Tunisie Justice doit ĂȘtre faite lors du procĂšs en appel « des 38 de Gafsa » !
ProcÚs de Gafsa :  les 33 condamnés en appel le 12 janvier.
PROCĂS DU 11 DĂCEMBRE 2008 DEVANT LE TRIBUNAL PĂNAL DE GAFSA
RAPPORT DâOBSERVATIONS JUDICIAIRES
MaĂźtre Houcine BARDI
Docteur en Droit / Avocat au Barreau de Paris
Â
1)Â Â Â Â Â MANDAT
MandatĂ© par le ComitĂ© pour le Respect des LibertĂ©s et des Droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT), et la FĂ©dĂ©ration des Tunisiens pour une CitoyennetĂ© des Deux Rives (FTCR), deux associations de droit français, j’ai pu assister, en qualitĂ© d’observateur judiciaire, au procĂšs des « 38 » accusĂ©s dans la principale[1] affaire judiciaire du bassin minier de Gafsa.
2)Â Â Â Â Â LE CONTEXTE
Suite Ă l’annonce des rĂ©sultats du concours de recrutement de la Compagnie des Phosphates de Gafsa (CPG), dans le Sud-ouest tunisien, les habitants du bassin minier (Redayef, Metlaoui, OumlarĂšs, MâdhillaâŠ) se sont rĂ©voltĂ©s, dĂšs le 5 janvier 2008, pour montrer leur insatisfaction.
La CPG (sociĂ©tĂ© appartenant Ă l’Ătat tunisien) est le principal employeur de la ville de Gafsa. Les postes d’emploi y sont attribuĂ©s selon des quotas, dont certains revenaient jusquâici aux familles des victimes de l’extraction miniĂšre, d’autres au syndicat des mineurs, etc.
Des grĂšves de la faim, des sit-in, des marches et des manifestations pacifiques ont Ă©tĂ© organisĂ©es par les habitants de Gafsa durant plusieurs mois pour exiger, des autoritĂ©s, des postes d’emploi, notamment pour les plus dĂ©munis.
Face Ă cette montĂ©e du mouvement de protestation sociale dans la rĂ©gion, les autoritĂ©s ont dĂ©pĂȘchĂ© un nombre considĂ©rable de forces de lâordre, qui ont Ă©tĂ© rapidement renforcĂ©es par une prĂ©sence massive de lâarmĂ©e. Les habitants du Bassin minier parlent dâun « état de siĂšge » âŠ
Lâinstallation dans la durĂ©e du mouvement de protestation a donnĂ© naissance Ă une coordination locale, supervisĂ©e essentiellement par des syndicalistes de la ville de Redayef, dĂ©nommĂ© « Mouvement de protestation sociale de Redayef ».
Une DĂ©lĂ©gation chargĂ©e de nĂ©gocier avec les autoritĂ©s locales en a Ă©tĂ© issue. Elle Ă©tait composĂ©e de MM. Adnane HAJI (dĂ©lĂ©guĂ© syndical), BĂ©chir ABIDI (dĂ©lĂ©guĂ© syndical), Ali RâHILI (SecrĂ©taire GĂ©nĂ©ral de lâUnion syndicale locale), Mohamed KHLAYFI (Ancien dĂ©putĂ© et dĂ©lĂ©guĂ© syndical), et M. Ali BOUIHI.
Cette dĂ©lĂ©gation a participĂ© Ă au moins trois rĂ©unions officielles avec les autoritĂ©s locales : le 02/05/08 (Ă la Mairie de Redeyef), le 20/05/08 (au siĂšge de lâinspection du travail de Redeyef) et le 26/05/08. Ont pris part Ă ces rĂ©unions, outre les reprĂ©sentants de la commission de nĂ©gociation, le Gouverneur de la ville de Redeyef, le Maire de ladite ville, des dirigeants de la Compagnie des Phosphates de Gafsa, et des inspecteurs du travail.
Avec l’extension du mouvement de protestation Ă dâautres villes de la rĂ©gion du bassin minier de Gafsa, une coordination nationale dĂ©nommĂ©e « ComitĂ© national de soutien aux habitants du bassin minier », a Ă©galement vu le jour. De mĂȘme quâun « ComitĂ© de soutien aux habitants du Bassin minier de Gafsa » a Ă©tĂ© créé Ă Paris, et un mouvement de solidaritĂ© similaire a vu le jour Ă Nantes oĂč rĂ©side un nombre relativement important de Tunisiens originaires de la Ville de Redeyef.
Les associations civiles tunisiennes, telles que la Ligue Tunisienne de DĂ©fense des Droits de l’Homme (LTDH), le Conseil National pour les LibertĂ©s en Tunisie (CNLT), le ComitĂ© pour le Respect des LibertĂ©s et des Droits de lâHomme en Tunisie (CRLDHT) ainsi que plusieurs Unions rĂ©gionales de lâUnion GĂ©nĂ©rale Tunisienne du Travail (UGTT), tout autant que les partis d’opposition tels que le Forum DĂ©mocratique pour le Travail et les LibertĂ©s (FDTL), le Parti DĂ©mocratique Progressiste (PDP) et le Parti ATTAJDID (pour ne citer que les partis lĂ©gaux), et des associations comme lâAssociation tunisienne des Femmes dĂ©mocrates (ATFD, prix des droits de lâHomme de la RĂ©publique française 2008) ont clairement exprimĂ© leur soutien Ă ce mouvement pacifique de protestation socialeâŠ
Les nĂ©gociations engagĂ©es tant avec les autoritĂ©s locales quâavec les ministres envoyĂ©s sur place par le Gouvernement ont toutes Ă©chouĂ©. Il semblerait, en effet, que les propositions dâembauche faites par les autoritĂ©s, Ă©taient trĂšs en deçà des aspirations de la population. Il convient de rappeler Ă ce sujet que le taux de chĂŽmage dans la rĂ©gion de Gafsa est nettement au dessus du double de la moyenne nationale (estimĂ©e, officiellement, Ă plus de 14%)
Le mouvement de protestation sâest donc poursuivi, entrainant dans son sillage un grand nombre dâarrestations (notamment parmi les leaders) et de condamnations (judiciaires).
Le procĂšs organisĂ© le 11/12/08, devant le tribunal pĂ©nal de Gafsa (statuant en matiĂšre de crimes) intervient suite Ă plusieurs autres procĂšs ayant abouti Ă la condamnation (Ă de plus ou moins lourdes peines) de la plupart des accusĂ©s (les cas de relaxe ont Ă©tĂ© raresâŠ)
Lâimportance du prĂ©sent procĂšs dĂ©coule Ă la fois du grand nombre dâaccusĂ©s : 38, dont 2 considĂ©rĂ©s « en Ă©tat de fuite »[2], et de la qualitĂ© de ceux qui en font lâobjet : « chefs dâune entente (criminelle) », selon lâaccusation ; « leaders du mouvement de protestation pacifique de Gafsa » dĂ»ment mandatĂ©s par les habitants dans le cadre des nĂ©gociations avec les autoritĂ©s locales, selon la dĂ©fenseâŠ
3)Â Â Â Â Â QUELQUES OBSERVATIONS PRELIMINAIRES EN MARGE DU PROCĂS
Je voudrais tout dâabord relater quelques faits quâil mâa Ă©tĂ© donnĂ© de constater en dehors du palais de justice de Gafsa, et qui, tout en Ă©tant mineurs, ne sont nullement anodins.
Sur la route qui nous conduisait vers Gafsa, nous avons Ă©tĂ© (trois jeunes avocats du Barreau de Tunis, et moi-mĂȘme) contrĂŽlĂ©s Ă trois reprises. A chaque fois il sâagissait de « barrages sĂ©lectifs » de la gendarmerie appuyĂ©e par des policiers en civil, qui semblaient bien connaĂźtre mes compagnons, puisquâils les appelaient de leurs noms⊠et sâenquerraient (surtout) de la prĂ©sence, dans la voiture, de « lâinconnu » que jâĂ©tais !
Le premier contrĂŽle sâest dĂ©roulĂ© de maniĂšre presque « cordiale », avec un air plutĂŽt amusĂ© de la part de mes compagnons, qui ont adressĂ© quelques blagues cyniques Ă lâendroit des agents⊠plutĂŽt souriants.
Les deux suivants ont failli dĂ©gĂ©nĂ©rer, puisque les « contrĂŽleurs » voulaient carrĂ©ment immobiliser le vĂ©hicule⊠ce qui a obligĂ© mes co-voituriers Ă dĂ©noncer (par tĂ©lĂ©phone) auprĂšs de M. le BĂątonnier ESSID, cette « atteinte caractĂ©risĂ©e au droit Ă la libertĂ© de circulation »âŠ
Câest lors dâun contrĂŽle similaire, en date du 04/12/08, que la dĂ©lĂ©gation de lâAssociation Tunisienne des Femmes DĂ©mocrates a Ă©té « refoulĂ©e ».
Au bout de 10 Ă 15 minutes dâattente, « lâordre » a Ă©tĂ© donnĂ© de nous laisser repartir.
ArrivĂ©s Ă proximitĂ© du Palais de Justice de Gafsa, vers 08H30 du matin, jâai Ă©tĂ© impressionnĂ© par la prĂ©sence, le moins que lâon puisse dire, massive des policiers (toutes brigades confonduesâŠ).
Un barrage a Ă©tĂ© dressĂ© Ă lâentrĂ©e du parking du Palais. Des policiers nous en ont interdit lâaccĂšs. CâĂ©tait sans compter avec lâobstination de mes compagnons : « Câest le parking rĂ©servĂ© aux auxiliaires de justice, dont nous faisons partie, et vous nâavez nullement le droit de nous en interdire lâaccĂšs » ont rĂ©torquĂ© Ă lâunisson mes trois confrĂšres.
Quelques minutes de « nĂ©gociation » avec, entre autres, des agents civils, ont Ă©tĂ© « nĂ©cessaires » pour lever le barrage, et nous « autoriser exceptionnellement » de stationner le vĂ©hicule dans lâemplacement qui lui Ă©tait, pourtant, rĂ©servĂ©âŠ
Avant dâatteindre la porte du Palais, une femme (la quarantaine, face blĂȘmeâŠ) sâest prĂ©cipitĂ©e vers nous (jâai compris par la suite quâil sâagissait de lâĂ©pouse de M. Fahem BOUKADDOUS, le journaliste de « Al Hiwar Attounsi », accusĂ© en Ă©tat de fuite, parmi « les 38 ») et a priĂ© mes accompagnateurs de la faire rentrer avec eux au Palais⊠car lâaccĂšs lui a Ă©tĂ© refusĂ©, par les trĂšs nombreux policiers qui gardaient lâentrĂ©e du Tribunal.
Nouvelle « palabre » âquelque peu virulente en raison des propos vĂ©hĂ©ments tenus par un agent rĂ©pondant au nom de YOUSSEFâ entre le petit groupe dâavocats (qui a improvisĂ© un « cordon » afin de protĂ©ger la malheureuse⊠qui sâĂ©tait, semble-t-il, fait agresser lors de lâaudience du 04/12/08 devant la mĂȘme juridiction) et non moins dâune dizaine dâagents civils et en tenues. Un appel tĂ©lĂ©phonique âde lâun dâentre euxâ Ă un « haut responsable » a permis dâobtenir le « laissez-passer » pour tousâŠ
4)Â Â Â LE PROCES
A)   La liste des accusés
Sur les soixante personnes (tous des hommes[3] du gouvernorat de Redeyef) poursuivies initialement par le ministĂšre public, une vingtaine a pu bĂ©nĂ©ficier dâun non-lieu, au cours de leur audition par le juge dâinstructionâŠ
NOM ET PRENOM |
DATE DE NAISSANCE ET PROFESSION |
 |
1) Adnane HAJI |
25/10/1958 / Instituteur |
 |
2) Adel JAYAR |
22/01/1969 / Professeur de lâenseignement secondaire |
 |
3) Bechir ABIDI |
21/01/1954 / Instituteur |
 |
4) Tarak HLAYMI |
16/11/1965 / Â Instituteur |
 |
5) Tayeb Ben OTHMANE |
06/10/1970 / Instituteur |
 |
6) Hassane Ben abdallah |
10/08/1975 / Travailleur journalier |
 |
7) Maher Fajraoui |
11/08/1976 / Ouvrier-boulanger |
 |
8) Ali JDIDI |
02/11/1972 / Travailleur journalier |
 |
9) Haroun Hlaymi |
06/07/1981 / Etudiant |
 |
10) Mdhaffar ABIDI |
11/05/1985 /Â ElĂšve |
 |
11) Ghanem CHRAYTI |
22/04/1983/ Â Travailleur journalier |
 |
12) Abid KHLAYFI |
02/07/1973 / secrĂ©taire de gestion Ă lâISSPT de Gafsa |
 |
13) Rachid ABDAOUI |
 |
 |
14) Ridha AMAYDI |
03/01/1966 / Instituteur |
 |
15) Abdessalam HELALI |
07/01/1960 / Instituteur |
 |
15) Hafnaoui BEN OTHMANE |
06/10/1970Â / Instituteur |
 |
16) Sami AMAYDI |
13/11/1978 / Travailleur journalier |
 |
17) Fayçal BEN AMOR |
13/06/1978 / Travailleur journalier |
 |
18) Ridha AZEDDINI |
25/03/1974 Travailleur dans les chantiers de lâenvironnement |
 |
19) Mahmoud RADDADI |
05/10/1968 / Travailleur journalier |
 |
20) Boubakar BEN BOUBAKAR |
12/09/1972/ Travailleur journalier |
 |
21) Hafnaoui BEN OTHMANE |
29/10/1973 / Travailleur journalier |
 |
22) Hédi BOUSLAHI |
17/07/1973/ Travailleur journalier |
 |
23) Thameur MAGHZAOUI |
20/12/1977/ Travailleur journalier |
 |
24) Issam FAJRAOUI |
27/03/1981/ Travailleur journalier |
 |
25) Mouadh AHMADI |
09/02/1974/ Travailleur journalier |
 |
26) Abdallah FAJRAOUI |
11/12/1978 / Travailleur journalier |
 |
27) Mohamed BALDI |
01/04/1983/ Mécanicien |
 |
28) Makram MAJDI |
20/10/1982/ Travailleur journalier |
 |
29) Othmane BEN OTHMANE |
19/06/1983 / Travailleur journalier |
 |
30) Mahmoud HLALI |
07/01/1960 /Â Instituteur |
 |
31) Mohsen AMAYDI |
23/01/1978 /Â Etudiant |
 |
32) Radouane BOUZAYENE |
30/04/1974/ Travailleur journalier |
 |
33) Habib KEDIRI (TABBABI) |
11/8/1974 /Â Travailleur journalier |
 |
34) IsmaĂŻl JOUHRI |
26/09/1977 / Mécanicien |
 |
35) Lazhar BEN ABDELMALAK |
02/01/1959 / Instituteur |
 |
36) Boujemaa CHRAYTI |
22/04/1983Â / Travailleur journalier |
 |
37) Fahem BOUKADDOUS |
09/10/1970Â / Journaliste |
 |
38) Mohieddine CHERBIB |
30/08/1952 / Immigré en France |
 |
Â
B)Â Â Â Les chefs dâaccusation
Pour les accusés de (1) à (36), il a été retenu les accusations suivantes :
« Appartenance Ă une bande ; participation Ă une entente en vue de prĂ©parer et commettre une agression contre les biens et les personnes ; participation Ă une rĂ©bellion provoquĂ©e par plus de dix personnes avec usage dâarmes et durant laquelle il y a eu agression dâun fonctionnaire dans lâexercice de ses fonctions ; entrave Ă la circulation dans les voies publiques ; participation Ă une rĂ©bellion provoquĂ©e par des discours prononcĂ©s dans des lieux et rĂ©unions publics, par des affiches, des communiquĂ©s et imprimĂ©s ; dĂ©gradation, sciemment, de bien dâautrui ; fabrication et dĂ©tention dâoutils et dâinstruments incendiaires sans autorisation ; jets de corps solides contre les biens dâautrui ; provocation de bruit et de tapages dans un lieu public ; distribution, vente et exposition de publications destinĂ©es Ă la diffusion en vue de troubler lâordre public ; collecte de dons sans autorisation ; mise Ă disposition de locaux et assistance financiĂšre aux membres dâune association de malfaiteurs. Faits rĂ©primĂ©s par les articles : 32-131-132-133-119-118-121-121 ter-304-320-316 du Code PĂ©nal et les dĂ©crets du 21 dĂ©cembre 1944, du 18 juin 1894 et celui du 02 avril 1953âŠÂ »
Pour les accusés Fahem BOUKADDOUS (n°37) et Mohieddine CHERBIB (n°38) :
« AdhĂ©sion Ă une bande ; participation Ă une entente visant Ă prĂ©parer et Ă commettre des agressions contre des personnes et des biens ; distribution, vente, exposition et dĂ©tention, dans l’intention de les diffuser, de documents susceptibles de troubler l’ordre public dans un but propagandiste »
Les avocats de la dĂ©fense rĂ©sumeront, communĂ©ment, cette sĂ©rie impressionnante dâaccusations sous la simple appellation : « AFFAIRE DE LâENTENTE ».
Il sâagit bien Ă©videmment dâaccusations extrĂȘmement graves, faisant encourir aux auteurs prĂ©sumĂ©s jusquâĂ 10 ans dâemprisonnement (article 119 du CPT), « sans prĂ©judice des peines Ă©dictĂ©es (âŠ) contre l’auteur des coups et blessuresâŠÂ ». Câest lâapplication des peines prĂ©vues pour ce dernier dĂ©lit, qui ajoutera des mois supplĂ©mentaires aux annĂ©es dâemprisonnement prononcĂ©es Ă lâencontre de certains accusĂ©sâŠ
Â
C)   Le dĂ©roulement de lâaudience
Peu de temps avant lâouverture de lâaudience, M. le BĂątonnier BĂ©chir ESSID a convoquĂ© ses confrĂšres dans la bibliothĂšque de lâOrdre des avocats, pour dĂ©battre de la stratĂ©gie de dĂ©fense Ă adopter.
La question Ă laquelle il fallait rĂ©pondre pourrait ĂȘtre rĂ©sumĂ©e ainsi : doit-on rĂ©itĂ©rer les demandes relatives aux exceptions de nullitĂ© et aux complĂ©ments dâenquĂȘte et dâinformation (lesquelles doivent ĂȘtre soulevĂ©es in limine litis, avant tout dĂ©bat au fond) ; et dans le cas oĂč lesdites exceptions sont Ă©cartĂ©es (dâune maniĂšre ou dâune autre) par le tribunal, quâest-ce quâil conviendrait de faire ? DĂ©fendre lâaffaire au fond, ou se retirer en signe de protestation contre le non-respect des droits de la dĂ©fense ?
Plusieurs avocats ont pris la parole. Les avis Ă©taient divergents. Il mâa tout de mĂȘme semblĂ© quâune majoritĂ© relative (parmi les prĂ©sents) penchait plutĂŽt vers lâengagement de la dĂ©fense au fond, dans le cas oĂč le tribunal « ignorerait » ce que les avocats tunisiens appellent « les demandes prĂ©liminaires ».
Toujours est-il que les avocats nâont pas eu suffisamment de temps pour arrĂȘter dĂ©finitivement leur « stratĂ©gie ». Quelquâun est venu nous annoncer que lâon avait fait venir les accusĂ©s. LâindĂ©cision des avocats de la dĂ©fense ne sera pas sans incidence sur le dĂ©roulement des dĂ©bats, tout autant que sur lâissue expĂ©ditive du procĂšsâŠ
Le dispositif policier qui Ă©tait dĂ©jĂ impressionnant (dans lâenceinte mĂȘme du palais) au dĂ©but de la rĂ©union des avocats, est devenu (Ă lâissue de cette mĂȘme rĂ©union) lâest devenu plus encore ensuite, notamment dans la salle dâaudience (de taille moyenne) occupĂ©e, pour moitiĂ© au moins, par les forces de lâordre et les agents civilsâŠ
Les avocats de la dĂ©fense Ă©taient Ă©galement trĂšs nombreux. Il y avait, outre M. le BĂątonnier ESSID, son prĂ©dĂ©cesseur le BĂątonnier Abdessattar BEN MOUSSA, Me Ahmed NĂ©jib CHEBBI (PrĂ©sident du PDP, et candidat dissident Ă lâĂ©lection prĂ©sidentielle de 2009), Me Mokhtar TRIFI (PrĂ©sident de la LTDH), ainsi que son fils le jeune avocat Bassam TRIFI, Me Radhia NASRAOUI (PrĂ©sidente de lâALTT), Me Ayachi HAMMAMI, Me SaĂŻda GARRACHE, Me Chokri BELAĂD, Me Abdennaceur LAOUINI, Me KarimâŠ, Me Ali KALTHOUM, Me Zouhayr YAHYAOUI, Me Ridha RADDADI, Me Faouzi BEN MâRAD, Me CHAMAKHI, Me BEN THABET, Me ALIMI, Me HENCHIRI, Me FAJRAOUI, Me EL MEDDEB, Me THLIJANI, Me BEN BOUBAKEUR, Me TEBBASSI, Me Salem SâHIMI, Me SGHAIER, Me MLAOUAH, Me ABIDI, Me TARCHEK, Me BEN HAMMOUDA, Me HAMDI, Me ISSAOUI, Me HAMDI, Me BOUSLAH, Me JARBAOUI, Me AMARA, Me ZAROUANI, Me TROUDI, Me BEN YOUSSEF, Me KEDDIS, Me ZENDAH, Me RABHI, Me MANNAĂ, Me KAROUI, Me SâOUDI, Me KHERAYFI, Me MECHICHI, Me CHARNI, Me KRICHI, Me MOUMNI, Me TOUKABRI, Me BUSLAHâŠ[4] En outre il y avait les avocats constituĂ©s et qui nâont pu assister Ă lâaudience du 11/12/08, tels que Me JâMOUR, Me ABBOU, Me KOUSRI, etc. En tout, pas moins de 124 avocats de toute la Tunisie, tous constituĂ©s bĂ©nĂ©volement pour dĂ©fendre les 38 accusĂ©s.
Lâensemble de la sociĂ©tĂ© civile et politique tunisienne (indĂ©pendante) Ă©tait elle aussi prĂ©sente : la LTDH, AI-Tunisie, le CNLT, lâATFD, lâUGTT, sans compter les associations dont les membres ont Ă©tĂ© « refoulĂ©s » telle que « LâOBSERVATOIRE POUR LA LIBERTE DE LA PRESSE ET DE LâEDITION » ; les partis politiques (ATTAJDID, PDP, FDTL PCOT, PTPD, PSG)
Parmi les observateurs internationaux jâai remarquĂ© la prĂ©sence dâun reprĂ©sentant de la Commission europĂ©enne ; un reprĂ©sentant du syndicat FSU (France) ; la chargĂ©e des affaires politiques de lâambassade amĂ©ricaine (Mme Tina D. SAHA), ainsi que mon confrĂšre Antoine AUSSEDAT du Barreau de Paris (mandatĂ© par la FIDH, le REMDH et lâOrdre des Avocats de Paris)
Le PrĂ©sident GARGOURI (Ă la tĂȘte dâune formation collĂ©giale de cinq juges) a ouvert lâaudience en donnant la parole aux avocats de la dĂ©fense. Il a sans doute estimĂ© quâil nâĂ©tait pas « nĂ©cessaire » de lire au prĂ©alable lâacte dâaccusation ! (comme lâexige lâarticle 143 alinĂ©a 3 CPP : « Il est ensuite donnĂ© connaissance des piĂšces du dossier ») (PremiĂšre irrĂ©gularitĂ© procĂ©durale)
Cinq avocats se sont succĂ©dĂ©s Ă la barre : Le BĂątonnier (en exercice) Me BĂ©chir ESSID, Me Radhia NASRAOUI, Me Chokri BELAĂD, le BĂątonnier Abdessattar BEN MOUSSA et Me Ali KALTHOUM.
Les trois principales plaidoiries (Me BEN MOUSSA, Me KALTHOUM et Me BELAĂD, qui nous ont remis leurs Ă©critures) ont soulevĂ©, in limine litis, les irrĂ©gularitĂ©s suivantes :
1)Â Â Â Â Â SUR LA NON PRĂSENTATION DES SCELLĂS ET AUTRES PIĂCES Ă CONVICTION
Lâaccusation de « constitution d’une entente criminelle » a Ă©tĂ© fondĂ©e sur la saisie d’un certain nombre d’armes (blanches) (et d’armes par destination), ainsi que des disques compacts, des banderoles (portant les inscriptions suivantes : « droit au travail pour le fils de l’ouvrier et du dĂ©shĂ©ritĂ© » ; « donnez-nous du travail, sinon ne rĂ©primandez pas les chĂŽmeurs s’ils la dĂ©clenchent » ; « du travail non des promesses creuses» ; « pas de dignitĂ© sans emploi stable »; « oui pour l’emploi stable qui sauvegarde la dignitĂ©, oui pour notre part de la richesse nationale, oui pour les vrais projets de dĂ©veloppement dans la rĂ©gion »), un tĂ©lĂ©phone portable, une camĂ©ra, des communiquĂ©s et des tracts…
Aucune de ces preuves n’a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e Ă la dĂ©fense. Ce qui constitue une atteinte on ne peut plus grave au principe du contradictoire (et Ă lâĂ©galitĂ© des armes), Ă la publicitĂ© des dĂ©bats, et plus gĂ©nĂ©ralement aux droits de la dĂ©fense.
2)     SUR L’IMPORTANCE DES PROCĂS-VERBAUX CONSTATANT LES RENCONTRES OFFICIELLES ENTRE LES MEMBRES DE « L’ENTENTE » ET LES AUTORITĂS LOCALES
Plusieurs rĂ©unions officielles ont eu lieu entre, dâune part, « le comitĂ© de nĂ©gociation » composĂ©e de Messieurs : Adnane HAJI (dĂ©lĂ©guĂ© syndical) ; BĂ©chir ABIDI (dĂ©lĂ©guĂ© syndical) ; Ali RâHILI (SecrĂ©taire GĂ©nĂ©ral de lâUnion syndicale locale) ; Mohamed KHLAYFI (Ancien dĂ©putĂ© et dĂ©lĂ©guĂ© syndical) ; M. Ali BOUIHI ; et les autoritĂ©s locales reprĂ©sentĂ©es notamment par M. le gouverneur de la ville de Redeyef, le maire, ainsi que cinq dirigeants de la compagnie des phosphates de Gafsa et quatre inspecteurs du travail de la ville de Metlaoui.
La dĂ©fense accorde une importance capitale Ă ces procĂšs-verbaux, dans la mesure oĂč ils apportent la preuve de l’inexistence de « l’entente » allĂ©guĂ©e par l’accusation.
Dans leurs Ă©critures, les avocats disent avoir remis au tribunal des copies des procĂšs-verbaux dont s’agit.
3)Â Â Â Â Â SUR LE DROIT D’ENTENDRE ET DâINTERROGER LES TĂMOINS
Les avocats de la dĂ©fense soutiennent qu’il ne leur a pas Ă©tĂ© donnĂ© d’interroger les tĂ©moins Ă charge ; qu’il n’a pas Ă©tĂ© fait droit Ă leur demande d’entendre les tĂ©moins Ă dĂ©charge (le prĂ©cĂ©dent gouverneur de Redeyef, le maire de la ville, les inspecteurs du travail, les dirigeants de la sociĂ©tĂ© des phosphates de Gafsa, ainsi qu’un certain Omar TAKROUNI, haut officier dans l’armĂ©e nationale, ainsi que le ministre de la santĂ© publique qui a un long entretien avec lâaccusĂ© Adnan HAJI) ; qu’en outre aucune confrontation n’a Ă©tĂ© organisĂ©e (comme l’exige l’article 65 du code de procĂ©dure pĂ©nale) entre leurs clients et les tĂ©moins Ă charge.
4)Â Â Â Â Â SUR LES DEMANDES DâEXPERTISES MĂDICALES
Les avocats soutiennent que la plupart de leurs clients ont Ă©tĂ© victimes de torture et ont subi des traitements inhumains et dĂ©gradants tout au long de leur dĂ©tention et notamment lors de la phase dâenquĂȘte ; quâils ont systĂ©matiquement fait Ă©tat de cette atteinte gravissime Ă lâintĂ©gritĂ© physique des « accusĂ©s » en particulier devant le juge dâinstruction qui en a constatĂ© la vĂ©racitĂ©. Ils prĂ©sentent un tableau des principaux cas de torture allĂ©guĂ©s et constatĂ©s (dont on a pu vĂ©rifier la transcription dans lâordonnance de clĂŽture de lâinstruction)
Â
Date du PV |
Nom de lâaccusĂ© |
Type de torture |
Emplacement des traces |
Observations du juge dâinstruction |
RequĂȘte de la dĂ©fense |
21/06/08 |
Mouadh Ahmadi |
physique |
Griffures au dos et sur le cÎté gauche |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
21/06/08 |
Issam FAJRAOUI |
physique |
Blessures au menton |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
21/06/08 |
Adesselem HLALI |
physique |
Blessures au menton |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
21/06/08 |
Ridha AZZEDDINE |
physique |
Fessier, bras gauche |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
21/06/08 |
Ali JDIDI |
physique |
Les dents, bras gauche |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
21/06/08 |
Thameur MAGHZAOUI |
physique |
Pieds |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
21/06/08 |
Adnane MAHGZAOUI |
Menaces Torture sexuelle |
Poignets |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
23/06/08 |
Med Ben Salah BEDOUI |
physique |
 |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
23/06/08 |
Adnane HAJI |
physique |
 |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
26/06/08 |
Farid HANDIRI |
physique |
 |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
08/07/08 |
Béchir ABIDI |
Menace de sodomie |
 |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
10/07/08 |
TaĂŻeb BEN OTHMANE |
physique |
 |
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
21/07/08 |
Kamel KALBOUSSI |
 |
Ouverture béante au pied droit, blessures au pied et avant bras gauches, ecchymoses⊠|
A constaté les traces |
Demande dâexamen mĂ©dical |
Â
Dâautres griefs ont Ă©tĂ© soulevĂ©s par les avocats de la dĂ©fense (notamment dans la plaidoirie exhaustive âet non interrompue par le PrĂ©sidentâ du BĂątonnier BEN MOUSSA) telle que lâincohĂ©rence flagrante dâun certain nombre de procĂšs verbaux qui taisent les mentions obligatoires devant y figurer (conformĂ©ment aux dispositions de lâarticle 13 bis du CPP tunisien)[5] ; ou la maltraitance et le dĂ©faut de soins envers M. BĂ©chir ABIDI qui, selon la dĂ©fense, a perdu plus de 30 kg durant son arrestation et y a contractĂ© une anĂ©mie et une bronchite aigĂŒe[6].
MalgrĂ© la gravitĂ© extrĂȘme des griefs soulevĂ©s par les avocats de la dĂ©fense, tous plaidant explicitement en faveur de lâannulation des procĂ©dures, pour raisons de torture, non respect des formalitĂ©s substantielles, non respect du principe (dâordre public) du contradictoire, non respect de la publicitĂ© des dĂ©bats (et de lâĂ©galitĂ© des armes), tout autant quâau nom des droits Ă©lĂ©mentaires de la dĂ©fense⊠le PrĂ©sident GARGOURI a dĂ©cidĂ© de passer outre et de procĂ©der immĂ©diatement Ă lâinterrogatoire des accusĂ©s !
MaĂźtre Ali KALTHOUM (du Barreau de Gafsa, et un des principaux avocats de la dĂ©fense) a engagĂ©, avec le prĂ©sident, un dĂ©bat procĂ©dural pointilleux sur le sens exact des dispositions de lâarticle 143 du CPP (tunisien) qui, selon lui, nâautorise lâinterrogatoire des prĂ©sumĂ©s coupables, quâaprĂšs la satisfaction des dispositions (du mĂȘme article) relatives Ă la prĂ©sentation des scellĂ©s, Ă lâorganisation des confrontations, etc.
Prenant acte de lâobstination du PrĂ©sident Ă vouloir passer directement Ă lâinterrogatoire, en arguant de ce que leur audition permettra dâapporter des rĂ©ponses aux « questionnements lĂ©gitimes » des avocats, la dĂ©fense a enjoint les accusĂ©s de « refuser de rĂ©pondre »âŠ
Le PrĂ©sident a alors ordonnĂ© Ă ce quâil soit consignĂ© dans le procĂšs verbal dâaudience le refus des prĂ©sumĂ©s coupables de se prĂȘter Ă lâinterrogatoire du Tribunal, et a suspendu lâaudience « pour dĂ©libĂ©ration ».
Cette dĂ©cision subite, qui a pratiquement mis un terme de maniĂšre totalement inattendue au procĂšs, a surpris tout le monde. Toute lâassistance est restĂ©e figĂ©e⊠jusquâĂ ce que les « accusĂ©s », se dressant sur leur banc, entonnent Ă lâunisson lâhymne national, vite repris par tous les prĂ©sents, Ă lâexception des forces de lâordreâŠ
On entendait des « youyous » dans les bancs du public, situĂ©s derriĂšre celui rĂ©servĂ© aux avocats⊠les accusĂ©s ont Ă©galement eu le temps de scander quelques mots dâordre propres au Mouvement du Bassin Minier⊠avant de se faire Ă©vacuer manu militari par les forces de lâordre, sous les sifflets et les huĂ©es du publicâŠ
Il Ă©tait Ă peu prĂšs 11H30, lorsque le PrĂ©sident avait suspendu lâaudience pour « dĂ©libĂ©rer ». La reprise nâa eu lieu que vers 23H00 !
A partir de 22H00 lâon a remarquĂ© un « remue-mĂ©nage » chez les policiers. CâĂ©tait le signal avant-coureur de la reprise imminente de lâaudience. Personne nâĂ©tait encore tout Ă fait certain que le tribunal (non prĂ©sent au complet, puisque 2 des 5 juges ne siĂšgeront pasâŠ) allait sâapprĂȘter Ă prononcer le jugement.
Un dispositif des plus impressionnants sâest petit Ă petit mis en place dans la salle dâaudience. Des va-et-vient, des chuchotements, des appels tĂ©lĂ©phoniques, des placements, des dĂ©placements⊠bref une fourmiliĂšre dâagents de toutes sortes qui ont pris littĂ©ralement possession de tout le palais et notamment de la salle dâaudience : un corridor de policiers allant de la porte dâentrĂ©e des prĂ©venus, jusquâau banc des accusĂ©s ; derriĂšre lequel une rangĂ©e dâau moins une vingtaine de policiers (sĂ©parant les avocats de leurs clients) ; derriĂšre les avocats une rangĂ©e dâagents civils sĂ©parant les avocats des familles ; tournant le dos au tribunal (face Ă la salle) une autre rangĂ©e de policiers ; un grand nombre de policiers (dont les hauts gradĂ©sâŠ) bloquaient la deuxiĂšme entrĂ©e droite de la salle ; Ă lâavant de lâaile gauche de la salle dâaudience quelques vingt policiersâŠ
Les avocats Ă©taient abasourdis et indignĂ©s (ils mâont affirmĂ© que mĂȘme pendant le procĂšs du « groupe de Soliman » ils nâavaient pas vu « une pareille mascarade qui dit long sur lâĂ©tat pitoyable de la justice tunisienne ») ! Les observateurs internationaux Ă©taient choquĂ©s ! Les familles apeurĂ©es âŠ
Lorsque le Tribunal incomplet (3/5 juges prĂ©sents, sans compter la « dĂ©faillance » du ministĂšre publicâŠ) est entrĂ© en salle pour annoncer la rĂ©ouverture de lâaudience, un jeune avocat du Barreau de Tunis (AL) qui nâa pu contenir sa colĂšre et son indignation au vu de ce « spectacle affligeant », a criĂ© Ă vive voix : « Câest cela votre justice ? Câest cela votre procĂšs Ă©quitable ? Est-ce ainsi que vous respectez lâEtat de droit et lâindĂ©pendance de la justice ? Mais câest une caserne et non plus un tribunal ⊠vous devez avoir honte⊠voyez gens de Redeyef la justice quâon rĂ©serve Ă vos enfantsâŠÂ »
CâĂ©tait « suffisant » pour que le prĂ©sident GARGOURI dĂ©cide de lever lâaudience. Il nây a donc pas eu lecture du jugement. Le prĂ©sident de la section de lâordre des avocats de Gafsa a dĂ» aller en chercher une copie manuscrite auprĂšs du greffe pĂ©nal.
Rendez-vous fĂ»t donnĂ© aux avocats et aux membres des familles, dans la bibliothĂšque de lâOrdre pour lecture du jugement, dont voici le tableau rĂ©capitulatif :
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NOM ET PRENOM |
CONDAMNATION / PEINE |
1) Adnane HAJI |
 |
2) Adel JAYAR |
 |
3) Bechir ABIDI |
 |
4) Tarak HLAYMI |
10 ans |
5) Tayeb Ben OTHMANE |
 |
6) Hassine Ben abdallah |
 |
7) Maher Fajraoui |
 |
8) Fahem BOUKADDOUS |
6 ans (par défaut) |
9) Haroun Hlaymi |
 |
10) Mdhaffar ABIDI |
 |
11) Ghanem CHRAYTI |
 |
12) Abid KHLAYFI |
 |
13) Rachid ABDAOUI |
 |
14) Ridha AMAYDI |
6 ans |
15) Abdessalam HELALI |
 |
15) Fayçal DHAOUADI |
 |
16) Sami AMAYDI |
 |
17) Fayçal BEN AMOR |
 |
18) Ridha AZEDDINI |
 |
19) Mahmoud RADDADI |
 |
20) Boubakar BEN BOUBAKAR |
4 ans |
21) Hafnaoui BEN OTHMANE |
 |
22) Hédi BOUSLAHI |
1 an |
23) Thamer MAGHZAOUI |
 |
24) Issam FAJRAOUI |
 |
25) Mouadh AHMADI |
 |
26) Abdallah FAJRAOUI |
 |
27) Mohamed BALDI |
 |
28) Makram MAJDI |
2 ans avec sursis |
29) Othmane BEN OTHMANE |
 |
30) Mahmoud HLALI |
 |
31) Mohsen AMAYDI |
 |
32) Radouane BOUZAYENE |
 |
33) Habib KEDIRI |
 |
34) IsmaĂŻl JOUHRI |
 |
35) Lazhar BEN ABDELMALAK |
Relaxe |
36) Boujemaa CHRAYTI |
 |
37) Ali JDIDI |
 |
38) Mohieddine CHERBIB |
2 ans (« par défaut ») |
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CONCLUSIONS FINALES DU RAPPORT
Avant de donner la parole au PrĂ©sident de la Section de lâOrdre des avocats de Gafsa pour faire la lecture du jugement, le BĂątonnier de lâOrdre National des Avocats de Tunisie, Me BĂ©chir ESSID, a dit « Ce qui sâest passĂ© aujourdâhui ne mĂ©rite mĂȘme pas lâappellation « procĂšs », tant les irrĂ©gularitĂ©s et illĂ©galitĂ©s sont Ă©videntes, et le non respect des droits de la dĂ©fense est flagrantâŠÂ »
Lâaudience du 11/12/08, devant le tribunal pĂ©nal de Gafsa (statuant en matiĂšre criminelle, puisque lâĂ©quivalent de la Cour dâassises nâexiste pas dans lâordre judiciaire tunisien) Ă laquelle jâai pu assister, mâa permis de constater :
1)     Le non respect du principe de la prĂ©somption dâinnocence
2)     Le rejet « tacite » des innombrables exceptions de nullité soulevées par la défense avant tout débat au fond
3)     Lâabsence de la moindre prise en compte, par le tribunal, des allĂ©gations on ne peut plus graves de torture (de traitements inhumains et dĂ©gradants et de dĂ©faut de soins) Ă©tayĂ©es âpour certainsâ par les constations du juge dâinstruction⊠et la « fin de non recevoir, implicite » des demandes dâexpertises mĂ©dicales
4)     Le refus de présentation des scellés
5)     Le refus de convoquer les témoins (notamment à décharge)
6)     Le refus dâorganiser les confrontations avec les tĂ©moins Ă charge
7)     Le refus de diligenter des enquĂȘtes et informations complĂ©mentaires
Toutes ces observations et constatations me conduisent Ă affirmer que le procĂšs auquel jâai assistĂ©, le 11/12/08 Ă Gafsa, est un des procĂšs les plus inĂ©quitables auxquels il mâa Ă©tĂ© donnĂ© dâassister. Le principe du contradictoire a, en effet, Ă©tĂ© totalement ignorĂ©, lâĂ©galitĂ© des armes et la publicitĂ© des dĂ©bats ont Ă©tĂ© systĂ©matiquement bafouĂ©es, les droits de la dĂ©fense (et implicitement ceux des accusĂ©s) ont Ă©tĂ© piĂ©tinĂ©s, depuis lâenquĂȘte prĂ©liminaire, jusquâĂ lâautoritĂ© de jugement, en passant par celle de lâinstruction.
Sâil est un « procĂšs » qui ne saurait avoir pour « mĂ©rite » que celui dâĂȘtre donnĂ© en contre-exemple absolu de ce quâest un vrai procĂšs Ă©quitable, câest bien celui «des 38 de Redeyef » qui sâest tenu devant le tribunal pĂ©nal de Gafsa le 11/12/08 !
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*Je tiens Ă remercier Karine GANTIN pour sa patiente relecture et ses suggestions pertinentes.
[1] Compte tenu tout d’abord de lâimportance du nombre des accusĂ©s et de leurs qualitĂ©s (« chefs dâune entente »)
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[2] Le cas de M. Mohieddine CHERBIB (PrĂ©sident de la FTCR) est singulier, dans la mesure oĂč lâintĂ©ressĂ© a fait lâobjet de « poursuites » alors mĂȘme quâil rĂ©side Ă des milliers de kilomĂštres de Gafsa ; il nâa jamais fait lâobjet de convocation rĂ©guliĂšre ni de la part des autoritĂ©s dâenquĂȘte, ne de celles de lâinstruction, ni par le Tribunal. Voir Ă ce propos lâargumentaire juridique dĂ©taillĂ© rĂ©alisĂ© par le CRLDHT « Observations sur lâOrdonnance de clĂŽture de lâinstruction dans lâaffaire des 38 de Gafsa : le cas de Mohieddine CHERBIB) »
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[3] La seule femme qui a Ă©tĂ© condamnĂ©e (Ă 4 mois dâemprisonnement) suite aux Ă©vĂšnements de Gafsa, est Mme Zakia DHIFAOUI (qui a dĂ©clarĂ© avoir Ă©tĂ© victime de torture et de harcĂšlement sexuel lors de sa dĂ©tention), membre du Forum DĂ©mocratique pour le Travail et les LibertĂ©s, parti lĂ©gal, dont le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral, le Dr Mustapha BEN JAAFAR, sâest rĂ©cemment dĂ©clarĂ© candidat aux prochaines Ă©lections prĂ©sidentielles de 2009.
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[4] Cette liste nâest pas exhaustive. Je mâexcuse par avance auprĂšs des avocats que je nâai pas citĂ©s.
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[5] Cas de lâaccusĂ© Mansour SOUILMI, dont il est tout dâabord indiquĂ© (dans le PV consignĂ© dans le dossier) quâil a Ă©tĂ© placĂ© en garde Ă vue le 12 aoĂ»t 2008, alors que dans un autre PV il est signalĂ© comme Ă©tant « recherché »âŠÂ ; de mĂȘme il nâest pas indiquĂ© dans le PV de placement en garde Ă vue de M. Abid KHLAYFI (datĂ© du 29/07/08) ni la date ni lâheure de la fin de la GAVâŠ
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[6] Nous avons appris ultĂ©rieurement que lâĂ©tat de santĂ© du concernĂ© sâest gravement dĂ©tĂ©riorĂ© aprĂšs le procĂšs, et quâil a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© au CHU de lâAriana dans la banlieue de Tunis, oĂč il a Ă©tĂ© maintenu menottĂ© Ă son lit dâhĂŽpitalâŠ
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 Appel des artistes tunisiens
« GHAZA DANS NOS YEUX »
« GHAZA dans nos yeux, tant que les enfants meurent les yeux ouvertsâŠÂ »
Câest lâappel lancĂ© par EL HAMRA, théùtre tunisien ami.
Appel rĂ©percutĂ© par nous, artistes citoyens tunisiens, laĂŻques indĂ©pendants, et envoyĂ© Ă tous les amis non tunisiens, notamment europĂ©ens, amis quâon croyait tous jusquâici partager les mĂȘmes valeurs humanistes que nousâŠ
Un de ces amis-là , homme de théùtre avisé et dialecticien brechtien avéré, crut bon de nous renvoyer par S.M.S. le message suivant : « Devant nos yeux, une bande de fanatiques récolte les fruits amers de leurs provocations irresponsables et font payer à leur peuple pris en otage leurs folies meurtriÚres. »
Texte laconique, couperet, dĂ©finitif comme une dĂ©pĂȘche dâagence de presse officielle.
Une rĂ©ponse symĂ©trique reprenant presque mot Ă mot un verdict, aussi court, expĂ©ditif quâaveugle, aurait donnĂ© ceci : « Devant nos yeux, un Ă©tat raciste et belliqueux sĂšme depuis 1948 le fruit de sa domination irresponsable et fait payer Ă un peuple et Ă toute une rĂ©gion pris en otages, sa folie meurtriĂšre »
Chaque mot pĂšse, car chaque mot tue aussi.
Et si cet ami, artiste avisĂ© et humaniste avĂ©rĂ©, avait cĂ©dĂ© Ă son tour Ă lâintox pour devenir lui-mĂȘme intox ?
Et si le principe des deux poids deux mesures lâemportait sur la logique, le bon sens et la sagesse les plus Ă©lĂ©mentaires ?
Et si lâaveuglement qui entame aujourdâhui les esprits les plus lucides, balayait lâĂ©vidence la plus aveuglante ?
Et si les conséquences étaient de plus en plus admises comme des causes ?
Et si lâassailli devait encore et encore passer pour lâassaillant, et la victime pour le bourreau ?
Et siâŠÂ et siâŠÂ ?
TrĂȘve de cris dâOrphĂ©e protestataires et scandalisĂ©s. Buvons notre colĂšre,  dĂ©dramatisons la question, dĂ©passionnons le dĂ©bat et dĂ©plaçons le problĂšme du terrain Ă©motionnel et surtout idĂ©ologique comme tente de le placer notre ami artiste, et plaçons-le sur son terrain rĂ©el, le terrain politique.
Dans la plus grande prison Ă ciel ouvert que lâHistoire ait connue depuis les camps de VARSOVIE, selon un Ă©minent expert onusien, est-il admissible quâon assiĂšge des centaines de milliers dâhumains, quâon les Ă©touffe, affame, assoiffe et coupe du reste du monde, et quâon les punisse dâavoir fait des choix politiques dĂ©mocratiques que lâOccident avait encouragĂ© (et il avait eu raison), puis il en avait boycottĂ© les rĂ©sultats (et il en a eu tort). Sombre contradiction aux  funestes consĂ©quences !
Chaque fois quâune fraction, quâun groupe, une minoritĂ©, un mouvement, un parti Ă©lĂšve la voix, proteste, conteste, Ă©ructe ou menace pour son existence ou sa survie, on le taxe de terrorisme fanatique, nâest-ce pas lâami ?
Autrefois et sous dâautres cieux on appelait cela rĂ©sistance.
Spolier, dĂ©possĂ©der et chasser, envahir et Ă©craser puis Ă©lever des murs pour sĂ©parer les bons des mĂ©chants, les vrais citoyens de la terre promise des occupants historiques, câest tout ce quâa offert lâĂ©tat hĂ©breux au peuple palestinien depuis 1948.
Tout cela avec lâappui passif ou actif des gouvernants du monde entier. ISRAĂL fait ce quâil veut et impunĂ©ment depuis plus de soixante ans.
On ne le répÚtera jamais assez.
Le sort fait aujourdâhui aux palestiniens de GHAZA, suspectĂ©s de terrorisme islamique, a Ă©tĂ© le mĂȘme, faut-il le rappeler, Ă RAMALLAH sous le rĂšgne de lâautre « terroriste » non soupçonnĂ© dâislamisme, nommĂ© ARAFAT.
Ce sort fait aux palestiniens a Ă©tĂ© rendu possible par une longue et patiente construction de lâennemi.
On ne le répÚtera jamais assez.
Qui arrĂȘtera ISRAĂL devant son avancĂ©e inexorable vers lâanĂ©antissement du peuple palestinien ?
Cette nouvelle agression est une agression de trop.
Faut-il se contenter dâexprimer sa colĂšre et dâappeler Ă lâaide humanitaire ?
Lâaide humanitaire suffit-elle en attendant le prochain assaut ?
De toute façon lâaide humanitaire nâest pas forcĂ©ment un acte de solidaritĂ©. Elle relĂšve juste du secours apportĂ© aux blessĂ©s. Et il nâya aucun sens Ă la solidaritĂ© politique demandĂ© par les Arabes si elle nâest pas assortie dâun soutien Ă la rĂ©sistance. Le secours et lâassistance sont importants mais ne relĂšvent pas nĂ©cessairement de la solidaritĂ©.
MĂȘme les ennemis soignent les blessĂ©s en temps de guerre.
Et mĂȘme les ennemis autorisent les convois humanitaires dâacheminer mĂ©dicaments et nourriture.
Pas plus tard que ce matin, mercredi 7 Janvier, le gouvernement israĂ©lien vient de dĂ©cider dâune trĂȘve de quelques heures pour acheminer mĂ©dicaments et vivres Ă GHAZA. Alors vive la solidaritĂ© dâISRAĂL avec le peuple palestinien !?
La cause palestinienne est une cause juste. Lâapartheid orchestrĂ© qui y rĂšgne depuis plus de soixante ans en fait la plus grande injustice humaine de tous les temps. Qui peut encore ignorer cela, qui peut en faire douter ?
Cette agression est une agression de trop.
Ce sont des laĂŻques qui parlent et non quelques dĂ©fenseurs ou sympathisants excitĂ©s dâun quelconque islamisme fanatique.
IsolĂ©s, empĂȘchĂ©s chez nous de monter au crĂ©neau, de nous exprimer dans la rue comme cela se fait dans le monde entier, ou mĂȘme de faire parvenir une voix ni enragĂ©e ni partisane, une voix susceptible dâ inflĂ©chir les dĂ©cisions politiques et diplomatiques, une voix pour exprimer une juste colĂšre contre lâamalgame, la confusion et la propagande sioniste, nous ne cesserons jamais de dĂ©noncer les gouvernements complices, passifs ou actifs qui entĂ©rinent la partition de la PALESTINE et le projet planifiĂ© de son anĂ©antissement.
Le vrai problĂšme est quâISRAĂL et ses alliĂ©s sont en train de parvenir Ă Â toutes leurs fins depuis 1948.
Dâune guerre arabe contre le nouvel occupant (paradoxe de la fin des colonisations) le conflit est devenu petit Ă petit un conflit entre quelques arabes non rĂ©signĂ©s et ISRAĂL. Puis ce conflit sâest transformĂ© en guerre israĂ©lo-palestinienne pour devenir une guerre fratricide palestino- palestinienne, pour finir par une guerre entre ISRAĂL et le HAMAS, ceci avec le silence complice ou les protestations humanitaires plus ou moins formelles des Arabes et des EuropĂ©ens.
Aujourdâhui, LA PALESTINE est un hypothĂ©tique projet dâĂ©tat coupĂ© en deux, sinon vouĂ© Ă la disparition.
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BOLTON, lâancien reprĂ©sentant de BUSH aux Nations-Unies, sans avoir de pouvoir de dĂ©cision et sans doute sans parler pour rien, Ă©voque lâhypothĂšse israĂ©lo- amĂ©ricaine de rattacher Ă terme GHAZA Ă lâEGYPTE et la CISJORDANIE au Royaume HachĂ©mite.
                    Si câĂ©tait le cas, câen serait fini de la PALESTINE et des Palestiniens, et personne nâaura plus le droit de dire : « On ne le savait pas ! ».
JALILA BACCAR             auteur et comédienne
FADHEL JAĂBIÂ Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â metteur en scĂšne et auteur
ANOUAR BRAHEM Â Â Â Â Â Â Â Â Â musicien et compositeur
HABIB BEL HEDIÂ Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â Â producteur
FATMA BEN SAĂDANE   comĂ©dienne
NAWAL SKANDRANI      chorĂ©graphe  Â
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APPEL PRESSANT A LâUNION EUROPEENNE
 08/01/2009  A lâinitiative de lâInstitut Arabe des Droits de lâHomme, nous, acteurs des sociĂ©tĂ©s civiles arabes et europĂ©ennes. -ConsternĂ©s par la gravitĂ© de lâagression israĂ©lienne contre le peuple palestinien et lâinvasion de Gaza, qui a assombri les festivitĂ©s du nouvel an 2008 â 2009, et profondĂ©ment choquĂ©s par le trĂšs grand nombre de civils innocents tuĂ©s qui se comptent par centaines dont un grand nombre dâenfants, sans compter les milliers de blessĂ©s, et par la destruction mĂ©thodique des infrastructures vitales, y compris les symboles culturels, religieux et Ă©ducationnels, sans Ă©pargner mĂȘme les Ă©coles des N.U. refuge des enfants dont les maisons ont Ă©tĂ© dĂ©truites par les bombardements intenses. -ConsidĂ©rant que de tels actes constituent une violation flagrante de toutes les conventions internationales qui forment le systĂšme onusien des droits de lâHomme et des peuples, dont le droit international humanitaire et notamment les conventions de GenĂšve. -Prenant acte de lâappel europĂ©en pour lâarrĂȘt des combats, appel qui se dĂ©marque du soutien inconditionnel à la guerre exprimĂ© par lâadministration amĂ©ricaine sortante. -Estimant que toute initiative pour rĂ©tablir la paix dans la rĂ©gion ne saurait renvoyer dos Ă dos le colonisateur et la victime, et se doit de prendre en compte les faits suivants : Les vĂ©ritables causes de lâinvasion actuelle et de toutes les violences dans la rĂ©gion ne sauraient se justifier par un quelconque alibi, mais dâabord et avant tout par lâoccupation illĂ©gale des territoires palestiniens et leur colonisation continue, avec leur cortĂšge dâassassinats, dâemprisonnement de milliers de palestiniens qui croupissent dans les geĂŽles de lâoccupant depuis de longues annĂ©es sans jugement ou suite Ă des procĂšs iniques, dâhumiliations insoutenables, de destructions des infrastructures garantissant le minimum vital pour un peuple assiĂ©gĂ©, humiliĂ© et poussĂ© au dĂ©sespoir.  Il ne sert Ă rien de jouer sur lâamalgame du terrorisme et de la rĂ©sistance à lâoccupation, ou dâinvoquer le droit lĂ©gitime Ă la sĂ©curitĂ©, mais Ă sens unique, en oubliant quâaucune sĂ©curitĂ© ne saurait se construire sur lâinjustice, la colonisation illĂ©gale des terres des voisins et le non respect de toutes les rĂ©solutions de lâONU . Il est Ă©vident que câest bien la politique expansionniste, agressive et discriminatoire dâIsraĂ«l qui est la cause de lâinsĂ©curitĂ© dans toute la rĂ©gion, et qui ne fera que rendre plus problĂ©matique son intĂ©gration dans son environnement actuel. Encourager une telle politique par lâindiffĂ©rence et lâinaction, sĂšme le doute sur les valeurs universelles de la dĂ©mocratie et des droits de lâHomme et rend leur promotion et leur dĂ©fense dans la rĂ©gion plus difficiles. -ConsidĂ©rant enfin que les intĂ©rĂȘts objectifs de lâEurope sont tributaires de la paix dans la rĂ©gion mĂ©diterranĂ©enne, les signataires de ce document lancent un appel pressant Ă la prĂ©sidence de lâUnion EuropĂ©enne, la Commission EuropĂ©enne, le parlement europĂ©en et lâensemble des instances de lâUE afin de prendre leurs responsabilitĂ©s morales et historiques en agissant au plus vite, avant quâil ne soit trop tard, pour : *ArrĂȘter le bain de sang des civils et des enfants palestiniens * Mettre sur pied au plus vite une force internationale de protection du peuple palestinien. * CrĂ©er une commission internationale dâenquĂȘte sur les bombardements des Ă©coles, notamment des N.U et lâutilisation dâarmes prohibĂ©es comme les bombes phosphoriques et Ă fragmentation.  * Participer activement Ă une solution juste et durable du problĂšme palestinien sur la base des rĂ©solutions des NU. Il y va des intĂ©rĂȘts euro-mĂ©diterranĂ©ens, de la paix dans la rĂ©gion et dans le monde.  Les Signataires
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Rencontre avec l’Ă©pouse du militant emprisonnĂ© Adnane Hajji
LâAfrique et ses tripatouilleurs de Constitution
Nombre de chefs dâEtat suppriment les limitations de mandats pour sâĂ©terniser au pouvoirIls ont dĂ©jĂ modifiĂ© la Constitution pour se maintenir au pouvoir
Abdelaziz Bouteflika (AlgĂ©rie) : Le prĂ©sident algĂ©rien briguera, sans doute, un troisiĂšme mandat Ă la prĂ©sidentielle dâavril 2009 aprĂšs deux quinquennats. Il a fait modifier, en novembre 2008, la Constitution qui limitait le nombre de mandat Ă deux. Paul BarthĂ©lĂ©my Biya (Cameroun) : Au pouvoir depuis 1982 , Paul Biya a supprimĂ© en avril dernier la limitation du nombre de mandats Ă deux dans la Loi fondamentale du Cameroun. Il pourra se reprĂ©senter Ă sa propre succession en 2011, aprĂšs ce qui devait ĂȘtre son second et dernier septennat. Idriss DĂ©by (Tchad) : La Constitution du Tchad a Ă©tĂ© modifiĂ©e en 2005 pour permettre au prĂ©sident dâĂȘtre candidat Ă sa propre succession en 2006, et de conserver le pouvoir dont il sâest emparĂ© depuis son coup dâĂtat en 1990. Yoweri Museveni (Ouganda) : Le prĂ©sident ougandais a manipulĂ© la Constitution de son pays en 2005 pour se maintenir au pouvoir. Il occupe le fauteuil prĂ©sidentiel depuis quâil lâa pris par les armes en 1986. Omar Bongo Ondimba (Gabon) : Au Gabon, la limitation du nombre de mandats a Ă©tĂ© supprimĂ©e en 2003 pour permettre au prĂ©sident Bongo, au pouvoir depuis 1967, de se prĂ©senter autant de fois quâil le souhaite Ă une Ă©lection prĂ©sidentielle. Blaise CompaorĂ© (Burkina Faso) : Au pouvoir depuis son coup dâEtat en 1987, le prĂ©sident burkinabĂš avait supprimĂ© la limitation du nombre de mandats en 1997 pour ĂȘtre candidat et réélu Ă la prĂ©sidentielle de 2008. Il a restaurĂ©, en 2000, cette limitation Ă deux quinquennats. Zine Abidine Ben Ali (Tunisie) : En 2002, la Loi fondamentale de la Tunisie a Ă©tĂ© changĂ©e pour permettre au prĂ©sident Ben Ali, au pouvoir depuis 1987, de se prĂ©senter Ă sa propre succession Ă la prĂ©sidentielle de 2004. La Constitution limitait le nombre de mandats prĂ©sidentiels Ă trois. Feu GnassingbĂ© Eyadema (Togo) : Au Togo, le parlement a votĂ© la non limitation de mandats, fin 2002, pour permettre Ă lâancien prĂ©sident GnassingbĂ© Eyadema de se faire réélire pour un troisiĂšme mandat de cinq ans. Il Ă©tait au pouvoir depuis 36 ans dĂ©jĂ . Feu Lansana ContĂ© (GuinĂ©e) : Lâancien prĂ©sident guinĂ©en avait fait voter la modification de la Constitution en 2002 pour lui permettre de se faire réélire Ă la tĂȘte de la GuinĂ©e en 2003 alors quâil venait dâachever son second et dernier mandat.Bouteflika, vers un troisiĂšme mandat
Ce qui, pour lâheure, nâest quâune intention prĂȘtĂ©e Ă Mamadou Tandja, a dĂ©jĂ Ă©tĂ© accompli par son homologue algĂ©rien. Abdelaziz Bouteflika, 71 ans, a fait sauter la limitation des mandats de la Loi fondamentale de son pays pour, dit-il, « permettre au peuple dâexercer son droit lĂ©gitime Ă choisir ses gouvernants et Ă leur renouveler sa confiance en toute souverainetĂ© ». Pour rĂ©aliser ce hold-up constitutionnel en novembre dernier, M. Bouteflika sâest appuyĂ© sur le Parlement et le SĂ©nat qui lui sont complĂštement acquis. Il saluera dâailleurs le « patriotisme et le sens de la responsabilitĂ© » de ceux-lĂ qui sont censĂ©s reprĂ©sentĂ©s le peuple. PrĂ©sident depuis 1999, aprĂšs une Ă©lection anticipĂ©e, Abdelaziz Bouteflika peut dĂ©sormais briguer, en toute tranquillitĂ©, un troisiĂšme mandat. Selon une analyse du Journal ChrĂ©tien, Bouteflika, rĂ©duit par la maladie, attendrait de rĂ©unir cinq conditions pour annoncer sa candidature Ă la prochaine prĂ©sidentielle dâavril 2009, Ă savoir : obtenir le soutien de lâenvironnement international et national, rassurer les ONG et les journalistes Ă©trangers, obtenir le soutien de lâenvironnement interne, connaĂźtre ses concurrents et enfin attendre le moment appropriĂ©. Au Cameroun, Paul BarthĂ©lĂ©my Biya nâa pu, lui non plus, rĂ©sister Ă la tentation de se maintenir dans son trĂŽne prĂ©sidentiel. Le 31 dĂ©cembre 2007, dans les vĆux de nouvel an prĂ©sentĂ©s Ă ses concitoyens, le prĂ©sident camerounais, au pouvoir depuis 1982, avait annoncĂ© Ă ses compatriotes, son intention de gommer des textes constitutionnels la limitation du nombre de mandats. Celui qui a remplacĂ© Ă la tĂȘte du Cameroun Ahmadou Ahidjo, parti volontairement pour des raisons de santĂ©, a estimĂ© que lâalinĂ©a 2 de lâarticle 6 de la constitution qui limitait les mandats prĂ©sidentiels Ă deux, sâoppose Ă la volontĂ© populaire et « sâaccorde mal avec lâidĂ©e mĂȘme du choix dĂ©mocratique⊠». « Nous allons donc, dans cet esprit, rĂ©examiner les dispositions de notre Constitution qui mĂ©riteraient dâĂȘtre harmonisĂ©es avec les avancĂ©es rĂ©centes de notre systĂšme dĂ©mocratique afin de rĂ©pondre aux attentes de la grande majoritĂ© de notre population », avait-t-il dĂ©clarĂ©. DĂ©but 2008, alors que les Camerounais, prĂ©occupĂ©s par la hausse des prix des denrĂ©es alimentaires, manifestaient violemment dans les rues, Paul BarthĂ©lĂ©my Biya leur fait une sĂ©rie de promesses dont la hausse des salaires de 15%, et, dans la foulĂ©e, profite pour mettre en exĂ©cution son plan. Cela a Ă©tĂ© une formalitĂ© puisque le Parlement est majoritairement dominĂ© par sa formation politique, le RDPC [1]. La Loi fondamentale du Cameroun, revisitĂ©e, stipule dĂ©sormais que le « PrĂ©sident de la RĂ©publique, Ă©lu pour sept ans, est rééligible ». Ainsi, Paul Biya, 75 ans, dont le deuxiĂšme septennat sâachĂšve en 2011 pourrait ĂȘtre candidat Ă sa propre succession autant de fois quâil voudra. Ce nâest pas tout. Le visionnaire prĂ©sident camerounais a anticipĂ© les ennuis judiciaires au cas oĂč il dĂ©ciderait de prendre sa retraite. Les nouvelles dispositions de la Constitution lui confĂ©rent une immunitĂ© aprĂšs son rĂšgne. Une veste que chacun coupe Ă sa mesure Paul Biya a ainsi rejoint, cette annĂ©e, la longue liste des chefs dâEtats qui ont modifiĂ© la Constitution de leur pays (Idriss DĂ©by, Omar Bongo Ondimba, Zine Abidine Ben AliâŠ) pour se maintenir au pouvoir. La liste va sans doute sâallonger au cours des prochaines annĂ©es. La Constitution en Afrique nâest finalement rien dâautre quâun outil juridique qui permet aux Chefs dâEtat de rĂ©aliser leur dessein personnel. La constitution, comme le dit la chanson, est devenue une veste que chacun coupe, taille et recoud Ă sa mesure. [1] Rassemblement dĂ©mocratique du peuple camerounaisÂ
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