10 mai 2011

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TUNISNEWS
11 Úme année, N°4004 du 10.05.2011


FIDH: Tunjsie – Recrudescence de violences policiĂšres

Reporters sans frontiĂšres: TUNISIE – Les journalistes se mobilisent pour dĂ©noncer la violence policiĂšre

Reporters Without Borders: TUNISIA – Journalists demonstrate against last week’s police violence

Dynamique Citoyenne des Tunisiens à l’Etranger

AFP: Tunisie: volonté du gouvernement de tenir les élections le 24 juillet


REVUE DE PRESSE


FĂ©dĂ©ration internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH)
 
Communiqué
Tunisie
 

Recrudescence de violences policiĂšres

http://www.fidh.org/Recrudescence-de-violences-policieres
Le 10 mai 2005 – Quatre mois aprĂšs la chute du rĂ©gime de Ben Ali, la FIDH dĂ©nonce la multiplication des violences policiĂšres dans le cadre de manifestations antigouvernementales. Alors que le 6 mai, le ministĂšre de l’IntĂ©rieur prĂ©sentait ses excuses pour la rĂ©ponse brutale de la police aux protestations, les forces de l’ordre ont continuĂ©, dans les jours qui ont suivi, Ă  rĂ©primer violemment les manifestations, causant la mort d’un militant politique.
 
Le 8 mai 2011, Mahmoud Toumi, un membre du Parti du Travail patriotique et dĂ©mocratique a en effet succombĂ© Ă  ses blessures aprĂšs avoir Ă©tĂ© touchĂ© dans le dos par une balle tirĂ©e par l’armĂ©e. Il tentait de s’interposer pour empĂȘcher des jeunes casseurs de lancer des pierres sur un poste de police au cours d’une manifestation Ă  Sliman (banlieue de Tunis). Le mĂȘme jour, la police tunisienne a eu recours Ă  du gaz lacrymogĂšne pour disperser une manifestation antigouvernementale dans le centre de Tunis.
 
Depuis le 5 mai, des manifestations antigouvernementales regroupant majoritairement des jeunes ont lieu Ă  Tunis et sont quasi systĂ©matiquement rĂ©primĂ©es par un important dispositif policier utilisant des gaz lacrymogĂšnes et des matraques. Des violences ont Ă©tĂ© dĂ©noncĂ©es Ă  l’encontre de manifestants et de journalistes. Quatorze journalistes couvrant les manifestations pour des mĂ©dias tunisiens et internationaux ont Ă©tĂ© brutalisĂ©s par des policiers dans la capitale, les 5 et 6 mai. Un bloggeur qui filmait une agression commise Ă  l’encontre d’un journaliste pendant la manifestation du 6 mai a Tunis a Ă©tĂ© sĂ©vĂšrement battu et menacĂ© par des policiers en civil et en uniforme. Les forces de police sont Ă©galement entrĂ©es dans le local de deux journaux gouvernementaux, la Presse et al Sahafa et ont agressĂ© un journaliste qui s’y trouvait. Le 7 mai, un couvre-feu a Ă©tĂ© dĂ©crĂ©tĂ© Ă  Tunis et dans sa banlieue pour une durĂ©e indĂ©terminĂ©e.
 
La FIDH appelle le gouvernement tunisien de transition Ă  mettre fin Ă  toute forme de violence Ă  l’encontre des manifestants et Ă  diligenter une enquĂȘte indĂ©pendante sur les Ă©vĂ©nements ayant causĂ© la mort de Mahmoud Toumi.
 
La FIDH s’inquiĂšte vivement des violences et actes d’intimidation Ă  l’encontre de journalistes et de bloggeurs. Elle appelle les autoritĂ©s tunisiennes Ă  se conformer Ă  leurs engagements internationaux et Ă  respecter et garantir le droit de rassemblement pacifique et les libertĂ©s d’expression et d’information.
 
Contacts presse : Karine Appy/Arthur Manet + 33 1 43 55 14 12 / + 33 1 43 55 90 19


Reporters sans frontiĂšres
10.05.2011
(actualisation du communiqué du 06.05.2011)
 

TUNISIE – Les journalistes se mobilisent pour dĂ©noncer la violence policiĂšre

« La violence dĂ©ployĂ©e par les policiers contre les journalistes au cours des derniers jours rappelle de mauvais souvenirs, comme si les anciennes mĂ©thodes Ă©taient de retour, prĂšs de quatre mois seulement aprĂšs la chute de Zine el-Abidine Ben Ali. Nous demandons au gouvernement de transition d’ouvrir une enquĂȘte sur ces incidents et de donner des instructions claires aux forces de l’ordre afin que de telles pratiques cessent », a dĂ©clarĂ© Jean-François Julliard, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de Reporters sans frontiĂšres.
Le 9 mai 2011, plusieurs dizaines de journalistes sont descendus dans les rues de Tunis pour dĂ©noncer les attaques brutales dont ont Ă©tĂ© victimes une quinzaine de journalistes qui couvraient des manifestations dans la capitale entre les 5 et 7 mai dernier. Violemment pris Ă  partie, leur matĂ©riel avait Ă©tĂ© soit confisquĂ©, soit dĂ©truit. Les interpellations avaient Ă©tĂ© nombreuses, les policiers ne faisant pas la diffĂ©rence entre manifestants et professionnels de l’information.
L’appel Ă  manifester a Ă©tĂ© lancĂ© par le Syndicat national des journalistes tunisiens pour exhorter les autoritĂ©s Ă  prĂ©server la libertĂ© de presse et empĂȘcher tout retour aux pratiques de l’ancien rĂ©gime. Selon le Syndicat, ces violences commises par les agents de police ont pour but de verrouiller les mĂ©dias et priver l’opinion publique de l’information en Tunisie.
Ainsi, le journaliste du quotidien francophone La Presse et correspondant pour l’AFP, Abdelfattah Belaid, a Ă©tĂ© pris en chasse par des agents de police qui l’avaient poursuivi dans les locaux de son journal et tabassĂ© avec une barre de fer sur la tĂȘte. Deux appareils photos et un ordinateur portable lui ont Ă©tĂ© confisquĂ©s. La veille dĂ©jĂ , des policiers avaient agressĂ© une journaliste de Radio Kalima, Marwa Rekik, qui rĂ©alisait un reportage avenue Bourguiba, en fin d’aprĂšs-midi. Violemment frappĂ©e Ă  la tĂȘte, la victime a dĂ» ĂȘtre hospitalisĂ©e.
Zoubeir Souissi, photographe de l’agence Reuters, a relatĂ© Ă  l’Agence France-Presse s’ĂȘtre vu interdire, par des policiers, de prendre des photos, avant d’ĂȘtre rouĂ© de coups de pieds et de matraque. Il dĂ©clare s’ĂȘtre fait voler son appareil photo par un agent, qu’il a dĂ» soudoyer pour le rĂ©cupĂ©rer.
D’aprĂšs le communiquĂ© de presse du Syndicat des journalistes, ont Ă©galement Ă©tĂ© victimes des violences policiĂšres :
Mohamed El-Hammi de l’agence European Photo Agency
Hassan Dridi d’Associated Press,
Hamza Elaouini de l’agence de presse TV,
Lofti Hajji, Mohamed Amin Ben Nejma et Anass Ben Salah de la chaĂźne Al-Jazeera,
Chaffya Ibrahim du journal arabophone Echourouk,
Houssem Hamed de la radio privée tunisienne Chems FM,
Nizar Elhajbi du quotidien francophone La Presse,
Ahmed Elfouli et Monia Abdallah de la chaĂźne Hannibal TV,
Massoud Kawach du journal arabophone El-Sahafa.
Le 6 mai dans la soirĂ©e, le ministĂšre de l’Interieur avait prĂ©sentĂ© ses excuses “aux journalistes et aux citoyens agressĂ©s involontairement”. Selon l’AFP citant une source officielle, certains policiers agresseurs de journalistes auraient Ă©tĂ© identifiĂ©s.
Par ailleurs, Reporters sans frontiĂšres demande aux autoritĂ©s de s’expliquer sur le blocage d’une page Facebook et sur le fondement juridique d’une telle mesure, qui fait rĂ©fĂ©rence Ă  une dĂ©cision militaire. Le profil Facebook de Jalel Brick a Ă©tĂ© rendu inaccessible le 7 mai 2011. La mention suivante s’affiche lorsque l’on tente de se connecter : “Cette page web a Ă©tĂ© filtrĂ©e en application d’une rĂ©quisition Ă©manant du juge d’instruction auprĂšs du Tribunal Militaire Permanent de Tunis – Agence Tunisienne d’Internet – © 2011”. La version https de ce mĂȘme profil demeure accessible : https://www.facebook.com/jalel.brick.
——


Reporters Without Borders

TUNISIA – Journalists demonstrate against last week’s police violence

Reporters Without Borders condemns the police violence to which at least 15 journalists were subjected while covering the three days of demonstrations in the capital that began on 5 May. Making no attempt to distinguish between protesters and media personnel, the police roughed up reporters, carried out arrests and confiscated or smashed equipment.
“The use violence against journalists by the police in recent days is like a bad memory,” Reporters Without Borders secretary-general Jean-François Julliard said. “It is as if the old methods were back just four months after President Zine el-Abidine Ben Ali’s fall. We urge the transitional government to investigate these incidents and to give the security forces clear orders to put a stop to such practices.”
Dozens of journalist took to the streets of Tunis yesterday in response to an appeal by the National Union of Tunisian Journalists to defend press freedom and prevent any return to the practices of the past. The union said the aim of the violence by the police was to prevent the media doing their job and deny the public’s right to information.
One of the worst cases of violence involved Abdelfattah Belaid, an Agence France-Presse correspondent and reporter for the French-language daily La Presse. Police chased him into the headquarters of his newspaper on 6 May, beat him over the head with a metal bar and seized his two cameras and laptop.
Radio Kalima reporter Marwa Rekik had to be hospitalized after being attacked and beaten over the head by police officers while covering a demonstration on the capital’s Bourguiba Avenue on 5 May.
Reuters photographer Zoubeir Souissi told Agence France-Presse that, after ordering him to stop take photos, police officers kicked and clubbed him repeatedly and one of them took his camera. He said he had to bribe the officer in order to recover his camera.
The Union of Journalists said the following journalists had also been the victims of police violence:
Mohamed El-Hammi of the European Photo Agency
Hassan Dridi of the Associated Press
Hamza Elaouini of the TV news agency
Lofti Hajji, Mohamed Amin Ben Nejma and Anass Ben Salah of Al-Jazeera
Chaffya Ibrahim of the Arabic-language newspaper Echourouk
Houssem Hamed of the privately-owned Tunisian radio station Chems FM
Nizar Elhajbi of the French-language daily La Presse
Ahmed Elfouli and Monia Abdallah of Hannibal TV
Massoud Kawach of the Arabic-language newspaper El-Sahafa
The interior ministry apologized on the evening of 6 May “to the journalists and citizens who had been unintentionally attacked.” AFP quoted a government source as saying some of the police officers who had attacked journalists had been identified.
Reporters Without Borders also calls on the authorities to explain the blocking of Jalel Brick’s Facebook profile since 7 May and the legal grounds given for the measure, which mention a military court.
Anyone trying to reach the page from within Tunisia gets this message: “This web page has been filtered under an order from an investigating judge attached to the Tunis Permanent Military Tribunal – Tunisian Internet Agency – © 2011.” The https version of his profile is still accessible:https://www.facebook.com/jalel.brick.


Dynamique Citoyenne des Tunisiens à l’Etranger

 
(D.C.T.E.)
Version du 20 avril 2011
Le 14 janvier 2011, au terme d’un mois de manifestations historiques et de rĂ©pression sanglante qui a causĂ© la mort de plusieurs dizaines de jeunes assassinĂ©s par les sbires de la dictature criminelle, le peuple tunisien et sa jeunesse, dans un sursaut magnifique de dignitĂ© et d’aspiration obstinĂ©e Ă  la libertĂ© et Ă  la justice, ont rĂ©ussi l’impensable : chasser le dictateur et abattre l’une des tyrannies les plus funestes du dĂ©but de ce XXIe siĂšcle.
 
La rĂ©volution dĂ©mocratique et populaire tunisienne menĂ©e Ă  mains nues, sans ingĂ©rence extĂ©rieure et dans un face Ă  face homĂ©rique contre la dictature, portait un souffle Ă©pique, qui a frappĂ© l’imagination des hommes et des femmes de par le monde, par son pacifisme, par son caractĂšre citoyen et par la dĂ©termination des Tunisiennes et des Tunisiens Ă  changer le cours de leur destin.
 
Depuis la chute de la dictature et la fuite du despote, les flammes qui ont dĂ©vorĂ© le corps humiliĂ© de Mohamed Bouazizi un 17 dĂ©cembre 2010 dans un acte d’indignation absolu, se sont transformĂ©es en aurore illuminant l’horizon gĂ©ographique arabe et inaugurant, aprĂšs des siĂšcles de dĂ©clin, une nouvelle temporalitĂ©, chargĂ©e de promesses de progrĂšs, de libertĂ©, de justice et de dignitĂ©.
 
A l’heure actuelle notre pays se fraye sa voie vers l’instauration d’une RĂ©publique dĂ©mocratique, ouverte sur le monde et d’un Etat de droit garantissant les droits et les devoirs de chaque citoyen sans distinction de credo, de rang social, de genre ou d’origine gĂ©ographique.
 
Voici donc venu le temps de la reconstruction. Tous les Tunisiens y compris ceux et celles contraints par des nĂ©cessitĂ©s diverses, ont dĂ» opter de vivre Ă  l’étranger, loin de leur pays, sont appelĂ©s Ă  participer Ă  l’Ɠuvre globale d’édification de l’avenir, et d’élever sur le champ de ruine du rĂ©gime dĂ©chu, des nouvelles rĂ©alitĂ©s politiques, Ă©conomiques, sociales et culturelles.
 
Place et rÎle de la communauté tunisienne
 
Les Tunisiens et les Tunisiennes vivant Ă  l’étranger ont Ă©tĂ© longtemps marginalisĂ©s et exclus de la vie politique par les rĂ©gimes despotiques qui se sont succĂ©dĂ©s Ă  la tĂȘte du pays. RĂ©duits Ă  un simple variable Ă©conomique, leurs droits de citoyens ont Ă©tĂ© bafouĂ©s. Les rapports qu’entretenaient avec eux les reprĂ©sentations consulaires ont toujours Ă©tĂ© teintĂ©s de suspicion et de mĂ©pris. L’image nĂ©gative et xĂ©nophobe de la figure de « l’immigrĂ© » dans le pays d’accueil, les discours nourris des prĂ©jugĂ©s dans le pays d’origine, ont induit des rĂ©flexes de fermeture communautaire chez bon nombre de nos concitoyens et en particulier chez les plus jeunes, d’oĂč des comportements d’indiffĂ©rence si ce n’est de rejet vis-Ă -vis de la chose publique.
 
 
L’exclusion et les fraudes massives Ă  rĂ©pĂ©tition, organisĂ©es depuis plus d’un demi siĂšcle Ă  l’occasion d’échĂ©ances abusivement appelĂ©es « Ă©lectorales », l’approche clientĂ©liste et sĂ©curitaire suivie successivement par les rĂ©gimes bourguibiste et benaliste, le quadrillage policier et la surveillance exercĂ©e par le parti-Etat grĂące Ă  ses rĂ©seaux enchevĂȘtrĂ©s d’officines, d’amicales et d’informateurs Ă  sa solde, ont contribuĂ© Ă  maintenir la communautĂ© tunisienne Ă  l’étranger dans un Ă©tat de peur, de division et de dĂ©sorganisation Ă  l’exception de quelques Ăźlots qui ont rĂ©ussi Ă  fonder en contrepoint, des structures associatives et fĂ©dĂ©ratives qui, bien que minoritaires, n’en ont pas moins rĂ©ussi, bon an mal an, Ă  maintenir vivace l’esprit de rĂ©sistance, et Ă  diffuser les valeurs dĂ©mocratiques et citoyennes.
 
L’effondrement du rĂ©gime de Ben Ali et le dĂ©mantĂšlement des clans mafieux liĂ©s Ă  la Famille, a eu pour effet immĂ©diat, de raviver chez la communautĂ© tunisienne vivant Ă  l’étranger, le sentiment de fiertĂ© d’ĂȘtre Tunisien et le dĂ©sir de prendre part au processus de construction dĂ©mocratique fondĂ© sur la citoyennetĂ©, l’égalitĂ©, la libertĂ© et la justice sociale. Aussi, a-t-on pu assister Ă  une vĂ©ritable explosion, partout dans le monde, de regroupements politiques, associatifs, professionnels et citoyens crĂ©es par des Tunisiens et des Tunisiennes, dĂ©sireux tous d’apporter leur contribution au dĂ©bat national sur les rĂ©formes politiques en cours et d’ajouter leur pierre Ă  la construction de la Nouvelle Tunisie.
 
En consĂ©quence et vu l’importance de notre communautĂ© Ă  l’étranger – plus d’un million de personnes dont plus de 600 000 en France – sa richesse et sa variĂ©tĂ© tant du point de vue social qu’économique, aucune structure politique organisĂ©e ou a fortiori associative ne peut prĂ©tendre, aujourd’hui, la reprĂ©senter Ă  elle seule et, encore moins, en ĂȘtre le porte-parole exclusif.
 
Pour toutes ces raisons, nous, associations autonomes de l’immigration, fĂ©dĂ©rations d’associations, groupes de citoyens tunisiens, personnalitĂ©s indĂ©pendantes appartenant au monde de la culture, ou issues des professions libĂ©rales, avocats, mĂ©decins, ingĂ©nieurs, ou enseignants, professeurs, Ă©tudiants, travailleurs jeunes et moins jeunes, hommes et femmes, binationaux et immigrĂ©s, Ă  l’issue de nombreux rencontres et dĂ©bats, mettons en place une dynamique collective, participative et plurielle.
 
Cette initiative ouverte Ă  tous nos compatriotes oĂč qu’ils se trouvent, a pour rĂšgle de base, le respect fondamental de l’opinion d’autrui et le consensus dans toute prise de dĂ©cision. Nous participons tous avec les mĂȘmes droits.
 
Pour ce faire, nous inaugurons par cette note une sĂ©rie de propositions portant sur les aspects de la vie de tous les jours dans nos pays d’accueil et de nos liens multiformes avec notre pays d’origine, que nous soumettons aux autoritĂ©s qui en examineront, avec notre concours, la pertinence et exploreront les possibilitĂ©s de rĂ©alisation. Sachant que cette rĂ©volution victorieusement menĂ©e, par notre peuple, nous offre une chance historique unique, dans la perspective de la consĂ©cration des principes d’EgalitĂ© dans la Nouvelle Constitution, de mettre fin Ă  des dĂ©cennies d’indiffĂ©rence, de marginalitĂ© et d’exclusion du dixiĂšme de notre population.
 
Les premiĂšres consultations ont permis de dĂ©gager trois axes principaux qui rĂ©sument, Ă  notre avis, l’essentiel des prĂ©occupations des Tunisiens et des Tunisiennes rĂ©sidents Ă  l’étranger. Outre le fait qu’ils ne sont pas limitatifs, ces axes sont appelĂ©s Ă  ĂȘtre dĂ©veloppĂ©s. C’est ce que nous proposons de rĂ©aliser tous ensemble dans le cadre d’une dĂ©marche fondĂ©e sur le dialogue alliant le mode direct, autrement dit les rĂ©unions, et indirect grĂące aux contributions Ă  distance sur les rĂ©seaux sociaux et les autres moyens de communication.
 
Nous vous invitons Ă  dĂ©velopper une synergie autour de cette dynamique non seulement sur l’ensemble du territoire français, mais aussi dans toute l’Europe et partout dans le monde. Chaque structure, chaque groupe et chaque citoyen et citoyenne convaincu(e) de l’intĂ©rĂȘt stratĂ©gique que reprĂ©sente cette dynamique doit mettre Ă  profit ses rĂ©seaux et ses relations de maniĂšre Ă  contribuer Ă  la diffusion de son contenu et Ă  en traduire les idĂ©es en actes concrets sur le terrain pour le bien de la communautĂ© tunisienne dans le monde.
 
Les trois axes et les premiers projets
 
Certains projets relevant de l’un ou l’autre de ces axes vous sont livrĂ©s sous forme de propositions. D’autres axes ne sont pas encore dĂ©clinĂ©s en projets. Nous comptons sur l’avancement de la dynamique et de l’adhĂ©sion de compĂ©tences et forces de propositions pour en expliciter le contenu. Nous dĂ©finirons par ailleurs les prioritĂ©s des projets dans des ateliers de travail et lors des rencontres.
 
Axe 1- Citoyenneté et représentativité
 
· La rĂ©habilitation de la citoyennetĂ© dans une nouvelle RĂ©publique dĂ©mocratique respectueuse de la souverainetĂ© du peuple qui garantisse l’Etat de droit et le respect des libertĂ©s fondamentales individuelles et collectives. Les droits de vote et d’éligibilitĂ© des Tunisiens rĂ©sidents Ă  l’étranger aux Ă©chĂ©ances Ă©lectorales notamment Ă  la Constituante et aux lĂ©gislatives sont une condition nĂ©cessaire mais non suffisante.
 
· La reprĂ©sentativitĂ© des Tunisiens Ă  l’étranger en impulsant la crĂ©ation d’un Haut Conseil de Tunisiens Ă  l’Etranger (H.C.T.E.), autrement dit, d’une instance spĂ©cifique avec des compĂ©tences transversales capable d’esquisser une approche englobant le phĂ©nomĂšne migratoire dans ses dimensions Ă©conomiques, humaines et stratĂ©giques.
 
Axe 2- Culture et mémoire
 
· La dĂ©fense de notre mĂ©moire et le renforcement de la prĂ©sence culturelle et linguistique dans les pays Ă  forte prĂ©sence tunisienne par la mise en place, entre autres, de pĂŽles culturels Ă  l’étranger.
 
Axe 3- Contribution des Tunisiens Ă  l’étranger Ă  l’économie nationale
 
· Le dĂ©veloppement de l’économie de notre pays et l’investissement dans les projets de dĂ©veloppement de l’économie nationale.


Centre d’Accueil de la Presse ÉtrangĂšre Ă  Paris
 
Foreign Press Center – Paris
 
Mercredi 11 mai 2011 Ă  16h00
 

La transition démocratique en Tunisie

La Tunisie a rĂ©ussi la premiĂšre rĂ©volution arabe avec un faible bilan humain. Elle a Ă©galement rĂ©ussi une rupture politique totale avec l’ancien rĂ©gime et dissous son parti le RCD. Mais Ă  quelques mois de l’Ă©lection de l’AssemblĂ©e constituante, la Tunisie rĂ©ussira-t-elle sa transition dĂ©mocratique ?
Source photo: tuniscope.com
Intervenant :
Abdelwahab Hani Président du parti AL MAJD ( Citoyenneté, République, Démocratie)
Contact CAPE :
Lucile Marbeau
Tél. : 01 53 76 90 73
Fax. : 01 53 76 90 76
Contact organisateur :
Club de la Presse Arabe
Samir Tueni


L’AcadĂ©mie tunisienne des sciences, des lettres et des arts « BeĂŻt al-Hikma » se propose d’organiser un colloque international Ă  l’occasion du 9Ăšme centenaire de l’Imam GHAZALI et ce du mardi 17 mai au samedi 21 mai 2011.
 
Académie tunisienne Beït al-Hikma
 
Colloque International sur :
 

NeuviĂšme centenaire de la mort de Ghazali

Du 17 au 21 mai 2011
Dans l’histoire de la pensĂ©e arabo-islamique, Ghazali occupe une place privilĂ©giĂ©e, de l’avis de la plupart des commentateurs, malgrĂ© des divergences Ă  ce sujet. Cela est dĂ» Ă  de multiples facteurs dont nous retiendrons les deux suivants :
– Les conditions historiques de la vie intellectuelle au VĂšme siĂšcle de l’hĂ©gire, caractĂ©risĂ©e par une richesse exceptionnelle.
– La qualitĂ© remarquable des Ă©crits de Ghazali qui ont portĂ© sur diffĂ©rents aspects de la vie intellectuelle, politique et spirituelle en terre d’Islam.
Il faut d’abord rappeler qu’au siĂšcle de Ghazali la pensĂ©e arabo-islamique a atteint l’apogĂ©e de son Ă©volution et de sa maturitĂ©, aprĂšs avoir assimilĂ© l’hĂ©ritage intellectuel grec, maintes fois traduit, Ă©tudiĂ© et commentĂ© . Le siĂšcle de Ghazali a, en outre, Ă©tĂ© marquĂ© par des conflits idĂ©ologiques qui ont atteint leur paroxysme : il a vu la naissance de l’ésoterisme (batinya) en tant que mouvement politique et doctrinal et surtout en tant que systĂšme de connaissance et structure idĂ©ologique cohĂ©rente. Il a Ă©galement vu l’émergence de « l’ash’arisme », en tant que doctrine sunnite anti-mu’tazilite, trĂšs combative. Ghazali s’est engagĂ© dans ces luttes; il a jouĂ© un rĂŽle majeur dans le dĂ©clenchement des polĂ©miques, dans l’élucidation des concepts et dans l’enrichissement de la pensĂ©e ash’arite en matiĂšre de « Kalam » et de « fiqh », et sur le double plan de la morale et de la politique. D’oĂč l’importance exceptionnelle de son Ɠuvre.
En fait, Ghazali est pour les uns le grand imam incontournable et le porte- drapeau de l’Islam, et pour d’autres, il est celui qui a portĂ© prĂ©judice Ă  l’Islam. Certains voient en lui un authentique « philosophe », d’autres soulignent tout le tort qu’il a fait Ă  la « falsafa » et Ă  ses reprĂ©sentants les plus cĂ©lĂšbres. Quoi qu’il en soit, le « corpus ghazalien » est susceptible de diverses « lectures » qui varient selon les gĂ©nĂ©rations et les Ă©poques. Pour la critique moderne, hardiment novatrice, ces « lectures » contradictoires de Ghazali dĂ©montrent la vitalitĂ© de ses Ă©crits et la richesse de sa personnalitĂ©.
Ces derniĂšres annĂ©es, l’AcadĂ©mie tunisienne a consacrĂ© des colloques majeurs aux grandes figures du patrimoine arabo-islamique ( Averroes, Ibn Khaldun, Ibn al-Jazzar, Ibn Battouta, Khereddine 

..). Pour la cĂ©lĂ©bration du 9Ăšme centenaire de la mort de Ghazali, BeĂŻt al-Hikma se devait d’organiser un colloque international d’envergure. RĂ©unissant une plĂ©iade de spĂ©cialistes et de chercheurs, arabes et Ă©trangers, ce colloque se propose d’étudier l’Ɠuvre de Ghazali et sa personnalitĂ©, d’analyser les travaux qui lui ont Ă©tĂ© sans cesse consacrĂ©s et d’examiner les thĂšses exposĂ©es et les instruments mĂ©thodologiques employĂ©s. Questionner et commenter cette Ɠuvre de nouveau est donc le but ultime de cette commĂ©moration.
ThĂšmes du colloque :
1- Ghazali dans son environnement politique et culturel.
2- Ghazali et ces antécédents.
3- Originalité de la pensée ghazalienne.
Ghazali aujourd’hui


Tunisie: volonté du gouvernement de tenir les élections le 24 juillet

AFP / 10 mai 2011 19h36

PARIS – Le ministre tunisien des Affaires Ă©trangĂšres, Mouldi Kefi, a affirmĂ© mardi Ă  Paris que la volontĂ© du gouvernement Ă©tait que les Ă©lections aient lieu Ă  la date proposĂ©e, le 24 juillet prochain, dans un entretien Ă  la chaĂźne France 24. La volontĂ© du gouvernement, la volontĂ© du prĂ©sident par intĂ©rim, la volontĂ© du Premier ministre, est que ces Ă©lections aient lieu Ă  la date proposĂ©e, a dĂ©clarĂ© le chef de la diplomatie tunisienne. Ca, c’est une volontĂ© politique. Et je suis sĂ»r que le peuple tunisien, qui a rĂ©ussi le miracle de la rĂ©volution du 14 janvier (jour de la fuite de l’ex-prĂ©sident Ben Ali, ndlr) est capable de relever ce dĂ©fi, nonobstant les difficultĂ©s techniques ou logistiques auxquelles on aura Ă  faire face, a-t-il insistĂ©. Dans un discours tĂ©lĂ©visĂ© Ă  la nation dimanche soir, le Premier ministre BĂ©ji CaĂŻd Essebsi, dont le gouvernement est chargĂ© de gĂ©rer le pays jusqu’Ă  cette Ă©chĂ©ance Ă©lectorale, a fait planer le doute sur le respect de la date prĂ©vue du 24 juillet, arguant de lenteur dans les travaux prĂ©paratoires. Le gouvernement s’est engagĂ© en choisissant la date du 24 juillet et on tient Ă  cette date, mais si le comitĂ© des rĂ©formes dit qu’il y a des empĂȘchements techniques et logistiques, ce sera une autre probabilitĂ© Ă  discuter, avait-il dĂ©clarĂ©, avant d’ajouter: Il est vrai qu’il y a une lenteur dans l’Ă©tude de ce dossier, mais la Haute commission chargĂ©e de prĂ©parer ces Ă©lections cruciales (…) est autonome, et le gouvernement lui apporte seulement son soutien matĂ©riel et logistique avait-il ajoutĂ©. Les Tunisiens doivent Ă©lire une AssemblĂ©e constituante, qui aura la tĂąche d’adopter une nouvelle constitution et de prĂ©parer de nouvelles Ă©lections. Alors que des scĂšnes de pillages et de dĂ©sordre dans les banlieues de Tunis et certaines villes de province se sont multipliĂ©es ces derniers jours, le chef de la diplomatie s’est voulu rassurant: La dĂ©mocratie ne se fait pas en quelques semaines, en quelques mois, a dit M. Kefi, tout en disant convaincu de la capacitĂ© de son pays Ă  mener Ă  bien sa transition dĂ©mocratique. InterrogĂ© sur les difficultĂ©s Ă©conomiques et sociales auxquelles sont confrontĂ©es le pays et qui pourraient favoriser un vote islamiste, le ministre s’est Ă  nouveau voulu confiant. Les islamistes ont Ă©tĂ© utilisĂ©s comme Ă©pouvantail pendant des annĂ©es par le rĂ©gime Ben Ali pour empĂȘcher la transition dĂ©mocratique, a-t-il rappelĂ©. Est-ce qu’aujourd’hui la situation sociale difficile va favoriser l’Ă©mergence des islamistes’ Je ne le pense pas. La sociĂ©tĂ© tunisienne a tous les ingrĂ©dients pour rĂ©ussir sa transition, y compris avec les islamistes (…) qui ont compris que c’est Ă  eux de s’adapter Ă  la nouvelle rĂ©alitĂ©. Je suis sĂ»r qu’ils sont conscients de ça, a-t-il ajoutĂ©. Mouldi Kefi s’est par ailleurs fĂ©licitĂ© du fait que la Tunisie soit invitĂ©e au G8 qui se tiendra fin mai Ă  Deauville, dans le nord-ouest de la France, et oĂč une aide importante pourrait ĂȘtre annoncĂ©e pour son pays. La France a dĂ©jĂ  promis en avril Ă  la Tunisie une aide de 350 millions d’euros sur la pĂ©riode 2011-2012.  


Tunisie
 

Les troubles se multiplient, les Ă©lections pourraient ĂȘtre retardĂ©es

 

Qui veut la peau de la révolution ?

 
Que se passe-t-il en Tunisie ? Depuis quelques jours, tout se passe comme si des « forces occultes » s’étaient mobilisĂ©es pour assaillir le pays, mettre Ă  mal la rĂ©volution du 14 janvier et ramener les citoyens dans l’ùre de la peur.
Commençons par les faits. Depuis la fin avril, les troubles se succĂšdent. Des petites opĂ©rations menĂ©es par des voyous d’abord. Un meeting politique empĂȘchĂ© ici. Trois voitures brĂ»lĂ©es lĂ . Des boutiques attaquĂ©es. Le 30 avril, trois prisons incendiĂ©es par des prisonniers et un millier qui en profitent pour s’échapper. Depuis jeudi dernier, les incidents se multiplient. Des magasins saccagĂ©s, Ă  Tunis et en province, des bĂątiments officiels pillĂ©s, un match international dans la banlieue de Tunis est interrompu par des Ă©meutes. Dans la capitale, jeudi, une manifestation pacifique est rĂ©primĂ©e avec une violence inouĂŻe par la police, qui frappe les manifestants mais aussi quinze journalistes. Ailleurs, des bandes de jeunes armĂ©s de couteaux, de sabres, de cocktails Molotov s’en prennent aux forces de l’ordre.
Devant la dĂ©gradation de la situation, le gouvernement dĂ©cide, samedi, de rĂ©tablir le couvre-feu de 21 heures Ă  5 heures du matin Ă  Tunis et dans sa banlieue ; il n’est pas respectĂ© dans certains quartiers chauds. Ce lundi, le dĂ©cĂšs d’un manifestant touchĂ© la veille par balle Ă  Soliman, Ă  40 km de Tunis, est annoncĂ©. Dimanche soir, le Premier ministre BĂ©ji CaĂŻd Essebsi prend la parole Ă  la tĂ©lĂ©vision, il laisse la porte ouverte Ă  un report des Ă©lections pour une constituante, qui sont prĂ©vues le 24 juillet.
Le mĂ©contentement gĂ©nĂ©ral explique pour une part ce climat de tension extrĂȘme. Les espoirs d’amĂ©liorations sociales s’évaporent et les gens se montrent frustrĂ©s. Sur businessnews.com.tn, un journaliste pose la question : « Peut-on obtenir, en l’espace de six mois, l’emploi intĂ©gral, les titularisations de tous les employĂ©s, les promotions pour tous, les procĂšs Ă  tous les mafieux, une dĂ©mocratie parfaite ? » D’autant que les marges de manƓuvres politiques et Ă©conomiques du gouvernement provisoire restent trĂšs rĂ©duites.
Mais les Tunisiens se demandent d’abord Ă  qui ces troubles profitent, beaucoup n’hĂ©sitant pas Ă  penser que les jeunes qui se dĂ©chaĂźnent dans les rues sont l’objet de manipulations Ă©videntes ou en tout cas une partie d’entre eux. Et certains y vont de maniĂšre frontale, comme la journaliste Sihem Bensedrine : « J’accuse la police politique et les lobbies des anciens RCDistes (de l’ex-parti quasi unique, le RCD, officiellement dissous) de faire la politique de la terre brĂ»lĂ©e pour semer la terreur auprĂšs des Tunisiens », a-t-elle lĂąchĂ© samedi. Ce lundi, l’AFP Ă  Tunis citait « une source proche du gouvernement » s’exprimant dans le mĂȘme sens : « Des milices du parti de prĂ©sident dĂ©chu Ben Ali payent des jeunes pour semer le trouble dans le pays » 
Un autre sujet d’excitation a surgi de maniĂšre inattendue dans la nuit de mercredi Ă  jeudi, sous la forme d’une vidĂ©o enregistrĂ©e Ă  l’insu de l’ancien ministre de l’IntĂ©rieur Farhat Rajhi et qui fait un « buzz » sur le Net tunisien. On y voit celui qui fut aux commandes du ministĂšre aprĂšs la rĂ©volution en fĂ©vrier et mars – assez de temps pour devenir populaire sous le sobriquet de « M. Propre » – dĂ©clarer que si les islamistes du parti Ennahda devaient gagner les Ă©lections du 24 juillet, l’armĂ©e provoquerait un coup d’Etat !
Il n’en fallait pas plus pour dĂ©clencher le courroux du Premier ministre qui l’a traitĂ© de « crapule, menteur, irresponsable dont les propos qui visent Ă  semer la discorde et la zizanie mĂ©ritent des poursuites judiciaires ».
Ennahda a rĂ©agi posĂ©ment. Evoquant « l’huile sur le feu [jetĂ©e par Fahrat Rajhi] dans un climat explosif tombant dans un contexte oĂč la population a des doutes sur la crĂ©dibilitĂ© du gouvernement quant Ă  la rĂ©alisation des objectifs de la rĂ©volution », le chef du parti Rached Ghannouchi, rĂ©pondant Ă  l’AFP, a flattĂ© l’armĂ©e « qui a sauvĂ© le peuple d’un bain de sang (
) et qui est le seul pilier qui soutient encore l’Etat ».
Un reportage de la mĂȘme agence Ă  Ettadhamen, la banlieue tunisoise qui a flambĂ©, montrait ce dimanche les militants disciplinĂ©s d’Ennahda en train de rĂ©tablir le calme aprĂšs les Ă©meutes des derniers jours.
 
BAUDOUIN LOOS
(Source: LE SOIR (BRUXELLES), MARDI LE 10 MAI 2011)


En Tunisie, on envisage le report des élections

Le Premier ministre, BĂ©ji CaĂŻd Essebsi, dont le gouvernement est chargĂ© de gĂ©rer le pays jusqu’aux Ă©lections, a fait planer le doute sur le respect de la date prĂ©vue du 24 juillet, arguant de la «lenteur» dans les travaux prĂ©paratoires.

«Le gouvernement s’est engagĂ© en choisissant la date du 24 juillet et on tient Ă  cette date, mais si le comitĂ© des rĂ©formes dit qu’il y a des empĂȘchements techniques et logistiques, ce sera une autre probabilitĂ© Ă  discuter», a-t-il dĂ©clarĂ©, hier, lundi.

«Il est vrai qu’il y a une lenteur dans l’étude de ce dossier, mais la Haute commission chargĂ©e de prĂ©parer ces Ă©lections cruciales est autonome, et le gouvernement lui apporte seulement son soutien matĂ©riel et logistique» a-t-il ajoutĂ©. La commission Ă©lectorale indĂ©pendante a Ă©tĂ© Ă©lue, hier, lundi, par la Haute commission chargĂ©e de prĂ©parer les Ă©lections. Cette commission, qui doit au total compter 16 membres, sera chargĂ©e de superviser le scrutin. De leur cĂŽtĂ©, les partis politiques sont divisĂ©s sur le bien-fondĂ© de la date du 24 juillet, le Parti dĂ©mocrate progressiste y restant attachĂ© tandis que le Mouvement de l’unitĂ© populaire plaide pour un report et l’organisation d’un rĂ©fĂ©rendum constitutionnel. Quant au prĂ©sident du parti islamiste Ennahda, Rached Ghannouchi, il a soulignĂ©, dimanche dernier, que la Tunisie vit une situation «dangereuse» et que les Tunisiens «doutent de la crĂ©dibilitĂ© du gouvernement».

Le gouvernement et la police «refusent de rĂ©aliser qu’il y a eu des changements et que c’est le droit des Tunisiens de manifester», a-t-il aussi dĂ©clarĂ© alors que des manifestations antigouvernementales ont rĂ©guliĂšrement lieu Ă  Tunis depuis le 5 mai dernier.

Depuis trois jours, des quartiers dĂ©favorisĂ©s de la capitale tunisienne sont, par ailleurs, la proie de violences accompagnĂ©es de pillages. A Slimane, dans la banlieue de Tunis, un homme a Ă©tĂ© mortellement blessĂ© par balle, dimanche dernier, selon un tĂ©moin. De nouvelles scĂšnes de dĂ©sordre ont eu lieu Ă©galement dans la nuit de dimanche Ă  lundi Ă  Ettadhamen, une banlieue dĂ©favorisĂ©e de Tunis, malgrĂ© le couvre-feu instaurĂ© dans la capitale pour une durĂ©e indĂ©terminĂ©e. «ça a recommencĂ© cette nuit comme la nuit prĂ©cĂ©dente», a racontĂ© ce tĂ©moin, Abdelrazak Haouini, parlant de «jeu du chat et de la souris» entre forces de l’ordre et bande de jeunes «trĂšs alcoolisĂ©s» jusqu’à 5h du matin.

«Un des jeunes, qui Ă©tait poursuivi par la police, est montĂ© sur le toit d’une maison et il est tombĂ©, a ajoutĂ© cet habitant, affirmant «avoir entendu que le jeune serait mort». Cette information n’a pas pu ĂȘtre confirmĂ©e dans l’immĂ©diat. «Ces jeunes qui sont trĂšs pauvres buvaient beaucoup de biĂšre et je ne sais pas qui leur donne cet argent pour en acheter autant, je ne sais pas qui est derriĂšre tout ça», a encore racontĂ© le tĂ©moin. Dans ce contexte, plusieurs partis politiques ont appelĂ© le gouvernement transitoire «à faire preuve de transparence afin de regagner la confiance du peuple» et Ă  Ɠuvrer pour stabiliser la situation dans le pays.

Source: “Donne Ton Avis” Le 10-05-2011

La Tunisie rétablit le couvre-feu et songe à reporter les élections

Le rĂ©tablissement du couvre-feu et la brutalitĂ© de la police dans les manifestations ne facilitent pas l’action d’un gouvernement qui cherche Ă  attirer les investisseurs pour redresser le pays. Les Ă©lections pourraient ĂȘtre reportĂ©es.

Aujourd’hui, la sĂ©curitĂ© n’est plus une question », lançait jeudi dernier le directeur gĂ©nĂ©ral de l’Office national du tourisme tunisien, Habib Ammar, en prĂ©sentant la nouvelle campagne de promotion du tourisme en Tunisie. Samedi, aprĂšs les manifestations antigouvernementales Ă  Tunis et dans sa rĂ©gion, les autoritĂ©s ont dĂ©crĂ©tĂ© le rĂ©tablissement du couvre-feu dans la capitale et dans d’autres villes, de 21 heures Ă  5 heures et pour une durĂ©e indĂ©terminĂ©e. La police a violemment dispersĂ© plusieurs centaines de manifestants en plein coeur de Tunis, jeudi et vendredi. MalgrĂ© le couvre-feu, les manifestations se sont poursuivies ce week-end et ont fait un mort Ă  Slimane, dans la banlieue de Tunis, selon un tĂ©moin. Des magasins ont Ă©tĂ© pillĂ©s en plein centre de la capitale ainsi que dans sa banlieue nord. Cinq postes de police et de la Garde nationale ont Ă©tĂ© incendiĂ©s.

Les manifestants ont appelĂ© Ă  la« dĂ©mission » du gouvernement transitoire et Ă  « une nouvelle rĂ©volution », estimant que l’exĂ©cutif n’Ă©tait pas capable d’emmener le pays sur la voie de la dĂ©mocratie.

Le poids des islamistes

Quinze journalistes travaillant pour des mĂ©dias tunisiens et internationaux ont reçu coups, insultes et se sont vu confisquer leurs appareils photo et camĂ©ras lors des manifestations de jeudi et vendredi. La presse tunisienne a condamnĂ© ces violences et le ministĂšre de l’IntĂ©rieur a prĂ©sentĂ© ses excuses. Beaucoup s’interrogent sur les origines des troubles – anciens membres du parti unique RCD, islamistes, casseurs : nombre d’hypothĂšses sont Ă©voquĂ©es.

Les manifestations ont dĂ©marrĂ© aprĂšs l’interview de l’ancien ministre de l’IntĂ©rieur, Farhat Rajhi, publiĂ©e sur Internet dans la nuit de mercredi Ă  jeudi, dans laquelle il dĂ©nonçait la prĂ©paration d’un « coup d’Etat militaire ». « Si le mouvement islamiste Ennahda (Renaissance) gagne les prochaines Ă©lections du 24 juillet [pour la mise en place d’une AssemblĂ©e constituante, NDLR], le rĂ©gime sera militaire » , indiquait-il. L’ancien ministre, trĂšs populaire, ajoutait : « Le dernier voyage du Premier ministre, BĂ©ji CaĂŻd Essebsi, Ă  Alger a consistĂ© en la coordination sur ce point » et « la nomination, le 18 avril, du gĂ©nĂ©ral Rachid Ammar au poste de chef d’Ă©tat-major interarmes n’est qu’une prĂ©paration Ă  ce coup d’Etat ».

Le Premier ministre a critiquĂ© des propos « dangereux », mĂ©ritant « une poursuite judiciaire », visant Ă  semer « la discorde et la zizanie » et Ă  provoquer le report de la date des prochaines Ă©lections. Dans un discours Ă  la tĂ©lĂ©vision nationale, dimanche soir, BĂ©ji CaĂŻd Essebsi a d’ailleurs laissĂ© planer le doute sur la tenue des Ă©lections Ă  la date prĂ©vue. « Le gouvernement s’est engagĂ© en choisissant la date du 24 juillet et on tient Ă  cette date, mais si le comitĂ© des rĂ©formes dit qu’il y a des empĂȘchements techniques et logistiques, ce sera une autre probabilitĂ© Ă  discuter. »

De quoi inquiĂ©ter encore un peu plus les investisseurs. Or, la relance de la croissance – qui ne dĂ©passera pas 1 % cette annĂ©e -passe par les investissements et les grands projets. Le poids des islamistes inquiĂšte aussi. « Selon les estimations, ils feraient un score de 10 % Ă  30 % aux prochaines Ă©lections », indique un ancien diplomate. Une coalition regroupant une cinquantaine d’associations a Ă©tĂ© créée vendredi Ă  Tunis pour « faire barrage Ă  l’intĂ©grisme et Ă  l’islamisme ».

« En cette pĂ©riode difficile, l’Europe devrait soutenir la Tunisie au lieu d’apparaĂźtre comme Ă©goĂŻste, conclut ce diplomate. La Tunisie accueille 250.000 rĂ©fugiĂ©s de Libye alors que l’Europe s’insurge pour 20.000 migrants. L’image de l’Europe en prend un coup et ce n’est vraiment pas dans son intĂ©rĂȘt. »

Source : « Les Echos » Le 10-05-2011

Un inquiétant tournant sécuritaire qui suscite la colÚre populaire TUNISIE

Le gouvernement transitoire a réinstauré le couvre-feu sur Tunis, aprÚs les manifestations de vendredi. Les Tunisiens redoutent les manipulations des islamistes et celles des nostalgiques de la dictature.

Tunis, envoyée spéciale.

«Nous sommes entrĂ©s dans une zone d’incertitudes lourdes de dangers. » Comme tous ses compatriotes, Massaoud Romdhani, syndicaliste et militant des droits de l’homme, affiche son inquiĂ©tude sur le regain de tension en Tunisie. Hier, le gouvernement transitoire a rĂ©instaurĂ© le couvre-feu sur Tunis, espĂ©rant mettre un terme aux violences qui ont Ă©clatĂ©, ces derniĂšres nuits, dans les quartiers populaires de la capitale tunisienne. Jeudi dernier, la tension est brutalement montĂ©e, aprĂšs les dĂ©clarations de l’ancien et Ă©phĂ©mĂšre ministre de l’IntĂ©rieur, Farhat Rajhi, qui a accusĂ© les proches du dictateur dĂ©chu de tirer les ficelles de la transition. Ce magistrat a aussi mis en cause l’armĂ©e, dans une vidĂ©o postĂ©e sur Facebook, en Ă©voquant la prĂ©paration, selon lui, d’un coup d’État militaire en cas de victoire des islamistes d’Ennahda Ă  l’issue de l’élection de l’AssemblĂ©e constituante, prĂ©vue le 24 juillet. FondĂ©es ou non, ces allĂ©gations ont rencontrĂ© un large Ă©cho, en particulier chez les plus jeunes, convaincus qu’un « gouvernement de l’ombre » travaille Ă  la confiscation de « leur » rĂ©volution.

Les propos de Farhat Rajhi ont eu l’effet d’une Ă©tincelle, suscitant, en centre-ville, des rassemblements violemment dispersĂ©s. Aux abords de l’avenue Bourguiba, lorsque des manifestants tentent de se rassembler, des policiers cagoulĂ©s et armĂ©s sillonnent les rues perpendiculaires, au prĂ©texte de rechercher des casseurs. Vendredi, des journalistes, dont un photographe travaillant pour l’AFP, ont Ă©tĂ© pris pour cibles par les forces de l’ordre. L’armĂ©e s’est redĂ©ployĂ©e autour de la place de la Casbah, symbole des rassemblements qui avaient coĂ»tĂ© son poste au premier ministre Mohammed Ghannouchi. Un tournant sĂ©curitaire qui suscite l’émoi, la colĂšre ou l’inquiĂ©tude. Dans le camp laĂŻque, on redoute que les dĂ©clarations de Farhat Rajhi ne profitent aux islamistes, trĂšs actifs depuis la chute de Ben Ali. « Ces propos alimentent la campagne victimaire orchestrĂ©e par Ennahda », analyse la rĂ©alisatrice et militante Selma Beccar. Le troisiĂšme gouvernement de transition, dirigĂ© par un vĂ©tĂ©ran du bourguibisme, BĂ©ji CaĂŻd Sebsi, peine Ă  gagner la confiance des Tunisiens, sur fond d’attentes sociales impĂ©rieuses, d’inĂ©galitĂ©s profondes entre la cĂŽte et le reste du pays, de doutes sur la date et les modalitĂ©s des futures Ă©lections. « Cette rĂ©volution a Ă©tĂ© voulue par le peuple, mais aussi par une frange du rĂ©gime, pour laquelle Ben Ali Ă©tait devenu un grain de sable dans la mĂ©canique du systĂšme. Avec ce peuple qui a pris la parole, ce n’est plus un grain de sable qui enraye la machine, c’est une pierre », rĂ©sume l’écrivain Taoufik Ben Brik. Le chef du gouvernement devait s’exprimer, hier soir, Ă  la tĂ©lĂ©vision. Pas sĂ»r que ses explications suffiront Ă  dissiper un lourd climat de dĂ©fiance.

Élections reportĂ©es ?

L’échĂ©ance de juillet pour l’élection de l’assemblĂ©e constituante pourrait ĂȘtre dĂ©calĂ©e de quelques mois. Dans un entretien publiĂ© par le journal la Presse de Tunisie, Iadh Ben Achour, prĂ©sident ‹du Conseil de l’instance supĂ©rieure pour la rĂ©alisation des objectifs de la rĂ©volution, de la rĂ©forme politique et de la transition dĂ©mocratique, estime que les Ă©lections pourraient ĂȘtre reportĂ©es au mois d’octobre ou de novembre. La lenteur des discussions ‹qui ont entourĂ© l’élaboration de la loi Ă©lectorale a fait qu’elle ‹ne sera promulguĂ©e que la semaine prochaine, avec deux mois ‹de retard sur l’échĂ©ance prĂ©vue. Le dĂ©lai entre cette promulgation et la date du 24 juillet, prĂ©vue pour les Ă©lections, est trop court. M. Ben Achour estime qu’il n’est pas suffisant pour prĂ©parer convenablement les premiĂšres Ă©lections libres de l’histoire ‹du pays.

Source : « L’humanite » Le 10-05-2011

Serge Moati : « La Tunisie de 2011 me fait penser à la France de 1981 »

FidĂšle du prĂ©sident français François Mitterrand, le documentariste Serge Moati revient sur son parcours, trente ans aprĂšs l’élection de mai 1981. Pour lui, un mĂȘme vent de libertĂ© souffle aujourd’hui sur son pays de naissance, la Tunisie.

C’était il y a trente ans. Le 10 mai 1981. La gauche arrivait au pouvoir et rĂȘvait de « changer le monde ».Trente ans aprĂšs (Le Seuil, 330 pages, 19,50 euros) est la chronique allĂšgre de cette Ă©poque, une splendide rĂ©trospective de cette France oĂč tout semblait possible et paraissait devoir ĂȘtre inventĂ©. C’est aussi le portrait en creux d’un jeune homme idĂ©aliste et ambitieux. Du fils d’un notable tunisien, juif, socialiste, militant pour l’indĂ©pendance. Serge Moati n’a que 11 ans quand il se retrouve orphelin. Ce sont de ces drames qui marquent une vie, aussi accomplie soit-elle. On comprend mieux dĂšs lors sa fascination pour François Mitterrand, incarnation d’une figure paternelle absente. Son ascension sera filmĂ©e par Moati depuis le congrĂšs d’Épinay (1971), au cours duquel il prend la tĂȘte du Parti socialiste (PS), jusqu’à la kitschissime cĂ©rĂ©monie du PanthĂ©on de 1981, en passant par les duels tĂ©lĂ©visĂ©s des Ă©lections prĂ©sidentielles et ses derniers vƓux aux Français. Aujourd’hui, le documentariste, qui, « Ă  64 ans, n’a pas l’intention de devenir un mec de droite », s’apprĂȘte Ă  filmer les coulisses de la campagne prĂ©sidentielle de 2012 et Ă  publier un essai Ă©crit « Ă  chaud, avec Ă©motion » sur les Ă©vĂ©nements de Tunisie, sa seconde patrie.

Jeune Afrique : Quel regard portez-vous sur la rĂ©volution tunisienne ?

Serge Moati : Je suis de ceux qui pensent, peut-ĂȘtre Ă  tort, que le 14 janvier [jour de la fuite de Ben Ali, NDLR] marque le dĂ©but de l’indĂ©pendance. Je souhaite de tout mon cƓur quela Tunisie connaisse la dĂ©mocratie qui lui a Ă©tĂ© confisquĂ©e depuis fort longtemps et qui n’est pas un luxe de bourgeois français interdit aux pays arabes. Il faut tordre le cou Ă  ceux qui parient avec un air supĂ©rieur que les pays arabes ou africains ne sont pas capables d’y accĂ©der.

Vous ĂȘtes donc optimiste ?

Je suis un pessimiste actif. Je veux que ça marche ; que, pour une fois, l’utopie gagne. On peut me traiter de gogo, mais je prĂ©fĂšre ĂȘtre gogo avec ceux qui font bouger le monde que rĂ©aliste avec ceux qui ne font que le freiner.

Aviez-vous senti venir cette rĂ©volution ?

Oui, juste aprĂšs la mort de Mohamed Bouazizi [dont le suicide a dĂ©clenchĂ© les premiers mouvements de rĂ©volte, NDLR]. Une anecdote m’a marquĂ©. Je loue une maison Ă  l’annĂ©e Ă  La Marsa, au bord de la plage. Des amoureux flirtaient tranquillement quand des flics sont arrivĂ©s comme des sauvages et les ont fait dĂ©guerpir. Un de mes amis leur a dit : « ArrĂȘtez, que vous ont-ils fait ? » Quelques semaines plus tĂŽt, il n’aurait jamais agi ainsi, car il savait que ça pouvait tourner au vinaigre. La plupart des gens avaient trĂšs peur, parce qu’ils avaient un appartement ou un emploi Ă  dĂ©fendre. Je suis de ceux qui avaient peur aussi. Je ne possĂšde rien en Tunisie, mais je fais partie de la communautĂ© juive et je n’avais pas envie qu’indirectement cela lui attire des ennuis.

Aviez-vous des contacts avec Ben Ali ?

Je l’ai vu une fois, juste aprĂšs qu’il a pris le pouvoir, en 1987. Il m’a dit : « Vous ĂȘtes un fils de Tunis et un conseiller de Mitterrand, aidez-moi Ă  libĂ©raliser la tĂ©lĂ©vision. » Moi, naĂŻf, je passe un week-end auprĂšs de lui et, un mois plus tard, je lui remets un rapport : tĂ©lĂ©vision indĂ©pendante du pouvoir politique, crĂ©ation d’un Conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel, organisation de dĂ©bats
 Ce rapport a dĂ» ĂȘtre enterrĂ© dans les sables de Foum Tataouine !

Vous quittez la Tunisie pour la France, en 1957. Puis, en 1965, vous rĂ©pondez Ă  une petite annonce et c’est au Niger que vous apprenez votre mĂ©tier de cinĂ©aste


J’ai adorĂ© ce pays. Je m’y suis fait des frĂšres et sƓurs – des lycĂ©ens de mon Ăąge, puisque je m’occupais d’une tĂ©lĂ© scolaire et du cinĂ©club. J’ai dĂ©couvert les danses de possession, la tradition africaine, la franc-maçonnerie Ă  laquelle j’ai Ă©tĂ© initiĂ©. J’étais un jeune homme ardent qui voulait changer le monde. Le Niger m’a offert l’espace et la fraternitĂ©. J’avais l’impression de sortir de l’orphelinat. L’immense savane africaine, la virginitĂ© du monde
 C’était beau.

Vous y retournez ?

De temps en temps. J’ai fait plein de films en Afrique. J’aime beaucoup ce continent mais, par moments, il m’effraie. Il y avait plus de gentillesse avant, parce qu’il y avait plus de traditions, des sociĂ©tĂ©s initiatiques qui crĂ©aient un vrai ordre – qui ne reposait pas sur l’argent.

Vous rencontrez Mitterrand en 1970. Comment vous est-il apparu ?

Impressionnant. Il Ă©tait beau, d’abord. TrĂšs cultivĂ©, extrĂȘmement attentif. C’était un homme en pleine possession de sa vie : il aimait les femmes – vous riez, mais cela compte : ce n’était pas un politique classique. Ce n’est pas un hasard s’il a dit : « AprĂšs moi, il n’y aura plus que des comptables. » Nous parlions poĂ©sie, cinĂ©ma, femmes
 C’était un homme drĂŽle, Ă  l’humour distanciĂ© et qui, pour moi, avait le mĂ©rite inouĂŻ de connaĂźtre la France des chemins vicinaux, des collines et des dĂ©partements
 Voyager avec lui Ă©tait dĂ©licieux. Il m’a appris la France.

Au dĂ©but des annĂ©es 1970, vous avez dĂ©jeunĂ© chez lui avec RenĂ© Bousquet, qui organisa la rafle des Juifs au vĂ©lodrome d’Hiver, en 1942. Cela ne vous a pas choqué ?

Je ne sais pas qui c’est, Ă  l’époque ; c’est Jacques Attali – prĂ©sent lui aussi Ă  ce dĂ©jeuner – qui m’explique. Ça a glissĂ© sur moi, je ne mesurais pas
 Quand Mitterrand a dit Ă  Attali : « Bousquet a sauvĂ© notre rĂ©seau de rĂ©sistants pendant la guerre », je n’avais pas de raison de douter de lui. Quel droit avais-je, moi, trente ans aprĂšs, de condamner un type qui avait Ă©tĂ© blanchi Ă  la LibĂ©ration ? Je prĂ©fĂšre me souvenir du Mitterrand jeune rĂ©sistant, trĂšs courageux, qui fĂ©dĂ©rait les mouvements de prisonniers. Et puis, j’aime la complexitĂ© chez les gens. Notre seul moment de sĂ©paration s’est produit en 1986, au moment de la cohabitation. J’ai dĂ©missionnĂ© de la direction de FR3 [la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision rĂ©gionale], car cela me dĂ©plaisait de dĂ©coudre sous la droite la politique que j’avais mise en Ɠuvre sous la gauche. « On ne dĂ©serte pas », m’a-t-il engueulĂ©. On n’a plus Ă©changĂ© un mot jusqu’en 1988. Et lĂ , grand seigneur, il m’appelle pour m’occuper de sa campagne


Vous ĂȘtes de ceux qui l’ont fait rĂ©pĂ©ter pour son dĂ©bat du second tour face Ă  Chirac, en 1988. Qui a eu l’idĂ©e de lui faire appeler son adversaire « monsieur le Premier ministre » ?

BĂ©rĂ©govoy ou Fabius, je ne sais plus. Mais lĂ  oĂč Mitterrand est fort, c’est qu’il ne se trompe pas une seule fois, lors du dĂ©bat. Il avait une maĂźtrise extraordinaire. C’est pour cela que je l’adorais, moi qui suis impatient, Ă©motif
 Mitterrand m’a appris des choses qui n’ont aucun rapport avec la politique. À se battre sur ce qu’on croit ĂȘtre essentiel et Ă  ne pas dĂ©vier. L’opiniĂątretĂ©, l’acharnement. Et il l’a fait : en quatorze ans, rien de capital n’a Ă©tĂ© entachĂ©.

Les socialistes voulaient « changer la vie ». L’avez-vous changĂ©e ?

Vous savez bien que non. Mais on a fait des choses concrĂštes, doublĂ© les allocations familiales, le salaire minimum
 On ne savait d’ailleurs pas trĂšs bien ce qu’on entendait par cette injonction rimbaldienne. Je croyais qu’on allait tous s’aimer, qu’il n’y aurait plus jamais de mĂ©chancetĂ©.

C’était merveilleux !

Oui, mais on en Ă©tait lĂ , il y avait cette mĂȘme naĂŻvetĂ©, ce mĂȘme enthousiasme qui, aujourd’hui, me poussent Ă  croire que tout va bien se passer en Tunisie.

Allez-vous filmer la campagne prĂ©sidentielle de 2012 ?

Oui, j’adore filmer les coulisses de la politique. Je suis alors extraordinairement neutre. Ce qui m’intĂ©resse, c’est le cĂŽtĂ© romanesque des choses. Je filme d’ailleurs plus facilement la droite que la gauche parce que, pour moi, c’est plus exotique. Je voudrais, aussi, que la gauche rĂ©invente un peu de lyrisme. Le programme du PS est sage, raisonnable.

Cela vous déçoit ?

Je pense que ce n’est plus de mon temps. C’est pour cela que ce livre est important pour moi : il parle d’une Ă©poque pas si lointaine oĂč la gauche rĂȘvait et savait faire rĂȘver. On ne peut pas faire de politique rĂ©elle sans faire rĂȘver.

Source : « Jeune Afrique » Le 10-05-2011

Tunisie. ScĂšnes dĂ©solantes Ă  l’aĂ©roport de Tunis-Carthage

Les passagers tunisiens et Ă©trangers arrivĂ©s Ă  l’aĂ©roport de Tunis-Carthage dans la nuit de samedi Ă  dimanche ont Ă©tĂ© doublement surpris. Et pas seulement Ă  cause du couvre feu


A cause du couvre feu, une grande partie des voyageurs a Ă©tĂ© empĂȘchĂ©e de quitter l’aĂ©rogare. Il Ă©tait aussi impossible de dĂ©crocher un taxi. Les parents des uns et les hĂŽtes des autres n’ont pu se dĂ©placer Ă  l’aĂ©roport et ceux qui y Ă©taient dĂ©jĂ  avant l’annonce de la nouvelle ont Ă©prouvĂ© beaucoup de peine et de peur quitter les lieux Ă  partir de 23 heures. Plusieurs ont d’ailleurs passĂ© leur nuit sur place. Et pour rajouter Ă  la mĂ©saventure des centaines de personnes, Ă©trangers compris, on a constatĂ© sur place l’absence des moindres mesures de sĂ©curitĂ©, les forces de l’ordre et l’armĂ©e Ă©tant les grands absents dans cet endroit aussi sensible. C’est Ă  ne plus rien comprendre


Qui fait quoi dans cette foire d’empoigne?

DĂšs leur atterrissage sur le sol tunisien, les passagers ont appris la triste information que les Ă©quipes de l’aĂ©roport (les bagagistes en l’occurrence), qui observent une grĂšve voici maintenant plusieurs jours, n’étaient pas en services et que ceux dĂ©signĂ©s pour assurer la permanence n’ont pu joindre leurs postes Ă  cause du couvre-feu. Il a fallu donc attendre plus d’une heure pour pouvoir rĂ©cupĂ©rer les bagages.

Mais la scĂšne la plus dĂ©solante et la plus embarrassante pour nous Tunisiens dans toute cette triste soirĂ©e est celle des dizaines de visiteurs Ă©trangers (touristes, particuliers et hommes/femmes d’affaires) livrĂ©s Ă  eux-mĂȘmes, qui n’ont rien compris et qui n’ont trouvĂ© aucun interlocuteur capable de les consoler, de les aider Ă  joindre leurs destinations ou tout simplement de les rĂ©conforter et de contenir leur rage et leur dĂ©ception.

Tout le monde ne pensait qu’à une chose: comment rejoindre sa maison aprùs avoir fini le travail. Et tous ces touristes et autres passagers? Peu importe ce qui leur arrive et s’ils parviennent à quitter les lieux dans des conditions normales!

Si on peut trouver des excuses pour ce qui est arrivĂ© aux particuliers et aux investisseurs Ă©trangers arrivĂ©s Ă  Tunis samedi soir et tĂŽt dimanche Ă  l’aĂ©roport de Tunis, il nous est Ă©tĂ© trĂšs difficile Ă  digĂ©rer et Ă  concevoir qu’aucune partie, privĂ©e ou officielle, n’est venue au secours de ceux, amoureux de notre pays, qui n’ont pas hĂ©sitĂ© de venir en touristes en ces temps difficiles.

Un dĂ©menti pour l’image d’une Tunisie accueillante

Il a fallu l’apport de quelques citoyens tunisiens et celui de quelques journalistes, eux aussi coincĂ©s dans les mĂȘmes conditions, pour que des touristes soient rassurĂ©s et retrouvent leur sourire.

L’annonce du couvre feu moins d’une heure seulement avant son entrĂ©e en vigueur a certes beaucoup contribuĂ© Ă  ce que nous avons vĂ©cu. Mais elle n’explique en rien ce qu’ont Ă©prouvĂ© beaucoup de Tunisiens et d’étrangers.

Au moment oĂč les autoritĂ©s tunisiennes s’efforcent pour sauver ce qui peut ĂȘtre sauvĂ© de la saison touristique estivale, ce qui s’est passĂ© Ă  l’aĂ©roport de Tunis-Carthage dans la nuit de samedi Ă  dimanche est une vraie honte. Une gifle pour l’image d’une Tunisie calme, rassurante et accueillante.

N’est-ce pas monsieur le ministre du Commerce et du Tourisme?!

Source : « Kapitalis » Le 10-05-2011

TUNISIE. 13 élus pour la haute instance

Election de 13 membres de la haute instance indépendante pour les élections. 13 sur 16.

L’instance centrale des Ă©lections compte 16 membres nommĂ©s par dĂ©cret et seront choisis comme suit : trois magistrats choisis par la haute instance pour la rĂ©alisation des objectifs de la rĂ©volution, proposĂ©s Ă  paritĂ© par l’association des magistrats tunisiens (AMT), le syndicat des magistrats ; trois membres choisis par la haute instance pour la rĂ©alisation des objectifs de la rĂ©volution parmi les six candidats proposĂ©s par le conseil de l’ordre des avocats, un huissier notaire, un huissier de justice, un expert comptable, un journaliste, deux membres parmi les militants des droits de l’Homme, un membre reprĂ©sentant les Tunisiens Ă  l’étranger, un expert en informatique, et deux professeurs universitaires.

Voici la liste des 13 élus:

‱Boubaker Ben Thabet

‱Med Fadhel Mahfouth

‱Ridha Torkhani

‱Sami Ben Slama

‱Nabil Bafoune

‱Anouar Ben Hssan

‱Arbi Chouikha

‱Kamel Jandoubi

‱Abd Errahmane Hedhili

‱Monia Abed

‱Zeki Rahmouni

‱Mohamed Sghaïer Achouri

‱Souad Triki

Source : « Le Western culturel » Le 10-05-2011

Tunisie : Les facebookeurs face Ă  la situation politique actuelle

AprĂšs avoir grandement contribuĂ© Ă  la rĂ©volution du 14 janvier, voilĂ  que Facebook, le rĂ©seau social le plus populaire en Tunisie, fait naitre une toute nouvelle tendance : celle des sondages politiques. Que pensez-vous du discours de Beji Caid Essebsi ? Avez-vous confiance en Farhat Errajhi ? Autant de questions dont les rĂ©ponses demeurent parfois….inattendues !

A la base, cette nouvelle application intitulĂ©e «Facebook question», prĂ©sente sur pratiquement tous les murs des facebookeurs tunisiens, offre la possibilitĂ© aux utilisateurs de poser et de rĂ©pondre Ă  plusieurs questions, d’obtenir des recommandations d’amis (les avis sur tel film, restaurant ou sur une voiture…). Sauf qu’en Tunisie, cet outil sert Ă  une toute autre vocation : celle de jauger un temps soit peu l’Ă©tat d’esprit qui rĂšgne en ce moment chez des internautes, tiraillĂ©s entre les rĂ©vĂ©lations explosives de Farhat Errajhi, ancien ministre de l’intĂ©rieur et le dĂ©menti officiel effectuĂ© ce dimanche par BĂ©ji Caid Essebsi, le premier ministre du gouvernement provisoire tunisien. Sans parler des diffĂ©rents points de vue concernant les leaders des partis politiques !

Voici un petit Ă©chantillon provenant des innombrables questions/rĂ©ponses (ainsi que leurs rĂ©sultats) qui pullulent actuellement sur les murs des internautes. PrĂ©cisons toutefois, que chaque facebookeurs, groupes et pages fans a le droit de poser la question qu’il souhaite. Celle-ci sera ensuite proposĂ©e aux diffĂ©rents amis qui pourront donner leurs propre avis sur la question et mĂȘme rajouter de nouvelles opinions. Ainsi, selon les premiĂšre constatations, le tunisien serait pour un rĂ©gime militaire, aurait encore confiance en le gouvernement actuel aurait tendance Ă  trouver Farhat Errajhi plus convaincant que Beji Caid Esebsi….

Source : « Tekiano » Le 10-05-2011

Tunisie. Le torchon brûle entre Tarak Ben Ammar et Gilbert Naccache

Le neveu de Wassila Bourguiba, seconde Ă©pouse de l’ex-prĂ©sident, menace d’intenter un procĂšs pour diffamation Ă  celui qui a Ă©tĂ© emprisonnĂ© par Bourguiba pendant 11 ans, entre 1968 et 1979.

La menace du producteur de cinĂ©ma Tarak Ben Ammar fait suite Ă  une interview du militant de gauche et co-fondateur du groupe Perspectives Tunisiennes, oĂč Gilbert Naccache dĂ©crit Tarak Ben Ammar sous des traits peu amĂšnes.

Les «gens de l’ombre» Parmi les «gens de l’ombre», membres du Rcd, ex-parti au pouvoir, qui veulent confisquer la rĂ©volution tunisienne ou cherchent Ă  jouer encore un rĂŽle politique dans l’aprĂšs-Ben Ali, des «gens qui reprĂ©sentaient Ă  la fois la partie la plus pourrie du Rcd mais pas la partie complĂštement mafieuse», et «qui avaient des intĂ©rĂȘts avec les Français», M. Naccache cite, dans son entretien sur Facebook, le banquier «Hakim Karoui et ses acolytes». Il nomme ensuite l’un des reprĂ©sentants de «la bourgeoisie tunisoise», Tarak Ben Ammar en l’occurrence, qui, pour reprendre pied sur la scĂšne politique tunisienne, serait, selon ses termes, «prĂȘt Ă  tout financer». «Si tu veux crĂ©er un parti, vas le voir, il te donnera tout l’argent que tu voudras. Il est prĂȘt Ă  tout financer. Il nous a mĂȘme fait des avances», raconte M. Naccache. Il ajoute d’autres dĂ©tails: «La personne qui a Ă©tĂ© contactĂ©e [par Ben Ammar, ndlr] lui a expliquĂ© que nous, dans notre association, on voudrait qu’avec les gens qui participent Ă  financer, que ce soit Tarak Ben Ammar ou un autre, on discute d’abord des engagements». Mais tout en affirmant que M. Ben Ammar n’a rien demandĂ© en contrepartie de son soutien financier et qu’aucun compromis n’a Ă©tĂ© envisagĂ© entre les deux parties, M. Naccache justifie son refus de l’aide financiĂšre du producteur de cinĂ©ma par son souci de ne rien lui devoir. Car, explique-t-il, «quand tu as acceptĂ© de l’argent de quelqu’un, mĂȘme si tu n’es pas obligĂ©, tu es beaucoup plus gĂȘnĂ© aprĂšs.»

Gros souliers contre mocassins S’agissant, en l’occurrence, de Tarak Ben Ammar, M. Naccache ajoute: «Je ne prendrai pas une position politique en Tunisie sans que je le dĂ©nonce comme un corrompu.» (sic!) Et d’ajouter, sans prendre de gants: «En tout cas, il Ă©tait l’un des agents de la corruption du temps de Bourguiba. Ça, je ne lui laisserai pas faire. Il a utilisĂ© la puissance de sa tante et de l’Etat pour gagner de l’argent et se faire un empire. Donc, si demain c’est lui qui finance, et mĂȘme si moi je veux le dĂ©noncer, on va me dire: ‘‘Ne dĂ©conne pas, on a besoin de lui, c’est un copain, il nous donne de l’argent, on doit le mĂ©nager’’. Non, je ne mĂ©nage personne. Cette rĂ©volution est une rĂ©volution de gens qui ont de gros souliers et qui marchent dans la boue. Et non de gens qui ont des mocassins.» Dans sa rĂ©ponse aux «propos diffamatoires de Gilbert Naccache», Tarak Ben Ammar affirme sur sa page Facebook avoir pris connaissance «avec stupeur» des accusations de M. Naccache Ă  son encontre. Et il est catĂ©gorique: «Je ne connais pas cet homme, je ne l’ai jamais rencontrĂ©, ni ‘‘approché’’ comme il dit, encore moins ‘‘proposĂ© de financer son mouvement politique’’. Je n’ai jamais entendu parler de son mouvement. Je ne connais ni ses amis, ni ses thĂ©ories, ni ses idĂ©es, ni son parti, ni sa personne. Je ne sais rien de lui. Je ne lui ai jamais parlĂ© de ma vie. Il m’est parfaitement inconnu. Je ne l’ai vu et entendu pour la premiĂšre fois de mon existence que dans la vidĂ©o postĂ©e sur Facebook». MĂȘme si on peut s’étonner du fait que M. Ben Ammar avoue ne pas connaĂźtre Gilbert Naccache, une icĂŽne de la scĂšne politique contemporaine de la Tunisie – Ă  chacun sa culture et ses centres d’intĂ©rĂȘt, ceux de M. Ben Ammar, comme il le prĂ©cise lui-mĂȘme, sont les mĂ©dias et le cinĂ©ma –, on peut cependant concĂ©der au neveu de Wassila Bourguiba qu’il n’a pas besoin du «secours de Gilbert Naccache» pour se «lancer dans la politique». Car, comme il le dit lui-mĂȘme: «Tant qu’à financer un parti, j’en aurais simplement créé un moi-mĂȘme, au moins aurais-je eu l’assurance de ne pas vĂ©gĂ©ter Ă  l’état de groupuscule.»

Une unique vocation: les mĂ©dias et le cinĂ©ma Il y a certes eu une page Facebook mise en ligne le 21 janvier, soit une semaine aprĂšs la chute de Ben Ali, par un certain Renaud Duaner, et qui annonçait clairement «Pour ceux qui aiment avoir ‘‘Tarek Ben Ammar’’ comme PrĂ©sident». Mais cela, bien sĂ»r, n’engage en rien l’intĂ©ressĂ© qui affirme n’avoir aucune ambition politique. Et nous n’avons aucune raison pour ne pas le croire. «J’ai dĂ©jĂ  dĂ©clarĂ© publiquement et officiellement, sur la radio Europe 1 et sur YouTube, que, Ă©tant associĂ© Ă  une chaĂźne de tĂ©lĂ©vision, je considĂ©rais que cela Ă©tait incompatible avec une quelconque charge ou candidature politique», souligne M. Ben Ammar. Il ajoute: «Et dans tous les cas, je n’ai jamais envisagĂ© aucun projet de financement de parti politique, de quelque importance qu’il soit. Je rĂ©pĂšte donc qu’en ce qui me concerne, je n’ai toujours eu qu’une seule et unique vocation, depuis mon jeune Ăąge, les mĂ©dias et le cinĂ©ma.» L’ami de M. Ben Ammar, et son co-actionnaire Ă  Nessma TV, Silvio Berlusconi, n’est pas du mĂȘme avis. Ayant les mĂȘmes vocations, les mĂ©dias et le cinĂ©ma, cela ne l’a pas empĂȘchĂ© d’utiliser son empire mĂ©diatique et tĂ©lĂ©visuel pour se lancer en politique et prendre la tĂȘte de l’Etat italien. Ce n’est visiblement pas un exemple Ă  suivre pour le Tuniso-français. Et cela M. Naccache a visiblement du mal Ă  l’admettre. L’auteur de ‘‘Cristal’’, un monument de la littĂ©rature carcĂ©rale tunisienne, qui aurait bien pu ĂȘtre portĂ© Ă  l’Ă©cran par M. Ben Ammar, ne porte malheureusement pas ce dernier dans son cƓur, et c’est son droit, mais de lĂ  Ă  lui attribuer des ambitions qu’il n’a pas, et encore moins de le traiter de «corrompu», il y a un pas qu’il aurait pu Ă©viter de faire. Et comme on devait s’y attendre, les dĂ©clarations de M. Naccache n’ont pas manquĂ© d’énerver M. Ben Ammar, qui s’est vu «contraint» de l’assigner en justice «pour toutes les diffamations profĂ©rĂ©es dans sa vidĂ©o». Une affaire Ă  suivre


Source : « Kapitalis » Le 10-05-2011

Tunisie: Quand la stupiditĂ© s’érige en crime !

Ne pas insulter les cons, les dĂ©biles, les mĂ©diocres est une tĂąche difficile et une besogne frustrante pour peu qu’on ait un peu d’esprit et un dĂ©but de

raison. Etre clĂ©ment avec la sottise et tolĂ©rer le vulgaire, le bas, le trĂšs bas tel est dĂ©sormais le lot quotidien de la majoritĂ©. Apparemment, le cĂŽtĂ© pervers de la dĂ©mocratie serait le fait que nous soyons acculĂ©s Ă  subir le mensonge sur fond de vĂ©ritĂ© et la vĂ©ritĂ© sur fond de mensonge. Peu importe les propos, pourvu que ça fasse tĂąche, pourvu que ça souille, pourvu que ça fasse le Buzz. « Ne pas laisser sa pensĂ©e trainer dans les orniĂšres du vulgaire » [STENDHAL: « le rouge et le noir »]: Je m’y force, je m’y tiens. Il n’y’a pas plus vulgaire qu’une vidĂ©o d’un ancien ministre de l’intĂ©rieur qui accuse sans preuve. Il n’y’a pas plus vulgaire qu’un propos non assumĂ©. Il n’y’a pas plus vulgaire qu’un magistrat qui condamne par humeur. Il n’y’a pas plus vulgaire qu’un journalisme sans Ă©thique et sans moral. Pour Monsieur RAJHI qui se veut homme du peuple je dis ceci : Tout est condamnable dans ta sortie, mĂȘme sa forme. Une interview dĂ©robĂ©e qui n’en a pas l’air et une lĂ©gĂšretĂ© de ton qui jure avec la gravitĂ© de la teneur. Et puis au bout, une bombe qui explose dans chaque foyer, un doute qui s’installe dans tous les esprits et un malaise qui ronge tous les cƓurs. Mais encore, un pays qui brĂ»le et la vie qui quitte les rues. J’espĂšre que tu en es fier. Trois trucs que je retiens de cette tirade malheureuse : ArmĂ©e pourrie, SahĂ©liens pourris, gouvernement pourri. Pour rĂ©sumer : Tous ou presque pourris, tous ou presque vendus. D’abord venons-en aux forces armĂ©es. Pour moi, mettre en doute l’intĂ©gritĂ© et la foi de l’institution militaire revient Ă  un saut dans le vide sans filets de secours. L’armĂ©e est le dernier rempart qui abrite cette Tunisie qui n’a ni constitution ni lĂ©gitimitĂ©. Et puis pourquoi R.AMMAR irait chercher ZABA le prĂ©sident dĂ©chu au fond du Sahara en cachette pour recevoir des ordres alors qu’il lui a dĂ©sobĂ©i avec fracas 4 mois avant quand ce dernier Ă©tait le prĂ©sident en place. Le ridicule ne tue pas puisque M. Rajhi respire encore. Et puis il veut qu’on le suive dans cette marche vers le nĂ©ant et sans apporter le moindre dĂ©but de preuve !!! La grande muette ne doit pas le rester face Ă  des allĂ©gations de la sorte. Personne n’est au dessus de la loi, et surtout pas un magistrat. Et puis, je veux bien croire que les sahĂ©liens ne veulent pas cĂ©der le pouvoir qu’ils auraient exercĂ© depuis des dĂ©cennies puisque « Monsieur propre » lui-mĂȘme ne voulait pas cĂ©der son juteux salaire de ministre acquis depuis seulement deux mois et ce mĂȘme au prix d’une allĂ©geance humiliante Ă  un gouvernement de « pourris ». Mais approfondissons davantage ce point peut ĂȘtre qu’on verra plus clair. Alors, il prĂ©tend que les sahĂ©liens se retourneraient contre toute Ă©lection qui ne les mettrait pas au pouvoir. Mais qui sont d’abord ces sahĂ©liens ? Ils devraient ĂȘtre organisĂ©s en une sociĂ©tĂ© secrĂšte ralliant politiques, militaires et peut ĂȘtre milices pour pouvoir ainsi effectuer un retournement aussi spectaculaire contre la volontĂ© du peuple. Mais on doit aussi prendre comme hypothĂšse qu’une majoritĂ© des habitants de la rĂ©gion du sahel (Il faut d’abord la dĂ©finir) sont au courant de cette machination on ne peut plus diabolique, parce que tout mouvement politique supposerait une base pour le soutenir aprĂšs le putsch. Et du coup, Il faut supposer qu’une frange de la population tunisienne comploterait actuellement contre toutes les autres et ce parce qu’elle croit en sa lĂ©gitimitĂ© Ă  gouverner. La poudre d’une guerre civile Ă©talĂ©e, il ne reste plus que l’étincelle !! Quel mĂ©pris de la Tunisie et des tunisiens et quelle belle image il nous dresse lĂ . Ce n’est certainement pas l’idĂ©e que je me fais de ma patrie, mais ce n’est peut ĂȘtre lĂ  que le reflet d’un ĂȘtre psychologiquement tourmentĂ© et d’une personne profondĂ©ment amĂšre. Et puis, pourquoi BCS, un Tunisois donc « gĂ©ographiquement illĂ©gitime », risquerait sa rĂ©putation et sa mĂ©moire pour servir ses maĂźtres sahĂ©liens ? Pour quelle raison ? Je ne crois pas au crime sans motif et je ne vois vraiment pas pourquoi un homme politique dĂ©fendrait un autre parti que le sien et sans mĂȘme qu’il ait rĂ©compense en retour. L’homme est dĂ©sintĂ©ressĂ© de tout sinon de son amour pour son pays. Lisez son histoire et vous saurez que ce pays n’a jamais Ă©tĂ© entre de si bonnes mains. AprĂšs l’interview de ce dernier, les deux protagonistes de l’affaire ont parlĂ©. Le contraste est sidĂ©rant. Tout commentaire sera de trop. Pour finir, si c’est juste de la stupiditĂ© qui a inspirĂ© les propos de M.RAJHI alors c’est une stupiditĂ© qui s’érige en crime et si c’est juste de l’irresponsabilitĂ© alors c’est une irresponsabilitĂ© qui prend des allures de trahison. Et je vois aujourd’hui des avocats, encore eux, qui accourent pour prendre sa dĂ©fense. Et la Tunisie, qui prend sa dĂ©fense ?

Source : « Espace Manager » Le 10-05-2011

Montrer les révolutions du Maghreb, un défi pour les cinéastes et producteurs

La rĂ©volution tunisienne est dans « la boĂźte » : les Ă©vĂ©nements qui ont conduit au dĂ©part de l’ancien prĂ©sident Ben Ali, le 14 janvier, ont suscitĂ© un flot continu d’images Ă©manant de journalistes, d’amateurs, mais aussi de documentaristes et de cinĂ©astes. Ainsi, tournĂ© dans l’urgence, Plus jamais peur, un documentaire rĂ©alisĂ© par Mourad Cheikh, sera projetĂ© durant le Festival de Cannes, le 20 mai.

Mais que faire de cette matiĂšre ? Quel effet va produire la chute de la dictature sur l’imaginaire des rĂ©alisateurs ? Ces questions Ă©taient au centre de la table ronde organisĂ©e, dimanche 8 mai, au cinĂ©ma L’Ecran, Ă  Saint-Denis, lors de la 6e Ă©dition du Panorama des cinĂ©mas du Maghreb, organisĂ© du 4 au 8 mai. RĂ©alisateurs et producteurs tunisiens, algĂ©riens ou marocains invitĂ©s n’ont pas cachĂ© une certaine perplexitĂ©. La force de l’autocensure est tenace, la fiction est encore sous la bride. « Je ne trouve pas encore le recul pour filmer. Mais nous sommes venus ici pour lancer un appel et fonder une association de cinĂ©astes du Maghreb », a dĂ©clarĂ© le documentariste tunisien et activiste Marouane Meddeb.

Qu’elles proviennent d’amateurs ou de professionnels, les images captĂ©es sur le vif se ressemblent, estime le rĂ©alisateur et producteur marocain Ali Essafi : « Au Maroc, on a filmĂ© le mouvement qui est nĂ© le 20 fĂ©vrier. Ce que j’ai vu, dans les rushes, ne diffĂšre pas de ce qui tourne sur YouTube. L’autocensure est plus importante que la censure. On est empĂȘtrĂ©s dans des schĂ©mas, des complexes d’infĂ©rioritĂ© issus du colonialisme, dit-il, sans pour autant dĂ©sespĂ©rer. Les images sauvages de la rĂ©volution ont un intĂ©rĂȘt : ces amateurs qui filment beaucoup peuvent nous aider Ă  nous libĂ©rer de l’auto-censure. »

Filmer la Tunisie post-Ben Ali pour en tirer une fiction ? C’est le pari de trois jeunes cinĂ©astes tunisiens du groupe Exit, sociĂ©tĂ© de production fondĂ©e en 2005. AprĂšs avoir « surconsommé » des images tĂ©lĂ©visĂ©es, Ala Eddine Slim, Youssef Chebbi et Ismael ont eu envie de fabriquer autre chose. Fin mars et dĂ©but avril, ils sont partis dans le camp de rĂ©fugiĂ©s de Ras Jedir, Ă  la frontiĂšre tuniso-libyenne. Avec leurs camĂ©ras numĂ©riques, ils ont filmĂ© la vie du camp : les intĂ©gristes font la loi, les communautĂ©s se sont dĂ©jĂ  regroupĂ©es par quartier, l’armĂ©e ne fait que contrĂŽler quand elle ne sort pas le bĂąton… Babylon n’est encore qu’une Ă©bauche, mais promet d’ĂȘtre un objet cinĂ©matographique singulier.

L’Ă©ducation Ă  l’image

Vingt minutes en ont Ă©tĂ© montrĂ©es au public, dimanche 8 mai. « On va raconter une sociĂ©tĂ© qui s’autodĂ©truit. Les dialogues ne seront pas sous-titrĂ©s. Babylon, c’est l’impossibilitĂ© de rencontre entre les gens. On tient aussi Ă  ce que le film parle de nulle part, et ne soit pas cantonnĂ© Ă  la Tunisie », explique Ala Eddine Slim, 28 ans, Ă  l’issue de la table ronde. Les trois cinĂ©astes ont autoproduit le film et cherchent encore des financements pour la postproduction.

En attendant, ils mettent la derniĂšre main Ă  des propositions visant Ă  rĂ©organiser le cinĂ©ma tunisien, dĂ©velopper les cinĂ©-clubs, l’Ă©ducation Ă  l’image. Quand on salue une telle Ă©nergie, Ala Eddine Slim rĂ©pond avec ironie : « La dictature, c’est stimulant intellectuellement. »

Source: “Le Monde” Le 10-05-2011

Premiers orages sur le « printemps arabe »

Ne soyons pas naĂŻfs : les chemins de la dĂ©mocratie sont rarement pavĂ©s de roses. Les deux pays « modĂšles » du « printemps arabe », la Tunisie et l’Egypte, n’Ă©chappent pas Ă  la rĂšgle. Ils sont dans la tourmente, comme l’ont encore manifestĂ© les Ă©vĂ©nements du week-end. Ce n’Ă©tait pas inattendu.

Si, Ă  Tunis comme au Caire, des rĂ©gimes dictatoriaux ont cĂ©dĂ© le pas sans trop de sang versĂ©, la transition vers la dĂ©mocratie n’y est pas moins difficile. Mais il faut toute l’impatience d’un consommateur europĂ©en, habituĂ© Ă  ĂȘtre servi Ă  la nanoseconde, et pour qui le rythme de l’Histoire se confond avec celui d’une sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e, pour s’Ă©tonner que la Tunisie et l’Egypte ne soient pas dĂ©jĂ  des social-dĂ©mocraties scandinaves !

Cela prendra du temps, mieux vaut s’y faire.A la dictature succĂšde en gĂ©nĂ©ral une phase plus ou moins chaotique. La dĂ©mocratie relĂšve de l’Ă©volution – pas de la rĂ©volution ; elle ne se dĂ©crĂšte pas – elle s’installe lentement.

Et dans l’insistance de certains Ă  pointer d’ores et dĂ©jĂ  les « ratĂ©s » de la transition Ă©gyptienne et tunisienne, il y a quelques relents de ce que les Allemands appellent la Schadenfreude – ce « on vous l’avait bien dit que ça allait mal tourner » des Ă©ternels nostalgiques de l’ordre passĂ©.

Les nouvelles venues d’Egypte et de Tunisie n’en sont pas moins inquiĂ©tantes.

Au moins douze personnes ont Ă©tĂ© tuĂ©es, des centaines d’autres blessĂ©es et deux Ă©glises brĂ»lĂ©es au Caire, dans la nuit du samedi 7 mai, lors d’affrontements entre chrĂ©tiens et musulmans. Ce type d’incidents sanglants – dont sont en gĂ©nĂ©ral victimes les coptes – n’est pas nouveau : il y en avait du temps d’Hosni Moubarak. Mais la lenteur de la rĂ©action de la police tĂ©moigne d’un climat de sĂ©curitĂ© durablement dĂ©gradĂ©, alors que l’Egypte va entrer en campagne Ă©lectorale.

Les Ă©vĂ©nements de Tunisie reflĂštent Ă©galement une phase de doute et d’insĂ©curitĂ©. Le gouvernement s’est rĂ©solu Ă  dĂ©clarer samedi le couvre-feu Ă  Tunis et dans sa banlieue. La mesure a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©e aprĂšs quatre jours de manifestations antigouvernementales suivies de pillages au coeur de la capitale et dans la banlieue nord.

Elle intervient alors qu’un ancien ministre a Ă©voquĂ© la possibilitĂ© d’un coup d’Etat militaire si le scrutin prĂ©vu pour l’Ă©lection d’une AssemblĂ©e constituante, le 24 juillet, donnait la victoire aux islamistes.

En Tunisie comme en Egypte, la difficile transition politique en cours a lieu sur fond de difficultĂ©s Ă©conomiques grandissantes. L’effondrement du tourisme y est pour beaucoup. La croissance a chutĂ© dans les deux pays, le chĂŽmage des jeunes augmente, la pauvretĂ© aussi, crĂ©ant un terrain favorable Ă  l’extrĂ©misme politique.

L’Egypte et la Tunisie sont emblĂ©matiques de ce que le « printemps arabe » a portĂ© de meilleur. Un Ă©chec serait une victoire pour les dictateurs de la rĂ©gion. Les pays du G8, qui se rĂ©unissent fin mai Ă  Deauville, doivent dĂ©gager rapidement une aide massive au profit du Caire et de Tunis.

Source: ”Le Monde” Le 09-05-2011

La bourde de Lotfi Laamari, les dits et les non dits de Béji Caïd Essebsi, et les « oublis » de nos journalistes


 

 

Par Badreddine BEN HENDA

AprĂšs l’entretien accordĂ© dimanche dernier par le Premier Ministre Ă  nos trois chaĂźnes nationales de tĂ©lĂ©vision, nous avons cru bon de livrer Ă  chaud cet ensemble de remarques plutĂŽt critiques sur la prestation des journalistes invitĂ©s et sur quelques rĂ©ponses de M. BĂ©ji CaĂŻd Essebsi.

 

A notre avis, le « coup d’éclat » de l’interview fut la question posĂ©e par Lotfi Laamari sur la possibilitĂ© de demander aux forces de l’OTAN de dĂ©fendre nos frontiĂšres avec la Libye. HabituĂ© Ă  jouer le beau rĂŽle dans les Ă©missions oĂč il participe sur Hannibal TV, il crut, cette fois encore, devoir s’illustrer aux dĂ©pens de ses deux collĂšgues de la Nationale et de Nessma lesquelles, pour son malheur, le laissĂšrent poser sa question-bourde et tirer le premier sa « boulette » du jour. Ne cachant point sa sympathie, nous dirions mĂȘme son soutien, pour les rebelles en guerre contre Gaddafi, et passant sous silence les abus et les exactions commis en terre libyenne par les forces Ă©trangĂšres (guĂšre dĂ©sintĂ©ressĂ©es) au nom de la dĂ©fense des civils, Lotfi Laamari s’étonna que la Tunisie n’ait pas jusqu’aujourd’hui et aprĂšs les incursions et agressions rĂ©pĂ©tĂ©es des voisins libyens, demandĂ© « secours » Ă  nos « amis » de l’OTAN. Heureusement que BĂ©ji CaĂŻd Essbsi l’arrĂȘta net en lui rappelant un devoir sacrĂ© que le premier ou mĂȘme le dernier des journalistes « rĂ©volutionnaires » est censĂ© connaĂźtre et dĂ©fendre, Ă  savoir la souverainetĂ© de l’Etat tunisien et de ses dĂ©cisions. Sur cette question, le Premier ministre tunisien a rĂ©agi fort honorablement. Nous l’avons mĂȘme senti effarouchĂ©, indignĂ© par « la sotte » demande de Laamari.

 

Toujours diplomate

 

Dans d’autres rĂ©ponses nĂ©anmoins, BĂ©ji Caid Essebsi fut soit trop impulsif, soit peu convaincant, soit plutĂŽt Ă©vasif. En tout cas, il n’a pas tout dit de maniĂšre explicite et son discours regorgeait de non-dits et d’inter-dits. Reconnaissons tout de mĂȘme qu’il Ă©tait le mieux prĂ©parĂ© Ă  l’entretien et le moins pressĂ© de le finir. Nos trois journalistes ne surent pas tout tirer de lui et n’abordĂšrent que les sujets qu’ils estimaient les plus « brĂ»lants ». Revenons au Premier ministre Ă  qui l’interview offrit visiblement une belle opportunitĂ© pour rendre Ă  Farhat Rajhi la monnaie de sa piĂšce : chaque fois qu’il Ă©voquait l’ancien ministre de l’intĂ©rieur, BĂ©ji CaĂŻd Essebsi tint des propos ostensiblement railleurs, mĂ©prisants, voire mĂȘme insultants. C’était dans l’ensemble une riposte plus passionnĂ©e que mesurĂ©e. A propos de Kamel Letaief, Beji Caid Essebsi ne fit pas seulement la fine bouche, mais ne daigna mĂȘme pas prononcer son nom. Il rappela surtout qu’en chef du gouvernement, il ne recevait ses ordres de personne tout en nuançant ce ferme refus de partager avec qui que ce soit les prĂ©rogatives de premier ministre, par quelques Ă©vocations lapidaires de la prééminence du pouvoir prĂ©sidentiel dĂ©volu Ă  Foued Mbazaa. En ce qui concerne ses rapports avec les journalistes, objet rĂ©current de certaines rĂ©serves, le Premier ministre ne dĂ©rogea pas, cette fois non plus, Ă  son ton badin coutumier et usa de son humour un tantinet intimidant et parfois ouvertement dĂ©nigreur. Il concĂ©da, certes, quelques formules courtoises et des compliments flatteurs aux trois journalistes de la tĂ©lĂ©vision, mais il ne put cacher une certaine rancƓur contre les attaques des mĂ©dias (excessives et infondĂ©es Ă  ses yeux) contre lui ou contre son gouvernement. Il est vrai que durant les trente annĂ©es que BĂ©ji CaĂŻd Essebsi a passĂ©es au pouvoir sous le rĂšgne de Bourguiba, les hommes de la presse qu’on « autorisait » Ă  interviewer un Premier ministre se comptaient Ă  peine sur le bout des doigts d’une seule main et tout le monde connaĂźt la « tendresse » des questions que ces journalistes privilĂ©giĂ©s (sĂ©lectionnĂ©s, plutĂŽt) posaient aux dirigeants et la « douceur » des articles dont ils encensaient les hauts responsables interviewĂ©s. Aujourd’hui, les langues se sont dĂ©liĂ©es et pour parer aux plus mĂ©disantes d’entre elles, il n’y a aucun mal Ă  jouer la carte de la transparence totale. Choix pris presque Ă  contrecƓur par si BĂ©ji qui aurait aimĂ© rester discret sur certaines questions. Et de fait, il l’est restĂ© dimanche soir sur quelques sujets. Disons plutĂŽt qu’il a rĂ©pondu en diplomate de temps Ă  autre. Comme sur la visite au Qatar de notre ministre de la DĂ©fense chargĂ© alors, selon BĂ©ji CaĂŻd Essebsi, d’un dossier de coopĂ©ration Ă©conomique ! Le Premier ministre « provisoire » (la polĂ©mique sur ce qualificatif Ă©tait drĂŽle) nous a semblĂ© par ailleurs suggĂ©rer la possibilitĂ© (la probabilitĂ© ?) de deux reports : celui des Ă©lections de l’AssemblĂ©e constituante et celui des grands examens nationaux, en particulier du baccalaurĂ©at. Nous l’avons mĂȘme trouvĂ© un peu sceptique quant au respect du dĂ©lai du 24 juillet prochain. Lorsqu’il a Ă©voquĂ© son entretien avec Iyadh Ben Achour Ă  ce sujet, le Premier ministre ne pouvait pas ignorer que les apprĂ©hensions de ce dernier rĂ©sumaient celles de plusieurs autres membres de la Haute Instance pour la rĂ©alisation des objectifs de la RĂ©volution et les appels lancĂ©s par certains chefs de partis en faveur du report de la date des Ă©lections en question.

L’actualitĂ© d’abord

Toujours est-il que globalement, les rĂ©ponses de BĂ©ji CaĂŻd Essebsi dĂ©notaient une assurance certaine chez cet homme qui ne s’énerva quasiment pas et Ă©tait disposĂ© Ă  rester encore plus longtemps avec ses invitĂ©s. Ces derniers le déçurent quelque peu parce qu’il aurait aimĂ© les voir poser d’autres questions sur, entre autres, le dĂ©ficit budgĂ©taire qui n’augure rien de bon pour les salariĂ©s de l’Etat. Le Premier ministre aurait sans doute voulu s’étendre sur les dossiers Ă©conomiques et sociaux, sur le dĂ©veloppement Ă©quilibrĂ© des rĂ©gions. Curieusement, c’est lui qui a Ă©voquĂ© la nouvelle rĂ©partition du budget national et soulignĂ© le chambardement total opĂ©rĂ© au profit des gouvernorats de l’intĂ©rieur. On ne lui a pas non plus posĂ© de questions sur l’utilisation des sommes « faramineuses » prĂȘtĂ©es ou promises Ă  la Tunisie, sur les rĂ©sultats de la visite « Ă©conomique » du ministre de la DĂ©fense au Qatar, sur l’opportunitĂ© d’un projet « laitier » Ă  Sidi Bouzid alors qu’à Jendouba, on arrose les prĂ©s, les jardins et mĂȘme le bitume avec le lait en trop. Bref, nos trois journalistes tenaient dĂ©jĂ  leurs « scoops » une heure aprĂšs le dĂ©but de l’interview avec Si BĂ©ji. Ils avaient fait le tour de l’actualitĂ© « brĂ»lante », et ne demandaient pas plus que le « menu du jour ». Ils l’eurent et c’est Monsieur CaĂŻd Essebsi qui, paraĂźt-il, resta sur sa faim ! Nous aussi, d’une certaine maniĂšre !

Source: ”Le temps” Le 10-05-2011

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