Liberté et Equité:  Arrestation de monsieur Abdelmottaleb Ben Marzoug
Dr Moncef Marzouki : Nouvelle méthode de répression crée par le régime tunisien Contre Maßtre Abdel Waheb Maatar
Abdo Maalaoui : Tarek Mekki, un plaisantin ou un futur Président de la Tunisie : Qui est-il ?
VoltaireNet: Plaidoyer pour la justice« Au nom de lâhomme », un film dâAndrea Canetta
2) Arrestation de monsieur Abdelmottaleb Ben Marzoug
Jeudi 19 fĂ©vrier 2009, monsieur Abdelmotttaleb Ben Omar Ben Mohammed Ben Marzoug a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© au district de police de GabĂšs oĂč il avait Ă©tĂ© convoquĂ© par tĂ©lĂ©phone. Il a ensuite Ă©tĂ© conduit Ă lâadministration de la SĂ»retĂ© de lâEtat au ministĂšre de lâIntĂ©rieur Ă Tunis. Son avocate, MaĂźtre Radhia Nasraoui, a dĂ©posĂ© plainte au Procureur de la RĂ©publique de Tunis, pour lâinformer du dĂ©passement de la durĂ©e de garde Ă vue. Abdelmottaleb Ben Marzoug est originaire de Douz dans le gouvernorat de Kebili ; il est mariĂ© et a une fille qui nâa pas trois mois. [âŠ] Pour le bureau exĂ©cutif de lâOrganisation Le PrĂ©sident MaĂźtre Mohammed Nouri (traduction dâextraits ni revue ni corrigĂ©e par les auteurs de la version en arabe, LT)Nouvelle mĂ©thode de rĂ©pression crĂ©e par le rĂ©gime tunisien Contre MaĂźtre Abdel Waheb Maatar DĂ©fenseur De droit de lâhomme
ÂTarek Mekki, un plaisantin ou un futur PrĂ©sident de la Tunisie : Qui est-il ?
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Abdo Maalaoui
Montréal \ Canada
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Encore et encore et encore !!! Les politiciens tunisiens (du pouvoir comme de lâopposition) savent que les tunisiens veulent de la dĂ©mocratie et de la dignitĂ©… Chacun veut nous promettre le voyage au paradis… L’essoufflement et lâusure du RCD aprĂšs 21 ans de rĂšgne sans partage du  pouvoir et le vieillissement de ses cadres qui nâont pas su former la jeunesse qui sera capable de continuer la construction du pays. Les dirigeants de l’opposition n’ont pas su non plus canaliser certaines couches de notre sociĂ©tĂ©. VoilĂ une grande partie des tunisiens sont dĂ©sillusionnĂ©s, amers et fatiguĂ©s…
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Hops.!!! Un autre Leader qui a jailli de nul part qui s’appelleTarek Mekki… J’ai fait mon enquĂȘte et j’ai dĂ©couvert en partie : Qui est M. Tarek Mekki, celui qui veut ĂȘtre PrĂ©sident de la Tunisie ?
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Il vit Ă MontrĂ©al / Canada, comme un grand seigneur ! Son pĂšre est un homme historique : El Haj Mekki, un Polytechnicien, ingĂ©nieur spĂ©cialiste des mines. Il a dirigé toutes les mines en Tunisie telles que la Mine de Tamera, Douahria (Sejnane) et toutes les autres mines Ă travers le pays, avec le temps, il devenu Monsieur Mines du gouvernement de Bourguiba ! … Il a eu une carriĂšre fulgurante. Par la suite il s’est lancĂ© dans le domaine de la construction et du TBP… Un homme intĂšgre, gĂ©nĂ©reux et simple ! Il a fait beaucoup pour la Tunisie… Tous les mineurs de la Tunisie l’aimaient !
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Il a bĂąti une fortune dans le domaine de la construction. Son pĂšre Haj Mekki est une grande personnalitĂ© historique tunisienne de 2Ăšme rang. Il est ami intime de Si HĂ©di Baccouche, HĂ©di Nouira, Mohemd Mzali, et les autres grosses vieilles pointures tunisiennes. Câest un Bourguibiste de la premiĂšre heure⊠Haj El Mekki jouit de la confiance de Ben Ali et de son entourage jusquâaujourdâhui ! Câest un grand homme qui mĂ©rite le grand respectâŠ.
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Le fiston Tarek Mekki est nĂ© dans cette ambiance, fils unique, il a dirigĂ© les plus grands chantiers, il a construit avec son pĂšre la majoritĂ© des grands hĂŽtels, MosquĂ©es, routes, etc⊠Câest un personnage sans CV politique, mais il est trĂšs populiste auprĂšs des couches populaires, il est aussi connu Ă la CitĂ© Ettadhamen, Ă Ibn Khouldoun, quâĂ Gafsa, ou dans les grands hĂŽtels de la Tunisie. Tous les membres de la famille Trabelsi, Belhassen, El Taief, El Matri ⊠etc⊠sont ses ex-clients et des anciens amis⊠Câest lâentreprise de son pĂšre qui a construit les divers chĂąteaux et bĂątiments et câest notre Robbins de Bois Tarek Mekki qui a supervisĂ© les chantiersâŠ
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Tarek Mekki nâest pas un «AS de pique» !!! Il brassait des millions de dinars en Tunisie, il Ă©tait parmi le quatriĂšme cercle du pouvoir Ă©conomique de la Tunisie ! Il a vĂ©cu dans la richesse, mais il repugnait la misĂšre, la pauvretĂ© et le mĂ©pris “hogra” ? Il prennait l’argent de son riche pĂšre et il aidait les pauvres de ses chantiers !..
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Alors que se passe-t-il ? Que veut-il ? Pourquoi il dĂ©laisse la vie de chĂąteau en Tunisie pour sâinstalle au Canada dans le secret et le froid ! Tarek Mekki a visitĂ© lâhĂŽpital juif de MontrĂ©al quand Madame Matri, la fille de Ben Ali a accouchĂ© avec la petite fille de Sakhr El Matri qui est nĂ©e canadienne me confirmait Mme Clarice travaillant dans le mĂȘme hĂŽpital depuis 20 ans ?âŠ
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DâaprĂšs les vidĂ©os sur You Tube ou Daily Motion et autres⊠qui ont Ă©tĂ© regardĂ© par plus de 800,000 personnes, câest Ă©norme, du jamais vu en Tunisie !!!
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Il rĂ©clame haut et fort quâil veut devenir le PrĂ©sident de la Tunisie ? Est-ce que câest une « Joke » ? Ou une rĂ©alitĂ© ?
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Le samedi 8 mars 2009, il Ă©tait invitĂ© Ă lâUniversitĂ© Concordia pour parler entre autres de la situation politique en Tunisie, jâĂ©tais invitĂ© par un ami canadien qui Ă©tait dans le comitĂ© organisateur. Ce dernier mâa demandĂ© si je connais un certain Tarek Mekki ? Je lui ai rĂ©pondu sincĂšrement que je le connais comme tout le monde par ses vidĂ©os. Mais je ne sais pas qui il est ? Ou de quel parti politique il est membre ?
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Jâai dĂ©couvert quâil nâest dâaucun parti.  Lui-mĂȘme est devenu un personnage Parti «Partyman »⊠Il mâa vu, il se renseignait vite sur moi, il pensait que je travaillais pour le Consulat de Tunisie Ă MontrĂ©al ou je suis un agent du gouvernement tunisien, il Ă©tait extrĂȘmement nerveux et mĂ©fiant !
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A certain moment, on a dĂ©cidĂ© de briser la glace de part et dâautre⊠et de se saluer comme des gens civilisĂ©s. JâĂ©tais complĂštement Ă©tonnĂ© de lâabsence de Tunisiens. Il mâavait posĂ© la question sur la raison de ma prĂ©sence Ă cette rĂ©union,  je lui ai rĂ©pondu que je suis invitĂ© simplement par un ami ! Je lui demandais quâil peut rester tranquille, je nâai aucun ennemi tunisien mais jâai des adversaires politiques, des gens avec qui je ne partage pas la mĂȘme vision, ni la mĂȘme mission. Parfois, je vois le dĂ©veloppement Ă©conomique et financier de la Tunisie autrement ! Je suis plus un opposant Ă la bureaucratie, Ă la magouille, et au mĂ©pris, mais jâai toujours gardĂ© du respect pour mes adversaires politiques, chacun a ses convictions ! âŠ
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Il mâa demandĂ© mon nom de nouveau. Je lui ai rĂ©pondu Abdo Maalaoui⊠Il sâest rappelĂ© de mon nom. Il a une mĂ©moire phĂ©nomĂ©nale ! Il Ă©tait Ă la limite de lâinsolence et de lâarrogance ! Il riait des articles que jâai Ă©crits⊠à certain moment, je ne lâai pas ratĂ© ⊠Je lâai traitĂ© de tous les noms, il avait compris quâil devrait arrĂȘterâŠÂ Il sâest approchĂ© de moi en mâembrassant (la chaleur tunisienne !) et en me disant quâil dĂ©tient de grands dossiers. Sâil les divulgue ca va Ă©clater⊠!!! Je lâai rĂ©pondu que ce sport national des tunisiens aprĂšs le foot ne mâintĂ©resse pas, chaque  tunisien(ne) dĂ©tient des dossiers sur les autres ⊠sauf sur eux-mĂȘmes⊠Ce jeu malsain  ne mâintĂ©resse pas, je trouve que ca fait partie de la Culture des gens  arriĂ©rĂ©s !!!
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AprĂšs quelques minutes «cul de sac» chacun de nous est partie rejoindre son cercle dâamisâŠ
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Je lâai vu accompagnĂ© avec des ONG amĂ©ricaines trĂšs actives dans la coopĂ©ration internationale, souvent ces ONG amĂ©ricaines ont trempĂ© dans des activitĂ©s non catholiques en AmĂ©rique Latine, en Afrique et en Asie⊠Je lâai vu sortir avec un attachĂ© de lâAmbassade amĂ©ricaine Ă Ottawa, escortĂ© par trois autres personnes connues dans le milieu de la coopĂ©ration internationale (jâai 30 ans dâexpĂ©rience dans le milieu de la coopĂ©ration internationale), il y avait aussi notre police canadienne, des agents de la GRC qui Ă©taient prĂ©sents aussi !
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Depuis cette rencontre, je me pose des tas de questions !
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š     Tarek Mekki, est-il une carte de rechange que les américains et les canadiens sont entrain de préparer et jouer ?
š     Tarek Mekki, malgrĂ© quâil fĂ»t millionnaire en Tunisie, pour rĂ©aliser toutes ses activitĂ©s, a-t-il accĂšs au financement magique et underground de bailleurs de fonds nord-amĂ©ricains parce que pour entretenir une Ă©quipe dynamique et professionnelle en Europe et en AmĂ©rique, ca prend de lâargent ?
š     Tarek Mekki travaille pour le compte de qui ?
š     Tarek Mekki, une figure politique complĂštement inconnue est devenue la nouvelle star politique de lâheure en deux ans seulement ? Qui sont les gens derriĂšre-lui et avec lui ?
š     Tarek Mekki, avec les 800,000 personnes qui ont visionné ces vidéos, pourquoi il ne crée pas légalement un parti politique en Tunisie ?
š     Sâil veut devenir PrĂ©sident de la Tunisie, il sait que câest le droit de chaque citoyen tunisien garanti et protĂ©gĂ© par la Constitution tunisienne. Pourquoi il ne se prĂ©sente pas officiellement aux Ă©lections 2009 ?
š     Alex Davilmar, un ami de longue date et expert en tĂ©lĂ©communication par Satellite & IP mâavait informĂ© quâil a eu une demande dâun groupe qui veut Ă©mettre des Ă©missions TV par satellite sur la Tunisie, honnĂȘtement jâai pensĂ© la Chaine Zeitouna de Sakhr El Matri, mais maintenant, je commence de comprendre !!! Alex mâa confirmĂ© que câest un groupe canado-amĂ©ricain ! Sakhr nâest pas amĂ©ricain, ni canadien malgrĂ© que sa petite fille adorĂ©e est canadienne mais elle est encre trop jeune ?Â
š     Terek Mekki, est-ce quâil est entrain de prĂ©parer une chaine TV satellitaire pour perpĂ©trer sa pĂ©nĂ©tration politique en Tunisie ?
š     Beaucoup de mystÚres que Tarek Mekki le nouveau Robbins de Bois est entrain de broder !
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Les proches de lâopposition tunisienne sont entrain de le courtiser en secret, il est devenu un personnage incontournable sur la scĂšne politique tunisienne. Est-il vrai que des gens de la famille prĂ©sidentielle est entrain de nĂ©gocier son retour ou acheter son silence dâaprĂšs ses dires, mais il nâest pas prĂȘt⊠Il ne veut rien dâautre que devenir le PrĂ©sident de la Tunisie !!!
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Historiquement : Erreur de le sous-estimĂ© !!!  Rappelons-nous, toute la classe politique tunisienne Ă lâĂ©poque de Bourguiba a sous-estimĂ© Ben Ali, personne nâa pensĂ© quâil sera au pouvoir, mais personne ⊠!!! MĂȘme pas lâopposition !!!
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Est-ce que la Tunisie est devenue le pays des mystĂšres ? Aucun mĂ©dia officiel tunisien nâa osĂ© enquĂȘter ⊠Radio Rumeur proche du cercle diplomatique tunisien Ă MontrĂ©al garde le silence le plus absolu !
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Pourquoi tout ce silence ? Câest bizarre, est-ce que le peuple tunisien a le droit de savoir !!!
E.Mail : maalaoui@yahoo.com
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Tunisie : AprĂšs le rachat de Fortis, qui rendra les 20 MDT Ă la BNA ?
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Des forces de Gauche dont le PCF indésirables
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 CHOUIKHA Abd Raouf
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     Richard Prasquier prĂ©sident du Crif a dĂ©noncĂ© “une explosion de haine dâune virulence alarmante“, observĂ©e lors des manifestations organisĂ©es pour protester contre lâoffensive israĂ©lienne dans la bande de Gaza. Il accuse pour cela les partis de gauche sauf le PS dâĂȘtre directement responsables de dĂ©bordements antisĂ©mites et pratique certains amalgames douteux.Â
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Craignant une recrudescence des actes antisĂ©mites,Richard Prasquier prĂ©sident du Conseil reprĂ©sentatif des institutions juives de France (Crif) a dĂ©noncĂ© “une explosion de haine d’une virulence alarmante“, observĂ©e lors des manifestations organisĂ©es pour protester contre l’offensive israĂ©lienne dans la bande de Gaza.
En effet, en janvier, 352 incidents antisĂ©mites ont Ă©tĂ© enregistrĂ©s, dont 50 actes de violences contre des personnes ou des biens symboliques, selon des prĂ©cisions du ministĂšre de l’intĂ©rieur. Ces chiffres reprĂ©sentent Ă eux seuls 80 % du nombre d’actes antisĂ©mites relevĂ©s pour l’ensemble de l’annĂ©e 2008. Pourtant ce ministĂšre non avare en chiffres, ne prĂ©cise pas si ces violences sont le fait dâactes isolĂ©s Ă©manant de jeunes de « banlieues » ou dâactions mĂ»rement organisĂ©es de la part dâassociations de malfaiteurs ainsi que sur leurs vĂ©ritables motivations.
Les enquĂȘtes ne semblent pas ĂȘtre trĂšs bavardes pour lâinstant, il est pourtant  impĂ©ratif que lâopinion française soit rĂ©guliĂšrement informĂ©e sur ces dĂ©rives inquiĂ©tantes et dangereuses pour la cohĂ©sion nationale.
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L’extrĂȘme gauche, les communistes et les Verts ont Ă©tĂ© vivement accusĂ©s Ă l’occasion du dĂźner annuel du Crif d’avoir  “cautionnĂ© des dĂ©bordements antisĂ©mites lors de manifestations pro-palestiniennes“. Prasquier a dĂ©plorĂ© qu’ “on dĂ©file sous les drapeaux de ce mouvement architerroriste qu’est le Hamas“, aux “cris de morts aux juifs“.
DĂ©jĂ , dans une interview Ă RFI le 15 fĂ©vrier dernier,Prasquier accusateur visait tout particuliĂšrement la secrĂ©taire nationale du PCF : “Je trouve tout Ă fait normal que des gens manifestent pour dire qu’ils dĂ©sapprouvent ou sont hostiles Ă l’opĂ©ration, Ă la politique israĂ©lienne et qui la condamnent“. En fait ce qui lui pose beaucoup plus de problĂšme c’est quâil “ne comprends pas que des hommes politiques qui font partie du consensus dĂ©mocratique de notre pays, et lĂ je pense Ă Marie-George Buffet – Besancenot et la LCR ça fait longtemps qu’ils sont sur le terrain -, puissent dĂ©fendre un mouvement qui est reconnu comme un mouvement terroriste, qui est l’archĂ©type du mouvement terroriste, qui est un mouvement islamiste radical. “
Il poursuit toujours véhément
“Comment croire ces militants politiques aguerris de l’extrĂȘme gauche qui prĂ©tendent n’avoir rien vu et rien entendu de ces dĂ©bordements ? Sur les photos, on ne les voit pourtant pas fermer les yeux ou se boucher les oreilles !”, a-t-il lancĂ© en sâadressant Ă la secrĂ©taire nationale Marie-George Buffet, Ă Olivier Besancenot (NPA) et aux Verts, prĂ©sents aux dĂ©filĂ©s de janvier.
En consĂ©quence, en guise de sanctions, le PCF et les Verts n’ont pas Ă©tĂ© invitĂ©s au dĂźner du Crif du lundi 2 mars.
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M. Fillon a lui aussi fait écho en enchérissant dans sondiscours :
” Nous nâacceptons pas que des manifestations prĂ©tendument pacifistes dĂ©gĂ©nĂšrent en dĂ©bordements de violence, cautionnĂ©s par la complaisance de certains responsables politiques. “
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Les luttes du PCF contre lâantisĂ©mitisme DĂšs lundi,Marie-George Buffet s’est profondĂ©ment “indignĂ©e” par sa mise en cause et a soulignĂ© que les communistes français avaient “toujours Ă©tĂ© aux cĂŽtĂ©s des juifs de France“, notamment “dans la rĂ©sistance contre l’occupant nazi“. Elle a notamment prĂ©cisĂ© “Monsieur le prĂ©sident (…) vous savez que vous trouverez toujours les communistes Ă vos cĂŽtĂ©s dans ce combat contre l’antisĂ©mitisme, comme dans celui contre le racisme »âŠÂ « c’est un amalgame inacceptable de dire ou de sous-entendre que des communistes auraient cautionnĂ© le moindre mot antisĂ©mite ou mĂȘme attentatoire Ă l’existence de l’Ătat d’IsraĂ«l” lors des manifestations.
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Le PCF souhaite dĂ©sormais “fermer cette parenthĂšse qui n’aurait jamais dĂ» s’ouvrir” avec le Crif, a indiquĂ© son porte-parole Olivier Dartigolles. “Il y a sĂ»rement de l’incomprĂ©hension sur la derniĂšre pĂ©riode, il faut se parler.”
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Comme on sâen aperçoit, la charge la plus lourde du prĂ©sident du Crif Ă©tait destinĂ©e au PCF, devenu brutalement responsable des dĂ©bordements voire mĂȘme complice des slogans antisĂ©mites.
Pourquoi ne pas lui imputer aussi  la présence des excités et des casseurs et  le rendre responsable des dégùts causés au cours de ces manifestations !
Leur service dâordre Ă©tait-il tenu de contrĂŽler tout le long du cortĂšge des manifestants ? Â
De toute façon il ne le pourrait pas mĂȘme sâil en avait les moyens.Â
Tous les mĂ©dias en sont tĂ©moins, le cortĂšge du PCF nâĂ©tait pas du tout mĂȘlĂ© aux autres et les militants dont Marie-Georges Buffet dĂ©filaient derriĂšre leurs propres banderoles. Celles-ci dĂ©nonçaient simplement lâagression injustifiĂ©e et dĂ©mesurĂ©e contre une population de Gaza dĂ©munie et ne disposant dâaucune protection. Cette population a Ă©tĂ© prise entre les tirs des belligĂ©rants aprĂšs un long et pĂ©nible blocus. Â
Il est profondĂ©ment injuste de traiter le PCF de la sorte, vu son passĂ© de rĂ©sistance et de lutte historiques.  Il a Ă©tĂ© notamment le fer de lance de la lutte contre lâantisĂ©mitisme et contre toutes formes de racisme, et lâa montrĂ© Ă maintes reprises. Les manifestations de 2006 en faveur de Ilan Halimi sont lĂ pour nous le rappeler.
Souvenons-nous la loi de juillet 1990, dite « loi Gayssot » qui fut votĂ©e afin de  renforcer le dispositif contre le racisme aprĂšs la sortie dâune « thĂšse » nĂ©gationniste, de lâattentat meurtrier rue Copernic et du meurtre du jeune AlgĂ©rien Habib Grinzi, jetĂ© par la fenĂȘtre du train Bordeaux-Vintimille.
Ce parti voulait quant Ă lui, faire des luttes contre les discriminations,  unegrande cause nationale dĂšs octobre 2005. Â
Le Crif reconnaissait dĂ©jĂ par la bouche de son ancien prĂ©sident M. Cukierman “ notre prĂ©sence auCongrĂšs du PCF tĂ©moigne des excellentes relations que nous entretenons avec ce parti. Marie-George Buffet rĂ©pond aussi Ă notre invitation lors de notre dĂźner annuel, de mĂȘme que le PCF participe aux manifestations auxquelles nous appelons, comme cela a Ă©tĂ© le cas rĂ©cemment avec lâassassinat dâIlan Halimi “.
Lâinstrumentalisation de lâantisĂ©mitisme
Le Crif semble agir davantage en parti politique quâen un conseil reprĂ©sentatif se permettant de donner des leçons de ” politiquement correct ” aux partis politiques français et dâindiquer lâattitude Ă adopter afin de ne pas ĂȘtre suspectĂ© dâantisĂ©mitisme. Le Crif pratique un amalgame condamnable entre IsraĂ«l et les gens de culture ou de religion juive. Il renforce donc le communautarisme. En qualifiant d’antisĂ©mite tout opposant Ă la politique d’IsraĂ«l, il dĂ©veloppe un vĂ©ritable terrorisme intellectuel et le dĂ©bat au sein de la communautĂ© française se trouve donc faussĂ©.
Cette instrumentalisation est utilisĂ©e dans un objectif bien prĂ©cis : dĂ©fendre la politique de lâĂ©tat dâIsraĂ«l en maintenant un autre amalgame qu’on ne cesse d’entretenir volontairement entre toute critique de la politique IsraĂ©lienne ou antisioniste et lâantisĂ©mitisme qui sont hĂ©las responsables de la montĂ©e de l’hostilitĂ© envers les juifs de France. Cette hostilitĂ© apparaitrait plus nettement comme lâexpression de l’antisionisme et non  de lâantisĂ©mitisme. (Rappelons que le sionisme a dĂ©jĂ Ă©tĂ© assimilĂ© jadis Ă une forme de racisme et de colonialisme par l’ONU et pas seulement par les jeunes des banlieues).
Cette instrumentalisation nâest-elle typique quâĂ la France ?
Des organisationsjuives britanniques, allemandes et nordiques ont rĂ©agi de maniĂšre bien diffĂ©rente vis-Ă -vis des problĂšmes du Proche-Orient, moins aveuglement communautaristes, et moins alignĂ©es sur la politique israĂ©lienne et on observe ainsi moins dâexpressions d’hostilitĂ© Ă l’Ă©gard des juifs dans ces pays quâen France. Le Prix Nobel Harold Pinter et l’historien Eric Hobsbawm membres du Independent Jewish Voices, dĂ©clarent que lâIJV est Ă©tabli comme contre-poids au soutien sans rĂ©serve pour la politique israĂ©lienne offert par les corps constituĂ©s tels que le Board of Deputies of British Jews [Le Conseil ReprĂ©sentatif des Juifs Britanniques].. FondĂ© en 1760, ce Conseil ReprĂ©sentatif est considĂ©rĂ© depuis longtemps comme l’organe officiel des Juifs britanniques ; mais son soutien sans rĂ©serve Ă IsraĂ«l lui a attirĂ© la censure de ceux qui critiquent la politique de ce pays dans les territoires occupĂ©s. La psychologue Susie Orbach, qui a aussi signĂ© la dĂ©claration de l’IJV, a dit : “En tant que Juive, je ressens une obligation particuliĂšre de m’opposer Ă l’injustice qui est faite aux Palestiniens… Le gouvernement israĂ©lien ne s’exprime pas en mon nom”.
David Goldberg, auteur et rabbin Ă©mĂ©rite de la Synagogue LibĂ©rale Juive, a dĂ©clarĂ© : “Lorsque les supporters juifs d’IsraĂ«l Ă l’Ă©tranger ne s’Ă©lĂšvent pas contre sa politique dĂ©sastreuse, cela ne garantit ni la sĂ©curitĂ© pour ses citoyens ni ne produit le bon climat pour essayer d’atteindre une paix juste avec les Palestiniens… et puis ils… agissent contre les propres intĂ©rĂȘts Ă long terme d’IsraĂ«l”.
Comme  lâa justement remarquĂ©Vincent Geisser « le sentiment pro-israĂ©lien, exprimĂ© par de nombreuses Ă©lites politiques, intellectuels ou Ă©ditorialistes français, est moins le signe dâune adhĂ©sion claire et consciente Ă la politique de lâEtat dâIsraĂ«l que le produit dâune lecture ethnicisante et stigmatisante de la rĂ©alitĂ© sociale, dont certains traits convergent avec les prĂ©jugĂ©s antisĂ©mitesâŠ.Contrairement Ă une idĂ©e reçue, le premier soutien dâIsraĂ«l en France procĂšde moins de lâaction dâun quelconque « lobby » que dâune lĂąchetĂ© et dâune hypocrisie de nombreux leaders dâopinion qui fantasment la puissance de la communautĂ© juive. Leur relation Ă IsraĂ«l se greffe moins sur un amour sincĂšre pour lâEtat hĂ©breu que sur une reprĂ©sentation ethnicisante de la communautĂ© juive qui flirte parfois avec lâantisĂ©mitisme et dĂ©bouche sur une posture politique : “ Je suis avec Eux pour ne pas avoir dâennuis  “. »
Cette instrumentalisation est une arme savamment utilisĂ©e par le Crif profitant dâun contexte français psychologiquement favorable aux fins de dĂ©fendre de maniĂšre inconditionnelle la politique israĂ©lienne, quelle quâelle soit.
Quelques modestes réactions politiques :
Certains hommes politiques de gauche ont essayé en vain de dénoncer cette grossiÚre manipulation, mais peu de médias en ont accordé crédit.
 “C’est la politique permanente du Crif de criminaliser comme antisĂ©mites tous ceux qui sont contre la politique d’IsraĂ«l et solidaires des Palestiniens”, a affirmĂ© Alain Krivine (NPA), et a tenu Ă souligner qu’il n’y avait “aucune banderole ni le moindre slogan antisĂ©mite” dans leurs rangs lors des dĂ©filĂ©s contre l’intervention israĂ©lienne Ă Gaza.
DĂ©jĂ montrĂ© du doigt en 2003, Olivier Besancenot avait poursuivi pour injure Roger Cukierman , l’ex-prĂ©sident du Crif, qui avait alors dĂ©noncĂ© lors du dĂźner de lâĂ©poque, “l’antisionisme” de partis rĂ©volutionnaires telle la LCR. “Cette alliance brun-vert-rouge donne le frisson”, avait-il confiĂ© .
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Jean-Luc MĂ©lenchon (Parti de gauche) qui a participĂ© “Ă titre personnel” au dĂźner du Crif quand il Ă©tait ministre, a dit justement craindre une relance du communautarisme,  “problĂšme de fond” derriĂšre ces
attaques, selon lui. “Le communautarisme n’a pas sa place dans la RĂ©publique”, a-t-il martelĂ©, voyant dans la venue de Nicolas Sarkozy Ă ce dĂźner un danger et une “incitation Ă la communautarisation du pays”.
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LE PS ET LE PROCHE-ORIENT
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De toute la gauche, seul le Parti socialiste  était reprĂ©sentĂ© Ă ce « diner ». En effet, Martine Aubry sâĂ©tait dĂ©solidarisĂ©e des manifestations contre lâoffensive sauvage israĂ©lienne et, avait enfoncĂ© le clou vers la mi-janvier en soutenant que le PS ne participerait pas Ă des manifestations “oĂč ceux qui voulaient porter la paix ont portĂ© des messages de haine, des messages de racisme ou d’antisĂ©mitisme“.
Lâunion de la gauche nâest donc pas pour demain.
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Les massacres des Gazaouis (dont plus dâun quart des morts sont des enfants selon les rapports des organisations humanitaires) nâont suscitĂ© quâune condamnation de principe dâIsraĂ«l. La direction socialiste a estimĂ© quâil sâagit dâune intervention “en rĂ©ponse aux tirs de roquettes du Hamas“, et sâest abstenue de qualifier les actions israĂ©liennes Ă Gaza. Les dirigeants du PS Ă©tablissent une symĂ©trie entre les tirs de roquettes de Hamas et lâusage de lâarsenal militaire le plus sophistiquĂ© par lâune des armĂ©es les plus puissantes du monde. En renvoyant dos Ă dos les deux parties, les dirigeants socialistes Ă©vitent de trancher la question. Dans le cadre des massacres de Gaza et devant lâindignation croissante dans le monde, le silence des socialistes nâen devient que plus choquant. En rĂ©alitĂ©, les dirigeants du PS occultent la question de la colonisation des territoires palestiniens par IsraĂ«l, la cause premiĂšre de ce long conflit. Cet aspect majeur de la lutte palestinienne nâest en effet mentionnĂ© dans aucun communiquĂ© socialiste. Les dirigeants du PS appellent Ă faire cesser « lâengrenage de la violence ».
Le cas de Pascal Boniface
Il est important Ă mon avis de rappeler la crise soulevĂ©e par lâĂ©viction de Pascal Boniface du bureau politique du PS. Celle-ci a laissĂ©e des stigmates encore visibles aujourdâhui. DâaprĂšs lâarticle dePhilippe MarliĂšre, Pascal Boniface Ă©crivit en avril 2001 une note interne destinĂ©e Ă François Hollande. Celle-ci se rĂ©fĂ©rait Ă lâoccupation des territoires par IsraĂ«l et Ă la lutte de libĂ©ration nationale du peuple palestinien ; sa question de principe était la suivante : “Dans nâimporte quelle situation de ce type, un humaniste, et plus encore un homme de gauche, condamnerait la puissance occupante “. Il poursuit : ” Imaginons un pays oĂč le premier ministre [Ariel Sharon] a Ă©tĂ© directement liĂ© [et condamnĂ© par la Cour suprĂȘme israĂ©lienne] Ă des massacres de civils, principalement femmes et enfants, dans des camps de rĂ©fugiĂ©s dĂ©sarmĂ©s [les camps de Sabra et Chatila en 1982] (âŠ) Ce serait une situation inacceptable. Elle est pourtant tolĂ©rĂ©e au Proche-Orient “. Boniface en pragmatique avertit quâon ” ne combattra pas lâantisĂ©mitisme en lĂ©gitimant lâactuelle rĂ©pression des Palestiniens par IsraĂ«l ” et dĂ©nonce le ” terrorisme intellectuel qui consiste Ă accuser dâantisĂ©mitisme ceux qui nâacceptent pas la politique des gouvernements dâIsraĂ«l (et non pas lâEtat dâIsraĂ«l) “. Nous connaissons la suite :  ses dĂ©tracteurs lâont accusĂ© de prĂŽner un rééquilibrage en faveur de la communautĂ© dâorigine arabo-musulmane en France. Boniface conseille aux dirigeants du PS de procĂ©der Ă une relecture politique du conflit, basĂ©e sur le respect des ” principes universels et non pas du poids de chaque communauté “. Il conclut toujours aussi lucide: ” Il est grand temps que le PS quitte une position qui, se voulant Ă©quilibrĂ©e entre le gouvernement israĂ©lien et les Palestiniens, devient, du fait de la rĂ©alitĂ© de la situation sur place, de plus en plus anormale, de plus en plus perçue comme telle, et qui par ailleurs ne sert pas â mais au contraire dessert â les intĂ©rĂȘts Ă long terme du peuple israĂ©lien et de la communautĂ© juive française “.
Ce texte confidentiel attira les foudres de lâambassadeur israĂ©lien Ă Paris. Ce dernier mena, avec plusieurs institutions juives, une violente campagne contre lâauteur de la note, toujours dâaprĂšsPhilippe MarliĂšre. Laurent Azoulai, responsable socialiste en rĂ©gion parisienne et prĂ©sident du Cercle LĂ©on Blum, diffusa une lettre au lendemain du 22 avril 2002 intitulĂ©e « Le Pen doit remercier Boniface ». Il y expliquait que la dĂ©faite de Lionel Jospin Ă©tait en partie due Ă la fuite de lâĂ©lectorat juif aprĂšs la publication de la note de Pascal Boniface. Aux « Douze heures pour lâamitiĂ© France-IsraĂ«l », le 22 juin 2003, Dominique Strauss-Kahn fit rĂ©fĂ©rence Ă une « note non autorisĂ©e et misĂ©rable » sous les huĂ©es du public; Laurent Fabius dĂ©missionna du Conseil dâadministration de lâIRIS; Pierre Moscovici, retira Ă Boniface son poste de dĂ©lĂ©guĂ© national et, de toutes parts, on accusa Pascal Boniface dâantisĂ©mitisme. Boniface dĂ©missionna en 2003 dâun parti dont il Ă©tait membre depuis 1980 [P. Boniface, Est-il permis de critiquer Israel ? Paris, Robert Laffont]
La rĂ©action au « cas Boniface » ne se fit pas attendre. A la fin 2003, un « Appel pour une paix juste et durable au Proche-Orient », rĂ©digĂ© par Pierre Joxe et Paul QuilĂšs (signĂ© par StĂ©phane Hessel, Michel Rocard, Hubert VĂ©drine, Martine Aubry, Jean-Luc MĂ©lenchon, Henri Nallet, Arnaud Montebourg, Manuel Valls et de nombreux militants), vint saluer lâinitiative de GenĂšve. Cet appel socialiste Ă©voque le « droit au retour des rĂ©fugiĂ©s palestiniens de 1947 et de 1967 » et revendique une « citoyennetĂ© pleine et entiĂšre des Arabes palestiniens de nationalitĂ© israĂ©lienne (20% des IsraĂ©liens) ». – Notons que la question du droit au retour faisant rĂ©fĂ©rence Ă la dĂ©cision 194 du Conseil de SĂ©curitĂ© de lâONU a Ă©tĂ© remise en cause par Nicolas Sarkozy lors de son voyage retentissant en IsraĂ«l le 22 juin 2008 -. Ce texte insiste aussi sur les discriminations dont sont victimes les Arabes-IsraĂ©liens du fait de leur origine ethnique et religieuse. Le texte appelle IsraĂ«l « à respecter les droits de lâhomme, le droit international et les Conventions de GenĂšve, Ă lâinstar des dĂ©mocraties dont lâEtat israĂ©lien se rĂ©clame ».
En 2008, un texte intitulĂ© « Palestine : lâexigence du courage politique » proposĂ© par Monique Cerisier-Ben Guiga (sĂ©natrice des Français de lâĂ©tranger qui revient dâun voyage en IsraĂ«l et dans les territoires) pour le congrĂšs de Reims a Ă©tĂ© signĂ© par des militants. Les signataires remarquent que 61 ans aprĂšs le plan de partage de lâONU, il nây a ni Etat palestinien, ni vĂ©ritables nĂ©gociations. Pour ces militants socialistes, bien en phase avec une grande partie de lâopinion internationale, le conflit israĂ©lo-palestinien est clairement de nature coloniale. Le texte nâappelle pas Ă des sanctions contre IsraĂ«l, mais demande simplement la suspension de lâaccord de rehaussement des relations IsraĂ«l-UE. Les dirigeants socialistes pour leur part, se cantonnent dans une position trop alignĂ©e sur IsraĂ«l et les Etats-Unis.
Les grands principes universels (droit Ă lâauto-dĂ©termination des peuples, droits de lâhomme, respect des rĂ©solutions de lâONU et de la Convention de GenĂšve) dont fait rĂ©fĂ©rence rĂ©guliĂšrement le PCF semblent ĂȘtre omis dans la ligne adoptĂ©e par le PS. Dâailleurs, le communiquĂ© socialiste relatif Ă Gaza exprimant la crainte que ce conflit ait des « rĂ©percussions jusque dans notre pays » montre peut-ĂȘtre une prudence prĂ©venant le risque de passions communautaires;  il dĂ©note surtout un dĂ©faut de stratĂ©gie devant les dĂ©bats internes qui risquent dâengendrer dâautres clivages plus douloureux et dâautres “cas Boniface” pourraient se reproduire dans lâavenir.
A la lumiĂšre des derniĂšres Ă©lections israĂ©liennes, du virage Ă droite de la Knesset et du durcissement trĂšs probable de la politique de colonisation, le PCF semble avoir dĂ©jĂ une longueur dâavance aux yeux des militants de gauche et de lâopinion gĂ©nĂ©rale de notre pays. Â
 « IsraĂ«l ne doit pas bĂ©nĂ©ficier dâune totale impunité »
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Par Frédéric Koller
Ancien rĂ©sistant et dĂ©portĂ©, StĂ©phane Hessel a lancĂ© lâidĂ©e dâun «Tribunal Russel» pour la Palestine comme il y en eu un pour le Vietnam avec lâespoir de faire pression sur IsraĂ«l et la communautĂ© internationale
NĂ© en 1917 Ă Berlin, StĂ©phane Hessel a Ă©migrĂ© en France avec sa mĂšre en 1924, luttĂ© aux cĂŽtĂ©s de la RĂ©sistance, Ă©tĂ© dĂ©portĂ© Ă Buchenwald, puis il fut corĂ©dacteur de la DĂ©claration universelle des droits de lâhomme en 1948. MĂ©moire vivante du XXe siĂšcle, ilparticipait dimanche Ă un dĂ©bat sur la libertĂ© dâexpression dans le cadre du Festival du film et forum international sur les droits humains (FIFDH) Ă GenĂšve. En marge du festival, il sâest exprimĂ© sur le conflit israĂ©lo-palestinien, un sujet qui lui tientparticuliĂšrement Ă cĆur. Dâorigine Ă moitiĂ© juive et Ă moitiĂ© protestante, il se place sur le plan moral pour dĂ©noncer les violences israĂ©liennes Ă lâĂ©gard des Palestiniens.
Le Temps: Vous avez Ă©tĂ© trĂšs critique face Ă lâintervention israĂ©lienne Ă Gaza, nâhĂ©sitant pas Ă parler de crime de guerre et de crime contre lâhumanitĂ©. La semaine derniĂšre, avec dâautres personnalitĂ©s, vous avez lancĂ© lâidĂ©e dâun «Tribunal Russell» pour la Palestine. De quoi sâagit-il?
StĂ©phane Hessel: Câest la suite de ce quâavait fait Jean-Paul Sartre sur le Vietnam. Câest une instance Ă©thique. Parmi les initiateurs, il y a Ken Coates, le prĂ©sident de la Fondation Bertrand Russell pour la paix, Ken Loach, Mary Robinson ou Boutros-Ghali.IsraĂ«l ne doit pas bĂ©nĂ©ficier dâune totale impunitĂ©. Si des gens ayant autoritĂ© morale se mettaient ensemble pour faire la liste de toutes les violations du droit international dont les gouvernements israĂ©liens successifs se sont rendus coupables, cela pourrait inciter les grandes puissances, les Nations unies et Luis Moreno-Ocampo Ă mettre devant la Cour pĂ©nale internationale des dirigeants israĂ©liens parmi les plus criminels comme les gĂ©nĂ©raux qui ont frappĂ© sur Gaza. Câest encore embryonnaire. On dĂ©pend de lâĂ©cho des mĂ©dias. Mais Ă lâĂ©poque du Vietnam, cela avait eu un certain rayonnement. Ce qui me choque le plus dans lâhistoire dâIsraĂ«l, câest lâabsence totale de sanctions. LâEurope, par exemple, au lieu de mettre au moins un terme Ă ses relations Ă©conomiques en disant que les droits de lâhomme sont violĂ©s, se rapproche au contraire encore plus dâIsraĂ«l. Les instances internationales sont presque plus responsables que le gouvernement israĂ©lien. Le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de lâONU, Ban Ki-moon, a Ă©tĂ© trĂšs bien, mais le Conseil de sĂ©curitĂ© est bloquĂ© par le veto amĂ©ricain.
â A propos de Gaza, vous avez Ă©galement parlĂ© de dĂ©sastre pour la morale juive. Pouvez-vous prĂ©ciser?
â Jâai eu le privilĂšge, en 1948, dâassister Ă la crĂ©ation de lâEtat dâIsraĂ«l. Je considĂ©rais que câĂ©tait une rĂ©ponse nĂ©cessaire aux horreurs de la Shoah et que les juifs qui avaient combattu avec vĂ©hĂ©mence pour un Etat devaient ĂȘtre soutenus dans cette lutte parce que, conformĂ©ment aux grands principes du judaĂŻsme, ils devaient crĂ©er un Etat moderne, un Etat social, avec une vraie dĂ©mocratie mĂȘme si une difficultĂ© centrale subsistait: quâest-ce quâun Etat juif? Mais Ben Gourion avait clairement indiquĂ© que les Arabes qui resteraient Ă lâintĂ©rieur de cet Etat jouiraient des mĂȘmes droits civiques. Ce sont ces valeurs-lĂ , que jâassimile aux valeurs sur lesquelles la diaspora juive a vĂ©cu tout au long des derniers siĂšcles, la volontĂ© de rĂ©aliser le DĂ©calogue, de rĂ©aliser la tolĂ©rance, de rĂ©aliser les messages de Spinoza, de Freud ou de Marx. Il y a une judaĂŻtĂ© qui a fait Ă©normĂ©ment pour le progrĂšs des valeurs morales dans le monde moderne. Câest Ă un Etat de ce genre que jâaccordais mon plein soutien. La rupture sâest faite avec deux Ă©vĂ©nements: lâun, peu connu quand il sâest produit, que les Palestiniens appellent la nakba [ndlr: la «catastrophe»], câest-Ă -dire la façon dont les juifs en sâimplantant ont Ă©tĂ© amenĂ©s Ă chasser les Palestiniens. La brutalitĂ© de cette expulsion nâa Ă©tĂ© connue que peu Ă peu. Plus tard, aprĂšs la guerre des Six-Jours, lâoccupation et la colonisation des terres attribuĂ©es par les Nations unies aux Palestiniens ont Ă©tĂ© la grande erreur quâun homme comme [Yitzhak] Rabin a reconnue puisquâil a prĂ©cisĂ© quâil fallait revenir aux frontiĂšres de 1967. Je considĂšre que les juifs ont une place Ă occuper dans le monde, comme toutes les grandes religions, et que cette place peut ĂȘtre amicale avec les autres religions. Le contraire, câest un Etat qui joue le rĂŽle dâune force militaire extrĂȘmement puissante, et cela est la nĂ©gation de ce que devrait ĂȘtre le rĂŽle dâun Etat dâIsraĂ«l trouvant sa place amicale Ă lâintĂ©rieur du Proche-Orient. Si on continue Ă rester une puissance dâoccupation, viendra un jour oĂč la rĂ©gion se rĂ©voltera contre cet Etat. Quelle que soit sa puissance militaire, la dĂ©mographie lui est dĂ©favorable. Un jour peut venir oĂč les autres vous diront quâils en ont assez et quâils vous fichent Ă la mer.
â A part quelques rares voix, comme la vĂŽtre, on a le sentiment dâun grand silence de la communautĂ© juive en Europe face aux exactions dâIsraĂ«l Ă Gaza ou plutĂŽt un soutien massif Ă la politique du gouvernement actuel dâIsraĂ«l. Comment lâexpliquez-vous?
â Ce nâest pas si radical. Il y a le CRIF (Conseil reprĂ©sentatif des institutions juives de France) qui est complĂštement infĂ©odĂ© Ă lâEtat dâIsraĂ«l et qui regroupe en effet une bonne partie de la diaspora en France, le pays qui a la plus grande communautĂ© juive dâEurope avec Ă peu prĂšs 500â000 individus. Mais lâUJFP (Union juive française pour la paix), dont je fais partie, est quand mĂȘme rĂ©pandue dans tout le pays. Des groupes comme Palestine 33 comportent aussi beaucoup de juifs. LĂ oĂč vous avez tout Ă fait raison, malheureusement, câest que les mĂ©dias sont trĂšs influencĂ©s par des juifs trĂšs pro-IsraĂ«l et qui dĂ©fendent la thĂšse qui mâexaspĂšre: «Attention, nous avons affaire Ă des gens qui nous envoient des roquettes, alors nous sommes obligĂ©s de nous dĂ©fendre, donc câest la sĂ©curitĂ© de ce petit pays au milieu dâune foule arabe que nous dĂ©fendons.» Cela aboutit Ă ce silence que nous essayons de briser. Il y a heureusement des IsraĂ©liens qui partagent ma façon de voir.
â Que pensez-vous du glissement vers une droite dure au pouvoir en IsraĂ«l avec, pour prochain ministre des Affaires Ă©trangĂšres, lâextrĂ©miste Avigdor Lieberman?
– Cela signifie que lâopinion publique en IsraĂ«l a Ă©tĂ© manipulĂ©e par la capacitĂ© brillante de communication des dirigeants, qui ont fait naĂźtre un sentiment dâangoisse, de peur et de besoin de sĂ©curitĂ©. Chaque fois quâil y a un incident, on joue lĂ -dessus pour faire croĂźtre le besoin dâune armĂ©e forte. Comme dans beaucoup de pays, quand il y a la guerre, lâopinion dĂ©fend ceux qui la font.
(Source : « Le Temps » (Quotidien â Suisse), le 10 mars 2009)
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Plaidoyer pour la justice
« Au nom de lâhomme », un film dâAndrea Canetta
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par Silvia Cattori*
Andrea Canetta vient de consacrer un documentaire, Ă la fois Ă©mouvant et instructif, sur le cas du milliardaire italo-Ă©gyptien Youssef Nada, que le RĂ©seau Voltaire a dĂ©jĂ prĂ©sentĂ© Ă ses lecteurs : Au nom de lâhomme. LâĆuvre souligne la situation kafkaĂŻenne dâune personnalitĂ© accusĂ©e arbitrairement de soutenir le terrorisme, privĂ©e par lâadministration suisse de son droit de circuler et de travailler, bien quâinnocentĂ© Ă la fois par la justice italienne et la justice suisse. Silvia Cattori a interrogĂ© ce rĂ©alisateur Ă propos de lâeffondrement de lâĂ©tat de droit dans le contexte de la guerre globale au terrorisme.
Lors de la premiĂšre projection publique du film « Au nom de lâhomme » [1], le rĂ©alisateur Andrea Canetta, a relevĂ© que, malheureusement, « des histoires, comme celle de Youssef Nada, dont les mĂ©dias ne veulent pas parler, il y en a des milliers. Elles dĂ©montrent quâun processus trĂšs subtil dâĂ©rosion de lâĂtat de droit est en train de se dĂ©rouler en Occident ».
Silvia Cattori : Votre film parle de lâhistoire bouleversante dâun banquier italo-Ă©gyptien de renom, dont la vie a basculĂ© quand, en 1997, des journalistes peu scrupuleux, probablement liĂ©s Ă des services de renseignement, ont voulu associer son nom au terrorisme. Il sâagissait, pour des forces alliĂ©es aux Ătats-Unis, dâexagĂ©rer le phĂ©nomĂšne du « terrorisme », de lui donner un visage, en peignant des croyants musulmans sous les traits du diable, pour rĂ©pandre la peur et prĂ©parer lâopinion publique aux prochaines guerres. Le sort de Youssef Nada est devenu plus angoissant quand, aprĂšs les attentats du 11 septembre 2001, son nom a Ă©tĂ© inscrit par lâadministration Bush sur la « liste noire » de lâONU [2]. Le grand mĂ©rite de votre film est de dĂ©montrer que cet homme si cruellement piĂ©tinĂ© est en rĂ©alitĂ© un homme de paix, un homme exceptionnel. Comme le rĂ©vĂšle la mĂ©diation que Youssef Nada a tentĂ©e en 1989 en Afghanistan. Cet aspect paradoxal nâest-il pas la clĂ© du film ?
Andrea Canetta : En effet, la tragĂ©die de lâAfghanistan, lui, il Ă©tait prĂȘt Ă lâarrĂȘter. Sa mĂ©diation pour Ă©pargner une nouvelle guerre au peuple afghan, Ă©tait en passe dâaboutir ! Si on songe que M. Nada avait notamment prĂ©vu la remise par les SoviĂ©tiques des cartes indiquant les zones afghanes quâils avaient minĂ©es. Et puis, quand on voit ce qui se passe, jâĂ©prouve un sentiment dĂ©vastateur. Car, les souffrances gĂ©nĂ©rĂ©es par les mutilations que ces mines ont causĂ©es Ă de nombreux Afghans auraient pu ĂȘtre Ă©vitĂ©es ou au moins contenues.
En lieu et place, lâaction conjointe des services secrets saoudiens et Ă©tats-uniens a mis des entraves Ă la mĂ©diation de M. Nada, en empĂȘchant le reprĂ©sentant afghan, qui devait conclure un accord avec les SoviĂ©tiques, de prendre lâavion juste une heure avant quâil ne sâenvole.
Tout cela permet de comprendre pourquoi cet homme est là , cloué. Youssef Nada est un homme de paix. Pour cette raison, il dérangeait.
Malheureusement cela renforce lâidĂ©e quâil y a des forces qui rĂ©ussissent Ă prospĂ©rer, Ă©conomiquement et politiquement, seulement dans la guerre. Beaucoup de gens sont complices de cette maniĂšre dâagir, par intĂ©rĂȘt ou par peur.
Câest une impression, je ne pourrais le dire autrement. Mais je suis trĂšs prĂ©occupĂ© par lâattitude peu claire, sinon obtuse, de la classe politique suisse sur toute une sĂ©rie de faits extrĂȘmement graves, touchant la libertĂ©, la souverainetĂ©. Ce sont les symptĂŽmes gravissimes de quelque chose qui est en train de se passer de façon subtile et, câest terrible Ă dire, quasi inĂ©luctable.
Si lâon met en perspective les autorisations tacites accordĂ©es Ă la CIA, Ă lâinsu de la population, pour le passage de certains transports. Si lâon y ajoute lâaffaire Tinner [3],et le cas de Youssef Nada, jâai lâimpression que, dans notre pays, il y a quelquâun qui fait ce quâil veut. Quand je dis « quelquâun », jâentends par lĂ des nations trĂšs puissantes. Je me demande si notre pays nâest pas soumis Ă un chantage et sâil nâest pas, de ce fait, obligĂ© de laisser faire.
Dans lâaffaire des frĂšres Tinner, par exemple, le Conseil fĂ©dĂ©ral a dĂ©truit les documents ; il sâest agi lĂ dâun acte anticonstitutionnel inacceptable. Il ne fallait pas dĂ©truire ces documents ! Ce sont lĂ des preuves qui ont Ă©tĂ© soustraites Ă la justice. Le Conseil fĂ©dĂ©ral a ensuite dĂ©clarĂ© : « Nous avons dĂ©truit ces documents pour Ă©viter quâils ne tombent dans les mains des terroristes ».
Jâai lâimpression que, dans certains cas, la classe politique suisse prend les citoyens pour des imbĂ©ciles. Ici aussi, il sâagit dâun cas assez dĂ©licat. Jâai le fort soupçon que les frĂšres Tinner ont Ă©tĂ© manipulĂ©s par la CIA pour fabriquer un faux dossier sur lâIran, de la mĂȘme façon que cela a Ă©tĂ© fait par la CIA sur lâIrak ; et que cette vĂ©ritĂ© devait rester secrĂšte.
Silvia Cattori : Quel lien y a-t-il entre le calvaire de M. Nada, le passage des vols de la CIA et le cas des frĂšres Tinner ?
Andrea Canetta : Ces trois Ă©lĂ©ments ne sont pas liĂ©es entre eux, mais je les mets ensemble parce que, dans tous ces cas, notre pays finit par violer ses propres principes constitutionnels et, comme par hasard, cela se produit sous la pression dâune nation qui a montrĂ© au monde une certaine maniĂšre dâagir.
Je trouve dĂ©concertant le fait que, sous les yeux de tous, un pays fabrique des mensonges pour envahir un autre pays, ment Ă ses alliĂ©s, les entraĂźnant dans un dĂ©sastre par pur intĂ©rĂȘt. Et quâen dĂ©pit du fait que tout cela soit connu, le Conseil fĂ©dĂ©ral dĂ©truise des documents qui, probablement, sont la preuve dâun autre cas en prĂ©paration, qui semble pareil Ă ce que lâon a mis en pratique en Irak.
Silvia Cattori : Comment expliquez-vous cette soumission du gouvernement suisse ?
Andrea Canetta : Jâai une forte propension Ă croire que les gouvernements ont des Ă©changes ambigus sur beaucoup de sujets. Un des dossiers chauds pour la Suisse concerne les questions liĂ©es aux activitĂ©s de banques, comme lâUBS, aux Ătats-Unis. Ces dossiers font lâobjet de marchandages en dehors de toute transparence ; si tu me donnes ceci, je te laisse faire cela.
Nous savons ce quâest le monde politique, que ces choses se produisent. Mais tout de mĂȘme, si lâon doit aller jusquâĂ renoncer Ă la souverainetĂ© de son propre pays, câest un fait extrĂȘmement grave. Il nâest pas tolĂ©rable de se jouer des citoyens pour sauvegarder certains intĂ©rĂȘts.
Le plus prĂ©occupant est que nous sommes entrĂ©s dans un contexte de paranoĂŻa liĂ©e Ă lâĂ©conomie et Ă la peur du terrorisme. Je sais Ă quoi je mâexpose par cette affirmation ; le terrorisme est un phĂ©nomĂšne exagĂ©rĂ©, manipulĂ© et, je le soupçonne fortement, aussi infiltrĂ©.
Silvia Cattori : Les journalistes ne se sont pas montrés trÚs intéressés à éclairer ces affaires inquiétantes. Ni à parler de la sortie de votre film ?
Andrea Canetta : Ils sont idĂ©ologiquement conditionnĂ©s par un systĂšme mĂ©diatique qui les utilise. La chose qui me dĂ©concerte est que, en rĂ©alitĂ©, les faits sur lesquels nous sommes en train de rĂ©flĂ©chir se dĂ©roulent sous les yeux de tous. Quand sort un film qui traite dâun thĂšme dĂ©licat, comme celui-lĂ , on fait comme sâil nâexistait pas. Le silence est leur force.
Silvia Cattori : Vous avez, vous, une vision claire mais, en pratique, ces rĂ©alitĂ©s ne sont pas si faciles Ă expliquer. Tandis que les livres et les articles de journalistes qui servent lâhistoire officielle obtiennent un large Ă©cho. Cela nâest-il pas dĂ©courageant ?
Andrea Canetta : En fin de compte, la force dâattraction du pouvoir et le martĂšlement de la propagande, cachĂ©e sous le nom dâun certain journalisme, crĂ©ent ces situations.
Je ne comprends pas sâils disent ce quâils disent et mentent parce quâils reçoivent un salaire ou sâil sâagit dâĂ©changes de faveurs. Ceux qui, par exemple, affirment que lâIran est une grande menace nuclĂ©aire rapportent ce que veut le Mossad. Ainsi, des pays et des peuples doivent ĂȘtre attaquĂ©s, dĂ©truits, pour garantir lâhĂ©gĂ©monie de certaines puissances sur une rĂ©gion donnĂ©e.
Je fais partie des mĂ©dias, mais jâessaye dâĂȘtre trĂšs vigilant en ce qui concerne les principes dĂ©ontologiques. Je suis un rĂ©alisateur. Je regarde les choses sous un angle humain.
Je nâarrive pas Ă comprendre comment on peut rester sans sâinterroger sur la version officielle des attentats de 2001, alors que 66 % des habitants de New York, qui nâont pas de voix, nây croient pas [4]. Pour nombre de gens, câest tellement Ă©vident ! Câest mĂȘme perçu comme la plus criminelle et gĂ©niale opĂ©ration « Faux drapeau » de lâhistoire contemporaine. Le pourquoi et le comment de ces Ă©vĂšnements reste Ă Ă©claircir mais, comme le disait le juge anti-mafia Giovanni Falcone [5], il faut suivre les flux dâargent car les mandants laissent des traces derriĂšre eux, comme les limaces. Qui a beaucoup gagnĂ© dâargent et de pouvoir depuis le 11 septembre 2001 ?
Silvia Cattori : Hier, toutes les portes du pouvoir sâouvraient Ă Monsieur Nada. Il traitait avec les plus importants dirigeants en Occident. Aujourdâhui, oĂč sont-ils passĂ©s ?
Andrea Canetta : Câest vraiment dĂ©plaisant de constater que des personnes de pouvoir, qui faisaient partie de son cercle dâamis et de relations, ont pris leurs distances dĂšs que Youssef Nada a Ă©tĂ© calomniĂ©. Câest lâautre aspect dĂ©sagrĂ©able de ces accusations. Dans le monde arabe, le terme terroriste est dĂ©vastateur. Pour Youssef Nada, dans sa culture, lâaccusation de terrorisme est vraiment infamante. Je voulais intituler le film « Nous sommes tous des terroristes », selon le postulat que, si lui est un terroriste, alors nous le sommes tous. Mais je nâai pas osĂ©. Je sentais que ce mot est la cause de trop de souffrance. Je le dis sincĂšrement. Tout cela me brise le cĆur.
Le film documentaire est une forme dâexpression qui permet, dans une certaine mesure, de saisir les nuances importantes sur les vicissitudes de la vie humaine. Dans la narration, jâai entremĂȘlĂ© passĂ© et prĂ©sent selon une architecture qui, petit Ă petit, dĂ©voile le rĂŽle international de Youssef Nada en Orient et au Moyen Orient. Je serais heureux si, aprĂšs avoir vu ce film, les gens rĂ©alisent que Youssef Nada est un homme de paix.
Silvia Cattori : Quand les lumiĂšres se rallument, on se sent un peu orphelins. Et on se demande ce que chacun dâentre nous peut faire pour briser ce cycle terrifiant ?
Andrea Canetta : Il est important que les spectateurs du film dĂ©couvrent la vraie personnalitĂ© de Youssef Nada, et puissent percevoir son honnĂȘtetĂ© fondamentale. Et comprendre que cet homme, si injustement puni, tient un discours civique. Câest important de reconnaĂźtre cet aspect noble et gĂ©nĂ©reux du personnage.
Je sais que Youssef Nada souffre beaucoup des injustices que subissent des peuples quâil connaĂźt bien. La privation de ses biens, ce nâest pas ce qui compte pour lui. Pas mĂȘme la perte de son prestige. Il souffre Ă©normĂ©ment de ne plus pouvoir poursuivre ce quâil considĂ©rait comme sa mission : aider ses frĂšres en difficultĂ© au travers dâĆuvres de bienfaisance.
Silvia Cattori : Comment expliquer ce refus du gouvernement suisse de redonner Ă M. Nada sa libertĂ© et lâusage de ses biens ?
Andrea Canetta : Le problĂšme est de lui restituer son droit dâentrer en Suisse et dâen sortir, comme nâimporte quel citoyen. En rĂ©alitĂ© il vit en Italie, mais dans une enclave Ă lâintĂ©rieur de la Suisse. Il pourrait aller en Italie en empruntant le couloir international sur le lac, en prenant un bateau. Il demande simplement le droit de passage en Suisse. Il leur demande : « Quâai-je fait de mal ? » Il a raison de faire valoir le droit de passage. Câest une demande parfaitement lĂ©gitime. Ce refus de la part de la Suisse est emblĂ©matique dâun enjeu Ă©norme.
Vous comprenez sur quoi spĂ©culent ces gens innommables, en le maintenant dans cette situation et en gelant ses avoirs ? Ils veulent lâamener Ă la banqueroute. Et alors câen est fini. Sâil fait banqueroute il ne pourra plus jamais payer les avocats engagĂ©s Ă assurer sa dĂ©fense dans cet imbroglio juridique et toutes les actions en cours sâarrĂȘtent. Ces autoritĂ©s qui le maintiennent clouĂ©, sans moyens de subsistance, savent pourquoi ils maintiennent ses biens gelĂ©s. Tout cela est calculĂ©.
Pourquoi ses avoirs sont gelĂ©s ? Ces avoirs sont siens. Mais il ne peut rien en faire. Pendant ce temps ils se dĂ©valuent. M. Nada sait parfaitement que tout ce quâil possĂšde effectivement, perd de sa valeur. Ses maisons sont en train de partir en ruine prĂ©cisĂ©ment parce quâon ne lui permet pas de sâen occuper.
Silvia Cattori : Alors quand Micheline Calmy-Rey, conseillĂšre fĂ©dĂ©rale chargĂ©e des Affaires Ă©trangĂšres, se rĂ©fĂšre au droit ce ne sont que des paroles en lâair ?
Andrea Canetta : Mais vous pensez encore que ce sont des erreurs judiciaires ? Des erreurs dâanalyse ? Non, non. Ceux qui ont mis sur pied cette guerre au terrorisme ont tout calculĂ©. La Suisse agit en consĂ©quence. Les consultants politiques sont conditionnĂ©s et limitĂ©s. Câest ce que jâai dit tout Ă lâheure : la chose dĂ©concertante est quâil y a des pays qui font ici ce quâils veulent. Ce nâest pas une perversion de la Suisse. On comprend que ce pays est soumis Ă un chantage.
Silvia Cattori : Des puissances exercent un chantage sur la Suisse ?
Andrea Canetta : Je ne pense pas quâil y ait des « squelettes dans le placard » ; ils nâen ont mĂȘme pas besoin. Câest de lâarrogance pure et simple. Quand Youssef Nada mâa demandĂ© : « DĂ©sormais, qui peut les arrĂȘter ? » jâai rĂ©pondu : « Ils peuvent seulement sâautodĂ©truire ».
Silvia Cattori : Donc, Madame Calmy-Rey ment quand elle dit que la Suisse doit appliquer les sanctions de lâONU ?
Andrea Canetta : La grande habiletĂ© de tout politicien est de faire croire quâil travaille pour le bien de la communautĂ© alors que, au lieu de cela, il se soucie de sa propre carriĂšre. MĂȘme en admettant que Madame Calmy-Rey soit de bonne foi, en substance la Suisse est face Ă un Conseil de SĂ©curitĂ© qui a un pouvoir unilatĂ©ral sur les Ătats membres et peut anĂ©antir les citoyens des nations sujettes ; comme cela sâest vu avec les listes noires.
VoilĂ le grand problĂšme de la classe politique aujourdâhui : il sâagit dâune caste au service des pouvoirs de lâĂ©conomie et de la finance. La guerre au terrorisme est une affaire Ă©conomique inimaginable, parfaite. Et le terrorisme câest une chose vague ; il suffit dâĂ©crire des articles et de diffuser des informations manipulĂ©es par les services secrets, pour justifier des guerres et combattre des peuples sans fin.
On fournit aux gens une information quâils ne peuvent pas vĂ©rifier. Puis, quand lâopinion publique commence Ă se rendre compte que la menace du terrorisme est exagĂ©rĂ©e et quâelle a pour rĂ©sultat lâĂ©rosion des libertĂ©s, il est facile Ă certains services secrets de fabriquer un climat de tension et de manipuler un attentat avec une opĂ©ration du genre « Faux drapeau ». Cela permet de relancer la guerre et, sous prĂ©texte de sĂ©curitĂ©, de justifier toutes les dĂ©penses astronomiques quâelle entraĂźne. Ă chaque fois on donne un tour de vis supplĂ©mentaire aux libertĂ©s ; et ainsi Ă lâinfini, jusquâau tour de vis qui conduira au pouvoir autoritaire absolu. Qui sont les hommes qui administrent tout cela ? Encore une fois : souvenons-nous de ce que disait le juge Falcone.
Pour paraphraser le titre cĂ©lĂšbre de Fenimore Cooper « Le dernier des Mohicans, câest trĂšs prĂ©occupant de penser que M. Dick Marty [6] apparaĂźt comme « le dernier des politiciens » intĂšgres. Câest le paradoxe. Nos reprĂ©sentants politiques devraient ĂȘtre tous comme lui honnĂȘtes, mus par les mĂȘmes motivations. Au lieu de cela, il fait figure de mouche blanche.
Silvia Cattori : Des personnes comme vous, qui savent que M. Nada est injustement « cloué », ne peuvent que souffrir ?
Andrea Canetta : La mĂ©lancolie, le poids sur le cĆur, sont des Ă©motions personnelles. Ma mĂ©lancolie est tempĂ©rĂ©e par le fait que, en rĂ©alitĂ©, je suis heureux dâavoir rencontrĂ© cet homme profond qui mâa ouvert les yeux sur les rapports humains, sur le monde arabe et aussi sur lâOrient.
Youssef Nada mâa permis de comprendre quelque chose dâimportant ; que lâon peut ĂȘtre milliardaire et tout Ă la fois compatissant et humain. Lâon peut ĂȘtre milliardaire sans ĂȘtre nĂ©cessairement conditionnĂ© par les facilitĂ©s qui en dĂ©coulent. Je ne le savais pas ; jâavais cette image selon laquelle, celui qui appartient Ă un niveau social trĂšs Ă©levĂ© est quelquâun qui exploite les autres. Jâai compris quâil est possible de rester profondĂ©ment simple et humain, proche des humbles et des plus dĂ©shĂ©ritĂ©s, tout en Ă©tant trĂšs fortunĂ©.
Silvia Cattori : Partant de cette atroce et douloureuse expĂ©rience, votre film permet de comprendre que la prĂ©tendue guerre au terrorisme est en mĂȘme temps une guerre contre nos libertĂ©s. En somme, les gouvernements nâont jamais autant invoquĂ© les droits de lâHomme que depuis que, dans le cadre de cette hystĂ©rie antiterroriste, ils les foulent aux pieds ?
Andrea Canetta : Les droits de lâHomme peuvent ĂȘtre utilisĂ©s comme une arme. Quand on pratique le deux poids deux mesures avec les droits de lâHomme, ceux-ci deviennent un instrument de lâOccident pour soumettre certains pays. Aller dĂ©verser nos discours sur les droits dans les pays musulmans, dĂ©signer certains pays comme non respectueux des droits de lâHomme et en oublier dâautres, câest se servir dâune arme.
Lâexploitation des droits de lâHomme est la grande habiletĂ© du totalitarisme qui est en train de se mettre en place. Faire usage dâun certain langage progressiste, humanitaire, qui invoque le droit, sert Ă camoufler les vraies raisons qui se cachent souvent derriĂšre ces mots. Je nâai pas confiance en lâONU telle quâelle se prĂ©sente. LâONU ne sera-t-elle pas demain lâinstrument qui permettra au totalitarisme mondial de serrer la vis ?
Silvia Cattori : Comment contraindre dĂšs lors les gouvernements Ă rĂ©parer lâinjustice et Ă rendre la libertĂ© Ă des gens comme Monsieur Nada ?
Andrea Canetta : Monsieur Nada, ainsi que tant dâautres personnes inscrites sur la liste noire, sont innocentes et mĂ©ritent des excuses officielles et des indemnisations pour les dommages quâelles ont subis. LâItalie et la Suisse devraient intervenir tout de suite pour exiger que leurs noms soient retirĂ©es de cette liste noire, afin quâelles puissent retrouver immĂ©diatement leurs libertĂ©s et lâaccĂšs Ă leurs biens.
Leur histoire est exemplaire de la façon dont le concept de « Choc des civilisations » se rĂ©vĂšle pour ce quâil est vraiment : non pas une analyse, mais une stratĂ©gie politico-militaire Ă lâĆuvre. Je pense quâil est important de la faire connaĂźtre car elle concerne chacun de nous, notre dĂ©mocratie et les valeurs que nous prĂ©tendons dĂ©fendre.
(*) Silvia Cattori
Journaliste suisse.
Traduit de lâItalien par JPH.
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[1] « In the name of Man », dâAndrea Canetta, 50 ans, rĂ©alisateur suisse italien, a Ă©tĂ© projetĂ© au 44eme film festival « JournĂ©es cinĂ©matographiques », de Soleure, le 20.01.09, oĂč cet entretien a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©. Le film original, en italien, est disponible Ă©galement en versions anglaise et française. Toute personne intĂ©ressĂ©e Ă projeter « Nel nome dellâuomo » lors de confĂ©rences ou de festivals, peut sâadresser Ă : Andrea.Canetta
[2] Voir : « Lâincroyable histoire de Youssef Nada » et « Pour nous, le mal est dĂ©jĂ fait », par Silvia Cattori, RĂ©seau Voltaire, 15 juin et 26 octobre 2008.
[3] Voir : « Affaire Tinner : tir de barrage contre le gouvernement », Swissinfo.ch, 23 janvier 2009.
[4] Information recueillie par Andrea Canetta, à « Ground Zero », auprÚs du comité des habitants de New York.
[5] Giovanni Falcone, né en1939 à Palerme, était un juge trÚs connu engagé dans la lutte anti-mafia. Il a été assassiné en mai 1992.
[6] M. Dick Marty se montre trĂšs rigoureux sur tous ces dossiers. _ Sur la question des listes noires, il Ă©crivait, en conclusion de son rapport de mars 2007 au Conseil de lâEurope : « La pratique actuelle des « listes noires » de lâONU ne bafoue pas seulement les droits fondamentaux, en causant de flagrantes injustices Ă de nombreuses personnes Ă lâencontre desquelles rien nâa pu ĂȘtre dĂ©montrĂ©, mais dĂ©crĂ©dibilise toute la lutte internationale contre le terrorisme, (âŠ) » (Voir : « Listes noires du Conseil de sĂ©curitĂ© des Nations Unies – Note introductive », par Dick Marty, rapporteur, Commission des questions juridiques et des droits de lâhomme de lâAssemblĂ©e parlementaire du Conseil de lâEurope, 19 mars 2007. (cf. titre IV, paragraphe 13, alinĂ©a 2).) Et, dans ses dĂ©clarations Ă la presse, il dĂ©nonçait : « la dangereuse Ă©rosion des droits et des libertĂ©s fondamentales qui est en cours, mĂȘme dans les enceintes mandatĂ©es pour les protĂ©ger et les promouvoir. » (Voir : « Dick Marty dĂ©nonce la “liste noire” du terrorisme »,Swissinfo.ch, 25 avril 2007.) En ce qui concerne cette destruction de documents par le Conseil fĂ©dĂ©ral, il a dĂ©claré : « Ce qui sâest passĂ© est gravissime : des piĂšces ont Ă©tĂ© soustraites Ă la justice et dĂ©truites Ă tout jamais, alors quâil y avait dâautres solutions. On nâa jamais rien vu de tel dans notre pays. » (Voir : « Dick Marty : « Le Conseil fĂ©dĂ©ral sâest prostituĂ© pour Les Ătats-Unis » »,LâHebdo, 29.01.2009)
(Source : « VoltaireNet » (France), le 2 mars 2009)
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