son bataillon à Mareth. Le soldat dans la tourmente de la guerre Le caporal Hédi Abdelkader intégra le 8ème Régiment des Tirailleurs Tunisiens (8ème RTT), lequel fut affecté à la 88ème Division d’Infanterie Africaine (88ème DIA) de septembre 1939 à février 1940, opérant à Mareth et Metlaoui.Au terme de cette période où il a suivi le peloton d’élèves sous-officiers en devenant major de sa promotion, il fut nommé sergent. Le 8ème RTT fut ensuite affecté à la 84ème DIA de février à mai 1940 et stationné entre Beja et Medjaz El Bab. Suite au déclenchement de la guerre et de retour à Bizerte, le 8 ème RTT embarque sur le paquebot “ De Grasse ” le 26 mai 1940 pour Marseille. La vitesse du navire avait permis au 8éme RTT d’arriver plus rapidement à Marseille, soit en vingt-quatre heures, et d’éviter ainsi le rendez-vous avec l’aviation allemande venue bombarder le reste du convoi de la 84ème DIA, dont les bateaux, plus lents, étaient arrivés douze heures plus tard.Après avoir atteint le Nord de la région parisienne et suite à l’effondrement du front, son unité, après avoir engagé le combat sur l’Oise, s’est repliée sur Beauvais, Pontoise, Versailles, Rambouillet et, voulant repasser la Loire, elle avait été rattrapée et encerclée par l’ennemi à Vendôme le 18 juin 1940, à 9 heures du matin. Le sergent a été fait prisonnier avec son groupe au complet par trois Allemands montés sur un side-car.Quelques jours après, tout le monde fut transféré au camp de Voves, situé à mi-chemin entre Chartres et Orléans.C’est dans ce camp que le sergent Hédi Abdelkader fit la connaissance d’un professeur de français, réfugié juif d’origine allemande et naturalisé français, qui lui avait proposé, avec quelques camarades, de leur apprendre l’allemand. Il s’accrocha à cette proposition et finit par apprendre cette langue au bout de trois mois, pour mieux communiquer avec ses gardiens, se rappelant de l’adage arabe “ en apprenant la langue d’un peuple, on se protège de ses méfaits ”. En novembre 1940, on annonça aux prisonniers nord- africains qu’ils allaient rentrer chez eux, mais il s’agissait d’un mensonge ; les Allemands voulaient simplement les transférer dans un autre camp. Après un séjour de six mois au camp de Mulsanne, lieu actuel des 24 heures du Mans, ils furent envoyés au camp de “ la Vallée aux Poules ”, à la Cité des Pins, située au Mans.Il est à remarquer que pendant une période de quatre mois le détachement se déplaçait pour travailler de Mulsanne au parc à fourrages du Mans, lieu important de ravitaillement de la région de l’Ouest. Devant l’exaspération des Allemands devant le désordre qui régnait au camp, le sergent Hédi Abdelkader manifesta à ces derniers sa volonté de diriger le détachement tout en leur promettant le retour à l’ordre, ce qui fut fait. Cette intervention a été salutaire pour tout le monde grâce à sa connaissance de la langue allemande. Il réussit également à contrecarrer l’influence de certains prisonniers polonais qui n’arrêtaient pas de dire aux Allemands du mal de ses compatriotes en les traitant de malpropres, de voleurs etc.…. Il faut reconnaître que dans un camp de prisonniers la convivialité et la bonhomie n’étaient pas de mise. Le sergent lança la pratique du football au camp de Mulsanne en organisant des tournois entre Malgaches, Français, Algériens, Marocains et Tunisiens. Ses prouesses ne passèrent pas inaperçues et certains prisonniers français, joueurs du club “ Union Sportive du Mans ”, en informèrent leur président, un certain M.Berger. Après le transfert du détachement au camp de “ la Vallée aux Poules ” au Mans, celui-ci le contacta pour lui proposer de jouer dans son club. M.Berger sollicita les Allemands, moyennant une caution de 10.000 francs, somme considérable à l’époque, pour permettre au sergent Hédi Abdelkader de jouer dans son équipe. Cette nouvelle situation lui permettait de sortir du camp, mais accompagné tout le temps d’un soldat allemand, pour aller s’entraîner ou jouer au stade Léon Bollet du Mans. C’est au cours de ces déplacements qu’il fut contacté par le Lieutenant Said Belhaffaf, Algérien de Constantine et retraité de l’armée française, qui lui proposa d’organiser des aides aux prisonniers nord-africains. L’entrée dans la Résistance En réalité le Lieutenant Saïd Belhaffaf, fer de lance de la contribution maghrébine à la Résistance française dans cette région, voulait le connaître davantage et le tester, avant de lui proposer de rejoindre la Résistance. A cette époque il fallait être très prudent parce que l’ennemi étendait ses tentacules dans les plus petits recoins de la France occupée pour épier les moindres faits et gestes de la population. Le sergent accepta sans réserves d’entrer dans la Résistance, une façon de lutter contre l’oppresseur et l’occasion de reprendre sa revanche du 18 juin 1940, jour de la capture humiliante de son groupe. C’est également au cours de ces sorties qu’il rencontra celle qui sera sa future épouse, et ce dans une épicerie. Un sourire qui se transforma en un coup de foudre et le point de départ d’une vie commune pleine d’amour, de tendresse et de bonheur, malgré les embûches du temps. En jouant au football, il était souvent comparé au caporal-chef Benguigui, ancien joueur du club et prisonnier de guerre en Allemagne. Un jour le président du club, M.Berger, affirma au sergent Hédi Abdelkader qu’il ne lui tiendrait pas rigueur s’il voulait s’évader. Le sergent avait aussitôt compris que son interlocuteur était dans la Résistance, et d’ailleurs M. Berger fut arrêté par la Gestapo et mourut, hélas, lors de la libération du camp où il était prisonnier. Quelques mois plus tard, les prisonniers nord -africains furent transférés, début 1942 à St Médard – en – Jalles prés de Bordeaux. Les Allemands prétendaient que le climat était plus doux pour ces prisonniers, mais la véritable raison était de les charger des travaux d’agrandissement des pistes du terrain d’aviation de Mérignac. Dans ce même camp il y avait des Sénégalais, parmi lesquels un qui deviendra célèbre, le lieutenant Léopold Sedar Senghlor.Le séjour dans ce camp n’était pas agréable pour le sergent, d’autant plus qu’il ne pouvait plus voir sa fiancée, car même les visites n’y étaient pas faciles. Sa connaissance de la langue allemande lui permit de faire l’interprète. Il avait été chargé de regrouper les colis de prisonniers décédés on évadés, et de les distribuer aux autres prisonniers du camp. Un jour son ex-instructeur le sergent-chef Mohamed Dhifallah, également prisonnier, l’avait informé que les Allemands forçaient des prisonniers à ramener des renseignements sur la Résistance française et les exécutaient en cas de refus ou de manque d’efficacité. Il lui avait conseillé l’évasion comme seule chance de salut, geste qu’il n’oubliera pas après la Libération quand le sergent-chef fut accusé injustement de trahison, en militant pour son acquittement en 1946 en Tunisie. Il prépara minutieusement cette évasion, et fin octobre 1942, profitant de la proximité de la gare, il faussa compagnie au groupe qui retournait au camp, en prenant un train direct pour le Mans. Il rejoignit la maison de ses futurs beaux-parents, qui au péril de leur vie l’hébergèrent. Le lieutenant Said Belhaffaf lui procura une fausse attestation de congé de captivité grâce à des complices à la préfecture du Mans. Il lui trouvera également du travail à l’usine Junkers, spécialisée dans la réparation et révision des moteurs d’avions. Grâce à son sens de l’organisation, le sergent avait été élu comme délégué du comité d’entreprise de l’usine par les 600 ouvriers, parmi lesquels 250 réfractaires du STO (service du travail obligatoire). Il s’occupa de l’atelier de démontage, du lavage et du contrôle des pièces, ayant sous ses ordres 70 personnes. L’assistance apportée aux prisonniers et réfractaires français Belhaffaf, après avoir bien apprécié le personnage, l’intégra dans l’organisation civile et militaire OCM sous le n° 25, le 1er novembre 1942 .Les tâches du sergent étaient multiples et on peut citer en particulier l’ aide à l’ évasion des prisonniers et leur acheminement vers des lieux d’hébergement sécurisés mis à disposition par le chef de groupe. Le sergent avait assuré le recrutement, la propagande,la diffusion de tracts et de la presse clandestine, la garde des équipements militaires destinés aux groupes d’actions immédiates, camouflés chez lui dans la maison de ses beaux- parents .Le sergent nous a montré plusieurs témoignages écrits par des Français pour l’aide qu’il leur a apporté. Parmi les ouvriers qu’il supervisait, il y avait un Français juif originaire d’Alger, du nom de Bénifla, qui occupait le poste de chef d’équipe de lavage, et un autre Juif originaire d’Alsace, du nom de Pfefer, chargé du magasin. Le sergent le savait mais faisait tout ce qu’il fallait pour que les Allemands ne le sachent pas. Par ailleurs il est à signaler que le sergent rencontra le fameux joueur Benguigui en 1943, lors des rencontres qui opposaient son club à celui de l’Union sportive de Sable, ville voisine du Mans. Le caporal-chef Benguigui s’était enfui, la même année, d’un camp de prisonniers en Allemagne, grâce à la complicité d’un conducteur de locomotive qui l’avait caché sous le plancher d’un wagon .Il choisit de s’établir à Sable, ville d’origine de sa femme et où il était moins connu. C’est au cours des échanges de licences que le sergent Hédi Abdelkader et le caporal-chef Benguigui connurent mutuellement leurs origines.Le Sergent faisait mine de ne rien savoir et le caporal–chef évitait tout contact de peur d’être dénoncé .D‘ailleurs les deux personnes devinrent de très grands amis après la guerre. Le sergent Hédi Abdelkader se maria le 20 mars 1943 et s’installa chez ses beaux- parents. Le manque de pièces de rechange, suite aux bombardements des villes allemandes par les Alliés, obligea la direction de l’usine Junkers à demander le maintien du rythme de quatre moteurs révisés par jour en recommandant aux équipes concernées de démonter cinq moteurs par jour, le plus détérioré étant destiné au “cannibalisme ”.Le sergent réunit ses équipiers pour discuter cette demande. Ceux-ci, après avoir protesté, finirent par donner leur accord à condition de disposer du samedi après-midi et du dimanche comme congé hebdomadaire, prétendant, à juste titre, de s’occuper de leur approvisionnement à la campagne voisine .Le sergent finit par avoir l’accord de la direction de l’ usine pour le congé hebdomadaire demandé. La réaction des ouvriers fut la surprise au moment de la paie, quand ils constatèrent une baisse des salaires suite à la diminution des heures supplémentaires .Le sergent fut sollicité par le Comité d’entreprise pour aller plaider la cause des ouvriers auprès de la direction de l’usine, et finit par obtenir une augmentation substantielle, compensant largement la diminution du nombre d’ heures supplémentaires .Le sergent usait d’arguments de taille pour convaincre ses interlocuteurs , en défendant le fait que les moteurs révisés avec les moyens du bord coûtaient moins cher que les neufs et qu’ainsi il fallait accorder aux salariés une augmentation motivante . Aussi surprenant que cela puisse paraître , certains énergumènes, ouvriers à l’ usine, agissant par jalousie ou racisme et profitant de la période floue de l’épuration qui a suivi la Libération, utilisèrent ces succès contre le sergent lui-même, les présentant comme actes de collaboration avec l’ ennemi .Le sergent s’en défendit avec véhémence et, grâce à son adhésion prouvée à la Résistance, il mit ses accusateurs hors d’ état de nuire. Cette décision du congé hebdomadaire fut salutaire car l’usine fut bombardée par l’aviation britannique un dimanche du mois de mai 1944 sans faire aucune victime civile. En réalité cette opération avait été bien préparée et coordonnée entre le groupe de résistance OCM et Londres. L’usine Junkers figurait comme objectif militaire du commandement allié, et le sergent le savait. Il se souvenait des deux passages des bombardiers anglais alors que toute la famille était installée dans une ferme à Paregnier-le-Pollin, située en hauteur à 20 kilomètres de la ville du Mans. L’usine fut entièrement détruite. Le sergent rejoignit le maquis aussitôt avec son groupe de Maghrébins. Il réussit, avec l’aide d’un groupe de Tunisiens, à neutraliser onze soldats allemands avec deux mitrailleuses et dont la mission était la destruction du pont de Foultourte sur la route reliant le Mans et Sable. Cette action facilita l’avancée du groupe de reconnaissance allié de la division blindée du général Patton, et lui valut la croix de guerre avec étoile de bronze. Le sergent avait pris part également aux actions armées contre les forces allemandes lors des combats de libération de la France, sur la Sarthe et sur la Loire, sous les ordres du colonel Le Tellier, Chef d’ état- major de la subdivision du Mans. Après le passage des Alliés, les résistants maghrébins furent rassemblés et casernés à Cavegnac sur instruction du colonel Le Tellier et du général De Reboul, commandant le groupe de subdivision du Mans. Le groupe fut chargé du maintien de l’ordre jusqu’à la mise en place du gouvernement provisoire. A cette époque le sergent avait obtenu le grade d’adjudant. L’époque d’après-guerre Après la libération, l’adjudant Hedi Abdelkader intégra l’Ecole Régionale d’Officiers de Cholet et en sortit quatrième de la promotion “Colonel Fabien ” (mars 1945), avec le brevet de chef de section interarmes .Il obtint également son certificat de fin d’études primaires le 26 février 1945 au Mans. L’adjudant Hédi Abdelkader, après avoir passé trois années à l’école d’application d’infanterie d’Auvours, faisant fonction d’officier d’approvisionnement,fut affecté à une compagnie de tirailleurs à Strasbourg, sans bénéficier d’avancement en rapport avec les efforts qu’il avait fournis. En effet, et à cause d’une sévère décision du lieutenant Said Belhaffaf d’empêcher les militaires nord-africains de prendre des galons dans les rangs des FFI de peur d’ imbrication politique, l’adjudant Hédi Abdelkader ne pouvait devenir officier, à cette époque. D’ailleurs, le lieutenant Said Belhaffaf, en bon chevalier, reconnut son erreur , mais malgré les efforts consentis, ne put réparer le préjudice subi. Le retour en Tunisie Entre plusieurs possibilités d’affectation, à savoir Strasbourg, Marseille et l’Autriche, l’adjudant-chef choisit son pays et y retourna avec sa famille le 2 février 1949. Ses beaux-parents, après avoir vendu une partie de leurs biens, l’accompagnèrent. Il dit avec beaucoup d’émotion que c’est grâce à sa mère que sa femme put très bien s’intégrer dans le milieu tunisien et éviter ainsi le choc des cultures. D’ailleurs, à l’Indépendance de la Tunisie, elle obtint par le bienfait de la loi la nationalité tunisienne et ce n’ est que récemment qu’elle reprit sa nationalité d’origine, tout en restant Tunisienne jusqu’ au bout des ongles. L’adjudant-chef Hédi Abdelkader fut affecté à son corps d’origine, le 8ème RTT à Bizerte.Il est à signaler qu’il n’avait pas signé un engagement de trois ans pour aller en Indochine et fut admis, en réussissant premier, à un concours de préposé-chef des Douanes et affecté à Sfax. Quelques semaines plus tard, il fut convoqué par son chef de corps, le colonel Achte, pour lui demander des explications quant à son refus de s’engager pour l’Indochine. L’adjudant-chef expliqua qu’il fallait une autorisation spéciale pour aller jusqu’ à un âge de quarante ans. Cette demande fut acceptée illico et un décret fut établi aussitôt à ce sujet. Quinze jours après, il fut rappelé pour la reprise du service et proposé au grade d’officier pour la sixième fois depuis 1945 et nommé sous- lieutenant le 1er mars 1953. Il reprit son sport favori, le football, pour devenir en mai 1951 arbitre interrégional et arbitre national militaire. Il disait que pendant la période noire de 1951 à 1952, alors affecté au Sud Tunisien, il veillait, malgré l’atmosphère de troubles qui régnait, à contenir le comportement de ses soldats envers la population civile. Il ajoutait qu’aucun débordement ni exactions n’avaient eu lieu sous ses ordres. A l’indépendance de la Tunisie, ayant obtenu le rang de lieutenant en 1955, il fut transféré à l’armée de son pays, en participant à sa mise sur pied. Le lieutenant Hédi Abdelkader réceptionna, à Bouficha, l’ensemble du matériel militaire transféré de l’armée française, correspondant à une brigade interarmes. Le matériel avait été réparti sur place, sur les unités de l’Armée tunisienne naissante. Le lieutenant devint arbitre fédéral de football en octobre 1956. Décoré du Mérite Sportif en 1969, il obtint également la Médaille du Sport, de la Culture et du Travail en 1976. Devenu capitaine le 1er juillet 1956, il prit une retraite anticipée le 25 décembre 1963. Le capitaine Hédi Abdelkader est décoré, du côté tunisien, du Cordon de l’Ordre de la République 4ème catégorie, obtenu le 25/12/1963, et 3ème catégorie obtenu le 25 juillet 1975.Il est, du côté français, décoré de la Médaille de la Résistance le 31 mai 1947, Chevalier de la Légion d’Honneur le 24 juillet 1994, Officier de l’Ordre national du Mérite le11/03/2001 et Officier de l’Ordre de la Légion d’Honneur le 15/08/2004. Toujours dévoué pour servir les autres, le capitaine est actuellement président de l’Association des Anciens Combattants et Victimes de guerre. C’est grâce à son action à la tête de cette association que les pensions des Anciens combattants de l’armée française ont été revalorisées d’une manière substantielle en 2004. Il y a lieu de retenir, de l’itinéraire de cet homme hors du commun, un message d’humanisme et un attachement indéfectible à un idéal de liberté.Il considère que ce qu’il a fait envers les réfractaires français en général et ceux de confession juive en particulier relève de ce même idéal. Il regrette cependant la politique répressive du gouvernement actuel d’Israël envers le peuple palestinien le poussant au désespoir .Il ajoute qu’ un tel comportement dénote une méconnaissance totale des leçons de l’ histoire. Son action à la tête de l’association a permis notamment de rappeler que les Anciens combattants de la deuxième guerre mondiale avaient lutté réellement contre la barbarie nazie pour sauvegarder la liberté et la démocratie, valeurs auxquelles s’est attachée la Tunisie depuis le début de sa lutte pour l’Indépendance. (Source : « Réalités » N° 1069 du 22 juin 2006)

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