An-Nahdha Movement: Statement on the events of 18May 2011
AFP: Tunisie: les « terroristes » visaient des « sites touristiques » (presse)
Reuters: Tripoli dément le départ de l’épouse et de la fille de Kadhafi
AFP: Tunisie et Egypte au menu des assemblées de la Banque africaine de développement, les 9-10 juin à Lisbonne
Houcine Ghali: Tunisie : règne de la subjectivite et du defoulement
Statement on the events of 18May 2011
Alert – Tunisia
18 May 2011
Draft election decree must protect freedom of expression, cautions ARTICLE 19
Tunisie: les « terroristes » visaient des « sites touristiques » (presse)
Tunis dément la présence de la famille Kadhafi en Tunisie
Tripoli dément le départ de l’épouse et de la fille de Kadhafi
Situation tendue en Tunisie notamment en raison de la Libye (Essebsi)
Tunisie et Egypte au menu des assemblées de la Banque africaine de développement, les 9-10 juin à Lisbonne
Les quatre journalistes libérés en Libye sont en route pour la Tunisie
TUNISIE : REGNE DE LA SUBJECTIVITE ET DU DEFOULEMENT
Houcine Ghali, Genève
Dans leurs commentaires, leurs interventions et leurs échanges dans les mas medias et l’ ensemble des supports d’ internet, les Tunisiens usent souvent de subjectivisme, d’ étalage de leurs états d’ âme, de sentiments, de critiques gratiutes, d’ affects et même d’ insultes et de règlements de comptes.
C’ est le résultat de 23 ans de réression, de mutisme, d’ obéissance passive au Prince et d’ auto-censure.
L’ irruption de la révolution spontannée dans le pays, sans le moindre apport des intellectuels, leaders politiques de toute obédience, défenseurs des droits humains bien lotis dans le Grand Tunis et bourgeois libéraux loin de la misère des régions de l’ intérieur, a ouvert la porte toute grande aux citoyens pour un défoulement collectif non maîtrisé, une revanche sur un pouvoir qui les a longtemps méprisés, une haine contre la police qui les a dépossédés de leur dignité.
L’ absence de culture politique, d’ acquisition des matériaux intellectuels et des connaissances nécessaires pour pouvoir analyser, critiquer objectivement et ainsi participer positivement à l’ émancipation du pays, faisait défaut à la majorité de la population. Même un nombre appréciable de ceux qui se gargarisent d’ être intellectuels se sont distingués par l’ étalage de leurs états d’ âme, une critique acerbe contre tous ceux qui ne partagent pas leurs idées et un défoulement inoui contre les symboles de l’ ancien pouvoir, tellement cette frange de l’ élite tunisienne se sent aujourd’ hui coupable d’ avoir accepté une humiliation durant 23 ans sans bouger, sans se révolter et sans oser affronter les difficultés inhérentes à tout engement révolutionnaire.
On a le droit de ne pas apprécier les idées et la stratégie d’ un leader d’ une formation politique ou d’ autres intervenants sur la scène médiatique, mais en démontrant le pourquoi, dans le respect, au nom justement de la démocratie qui nous permet de nous exprimer aujourd’ hui.
Si par exemple Sihem Ben Sedrine se prenait et se prend encore pour Rosa Luxembourg, c’ est son droit, mais ce n’ est pas une raison pour l’ insulter, la diminuer ou la dénigrer sur Facebook, et personne n’ est obligée de la suivre puisqu’ il y a tellement d’ autres courants politiques qui peuvent répondre aux diverses attentes des citoyens. Au contraire, il aurait fallu démonter ses arguments par d’ autres arguments contraires et ainsi peut être persuader les gens pour ne point suivre ses desseins.
De la même manière pour Ennahdha. Face aux discours, prises de position et interventions de ses leaders, ils ont eu droit à un flot d’ insultes, de moqueries, d’ affirmations gratuires, de défoulement haineux, mais peu d’ analyses et de réflexions pour démonter le discours de ce mouvement islamiste.
Dans toute révolution et dans toute société il y a des extrémistes, c’ est au citoyen de choisir la voie qui lui convient mais en laissant aux autres le droit de s’ exprimer. La polémique et les crises sont même nécessaires pour voir plus clair et avancer en connaissance de cause et ainsi bâtir la maturilé politique du peuple. Et ce sont les urnes qui départagent après les diverses opinions.
Mais en Tunisie, et à ce moment précis et important pour réussir la révolution, on constate que la majorité des citoyens demeure en dehors des formations politiques et des organisations de la société civile. Près de 80/% du peuple se trouve dans ce cas de figure. L’ absence d’ encadrement politique, de l’ appartenance à un parti, permet la flauraison du défoulement individuel et l’ indigence de la culture politique et du choix idéologique. C’ est ce qui explique l’ installation d’ une pagaille sur la scène des revendications et de l’ expression.
Il vaudrait donc mieux, au moins se mettre d’ accord pour cibler ceux qui freinent la révolution, à savoir tous ceux qui ont servi, à un haut niveau l’ ancien régime, réprimé le peuple, volé les fruits de son labeur et piétiné sa dignité, en attendant une prise de conscience plus salutaire.
Al-Qaida pointe le bout de son nez
Deux militaires ont été assassinés le 18 mai à Rouhia, dans le sud du pays, par un groupe armé. Deux des assaillants ont aussi été abattus. Ils seraient Tunisiens et sont fortement suspectés d’appartenir à Al-Qaida au Maghreb islamique.
Les événements enregistrés ces derniers jours sur les frontières de notre pays avec la Libye sont préoccupants et dangereux. Ils annoncent que la Tunisie, comme les autres pays de la région, est une cible potentielle d’Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi). Les forces de sécurité nationale – la police, la garde nationale et, surtout, l’armée qui avait pourtant semblé, la dernière période, s’enivrer de sa sortie dans les villes et se prendre au jeu de la politique – ont répondu présents à l’appel et étaient d’une vigilance exemplaire à la frontière tuniso-libyenne. Par contre, les partis politiques de tous bords, dont le nombre n’a cessé de gonfler, ont brillé encore une fois par leur mutisme comme si rien ne les concernait dans ce pays sinon leurs petits intérêts et leurs magouilles.
Depuis une semaine, les services de la douane tunisienne ont intercepté des armes et des munitions en provenance de Libye, à Dhehiba. C’était le signal que nos frontières n’étaient plus aussi hermétiques et qu’il fallait redoubler de vigilance. Quelques jours plus tard, un homme s’est même permis de brandir son arme, un pistolet mitrailleur, dans un café de Gafsa. Entre-temps, des fusils, des munitions, des bombes, des détonateurs et de la dynamite ont été découverts ici et là dans les régions frontalières du Sud. Mais l’interception la plus importante a été, le 15 mai [à Nekrif, dans la région de Tataouine, dans le sud-est tunisien], celle de deux individus en possession d’une ceinture explosive, d’une bombe et de munitions. L’un d’eux est d’origine libyenne et l’autre de nationalité algérienne. Tous deux ont avoué appartenir au mouvement Aqmi et ont signalé aux enquêteurs l’existence d’autres complices planqués dans une maison de Tataouine [ville du sud-est].
Derrière toutes ces interpellations, il y a bien entendu beaucoup d’efforts et un gros travail de surveillance et de contre-espionnage. Dans l’état actuel de désorganisation des services de la police et de la garde nationale, désorganisation somme toute compréhensive et attendue, on peut parier que les services de la sécurité militaire étaient la pièce maîtresse du dispositif sécuritaire mis en place dans le sud du pays, ce qui a permis ces interpellations. L’armée nationale a été en effet épargnée par les développements tumultueux qui ont frappé les structures du ministère de l’Intérieur et a gardé son dispositif intact. C’est pourquoi elle a réussi sans peine à gagner l’estime des Tunisiens, si ce n’était son intervention pour bloquer des sites hostiles à l’armée. Toutefois, les dernières interpellations dans les régions frontalières du Sud ont montré que l’armée est bien présente là où elle doit l’être.
Par contre, on attend toujours que nos partis politiques daignent s’intéresser à quelque chose d’autre que leurs petits calculs politiciens. Aucun parti n’a en effet publié ne serait-ce qu’un seul communiqué sur la situation sécuritaire dans le Sud et les risques d’implantation du terrorisme international sur le sol tunisien. Aucun parti politique n’a à ce jour appelé à une manifestation contre le terrorisme. La sécurité du pays est-elle l’affaire de l’Etat ou est-elle une affaire nationale qui implique tous les Tunisiens ?
Les partis politiques tunisiens s’étaient pourtant insurgés contre les exactions policières sur les manifestants il y a deux semaines. Ils auraient pu aussi s’intéresser à la vie des Tunisiens en condamnant le terrorisme qui pointe son nez chez nous ou en appelant à une mobilisation nationale contre la violence politique en général. Au lieu de cela, ils continuent toujours à se chamailler au sein de la haute commission, à se bousculer dans les médias et sur les plateaux de télévision, à séduire plutôt qu’à convaincre les Tunisiens de leurs programmes qu’ils n’ont toujours pas. Autant l’armée ne doit pas être soudoyée par la politique, autant les politiques ne doivent pas laisser le pays s’altérer par leurs calculs politiciens et sectaires.
Source : « Courrier international » Le 19-05-2011
Tunisie : la fragile transition démocratique
Quatre mois après la fuite de Ben Ali, les Tunisiens redoutent une reprise en main du pays par les cadres de l’ancien régime. Les attentes sociales, elles, restent impérieuses. Tunis, envoyée spéciale.
Il y a les bouleversements manifestes. Ces petits riens et ces grands changements qui esquissent une Tunisie nouvelle. Comme ces vitrines de librairie où trônent fièrement les livres de Sihem Bensedrine ou de Taoufik Ben Brik, opposants naguère traqués, insultés, jetés dans les geôles du régime de Ben Ali. Comme ces mouvements sociaux qui secouent sans répit le pays. Comme cette inextinguible soif de débat qui attire les citoyens dans les réunions des innombrables associations ou partis politiques créés depuis la fuite du dictateur, le 14 janvier. Il y a les changements, et puis il y a l’inquiétude. La peur du retour en arrière, la terreur de voir les séides de l’ancien régime reprendre le pays en main en semant la confusion, le trouble et le désordre. « Chaque révolution a sa contre-révolution. Sous des formes diverses, toutes les forces qui craignent de voir leurs intérêts menacés par la transition démocratique tentent de déstabiliser le pays », résume Abdelaziz Messaoudi, membre du comité politique du parti Ettajdid (gauche).
En mettant des mots sur ces craintes, en incriminant un « gouvernement de l’ombre » tirant, selon lui, les ficelles de la transition, l’ex-ministre de l’Intérieur Farhat Rajhi a suscité une onde de choc dans tout le pays. Après ses déclarations début mai, les manifestations appelant à une « seconde révolution » se sont succédé. Sur l’avenue Habib-Bourguiba, des policiers cagoulés ont durement réprimé les contestataires, blessant même des journalistes. Depuis, le couvre-feu décrété le 7 mai dans le Grand Tunis a été allégé. Mais le climat reste lourd.
Un climat de peur entretenu
Dans un pays qui comptait un policier pour 70 habitants et un nombre incalculable d’indics, le poids de l’appareil sécuritaire et de la police politique du régime se fait toujours sentir. Dans le même temps, le sentiment d’insécurité est attisé, si besoin à grand renfort de rumeurs, pour entretenir un climat de peur. Le 5 mai, une soixantaine de détenus s’évadaient de la prison de Sfax, après des faits similaires à Kairouan, Kasserine et Gafsa. « Tout cela est très suspect. Comme les Tunisiens parlent de politique, tout est fait pour qu’ils ne parlent plus que d’ordre et de sécurité », explique Massaoud Romdhani, militant des droits de l’homme et membre de la haute instance pour la transition démocratique.
Sur le front social aussi, le climat est à l’orage. Le premier ministre, Béji Caïd Essebsi, n’a pas de mots assez durs pour fustiger les « grèves sauvages » préjudiciables, selon lui, à une économie guettée par le ralentissement (le FMI prévoit une croissance de 1,3 % en 2011, contre 3,7 % en 2010). Pour faire taire les revendications salariales, certains investisseurs étrangers n’hésitent pas à brandir la menace de fermeture. La fracture entre les régions côtières et celles de l’intérieur, minées par la misère et le chômage, est plus profonde que jamais. Les attentes sociales restent impérieuses.
Autant de facteurs qui nourrissent la défiance vis-à-vis du gouvernement de transition. Premier ministre de Ben Ali, Mohamed Ghannouchi avait « dégagé » sous la pression des manifestants de la Casbah, aux yeux desquels il incarnait la continuité. À quatre-vingt-six ans, son successeur, Béji Caïd Essebsi, vétéran du bourguibisme, apparaît, lui, en décalage complet avec les aspirations d’une jeunesse refusant de voir « sa » révolution voler aux quatre vents. « Tant que les élections à l’Assemblée constituante n’auront pas eu lieu, le problème de la légitimité restera posé », se résigne Abderrazak Zouari, ministre du Développement régional. Prévu le 24 juillet, ce premier scrutin libre depuis l’indépendance pourrait être reporté. Officiellement pour des raisons « techniques ».
Source : « L’humanite » Le 19-05-2011
Tunisie – Partis : Omar S’habou fait son entrée dans l’arêne politique
Lors d’une conférence de presse tenue jeudi 18 mai 2011 à El Teatro (El Mechtel), M. Omar S’habou a présenté le nouveau Parti du nom de Mouvement Réformiste Tunisien dont il présidera la destinée, ainsi qu’un nombre important de ses cofondateurs dont font parties des journalistes, des avocats et des hommes d’affaires pour l’essentiel.
En guise d’introduction, M. S’habou a déclaré qu’il reste avant et après tout un communicateur et un journaliste, mais que les événements qu’a connus le pays, conjugués avec les péripéties qu’il a lui-même connues et qui l’ont contraint à l’exil, l’ont amené à se convertir en homme politique, aujourd’hui doté d’un Parti, ajoutant que de ‘‘retour de l’exil, j’ai le plus naturellement du monde innocenté les journalistes tunisiens de toute implication dans le système du président déchu, tant je savais les contraintes qui pesaient sur eux dans l’exercice de leurs fonctions’’.
Le slogan du MRT étant ‘‘Liberté, Modernité et Sécurité’’, le président du MRT a présenté les contours de sa politique générale qui repose essentiellement sur un train de réformes tous azimuts, allant de la liberté individuelle et d’expression jusqu’à la sécurité des citoyens, en passant par la modernisation des systèmes socio-économiques. Sur ce dernier point, il a précisé que ‘‘le MRT veillera à ce que la liberté d’entreprendre soit non seulement assortie d’une exigence sociale contraignante mais aussi d’un corpus éthique qui lui soit consubstantiel; la confiance, la loyauté dans la concurrence et le respect des règles de jeu propre à l’économie de marché devant en être les valeurs motrices et organisatrices’’.
L’adieu à Voltaire?
Surprise!… Avec M. S’habou, tout semble s’acheminer vers le rejet, partiel en tout cas, de la langue française. Son explication: «Le MRT préconise l’instauration du bi, voire trilinguisme, dès la première année de la scolarité. Il s’appliquera à substituer, dans les plus brefs délais, l’anglais au français comme deuxième langue de base à côté de l’arabe. Les Tunisiens n’ont pas tissé avec la France des liens de dépendance. La deuxième langue est celle qui permette aux Tunisiens de rester dans un rapport d’interaction avec les évolutions actuelles et futures de l’humanité.Ce sera par conséquent l’anglais».
L’esprit réformateur
Pour revenir à l’esprit du MRT, le conférencier, en s’inscrivant dans la droite ligne des premiers réformateurs tunisiens (Tahar Haddad, Farhat Hached, Bourguiba…) qui, par une succession de réformes structurelles (libération de la femme, démocratisation de l’enseignement, modernisation de l’enseignement, développement intégral), ont fait éclore une société modèle dans le monde arabo-musulman, entend ‘‘poursuivre le même souffle réformiste structurel pour relever les défis qui attendent la nation tunisienne aujourd’hui et demain’’.
Signalons que dans les coulisses du MRT, on parle avec beaucoup d’enthousiasme du retour du ‘‘Maghreb’’, revue fondée par M. S’habou et interdite depuis bien des années maintenant.
Source: ”wmc” Le 19-05-2011
Pour un référendum et non pas une Constituante
Tunisie-Politique: Pour un référendum et non pas une Constituante
Les Tunisiens, quelle que soit leur appartenance politique, sociale, culturelle ou religieuse, sont unanimes pour une nouvelle Constitution pour le pays. Les motivations de leur refus des dispositions constitutionnelles actuelles concernent particulièrement le code électoral, les pouvoirs du président de la République, la séparation des pouvoirs et, par effet induit, l’indépendance de la justice. Ils abhorrent la présidence à vie ainsi que les prolongations éhontées des mandats présidentiels. Ils souhaitent des garanties démocratiques susceptibles d’écarter un retour possible au despotisme. Pour satisfaire ces attentes légitimes du peuple, que faudrait-il faire, que pourrait-on faire pour réaliser les objectifs partagés? Deux voies s’offrent dès lors aux Tunisiens: 1) L’élection d’une Assemblée nationale constituante qui aura la légitimité de désigner un chef d’Etat provisoire (encore un…), un gouvernement provisoire, de rédiger une nouvelle Constitution. Et probablement de légiférer. 2) Présenter au peuple en référendum 3 variantes de la Constitution: – un régime présidentiel – un régime parlementaire – un régime semi-présidentiel. Des élections présidentielles et/ou législatives suivront trois mois plus tard. La première option (Assemblée constituante) semblait avoir la faveur des partis et groupuscules actifs, des syndicats et d’une partie de la société civile. L’Instance supérieure… a entamé ses travaux sur cette base et achevé le projet du code électoral. Dès son apparition, ce projet fut contesté. On pouvait penser qu’il était contesté car il prévoyait l’exclusion de citoyens n’ayant pas fait l’objet de jugement d’être éligibles (article 15). Non, car en dépit de son caractère antidémocratique et contraire à l’article 5 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme (2e alinéa) qui stipule que «tout ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché». L’opinion publique semble l’avoir admis vu l’énormité des actes commis sous l’ancien régime… Mais ce code est rejeté par les indépendants et certains nouveaux partis créés après le 14 janvier 2011 qui risquent de se trouver exclus de la compétition au profit des partis d’avant cette date. La majorité de ces nouveaux partis est composée de jeunes, de cadres, de citoyens ayant participé activement à la Révolution. Après l’exclusion des jeunes chômeurs et des diplômés au profit de ceux qui travaillent et qui réclament à force de grèves et de si-tin des augmentations de salaires, c’est au tour des jeunes indépendants et des cadres d’être sur le bas-côté. Mais au fur et à mesure que les préparatifs de la Constituante avançaient, les Tunisiens, y compris ceux-là mêmes qui la réclamaient, se rendirent compte de l’ampleur des risques non pas politiques mais idéologiques. La société est entrée du coup dans une turbulence idéologique et civilisationnelle. En fait, il semble que dans la foulée et l’ardeur révolutionnaire de vouloir remettre tout en cause, l’on ait oublié purement et simplement que la Constitution de 1959 contient dans sa première version des dispositions générales (17 articles sur 78) qui constituent en fait la nature, l’âme de la Tunisie moderne. Ces dispositions rédigées quelques semaines après l’indépendance par un groupe de leaders historiques sous la conduite et l’animation du père de la nation n’ont jamais été modifiées. Elles affirment que la Tunisie est un Etat indépendant, souverain, l’arabe est sa langue et l’Islam sa religion (art. 1). Que le peuple est le seul détenteur de la légitimité (art. 3), que la devise de la République est «liberté, ordre, justice», que la liberté de culte et de l’individu est garantie (art. 5), que les citoyens sont égaux devant la loi (art. 6), que le citoyen jouit de ses droits entièrement limités seulement par le respect de la liberté d’autrui, que la liberté d’opinion, d’expression, de presse, de réunion est garantie (art. 8) ainsi que le droit syndical (2e alinéa art. 8). L’inviolabilité du domicile est assurée (art. 9). Tout accusé est présumé innocent jusqu’à preuve de sa culpabilité (art. 12). La punition est individuelle (art. 13). Le droit de propriété est garanti (art. 14), etc. Les membres de l’Instance supérieure, se rendant compte qu’ils sont devant une situation de blocage, se sont mis à débattre, à partir de cette semaine, de ce qu’ils appellent le «pacte républicain». Une manière de sauvegarder les dispositions avant d’envisager de les démolir. On peut penser que les Tunisiens ont appris à couper les cheveux en quatre. Comment s’en sortir ? Alors comment s’en sortir pour de bon ? Revenir à la 2e option, c’est-à-dire le référendum. Les objections que certains citoyens peuvent apporter sont de deux ordres. 1) Le référendum peut être «manipulé» par le pouvoir en place pour en faire un plébiscite. 2) Quelle est la légitimité du groupe de rédaction de la nouvelle Constitution ? Certes, les pouvoirs en place désirent se perpétuer. Mais force est de souligner que ce ne sera pas le cas pour ce référendum car les autorités sont provisoires et quitteront les affaires dès que la transition sera achevée. Le peuple ne va pas voter par oui ou non, mais il va choisir entre 3 variantes: — Un régime présidentiel — Un régime semi-présidentiel — Un régime parlementaire. Quant à la légitimité du comité de rédaction, on peut confier à l’Instance supérieure… le soin d’élire ou de désigner ce comité qui sera chargé de la rédaction de ces trois variantes. Celles-ci peuvent même être adoptées par l’Instance avant de les soumettre à référendum. Cette instance a bien proposé le Code électoral. La tenue de ce référendum aura le mérite de mettre de côté les turbulences idéologiques qui ne font que diviser les Tunisiens, pour replacer la problématique uniquement au niveau politique. Le peuple qui, jusqu’ici, observe, un peu perplexe, n’a pas dit son dernier mot. Un référendum lui donnera la parole. Chaque parti politique fera campagne pour le régime de son choix. Les médias auront un rôle pédagogique important. Il sera mis fin à la précipitation et à l’improvisation. L’annonce d’un calendrier clair et cohérent est de nature à restaurer la confiance. Le référendum peut avoir lieu le 24 juillet. Des élections présidentielles et législatives ou seulement législatives auront lieu trois mois plus tard. Les autorités provisoires assureront la transition jusqu’à l’achèvement du processus. On aura ainsi le temps de cerner le problème du financement des partis, d’élaborer des audits financiers préalables à la participation des partis aux élections. Les petits partis auront le temps de débattre entre eux et avec la société. En conclusion, quel que soit le type de régime qui sera choisi, l’important est la séparation des trois pouvoirs et les verrouillages nécessaires pour éviter le despotisme de l’un sur les deux autres. «Lorsque dans la même personne ou dans le même corps de magistrature, la puissance législative est réunie à la puissance exécutrice, il n’y a point de liberté parce qu’on peut craindre que le même monarque ou le même sénat ne fasse des lois tyranniques pour les exécuter tyraniquement. Il n’y a point de liberté si la puissance de juger n’est pas séparée de la puissance législative et de l’exécutrice. Si elle était jointe à la puissance législative, le juge serait législateur. Si elle était jointe à la puissance exécutrice, le juge pourrait avoir la force d’un oppresseur», disait Montesquieu dans L’esprit des lois.
Source: “Afrique en ligne” Le 19-05-2011
La Tunisie sous le choc de l’affaire Oussama Achouri
Onde de choc après les déclarations d’un manifestant qui dit avoir été violé par un agent de police
Un jeune manifestant, Oussama Achouri, déclare dans une vidéo publiée sur facebook qu’il a été violé par un agent le 12 mai 2011 après son arrestation. Les tunisiens avaient découvert ce jeune homme de 22 ans dans le journal télévisé du jeudi soir avouant qu’il avait commis des actes de vandalisme sur ordre de Hamma Hammami et Siham ben Sedrine, respectivement secrétaire général du parti communiste POCT et célèbre militante des droits de l’homme.
Dans sa vidéo, Oussama revient sur ses déclarations à la tv nationale et explique qu’il a été obligé de tenir ces propos a la suite d’actes de violence dont le viol subi. Il n’expliquera pas la présence de la caméra ni les circonstances de l’enregistrement. Al jazzera relaye l’info, et dans la foulée le secrétaire d’état à la jeunesse déclare sur sa page officielle avoir lui même emmené Oussama à l’hôpital où un certificat médical lui a été délivré. Puis samedi 14, nouvel émoi, Oussama se serait fait arrêter à nouveau et la communauté du web s’enflamme. Communiqué aussitôt sur la page facebook de la police, Oussama n’a pas été arrêté, il aurait juste été entendu dans le cadre de cette affaire » prise très au sérieux » par le ministère de l’intérieur et il est libre de ses mouvements.
Joint par afrik.com, le syndicat de la police, reste égal à lui même : tout dépassement de la loi, même par un agent sera réprimé, mais de rappeler que tout reste au stade d’allégations tant que cela n’a pas été prouvé. Les investigations seraient en cours et la communication sera transparente et sereine.
Slim amamou, le secrétaire d’état à la jeunesse, confirme les faits indiqués sur son blog, il ne connait pas directement Oussama, c’est un autre blogueur qui l’a joint pour solliciter son aide après avoir constaté le refus d’ausculter Oussama.
Taoufik bouderbala, dit avoir eu connaissance de ce fait d’actualité, mais que ce jeune homme ne s’est pas présenté à sa commission, il est important qu’il vienne exposer son cas pour être pris en charge et permettre toute la lumière sur cette affaire. Il rajoute que le président de la commission a la latitude pour solliciter les hôpitaux pour les expertises en vertu de la circulaire du premier ministre de février 2011.
Bechir Warda, président de l’Observatoire National de la presse, interrogé par afrik.com sur la déontologie des chaines qui ont diffusé des séquences de personnes en détention sans vérification, sans publier de démenti quand la personne est revenue sur ses déclarations, trouve que le procédé est contraire à la déontologie, le travail journalistique a manifestement été bâclé, les conditions d’enregistrement restant floues. Sur les déclarations du jeune Oussama, M. Warda a beaucoup de doutes, il s’interroge notamment sur le fait qu’en tant que victime il n’ait toujours pas porté l’affaire devant la justice. Il rajoute par ailleurs que la haute autorité n’a été saisie d’aucune plainte.
Oussama Achouri, lui, reste jusqu’à ce mercredi matin injoignable, il serait caché par des camarades qui ne précisent pas ce qu’ils craignent. Le plus actif d’entre eux, Naim Jouini, un jeune de 22 ans, fait le relais entre lui, les médias, les avocats, et même la police qui l’a joint alors qu’afrik.com recueillait ses propos. Il enregistre au passage des témoignages sur facebook et donne des précisions sur l’affaire lorsque afrik.com tente de poser les interrogations directement à Oussama : Oussama n’est pas un blogueur, ce serait un manifestant de la kasbah, c’est là qu’ils auraient fait connaissance. Il aurait été arrêté jeudi 12 en début d’après midi lors d’un contrôle d’identité à Tunis. Relâché, il aurait parlé a ses amis du viol qu’il aurait subi par un agent suite à un premier refus de faire des aveux dictés à la tv. L’affaire commence par la publication de la vidéo de Oussama sur facebook. Naim et un autre camarade l’auraient emmené pour effectuer un constat médical, mais ils se seraient heurtés à un refus, sans plus de précision. C’est là qu’ils ont eu l’idée de faire appel à Slim Amamou.
Sur les faits du samedi 14, Naim déclare qu’Oussama aurait été interpellé à la terrasse d’un café alors qu’il était en sa compagnie avec d’autres amis. Il aurait eu un malaise en découvrant son agresseur dans le camion de police. Les agents auraient indiqué qu’ils voulaient entendre Oussama pour lui rendre justice et comprendre ce qui s’était passé. Il aurait été donc entendu dans les locaux de la police judiciaire et on lui aurait montré des pages facebook et un historique internet démontrant un penchant homosexuel, ce qu’il aurait refusé de signer. il sorti libre du poste le jour même et il n’est pas en détention comme le suggèrent les internautes.
Afrik qui est sur l’affaire depuis dimanche n’arrive pas à avoir accès à Oussama, son protecteur ne donne pas de raisons précises, il dit juste avoir mis deux avocats sur l’affaire et indique se méfier beaucoup. Il pointe aussi un manque de soutien logistique et financier, mais refuse l’accès d’un avocat supplémentaire conseillé par afrik.com au dossier et à Oussama.
Oussama est apparu entre temps dans une nouvelle vidéo datant du 15 mai en réponse au communiqué du ministère de l’intérieur, pointant du doigt des incohérences grossières dans leur déclaration, notamment le fait de dire qu’il a été arrêté vendredi alors qu’il s’agit de jeudi, l’intervention tv du jeudi soir au poste, et le certificat médical datant de vendredi faisant foi. Il donne aussi plus de détails sur le viol qu’il aurait subi ; il aurait été immobilisé par un agent corpulent pendant qu’un autre le sodomisait. Ce dernier, lui aurait déjà fait des gestes et allusions obscènes alors qu’il montait les escaliers une heure avant l’agression. Toujours selon Oussama dans sa vidéo, pour Nawat.org, le chef de poste qui nie avoir eu connaissance des faits, aurait admis lors de la 2eme arrestation d’Oussama qu’il savait qu’on l’avait séparé des autres jeunes et qu’on l’avait placé seul dans une pièce. Concernant la présence des caméras, il ne fournit pas d’explication sur les circonstances de leur présence et si elles étaient là depuis le début, on apprendra que NESSMA TV a été la première à recueillir ses propos 1 quart d’heure après le viol et qu’il était en pleurs dans la séquence. Impossible de mettre la main sur cette séquence aujourd’hui, une heure plus tard il fait les déclarations à la tv nationale déterminé, dit-il, à dire ce qu’il faut pour sortir du poste. Autre caméra présente, celle du ministère de l’intérieur qui aurait dépêché une équipe sur place.
Autre apparition de Oussama, au micro de Shems FM et de Mosaïque FM et à au haut comité de réalisation des objectifs de la révolution, le quel comité s’est montré très concerné.
L’émoi est vif sur la toile, le spectre policier refait surface, et déjà, on se divise : Ce jeune qui a déjà tenu des propos sur lesquels il est revenu est-il crédible ? Autre question récurrente, le timing de ces déclarations : le lendemain de l’interview de Baji Kaid Sebsi qui avait désigné sans les nommer des partis politiques derrière les actes de vandalisme.
Mais au delà de ces divisions en pour et contre, la grande question est : les arrestations après le 14 janvier sont elles toutes saines et sereines ? Ceux que la télévision nationale exhibe comme des casseurs et criminels, le sont-ils vraiment ? Comment en être certain, alors que tout le monde est tourné vers les faits précédent le 14 janvier, que les médias versent encore dans le sensationnel et que le ministère de l’intérieur n’a pas encore atteint la phase ou il désigne et se détache publiquement des éléments qui ont mal agi et entaché sa réputation durant et avant la révolution. Le doute est permis et bénéficiera toujours, tant que l’enquête ne s’est pas prononcée, à ceux qui se déclarent victimes de bavures de la part de l’état.
Afrik ne manquera pas de revenir sur l’affaire.
Source: “Afrik.com” Le 18-05-2011
Démocratie linguistique Le tunisien, ma langue
C’est le moment ou jamais de se pencher sur le débat linguistique en Tunisie, débat qui nous a toujours été interdit pendant la dictature et considéré tabou au nom d’un panarabisme faux, inexistant et obsolète. Selon une définition linguistique de la langue, celle-ci précise que «c’est un système de signes doublement articulés, c’est-à-dire que la construction du sens se fait à deux niveaux d’articulation». Dans une perspective sociolinguistique (étude des langues dans leur rapport aux sociétés), le terme «langue» «définit tout idiome remplissant deux fonctions sociales fondamentales : la «communication» (c’est au moyen de la langue que les acteurs sociaux échangent et mettent en commun leurs idées, sentiments, pensées, etc.) et l’«identification» (de par son double aspect individuel et collectif, la langue sert de marqueur identitaire, quant aux caractéristiques de l’individu et de ses appartenances sociales). Par conséquent, les «langues» sont des objets vivants, soumis à multiples phénomènes de variations et les frontières entre les langues sont considérées non hermétiques, car elles relèvent d’abord des pratiques sociales. Ce qui nous intéresse plus particulièrement est justement la langue liée à la sociolinguistique, et spécifiquement à la Tunisie. En tant que linguiste et maître de conférences en philologie romane, je me suis toujours penché sur le problème «Langue» en Tunisie. J’ai d’ailleurs toujours refusé que le tunisien soit défini comme un dialecte et pas comme une langue au vrai sens du mot. Les raisons de ce refus sont multiples et d’autres linguistes en conviennent. Toute langue est synonyme d’appartenance à une identité individuelle et collective, personnelle et sociale. La langue est celle que chaque individu utilise pour exprimer ses états d’âme, ses émotions, sa rage, son amour, ses sentiments… La langue est aussi celle que nous utilisons avec nos parents, nos amis… Et encore celle que nous entendons à la radio, ou encore utilisons au bureau. Bref, la langue est celle de tous les jours. Mais la langue est aussi celle qui est utilisée du nord au sud et de l’est à l’ouest d’un pays, par toutes (ou presque) les couches sociales. La langue est l’élément d’identification et d’appartenance à chaque société. Je défie donc chaque Tunisien de me dire quelle est la langue qu’il utilise tous les jours. Serait-ce l’arabe littéraire ou bien le tunisien ? Sans doute aucun, je pense que la seule réponse est bien la seconde. Des collègues, linguistes et non linguistes, soutiennent la thèse du tunisien comme dialecte, ou bien un charabia, à cause de l’apport innombrable de mots d’origine étrangère, notamment française et italienne. Mais dans quelle langue n’existent pas des prêts ou des calques linguistiques d’origine étrangère‑? Prenons l’exemple de l’italien, où une multitude de mots français et anglais sont présents. Idem pour le français ou l’espagnol, etc. La langue vit grâce à ces apports linguistiques, qui la rendent riche et actuelle. Une langue qui ne se modifie pas, qui n’évolue pas, qui n’accepte pas d’apports étrangers, n’est pas une langue. Pour revenir donc à la Tunisie, l’arabe littéraire n’est pas notre langue, car c’est une langue dans laquelle nous ne nous exprimons presque jamais, sauf si vraiment on est obligé à le faire. Il s’agit bien d’une obstination de tous les gouvernants des pays arabes qui veulent s’imaginer une unité linguistique, politique, culturelle et sociale entre tous les pays de culture arabo-musulmane, grâce au seul «élément d’unification» qui serait la langue arabe. Nous savons bien que c’est faux ! Chaque pays arabe a sa propre langue et sa propre culture et ces éléments ne font que discréditer le panarabisme, ce mouvement politique, culturel et idéologique qui vise à réunir et à unifier les peuples arabes, proposant la défense de l’identité arabe et le destin partagé. Tout ça est dépassé et relève du faux‑!
Source: ”Jetsetmagasine” Le 19-05-2011
Tunisie. Le financement des partis en question
Par Imed Bahri
Sous la dictature, il y avait un nombre réduit de partis, pour la plupart satellisés par le gouvernement, qui émargeaient – légalement, mais au prorata de leur allégeance au régime de Ben Ali – sur des financements publics.
Quels financements et selon quels critères? Après le 14 janvier, des dizaines de nouveaux partis ont vu le jour. Leur nombre a déjà dépassé la soixantaine. D’ici l’élection de l’Assemblée constituante, ils pourraient dépasser les 70. Comment ces partis vont-ils financer leurs activités et leurs campagnes? L’Etat a-t-il les moyens de tous les financer? Sur quelle base et selon quels critères? Les apports des membres et les dons des sympathisants doivent-ils être plafonnés? Et si certains de ces partis acceptaient des financements extérieurs? Comment contrôler ces flux de financement? Comment établir un minimum d’équité entre les partis en matière de financement? Ce sont là autant de problèmes que les pouvoirs provisoires devraient régler afin d’assurer la transparence et l’équité, conditions sine qua non d’une élection dont les résultats seraient acceptés par toutes les parties. Pour contribuer au débat national sur cette question, le Centre Kawakibi pour la transition démocratique et le Programme des Nations Unies pour le développement (Pnud), ont organisé, vendredi, une conférence sur «les législations et le financement des partis politique en Tunisie: approches comparatives». Les travaux de la conférence ont porté sur les législations relatives à la réglementation, à l’organisation de l’activité des partis, et à leur financement public et privé, ainsi que sur les mécanismes de suivi et de contrôle de l’Etat vis- à-vis des partis, sans porter atteinte à leurs droits et à leur liberté d’action. Des juristes et des experts, tunisiens et étrangers, des représentants des partis politiques et de la société civile ont pris part à la conférence qui a abouti à des recommandations dans la perspective de l’élaboration de la loi de financement des partis politiques en Tunisie et de la campagne électorale pour l’élection de l’assemblée constituante.
Comment garantir la transparence des financements Lors de la séance d’ouverture, Mustapha Beltaief, membre de la commission d’experts de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique, a souligné que la démocratie nécessite la mise en place de règlements pour l’action politique. Une situation, a-t-il ajouté, qui explique l’importance de la loi dans l’organisation de l’activité des partis et dans la garantie de leur financement en toute transparence. Il a fait aussi remarquer que le grand nombre de partis qui ont émergé en Tunisie est une conséquence normale et saine, qui reflète la soif de l’élite à participer à la gestion des affaires publiques «après des décennies de refoulement et de peur». Mohamed Belhocine, représentant résident du Pnud à Tunis, a mis en exergue, de son côté, le besoin des partis politiques, notamment les nouveaux, d’un financement public, à l’approche de la campagne électorale, relevant la nécessité de tirer profit des législations des pays ayant des traditions démocratiques, en matière de promulgation de lois des partis, dans la mise en œuvre de réformes politiques, particulièrement sur le plan du dialogue national, de l’opération électorale et du développement de la société civile.
Pour un conseil national des partis politiques Mohsen Marzouk, président du comité exécutif du centre Kawakibi, a, pour sa part, appelé à la mise en place d’un conseil national des partis politiques tunisiens qui aura pour mission d’approfondir le dialogue civil pluraliste entre tous les partis et de consolider leurs capacités organisationnelles et de communication. Il a, dans ce contexte, souligné l’importance du pacte républicain dans l’engagement des différentes sensibilités politiques à respecter les règlements juridiques et civils qui défendent le processus de réforme politique. Au cours de la première séance, qui a porté sur «les législations des partis politiques», les interventions ont souligné la nécessité que la loi sur les partis mette en place la plateforme institutionnelle de la transition démocratique, en accord avec les lois électorale, des associations et de la presse. Eric Thiers, conseiller des services de l’Assemblée nationale française, a évoqué l’expérience de son pays, dans le domaine de l’organisation de la vie politique, soulignant l’importance du rôle du cadre juridique dans la l’organisation de la vie politique. Il a insisté sur la nécessité de créer des mécanismes de contrôle de la transparence du financement afin de garantir une compétition équilibrée entre les partis et lutter contre la corruption et les groupes de pression. De son côté, Henady Foued, du Centre Al Qods, a exposé l’expérience de la Jordanie dans l’élaboration d’une loi sur les partis, loi qui a connu deux amendements importants, en 1992 et 2007, et qui «n’a pas pu répondre aux attentes des partis dans l’instauration d’un climat politique démocratique pluraliste», en Jordanie. Traduire : il ne s’agit pas d’avoir des lois – sous le règne de Ben Ali, les Tunisiens en ont été gavés –, mais d’en avoir de bonnes et, surtout, de les mettre en application. Mme Foued a ajouté que les réformes législatives revendiquées par le peuple jordanien, lors des dernières manifestations, ont conduit à la création d’une commission de dialogue national qui va se pencher sur l’élaboration d’une nouvelle loi électorale et une autre pour les partis consacrant leurs droits de bénéficier d’un financement public permanent et équitable.
L’interdiction des financements extérieurs La deuxième séance, qui a porté sur «le financement des partis politiques» a comporté deux interventions. Dans la première, Ingrid Van Biezen, professeur de politique comparée à l’université de Leiden, a insisté sur la nécessité pour l’Etat de créer un mécanisme de contrôle des financements et de la gestion financière des partis, lui permettant de prendre connaissance de l’origine et du volume des aides et des dons accordés aux partis. En parallèle, l’Etat doit prévoir l’interdiction totale des financements provenant de l’étranger et des administrations publiques, ainsi que la sanction des partis qui ne respectent pas la loi ou dont les financements ne sont pas transparents. La deuxième intervention a porté sur «le contrôle des financements des partis par la cour des comptes». Le juge près la cour des comptes de Tunis, Houcine Haj Massaoud, a mis l’accent sur l’obligation pour les partis politiques de présenter un rapport annuel à la cour et qui explique la méthode de gestion des financements publics. Il a souligné la nécessité d’accorder l’indépendance à la cour des comptes afin qu’elle accomplisse sa mission sans contraintes gouvernementales, et de créer une commission nationale de contrôle des financements des partis. La troisième séance de la conférence s’est déroulée dans le cadre de trois ateliers de travail autour du «financement entre le secteur public et du secteur privé», «les comptes et les partis politiques» et «les moyens de l’Etat pour le contrôle des partis».
Source : « Kapitalis » Le 19-05-2011
Lien : http://www.kapitalis.com/fokus/62-national/3978-tunisie-le-financement-des-partis-en-question-.html
Enseignement
La mise et le niveau
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Le système éducatif tunisien est depuis le 16 jusqu’au 21 mai soumis à des enquêtes menées par des organismes internationaux chargés d’évaluer des résultats des élèves tunisiens visant à déduire des conclusions sur le niveau général des élèves et sur le système éducatif suivi en Tunisie. Ces enquêtes seront menées sous les auspices du ministère de l’Education et avec la collaboration du CNIPRE (Centre National d’Innovation Pédagogique et de Recherches en Education). |
Il est à rappeler que ce n’est pas la première fois que ce genre d’enquêtes se fait en Tunisie : Depuis 1999, la Tunisie a participé à cinq évaluations internationales (1999, 2001, 2003, 2006 et 2009), mais les résultats étaient souvent peu probants pour des raisons diverses touchant au système éducatif et à d’autres facteurs socio-culturels bien expliqués dans les rapports respectifs des organisateurs. A son tour, le CNIPRE a mené des enquêtes périodiques à l’échelle nationale dont la première revient à 2004 concernant les élèves de 4è année de l’Enseignement de Base et a porté sur 4 disciplines : les mathématiques, l’arabe, le français et l’éveil scientifique, ce qui a permis de diagnostiquer des lacunes au niveau de l’apprentissage et la progression des acquis des élèves. Ces différentes évaluations visent à l’amélioration du rendement du système éducatif en Tunisie. Les deux organismes internationaux concernés par ces évaluations de 2011 sont TIMSS (Trends in International Mathematics and Siensce Study) qui s’intéressera à l’enseignement et à l’apprentissage des mathématiques et des sciences dans les classes de 4ème et de 8ème années de l’enseignement de base et PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves), une enquête organisée tous les trois ans par l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economique) dans plus de 65 pays dont la Tunisie et qui se penchera sur l’évaluation de l’écrit (lecture), la culture mathématique et scientifique chez les élèves de 15 ans au moyen de tests internationaux communs à tous les pays participants. Le but de ces enquêtes est d’évaluer l’acquisition de savoirs et savoir-faire essentiels à la vie quotidienne au terme de la scolarité obligatoire. Les tests portant sur la lecture, les mathématiques et les sciences se présentent sous forme d’un questionnaire de fond. Les élèves tunisiens sélectionnés doivent passer des tests écrits avec des questions ouvertes ou à choix multiple. À chaque évaluation, un temps d’épreuve plus long est prévu pour le sujet principal par rapport aux autres sujets. Les exercices porteront sur les leçons du programme relatif à chaque niveau et ont pour objectif d’évaluer la capacité de l’élève à utiliser des connaissances scientifiques et mathématiques pour faire face aux défis de la vie réelle. La durée de l’épreuve est fixée à 2 x 36 minutes pour les élèves de 4ème année de base et à 2 x 45 minutes pour ceux de la 8è année. Concernant les élèves âgés de 15 ans qui seront testés par PISA, la durée de l’épreuve est fixée à 2x 60 minutes. Les exercices relatifs à toutes les épreuves sont au nombre de 50 environ. Les résultats de ces différentes évaluations feront l’objet de rapports qui seront publiés par les deux organisateurs internationaux TIMSS et PISA. Des annonces portant le slogan « Soyons dans la course ! » ont été affichées dans les écoles primaires et les collèges pour informer les élèves de ces évaluations et les inciter à y participer. Comparaison Force est de constater que ce genre d’enquêtes effectuées par ces organismes internationaux dans plusieurs pays mèneront à des comparaisons entre les différents systèmes éducatifs dans plusieurs coins du monde et seront d’un grand apport pour les pays où les méthodes d’apprentissage sont encore arriérées ou inefficaces, d’autant plus que les enquêtes comparatives portent sur plusieurs aspects des systèmes éducatifs respectifs, notamment les contenus des programmes officiels, les filières et les disciplines, les méthodes d’apprentissages, l’horaire imparti à chaque activité, le temps scolaire. Selon le CNIPRE, les enquêtes précédentes effectuées en Tunisie par ces mêmes organismes ou d’autres ont permis de tirer des conclusions objectives dont on retient au moins deux concernant les mathématiques : d’abord, l’inexistence dans les programmes tunisiens d’un certain nombre de concepts et de matières figurant dans la plupart des programmes des pays participants ; ensuite, le manque d’initiation des élèves à la résolution des problèmes et à l’utilisation de leurs connaissances dans des situations significatives. Espérons que les évaluations de 2011 seront meilleures que celles des années précédentes où la Tunisie occupait un classement plutôt médiocre par rapport à la moyenne générale. En effet, en 2009, les résultats obtenus par la Tunisie en mathématiques comme en lecture n’étaient pas fameux. En mathématiques, avec un score 401 pour une moyenne 501 ODCE, la Tunisie a vu diminuer sa proportion d’au moins 5 points de pourcentage par rapport à l’enquête PISA 2006. En lecture, elle était classée en dessous de la moyenne avec un score 404, alors que le score OCDE était 493, la Corée était en tête avec 539, le Japon avec 520, la France avec 496, les Emirats Arabes Unis avec 459 et Qatar avec 372. Décidément beaucoup reste à faire pour hisser notre système éducatif au niveau international ! Source: “Le Temps” le 19-05-2011
Tous révolutionnaires, rcédistes : et les khobzistes ?
Par Abdelhamid GMATI Ben Ali est parti, depuis un peu plus de quatre mois. Le peuple tunisien l’a chassé. C’est une certitude. Beaucoup pensent: «Bon débarras, il nous a suffisamment empoisonné la vie». D’autres, insatiables, veulent le voir rapatrié, pour qu’il paie pour ses innombrables crimes. Et ils s’impatientent, soupçonnant, voire accusant, le gouvernement de tergiverser. Et d’aucuns enragent en se disant qu’il se la coule douce, profite de ses milliards volés et se moque de nous. La vérité est tout autre. Rappelons qu’un mandat d’arrêt international a été lancé contre lui, contre son épouse, Leïla Trabelsi, et contre plusieurs de ses proches depuis le 26 janvier, que plusieurs demandes d’extradition ont été faites, que le juge d’instruction du Tribunal militaire permanent de Tunis vient d’entamer l’instruction de l’affaire dans laquelle sont impliqués l’ex président Zine El Abidine Ben Ali, l’ancien ministre de l’Intérieur, Rafik Belhaj Kacem, l’officier de police à la retraite Jalel Boudriga, ainsi que contre le commissaire général de police, Lotfi Zouaoui, ancien directeur de la sécurité publique, et l’ancien directeur des services spéciaux, Rachid Ben Abid, tous deux impliqués dans l’affaire. Au total, dix-huit actions en justice ont été engagées à Tunis contre l’ancien chef de l’Etat. De plus, on apprend que Ben Ali ne peut sortir de l’Arabie Saoudite, ainsi que sa femme et ses compagnons. Il vit très mal son exil. Il suit les événements qui secouent le monde arabe à la télévision, sur Internet et Twitter. Et il enrage au point d’avoir des crises d’«hypoglycémie». C’est dire si le bonhomme est heureux. Mais les Tunisiens ne sont pas heureux, non plus. Ils sont entrés dans l’ère du soupçon. Tout le monde soupçonne tout le monde. On est tous révolutionnaires et tous les autres sont rcédistes, ou, pire, bénalistes. La rue, les réseaux sociaux bruissent de rumeurs, et d’après un sondage de la TV tunisienne «Watanya 1», 75% des Tunisiens estiment que la contre-révolution est en marche. Mais qui sont les contre-révolutionnaires ? Personne et tout le monde. Notre consœur, Sihem Ben Sedrine, rédactrice en chef de Radio Kalima (et passant pour le clan des «béni non-non»), estime que «les caciques de l’ancien régime cherchent à se protéger. Comme il y a une certaine vacance à la tête de la révolution qui n’a pas encore placé ses hommes au pouvoir. Les élites du régime Ben Ali tentent de sauver une partie au moins de leurs privilèges, voire de reprendre le pouvoir politique et économique». Et elle «pointe le système judiciaire et une partie des forces de l’ordre, en particulier l’ancienne police politique, qui seraient, selon elle, toujours contrôlés par les partisans de l’ancien régime».De fait, la justice est lente et manque de communication concernant les affaires de malversations et de corruption ; en particulier concernant les affaires impliquant Ali Seriati, les membres des clans Ben Ali, Trabelsi, Materi et alliés ; jusqu’ici, il n’y eut qu’un procès contre Imed Trabelsi, une affaire de consommation de drogue. Pour les anciens conseillers, ministres et responsables du RCD, un seul interrogatoire a été suffisant pour les garder en prison mais on ne sait pas encore les motifs de leur incarcération. Leurs avocats et leurs proches parents, eux, communiquent et assurent que les dossiers sont encore vides et ne contiennent pas de preuves à charge. Mais du côté des magistrats, rien. On estime que les magistrats sont préoccupés par leur implication dans les affaires de l’Etat et délaissent leurs obligations professionnelles. On citera ce que fait leur association (AMT) sur le bras de fer qu’elle a engagé avec l’Armée nationale. Et on se demande si la justice tunisienne, composée d’hommes qui ont servi le régime, soumise comme elle l’est aux impératifs de la réhabilitation et aux passions de la rue, est en mesure d’assurer un procès équitable et serein à Ben Ali, aux siens et aux anciens responsables malfaiteurs. Certains médias ne sont pas en reste dans la surenchère : soupçonnés, pour certains, d’être manipulés par les politiques, ils se livrent à la chasse aux sorcières (avec de faux documents et des informations tronquées) et se laissent aller au populisme pour des raisons commerciales. C’est à celui qui révélera le plus juteux «scandale». Il est temps d’être sérieux, c’est-à-dire de se montrer digne de la révolution, sans s’improviser porte parole mais en s’engageant à la faire réussir. Et d’abord, il faut se défier de l’exclusion. Parlons des Rcédistes. Les adhérents à ce parti ont, dit-on, atteint le nombre de 2 millions et demi, soit à peu près le quart de la population. On nous dit qu’ils étaient intéressés. OK. Mais qui irait adhérer et militer à un parti sans intérêt, matériel, psychologique, idéologique ou politique ? Soyons sérieux et honnêtes. Disons que ce nombre a été gonflé. Soit. Combien sont-ils en réalité ? 1 million et demi ? 1 million ? 500.000 ? C’est toujours énorme et on ne peut exclure une partie importante de la population. Votre partenaire au travail, au café, votre ami, votre directeur d’hôtel, le paysan du coin, le préposé à la clientèle à la Steg, ou à la Cnss ou ailleurs, est peut-être rcédiste. Vous-mêmes ? Êtes vous sûrs de n’avoir jamais servi ou participé à une activité du RCD ? Ne jetons pas la pierre aux autres. Au cours d’une émission débat à la TV «Watanya 1» à laquelle il était convié, pour une rare fois, Moncef Marzouki, médecin, opposant, exilé et militant, a surpris plus d’un. Lui qui passait pour un membre des «béni non-non» a tenu des propos d’un dirigeant responsable, positif, efficace, clairvoyant, patriote. Il invite tout le monde à combattre la peur, la suspicion, à avoir confiance en nous-mêmes. Il ne faut pas se lancer dans la chasse aux sorcières : combien étaient les malfaiteurs du RCD ? 4, 5, 10.000 ? Laissons la justice faire le tri et son travail. Faisons la différence entre les êtres et les choses. Il y en a d’autres, non-RCD, qui sont à revoir et qui ont commis des choses. Que ceux qui ont acquis des biens, normalement, honnêtement, n’aient aucune crainte. Il n’y a que les biens mal acquis qui soient en cause. Et puis, et puis… Il faut aller de l’avant, politiquement, en donnant la parole au peuple, à travers les élections, en instaurant et en consolidant les institutions, en réhabilitant les corps de métiers, les entrepreneurs, en assurant la cohésion. Alors ? Nous sommes tous, tunisiens, révolutionnaires ou anciens rcédistes, ou islamistes, ou communistes, ou fascistes, ou même maraboutistes. En fait : où sont les khobzistes ? Source: ”La Presse” Le 19-05-2011
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