13 janvier 2012

TUNISNEWS

11 Úme année, N°4214 du 13.01.2012


Reporters sans frontiÚres adresse une lettre aux nouvelles autorités tunisiennes

La Croix: En Tunisie, la banque Zitouna veut vivre pour l’économie du pays

Courrier international: La presse subit les dérives autoritaires du nouveau pouvoir

WMC: Marzouki Ă  Kasserine… Non Ă  la rĂ©bellion contre les symboles de l’Etat?

Maghreb Emergent: Tunisie – Les appels de Marzouki et de Ghannouchi Ă  la fusion avec la Libye font dĂ©bat

La Croix: La Tunisie fait la lumiÚre sur son passé

WMC: Tunisie : “Nous pouvons atteindre 14 millions de touristes“, affirme Elyùs Fakhfakh

Kapitalis: Tunisie. Un front centriste autour du Pdp pour quoi faire?


A l’occasion du premier anniversaire de la rĂ©volution tunisienne, Reporters sans frontiĂšres adresse une lettre aux nouvelles autoritĂ©s tunisiennes dans laquelle l’organisation fait part de ses inquiĂ©tudes.


 

Moncef Marzouki, Président de la République

Hamadi Jebali, Premier ministre

Mustafa Ben Jafar, PrĂ©sident de l’AssemblĂ©e constituante

Mesdames et Messieurs, membres Ă©lus de l’AssemblĂ©e constituante

Le 12 janvier 2012, Tunis,

Vous, autoritĂ©s nouvellement Ă©lues par la volontĂ© du peuple, Ă  l’issue du premier scrutin dĂ©mocratique en Tunisie depuis plus d’un quart de siĂšcle, vous ĂȘtes les garants des acquis de la rĂ©volution, qui s’est soldĂ©e par le dĂ©part de Zine el-Abidine Ben Ali le 14 janvier 2011. Nous croyions fondamentalement que la libertĂ© d’expression et la libertĂ© d’information sont au cƓur de l’avenir dĂ©mocratique de toute nation. Si ces principes sont devenus une rĂ©alitĂ© dans la Tunisie d’aprĂšs-Ben Ali, iI est de la responsabilitĂ© de chacun de les prĂ©server.

Depuis plusieurs mois, grĂące Ă  son bureau dans la capitale, Reporters sans frontiĂšres suit les Ă©volutions du champ mĂ©diatique tunisien, Ă  Tunis, mais Ă©galement dans les rĂ©gions, ainsi que les difficultĂ©s liĂ©es Ă  son renouvellement, notamment dans le domaine de l’audiovisuel. Il est Ă  souligner que les premiĂšres Ă©lections libres en Tunisie ont Ă©tĂ© couvertes par des chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision qui existaient du temps de l’ancien prĂ©sident, prĂ©dateur de la libertĂ© de la presse. Les dispositions lĂ©gislatives adoptĂ©es rĂ©cemment devraient permettre une ouverture du secteur pour davantage de pluralisme.

Consciente de l’importance de la crĂ©ation de cadres juridiques solides pour les mĂ©dias, Reporters sans frontiĂšres a Ă©galement suivi les travaux de rĂ©daction des projets de lois et rendu un avis consultatif sur le code de la presse Ă  la sous-commission mĂ©dias dirigĂ©e par Ridha Jenayah et Ă©manant de la Haute Instance pour la rĂ©forme, la transition dĂ©mocratique et la prĂ©servation des acquis de la rĂ©volution. Des remarques formulĂ©es par le comitĂ© juridique de l’organisation ont Ă©tĂ© retenues dans le projet de loi, adoptĂ© par le gouvernement de BĂ©ji CaĂŻd Essebsi, Ă  la veille des Ă©lections pour l’AssemblĂ©e constituante.

Si certaines avancĂ©es ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es dans le domaine lĂ©gislatif et avec la crĂ©ation de nouveaux mĂ©dias, Reporters sans frontiĂšres s’inquiĂšte du fait que la pression sur les journalistes et les mĂ©dias se soit accentuĂ©e au cours des derniers mois. Le slogan que Reporters sans frontiĂšres avait choisi en octobre dernier pour l’inauguration de notre bureau Ă  Tunis : ‘Libres jusqu’à quand ?’ nous semble particuliĂšrement d’actualitĂ©.

Les violences policiĂšres qui ont eu lieu le 3 janvier dernier Ă  l’encontre de deux journalistes, ainsi que celles du mois de juillet et de mai 2011 sont extrĂȘmement prĂ©occupantes. Elles ne sont pas sans nous rappeler les mĂ©thodes policiĂšres et sĂ©curitaires rĂ©pressives d’une Ă©poque que tout un chacun pensait rĂ©volue. Le ministĂšre de l’IntĂ©rieur doit ouvrir de maniĂšre systĂ©matique des enquĂȘtes sur les agressions commises par ses agents contre des professionnels de l’information. Leurs conclusions doivent ĂȘtre rendues publiques. Par ailleurs, des sessions de sensibilisation des forces de l’ordre au travail des journalistes (et vice-versa) devraient ĂȘtre organisĂ©es en partenariat avec les organisations de dĂ©fense de la libertĂ© de la presse en Tunisie.

En outre, les rĂ©centes nominations Ă  la tĂȘte des mĂ©dias publics, annoncĂ©es par le Premier ministre le 7 janvier dernier, en contradiction avec les dispositions prĂ©vues par l’article 19 du dĂ©cret loi n°2011-116 du 2 novembre 2011, constitue une violation flagrante de l’indĂ©pendance des mĂ©dias. Nous attendons que le gouvernement fasse immĂ©diatement marche arriĂšre et annule la nomination des rĂ©dacteurs en chef et directeur de l’information. En outre, si le Premier ministĂšre dispose du droit de gĂ©rer les nominations administratives, nous regrettons qu’il ne soit pas penchĂ© en prioritĂ© sur la mise en place de la Haute AutoritĂ© indĂ©pendante de la communication audiovisuelle, comme l’énonce le dĂ©cret de novembre dernier. La tentative d’interdiction de la publication, le 10 janvier 2012, d’une enquĂȘte de l’hebdomadaire El Oula sur d’éventuels avantages financiers perçus, dans le passĂ©, par le nouveau PDG de l’Etablissement de la tĂ©lĂ©vision tunisienne, sur pression de ce mĂȘme AdnĂšne Khedr, ne fait que renforcer nos inquiĂ©tudes.

De mĂȘme, si l’Agence tunisienne de communication extĂ©rieure (la fameuse ATCE) a officiellement gelĂ© ses activitĂ©s, elle reste nĂ©anmoins une structure destinĂ©e Ă  interdire la distribution de certains journaux dans le pays… comme du temps de Zine el-Abidine Ben Ali. Ainsi, rĂ©cemment deux hebdomadaires français (L’Express et Le Nouvel Observateur) n’ont pu ĂȘtre distribuĂ©s en Tunisie du fait de la reproduction de reprĂ©sentations du ProphĂšte dans ces deux publications. Les autoritĂ©s doivent apporter des Ă©claircissements relatifs Ă  la mise en place, ou non, d’un mĂ©canisme de censure prĂ©alable. Pratique qui constituerait un retour Ă  des pratiques tristement cĂ©lĂšbres.

Reporters sans frontiĂšres tient Ă©galement Ă  exprimer son inquiĂ©tude concernant les risques que la montĂ©e de l’extrĂ©misme religieux fait courir sur la libertĂ© de la presse en Tunisie. Des mouvements salafistes ont recours Ă  un certain nombre de techniques d’intimidations pour dĂ©courager les journalistes qui veulent traiter de sujets relatifs Ă  la religion, n’hĂ©sitant pas Ă  faire pression sur des mĂ©dias. Le procĂšs intentĂ© contre la chaĂźne Nessma et son principal actionnaire, en octobre dernier, suite Ă  la diffusion du film PersĂ©polis, ainsi l’agression, le 11 janvier 2012, de SoufiĂšne Ben Hamida, journaliste de la chaĂźne, qui avait dĂ©jĂ  vu sa voiture taguĂ©e du mot « mĂ©crĂ©ant », montrent que les journalistes et les mĂ©dias tunisiens ont plus que jamais besoin que les autoritĂ©s se placent en faveur de la libertĂ© d’expression et du droit pour les journalistes Ă  pouvoir faire leur travail sans ĂȘtre inquiĂ©tĂ©s.

Il est plus que jamais temps que les nouvelles autoritĂ©s prennent leurs responsabilitĂ©s face Ă  l’ensemble de ces problĂšmes. Elles doivent envoyer un signal fort Ă  tous ceux qui bafouent la libertĂ© d’expression et la libertĂ© des journalistes Ă  pouvoir informer en toute indĂ©pendance. Au-delĂ  des polĂ©miques, des questions politiques et des convictions religieuses individuelles, la libertĂ© d’expression, en tant que premier acquis de la rĂ©volution, doit faire l’objet d’un consensus et ĂȘtre protĂ©gĂ©e par tous. Elle est l’affaire de tous. Le point d’entrĂ©e vers la libertĂ©. Le point de retour vers la dictature.

Reporters sans frontiĂšres reste Ă  vos cĂŽtĂ©s pour faire de ces dĂ©fis d’aujourd’hui des rĂ©alitĂ©s de demain. Restants Ă  votre disposition pour discuter de maniĂšre prĂ©cise et dĂ©taillĂ©e des points soulevĂ©s dans ce courrier, nous vous prions d’agrĂ©er, Mesdames, Messieurs, nos plus sincĂšres salutations dĂ©mocratiques,

Jean-François Julliard

Secrétariat général de Reporters sans frontiÚres

Source: ”TUNISCOPE” Le 12-01-2012

Lien: http://www.tuniscope.com/index.php/categorie/actualites/tunisie/reporters-520917


En Tunisie, la banque Zitouna veut vivre pour l’économie du pays


 

Par Camille Le TALLEC, Ă  Tunis

Un an aprÚs la chute du régime de Zine El Abidine Ben Ali, une procédure de confiscation des entreprises appartenant à ses proches est en cours.

Les entreprises concernées, qui ont traversé des moments critiques, tentent de redresser la barre.

C’est un homme qui doit Ă  la rĂ©volution l’une des missions les plus complexes de sa longue carriĂšre de banquier. Le 21 janvier 2011, Slaheddine Kanoun Ă©tait nommĂ© administrateur provisoire de la banque Zitouna par la Banque centrale de Tunisie (BCT). Une semaine plus tĂŽt, le prĂ©sident Zine El Abidine Ben Ali avait fui en Arabie saoudite. Parti au Qatar, son gendre, Sakhr El Materi, avait quant Ă  lui abandonnĂ© ses responsabilitĂ©s au sein de ses nombreuses entreprises, notamment la Banque Zitouna, dont il dĂ©tenait 87 % du capital.

Le mandat d’un an de Slaheddine Kanoun arrive bientĂŽt Ă  Ă©chĂ©ance. Il pourrait ĂȘtre reconduit, mais ne s’y attend pas : l’État doit rĂ©cupĂ©rer de façon imminente les parts de capital dĂ©tenues par Sakher El Materi. Car la banque Zitouna fait, depuis mars 2011, l’objet d’une procĂ©dure de confiscation. « J’ai rempli ma mission,assure d’ailleurs Slaheddine Kanoun :sauver la banque. »

« Les premiers jours ont Ă©tĂ© difficiles »,se souvient-il. La nomination d’un administrateur ayant pour effet de suspendre le conseil d’administration, il se retrouve seul maĂźtre Ă  bord. Dans les journaux, c’est le grand dĂ©ballage : les entreprises du « clan » de l’ancien prĂ©sident, accusĂ© d’avoir pillĂ© les richesses du pays, sont nommĂ©ment dĂ©signĂ©es. La banque Zitouna« est soudain apparue comme un symbole de l’ancien rĂ©gime ».

INQUIÉTUDE TOUJOURS PRÉGNANTE

Anticipant sa fermeture, les clients clĂŽturent leurs comptes.« Plus de 25 % des dĂ©pĂŽts ont Ă©tĂ© retirĂ©s en un mois »,se souvient-il. Les banques partenaires Ă  l’étranger hĂ©sitent Ă  travailler avec Zitouna : une autre banque tunisienne doit se porter caution, moyennant commissions. Une cellule de crise est mise en place pour« reconquĂ©rir la confiance ».La centrale d’appels tĂ©lĂ©phone aux clients pour les rassurer.

L’inquiĂ©tude est tout aussi prĂ©gnante au sein du personnel. Des salariĂ©s souvent jeunes – moyenne d’ñge 33 ans –, dont beaucoup avaient abandonnĂ© un poste pour rejoindre Zitouna, lors de son ouverture en mai 2010. Slaheddine Kanoun ouvre la porte Ă  l’élection, en fĂ©vrier, d’un bureau de l’Union gĂ©nĂ©rale tunisienne du travail (UGTT), l’ancien syndicat unique.

« Un crime du temps d’El Materi »,dit Hedi Zabi, son secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral adjoint.« Le syndicat a permis d’amĂ©liorer le climat social,assure Slaheddine Kanoun.Les salariĂ©s ont fait preuve de responsabilitĂ©, car tout blocage aurait pu nous ĂȘtre fatal. »Depuis un an, les grĂšves et les sit-ins ont causĂ© la fermeture de nombreuses entreprises, participant Ă  la dĂ©tĂ©rioration de la situation Ă©conomique du pays, qui devrait enregistrer une croissance proche de zĂ©ro en 2011.

Hedi Zabi se fĂ©licite d’avoir dĂ©jà« menĂ© sereinement plusieurs combats ».En mars 2011, un accord a Ă©tĂ© trouvĂ© pour amĂ©liorer les conditions de travail des jeunes actifs en contrat d’initiation Ă  la vie professionnelle, un programme mis en place par l’ancien rĂ©gime. En juin, 11 intĂ©rimaires ont pu ĂȘtre intĂ©grĂ©s Ă  l’entreprise. Ils font partie de la cinquantaine d’embauches rĂ©alisĂ©es depuis un an, qui ont portĂ© le nombre de salariĂ©s Ă  380.

CESSION PAR L’ÉTAT

« Il a fallu plus de temps pour rĂ©soudre le problĂšme des inĂ©galitĂ©s salariales »,dit Hedi Zabi. Un dossier« particuliĂšrement sensible »,qui a« pesĂ© sur le climat social de l’entreprise pendant plusieurs mois ».L’administrateur a dĂ» demander l’accord de la Banque centrale, en raison du coĂ»t des rĂ©gularisations pour l’entreprise. En novembre, 81 personnes ont finalement bĂ©nĂ©ficiĂ© d’augmentations.

Depuis, un autre syndicat a vu le jour. Le bureau de la ConfĂ©dĂ©ration gĂ©nĂ©rale tunisienne du travail (CGTT), organisation nĂ©e en 2006 d’une scission de l’UGTT, mais jamais reconnue par le rĂ©gime de Zine El Abidine Ben Ali, a Ă©tĂ© Ă©lu en novembre dernier. Mais la culture du pluralisme syndical est loin d’ĂȘtre acquise. Si la CGTT prĂŽne« l’unitĂ© d’action »,l’UGTT refuse de coopĂ©rer.

Les dĂ©buts de la CGTT sont aussi marquĂ©s par ses relations tendues avec l’administrateur provisoire.« Notre bureau demande que des parts du capital reviennent aux salariĂ©s,explique Habib Guiza, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du syndicat au niveau national.Monsieur Kanoun est furieux. » « Cette revendication est prĂ©maturĂ©e »,tranche l’administrateur, qui fait valoir qu’« aucune dĂ©cision officielle n’a Ă©tĂ© prise quant au devenir des parts confisquĂ©es ».

Leur cession par l’État fait pourtant peu de doutes, mais la procĂ©dure devrait prendre de longs mois. Pour Slaheddine Kanoun, la voie Ă  suivre doit ĂȘtre dictĂ©e par le seul« intĂ©rĂȘt de l’entreprise »,Ă  la santĂ© encore fragile malgrĂ© la rĂ©cupĂ©ration des dĂ©pĂŽts perdus et l’ouverture de 7 nouvelles agences en 2011 – contre 25 prĂ©vues initialement. À ses yeux,« il serait dommage de priver l’économie tunisienne d’une banque Ă  si grand potentiel ».

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UN ANNIVERSAIRE SOUS TENSION

À deux jours du premier anniversaire, samedi 14 janvier, de la chute de l’ex-prĂ©sident Zine El Abidine Ben Ali, la troĂŻka au pouvoir – le prĂ©sident de la RĂ©publique Moncef Marzouki, le chef du gouvernement Hamadi Jebali et le prĂ©sident de l’AssemblĂ©e constituante Mustapha Ben JaĂąfar – n’avait pas communiquĂ© d’intention de cĂ©lĂ©brer officiellement l’An un de la rĂ©volution.

Il est vrai que samedi dernier, le prĂ©sident et le chef de gouvernement, en dĂ©placement Ă  Thala et Kasserine Ă  l’intĂ©rieur du pays pour rendre hommage aux martyrs de la rĂ©volution, ont Ă©tĂ© accueillis aux cris de« Marzouki dĂ©gage »et« Jebali dĂ©gage »de la part de jeunes s’insurgeant contre « les promesses non tenues » envers les rĂ©gions dĂ©shĂ©ritĂ©es.

Source: “La Croix” Le 12-01-2012

Lien: http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/Monde/En-Tunisie-la-banque-Zitouna-veut-vivre-pour-l-economie-du-pays-_EP_-2012-01-12-757039


La presse subit les dérives autoritaires du nouveau pouvoir


 

Le Premier ministre a annoncĂ© le 7 janvier de nouvelles nominations Ă  la tĂȘte des mĂ©dias publics. Une dĂ©cision prise sans consultation et qui rappelle les mĂ©thodes du rĂ©gime de Ben Ali, un an aprĂšs sa chute.

D’abord, un rappel Ă  l’ordre au Premier ministre, Hamadi Jebali, et Ă  sa mouvance [le parti Ennahda, islamiste] et, mĂȘme, plus loin, Ă  ceux qui lui servent de caution, Ă  la tĂȘte de l’Etat et de l’AssemblĂ©e constituante [Moncef Marzouki, CongrĂšs pour la RĂ©publique, et Moustapha Ben Jaafar, Ettakatol, deux partis de gauche et laĂŻcs]. Ni les uns, ni les autres n’ont directement contribuĂ© Ă  la rĂ©volution dans le pays, mĂȘme si nul ne songerait Ă  nier leur combat passĂ© qui ne leur confĂšre a priori aucun certificat de “bonne conduite dĂ©mocratique”. Mais avoir reçu des coups de matraque de la police de Ben Ali ne suffit pas Ă  acquĂ©rir la qualitĂ© de dĂ©mocrate. Ce sont les actes actuellement appliquĂ©s qui permettront d’en juger.

Ce gouvernement jouit d’une lĂ©gitimitĂ© Ă©lectorale pour un mandat limitĂ© pour l’essentiel Ă  la rĂ©daction d’une Constitution et non pour imprimer au pays des modifications durables, ni dans ses orientations politiques, ni sociĂ©tales, Ă©conomiques, diplomatiques, sociales ou culturelles.Les mĂ©dias sont l’instrument privilĂ©giĂ© de la dĂ©mocratie, un relais utile. Le pouvoir doit s’en rapprocher pour mieux faire valoir ses points de vue, ses arguments sachant que la presse est, par nature, un corps rebelle, car porteur de la sensibilitĂ© du citoyen dans sa bonne comme dans sa mauvaise humeur engendrĂ©e par la gestion d’une vie quotidienne souvent difficile.

Cette mauvaise humeur est accentuĂ©e par les profondes frustrations laissĂ©es par l’exercice passĂ© de la politique. De trĂšs “mauvaises habitudes” subsistent et il faudra sans doute du temps pour dĂ©shabituer le pays ; gouvernants, journalistes et citoyens. Que peut et doit faire le gouvernement ? Travailler avec la presse : parvenir Ă  la convaincre, c’est ĂȘtre sĂ»r de convaincre le citoyen, qui est le votant aux prochaines Ă©lections, Ă  moins que l’intention soit de dĂ©possĂ©der celui-ci, encore une fois, de son droit de choisir librement ses dirigeants.

Dialogue mais non asservissement par divers biais comme par la dĂ©signation de vassaux zĂ©lĂ©s et redevables de leurs postes et de leurs privilĂšges. Un responsable de rĂ©daction nommĂ© par dĂ©cret rĂ©galien devrait, par principe et pour l’honneur, refuser ce poste sauf Ă  s’exclure lui-mĂȘme de la profession. Car son capital de confiance et de crĂ©dibilitĂ© a d’avance fondu.

Le deuxiĂšme rappel Ă  l’ordre vise les journalistes. Ils doivent s’interdire les jugements pĂ©remptoires, de se croire en droit de juger sans preuve. Ils doivent s’interdire tout militantisme partisan mĂȘme si, en leur conscience, en tant que citoyens, leurs choix sont faits. Il est clairement dit (Charte de Munich) : “La mission d’information comporte nĂ©cessairement des limites que les journalistes eux-mĂȘmes s’imposent spontanĂ©ment.” Le journaliste doit porter Ă  la connaissance du public tous les faits dont il a connaissance et qui influent sur l’avis du citoyen et guident ses choix dĂ©mocratiques. Pour atteindre ce but, il “veille Ă  rendre perceptible pour le public la distinction entre l’information proprement dite – soit l’Ă©noncĂ© des faits – et les apprĂ©ciations relevant du commentaire ou de la critique”.

Il serait bon aussi de rappeler que le journaliste a le devoir de “respecter la vĂ©ritĂ©, quelles qu’en puissent ĂȘtre les consĂ©quences pour lui-mĂȘme”et de “ne pas user de mĂ©thodes dĂ©loyales pour obtenir des informations, des photographies et des documents”, de “s’obliger Ă  respecter la vie privĂ©e des personnes”, de “rectifier toute information publiĂ©e qui se rĂ©vĂšle inexacte”. Et, enfin, “les journalistes revendiquent le libre accĂšs Ă  toutes les sources d’information et le droit d’enquĂȘter librement sur tous les faits qui conditionnent la vie publique”.

Il serait sans doute utile dans le contexte actuel d’inviter tous Ă  relire ces textes et Ă  cesser de se rĂ©fĂ©rer au passĂ© rĂ©cent pour simplement se prĂ©valoir du contraire. L’opposĂ© de la dictature ne doit pas forcĂ©ment ĂȘtre l’anarchie, le laisser-aller, le dĂ©rapage permanent. Il faut revenir sans tarder aux rĂšgles de base du mĂ©tier sans perdre son temps Ă  rĂ©gler des comptes. La profession doit mieux se structurer, mettre fin aux jeux des personnes, unifier ses rangs et ses reprĂ©sentations, contrer les manipulations, et rappeler chacun Ă  ses devoirs.

Source: “Courrier international” Le 12-01-2012

Lien: http://www.courrierinternational.com/article/2012/01/12/la-presse-subit-les-derives-autoritaires-du-nouveau-pouvoir


Marzouki Ă  Kasserine… Non Ă  la rĂ©bellion contre les symboles de l’Etat


Par Amal Djait

Le prĂ©sident provisoire,Moncef Marzouki, en visite dans le gouvernorat de Kasserine pour rendre hommage aux «martyrs» de la rĂ©volution, a Ă©tĂ© huĂ© et empĂȘchĂ© de terminer un discours par des jeunes chĂŽmeurs. Retour sur un «dĂ©gage» qui dĂ©range

Selon MosaĂŻque Fm, Marzouki a Ă©tĂ© accueilli Ă  son arrivĂ©e au gouvernorat par un groupe de jeunes qui rĂ©clamaient du travail et qui criaient: «Marzouki DĂ©gage!». Moncef Marzouki effectuait une visite Ă  Thala pour rendre hommage aux martyrs de la rĂ©volution dont la Tunisie s’apprĂȘte Ă  fĂȘter le premier anniversaire le 14 janvier. Au-delĂ  de savoir qui et quand allons-nous dĂ©cider d’une date commĂ©morative entre le 17 dĂ©cembre et le 14 janvier, il serait temps de penser Ă  fĂȘter la rĂ©volution. Pour le moment, c’est Ă  Marzouki qu’on fait la fĂȘte!

Le prĂ©sident, depuis les fĂȘtes de fin d’annĂ©e, se ramasse des critiques virulentes dans les mĂ©dias nationaux et internationaux en rĂ©ponse aux bourdes qu’il a commises en moins d’une semaine. De quoi vraiment saper le moral d’un militant qui ne s’est pas trompĂ© de combat mais dont il gĂšre si mal la sortie ou plutĂŽt l’entrĂ©e. Le passage du militantisme Ă  l’exercice du pouvoir ne semble pas rĂ©ussir au prĂ©sident provisoire qui va vite devoir se ressaisir afin de rĂ©tablir au plus vite son image qui se ternit et celle de la Tunisie qui en pĂątit.

L’homme a la charge d’un Etat et ne semble pas encore se rendre compte qu’il n’est plus un simple opposant. AprĂšs avoir frĂŽlĂ© l’incident diplomatique avec l’AlgĂ©rie oĂč il va se rendre prochainement, Marzouki a-t-il mis un peu d’eau dans son vin? Difficile Ă  savoir la rĂ©ponse. Sauf que, ses dĂ©clarations se font depuis plus rares malgrĂ© une semaine Ă©coulĂ©e riche en Ă©vĂšnements et visites officielles. La cote du prĂ©sident a-t-elle seulement baissĂ© au point de lui rapporter un «dĂ©gage»? Un mot lourd de sens pour les Tunisiens. Et pour cause!

Pourtant, selon un sondage rĂ©alisĂ© par Sigma-Le Maghreb au en dĂ©cembre dernier, le prĂ©sident arrivait largement en tĂȘte des personnalitĂ©s Ă  qui on fait le plus confiance en Tunisie, avec 46,93% des rĂ©ponses, suivi de trĂšs loin par Hamadi Jebali avec seulement 8,3% et Rached Ghannouchi 6,56%. Selon ce mĂȘme sondage, Moncef Marzouki arrive largement en tĂȘte des personnalitĂ©s politiques de l’annĂ©e avec 85,74%, suivi par BĂ©ji CaĂŻd Essebsi (52,30%) et Hamadi Jebali (42,02%). Au vu de l’actualitĂ©, on serait tentĂ© de voir l’impact de ces faux pas si le sondage venait Ă  ĂȘtre refait aujourd’hui.Quel serait l’indice de confiance de Marzouki aprĂšs ce dĂ©but d’annĂ©e houleux?

Ceux qui le connaissent savent que, enfant, Marzouki « rĂȘvait de voler, d’aller trĂšs haut dans les cieux». S’est-il seulement dĂ©jĂ  brĂ»lĂ© les ailes? Nombreux sont ceux qui Ă©numĂšrent ses qualitĂ©s et parlent d’un homme intĂšgre et fondamentalement attachĂ© aux libertĂ©s individuelles. Un homme d’honneur et de principes, et le fait qu’il soit dĂ©gagĂ© de la sorte est une grande offense Ă  l’Etat. L’AtugĂ©een Dali Mankai explique: «Cette rĂ©bellion est trĂšs dangereuse contre les symboles de l’Etat. On a raillĂ© BĂ©ji CaĂŻd Essebsi quand il a parlĂ© de «Haybat Addawla», en voici les consĂ©quences. Aujourd’hui, c’est Marzouki, demain ça sera son successeur. Il ne faut jamais se fĂ©liciter quand les institutions de l’Etat sont touchĂ©es».

Bien vu. «Mais Ă  vouloir changer trop rapidement de ton et de temps, Ă  traiter les Tunisiennes de “safirat“, en attaquant les us et coutumes des Tunisiens, le “dĂ©gage attitude“ de Kasserine finit par ĂȘtre apprĂ©ciĂ© dans presque tous les milieux et par beaucoup de citoyens », rĂ©pond Esma B, Ă©tudiante Ă  HEC.

Reste Ă  savoir si ce “dĂ©gage attitude“ est un fait divers ou de la manipulation comme le laissent entendre des militants du CPR. Et si finalement la question qui dĂ©range est de savoir si Marzouki n’est pas victime de ses relations avec Ennahdha?

Pour Esma, cela ne fait aucun doute: «Il est victime de sa dĂ©termination Ă  devenir trop vite prĂ©sident et coĂ»te que coĂ»te. Comment un homme de sa trempe accepte-t-il d’ĂȘtre aux commandes alors que les manettes sont entre les mains d’Ennahdha? Comment rĂ©ussira-t-il Ă  faire le consensus? Comment parviendra-t-il Ă  ĂȘtre le garant des institutions et des libertĂ©s d’une nouvelle Tunisie? Il y a ainsi des alliances contre nature qui ne pardonnent pas!»

Une opinion qui pousse Ă  la rĂ©flexion au vu de la prochaine Ă©tape. Une Ă©tape cruciale pour la Tunisie que Marzouki, avec des prĂ©rogatives si imitĂ©es, ne peut grand-chose. C’est sans compter avec la dimension fougueuse et rebelle de Moncef Marzouki.

Affaire Ă  suivre !

Source: “WMC” Le 12-01-2012

Lien: http://www.webmanagercenter.com/management/article-114767-opinion-tunisie-marzouki-a-kasserine-non-a-la-rebellion-contre-les-symboles-de-l-etat

 


Tunisie – Les appels de Marzouki et de Ghannouchi Ă  la fusion avec la Libye font dĂ©bat


Les dĂ©clarations faites par le PrĂ©sident tunisien Moncef Marzouki lors de sa rĂ©cente visite Ă  Tripoli rĂ©clamant “une fusion entre les deux pays” ont fait renaĂźtre l’espoir d’une Union du Maghreb arabe (UMA). Outre les mauvais souvenirs laissĂ©s par les projets d’union passĂ©, certains doutent mĂȘme de la pertinence Ă©conomique de cette option. Et pourtant
l’idĂ©e fait rĂȘver.

A Tripoli, le prĂ©sident Moncef Marzouki, au risque de choquer une presse qui s’adonne au plaisir de la critique dans tous les sens a appelĂ© Ă  dĂ©passer le stade de la simple coopĂ©ration entre la Tunisie et la Libye pour aller vers « l’indimaj », terme qui peut aussi bien ĂȘtre traduit par « fusion » que par « intĂ©gration ». Mais le propos de Marzouki n’était pas Ă©quivoque. “Nous devons transformer deux peuples jumeaux en une seule nation, qui formera un seul territoire et une seule patrie, afin que nous puissions vivre dans la paix et la dĂ©mocratie”, a-t-il dĂ©clarĂ©. Il y a sans doute une bonne part de conviction maghrĂ©bine de la part du prĂ©sident tunisien mais il y a aussi un intĂ©rĂȘt Ă©conomique pour une Tunisie oĂč les urgences Ă©conomiques et sociales pĂšsent lourdement sur la transition. La Tunisie veut ĂȘtre partie prenante de la « reconstruction en Libye » dont les couts pourraient atteindre, selon les estimations du patronat français, les 200 milliards de dollars.La Tunisie dispose d’un tissu d’entreprises et d’une main d’Ɠuvre qualifiĂ©e qui l’habilitent Ă  prĂ©tendre ĂȘtre partie prenante dans la reconstruction de la Libye, une fois celle-ci stabilisĂ©e. Ce qui est loin d’ĂȘtre le cas. Accueillie avec scepticisme voire avec des sarcasmes par certains mĂ©dias tunisiens, l’idĂ©e fait rĂȘver les opĂ©rateurs Ă©conomiques tunisiens Ă  la recherche de nouvelles perspectives dans un contexte de dĂ©gradation de la situation Ă©conomique en Tunisie.

Rached Ghannouchi approuve

L’idĂ©e d’intĂ©gration a Ă©tĂ© reprise Ă  son compte par Rached Ghannouchi, le leader du parti Ennahda, le premier parti tunisien qui dirige le gouvernement. « Nous avons soutenu cette idĂ©e il y a une quarantaine d’annĂ©es avant qu’elle ne soit annulĂ©e par Bourguiba. Nous avons rĂ©Ă©ditĂ© cette proposition en 2010, lors du soulĂšvement de Ben Guerdane, qui a eu lieu suite Ă  la fermeture des frontiĂšres. L’occasion est propice aujourd’hui pour sa rĂ©alisation » a-t-il dĂ©clarĂ© au journal Al-Hayat. Le leader d’Ennahdha ne voit aucun mal «dans cette union entre deux pays fusionnels sur le plan politique, culturel et Ă©conomique ? Deux pays proches par leurs peuples, leur religion, leur histoire et leurs intĂ©rĂȘts ». Les apprĂ©ciations des mĂ©dias tunisiens sont trĂšs contrastĂ©es. « LemarchĂ© libyen est loin de nous ĂȘtre acquis » estime GlobalNet qui appelle Ă  « tempĂ©rer » les aspirations tunisiennes envers la « panacĂ©e » libyenne ». Il invite Ă  ne pas penser la croissance sur la base de « potentialitĂ©s hypothĂ©tiques » d’autant que « selon plusieurs indices,la Libye ne va pas constituer, du moins dans l’immĂ©diat, une terre d’accueil et de travail pour les Tunisiens ». En rĂ©ponse Ă  Guy Sitbon, journaliste d’origine tunisienne qui reproche Ă  Ghannouchi de croire au pĂšre Noel, Rafik Souidi dĂ©fend, dans Kapitalis, l’option d’une union fĂ©dĂ©rale. Selon lui, les complĂ©mentaritĂ©s Ă©conomiques « sont Ă©videntes » et « on peut ĂȘtre assurĂ© que cette entitĂ© pourrait connaĂźtre un essor irrĂ©sistible avec une croissance Ă  deux chiffres sur une longue pĂ©riode et constituerait Ă  terme la locomotive de la zone Mena avec un Pnb potentiel de plus de $500 milliards ».

Source: “Maghreb Emergent” Le 12-01-2012

Lien: http://www.maghrebemergent.info/actualite/maghrebine/7673-tunisie-les-appels-de-marzouki-et-de-ghannouchi-a-la-fusion-avec-la-libye-font-debat.html

 


La Tunisie fait la lumiÚre sur son passé


 

Par MARIE VERDIER

 

Les différentes commissions sur la corruption et les victimes de la révolution dressent un premier bilan.

Combien la Tunisie compte-t-elle de martyrs de la révolution ?

« Les morts pendant la rĂ©volution ne sont pas forcĂ©ment des martyrs,prĂ©cise d’emblĂ©e l’avocat Taoufik Bouderbala qui prĂ©side la commission d’investigation sur les dĂ©passements et les abus pendant la rĂ©volution.Il reviendra Ă  l’État d’établir la liste. »En dix mois d’existence, sa commission – qui doit remettre son rapport fin janvier – a instruit 2 750 dossiers de victimes dĂ©posĂ©s par les familles. Ils concernent 323 morts et 2 000 blessĂ©s (ainsi que 427 dossiers de biens pillĂ©s ou endommagĂ©s) entre le 17 dĂ©cembre 2010, date de la mort par immolation de Mohamed Bouazizi, et le 23 octobre 2011, jour des Ă©lections de l’AssemblĂ©e constituante.

Depuis, plus de 300 dossiers supplĂ©mentaires sont arrivĂ©s.« On a incitĂ© chaque famille Ă  dĂ©poser une plainte »,prĂ©cise Taoufik Bouderbala. Sa commission a par ailleurs dressĂ© 42 procĂšs-verbaux concernant de hauts responsables tunisiens impliquĂ©s dans la rĂ©pression lors de la rĂ©volution.La commission prĂ©conise de ne pas en rester lĂ . Elle recommande de rĂ©former les systĂšmes sĂ©curitaire et judiciaire tunisiens. Et de crĂ©er une commission justice et rĂ©conciliation pour gĂ©rer l’hĂ©ritage des vingt-trois ans de rĂšgne de Zine El Abidine Ben Ali mais aussi des annĂ©es Bourguiba depuis l’indĂ©pendance.

La lutte contre la corruption a-t-elle progressé ?

DĂšs ses premiers pas, sa « descente » dans le palais de Carthage et les rĂ©sidences privĂ©es du couple prĂ©sidentiel au printemps dernier, la commission d’investigation sur les affaires de corruption et de malversation a Ă©tĂ© critiquĂ©e. Beaucoup considĂšrent que les critiques incessantes ne sont pas Ă©trangĂšres Ă  la mort de son prĂ©sident Abdelfattah Omar le 2 janvier dernier Ă  la suite d’un malaise. Confusion avec la justice, absence de transparence et de mĂ©thodologie ont poussĂ© certains membres Ă  dĂ©missionner, notamment le reprĂ©sentant du rĂ©seau national anti-corruption qui estime que les rĂ©seaux mafieux continuent Ă  prospĂ©rer.

L’ONG Transparency Internationalabonde dans son sens puisqu’elle a fait reculer la Tunisie au 73erang (contre 59 en 2010) sur son tableau 2011 de l’indice de perception de la corruption. Toujours est-il que cette commission a examinĂ© 5 000 des 10 000 requĂȘtes qu’elle a reçues et transfĂ©rĂ© Ă  la justice 320 dossiers impliquant environ 1 200 personnes.

Les biens mal acquis des proches du couple prĂ©sidentiel (une liste de 114 personnes Ă©tablie par dĂ©cret) ont Ă©tĂ© confiĂ©s Ă  une commission de confiscation, laquelle a dĂ©jĂ  transfĂ©rĂ© Ă  l’État 116 sociĂ©tĂ©s gĂ©rĂ©es par des administrateurs provisoires et poursuit des investigations sur 204 autres sociĂ©tĂ©s. Quant aux avoirs, biens mobiliers et immobiliers Ă  l’étranger, la Tunisie devra attendre pour les rĂ©cupĂ©rer qu’aboutissent de longues procĂ©dures dans chaque pays concernĂ©.

Source: “La Croix” Le 12-01-2012

Lien: http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/Monde/La-Tunisie-fait-la-lumiere-sur-son-passe-_EP_-2012-01-12-757038


Tunisie : “Nous pouvons atteindre 14 millions de touristes“, affirme Elyùs Fakhfakh


Nous venons de rencontrer ElyĂšs Fakhfakh, ministre du Tourisme, et ill nous a semblĂ© connaĂźtre son affaire, non sans passion d’ailleurs, mĂȘme s’il convient que sur les 550 hĂŽtels classĂ©s, seuls 105 sont actuellement en mise Ă  niveau sur 250 dossiers prĂ©sentĂ©s, que leur moyenne d’Ăąge de 25 ans pose problĂšme, que nous avons des faiblesses de modernisation, de services, de taille, d’endettement, de formation, d’infrastructure…

Selon lui, la Tunisie n’a pas suivi les trois expressions essentielles de la rĂ©volution qu’a connue le tourisme mondial:

-“La dĂ©mocratisation du ciel, le dĂ©veloppement duLow Costet les flux importants, et nous allons collaborer avec le ministĂšre du Transport pour aller plus loin que les dossiers qui sont dĂ©jĂ  aboutis pour ouvrir le ciel tout en prĂ©servant la compagnie nationale. Tout cela impacte relativement alors que le flux global se multiplie par 2 ou 3.

-Internet: car la commercialisation classique est de moins en moins utilisĂ©e au moment oĂč 50% des rĂ©servations se font aujourd’hui via le Web, au moins sur les marchĂ©s matures de l’Europe. Il faut Ă©galement bien noter qu’entre 70% et 80% de touristes potentiels se renseignent sur les sites dĂ©diĂ©s avant de se rendre dans les pays de destination. Et nous devons intĂ©grer cette rĂ©volution et l’Ă©tablir en axe stratĂ©gique, rattraper notre retard et investir dans lee-booking.

La rĂ©duction de la durĂ©e de sĂ©jour: car les touristes viennent de plus en plus pour un seul week-end, pour une activitĂ© spĂ©cifique, pour un parcours dĂ©terminĂ© d’avance, pour un hobby… et nous devons y rĂ©pondre par des conditions Ă©tudiĂ©es, de vols amĂ©nagĂ©s, un site qui renseigne sur la destination…“.

En ce qui concerne sa nouvelle politique pour les touristes algĂ©riens et libyens, M. Fakhfakh affirme que nos voisins reprĂ©sentent 45% du flux touristique et que nous devons naturellement Ă©tudier leurs attentes et leurs besoins qui sont spĂ©cifiques Ă  chacun. Dans le cadre de cette Ă©valuation, nous devons proposer des produits Ă©tudiĂ©s pour qu’ils se sentent chez eux.

Alors, 16 millions de touristes en 2015? “En maintenant notre stratĂ©gie qui rĂ©pond aux trois critĂšres (dĂ©mocratisation du ciel, usage de l’Internet, rĂ©duction de la durĂ©e de sĂ©jour), nous devons travailler Ă  l’amĂ©lioration de notre produit et sa qualitĂ© qui reste un must avant les autres aspects. A partir de lĂ , on devrait facilement doubler notre capacitĂ© (Ă  parti des 7 millions de base, et donc 14 millions) mais, par delĂ  le nombre, nous prĂ©fĂ©rons travailler sur les augmentations de recettes (par l’animation, l’amĂ©lioration du produit, viser les touristes Ă  forte valeur ajoutĂ©e…)“.

Avec les 25 millions d’euros de budget de promotion du tourisme tunisien, c’est-Ă -dire la moitiĂ© de ce que dĂ©pense le Maroc (50 millions d’euros) et le quart de ce que dĂ©pense la Turquie (100 millions d’euros), on lui souhaite beaucoup de courage pour imposer la destination Tunisie.

Source:”WMC” Le 12-01-2012

Lien: http://www.webmanagercenter.com/management/article-114803-tunisie-%93nous-pouvons-atteindre-14-millions-de-touristes%93-affirme-elyes-fakhfakh

 


Tunisie. Un front centriste autour du Pdp pour quoi faire?


 

Par Marouen El Mehdi

Les leaders des trois partis ont tenu une confĂ©rence de presse, mercredi, pour annoncer la constitution de ce front, les raisons ayant nĂ©cessitĂ© sa constitution, ses objectifs et son programme d’action.

Pourquoi le Parti dĂ©mocrate progressiste (Pdp), Afek Tounes et le Parti RĂ©publicain ont-ils donc pris la dĂ©cision de fusionner ? Selon ses initiateurs, cette fusion est une rĂ©ponse aux nĂ©cessitĂ©s de cette Ă©tape et aux aspirations de larges franges de la sociĂ©tĂ©. Entre autres raisons, ces partis invoquent ce qu’ils appellent «la responsabilitĂ© historique du moment», «les enjeux auxquels la Tunisie doit faire face», «la nĂ©cessitĂ© de disposer d’un cadre politique susceptible d’accueillir toutes les forces nationales dĂ©sireuses d’édifier un projet politique ancrĂ© profondĂ©ment dans la sociĂ©tĂ© et puisant dans ses valeurs arabo-musulmanes».

Une nouvelle force politique dĂźtes-vous ?

Et quoi encore, au-delĂ  de cette langue de bois qui en dit moins qu’elle ne tait ? Le nom d’Ennahdha, grand vainqueur des Ă©lections de l’AssemblĂ©e constituante, le 23 octobre, et qui a constituĂ© le gouvernement actuel, grĂące Ă  une alliance avec deux autres partis centristes, le CongrĂšs pour la rĂ©publique (Cpr) et Ettakatol, n’a pas Ă©tĂ© Ă©voquĂ©. Il Ă©tait pourtant dans tous les esprits. N’est-ce pas pour contrer ce mouvement, aujourd’hui au pouvoir, que les trois partis, grands perdants des Ă©lections d’octobre, cherchent aujourd’hui Ă  fusionner, dans l’espoir de peser d’un poids moins lĂ©ger dans l’échiquier politique ?N’est-ce pas aussi pour se positionner en perspective des prochaines Ă©lections, qui auront lieu, sauf surprise ou catastrophe, en 2013 ?

La fusion annoncĂ©e sera concrĂ©tisĂ©e Ă  l’occasion du prochain congrĂšs du Pdp, les 17, 18 et 19 mars, qui se transformera en un congrĂšs unificateur d’une nouvelle force politique. Une instance commune a Ă©tĂ© constituĂ©e pour la prĂ©paration politique et logistique de ce congrĂšs qui aura Ă  choisir le nouveau nom du parti et fixera ses statuts ainsi que son nouveau rĂšglement intĂ©rieur. Et sans doute aussi les grands axes de son futur programme, sachant que les orientations idĂ©ologiques des trois formations ne brillent pas par leur cohĂ©rence : l’hĂ©ritage socialisant du Pdp contraste quelque peu avec le libĂ©ralisme d’Afek Tounes. A moins de vouloir seulement constituer un simple front Ă©lectoral face Ă  Ennahdha, les dirigeants de ce futur parti devraient essayer de trouver un corpus commun d’idĂ©es politiques et de programmes Ă©conomiques et sociaux.

Said Aydi prend goût au combat politique

Lors de leurs interventions, Maya Jribi (Pdp), Yassine Brahim (Afek Tounes), Youssef Chahed (La Voix du Centre), Mohamed Louzir (Afek Tounes) et Ahmed Nejib Chebbi (Pdp) ont tournĂ© autour du pot pour ne pas prononcer le nom de l’adversaire commun : ce qui aurait eu l’avantage de la sincĂ©ritĂ© et de la clartĂ©. Ils se sont donc contentĂ©s de souligner la nĂ©cessitĂ© de rĂ©unir toutes les forces dĂ©mocratiques et progressistes pour constituer un parti centriste que beaucoup de Tunisiens appellent de leurs vƓux. M. Chahed, un brin lyrique, comme souvent au moment des naissances, a mĂȘme parlĂ© de la rĂ©alisation d’un
 rĂȘve (pas moins !).

 

Prenant la parole sous une forte ovation, Said Aydi, l’ex-ministre de l’Emploi et de la Formation, s’est dit honorĂ© de rejoindre le rang de ce parti : «Lorsque M. CaĂŻd Essebsi m’a appelĂ© pour occuper un poste dans son gouvernement, il a recommandĂ© Ă  tous les ministres de rester neutres et j’ai tout fait pour l’ĂȘtre. A prĂ©sent, je ressens de la fiertĂ© en voyant ce parti voir le jour. Il porte un projet grandiose pour l’avenir de la Tunisie et son programme accordera une place particuliĂšre Ă  la lutte contre le chĂŽmage, et je contribuerai Ă  cet effort, surtout que je possĂšde dĂ©sormais une expĂ©rience dans le domaine de l’emploi et de la formation».

Autre indĂ©pendant Ă  avoir ressenti un trĂšs fort dĂ©sir de «fusionner» : Slaheddine Zahaf, invitĂ© d’honneur de la confĂ©rence, qui a prĂ©cisĂ© que la Tunisie a un besoin pressant d’un tel parti qui servira l’intĂ©rĂȘt de tous les Tunisiens.

Ettajdid se laisse désirer

Les rĂ©ponses aux interrogations des journalistes ont rĂ©vĂ©lĂ© une certaine rĂ©serve quant Ă  la possibilitĂ© de voir le parti Ettajdid rejoindre ce mouvement. Mme Jribi a laissĂ© entendre que le front reste ouvert Ă  tous et que des tractations avec le parti d’Ahmed Brahim sont encore en cours. On a cependant appris que des intĂ©rĂȘts d’ordres personnels et politiques ont Ă©tĂ© derriĂšre ce revirement de derniĂšre minute.

Les dirigeants d’Ettajdid, dont on connaĂźt l’attachement Ă  leur identitĂ© historique d’hĂ©ritiers du Parti communiste tunisien (Pct), ont-ils craint de voir la fusion annoncĂ©e se transformer en une auto-dissolution au sein d’une sorte de «grand Pdp», ce parti jouant dĂ©jĂ , trĂšs opportunĂ©ment, le rĂŽle de locomotive ? On pourrait sĂ©rieusement le penser, connaissant les anciennes rivalitĂ©s feutrĂ©es de ces deux partis et l’échec de toutes leurs anciennes tentatives d’alliance.

Par ailleurs, certains partis du PĂŽle dĂ©mocratique moderniste (Pdm), autre perdant des Ă©lections d’octobre, ont acceptĂ© de rejoindre la formation en gestation, alors que d’autres s’y sont fermement opposĂ©s. Ils craignent, eux aussi, que le congrĂšs constitutif, prĂ©vu lors du congrĂšs du Pdp, ne devienne une «lĂ©gitimation» de l’hĂ©gĂ©monie de ce parti, qui n’a jamais brillĂ© par sa prĂ©disposition au travail en commun ! Le fait qu’il y soit aujourd’hui acculĂ© l’incitera-t-il Ă  jouer moins solo ? Wait and see


Autre question prĂ©sente dans tous les esprits : le nouveau front centriste rejoindra-t-il un jour le mouvement politique que l’ex-Premier ministre, BĂ©ji CaĂŻd Essebsi, compte former dans un proche futur ? «Ce mouvement n’a pas encore vu le jour pour Ă©voquer une telle possibilitĂ©, mais tout reste possible», a-t-on rĂ©pondu, de maniĂšre Ă©vasive, laissant la porte ouverte Ă  toutes les supputations.

Ce qui, on l’imagine, n’est pas de nature Ă  rassurer des formations dont les idĂ©ologies sont aux antipodes du libĂ©ralisme, ici bourguibien, et qui pourrait englober, de proche en proche, les ex-Rcdistes. D’oĂč la nĂ©cessitĂ©, pour les initiateurs du front centriste de mieux dĂ©finir les contours de leur Opni ou objet politique non (encore) identifiĂ©.

Source:”Kapitalis” Le 12-01-2012

Lien: http://www.kapitalis.com/fokus/62-national/7772-tunisie-un-front-centriste-autour-du-pdp-pour-quoi-faire-.html

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