TUNISNEWS
11 ème année, N°4154 du 13.11.2011
archives : www.tunisnews.net
L’orient Le jour:Le chef de la 3ème force politique reporte son retour en Tunisie Rue 89:Mohamed Abbou : le CPR au gouvernement avec Ennahdha, pour quoi faire ?
AfriqueJet:Tunisie: Ennahdha rassure sur la préservation des libertés individuelles
Adriquinfos:L’Emir du Qatar assisterait à la première séance de la Constituante tunisienne
Europe1:Tunisie : 33% de visiteurs en moins
Kapitalis:Tunisie. Ben Ali et son cercle de corrompus
wmc:Rapport sur la corruption en Tunisie:A quel niveau doivent s’arrêter les procès, jugements et condamnations?
Le Post.fr:A propos de la liberté de « boire de l’alcool et se mettre en tenue légère » en Tunisie sous Ennahdha
Slate Afriquw:La femme tunisienne par Emna Ben Miled: Où en sommes-nous aujourd’hui ?
Le chef de la 3ème force politique reporte son retour en Tunisie
Le riche homme d’affaires tunisien basé à Londres, Hechmi Haamdi, dont la « Pétition populaire » est devenue contre toute attente la 3ème force politique en Tunisie, a renoncé à rentrer samedi dans son pays où il est accusé d’avoir entretenu des liens avec l’ex-président Ben Ali.
Selon son entourage, M. Haamdi a décidé de « reporter » son retour en Tunisie pour marquer son « vif mécontentement » après avoir appris qu’il était nommément mis en cause dans un rapport sur la corruption du régime du président déchu Zine Al Abidine Ben Ali, rendu public vendredi à Tunis.
A l’aéroport de Tunis, plusieurs dizaines de personnes étaient venues pour accueillir M. Haamdi, qui n’est jamais revenu en Tunisie depuis la fuite de Ben Ali en Arabie Saoudite 14 janvier dernier, pas même durant la campagne pour l’élection de l’assemblée constituante le 23 octobre.
« Je suis venue de Gafsa (350 km de Tunis) pour l’accueillir et partager la joie de la victoire », a dit Khadija, 59 ans, « déçue » par le report de la visite de M. Haamdi. La Pétition populaire pour la justice et le développement a obtenu 26 sièges à la nouvelle assemblée, se plaçant derrière le parti islamiste Ennahda (89 sièges) et le Congrès populaire pour la république (CPR/26 sièges), mais devant le parti de gauche Ettakatol (21 sièges). L’homme d’affaires tuniso-britannique, âgé d’une cinquantaine d’années, devait, au cours de son séjour tunisien s’entretenir avec différents responsables politiques de la prise en compte de son programme électoral, à forte connotation populiste, qu’il avait fait connaître à la Tunisie par le biais de la chaîne TV Al-Mustakilla dont il est propriétaire.
M. Haamdi est originaire de la région de Sidi Bouzid (centre) d’où était parti le soulèvement populaire sans précédent qui a conduit à la fuite du président Ben Ali. M. Haamdi a de nombreux sympathisants dans cette région défavorisée où le taux de chômage est important.
Sidi Bouzid a été le théâtre de violences après les élections du 23 octobre dernier, qui selon Ennahda, ont été attisées par des éléments proches de l’ancien régime de Carthage.
(Source : « L’orient Le jour « Le 12-11-2011) Lien ;http://www.lorientlejour.com/category/Derni%C3%A8res+Infos/article/731289/Le_chef_de_la_3eme_force_politique_reporte_son_retour_en_Tunisie_.html
Mohamed Abbou : le CPR au gouvernement avec Ennahdha, pour quoi faire ?
Arrivé deuxième aux élections du 23 octobre avec trente sièges, le Congrès pour la République (CPR) de Moncef Marzouki, est en train de former un gouvernement de coalition avec le parti islamiste Ennahdha (89 sièges) le parti social-démocrate Ettakatol de Mustafa Ben Jaafar (21 sièges).
Les tractations pour la formation du gouvernement devraient aboutir rapidement. Le poste de Premier ministre devrait revenir à Ahmed Jbali, secrétaire général d’Ennahdha. Les leaders des deux autres partis de la coalition devraient logiquement hérités des deux autres postes. La présidence de la République reste âprement disputée.
Mohamed Abbou, numéro deux du CPR, avocat, défenseur des droits de l’Homme et ancien prisonnier politique, s’explique sur les motivations de son parti pour siéger dans un gouvernement aux côtés du parti islamiste.
Thierry Brésillon : Quelle est la nature de l’alliance du CPR et d’Ennahdha ?
Mohamed Abbou : Nous faisions partis tous les deux dumouvement du 18 octobre, comme le PCOT, Ettakatol, le PDP. Le CPR a défendu les prisonniers islamistes, il a soutenu le droit des islamistes à avoir leur parti pour exercer leur activité politique. Mais après la chute de Ben Ali, nous avons commencé à critiquer Ennahdha sur certains points.
Avant les élections, il n’y avait pas de coalition entre nous. Mais après les élections, nous avons besoin d’une coalition pour faire un gouvernement, pour désigner un président de la Constituante, un président de la République, pour rédiger une loi pour organiser les pouvoirs publics. C’est ce dont nous débattons actuellement avec le mouvement Ennahdha. Nos négociations ne vont pas au-delà de la nécessité de trouver un consensus pour mettre en place des institutions.
Au-delà, c’est la Constitution et la Constitution n’est pas l’objet d’une négociation avec le mouvement Ennahdha ou avec un autre parti. Il n’y a pas de projet de société commun, il n’y a pas de projet de Constitution commun…
Quelles sont vos principales positions pour la Constitution ?
Concernant l’article 1er « La Tunisie est un Etat indépendant et sa religion est l’islam », la formule, issue d’un compromis 1956, est ambivalente, on peut comprendre que l’islam est la religion de la Tunisie et/ou celle de l’Etat. Notre point de vue est que l’Etat n’a pas à avoir une religion. Nous proposerons une formule du genre : « Notre identité est arabo-musulmane et ouverte sur d’autres civilisations. » Pour cela nous sommes contents que d’autres partis de gauche nous rejoignent pour défendre cette position.
Il faut insister sur l’idée que l’Etat est civil. Une notion que même Ennahdha partage. Il a signé avec nous la déclaration du mouvement du 18 octobre dans lequel il est question d’un Etat civil, d’un contrôle de l’Etat sur l’édification des mosquées et de l’enseignement religieux dans les écoles publiques. C’est un engagement moral.
La laïcité française, nous n’en avons pas besoin en Tunisie. L’Etat doit conserver le contrôle des mosquées, sinon, ce seront les salafistes qui le prendront.
Mais la grande question ce sera le choix du régime. Est-ce que ce sera parlementaire ou présidentiel ? Nous sommes pour un régime parlementaire, mais où la présidence de la République détient un certain nombre de pouvoirs.
Il faudra aussi être à l’écoute de la société civile. Et bien sûr, dans les commissions il y aura une place pour les experts extérieurs à la Constituante.
Quelle est votre position pour le règlement intérieur de l’Assemblée constituante ?
La question essentielle, c’est la majorité pour les dispositions constitutionnelles. Nous sommes en faveur d’une majorité absolue, et non d’une majorité qualifiée des deux tiers. En revanche, nous réclamons que le projet de Constitution soit ensuite approuvé par référendum, c’est cela qui lui conférera sa légitimité.
Une majorité des deux tiers aboutirait à bloquer la situation. Ennahdha a 41% des sièges. Il est pour un régime parlementaire, les autres sont en faveur d’un régime mixte. Si on doit décider aux deux tiers, on risque le blocage et on ne peut pas compter sur la bonne volonté des gens pour parvenir au consensus.
Le CPR défend l’idée que la Constituante devrait durer deux à trois ans. Comment concilier cela avec la position des autres partis ?
Les autres partis ont pris un engagement moral pour la limiter à un an. Mais déjà nous sommes d’accord au sein de la coalition en train de se former sur le fait qu’il faut entamer des réformes structurelles. Ce qui prendra un peu de temps. La durée de la Constituante, de toute façon, ce sera d’au moins un an et demi.
Les priorités, c’est la lutte contre la corruption, des réformes rapides dans les domaines de la justice et de la police. Pour les reformes économiques, il faut les engager sans attendre, mais elles prendront du temps. La priorité, c’est d’encourager l’investissement dans l’agriculture qui a été ignorée sous Ben Ali.
Comment réformer la police ?
On ne peut pas dire « tout le monde est corrompu » et limoger 50 000 policiers. Il y aura une phase politique au début, en utilisant les procédures administratives pour écarter les plus corrompus et les principaux tortionnaires, et confier les dossiers à la justice. Par la suite il faudra examiner les plaintes. Personne n’est au-dessus des lois. Le gouvernement de transition a déjà arrêté quelques tortionnaires. Malheureusement, cela n’a pas été assez vite et pas assez de cas ont été sanctionnés.
Maintenant le but au ministère de l’Intérieur, c’est qu’il n’y ait plus de corruption. Pour cela il faut améliorer la situation des fonctionnaires. Pour éliminer la torture, si on ôte au policier qui doit mener une enquête judiciaire la possibilité de torturer les gens, il faut lui donner d’autres moyens techniques et juridiques de découvrir la vérité. Nous avons besoin d’un nouveau code de procédure pénale.
Personne ne conteste qu’il faut une police chargée du renseignement, mais il faut qu’elle soit mieux entraînée qu’avant et surtout son rôle n’est pas d’intimider les citoyens, mais de collecter des informations dans le cadre des procédures prévues par la loi. Il faudra une loi pour régir les écoutes téléphoniques judiciaires et les écoutes administratives.
Il y a des idées intéressantes dans les propositions de réforme du ministère de l’Intérieur déjà sur la table. La séparation de la mission de sécurité et de l’administration territoriale va de soi. Il faut aussi que le ministère de l’Intérieur soit soumis à un contrôle parlementaire. Il faudra distinguer la police chargée de l’ordre public et celle qui est chargée du renseignement et la police judiciaire doit être rattachée au ministère de la Justice et sous les ordres du Parquet.
Quelles vos orientations économiques ?
Nous sommes en faveur d’une économie libérale et de l’initiative privée, et notre stratégie est de tout faire pour encourager les investissements internes et externes. Nous avons besoin de devises et surtout de créer des emplois. Nous ne contestons pas les grands choix de Ben Ali. Ce que nous contestons, c’est la corruption. On ne peut pas faire fonctionner une économie libérale avec de la corruption et des gens qui sont au-dessus des lois. Nous allons aussi insister sur la formation pour avoir des cadres moyens, des ouvriers spécialisés afin de développer des activités à plus forte valeur ajoutée. Il faut étudier de près les modalités de l’accord d’association avec l’Union européenne pour déterminer une position concernant le statut avancé. J’étais parmi les Tunisiens qui faisaient du lobbying contre le statut avancé sous Ben Ali, qui à l’époque ne pouvait servir que Ben Ali. Il s’agissait de faire des pressions économiques pour améliorer les droits de l’Homme. Mais a priori, je pense que nous avons besoin de ce statut. Concernant l’aide conditionnée, j’aurais aimé entendre la France prendre une telle position sous Ben Ali. Maintenant la Tunisie va respecter les droits de l’Homme, j’imagine mal Ennahdha ou un autre parti au pouvoir transgresser les droits de l’Homme, puisqu’ils étaient les victimes des violations auparavant. Et aujourd’hui, il y a un peuple qui sait dire « Dégage ».
(Source : « Rue 89 ! Le 12-11-2011) Lien ;http://blogs.rue89.com/tunisie-libre/2011/11/12/mohamed-abbou-le-cpr-au-gouvernement-avec-ennahdha-pour-quoi-faire-225725-0
Tunisie: Ennahdha rassure sur la préservation des libertés individuelles
Le Secrétaire général du Mouvement Ennahdha, parti politique d’obédience islamique vainqueur des élections législatives du 23 octobre, Hamadi Jebali, a souligné au cours d’une réunion, jeudi à Tunis, ‘l’engagement de son parti pour assurer la liberté des Tunisiens, hommes et femmes, en matière d’opinion, d’association, de religion et de croyance’. M. Hamadi Jebali a indiqué que le Mouvement Ennahdha va donner des ‘garanties constitutionnelles en vue de l’application de ces principes’. Il a adressé ce discours rassurant aux professionnels de l’industrie du tourisme qui ont appelé le parti Ennahdha lors d’une réunion organisée, jeudi à Tunis, à clarifier sa position sur les libertés individuelles afin d’apaiser les craintes des touristes européens à l’égard de la situation en Tunisie après la victoire d’Ennahdha aux élections à l’Assemblée constituante. Pour plusieurs participants, la solution rapide pour relancer l’activité touristique est de restaurer la confiance des touristes européens envers la destination touristique de la Tunisie en corrigeant l’image erronée colportée à l’étranger sur l’insécurité dans le pays. Un grand nombre de professionnels ont souligné la nécessité que l’esprit d’ouverture de la Tunisie soit tangible et perceptible sur le terrain et ne pas rester seulement de simples mots, exhortant le Mouvement Ennahdha à ‘s’engager à traduire son discours en action en contrant tous les aspects de la violence véhiculés par certains éléments extrémistes qui se proclament être de Ennahdha’. Parlant des engagements de son parti concernant les activités du tourisme, Hamadi Jebali a indiqué que le mouvement ‘assurera la liberté totale en matière de nourriture, de boisson et d’habillement’, affirmant que: ‘ce sont des libertés individuelles qui ne peuvent être imposées par la force’. Il a ajouté que son parti a préparé un plan d’urgence pour stimuler le tourisme, qui sera présenté à ses partenaires politiques en y associant tous les acteurs du secteur.
(Source : « AfriqueJet » Le 12-11-2011) Lien :http://www.afriquejet.com/ennahdha-tunisie-2011111227096.html
L’Emir du Qatar assisterait à la première séance de la Constituante tunisienne
TUNIS (Xinhua) – L’Emir du Qatar, ainsi que plusieurs leaders arabes et européens assisteront à la séance inaugurale de l’Assemblée constituante tunisienne, prévue pour le 23 novembre 2011, a rapporté samedi la radio tunisienne Mosaïque FM en citant Hamadai Jebali, secrétaire général du Mouvement Ennahdha
M. Jebali a ajouté que la présence de l’Emir du Qatar à cette première réunion aurait été invitée par M. Foued Mebazaa et M. Béji Caïd Essebsi, respectivement Président tunisien par intérim et Premier ministre du gouvernement provisoire tunisien.
M. Ridha Saïdi, membre du Bureau exécutif du Mouvement Ennahdha (Renaissance), majoritaire au sein de la Constituante, a déclaré samedi que la nouvelle composition du gouvernement tunisien sera prononcée dans les quelques jours qui suivent cette première séance de la Constituante.
Selon M. Saïdi, « le Mouvement Ennahdha soutient l’économie de marché et sera en faveur d’une économie libre et à contenu social tout en renforçant l’investissement étranger, l’initiative privée ainsi que le développement des relations économiques avec les partenaires de la Tunisie et l’ouverture sur les marchés asiatiques, américains et africains ».
(Source : « Adriquinfos » Le 12-11-2011) Lien ;http://www.afriquinfos.com/articles/2011/11/12/brevesdafrique-190627.asp
Tunisie : 33% de visiteurs en moins
La chute du tourisme en Tunisie a atteint 33,3% avec quatre millions de visiteurs au cours des dix premiers mois de l’année –contre six durant la même période en 2010–, selon des statistiques officielles. Le ralentissement concerne en particulier les Européens (- 45,1%) qui ont boudé la Tunisie, avec 1,9 million de touristes, selon un bilan de l’Office du tourisme (Ontt) arrêté à fin octobre. Premiers clients avec un million de visiteurs en moyenne par an, les Français n’ont été que 730.000 à prendre cette année des vacances dans ce pays. Les Maghrébins qui ont constitué ces derniers années le plus gros contingent de visiteurs arabes ont également boudé la destination. Les statistiques montrent un repli de 12,9% des Libyens (1,3 millions) et un net recul du nombre de visiteurs algériens (-41%), à peine plus de 500.000 contre un million environ. (Source : « Europe1 » Le 12-11-2011) Lien :http://www.europe1.fr/International/Tunisie-33-de-visiteurs-en-moins-813281/
Tunisie. Ben Ali et son cercle de corrompus
Par Marouen El Mehdi.
Nul ne peut imaginer ce que la mafia de Ben Ali et sa famille puisse s’octroyer illégalement de telles sommes d’argent, biens immobiliers et autres avantages fiscaux et financiers… Le document présenté vendredi aux médias par la Commission nationale d’investigation sur la corruption et la malversation (Cnicm) laisse perplexe. Avant la parution de ce document, très révélateur, on a souvent parlé de quantités d’argent, de biens, de pièces appartenant au patrimoine national, mais ce qui vient d’être révélé a de quoi rendre fou le plus sage des humains. Les voleurs de Carthage
Le rapport de la Commission fait savoir que plus de 10.000 plaintes et dossiers lui sont parvenues, qu’elle a examiné près de la moitié de ces requêtes et a remis 320 dossiers à la justice. Elle a aussi organisé plus de 120 audiences dont certaines sont filmées et conservées dans l’archive nationale et mises à la disposition du nouveau gouvernement pour toute fin utile.
Toutefois, les membres de la Commission n’ont pas omis de préciser que leur mission ne fut guère une promenade de santé et qu’ils ont été, pour une bonne période de leur tâche, sous une grosse pression de la part de quelques parties encore concernées par les détails du rapport. Les crimes concernent en premier lieu les secteurs de l’immobilier, les terrains agricoles, les biens publics, les transactions et appels d’offres publics, les méga projets, la privatisation, les communications, l’audio visuel, les secteurs financier et bancaire, les autorisations administratives, la douane et le fisc, l’administration, les recrutements, la recherche scientifique et l’orientation universitaire et les corps des magistrats et des avocats.
Une bonne partie du rapport est consacrée au président déchu, aux membres de sa famille, à ses proches et à certains hauts fonctionnaires de l’Etat. En parcourant les affaires et les chiffres, certains noms reviennent dans la plupart de ces dossiers. Nous en citons particulièrement le président, son épouse, leur gendre Sakhr El Matri, Mongi Safra, l’architecte de tous les coups bas, Belhassen Trabelsi, Imed Trabelsi et bien d’autres noms connus.
Celui de l’insubmersible Abdessalem Jrad, l’actuel S.G. de l’Union générale tunisienne du travail (Ugtt) y figure également dans plusieurs affaires. Le rapport ne cite pas souvent les noms en entier, mais les initiales permettent de reconnaître les fautifs.
Le rapport revient, en détail, sur les objets et les sommes d’argent et de devises retrouvés au Palais présidentiel de Carthage et celui de Sidi Dhrif, construit sur un terrain exproprié illégalement par le président déchu. Le réaménagement du terrain a coûté au ministère de la Défense nationale une perte de 4 millions de dinars. On a trouvé dans ces palais un peu tout : argent, objets en or et diamant, statuettes et objets d’art et de patrimoine, de divers objets tels… tenez-vous bien, près d’un millier de chaussures signés (Yves Saint Laurent)… Mais aussi des centaines de réfrigérateurs, de téléviseurs, et autres équipements électroménagers et ménagers, dans leurs emballages. «Les caves du palais ressemblaient au dépôt d’une grande surface», dira Néji Baccouche, membre de la commission. La part du lion Sakher El Matri et BelhassenTrabelsi
Volet immobilier, c’est Sakher El Matri et BelhassenTrabelsi qui se taillent la part du lion. Le gendre bien aimé de la famille s’est octroyé des centaines de terrains pour les revendre ou y bâtir des méga projets tels la banque Zitouna, les dépôts de voitures de la société Ennakl à La Goulette en plus d’autres propriétés, sociétés et des quartiers en entier. Le rapport revient sur les malversations et les tours de passe-passe employés pour avoir toute cette fortune : Sakhr et ses «méthodes» pour entrer dans le capital de Tunisiana, Attijari Bank …
Le volet financier met en exergue les malversations de BelhassenTrabelsi et les énormes prêts bancaires octroyés sans fournir de garanties. Plusieurs banques sont citées dont la Banque de l’Habitat pour des prêts sans garanties d’une valeur de 231 millions de dinars en faveur du président déchu et de ses proches, la Banque nationale agricole (Bna) pour des prêts «offerts» à la même famille d’une valeur de 323 millions de dinars, la Stb, la Bft et d’autres banques figurent également sur la liste.
Il faut dire que les établissements bancaires notamment publics ont été victimes de chantage exercé par la Banque centrale de Tunisie (Bct) qui leur impose parfois de renoncer à leurs dettes impayées. Il convient de préciser ici que cet établissement n’a pas été très coopératif avec la Commission, car il a refusé, qui plus est par écrit, de répondre à l’une de ses requêtes concernant une banque tunisienne basée en France, probablement l’Union internationale de banques (Uib). Position jugée étonnante émanant d’une personne comme Mustapha Kamel Ennabli, l’actuel gouverneur de la Bct, ancien haut responsable de la Banque Mondiale et qui est censé œuvrer pour la transparence financière.
Les mystères de l’Atce
Une bonne partie du document fut réservée à l’Agence tunisienne de la communication étrangère (Atce) qui a dépensé des centaines de milliards pour servir les intérêts du pouvoir en place par l’intermédiaire d’institutions de presse, de communication et de publicité, ainsi que d’un certain nombre de journalistes tunisiens et étrangers en plus de l’argent versé au Rcd, l’ex-parti au pouvoir. On y trouve les initiales des journalistes concernés et certains sont facilement reconnaissables à l’instar du fameux B.B. (Borhane Bsaies?) qu’on a suivi plusieurs fois sur les plateaux de quelques chaines satellitaires ou une certaine HBO (Houda Ben Othman?), la représentante de l’Atce à Bruxelles.
De même, on y découvre les basses transactions avec des entreprises étrangères de communication: Image 7, Arab Media, journal ‘‘Al Arab’’, PRP, AZ Consulting, Washington Media Group et d’autres. Le rapport revient également sur les dépassements et la gestion de la boîte de production audio-visuelle Cactus Prod, fondée par BelhassenTrabelsi et dirigée par Sami Fehri. Le rapport, qui souligne la concentration du pouvoir décisionnel entre les mains de Ben Ali, cite des exemples d’abus de pouvoir au profit de la famille de ce derniers, ses proches et alliés, ainsi que ses interventions dans tous les secteurs, dont celui de l’octroi des permis de vente de boissons alcoolisées (ça ne s’invente pas, mais ressemble tant au personnage), d’exportation du ciment et, même, de l’orientation universitaire.
Le rapport comporte, par ailleurs, des copies de documents qui attestent de toutes ces malversations ainsi que des photos, des tableaux et des rapports divers. (Source : « Kapitalis » Le 12-11-2011) Lien :http://www.kapitalis.com/fokus/62-national/6808-tunisie-ben-ali-et-son-cercle-de-corrompus.html
Rapport sur la corruption en Tunisie:A quel niveau doivent s’arrêter les procès, jugements et condamnations?
De l’or, beaucoup, de quoi faire deux souks de bijouterie, pas moins de 1.500 pièces de joaillerie saisies, et qui pèsent lourd. L’un des bracelets (cela doit être un Migyas) que nous avons saisis pèse près de 3,950 kg… Pire que tout, la Commission a découvert à Sidi Dhrif 57 pièces archéologiques dont une pièce datant de 2800 ans avant J.-C, a déclaré, sur un ton mordant et presque théâtral Néji Baccouch, membre de la Commission sur la corruption et les malversations lors de la conférence de presse organisée vendredi 11 novembre 2011 pour annoncer les conclusions définitives auxquelles est arrivée cette commission. Ben Ali n’a pas fait dans la dentelle, il était maître de tout et avait pouvoir de vie ou de mort. Ce qui, d’ailleurs, nous interpelle quant au niveau des responsabilités et comment elles doivent êtres déterminées. Car, si nous partons du principe que ce dictateur détenait tout, décidait de tout et agissait en seigneur et que les autres ne pouvaient qu’obéir, il va falloir que les «crimes, infractions» passent au second, troisième et même quatrième degré.
Ceci étant, nombreux sont ceux qui ont fait du zèle et qui se placent en deuxième, troisième et quatrième lignes. D’où une question très importante: à quel niveau les procès, jugements et condamnations doivent s’arrêter? Qui devrait servir d’exemple et qui devrait profiter de la clémence des «nouveaux, anciens» décideurs, celle du peuple ou de la justice?
«Illi ma chathit hazzit kmamha» (Celle qui n’a pas dansé a, au moins, levé ses manches) disent les anciens… Il faut aujourd’hui avoir le courage de dire “arrêtons le massacre et avançons!“. Un grand nombre de dossiers est entre les mains de la justice. Nos administrations, hauts cadres, institutions publiques, secteur privé doivent retrouver leur sérénité et reprendre le contrôle de leurs vies et surtout reprendre le pouvoir de décisions pour faire bouger les choses: «Je suis choqué, a déclaré, un consultant aux Nations unies, aucun cadre administratif ne veut prendre de décisions dans votre pays et on refuse même de signer des PV, ne me dites pas qu’il me revient à moi de signer des documents qui concernent des entreprises et des sociétés tunisiennes»
«Il y a une instance qui vient d’être créée et qui ressemble à celle de la Commission d’investigation sur la corruption et les malversations. Il ne faut en aucun cas faire valoir l’impunité, mais ce pays, je le dis avec beaucoup de conviction, ne peut pas souffrir des tensions continuelles entre les individus et les groupes. Il faut que, d’une part, chacun paye pour le délit qu’il a commis et que, de l’autre côté, la Tunisie puisse redémarrer pour que chacun y retrouve sa place en toute sécurité», a indiqué Pr Abdelfattah Amor, président de la Commission.
Pas d’inquisition mais pas de réconciliation aux dépens des individus lésés ou des intérêts de l’Etat. Intérêts qui ont été complètement assimilés à ceux de Ben Ali et Co. L’ATCE, une poule aux œufs d’or
L’abus de pouvoir a revêtu plusieurs formes. A commencer par la mainmise sur les terres agricoles appartenant à l’Etat. «Normalement, on doit classer les demandes des promoteurs intéressés selon l’importance de l’investissement, celle du nombre d’emplois et de l’ordre de grandeur du projet. Ces demandes sont soumises au président de la République, lequel prend seul la décision d’accorder son assentiment ou son refus. A l’examen des propositions. Il décide selon l’intérêt qu’il peut lui-même tirer du projet, les liens de parenté ou d’amitiés en désignant un candidat qui n’a pas les atouts objectifs selon les critères de la Commission de sélection», explique Néji Baccouch. Ben Ali est même intervenu au profit d’un complexe immobilier à Sfax parce qu’appartenant à un ami à lui, étranger et a exigé de la municipalité de Sfax d’approuver sa demande de construire sur une hauteur de 45 m.
Pareil pour les quotas des voitures, c’est lui qui décide en premier et dernier ressort tout comme pour la vente des produits alcooliques. Les hôtels qui demandent des autorisations de servir des boissons alcooliques sont soumis aux caprices du président de la République converti en distributeur d’alcool.
L’exportation du ciment dépend aussi des décisions du président homme d’affaires. Il décide des quantités et des destinations. Pire, l’un des beaux-frères du président avait un contrat avec une entreprise française laquelle versait une commission à Ben Ali dans un compte bancaire à Dubaï, à chaque fois qu’elle gagnait un marché en Tunisie.
La CNAM a été instrumentalisée pour servir à titre exclusif la belle-mère de l’ancien président, prise en charge par son fils. Toutes les dépenses étaient assurées par la Caisse nationale de l’assurance maladie, à Tunis et à l’étranger y compris celles du médecin accompagnateur et des frais de transport aérien qui peuvent atteindre les 45.000 euros par déplacement.
L’orientation universitaire n’a pas non plus échappé à l’interventionnisme présidentiel. Des ministres, hauts responsables ou présidents d’organisations nationales en appellent au président pour changer les orientations universitaires de leurs proches. A titre d’exemple, une demande adressée par Abdesslem Jrad, secrétaire général de l’UGTT à Zine El Abdidine Ben Ali pour autoriser la réorientation de l’un de ses proches.
Le trafic dans le secteur immobilier a dépasse les limites du rationnel. Ben Ali et ses proches ont dépouillé la zone des Berges du Lac de près de 77 hectares. Sidi Bou Saïd, La Marsa et Carthage, Cité les Pins et Tazarka n’ont pas échappé à la fièvre «pillarde» de l’ancien chef de l’Etat et de sa belle-famille, et ce au dinar symbolique. A Hammam Sousse, le m2 a été vendu 10 dinars à son neveu qui l’a ensuite revendu et y a gagné pour près de 18,6 MDT. Pareil pour la Baie des Anges à El Kantaoui, 35 hectares ont été acquis pour la valeur de 3,5 MDT et revendus pour la valeur de 30 MDT.
Des personnalités étrangères ont profité de la manne Ben Ali et ont acquis des biens immobiliers en Tunisie au dinar symbolique.
L’ATCE a été l’arme de la propagande médiatique de Ben Ali à l’international. Elle s’est servie des deniers publics pour redorer le blason du régime et celui de son artisan et ses acolytes. Ainsi, la représentante -une pseudo-journaliste- qui a représenté l’ATCE à Bruxelles au mois de juin 2006, a reçu près de 570.470 dinars en l’espace de 4 ans avec une prise en charge totale de toutes ses dépenses, du loyer à l’électricité et l’eau et même l’Internet. De quoi rendre jalouse plus d’une super-compétence tunisienne dans le domaine du lobbying. Un autre journaliste, cette fois-ci en France, a reçu près de 860 mille dinars, un consultant français, 988.627 mille dinars et un haut cadre à l’Office national de l’Artisanat, plus de 3 millions de dinars.
Des millions de dinars ont été ainsi investis par l’ATCE dans des missions ponctuelles et des contrats avec des journalistes tunisiens et étrangers dans le but de valoriser l’image de marque d’un régime qui avait, depuis des années, perdu sa crédibilité au niveau national et à l’international… Des millions de dinars jetés à la mer alors que le pays était miné de l’intérieur… Des malversations et des fraudes qui rappellent que la Tunisie perd chaque année 1,5 point de croissance à cause de la corruption.
On ne peut plus revenir sur le passé mais nous devons veiller à préserver l’avenir. La vigilance de toutes les parties concernées par le renforcement des bonnes pratiques et le renforcement de la transparence, est de mise. La clarification de toutes les responsabilités, qu’elles soient institutionnelles, administratives ou entrepreneuriale, l’est autant.
Plus de peur, plus de passivité, tout acte de corruption doit être dénoncé, d’où qu’il vienne et quel que soit celui qui l’a commis. Il y va de notre avenir et celui de notre pays, car avec un président qui ne s’occupait que de ses propres affaires, il était normal que les affaires du pays soient marginalisées à tel point que le peuple en est arrivé à boire dans des marécages…
(Source ; « wmc » Le 12-11-2011) Lien :http://www.webmanagercenter.com/management/article-112482-rapport-sur-la-corruption-en-tunisie-a-quel-niveau-doivent-s-arreter-les-proces-jugements-et-condamnations
A propos de la liberté de « boire de l’alcool et se mettre en tenue légère » en Tunisie sous Ennahdha.
Par Christian DELARUE
A propos de la liberté de « boire de l’alcool et se mettre en tenue légère » en Tunisie sous Ennahda. Le parti islamiste tunisien a cru bon de rendre public cette précision qu’en Tunisie les touristes comme les tunisiens et tunisiennes pourront continuer à consommer de l’alcool et à se mettre en bikini sur les plages. Pas en monokini ?
Cette concession faite sur le bout des doigts sur la rigueur des mœurs est nécessaire au tourisme, principale manne financière du pays. L’association entre rigueur des mœurs et islamisme est telle qu’une telle précision était nécessaire. On se demande même si elle vaut pour tout le pays ou seulement pour les zones touristiques. D’ailleurs, il peut paraitre à priori surprenant de mettre sur le même plan ces deux libertés car l’une peut déboucher sur un excès et pas l’autre. Mais c’est un point très secondaire.
On a beau critiquer – et à raison – les effets du capitalisme dans la publicité, dans les médias en terme de propagation des stéréotypes sexistes, et des excès en tout genre dont la consommation d’alcool, de cigarettes, etc.. il n’en demeure pas moins, que massivement, un refus apparait dès qu’une règle est posée ou semble pouvoir être prise pour les interdire. L’idée de revenir à une période austère est refusée. Avant 1968, dans les pays comme le Portugal, l’Espagne, l’Italie, la Grèce, la France le nudisme était interdit et la séduction stigmatisée. Ces pays du sud de l’Europe ont tous connu des dictatures conservatrices (Salazar, Franco, Mussolini, Colonels, Pétain). Mais sur cet aspect, c’est bien la religion – catholique le plus souvent – qui pesait lourdement sur les libertés et sur les mœurs. La religion diffusait une culpabilisation forte du charnel et du libidinal qui amputait l’individu, peu informé par ailleurs sur la sexualité de l’autre sexe, de plaisirs pas nécessairement malsains.
De ce point de vue, 1968 a donc créée une rupture par rapport à l’ordre ancien même si la libération a été progressive. Sur la Côte d’Azur et dans certaines zones avant-gardistes, la rupture est antérieure à 1968 mais dans les contrées plus reculées il a fallu plusieurs années pour débrider les comportements.
On a reproché à la période post 68 d’avoir « tordu le bâton dans l’autre sens » en autorisant la « licence » (drogue), le polyamour, le sexisme. Si cela est exact, il convient d’en mesurer la durée car cette période fut relativement courte. Par contre le capitalisme a lui bien rebondi sur mai 68 en récupérant à son profit la libération des mœurs. Il a marchandisé l’érotisme qui en 68 était « champêtre ». Les choses ont changé. Nous avec. Et on voit mal aujourd’hui comment ne pas accepter pour partie au moins cette marchandisation. Si les altermondialistes luttent contre la marchandisation du monde, notamment celle de la prostitution, il n’entendent pas pour autant revenir à la période austère de jadis.
Entre libération des mœurs austères et rigides et aliénation totale dans le consumérisme marchand une voie est possible. C’est à chacun et chacune selon son parcours de la tracer. Il n’y a pas de modèle. D’autant qu’un même individu peut évoluer dans son propre parcours. Il est donc exclus qu’il y ait de la répression « virile » contre les femmes, les homosexuels, les « hommes doux » stigmatisés par les machistes. Il faut combattre la répression tant contre les femmes « trop libres » que contre celles « trop prudes ». A l’évidence des préjugés doivent encore tomber.
(Source : « Le Post.fr » Le 12-11-2011) Lien :http://www.lepost.fr/article/2011/11/12/2635927_a-propos-de-la-liberte-de-boire-de-l-alcool-et-se-mettre-en-tenue-legere-en-tunisie-sous-ennahdha.html
La femme tunisienne par Emna Ben Miled: Où en sommes-nous aujourd’hui ?
Sana Sbouai
Les femmes tunisiennes se mobilisent depuis quelques semaines dans la rue, les universités et les associations pour assurer l’inscription de leurs droits dans la nouvelle Constitution. Emna Ben Miled, universitaire et auteur du livre, Les racines bibliques du voile, donne son point de vue sur la situation actuelle de la femme en Tunisie. Des propos d’Ennahdha à la question du port du voile, l’écrivain tente d’aborder ces sujets sans idées reçues.
Le départ est clair : «la femme tunisienne a une place avancée par rapport aux femmes du monde arabe, elle n’acceptera pas les retours en arrière qu’on veut lui imposer.» Une fois cette idée annoncée on se dit que c’est bon, qu’il n’y a rien à craindre, que tout ira pour le mieux. Emna ben Miled est optimiste. Pourquoi alors ne le serions-nous pas ? Elle connaît bien la Tunisie, elle maîtrise la question de la femme, on peut donc se fier à elle et à son avis.
«Le problème c’est qu’on doit se battre contre ce mouvement qui nous tire en arrière et que de ce fait, on dépense de l’énergie autour de questions qui auraient déjà dû être réglées. Et qui stagne, recule.»C’est à ce moment là que les certitudes commencent à s’effriter.«Nous avons une année de chantier devant nous, il va falloir défendre nos droits.» Et il suffit d’entendre son ton décidé pour savoir qu’elle ira jusqu’au bout du combat.
Sur la question de l’adoption, par exemple, Emna Ben Miled est pour la création d’associations de protection de l’enfant, pour la création de collectifs et de commissions au sein de la Ligue des Droits de l’homme. Pour ce qui est de la polygamie, clairement, elle considère cet argument du parti Ennahdha comme «de la vente de rêve religieux et de fantasme. Les Tunisiens sont très croyants et avec ça, on leur vend le fantasme du paradis musulman.» De fait, cette idée n’est pas réalisable, les ressources financières des Tunisiens n’ayant rien à voir avec celles des Saoudiens par exemple. L’autre argument démontant la possible mise en pratique de cette idée est le Code du Statut Personnel qui a instauré la monogamie il y a plus de 50 ans. «Les Tunisiennes ont donc vécu dans un certain état d’esprit et ça ne changera pas.» Et puis il y a la question du voile et de la Burqua qui obsède tout le monde. «Il y a effectivement une recrudescence du port du voile. Mais ça vient simplement du fait que pendant 23 ans il était interdit de le porter puisque Ben Ali était contre. D’un point de vue personnel cette recrudescence me chagrine car je me positionne en tant qu’historienne : ma mère fait partie de la génération des femmes qui se sont dévoilées, alors que ma fille fait partie de la génération des filles qui remettent le voile. C’est un retour en arrière.»
Finalement pour elle, le problème est avant tout économique : «La Tunisie est un pays pauvre qui risque de se faire acheter à coup de pétrodollars par l’Arabie Saoudite qui veut exporter son idéologie wahhabite.» Bourguiba a été un rempart contre cette idéologie. Puis ce rempart est tombé avec Ben Ali et le wahhabisme est entré en Tunisie via les télévisions satellitaires. «Sous une dictature on ne regarde pas les télévisions nationales, on ne regarde que les télévisions étrangères.» On y retrouvait le même discours simpliste qui se répétait indéfiniment : la femme doit rester au foyer, elle doit être voilée, elle doit obéir, accepter la polygamie, accepter la violence, voiler ses petites filles… «Le problème c’est que dans la réalité tunisienne, cette idéologie était impossible du fait de la loi tunisienne.»En effet le Code du statut personnel, avancée majeure dans le droit social, place la Tunisie en pays avant-garde à bien des niveaux. «Et en ce moment, un mouvement social se lève dans toute la société tunisienne pour défendre ce Code». Effectivement on se rend compte dans la rue comme en discutant avec les gens que les femmes comme les hommes de Tunisie tiennent à leurs droits et que l’on est loin du péril islamiste que beaucoup veulent coller sur le dos du pays. Cette vision déformée de la réalité, Emna l’explique facilement:
«Les Français et d’autres nous voient de l’extérieur, sans entrer dans le pays et discuter avec les gens, sans comprendre la langue. Par ailleurs ils font une étude en surface de la réalité sans approfondir leurs recherches. Et puis on sent aussi un problème avec l’Islam qui vient peut-être du fait qu’il y a un manque de spiritualité en Occident.»
Source : «Slate Afriquw » Source :http://blog.slateafrique.com/tawa-fi-tunis/2011/11/11/la-femme-tunisienne-par-emna-ben-miled-ou-en-sommes-nous-aujourdhui/