AP: Un manifestant blessé par balle lors d’une manifestation dans le sud tunisien
AFP: Tunisie: les écolos retrouvent des couleurs après la révolution
AFP: Immigration: Fillon assure l’Italie de la solidarité de la France
Un manifestant blessé par balle lors d’une manifestation dans le sud tunisien
Tunisie: les écolos retrouvent des couleurs après la révolution
Immigration: Fillon assure l’Italie de la solidarité de la France
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Les 10 mots de la révolution tunisienne – 10. “Marchands ambulants
On se promène début mars au bout de l’avenue Bourguiba, dans le quartier derrière l’ambassade de France, avec un ami tunisois. “Tu as vu, soupire-t-il, depuis le 14 janvier, ça n’arrête plus, il y en a de plus en plus, c’est dégoutant !”. Qu’est ce qui est dégoutant ? “Mais enfin ! Là ! Tous ces marchands sur les trottoirs. C’est affreux !”. Il désigne tous les vendeurs installés le long de la rue, qui ont déployé sur leurs étals des tee-shirts, des cigarettes, quelques DVD. On ne les avait même pas vus. Ils sont calmes, bien rangés les uns à côté des autres, les chalands regardent tranquillement la marchandise, on n’avait rien perçu de très choquant là dedans. Mais notre tunisois, qui fut hier en première ligne de toutes les manifs contre la dictature, est énervé : il n’a pas fait la Révolution pour ça. Et “ça” est une des conséquences, inattendues, de sa révolution. Si tous ces vendeurs à la sauvette tiennent le trottoir, c’est tout simplement parce que les placiers de la mairie ou la police n’osent plus venir leur signifier que c’est interdit. Comment oseraient-ils dans un pays qui s’est enflammé pour montrer son soutien au plus fameux vendeur ambulant de l’histoire arabe du XXIème siècle, un certain Mohamed Bouazizi ?
Seulement, ce désordre énerve de plus en plus de citoyens, qui voudraient voir renaître au plus vite une administration efficace. Même si sa mise en œuvre n’est pas si facile. Voyez le taxi, à qui l’on parle de nos vendeurs, dix minutes plus tard, en roulant vers l’aéroport. A leur propos, sa pensée est tranchée : “D’accord, ce sont des jeunes au chômage qui font ça pour gagner un peu. D’accord, ils ne vendent pas cher et ça peut aider les gens qui ont tellement de soucis en ce moment, mais travailler au noir, ça n’est pas normal. Les vrais commerçants doivent payer leurs impôts. L’Etat aussi a besoin de dinars !”. Et cinq minutes plus tard, quand on lui demande une note pour justifier la course qu’il vient de faire sans mettre en marche son compteur, il prend un air vraiment désolé –une fiche ? Comme c’est dommage ! Il n’en a plus !- et il empoche avec un clin d’œil le billet qu’on lui tend. Universelle bataille entre la vertu publique et les petits arrangements privés, un classique de l’histoire humaine. Chaque tunisien rêve pour son pays d’un Etat qui seraitenfin irréprochable et fort. Personne, à titre personnel, n’est mécontent de pouvoir profiter au passage qu’il soit encore si faible pour grignoter trois sous. Et tout le monde est bien conscient du problème.
Dans La Presse, le grand quotidien de Tunis, un petit dessin publié début mars résumait la situation avec drôlerie. On y voit un type décoré d’une magnifique médaille. Dessous cette légende : “Ce matin, M. le président de la République a tenu à remettre personnellement l’ordre du mérite national à M. Mohamed X….. Il a payé sa vignette auto”.
Source: ”Le Nouvel Observateur” Le 02-04-2011
Tunisie : croissance 2011 entre 0 et 1%, contre 5,4% prévus
Le ministre tunisien des finances Jalloul Ayed a dressé vendredi un sombre tableau économique du pays, faisant état d’une croissance pour 2011 entre 0 et 1% et de créations d’emplois plus de trois fois inférieures à celles qui étaient prévues. “En l’absence de mesures urgentes, nous devons nous attendre à une croissance de 0 à 1% en 2011, a déclaré le ministre lors d’une conférence de presse. Le Budget 2011, adopté fin 2010 avant la chute du régime du président Ben Ali le 14 janvier, tablait sur une croissance de 5,4%.
Source : « Les Echos » Le 01-02-2011
Bendir Man: la voix de la révolution tunisienne
Il a 26 ans. L’air de rien derrière sous son éternelle casquette militaire. Mais pour les Tunisiens, il est une véritable star.
Ne lui en déplaise, Bayram Kirani, alias Bendir Man, est devenu un des héros de la révolution tunisienne. Ses chansons satiriques et engagées ont donné courage à la population, qui les a jouées en boucle malgré la censure. Il compte aujourd’hui plus de 150 000 fans sur MySpace et près de 100 000 amis sur Facebook. Sans parler de tous les gens qui l’arrêtent dans la rue à Tunis.
Le jeune homme, qui se produit ce soir à Montréal dans le cadre des Journées de la Tunisie nouvelle, n’aime pas toute cette attention et préférerait visiblement s’effacer derrière la cause. Ce qui s’est passé dans son pays, dit-il, est le résultat d’un mouvement collectif impliquant toutes les générations et pas seulement la sienne. À l’entendre, sa contribution ne fut qu’un élément parmi d’autres. «Je n’ai pas montré la voie, ça s’est fait très spontanément», dit-il, en ajoutant qu’il se voyait «tout petit» pendant les manifestations.
Reste que Bendir Man a longtemps dit tout haut ce que plusieurs pensaient tout bas, ce qui lui a valu d’être banni depuis ses débuts. En deux ans de carrière, le chanteur n’a pas eu le droit de donner un seul concert en Tunisie, se produisant exclusivement en France et même un peu ici, à Montréal. Des jeunes qui l’écoutaient ont été arrêtés. Des programmateurs de salles qui voulaient l’engager ont été menacés par la police. Son CD, produit clandestinement, se passait exclusivement sous le manteau. Sa maison était surveillée, sa ligne sur écoute. Sans compter les nombreuses fois où on l’a tabassé et jeté en prison.
«Moi, je me pensais subtil. Mais pour le gouvernement, j’étais le summum de l’arrogance!» lâche-t-il, devant un café et un brownie.
Dans les gènes
Il faut dire que Bendir Man a de qui tenir: son père Mohamed, syndicaliste marxiste-léniniste convaincu, a passé 17 ans de sa vie en prison. Militant dès l’adolescence, le fils a instinctivement suivi les traces du paternel. «À 15 ans, je foutais déjà le bordel au lycée à cause d’une réforme», raconte cet ancien sportif, ceinture noire de karaté. La répression et les injustices sociales l’ont toujours mis hors de lui. Et c’est dans la chanson qu’il a trouvé le bon véhicule pour exprimer sa révolte.
Savait-il ce qu’il risquait? Bien sûr. «Mais je ne pouvais pas parler des oiseaux et de la vie en rose alors que les mecs de mon quartier vivaient dans la merde ou que d’autres risquaient leur vie pour aller se réfugier en Italie…»
Il est clair que sa guérilla chansonnière a porté ses fruits. Mais la bataille n’est pas complètement gagnée, souligne celui qui a déjà donné une vingtaine de concerts en Tunisie depuis le départ de Ben Ali.
Car si la vie a repris son cours, beaucoup reste à faire. «Je suis loin d’être soulagé, dit Bayram. La Constitution n’a pas encore été modifiée, les élections n’ont pas encore eu lieu. On se dirige vers un pays démocratique. Mais il y a encore un long chemin à parcourir.» Le chanteur, qui se présente comme un éternel insatisfait, ajoute qu’on peut compter sur lui pour «emmerder tous ceux qui ne veulent pas que ça change».
Il n’est peut-être le héros de sa révolution, mais il ne laissera personne gâcher le travail qui vient d’être fait.
Source: “Cyberpresse” Le 02-04-2011
Tunisie: Les islamistes sortent de l’ombre.
Si dans l’un de mes précédents articles je faisais état du silence des partis radicaux à orientation extrémiste en Tunisie, le temps semble me démentir au vue de la journée mouvementée de vendredi qu’a connue l’Avenue Habib Bourguiba. Ils étaient près d’un millier de personnes attroupées devant le ministère de l’intérieur et brandissant des drapeaux noirs portant des inscriptions religieuses et scandant des slogans à caractère religieux. Ils seraient selon des témoins des membres du mouvement islamiste Ettahrir.
Si les drapeaux de la Tunisie, de l’Egypte, de la Palestine et de l’Irak étaient notamment brandis dans le cadre de cette manifestation pacifique, les participants ont aussi revendiqué la dissolution effective du corps de la police politique, la suppression de la circulaire n°108 se rapportant à la prohibition du port du Hijab, outre la liberté de l’exercice des cultes et l’abrogation de la loi de lutte contre le terrorisme.
L’effet de cette manifestation qui aurait du être d’une autre ampleur, a été amoindri par l’annonce par le ministère de l’Intérieur, jeudi, de la décision d’autoriser le port du voile dans les photos d’identité, ce qui a fait que le nombre des participants n’excède pas quelques centaines.
Les revendications portaient tout particulièrement sur la défense du droit au port du Hijab et la réhabilitation de la formation religieuse dans les programmes scolaires.
Ils ont réaffirmé leur attachement au caractère pacifique de leur marche et leur détermination à faire face à tout intrus qui chercherait à la perturber.
“Le gouvernement n’a rien fait de concret. On veut une nouvelle politique qui réponde aux aspirations du peuple”, a lancé K. Gharbi, une fonctionnaire de 46 ans selon une source de Tunis (AP).
“Non au laïcisme, la Tunisie est un pays musulman”, pouvait-on notamment lire parmi les messages arborés dans la manifestation.
Au même moment, selon un journaliste de l’Associated Press qui était sur place, des accrochages ont opposé des manifestants et forces de l’ordre au centre-ville et autour de la place de la Kasbah (la place du gouvernement), où se trouve le siège du gouvernement.
La bonne nouvelle du jour viendrait surement du caractère pacifique de cette sortie spontanée des islamistes.
Source: ”come4news” Le 02-04-2011
Un nouvel ambassadeur à Tunis
L’ambassadeur de France en Tunisie devrait être remplacé par Yves Marek, un enfant du pays
C’est une question de jours. Le départ de Boris Boillon, l’ambassadeur de France en Tunisie, devenu le symbole d’une diplomatie française calamiteuse, est presque acté. Sur les forums Internet tunisiens, on se félicite déjà de l’arrivée de son potentiel remplaçant. Il s’agirait d’Yves Marek, 44 ans, un diplomate de carrière et un enfant du pays. « A priori, ce M. Marek a l’avantage de bien connaître notre pays et notre peuple. C’est un grand atout », peut-on lire sur la Toile. « M. Marek, vous êtes en Tunisie chez vous. L’essentiel, c’est faire partir M. Boillon », indique un autre internaute.
Le nom d’Yves Marek circulait déjà en janvier dernier pour la succession de Pierre Ménat, le prédécesseur de Boris Boillon. Mais, contre l’avis de Nicolas Sarkozy, Jean-David Levitte, le conseiller diplomatique de l’Elysée, a usé de tout son poids pour imposer celui qui était ambassadeur en Irak.
Fils de résistant tunisien
Si la nomination d’Yves Marek se confirme, la Tunisie accueillera un enfant de la résistance tunisienne. Son père, grand chef d’entreprise laitière, a été arrêté en 1986 par les services de police de Ben Ali, et il est resté aveugle et paralysé après son passage dans les geôles. « On lui a demandé de monter des dossiers contre le Premier ministre afin de faciliter l’arrivée de Ben Ali au pouvoir. Il a refusé », confie Yves Marek, qui a quitté Carthage après le bac. Le diplôme de l’ENA en poche, il débute sa carrière auprès d’Edgar Faure, le père de l’indépendance tunisienne. Un type de fonction qu’il ne quittera plus. Le diplomate de formation saute de cabinets en cabinets ministériels. Jamais il ne passe par la case ambassade. Après Jacques Toubon, à la Justice, il est aux côtés de Bernard Pons à l’Outre-mer. En 1995, il dirige l’équipe des collaborateurs de François Baroin, alors nommé porte-parole du gouvernement. Un homme dont il reste très proche. Appelé par Christian Poncelet au Sénat, il prend en charge le Musée du Luxembourg. Cultivé et fin, l’homme est féru de philosophie allemande et d’échecs. Un profil très lointain de celui de Boillon, qui posait en maillot de bain sur le site Copains d’avant.
Source : « France Soir » Le 02-04-2011
Révolution pour la liberté d’entreprendre
Les voix particulièrement audibles de la gauche tunisienne, sous les slogans en faveur de la redistribution des richesses, ne pourraient-elles nous faire oublier le sens profond du point de départ de la révolution tunisienne ?
« Laissez faire, laissez passer »
Mohamed Bouazizi, jeune de 26 ans dans une région dévastée par le chômage n’avait trouvé d’autre solution pour survivre et nourrir les siens que de créer sa propre petite entreprise : un stand ambulant de fruits et légumes. Maltraité et insulté par la Police et les agents de l’Etat qui ont confisqué sa marchandise sous prétexte qu’il n’avait pas acheté de licence pour vendre sur la voie publique, Bouazizi s’est immolé par le feu le 17 décembre 2010. Son acte a été récupéré par la gauche et les syndicats qui ont voulu en faire un Che Guevara tunisien. Mais ce jeune n’avait demandé ni allocation ni emploi subventionné. Il ne croyait pas en l’État-providence, simplement en lui-même, et, muni de son chariot de légumes, il avait tenté de s’en sortir par ses propres moyens sans rien demander à personne : Bouazizi était un entrepreneur. Son immolation est un symbole de la bataille du « laissez faire, laissez passer ».
Une confusion entre l’entreprise et le big business
La gauche tunisienne véhicule un stéréotype de l’entreprise fondé sur l’image arrogante d’un patron d’usine ou d’hôtel, réel ou fantasmé. Certes, des pratiques odieuses ont été mises en œuvre dans le silence de Ben Ali par une frange du patronat, mais on semble oublier que l’essence de l’entreprise tunisienne se trouve dans la petite entreprise, familiale ou individuelle : pizzerias de quartier, cybercafés, taxis, épiciers, plombiers etc. Sur les 525 960 entreprises répertoriées en Tunisie 503 636 employaient moins de 6 personnes en 2007 (1). La micro-entreprise représente donc plus de 95% des entreprises formant le tissu économique tunisien. On est loin du cliché de l’exploitation, avec cette multitude de petites entreprises dont 50% sont formées d’entrepreneurs indépendants, libérés du salariat et n’exploitant pas de main-d’œuvre.
Source : « Contrepoints » Le 02-04-2011
Qui arrêtera la dérive des syndicats en Tunisie?
Hazem Bouajina écrit – Certains dirigeants syndicaux confondent révolution et anarchie. Face à l’impuissance de la hiérarchie, ils imposent leur loi dans les entreprises et les établissements. Jusqu’à quand?
Les agissements insensés, violents et arrogants de plusieurs représentants syndicaux constituent des précédents très graves. Quelques exemples ahurissants…
Tunisie Telecom : le dirigeant syndical n’aime pas le chiffre 7
Le secrétaire général du syndicat des Ptt, dont rien que le nom Ptt montre qu’il vit encore à une autre époque, continue à vouloir imposer sa volonté à notre opérateur historique. Ce syndicaliste, qui ne semble pas saisir la nouvelle réalité du marché, continue d’exiger le départ de tous les contractuels sans exception de Tunisie Telecom. Pire encore: il veut changer le n°7 du préfixe car il fait allusion au 7-Novembre : date de l’accession de Ben Ali au pouvoir. Le ridicule, comme on dit, ne tue pas.
Ce syndicaliste n’a absolument aucune idée des conséquences financières et techniques d’une telle opération sur Tunisie Telecom et sur tous ses abonnés qui devront changer tous leurs documents, cartes de visites, papier en-tête, factures, sites web, etc.
N’est-il pas tristement hilarant que des personnes puissent exprimer des idées aussi bizarres et irresponsables sans que le gouvernement ne réagisse et ne les remette à leur place?
Jal Group : un directeur menacé à l’arme blanche
Les nouveaux représentants autoproclamés ont constitué 3 syndicats d’un coup à Jal Group. La société italienne qui emploie 4.500 personnes à Menzel Bourguiba et Menzel Jmil, qui est en situation de blocage. Les représentants syndicaux se sont attaqués au directeur général dans son bureau avec des armes blanches menaçant de le tuer.
Ces comportements de bandits ne ressemblent absolument pas aux agissements d’un représentant syndical digne de ce nom, et en plus ils continuent de nier les faits, alors que l’armée a été un témoin oculaire de l’agression.
Le fait de ne pas prendre des mesures contre ces personnes constitue un encouragement à ce genre d’actes inacceptables.
Hôpital Kassab: le syndicaliste mène le staff à la baguette
Un autre représentant syndical à l’hôpital Kassab, que ses collègues soupçonnent de petites magouilles, a toujours profité de son statut syndical pour échapper à la sanction et continuer son manège au vu et au su de tous le monde.
Ce monsieur impose sa volonté à tous l’hôpital. Il dirige maintenant un mouvement de protestation infondé dont le seul but et de bloquer le fonctionnement de l’hôpital et travailler ainsi à sa guise devant le regard impuissant du staff médical et la nonchalance du ministère.
Les représentant syndicaux constituent de nos jours les nouveaux Trabelsi, tout est permis pour eux, il se considère au dessus de la loi et il profitent uniquement pour leur intérêts personnels et la gloire éphémère, ces comportements indignes et incultes disent long sur le niveau intellectuel et humain de ces personnes
Source : « Kapitalis » Le 02-04-2011
Lien : http://www.kapitalis.com/afkar/68-tribune/3351-qui-arretera-la-derive-des-syndicats-en-tunisie.html
Non, monsieur Caïd Essebsi, les Tunisiens ne sont plus des bleus
Rafik Souidi écrit – Il faut respecter à l’avenir la volonté du peuple tunisien et cesser de l’infantiliser, car il est capable de vivre en démocratie dans le cadre d’un Etat de droit.
La devise de la République Tunisienne est «Liberté-Ordre-Justice». Pour la liberté et la justice, le bilan est accablant depuis l’indépendance et il est allé en s’aggravant ces dernières décennies. Mais ce qui est frappant dans cette devise nationale, c’est le mot central «ordre» – vague allusion à la dualité positiviste de l’ordre et du progrès d’Auguste Comte – comme si le peuple tunisien était considéré comme un adolescent dissipé dans une cour d’école, à qui il fallait rappeler le règlement de l’établissement. Que vient faire un tel «mot d’ordre» entre deux valeurs aussi belles et universelles que la liberté et la Justice?
Faillite morale et désordre financier de l’Etat
En effet, le droit à la sécurité est incontestable et le désordre est condamnable mais il ne s’agit en aucune manière d’une valeur universelle, tout au plus une des missions essentielles que doit assurer l’administration.
C’est pourtant au nom de cet ordre présumé que les droits élémentaires du citoyen ont été bafoués depuis l’indépendance et plus particulièrement depuis 1987: disparitions, emprisonnements politiques, tirs à balles réelles sur manifestants et assassinats de sang froid, cas multiples de torture, corruption généralisée des plus hautes instances gouvernementales et du système judiciaire, rackets et chantages en tout genre, délits d’initiés et privatisations frauduleuses, pillages et recels du patrimoine national, monopolisation du pouvoir par un clan et ses complices, statistiques truquées, propagande intérieure et extérieure mensongère… tout ça pour s’enrichir impunément et assouvir un appât du gain insatiable.
Après cette faillite morale et ce désordre financier de l’Etat tunisien à travers de tels agissements, il va falloir reconstruire à partir des fondations pour espérer redorer un jour son blason et lui faire recouvrer une réputation avantageuse.
Cet Etat tunisien moderne que le Premier ministre actuel a contribué à construire dans les années 60 en se souvenant combien la tâche était ardue, faute d’expérience et d’encadrement: «Nous étions des bleus», disait-il.
Un peu de volonté, de bon sens et de civisme.
Mais aujourd’hui la donne a changé car le pays dispose d’une pléthore de cadres et de diplômés de l’enseignement supérieur et il bénéficie de l’expérience des échecs cuisants qu’il a subis à cause d’une direction médiocre.
Avec la globalisation et le formidable essor des technologies de la communication, de l’internet ou des chaînes satellitaires, la démocratie et l’Etat de droit ne sont plus pour les Tunisiens des concepts incompréhensibles ou utopiques mais tout juste le minimum syndical auquel ils aspirent.
Est-ce un problème insurmontable d’organiser des élections honnêtes et transparentes, de respecter la constitution, d’avoir un appareil judiciaire indépendant et intègre, une police en charge de défendre les citoyens et non de les opprimer, d’instaurer la pluralité politique et l’alternance, de lutter contre la corruption, de promouvoir des médias libres et de qualité, d’éduquer nos enfants en leur inculquant l’éthique, le goût de l’innovation et la connaissance de leur civilisation? Non! Il faut juste de la bonne volonté, du bon sens et du civisme.
«Vouloir c’est pouvoir» dit le proverbe. Eh bien, c’est la volonté du peuple tunisien de vivre en démocratie dans le cadre d’un Etat de droit et il devrait donc y parvenir.
Alors, ne présentons pas la tâche plus ardue qu’elle n’est véritablement car si les pays de l’Europe de l’Est et la plupart de ceux d’Asie du Sud-Est l’ont fait sans grande difficulté malgré l’héritage du communisme ou des particularismes culturels, il n’y a aucune raison que le Tunisie n’y arrive pas. Encore faudra-t-il respecter à l’avenir la volonté du peuple tunisien et cesser de l’infantiliser car… nous ne sommes plus des bleus!
Source : « Kapitalis » Le 02-04-2011
Tunisie: Belhassen Trabelsi, ira-t-il au concert de Bendir Man?
Bendir Man sera ce soir en concert à Montréal. Il a profité de l’occasion pour inviter Belhassen Trabelsi. Une question de solidarité entre Tunisiens «fel ghorba». Labess partagera la scène avec Bendir Man. Et l’artiste réserve d’autres surprises pour son public canadien. Belhassen Trabelsi ratera-t-il l’événement?
Son âne l’a encore une fois porté jusqu’au Canada. Et sa cape mauve fonctionne toujours aussi bien. Bendir Man sera en concert, samedi 03 avril, à partir de 20h (heure de Montréal) à la salle Marie-Gérin Lajoie située à l’Université Université du Québec à Montréal (UQAM). L’événement est programmé dans le cadre des Journées de la Tunisie Nouvelle se tenant du jeudi 31 mars au dimanche 03 avril 2011. La manifestation est organisée par Avant-Scène Production. 50% des bénéfices seront versés au Croissant Rouge Tunisien.
Dans ce concert, Bendir Man sera accompagné par le percussionniste togolais Moise et le bassiste tunisien Mohamed Masmoudi. Pour l’occasion, le trio a concocté une reprise de «Zaama Ennar Tetfachi» du bon vieux chanteur tunisien Cheikh Efrit. Bendir Man nous en parle : «J’ai travaillé avec Moise et Mohamed sur un arrangement très folk aux influences down-tempo». Et il poursuit : «Je cherche souvent à faire découvrir à la jeune génération qu’il ya un énorme patrimoine à exploiter».
Le concert sera également marqué par la participation de quelques artistes invités. La poésie urbaine sera représentée par la slammeuse tuniso-canadienne Queen Ka. Saber Gallali, le guitariste tunisien résident à Montréal, amènera le groove avec ses compos jazz, soul et rythm’n’blues. Et le groupe québéco-marocain Labess assurera l’évasion roots avec sa musique aux influences reggae. D’ailleurs, Nedjim Bouizzoul, chanteur de Labess, va partager la scène avec Bendir Man pour interpréter deux morceaux, une du répertoire de chacun. «Nous allons chanter ensemble et «Habiba Ciao» et «Les sept couleurs» de Labess. On a fait quelques jam. Et c’était super» nous confie le super-héros mauve un jour avant sa scène québécoise.
Mais cet artiste satirique tunisien ne fait pas l’événement uniquement par le biais de ses nouvelles collaborations artistiques. Egal à sa personnalité d’inconditionnel Bendir Man, il fait le buzz en partant inviter Belhassen Trabelsi, as de la mafia benaliste refugié à Montréal, pour assister à son concert. La vidéo fait actuellement son ramdam sur Facebook. Bendir Man nous en dit plus : «Le pauvre est à l’étranger (fel ghorba). J’ai pensé à lui chanter «madhlouma ya donya, ya donya fik el 3ib» (la cultissime chanson de mezoued, NDLR). Karim Rmadi, mon manager au Canada, m’a proposé d’aller le voir. J’ai préféré aller l’inviter via le cabinet de son avocat. Et c’est ce que nous avons fait».
Avec une telle pléiade d’artistes, Belhassen Trabelsi va rater quelque chose s’il décline l’invitation de Bendir Man. Le super héro mauve s’est comporté en véritable gentleman. Mais Belhassen Trabelsi aurait-t-il changé? Va-t-il, lui aussi, retourner sa veste et changer de goûts musicaux? Bendir Man remplacera-t-il Amina Fakhet, George Wassouf et autres coqueluches fréquemment sollicitées par les Trabelsi?
Source : « Tekiano » Le 02-04-2011
Nos jeunes et la Révolution
Attention aux anciennes forces de rétention et aux « travestis révolutionnaires »
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Une révolution c’est un acte violent qui requiert donc de la force, et cette force ce sont les jeunes qui en sont l’incarnation. Cette condition s’est vérifiée dans tous les grands bouleversements sociaux à travers l’histoire de l’humanité.Ceci dit, notre Révolution ne déroge pas à la règle, elle en est la parfaite illustration. Il s’agit là d’une question d’ordre naturel, la jeunesse s’identifie principalement par sa fougue, par sa ténacité. |
De par sa force physique et mentale, elle sert de carburant à tout acte révolutionnaire, elle est la locomotive qui le tire vers l’avant, le propulse loin devant. Comme les propagations d’une onde se formant à la surface de l’eau sont provoquées par une force motrice telle que le jet d’une pierre, la révolution aussi ne peut avoir lieu qu’en présence d’une force, elle en est le corollaire. Cette loi naturelle qui gouverne tous les phénomènes de quelque nature qu’ils soient a eu comme champ d’action notre scène sociale qui s’est enflammée par un feu ravageur incendiant et réduisant en cendres Ali Baba et les principaux acteurs de sa bande de quarante ou plutôt de cent dix voleurs. L’apothéose Certes, nos jeunes ont mené le mouvement en variant et en multipliant les actes héroïques qui ont abouti à la décapitation du régime décadent, leur bravoure, leur détermination et les sacrifices qu’ils ont consentis sont indéniables, ils méritent toute notre reconnaissance et toute notre admiration. Toutefois, ces prouesses ne doivent en aucune manière occulter le mérite des autres, les adultes et les vieux, eux aussi ont largement contribué à la révolution, ont apporté leurs pierres à l’édifice. Une société ne fonctionne jamais avec une seule de ses composantes, elle est un tout indissociable, un ensemble compact dont aucun des éléments n’aurait d’existence en dehors du groupe. Une révolution ne tombe pas du ciel, elle est toujours l’aboutissement d’un processus évolutif. A aucun moment de son histoire, notre société n’a cessé de bouger, elle était en ébullition permanente. En témoignent la grève générale du 26 janvier 1978, les émeutes du pain du 3 janvier 1984 et celles du bassin minier de Redeyef de 2008 pour ne citer que les événements les plus marquants. Lors de ces révolutions avortées, plusieurs militants ont payé de leur vie, d’autres ont connu la prison et les sévices, et d’autres encore ont perdu leur travail et leurs études, c’est-à-dire leur dignité. L’ancienne génération a payé chèrement sa lutte contre la dictature, les communistes les premiers, les islamistes les seconds. Cette procession de victimes constitue le socle sur lequel repose notre Révolution. En d’autres termes, le présent est enfanté par le passé et celui-ci n’a pu prendre forme et donner ses fruits que dans l’enceinte du premier, les deux époques sont intimement reliées, l’une n’acquiert de valeur qu’en se conjuguant avec l’autre, c’est la loi de la dialectique historique. L’apport de l’ancienne génération à la Révolution n’est pas seulement historique mais également actuel en ce sens qu’elle en était l’un des protagonistes. Elle s’était embrasée dès la première heure par l’ardeur juvénile et a rejoint les rangs des jeunes révolutionnaires qui ont allumé l’étincelle de la lutte pour la liberté et la dignité. Baptiser la Révolution de Révolution des Jeunes c’est l’annihiler tout à fait, puisqu’une frange de la société ne peut réaliser à elle seule une révolution, dans ce cas, il faudrait plutôt parler de soulèvement. On le répète encore une fois une révolution ne peut avoir lieu que si et seulement si c’est la majorité des opprimés qui y participent, elle est donc forcément populaire et non pas sectaire. Le dénigrement Personne ne peut nier l’apport des structures syndicales, des avocats et de la société civile dans son ensemble dans l’action guidée par les jeunes, leur encadrement et leur assistance aussi bien matérielle que morale, qui ne sont pas à démontrer, ont été déterminants dans l’orientation du mouvement et dans le succès qu’il a connu. Des voix douteuses, très douteuses se sont élevées dans les quatre coins du pays pour dénigrer l’UGTT et minimiser ses efforts commettant ainsi un amalgame prémédité et malintentionné confondant direction et militants. Ces accusations gratuites dévoilent les intentions de leurs auteurs, leur projet malveillant. Ils manipulent les jeunes et les montent contre leurs aînés essayant de provoquer par là un conflit de générations. Ces manipulateurs qui n’ont participé à la Révolution ni de près ni de loin et dont certains ont été des collaborateurs du régime criminel déchu veulent mettre les militants sur la même distance qu’eux par rapport aux jeunes. Leurs manigances visent également les partis politiques de l’opposition, la vraie. Ils ne cessent de discréditer ces derniers prétendant qu’ils n’ont joué aucun rôle et ne doivent par conséquent en assumer aucun occultant délibérément l’apport de leurs partisans et passant sous silence les particularités de la conjoncture passée où sévissait la répression qui obligeait les partis à travailler dans la clandestinité les empêchant ainsi de se mêler aux masses et d’avoir une assise populaire. Cette campagne hostile contre les partis politiques radicaux est menée principalement par les partis de décor de l’ère sanguinaire, les résidus du RCD et les opportunistes qui veulent détourner les jeunes de leurs revendications essentielles en créant un conflit au niveau de l’appropriation de la Révolution. La politique sans politique C’est un honneur et un bonheur pour nous que ceux qui se sont sacrifiés aient vu leurs efforts couronnés, le succès de ces jeunes qu’on croyait marginalisés est une fierté pour nous, leur gloire a fait tâche d’huile dans l’ensemble du monde arabe. Ces politiques, qui veulent se faire une nouvelle virginité, tentent d’éloigner les jeunes de la politique, la leur représenter comme un ogre menaçant de dévorer « leur » révolution, ils essayent de les persuader qu’ils sont capables de mener la barque avec les moyens du bord et sans gouvernail, de faire de la politique sans moyens politiques. Par ces foutaises, ils complotent contre ces derniers et font preuve d’une grande niaiserie, nos théoriciens oublient la maxime qui dit que « les problèmes politiques sont les problèmes de tout le monde et les problèmes de tout le monde sont des problèmes politiques». Les jeunes ne sont pas dissociés de la réalité, ils regardent les difficultés dans lesquelles sont noyés leurs parents : traites bancaires, crédit habitat, loyer, dépenses quotidiennes…, les étudiants parmi eux sont confrontés aux problèmes de bourse, de chômage, ils sont victimes des accointances et des pots de vin, et sur le plan politique, ils se représentaient bien la situation, la nature répressive du régime ne leur échappait pas, ils gardent toujours en mémoire l’assassinat de l’un des leurs Nabil Barakati qui était mort sous la torture et il n’était pas bien évidemment le seul à avoir connu ce sort tragique. Les jeunes ne sont pas dépolitisés parce qu’ils lisent moins que leurs prédécesseurs comme le prétendent certains, ils puisent leur savoir dans d’autres moyens plus sophistiqués inventés par la nouvelle technologie, ils suivent le mouvement de l’évolution de l’histoire et s’adaptent à la réalité de leur époque : les anciennes révolutions ont été réalisées par des livres, celle de Khomeiny par des cassettes et la nôtre par l’Internet. Travaillons de concert ! Ces semeurs de troubles dont le projet est d’étouffer la Révolution en l’orientant vers un sentier fangeux oublient ou feignent d’oublier qu’à ce stade de la Révolution, c’est aux forces politiques de diriger, de tenir les rênes pour mettre en place les institutions de l’Etat démocratique tant souhaité et auquel on aspire. Pour réaliser cette tâche très délicate, le pays a besoin de toutes ses compétences patriotes qu’elles soient jeunes, adultes ou vieilles. Quel que soit leur âge, des prosélytes ne doivent pas s’immiscer dans le giron politique, car tout simplement ils n’ont pas la carrure comme c’est le cas du jeune facebooker nommé Secrétaire d’Etat. Il est un comparse, à travers lui, on veut faire croire aux jeunes qu’ils sont représentés au sein du gouvernement. On n’est pas non plus pour que des vétérans soient des protecteurs ou des porte-parole de leurs cadets. Donc, non à la tutelle ! Non à l’exclusion ! Conjuguons nos efforts pour le bien de notre pays chéri ! Notre Révolution a besoin de l’apport de tous les révolutionnaires, protégeons-la ! Source: “Le Temps” Le 02-04-2011 Actus nationales
Témoignage prémonitoire sur la révolution : Ben Brik président (4)
Nous publions depuis mercredi 30 mars, et quotidiennement, le livre de Taoufik Ben Brik intitulé «Ben Brik président». C’est un ouvrage écrit en 2002 sous la dictature de Ben Ali et qui constitue un témoignage prémonitoire sur la révolution tunisienne. Le soir, au cœur de la médina, la vieille ville arabe, alors que le jour de l’investiture s’est tu, les rues pleines d’ordures et d’ombres proposent de la bière et des prostituées. Le ciel s’étend comme un drap sale, les façades sont tachées par le smog des bus et les mendiants tremblent de froid et de faim sous un lampadaire de pacotille. Chez Fritchou, un bar clandestin, les bavardages vont bon train. On sert de la Celtia, du Mornag et de la boukha… sur l’avenue Bourguiba, les gargotes attirent ceux qui fuient femmes et enfants, avec leur jus de carotte et leur sandwich à la harissa. La nuit est tombée sans une étoile dans le ciel. Le vent décoiffe les cheveux et gifle la peau avec cruauté. Le rugissement des bus s’est arrêté. Les vendeurs à la sauvette se sont retirés avec leur fourbi pour regagner leurs pénates à El Kabaria, ou Melassine. C’est l’heure où les zabratas se donnent rendez-vous près de la place du théâtre municipal, au bar-restaurant Tonton Ville. Des hommes engoncés dans des complets usés et sombres se déplacent avec prudence sur le trottoir de la rue Ibn Khaldoun. On dirait des chiens. Ils avancent le dos voûté, se cachant le visage dans leur barbe pouilleuse. Lorsqu’ils atteignent la porte de Tonton Ville, ils entrent furtivement. Il est tard. A l’intérieur du bar, des prostituées font du tapage en défilant sur un podium imaginaire.Aucun des clients ne se décide à mettre la main au portefeuille et elles finissent par s’en aller, l’air maladif et le regard cruel et triste. Sur la table du milieu, il y a un soupçon de vie. Quatre hommes remplissent un Promo Sport. «Deux tournées, Ange!» Les traits empreints de lassitude, ils fument et boivent du mauvais alcool. «Je n’ai personne qui crie, je viens ici et je picole» , dit un type au visage tailladé de coups de couteau, une vraie carte géographique.«Pour parler, ça, on parle! De tout et de n’importe quoi. Le Ben Brik? Je m’en tape complètement», lance un compère dans un ricanement sinistre. Un pédéraste salue avec affectation: «bayeuu». Il s’assied à l’une des tables, près des toilettes, et demande qu’on lui offre un verre.«Ici on voit toujours les mêmes gueules», dit un chômeur, micheton, originaire du Kef et parieur de tiercé. Plus tard, l’avenue Bourguiba ondule doucement sous les ombres qui la parcourent. Sur la place Barcelone, on entend encore le bruit des bus qui viennent du Sud. Un homme maigre à capuche accueille les clients du Rzouga, un bar clandestin et déglingué, où on joue au noufi, baccara local. Une grosse dame avec des «tips» dorés dans les cheveux distribue les cartes. Il y a sept tables réservées aux joueurs qui, tout en tentant leur chance murmurent avec animation, boivent un vin dégueulasse et tripotent les cuisses de leurs gonzesses: leurs p’tits lots. En face du commissariat, le septième, on écoute une musique de taulard: «Ou goulou l’ommi ma tibkich ya el minfi». Au cinquième étage d’un immeuble, ni laid ni beau, une ampoule jaune devient le phare qui guide l’ivresse des noctambules solitaires. Un maquereau à la voix bienveillante et aimable apprend à des vampires qu’il existe un endroit pour boire du sang et converser à ces heures tardives: «Allez au Taouss». Il souffle ici, à cet endroit, quelque chose qui ressemble au soufre, où les âmes s’enflamment. C’est la vingt-cinquième heure. Sur le trottoir de la rue de Rome, un chien galeux mord des sacs-poubelles. Adossés au mur du gouvernorat, trois ivrognes se partagent une bouteille de Sidi Saïd. On rit aux larmes. Tunis City qui ne rigole jamais, qui n’a plus de bancs pour stopper la montée de la drague, est ravagé par un «c’est pas la peine!» Goliaaaaath… Professionnalisme et pragmatisme Triangle Génération Humanitaire est une organisation de solidarité internationale créée en 1994 et dont le budget en 2009 est de 11, 840 millions d’euros dont près de 1,360 million d’Euros de valorisation de dons en nature. «Travaillant dans le concret : urgence, réhabilitation et développement», elle participe aux actions dans «des situations inacceptables de précarité de populations en souffrance, telles que la pauvreté ou les conditions de conflits, ou de catastrophes naturelles. C’est donc de l’aide d’urgence et du développement qu’il s’agit, avec l’intégration d’une approche de développement durable». Plusieurs centaines de milliers de personnes, en Asie et en Afrique, ont ainsi pu bénéficier des interventions de Triangle qui n’est pas un bailleur de fonds, mais un partenaire de plusieurs organismes internationaux connus, dont le haut comité des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) et le Service d’aide humanitaire de la Commission européenne |
Source: “Le Quotidien” Le 02-04-2011
Nobel: Delanoë soutient les Tunisiens
Le maire de Paris Bertrand Delanoë a proposé la candidature du peuple tunisien au prochain prix Nobel de la paix, a-t-on appris vendredi auprès de ses services, confirmant une information du “Nouvel Observateur” et de l’agence de presse tunisienne TAP. Natif de Tunisie, M. Delanoë a adressé un message au Comité Nobel pour soutenir cette candidature, précise la TAP. “Le soulèvement pacifique tunisien a éveillé un espoir de liberté d’expression et de dignité pour tous les peuples opprimés dans le monde”, écrit M. Delanoë dans son message. Lors d’une visite à Tunis à la mi-février, un mois après la chute du régime de Ben Ali, il avait salué “une population intelligente et éduquée qui a su conquérir de la plus belle manière sa liberté”.
Source : « Le Figaro » Le 01-04-2011
L’Union européenne va choyer la Tunisie
Après la visite de Stefan Fule en Tunisie les 30 et 31 mars 2011, l’Union européenne a annoncé qu’elle avancera une partie du budget de 160 M€ prévu au titre des années 2012 et 2013 pour favoriser le virage démocratique de ce pays.
Le Commissaire européen chargé de la politique européenne du voisinage et de l’élargissement prévoit de plus de doubler cette aide dès qu’un gouvernement démocratiquement élu sera mis en place après les élections de l’Assemblée constituante.
“L’Europe est prête à soutenir les Tunisiens dans chacune de ces réformes fondamentales. La Tunisie a de nombreux atouts, notamment le niveau élevé d’instruction de sa population et son système administratif efficace. Ceci devrait contribuer à réussir la transition. Nous sommes venus en Tunisie pour discuter des nombreux sujets importants au coeur des relations euro-tunisiennes et j’ai eu des entretiens enrichissants avec le Premier Ministre Monsieur Essebsi, le Ministre des affaires étrangères Monsieur Kefi, le Ministre de la coopération internationale Monsieur Triki, le Ministre des finances Monsieur Ayed.” a indiqué Stefan Fule.
” Nous sommes pleinement conscients que la transition en cours demande des efforts considérables de la part de la Tunisie, certains immédiats, d’autres sur le moyen terme. Je pense en particulier à l’éradication de la pauvreté, au développement social et à l’emploi, en particulier dans le sud et le centre du pays.Il est trop tôt pour parler de montants futurs. Ils dépendront des réformes concrètes sur lesquelles la Tunisie demandera notre soutien. Mais, pour vous donner une idée : nous avions prévu de dépenser 160 M€ en Tunisie en 2012 et 2013. Dans le meilleur des cas, en ligne avec des réformes ambitieuses lancées par le gouvernement que les Tunisiens auront choisi, je pourrais envisager un doublement de ces montants. Et une partie pourrait être déjà engagée cette année.” a poursuivi le commissaire européen.
La Tunisie devrait également plus rapidement bénéficier du statut de partenaire avancé de l’Europe.
Source: ”econostrum” Le 01-04-2011
Les 10 mots de la révolution tunisienne
9. “Califat”
Dans un café, un soir, devant des bières, avec des jeunes tunisiens. On parle de la situation politique depuis la Révolution, on demande “vous avez peur des islamistes ?”. Et l’un d’entre eux : ” tu parles si on a peur, moi je n’ai pas envie que mon pays devienne un califat”. En général, en France, pour parler de la même chose, on dit “al qaïda” ou “les talibans “. Là, cette vieille notion, surgie des premiers temps de l’Islam, et réactivée depuis, il est vrai, par les rêves de totalitarisme religieux de Ben laden et de ses amis. En tous cas, la réalité est la même. Quand les révolutions arabes ont éclaté, toute l’Europe a été saisie d’un frisson : et s’ils allaient nous faire l’Iran de l’autre côté de la Méditerranée ? On peut rassurer l’Europe sur un point : une grande majorité des Tunisiens le craint encore bien plus. Depuis le 14 janvier, le pays a scruté avec angoisse les signes qui auraient pu montrer cette direction détestée. Vers la mi février, à une semaine d’intervalle, il y en a eu trois. D’abord une petite manifestation devant la grande synagogue de Tunis, au cours de laquelle on a entendu des slogans antisémites. Puis, le vendredi suivant, 18 février, quelques extrémistes barbus ont cherché une autre action d’éclat : ils ont voulu murer la vieille rue où se tient une institution séculaire de Tunis, le bordel, et en chasser les pensionnaires. Et le matin même, un prêtre polonais responsable d’une institution scolaire, avait été retrouvé égorgé. ” Au grand soulagement de tout le monde, nous explique un diplomate européen, cette dernière affaire a vite été classée au rayon des faits divers. Rien à voir avec la politique “. Mais les deux autres ? Qui les a organisé ? Des anciens ben alistes cherchant à discréditer le nouveau régime, disent les uns. Des vrais fanatiques appartenant à un petit groupuscule ultra religieux, affirment les autres. Toujours est il que l’ensemble des partis politiques (y compris le parti islamiste majoritaire, Ennahda, qui n’aime rien tant pour l’instant qu’à se montrer modéré) a condamné avec fermeté toute cette violence. Et que depuis, tout ce qui faisait le terreau de cette incertitude et de ces questionnements, s’est transforme en quelque chose de plus raisonnable : le grand débat actuel de la vie politique. Quelle place faut-il donner à la religion ? Sur Facebook, dans la presse, dans les cafés, c’est l’empoignade passionnée, et passionnante du moment. La Tunisie doit réaffirmer son ancrage dans l’Islam, demandent les uns. Jamais de la vie, elle doit être laïque et cantonner la religion à la sphère privée, affirment les autres. Et, nombre de ceux que nous avons rencontré tiennent le même genre de raisonnement, mais dans sa version plus terrestre : “moi je veux bien que les filles aient le droit de porter le voile (interdit sous Ben Ali), mais je ne veux pas que les barbus m’empêchent de mener la vie que je veux.” Et ils se resservent une bière.
Source: ”Le Nouvel Observateur” Le 01-04-2011
Tunisie. Le Fmi ne va tout de même pas regretter Ben Ali?
Le Fonds monétaire international (Fmi) a indiqué jeudi avoir envoyé des conseillers en Tunisie pour aider le gouvernement de transition à évaluer leur situation économique après la révolution.
«Nous avons eu des discussions en Tunisie, nous avons en fait envoyé une équipe technique là-bas récemment, la semaine dernière», a indiqué lors d’un point de presse à Washington la directrice des relations extérieures du Fmi, Caroline Atkinson. C’était une mission pour évaluer la situation, et non une mission de négociation en vue d’un financement, a-t-elle encore précisé. «Nous travaillons avec [le gouvernement tunisien) pour voir quelles sont les répercussions économiques. Il sera très important de soutenir une croissance forte et durable à l’avenir pour s’attaquer aux problèmes qui ont émergé», a estimé la porte-parole.
Strauss Kahn tressait des lauriers à Ben Ali Le Fmi s’est refusé jusqu’ici à évaluer précisément les répercussions que pourrait avoir sur la croissance de la Tunisie le départ de l’ex-président Ben Ali, dont elle avait (presque) toujours loué la gestion économique et sociale, exprimant rarement des griefs vis-à-vis de ses abus, même en matières économique et financière (corruption, népotisme, accaparement des richesses par les membres du clan présidentiel, etc.). Au cours de ses précédentes visites en Tunisie, le président du Fmi, le Français Dominique Strauss Kahn, a souvent eu des mots mielleux à l’égard de Ben Ali et de son gouvernement. Il est à parier que ce possible futur candidat à la présidence en France ne remettra pas de sitôt ses pieds en Tunisie. C’est donc sa crédibilité même que le Fmi devrait sauvegarder en Tunisie, en plus peut-être de l’économie tunisienne.
Source : « Kapitalis » Le 01-04-2011
Tunisie, Egypte: la rupture non violente
La religion remise à sa vraie place, l’émancipation de la femme et la non-violence contre des régimes violents: pour l’anthropologue suisso-tunisien Mondher Kilani, ces trois traits sont les plus remarquables des deux révolutions arabes à avoir réussi à ce jour.
Après deux révolutions de jasmin, le printemps arabe bute sur la répression exercée de la Libye au Yémen, en passant par la Syrie. Il n’empêche: les exemples tunisiens et égyptiens ont bouleversé nombre de certitudes et de lectures formatées sur la soi-disant «exception arabe». Un thème évoqué lors d’une récente journée d’études à l’Université de Lausanne, à laquelle participait notamment le professeur Mondher Kilani. Interview.
swissinfo.ch: Les révolutions en Tunisie et en Egypte vont-elles pousser les intellectuels à revoir leurs préjugés sur le monde arabe et sur l’«exception arabe»?
Mondher Kilani: Oui, certainement. Le point de vue, non seulement des Arabes sur eux-mêmes, mais également des Occidentaux sur les Arabes est en train de changer. On pensait que c’était des pays où rien ne bougeait, qui étaient essentiellement tournés vers la dictature, le terrorisme, l’archaïsme… C’était ça plutôt l’exception. Aujourd’hui, on peut dire qu’il n’y a plus d’exception. Non pas dans le sens où les Arabes seraient devenus comme les Occidentaux, mais dans le sens où aucune société n’est à l’abri des bouleversements. Et c’était peut-être le moment que ça bouge dans les sociétés arabes, parce qu’il y avait une pression très forte des jeunes, pour la liberté, contre la corruption. Le phénomène a surpris, et il est encore en train de surprendre, mais si on le place dans une perspective historique, et surtout si on laisse le temps à ces bouleversements de se faire, cela montrera que ces transformations obéissent à des exigences qui existaient déjà au niveau de la société.
swissinfo.ch: Les pays occidentaux ont soutenu les transitions démocratiques en Europe de l’Est, et avant cela en Grèce, au Portugal ou en Espagne. Comment voyez-vous leur rôle dans le monde arabe?
M. K. :Difficile… Il est sûr que l’Europe occidentale et les Etats-Unis ont soutenu les processus démocratiques à l’Est et au Sud. Ils les ont même anticipés, pour la bonne raison qu’ils considéraient l’ex-bloc soviétique et l’Europe du Sud comme partie de l’Europe. Mais pour le monde arabe, c’est très différent. La position de l’Occident est extrêmement ambiguë, complexe. Il y a un passé colonial, ou impérial, mais aussi le fait que les régimes autoritaires arabes étaient quasiment tous soutenus d’une façon ou d’une autre par l’Occident. Parce qu’ils étaient des alliés géostratégiques, parce que c’étaient des pays producteurs de pétrole, et aussi des pays sur lesquels on comptait pour arrêter les mouvements migratoires du Sud vers le Nord. Donc, tout cela fait qu’il n’y avait pas – de mon point de vue – une prédisposition de l’Europe et des Etats-Unis à soutenir un mouvement démocratique dans le monde arabe. Et ce qui est arrivé est arrivé, on pourrait dire contre le fait que l’Europe et les Etats-Unis ont soutenu des régimes dictatoriaux jusqu’à encore très récemment. Maintenant, certains pays sont en train de prendre un peu le train en marche. Reste à voir si leur soutien correspond à une volonté de voir une démocratisation réelle, ou si c’est parce qu’ils ne peuvent pas faire autrement que d’accompagner ce mouvement
swissinfo.ch: Pour l’heure, deux pays ont réussi à chasser leur tyran. Selon-vous, va-t-on y voir naître un nouveau type de contrat social?
M. K. : Il est vraiment trop tôt pour le dire. Je ne suis pas devin, et personne ne l’est. Ce qui est sûr, c’est qu’il faudra tenir compte des revendications de base, qui sont des revendications de dignité, de justice, de démocratie, de liberté. Et cela suppose quand même des changements radicaux, donc une redéfinition de la citoyenneté, du pacte social, de la gouvernance, des rapports sociaux, des rapports hommes-femmes, des rapports entre le politique et la religion.
swissinfo.ch La religion justement… Quelle serait sa place dans cette nouvelle configuration?
M. K. : La question va de toute façon se poser. Est-ce qu’elle va se poser en termes idéologiques, c’est-à-dire comme une référence absolue, qui va inspirer les régimes politiques? Je pense plutôt que ce sera comme référence culturelle, référence à une tradition. Parce que, si j’ai bien compris ce qui se passe actuellement dans le monde arabe, ce n’est pas une révolution comme en Iran en 78-79, où la référence fondamentale était l’islam.
swissinfo.ch: Finalement, vous parlez de «rupture anthropologique» dans l’histoire de ces peuples. Qu’entendez-vous par là?
M. K. : J’en vois au moins trois. La première, c’est justement que la religion, bien qu’elle soit présente, et bien qu’elle représente toujours un symbole important dans le monde arabe, n’est plus utilisée comme une source idéologique pour fonder le pacte social. Tous les régimes arabes, qu’ils soient «laïcs» ou pas, ont utilisé la religion pour mieux asseoir leur pouvoir et leur légitimité. Ils l’ont en quelque sorte prise en otage. Et il me semble que là, la religion est en train de prendre sa véritable place, émancipée de toute manipulation. Un autre point important, c’est l’émancipation de la femme. On l’a vu, la femme était présente dans l’espace public. Comme elle est bien présente dans la société civile, qu’elle soit voilée ou dévoilée. Au passage, cela montre aussi que l’émancipation peut passer par d’autres façons de faire que celle qu’on a vues en Occident. Et je pense qu’on ne peut qu’aller dans le sens d’un renforcement de l’égalité entre hommes et femmes. Et puis, ce qui me semble également très important si l’on parle de rupture anthropologique, c’est le rapport à la violence. Ces gens sont sortis dans la rue sans armes. On a répondu à la violence structurelle, dictatoriale, symbolique, économique, que la plupart de la population subissait, par un mouvement de non-violence. Et cela montre beaucoup de civilité et une capacité à prendre en charge son destin et à ne plus être manipulé. Ni par des dictateurs, ni par des soi-disant sauveurs, ni par une fuite en avant dans la détresse et dans la recherche de solutions miraculeuses.
Source : « Suissinfo » Le 01-04-2011
Et pendant ce temps-là, en Tunisie
Maintenant que le Premier ministre Mohammed Ghannouchi a démissionné, poussé par la manifestation du 25 février, la plus importante depuis celle qui a causé la chute de Ben Ali, de nouvelles incertitudes naissent dans le pays. De nouveaux défis aussi …
Si les Tunisiens sont fiers de leur révolution, à juste titre d’ailleurs puisque le « printemps arabe » continue de se propager dans la région, ils commencent à se rendre compte qu’il n’est pas facile d’ouvrir le chemin et qu’il n’existe pas de mode d’emploi tout fait pour redresser le pays.
Et ce qui se respire ces derniers jours à Tunis, c’est l’incertitude. Ou les incertitudes. Politiques, économiques, sociales … Les plus pessimistes ont l’impression que « la Tunisie se trouve comme perdue au milieu d’une forêt, dans l’obscurité et qu’elle ne connaît pas le chemin de la sortie. »
Un chauffeur de taxi, ingénieur en télécommunication, nous confiait que la révolution ne changerait rien à sa situation. Et il n’est pas le seul à le penser. En effet, le chômage des jeunes diplômés a été l’un des principaux moteurs du déclenchement des révoltes, et beaucoup se posent la question : cette démocratie toute neuve apportera-t-elle une solution au manque d’emplois ?
Autre source d’inquiétude,l’avenir du tourisme, l’une des principales composantes économiques. La plupart des gens s’impatientent : ils voient les jours et les semaines s’écouler tandis que la saison touristique approche. Et certains d’entre eux n’attendent qu’une chose : l’arrêt des grèves, le retour aux horaires habituels, « afin que le pays retrouve une vie totalement normale ».
DOLEANCES
Bien sûr, l’étape de la construction démocratique est un moment propice aux doléances, chacun l’aura compris, et le pays vit au rythme des grèves, des manifestations, et des revendications. Des demandes de toutes sortes, individuelles ou collectives, le plus souvent menées par des groupes socio-professionnels dont le but est la réforme de leurs statuts.
Et la politique vient s’agréger à cet ensemble, en vue des prochaines élections. Des marches sont organisées, pour préserver et améliorer le droit des femmes notamment. Les partis politiques font ou refont surface, ne serait-ce que pour faire connaître leur existence à une population longtemps privée de pluralisme.
D’une façon générale, le pays vit une accélération d’autant plus surprenante qu’elle n’était pas prévue même si elle était espérée. Une situation paradoxale dans la mesure où il est difficile de faire coexister changements radicaux et normalité quotidienne. C’est pourtant le défi auquel la Tunisie devra, le plus vite possible, faire face.
GAIETE
Mais une chose est certaine : ces trois jours d’arrêt du pays et les deux mois d’activités ralenties qui ont suivi se sont déroulés dans un calme relatif, qu’on peinerait à trouver ailleurs qu’en Tunisie, les évènements d’Egypte et de Lybie le montrent clairement. Et somme toute, le passif reste dérisoire en regard du grand pas qui a été franchi.
D’ailleurs, ce qui frappe le plus dans cette révolution, c’est sa gaieté. Elle afflue dans les rues, se répand sur les places, s’invite dans les maisons. Se décline sur les blogs. Même si cette étape de transition n’est pas de tout repos.
Un étudiant nous disait : « On ne sait pas ce que c’est que d’être libre, on ne sait comment se comporter quand on est libre. » Au sens formel du mot liberté, il faut entendre démocratie et liberté d’expression, deux choses dont la population commence à peine à s’emparer, « c’est tout nouveau », et ceux-là même qui se sont révoltés vont être la première génération à en user. Avec fierté, mais aussi avec peur : car pour nombre d’entre eux, la Révolution ne sera aboutie que lorsque le pays retrouvera une dynamique économique, une politique réellement débarrassée des scories du passé et une égalité sociale viable.
Du coup, les espoirs se portent vers les prochaines élections du mois de juillet, que tous espèrent libres, transparentes. Bref, démocratiques.
Source: “Temoignage chretien” Le 01-04-2011
Kamel Morjane obtient le visa pour son parti L’Initiative
L’ancien ministre tunisien des Affaires étrangères, Kamel Morjane, a obtenu vendredi 1er avril 2011 le visa pour son parti L’Initiative. Et ce n’est pas un poisson d’avril. Il s’agit du 51ème parti constitué en Tunisie.
De tendance centriste, ce parti se veut réformiste et s’inspire des mouvements similaires entrepris depuis Kheïreddine Pacha jusqu’aux hommes politiques et militants ayant conduit à l’indépendance du pays en 1956.
Selon une source officielle à l’intérieur du parti, l’Initiative compte défendre l’identité arabo-musulmane de la Tunisie tout en s’ouvrant sur les autres civilisations.
Le parti veut également encourager l’investissement privé, et il en fera une priorité, d’où le choix de sa dénomination l’Initiative, et ce tout en préservant le côté social.
Kamel Morjane est entouré d’experts tunisiens ayant une stature internationale, nous dit-on, et ils sont en train de préparer un projet de programme qui sera soumis pour consultation à une base de militants dans les régions et sur internet. D’ores et déjà, une page Facebook a été créée depuis quinze jours, avec une dizaine de vidéos, et ce pour alimenter le teasing. Cette page compte 11.500 fans et on y remarque un niveau de débats élevé.
Source: ”Business News” Le 01-04-2011
Tunisie. Imed Trabelsi et l’affaire des yachts volés en France (1/2)
Imed Trabelsi est, parmi les membres du clan Ben Ali, celui que les Tunisiens aiment le plus détester. Ses faits d’armes ont occupé la justice française avant la Tunisienne. Retour sur une affaire qui aurait pu lui coûter quelques années de prison en France…
A en croire Me Olivier Metzner, avocat d’Imed Trabelsi, qui a assisté son client lors de sa deuxième comparution devant le juge d’instruction du tribunal de première instance de Tunis, le 14 février, le dossier d’accusation de l’enfant terrible des Trabelsi ne contient que «dix pages» relatives à «une infraction douanière»!
En attendant d’en savoir plus à propos des accusations qui seront finalement retenues contre l’ex-maire de La Goulette, une semaine seulement avant la chute de Ben Ali –, nous voudrions rappeler les démêlés de l’intéressé avec la justice internationale, en attendant que la justice tunisienne fasse enfin la lumière sur ses exactions et abus de pouvoir en Tunisie.
Un yacht volé à Bonifacio se retrouve Sidi Bou Saïd
Imed Trabelsi, l’homme que tous les Tunisiens aiment détester, a trempé dans une affaire de vol d’un yacht au Port de Bonifacio, en Corse-du-Sud, en France. Ce yacht, le Beru Ma, d’une valeur de 1,5 million d’euros, propriété de Bruno Roger, ancien patron de la banque d’affaires Lazard frères, ami intime de Jacques Chirac et proche de Nicolas Sarkozy, a été volé le 5 mai 2006, avant de se retrouver, par un mystérieux concours de circonstance, au port de Sidi Bou Saïd.
Jean-Baptiste Andreani, l’ancien policier devenu enquêteur des assurances Generali, qui assurent le yacht de M. Roger, se rend à Sidi Bou Saïd à la demande de Generali, dès le 15 mai 2006, en se faisant passer pour un touriste.
«A mon arrivée, se souvient Andreani, j’ai été pris en charge par notre correspondant, le commissaire d’avarie. Je ne le connaissais pas avant cette rencontre. Au cours de notre transport au port de Sidi Bou Saïd, ce dernier m’a mis en garde sur les dangers encourus car le bateau se trouvait dans un port protégé par la famille présidentielle», raconte l’enquêteur au cours de son audition, le 24 mai 2006, par le juge d’Ajaccio en tant que témoin. Il apparaît alors que le bateau est en train d’être maquillé et qu’Imed Trabelsi est son acquéreur
L’Elysée et Carthage entrent en jeu Après avoir authentifié le Beru Ma, le détective dit avoir informé par téléphone Generali ainsi que le propriétaire, Bruno Roger. «Le lundi soir 15 mai 2006, tard, vers 21 h 30-22 heures, j’ai reçu un appel sur mon portable du commandant de gendarmerie en poste à l’ambassade de France, à Tunis. Il m’a demandé où se trouvait le bateau et m’a sollicité pour le conduire sur le lieu d’accostage. Ce commandant avait été contacté par la direction de la gendarmerie qui elle-même avait été contactée par M. Sarkozy, et ce à la demande du propriétaire, M. Roger», assure Andreani. «De ce que j’ai pu en savoir, M. Roger est une relation de M. Sarkozy. Sur ce vol de bateau, j’ai été contacté directement à deux ou trois reprises par M. Guéant, directeur de cabinet de M. Sarkozy [Claude Guéant deviendra secrétaire général de l’Elysée, ndla] ainsi que par le major général de gendarmerie Nauroy», ajoute le détective. Quel que soit le niveau d’implication de l’Elysée et de Carthage dans les négociations, force est de constater que quelques semaines après sa découverte dans le port de Sidi Bou Saïd, le Beru Ma est rapatrié en France et rendu à son propriétaire. Cette efficacité n’a pas bénéficié aux propriétaires des deux autres bateaux volés par la même bande, le Sando, le Blue Dolphin IV, qui, pourtant étaient stationnés à côté du Beru Ma, à Sidi Bou Saïd. Quoi qu’il en soit, lors de leur interrogatoire par la police, les neufs membres du réseau de voleurs des trois yachts désignent Imed et son frère Moez Trabelsi, comme étant les commanditaires des vols, précisant avoir reçu instruction de convoyer leur butin à Sidi Bou Saïd. Après un long feuilleton juridico-judiciaire, dans lequel les dirigeants des deux pays, au plus haut sommet de l’Etat, se trouvent impliqués, tout sera mis en œuvre pour éviter un procès en France aux deux receleurs tunisiens.
Un «voyou de grande envergure» soustrait à la justice
Ainsi donc Imed et Moez Trabelsi n’ont jamais comparu devant une juridiction française. Pour sauver les apparences, ils ont été déférés devant une juridiction tunisienne, qui les a finalement acquittés. Réputée bien moins regardante que la justice française, la justice de Ben Ali a su donner un aspect purement formel à leur pseudo procès. Elle s’est arrangée pour trouver un bouc émissaire pour lui faire endosser les forfaits des deux enfants terribles des Trabelsi: un certain Naoufel Benabdelhafid, docteur en droit et ex-secrétaire général de la faculté de médecine de Tunis, qui a eu la mauvaise idée de traficoter avec les Trabelsi.
Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que des membres de l’entourage de Ben Ali échappent à la justice. Imed Trabelsi n’est pas lui-même à son coup d’essai en matière de recel. Dans son rapport envoyé le 9 juin 2006 à l’assureur du Beru Ma, le détective privé Andréani, dépeint ce dernier comme un «voyou de grande envergure qui bénéficie d’une totale impunité». «Il utilise plusieurs véhicules volés: une Porsche Cayenne, un Hummer ainsi qu’une Mercedes 500 immatriculée 13, volée à Marseille en novembre 2005 (propriété d’un joueur de l’OM)», indique-t-il dans le même document. Le joueur en question est l’ex-défenseur international sénégalais de l’Olympique de Marseille, Habib Beye, victime d’un car-jacking en mars 2005. Imed Trabelsi avait alors été contraint de restituer la luxueuse limousine contre un abandon des poursuites.
En ce qui concerne le vol des yachts, les faits sont pourtant têtus et Imed et Moez Trabelsi, qui ont été acquittés par la justice tunisienne sur ordre de Leïla Trabelsi, ont été reconnus coupables de vol sinon de recel des yachts en France.
Kapitalis publiera demain le récit de cette abracadabrante affaire des yachts volés qui a occupé, pendant deux ans, la diplomatie et la justice de la France et de la Tunisie, avant d’être classée. Kapitalis rappellera les faits tels que rapportés en leur temps par les médias français, citant des enquêteurs et des magistrats de l’Hexagone. Une manière de rafraîchir certaines mémoires oublieuses et d’appeler nos chers magistrats, aujourd’hui libres et indépendants, à rouvrir et à instruire ces affaires trop vite classées, afin que la justice puisse enfin être faite et que les coupables d’abus et de crimes ne restent pas impunis.
Source : « Kapitalis » Le 31-03-2011
Tunisie. Imed Trabelsi échappe à la justice française (2/2)
Nos confrères français se sont attardés sur l’affaire des yachts volés à Bonifacio et retrouvés à Sidi Bou Saïd, ainsi que sur les manœuvres procédurières qui ont permis aux deux receleurs, Moez et Imed Trabelsi, d’échapper à la justice française. Récit…
Lors de son audition, le 24 mai 2006, en tant que témoin, Jean-Baptiste Andreani, l’ancien policier devenu enquêteur des assurances Generali, indique d’abord s’être rendu à Sidi Bou Saïd à la demande de la compagnie, le 15 mai 2006, en se faisant passer pour un touriste.
Un «port protégé par la famille présidentielle»
«A mon arrivée, se souvient l’enquêteur privé, j’ai été pris en charge par notre correspondant, le commissaire d’avarie. Je ne le connaissais pas avant cette rencontre. Au cours de notre transport au port de Sidi Bou Saïd, ce dernier m’a mis en garde sur les dangers encourus car le bateau se trouvait dans un port protégé par la famille présidentielle».
Après avoir authentifié le Beru Ma, le détective dit avoir informé par téléphone Generali ainsi que le propriétaire, Bruno Roger, patron de la banque Lazare, ami de Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, alors respectivement président et ministre de l’Intérieur. «Le lundi soir 15 mai 2006, tard, vers 21 h 30-22 heures, j’ai reçu un appel sur mon portable du commandant de gendarmerie en poste à l’ambassade de France, à Tunis. Il m’a demandé où se trouvait le bateau et m’a sollicité pour le conduire sur le lieu d’accostage. Ce commandant avait été contacté par la direction de la gendarmerie qui elle-même avait été contactée par M. Sarkozy, et ce à la demande du propriétaire, M. Roger», assure Andreani.
«De ce que j’ai pu en savoir, M. Roger est une relation de M. Sarkozy. Sur ce vol de bateau, j’ai été contacté directement à deux ou trois reprises par M. Guéant, directeur de cabinet de M. Sarkozy ainsi que par le major général de gendarmerie Nauroy», ajoute le détective.
Quel que soit le niveau d’intervention de l’Elysée et de Carthage dans le processus de l’enquête, on constatera cependant que quelques semaines après sa découverte dans le port de Sidi Bou Saïd, le Beru Ma est rapatrié en France et rendu à son propriétaire.
Interpol-Tunis refuse d’extrader les deux suspects
Malgré les interférences, la justice française continue de faire son travail, mais, du côté tunisien, on renâcle. Alors que le filet se resserre autour d’Imed et Moez Trabelsi, le magistrat français Jean-Baptiste Risson tente de lancer un mandat d’arrêt international contre les deux suspects. Mais en mai 2007, Interpol-Tunis refuse d’extrader ces derniers et, s’appuyant sur un cafouillage de procédure, un juge-tunisien décide de classer l’affaire.
Dès lors, les relations vont se détériorer entre M. Risson et le parquet français. Le premier multiplie les moyens procéduraux pour faire interpeller les deux neveux de Ben Ali tandis que le second, sur instruction de l’ambassade de France, alors dirigée par Serge Degallaix, contraint le magistrat à prendre en compte les exigences des avocats des deux suspects, qui nient les faits.
Tout en s’étonnant qu’Interpol et la justice tunisienne n’aient pas été saisis pour les délits les plus graves, comme cela aurait pourtant dû se produire, le juge Risson se rend en Tunisie, en mai 2008, accompagné du procureur d’Ajaccio, José Thorel, afin d’interroger les frères Trabelsi, les mettre en examen pour complicité de vols aggravés, délit passible en France d’une peine de quinze ans de prison, et les placer sous contrôle judiciaire.
L’opération s’est déroulée quinze jours seulement après la visite d’Etat à Tunis du président Sarkozy, le 28 avril 2008. Au cours de cette visite, l’absence de Leïla Ben Ali aux cérémonies officielles a été fortement remarquée. Officiellement, elle était en deuil à la suite du décès, peu de temps auparavant, de sa mère. En réalité, elle était très remontée contre son époux auquel elle reprochait de ne pas avoir fait suffisamment pour voler au secours d’Imed Trabelsi, en tout cas pas autant qu’il avait fait, une quinzaine d’années plus tôt, pour éviter à son frère Moncef Ben Ali la prison en France pour une sombre affaire de trafic de drogue.
La justice tunisienne essaie de sauver les apparences
C’est finalement un magistrat tunisien qui, deux semaines après la visite de Sarkozy, met les deux suspects en examen pour «complicité de vol en bande organisée» dans le cadre de la commission rogatoire internationale française. Il les laisse cependant en liberté.
Lors de leur audition, Moez et Imed Trabelsi nient catégoriquement toute responsabilité dans les vols, expliquant qu’on leur avait bien proposé d’acheter les yachts mais qu’ils n’avaient pas donné suite. Des explications qui, aux yeux du juge Risson, sont «insuffisantes pour contrebalancer l’ensemble des éléments à charge retenus à leur encontre».
Dans son édition du 19 août 2009, ‘‘Le Canard enchaîné’’ publie un passage révélateur de la déposition de l’un des 9 membres de la bande des voleurs. Dans sa déposition du 31 juillet 2009 signée par le juge Risson, Cédric Sermand révèle que c’est Moez Trablesi qui «avait passé commande d’un bateau» via deux intermédiaires tunisiens, Azzedine Kelaiaia et Amar Kechad. Kelaiaia s’est borné à expliquer qu’il avait entendu dire que les yachts étaient destinés aux Trabelsi. Etant de nationalité tunisienne, il a, on l’imagine, beaucoup plus à craindre.
‘‘Comment ça, ce n’est pas possible? Tu sais à qui tu parles ?’’
Du fait des intempéries, le yacht accoste à Bizerte, où Moez Trabelsi l’attend. «Il est monté pour le visiter, mais comme il y avait beaucoup de monde et qu’il était tard, il l’a visité très rapidement», se souvient Sermand. Sur le procès-verbal, l’un des skippers arrêté révèle notamment qu’«avec Trabelsi, nous avons évité les contrôles […] Un douanier a posé une main sur mon sac. Trabelsi l’a repoussé en lui parlant arabe, et son chef est arrivé en s’excusant».
Au cours d’un autre interrogatoire, le 6 mars 2007, Sermand raconte en détail l’entrée du Beru Maria dans le port de Sidi Bou Saïd. «Lorsque nous sommes arrivés en Tunisie, se souvient-t-il, il y avait beaucoup de gens qui semblaient nous attendre. Le bateau a plu à Imed Trabelsi, et celui-ci m’a dit qu’il allait le garder et qu’il fallait aller faire les papiers à la douane. Au début, le douanier a dit à Imed Trabelsi que ce n’était pas possible. Imed Trabelsi a dit au douanier: ‘‘Comment ça, ce n’est pas possible? Tu sais à qui tu parles ?’’ Imed Trabelsi a fait pression et, au final, le douanier a accepté de faire les papiers contre le paiement de la taxe de luxe et une somme d’argent qu’il versait au noir au douanier.»
Tandis que des hommes de main des Trabelsi s’affairent sur le yacht afin de le «maquiller», un événement inattendu se produit. «Nous sommes repartis en direction de la douane centrale pour faire établir les vrais ‘‘faux papiers tunisiens’’. C’est à ce moment-là qu’Azzedine Kelaiaia a reçu un coup de fil lui disant qu’il fallait faire repartir le bateau. En effet, il m’a dit que j’avais volé le bateau du banquier (de) Jacques Chirac et que Nicolas Sarkozy avait appelé pour savoir où était le bateau.»
Imed fracasse un radar et tape le policier avec
Présent aux côtés de Sermand au moment de la livraison du Beru Ma, Olivier Buffe, également mis en examen dans la procédure, déclare de son côté: «Je confirme bien l’épisode dans la voiture où Azzedine Kelaiaia a dit à Cédric Sermand qu’on avait volé le bateau du banquier (de) Jacques Chirac et que Nicolas Sarkozy avait appelé pour savoir où était le bateau.»
Sermand raconte aussi au juge Launois, qui sera remplacé début 2007 par son collègue Risson, qu’il avait pris place dans la BMW de Moez, juste après avoir convoyé le Blue Dolphin IV à Bizerte. La bande doit se rendre de Bizerte à Tunis. «En route, il y avait un contrôle radar que nous avons passé à plus de 200 km/h. Trabelsi a freiné brusquement puis a fait marche arrière (…). Il est sorti de voiture, a pris le radar et l’a fracassé contre la voiture de la police, tapant même le policier avec. Le deuxième policier était très peureux et s’inclinait respectueusement devant Trabelsi mais il a pris une gifle. Trabelsi leur a crié dessus et puis nous sommes partis.»
«Imed et Moez Trabelsi étant domiciliés en Tunisie et les faits qui leur sont reprochés ayant été commis hors du territoire national [français, ndla] (…), il a paru plus simple au parquet de demander une disjonction des faits; les deux hommes devraient être juges dans un délai raisonnable en Tunisie.»
C’est par cette déclaration sans appel que, le 8 août 2009, le procureur général de Bastia Paul Michel envoie valser l’ordonnance de renvoi signée, le 31 juillet 2009, par le juge Risson, et qui visait l’ensemble de la bande, y compris les deux neveux de Ben Ali. Le magistrat indique avoir transmis le dossier des frères Trabelsi à la Tunisie. En effet, en vertu d’une convention signée entre la France et la Tunisie en 1972, tous deux pourraient être jugés dans leur pays.
C’est ainsi que le 30 septembre 2009, au terme d’une journée d’audience marquée par l’absence de Imed et Moez Trabelsi, les principaux membres de la bande de voleurs des yachts sont condamnés à des peines de 1 à 2 ans de prison ferme.
Dans une déclaration diffusée dans l’émission ‘‘Sept à huit’’ sur ‘‘TF1’’, le 27 septembre 2009, trois jours avant le procès, Imed Trabelsi, bien à l’abri en Tunisie, s’offre le luxe de clamer son innocence, en lisant un texte qui lui avait été préparé d’avance, les yeux braqués sur un téléscripteur.
Il sera arrêté le 14 janvier 2011, le soir même de la fuite de sa protectrice: Leïla Trabelsi, épouse Ben Ali.
Source : « Kapitalis » Le 01-02-2011
Tunisie: M. Farhat Rajhi, président du Haut comité des droits de l’Homme
M. Foued Mebazaa, président de la République par intérim, a reçu, jeudi, au palais de Carthage, M. Farhat Rajhi qu’il a décidé de nommer président du Haut comité des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.
Licencié en droit de la faculté de droit de Tunis (juin 1975), M. Rajhi a une carrière de 36 ans dans le domaine de la magistrature. Il a occupé pendant 8 ans le poste de juge rapporteur auprès du tribunal immobilier avant d’être nommé juge au tribunal cantonal de Tunis puis successivement adjoint du procureur général près la cour d’appel de Tunis et vice-président du tribunal immobilier. Il a également occupé le poste d’inspecteur des services judiciaires au sein du ministère de la justice.
M. Rajhi a été nommé président de la chambre criminelle près la cour d’appel de Monastir puis procureur général près la cour de cassation.
Il a aussi occupé les postes de président de la chambre criminelle relevant de la cour d’appel de Bizerte, procureur général successivement près la cour d’appel de Nabeul et de Bizerte. Il a été aussi président de la chambre criminelle près la cour d’appel de Tunis.
M. Rajhi enseigne la Procédure pénale à l’Institut supérieur de la magistrature. Il est auteur de plusieurs articles et contributions dans la revue jurisprudence et législations.
Source: “babnet” Le 01-04-2011
Asma Belkhodja-Rébaï, une pionnière du mouvement féministe tunisien
La grande militante, Asma Belkhodja-Rébaï vient de nous quitter à l’âge de 81 ans
Née à Hammam-Lif en 1930 dans une famille patricienne d’origine turque qui a donné à la Tunisie une lignée de théologiens de renom, Asma Belkhodja a pris très tôt conscience de la condition déplorable de la femme tunisienne à travers l’attitude de son père, pourtant ancien sadikien, vis-à-vis de son épouse et de ses enfants. Ce père n’avait rien d’un monstre. Aimant et attentionné, il partageait, néanmoins, avec les hommes de sa génération un mépris total pour les femmes qui l’avait conduit à priver d’instruction ses filles.
Lorsqu’il mourut, Asma avait 13 ans et son instruction se limitait à des connaissances de base de la religion et de la littérature arabe. Ses sœurs, plus jeunes auront plus de chances. Elles seront scolarisées après la disparition du père. Mais les privations qu’elle avait connues ont permis à leur soeur aînée de se forger une forte personnalité. Alors qu’elle entrait à peine dans l’adolescence, elle adhéra à la première association féminine tunisienne, l’Union des Femmes musulmanes, fondée par une autre hammam-lifoise, Bchira Ben Mrad, fille du Cheikh El Islam, Mohamed Salah Ben Mrad. Elle y fera la rencontre de sa vie, son futur mari, Azzouz Rébaï, l’étoile montante du Néo Destour qui sera également son mentor. Ils convoleront en justes noces le 31 décembre …1954.
Dans l’intervalle, ils seront happés par l’action politique. Devenue militante destourienne, Asma Belkhodja sera de tous les combats, prenant part aux meetings au côté de Ferhat Hached, notamment, participant aux manifestations organisées par le parti comme celle du 15 février 1952. Elle sera arrêtée avec d’autres militantes et fera dix huit mois de prison avant de passer en jugement. Après l’indépendance, elle sera l’une des fondatrices de l’UNFT en 1958. Aïcha Bellagha en sera la première présidente et Asma Belkhodja, la secrétaire générale. Cependant sur injonction du parti, la présidente sera forcée de démissionner et remplacée par Radhia Haddad. Ce sera la première interférence du Destour dans les affaires intérieures d’une organisation nationale. En signe de protestation, Asma Belkhodja démissionnera. Ecœurée, elle se retirera de la vie publique.
Source: ”Leaders” Le 01-04-2011
Tunisie: après les barbus, les photos de femmes voilées autorisées dans une CIN
Le ministère de l’intérieur autorisera, prochainement, la délivrance d’une carte d’identité nationale aux femmes qui portent le voile dans leurs photos d’identité.
En concrétisation de cette nouvelle mesure, un projet portant modification du décret n° 717 de l’année 1993 en date du 13 avril 1993 et relatif à la fixation des normes matérielles et techniques de la carte d’identité nationale a été élaboré, ajoute un communiqué rendu public, jeudi, par le ministère de l’intérieur.
Dans son article 6, le texte portant modification du décret précité et qui sera adopté dans les prochains jours, exige aux femmes de montrer uniquement le visage et les yeux dans leurs photos d’identité, ce qui autorise les photos de femmes voilées dans la carte d’identité nationale.
Cette mesure, précise le même communiqué, s’inscrit dans le droit-fil des réformes engagées en vue de consacrer les principes et valeurs de la révolution tunisienne et de garantir le respect effectif des libertés publiques et individuelles.
Le ministère de l’intérieur avait autorisé, depuis le 12 février dernier, la délivrance d’une carte d’identité nationale comportant des photos d’identité de personnes barbues.
Source : « Espace Manager » Le 01-04-2011
Tunisie. Abdallah Kallel poursuivi de Genève à Tunis
Après des années de rude lutte en Europe, avec assez de réussite, le combat contre des tortionnaires de Ben Ali est annoncé en Tunisie. L’ancien ministre de l’Intérieur Abdallah Kallel se trouve en haut de la liste.
L’Association des victimes de torture en Tunisie (Avtt), dont le siège est à Genève, vient d’annoncer à Tunis avoir saisi Me Mongi Elfeki, avocat à la Cour de cassation de Tunis, pour le dépôt d’une plainte pénale «pour lésions corporelles graves, séquestrations, injures, mise en danger de la santé, contraintes et abus d’autorité» à l’encontre de Abdallah Kallel.
Le combat d’Abdennacer Nait-Liman Ancien ministre de l’intérieur du 17 février 1991 au 24 janvier 1995, nommé le 10 octobre 1991 ministre d’Etat, puis plusieurs fois ministre dans différents départements et de nouveau ministre de l’Intérieur du 17 novembre 1999 au 26 janvier 2001, l’Avtt accuse Kallel d’être «le commanditaire des actes de torture perpétrés par et au sein même de son ministère ». La plainte, déposée le vendredi 25 mars, vient selon Abdennacer Nait-Liman, président de l’Association, «suite à la passivité d’une justice manquant cruellement d’indépendance à l’époque du régime de Ben Ali où les victimes étaient privées de tout accès à la vérité, ainsi qu’à la justice et à des réparations». Nait-Liman a aussi dit que les Tunisiens et Tunisiennes victimes de «pratiques dégradantes inhumaines considérées comme crimes contre l’humanité» espèrent désormais «avoir accès librement aux tribunaux tunisiens libres et indépendants pour que la justice soit faite et que l’impunité dont bénéficiaient les tortionnaires qui se nourrissaient du silence et de la passivité des organes de la justice par l’ancien pouvoir exécutif soit éradiqués à jamais».
Kallel échappe à la justice suisse Rappelons qu’en février 2001, alors profitant de la présence d’Abdallah Kallel sur le territoire genevois, Nait-Liman avait déposé une plainte pénale contre ce dernier pour «lésions corporelles graves». Kallel, arrivé en Suisse pour subir une opération à cœur ouvert dans une clinique genevoise, parvient toutefois à quitter la Suisse juste avant que la justice genevoise s’intéresse à son cas. En juillet 2004, soutenu par l’Ong suisse Track Impunity Always (Trial), Nait-Liman introduit à Genève une action en justice visant à obtenir de Kallel et de la Tunisie «la réparation du dommage subi en raison des tortures infligées». En décembre 2010, la Cour européenne des droits de l’homme a communiqué le dossier aux autorités suisses, leur demandant de répondre aux griefs formulés par le plaignant et ses représentants. Un dossier de plus contre l’un des faucons de Ben Ali et une nouvelle épreuve de l’honnêteté et de l’intégrité de la justice de la nouvelle Tunisie.
Source : « Kapitalis » Le 01-04-2011
Lien :http://kapitalis.com/fokus/62-national/3327-tunisie-abdallah-kallel-poursuivi-de-geneve-a-tunis.html
La Kasbah 3 ?
La prestation de Caïd Essebsi à la télé aurait fortement déplu…
La Kasbah 3 s’approche à grande vitesse. Depuis quelques jours, on ne cesse de l’annoncer sur le net et les jeunes se rassemblent afin d’y revenir. Les arrestations qui ont eu lieu la fin de la semaine dernière n’ont pas contré la manifestation, pas plus que le débat autour de Caïd Essebsi projeté avant-hier sur les ondes de la télé nationale, bien au contraire, les réactions de mécontentements ont aussitôt circulé une fois le débat terminé. |
Pourquoi une Kasbah 3 ? L’évènement contient, certes son lot de revendications politiques, mais se nourrit également du sang des martyrs pas encore « vengés ». En effet, les familles qui depuis trois mois appellent à ce que ceux qui ont tiré sur leurs enfants soient au moins arrêtés, et jugés, s’impatientent et croulent sous le poids du chagrin. Il est vrai que la logique dit qu’à chaque chose son temps et que le gouvernement transitoire ne peut tout résoudre et contenter tout le monde à la fois. Mais il est également essentiel de comprendre la passion qu’engendre le chagrin et que ces familles ne peuvent voir les choses de manière autre que passionnelle. On ne peut en aucun cas les blâmer de ne pas se montrer « logiques ». Ainsi, dans la liste des revendications de la Kasbah 3, on y relève un réquisitoire de ceux qui ont tiré sur le peuple, mais aussi des accusations contre des anciens dirigeants du RCD, soupçonnés aux yeux des protestataires non seulement de tyrannie politique, mais également de détournement de fonds public. Les protestataires s’impatientent également de ne pas voir l’ancien président, ainsi que sa famille passer en justice et s’attendent aussi à ce que des pressions soient exercées pour rapatrier la famille de Ben Ali et pour récupérer les deniers publics. Les protestataires appréhendent également que la police politique, même officiellement dissoute ne continue du sévir encore. Ils veulent par ailleurs que les agents ayant exercé dans ce corps et auteur d’abus soient arrêtés et jugés. Sur le plan politique, les protestataires exigent que les discussions de l’instance supérieure soient publiques et non pas secrètes. Pourquoi cette impatience ? On remarque nettement que les jeunes tunisiens épient la Révolution égyptienne et comparent les progrès des deux côtés. La révolution égyptienne quoi que déclenchée après la nôtre commence fournir des réformes concrètes. Ainsi, l’assignation à domicile de Moubarak et sa famille, l’emprisonnement de ses ministres, l’interdiction à quelques responsables du parti présidentiel égyptien de s’adonner à la politique ainsi que d’autres dispositions prises, ont exacerbé encore plus nos jeunes et éveillent une méfiance ici quant à la volonté du gouvernement de poursuivre les responsables corrompus. Lors du débat avec le premier ministre, les questions relatives à la sécurité, aux snippers sont restées sans réponse. Ceci renforce l’appréhension et le fait qu’il dise qu’il peut changer de ministre sans donner d’explication ni demander une autorisation – ce qui est logique en soi – a renvoyé l’image d’un premier ministre qui se soucie peu du peuple. Encore une fois, la communication fait défaut au gouvernement… Et encore une fois, le premier ministre a brandi la carte de la sécurité et de l’économie pour contrer le sit-in. Des milliers de personnes y adhèrent, mais d’autres considèrent que ce n’est pas un sit-in qui paralysera le pays, mais ceux qui font les grèves ailleurs pour des augmentations, ainsi que les pilleurs, les milices et les anciens prisonniers relâchés. Les protestataires revendiquent leur droit civil au sit-in et crient haut et fort qu’une telle manifestation ne peut être interdite. D’ailleurs, des milliers de personnes se demandent sur le net comment cela se fait-il que le gouvernement ait laissé en liberté les vrais criminels, ceux qui ont tiré sur le peuple, ceux qui l’ont tyrannisé et volé et procèdent à des arrestations de jeunes car ils organisent des sit-in ou alors s’activant sur le net et ne font que pratiquer leur droit à la libre expression. Origine de la tension La majorité silencieuse reprend la parole encore une fois et entre ceux qui tiennent à organiser la Kasbah 3 et cette majorité qui les accuse d’être manipulés et les soupçonne de destructeurs, la tension monte entre les deux camps du peuple. Il est vrai qu’il est fort probable que les jeunes organisateurs de la Kasbah soient manipulés par d’autres forces ou courant malveillants, mais ceux qui ont discuté avec les protestataires et ont assisté aux précédents sit-in ne peuvent que témoigner de la bonne organisation, de la maîtrise de leur sujet et de l’envie de débattre animant ces jeunes qui ne peuvent en leur majorité être des ignorants et de ce fait là si faciles à manipuler. Comme il est tout aussi vrai également que le pays est « à genoux » et qu’il faut faire redémarrer l’économie. Il est clair aussi que la sécurité est impérative et qu’il faut la restaurer. Seulement, les protestataires de la Kasbah n’appellent point aux grèves ni ne pillent ou ne volent ou n’incendient… La Tunisie est devant un tournant historique. Les précédents sit-in ont vu s’éclater en parallèle et dans d’autres villes des incidents allant jusqu’à des confrontations armées et engendrant des blessés ou des morts. Est-ce une coïncidence ou alors une envie d’assimiler un sit-in au chaos ? Si c’est le cas quelles forces occultes manœuvrent pour qu’il en ait l’air ? Il nous reste alors à espérer que pour cette fois gouvernement et protestataires arriveront à trouver un terrain d’entente et que surtout aucun évènement sanglant ne se vérifiera et n’assombrira les horizons. |
Source: “Le Temps” Le 01-04-2011
Libye : Moussa Koussa, la «boîte noire» du régime
Arrivé mercredi soir à Londres, le ministre des Affaires étrangères libyen est une prise de choix pour les alliés.
La défection du ministre des Affaires étrangères libyen, Moussa Koussa, paraît digne d’un roman de John Le Carré. Arrivé lundi en Tunisie par la frontière terrestre, il atterrit mercredi soir sur l’aéroport d’affaires de Farnborough, près de Londres, à bord d’un jet privé, ou, selon d’autres sources, d’un appareil militaire britannique. Coup de maître des services secrets occidentaux le lâchage de cet ancien chef des services de renseignements va faire mal à Kadhafi. Même s’il n’était plus au cœur du système politico-sécuritaire depuis un an environ, Moussa Koussa, 61 ans, est la boîte noire du régime. Comme les enregistreurs placés à bord des avions, il emporte avec lui l’historique d’un trajet sanglant, l’histoire des services secrets libyens depuis 1969. De l’époque du terrorisme à celle des négociations avec l’Occident.
Malgré la résonance comique de son patronyme («courgette» en arabe) Moussa Koussa n’a rien d’un amuseur, même s’il entame sa carrière par une gaffe monumentale. À peine nommé ambassadeur à Londres, il annonce en 1980 dans une interview auTimes: «Les comités révolutionnaires ont décidé hier soir d’exécuter deux personnes de plus au Royaume-Uni, et je les approuve.» Le gouvernement britannique, qui le soupçonne déjà d’être chargé de superviser les assassinats d’opposants libyens en exil en Europe du Nord, lui donne 48 heures pour faire ses bagages. D’autant plus que, dans la même interview, l’éphémère ambassadeur chante les louanges de l’IRA, à laquelle Kadhafi envoie kalachnikovs, lance-missiles et explosifs militaires par bateaux entiers.
Ex-chef des services secrets
Rapatrié, le diplomate porte-flingue continue dans cette veine. Il est chargé des contacts avec les mouvements terroristes du monde entier au sein du «Mathaba», le «Centre anti-impérialiste» de Tripoli. Pendant les années 1980, la campagne de terreur libyenne atteint son apogée. En décembre 1988, c’est l’attentat contre un Boeing de la Pan Am au-dessus de la ville écossaise de Lockerbie (270 morts) puis, en 1989, l’explosion d’un DC-10 français d’UTA au-dessus du Niger (170 morts).
Moussa Koussa est promu en 1994 chef des services de renseignements, ce qui fait de lui l’un des deux ou trois hommes les plus puissants de Libye après Kadhafi. Il est l’un des rares personnages à avoir accès au Guide de la révolution 24 heures sur 24. En 2003, il coiffe une nouvelle casquette. Il est le principal artisan du retour de la Libye sur la scène internationale. Terrifié par le sort réservé à Saddam Hussein, Kadhafi charge son chef des renseignements d’entamer des négociations secrètes avec Londres et Washington. Elles aboutissent en décembre à l’annonce spectaculaire du renoncement de la Libye à son projet nucléaire militaire. Moussa Koussa devient ensuite le meilleur ami de ses collègues occidentaux. Il leur ouvre ses dossiers sur les groupes terroristes et sur les Libyens partis faire la guerre sainte en Irak. Certains membres de l’opposition libyenne l’accusent d’ailleurs de gonfler les listes en envoyant des agents travestis en recruteurs d’al-Qaida enrôler des jeunes désoeuvrés à seule fin de les dénoncer ensuite aux Etats-Unis.
Reçu à Londres, à Washington et à Paris, il est aussi derrière les négociations qui aboutissent aux compensations des familles de victimes des attentats de Lockerbie et du DC-10. Mais sa nomination au poste de ministre des Affaires étrangères, en 2009, marque le début d’une relative mise à l’écart. Moussa Koussa avait cédé les «services» à Abdallah el-Senoussi, un autre pilier sécuritaire. Il n’était, semble-t-il, plus admis dans le premier cercle. Le début des frappes aériennes l’a sans doute convaincu qu’il était temps de passer du côté des vainqueurs. Avec tous ses secrets.
Source : « Le Figaro » Le 01-04-2011