C.R.L.D.H. Tunisie: Pour une Justice Indépendante et Impartiale
Amnesty International : Tunisie. Programme pour le changement en matière de droits humains
Reporters sans frontières en Tunisie : « Une nouvelle liberté à préserver »
Reporters Without Borders in Tunisia : A new freedom that needs protecting
Accord entre l’UGTT et le gouvernement provisoire Vers la nomination de nouveaux gouverneurs
Ahmed Ben Amor: Le mouvement Nahdha – de la dispertion au rassemblement
Anouar KANZARI,: Contre courant – A propos de la déclaration du Front 14 janvier
TTU-Monde Arabe: Tunisie : Des protections troublantes
TTU-Monde Arabe: Tunisie : le RDC tente de rebondir
AFP: Tunisie: le chef de la diplomatie épinglé pour son “déni de révolution”
AFP: Tunisie: les mains libres, le président promet des négociations sociales
Reuters: Tunisian leader asks restive people to be patient
Reuters: Le président tunisien demande au peuple d’être patient
AFP: Vacances d’hiver: ski ou soleil mais loin de la Tunisie et de l’Egypte
ANSA: Immigrazione: nuovo sbarco a Lampedusa, approdati altri 78
ANSA: Tunisie: Le principal syndicat veut des négociations sociales “rapides”
Reuters: Un commentateur arrêté en Libye après avoir appelé à manifester
AFP: Les Algériens veulent le changement sans le chaos
AP: US intelligence director calls al-Qaida top threat
REVUE DE PRESSE
C.R.L.D.H. Tunisie
اللجنة من أجل احترام الحريات وحقوق الإنسان في تونس
Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie
Membre du Réseau Euro-méditerranéen des Droits de l’Homme
21ter rue Voltaire – FR-75011 PARIS – Tel/Fax : 00.33.(0)1.43.72.97.34
crldht@gmail.com / www.crldht.org
Notre ami Mouhieddine CHERBIB
membre fondateur du CRLDHT et ancien Président de la FTCR
rentre en Tunisie le 13 février 2011.
Pour une Justice Indépendante et Impartiale
Notre ami Mouhieddine Cherbib a été condamné à deux ans de prison ferme dans le cadre du procès des leaders du mouvement social du Bassin minier de Gafsa en 2008, pour son rôle de soutien en France à la population de la région. Il vient de faire opposition à cette condamnation. Un nouveau procès a été fixé pour les 15-16 février 2011 à Gafsa.
Le CRLDHT veut profiter de cette occasion pour dénoncer le dysfonctionnement de la justice tunisienne sous le régime de Ben Ali et pour poser les questions de fond relatives à la réforme du système judiciaire tunisien afin d’aboutir à une justice indépendante et impartiale en Tunisie.
Une délégation de personnalités amies du peuple tunisien accompagner notre ami Mouhieddine. Elle sera composée de :
– Alima Boumedienne, sénatrice – Les Vert Europe Ecologie – Bernard Dréano, CEDETIM – Driss El Kherchi – Président de l’ATMF – Gilles Monseron – Vice Président de la Ligue des Droits de l’Homme – Jamel Jani – Président Association Maghrébine des Droits de la Personne au Canda. – Kamel Jendoubi – Président du REMDH – Philippe Le Grand – LDH Nantes
– Michel Debon – SGEN-CFDT – Solidarité laique
– Mohamed Nemri – Président ATMF Argenteuil
– Abdesslem Lahcen Omar – Association des Familles des Prisonniers et Disparus Sahraouis
– Monseigneur Jacques Gaillot
– Razzi Hammadi – Secrétaire National – Parti Socialiste
– Said Tahri – ATMF Mantes la Jolie
– Souhayer Belhassen, Présidente de la FIDH
Le programme de la délégation comportera les étapes suivantes :
– Rencontre avec les familles des martyrs de la révolution à Ras El Jebel et à Bizerte (Nord de la Tunisie). – Une visite à M. Ali Ben Salem (Doyen des militants des droits humains), Président de la section de la LTDH à Bizerte – Rencontre avec les différentes composantes de la société civile à Tunis, au siège de la LTDH.
– Rencontre avec la population du Bassin minier de Gafsa (Redeyef, Moulares…)
– Rencontre avec les familles des martyrs de la révolution tunisienne à Sidi Bouzid et à Kasserine/Thala.
Kamel Jendoubi
Président du CRLDH
Participez aux « Assises de l’immigration Tunisienne » ! Par vos écrits, vos réflexions, vos questions et vos suggestions agissez : Participez à la rédaction du « Cahier de doléances » !
Aujourd’hui un certain nombre d’associations prennent l’initiative d’organiser les premières « Assises de l’immigration Tunisienne en France et dans le monde » pour la rédaction d’un cahier de doléances des migrantes et des migrants tunisien-nes pour la défense de leurs intérêts. Ce cahier de doléances sera présenté au nouveau pouvoir exécutif tunisien issu de la révolution du 14 janvier 2011. L’objectif de ces assises est de collecter toutes les propositions que nous inscrirons TOUS ensemble dans le cahier de doléances des migrants tunisien-nes et de les adopter collectivement d’ici la fin mars 2011 à l’occasion de la tenue d’assises de l’immigration tunisienne. Organisez des réunions dans toutes les villes, dans tous les pays où vous résidez et où vous travaillez. Regroupez-vous, agissez par vos écrits, vos réflexions, vos questions ou suggestions… participez à alimenter le contenu du cahier de doléances. Pour tous contact : Assises2011@yahoo.fr
Amnesty International Tunisie. Programme pour le changement en matière de droits humains
Après les troubles qui ont agité la Tunisie pendant un mois et poussé Zine El Abidine Ben Ali à fuir le pays et à abandonner la présidence, un gouvernement intérimaire a été formé et des élections sont en préparation.
Afin de rompre avec les 23 ans de violations systématiques des droits humains que le pays a connus sous le régime de Zine El Abidine Ben Ali, les autorités tunisiennes devront faire preuve de vision et de détermination, et adopter des mesures efficaces. Au fil des années, les Tunisiens ont fait les frais d’un trop grand nombre de promesses non tenues et ont perdu confiance dans les institutions du pays. Le peuple tunisien a montré qu’il ne se satisfera pas de réformes superficielles menées au coup par coup, mais qu’il attend au contraire des changements audacieux et de grande portée qui moderniseront les institutions qui les ont déçus. Deux institutions devant connaître une refonte immédiate sont les forces de sécurité et le système judiciaire, les principaux outils utilisés par les autorités afin d’écraser la contestation et de museler les critiques.
Les autorités tunisiennes doivent prendre conscience qu’il n’est pas possible d’attendre que l’état de droit et l’ordre soient rétablis dans le pays pour faire respecter les droits humains. Rétablir et garantir les droits fondamentaux doit être une priorité immédiate. Des progrès francs et mesurables sur le terrain des droits humains serviront à regagner la confiance de la population, et permettront aux Tunisiens d’avoir de nouveau foi en leurs institutions.
Les autorités doivent commencer par reconnaître l’ampleur et la gravité réelles des violations des droits humains ayant eu lieu dans le pays pendant des décennies. Ce travail doit être suivi de mesures immédiates visant à en finir avec ces pratiques.
En ce moment crucial, le nouveau gouvernement tunisien se voit offrir une occasion historique de rompre avec des années de répression et d’atteintes aux droits humains en prenant de toute urgence des mesures concrètes afin de respecter – dans la loi et la pratique – leurs obligations nationales et internationales.
Amnesty International salue : l’engagement pris par le gouvernement de relâcher tous les prisonniers politiques ; son annonce concernant la création d’une commission indépendante qui enquêtera sur les atteintes aux droits humains commises par les forces de sécurité pendant les troubles récents, et notamment sur leur recours à une force excessive et meurtrière ; et la formation d’autres commissions indépendantes qui travailleront sur les réformes politiques et la corruption.
D’autres mesures sont cependant requises en urgence de la part des autorités tunisiennes.
Elles n’ont pas encore annoncé si – et, le cas échéant, dans quelle mesure – les lois tunisiennes limitant gravement les libertés d’expression, d’association et de réunion seront réformées, ni évoqué le cadre juridique des élections à venir. Amnesty International estime que cela permettra de connaître les intentions réelles du gouvernement. Au fil des années, notamment au cours des dernières élections présidentielle et législatives en Tunisie, en octobre 2009, les autorités ont recouru à des lois draconiennes pour réprimer l’opposition politique et harceler la société civile indépendante. Les partis politiques opposés au gouvernement sont restés interdits ou dans l’incapacité de mener leurs activités librement.
À cette époque, les détracteurs du gouvernement – dont des défenseurs des droits humains – ont été soumis par des représentants de l’État à des dispositifs de surveillance oppressants, à des menaces, des manœuvres de harcèlement et des violences physiques. Les journalistes qui critiquaient le gouvernement ou dénonçaient des faits de corruption risquaient le harcèlement, les menaces et l’incarcération. Il est évident que si l’on souhaite que les élections de 2011 soient différentes, les autorités tunisiennes doivent agir immédiatement afin de lever les restrictions arbitraires pesant sur les libertés d’expression, d’association et de réunion, dans le droit et la pratique.
Amnesty International, s’appuyant sur le travail qu’elle effectue depuis des décennies pour recenser les violations dans ce pays, a dégagé les recommandations ci-après comme étapes clés vers le changement
Dans l’immédiat, Amnesty International exhorte les autorités tunisiennes à :
MAÎTRISER LES FORCES DE SÉCURITÉ
· veiller à ce qu’aucun membre des services de sécurité ne soit autorisé à agir au-dessus des lois ;
· entreprendre une refonte complète de tous les organes de sécurité et d’application des lois, et rendre public un organigramme clair des différentes branches des forces de sécurité, faisant apparaître la hiérarchie de manière bien distincte ;
· rendre publiques, de toute urgence, des instructions claires sur le recours à la force – et notamment aux armes à feu – qui soient strictement conformes aux normes et au droit internationaux, en particulier le Code de conduite des Nations unies pour les responsables de l’application des lois et les Principes de base des Nations unies sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois ;
· créer un organe de surveillance qui ait l’autorité requise pour obliger les forces de sécurité à rendre des comptes pour les violations commises. Un tel organe doit être doté d’un mécanisme indépendant, efficace et impartial de traitement des plaintes concernant les fautes commises par les forces de sécurité, notamment les atteintes aux droits humains. Ce mécanisme indépendant d’enregistrement des plaintes déposées contre les forces de sécurité doit se voir attribuer des équipes d’investigation indépendantes, afin de prendre spécifiquement en charge les plaintes contre ou impliquant les forces de sécurité.
CONDAMNER LA TORTURE ET LES AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS
· condamner publiquement la torture et les autres formes de mauvais traitements ; veiller à ce qu’il soit mis fin à ces pratiques ; faire savoir clairement à tous les agents de l’État chargés des arrestations, de la détention et des interrogatoires, dont les membres de la Direction de la sûreté de l’État du ministère de l’Intérieur, que la torture et les mauvais traitements ne seront tolérés sous aucune circonstance ;
· faire en sorte que des enquêtes efficaces, indépendantes et impartiales soient menées dans les meilleurs délais sur toutes les plaintes pour torture et autres formes de mauvais traitements, et que les auteurs de ces actes soient traduits en justice ; veiller à ce que les victimes obtiennent des réparations adaptées ;
· abolir immédiatement la détention au secret et faire en sorte que les détenus puissent : s’entretenir avec le monde extérieur régulièrement et sans délai – et que cela soit inscrit dans le droit et respecté dans la pratique –, notamment avec leur famille et avec un-des avocat-s de leur choix ; et, le cas échéant, recevoir des soins médicaux prodigués par des médecins indépendants ;
· autoriser que des organes internationaux indépendants composés d’experts effectuent des inspections régulières mais inopinées et sans restrictions de tous les lieux de détention.
FAIRE RESPECTER LA LIBERTÉ D’EXPRESSION, D’ASSOCIATION ET DE RÉUNION
· relâcher tous les prisonniers d’opinion, immédiatement et sans condition, et faire le nécessaire pour que tous les autres prisonniers politiques soient soit remis en liberté, soit rejugés conformément aux normes internationales d’équité des procès, sans que la peine de mort ne soit requise ;
· mettre fin au harcèlement et à la condamnation morale des prisonniers politiques après leur libération, et abandonner le recours à des mesures arbitraires et abusives telles que : le placement sous contrôle administratif ; l’interdiction de voyager ; la privation de soins médicaux ; et la confiscation de papiers d’identité et autres documents officiels nécessaires à toute personne pour exercer ses droits. Élaborer des programmes visant à aider les anciens prisonniers politiques à se réinsérer dans la société ;
· mettre un terme aux manœuvres de harcèlement et d’intimidation visant les militants des droits humains et les détracteurs du gouvernement, ainsi qu’aux mesures arbitraires prises contre les personnes et associations qui défendent les droits humains, l’état de droit ou l’indépendance de leur profession ;
· lever toutes les restrictions pesant sur le droit des Tunisiens à se réunir librement et à faire enregistrer des organisations indépendantes, dont des organisations de défense des droits humains. Les organisations en question doivent inclure l’Association internationale de soutien aux prisonniers politiques, l’Association de lutte contre la torture en Tunisie, Liberté et équité, le Conseil national pour les libertés en Tunisie, l’Observatoire pour la liberté de presse, d’édition et de création et le Centre de Tunis pour l’indépendance de la justice ;
· réviser, modifier ou abolir toutes les dispositions de la loi de 1969 sur les réunions publiques, de la loi de 1959 sur les associations, du Code pénal et du Code de la presse qui érigent en infraction l’exercice des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion, en particulier : les articles 48 (offense au Président de la République) et 51 (qui donne une définition très large de la diffamation) du Code de la presse ; les article 61bis et 121-122 du Code pénal (incitation à la rébellion par des discours tenus dans des lieux ou réunions publics) ; et les articles 6 et 7 de la loi règlementant les réunions publiques (autorisant la présence de fonctionnaires des services de la Sûreté lors de réunions et interdisant toute réunion susceptible selon les autorités de troubler la sécurité et l’ordre public) ;
· si le gouvernement a la responsabilité de combattre le terrorisme et de préserver la sécurité publique, la lutte contre le terrorisme ne doit pas pour autant servir de prétexte pour étouffer la contestation légitime, ni ériger en infraction l’exercice pacifique des droits fondamentaux tels que le droit à la liberté d’expression, d’association et de réunion. Il faut modifier la loi de 2003 sur la lutte contre le terrorisme afin de la mettre pleinement en conformité avec les normes et dispositions pertinentes du droit international relatif aux droits humains, ainsi qu’avec les recommandations des organes de défense de ces droits aux Nations unies. Le cas de chaque personne déclarée coupable et emprisonnée au titre de cette loi doit être réexaminé dans les meilleurs délais, et les personnes condamnées au motif de l’exercice pacifique de leurs droits doivent être remises en liberté.
RÉFORMER LE SYSTÈME JUDICIAIRE
· veiller à ce que le pouvoir judiciaire soit totalement indépendant du pouvoir exécutif ;
· réexaminer et modifier les procédures de nomination des membres de l’appareil judiciaire, afin de garantir la totale indépendance des juges ;
· inscrire l’inamovibilité des juges dans la Constitution, ainsi que des garanties contre les pressions directes et indirectes, ainsi que les influences et ingérences indues ;
· s’assurer que chaque personne inculpée d’une infraction ait droit à une procédure équitable devant un tribunal compétent, indépendant et impartial établi en vertu du droit, et que les droits de la défense soient pleinement respectés ;
· mettre fin aux procès de civils devant des tribunaux militaires et renvoyer toute affaire en cours devant des tribunaux ordinaires, dans le cadre de procédures qui soient conformes aux normes internationales d’équité des procès et sans requérir la peine de mort, ou bien relâcher les accusés ; ordonner que tous les civils déjà condamnés par un tribunal militaire soient rejugés dans le cadre d’une procédure équitable, ou les libérer ;
· commuer toutes les condamnations à mort et abolir la peine capitale.
METTRE UN TERME À L’IMPUNITÉ
· faire en sorte que l’enquête annoncée par le Premier ministre, Mohamed Ghannouchi, sur les troubles récents soit indépendante, transparente, rigoureuse et impartiale. Les autorités tunisiennes doivent garantir qu’aucun élément prouvant l’existence de violations des droits humains, et notamment d’exécutions illégales, ne soit altéré ni détruit, et que les enquêtes sur tous les homicides suivent les méthodes décrites dans les Principes des Nations unies relatifs à la prévention efficace des exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires et aux moyens d’enquêter efficacement sur ces exécutions. Les autorités tunisiennes doivent faire en sorte que le rapport d’enquête soit rendu public, et que les personnes identifiées comme étant les responsables présumées d’atteintes aux droits humains soient traduites en justice dans le cadre de procédures équitables, sans que la peine de mort ne soit requise ;
· la commission d’enquête doit transmettre les éléments prouvant l’existence de violations des droits humains aux autorités judiciaires ;
· ouvrir une enquête indépendante, rigoureuse et impartiale sur les atteintes aux droits humains commises pendant que Zine El Abidine Ben Ali était au pouvoir. Les enquêteurs doivent bénéficier de ressources suffisantes afin d’accomplir toutes leurs tâches correctement et sans délai, et être habilités à prendre connaissance de tous les documents et autres éléments de preuve pertinents, et à entendre toutes les personnes concernées. Les conclusions de l’enquête devront comporter des recommandations en vue de mettre un terme aux violations du droit international et d’empêcher le renouvellement de tels agissements, de garantir que toute la lumière sera faite, que justice sera rendue aux victimes et qu’elles bénéficieront d’une réparation complète, comprenant la restitution, la réinsertion, la compensation, l’indemnisation, et des garanties de non-renouvellement. Amnesty International est prête à mettre les archives de ses rapports sur les droits humains à la disposition des autorités tunisiennes afin de les assister dans le cadre d’enquêtes de ce type ;
· veiller à ce que toutes les personnes fournissant des informations dans le cadre d’enquêtes sur des atteintes aux droits humains reçoivent une protection adéquate contre les représailles ou toute autre forme d’intimidation ;
· mettre en place un système de vérification afin d’éviter que durant l’enquête, les personnes que l’on peut raisonnablement soupçonner de graves atteintes aux droits humains ne soient maintenues ou placées dans une position où elles sont susceptibles de commettre de nouveau ce type de violations ;
· ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, en faisant une déclaration, conformément à l’article 12(3), selon laquelle sa compétence s’applique aux crimes commis depuis l’entrée en vigueur du Statut (juillet 2002).
ACCORDER UNE PRIORITÉ ÉLEVÉE À LA PLEINE RÉALISATION DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS
· assurer à un niveau minimal essentiel les droits économiques, sociaux et culturels, en particulier l’accès à la nourriture, à l’eau et à des installations sanitaires, ainsi qu’aux soins de santé et au logement pour l’ensemble de la population, et, si nécessaire, demander la coopération et l’aide de la communauté internationale pour ce faire ;
· garantir la non-discrimination dans l’accès à des services publics essentiels, comme l’approvisionnement en eau, les installations sanitaires et les soins de santé ;
· mettre fin aux ingérences arbitraires dans le droit au travail et le droit à la santé des opposants politiques et de leur famille ;
· faire respecter les droits des travailleurs et les libertés des syndicats, conformément aux obligations de la Tunisie en vertu du droit international ;
· réformer les lois et institutions nationales de sorte que des recours effectifs soient à la portée de toutes les victimes de violations des droits économiques, sociaux et culturels.
LUTTER CONTRE LA DISCRIMINATION
· réformer, modifier ou abolir toutes les lois qui introduisent des discriminations fondées sur la race, la couleur de peau, la religion, l’appartenance ethnique, la naissance, le genre, l’orientation sexuelle, l’identité de genre, les opinions politiques ou autres, l’origine nationale ou sociale, le statut de propriétaire ou tout autre statut.
DÉFENDRE LES DROITS DES FEMMES ET DES FILLES
· réformer ou abolir toutes les lois, coutumes et pratiques existantes qui introduisent des discriminations à l’égard des femmes et des filles. En particulier, le Code du statut personnel – et notamment les dispositions relatives au mariage, à la garde et à la tutelle des enfants, ainsi qu’à l’héritage – et le Code pénal doivent être mis en conformité avec les obligations de la Tunisie au titre des articles 2, 3, 23 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politique, ainsi qu’avec les autres obligations internationales du pays.
· adopter une loi générale sur la violence contre les femmes, en particulier sur la violence domestique et le viol conjugal. Renforcer la protection des femmes et des filles contre la violence, en abrogeant les dispositions des articles 218, 227bis et 239 du Code pénal, qui autorisent respectivement l’arrêt des poursuites, du procès, ou de l’exécution de la peine lorsque le conjoint victime de violences physiques retire sa plainte, et lorsque l’auteur d’un viol ou d’un enlèvement épouse sa victime ;
· abroger les décrets imposant qu’un individu se vête ou ne se vête pas d’une certaine façon, à moins que les restrictions imposées ne le soient que parce qu’elles sont manifestement nécessaires et proportionnelles à un objectif légitime, ainsi que le prévoit le droit international relatif aux droits humains, et qu’elles ne soient pas discriminatoires.
AMNESTY INTERNATIONAL ENGAGE ÉGALEMENT LES AUTORITÉS TUNISIENNES À :
· adresser une invitation ouverte à toutes les procédures spéciales des Nations unies et favoriser immédiatement la venue en Tunisie : du rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires ; du rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; du rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats ; du rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression ; du rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits de l’homme ; et du groupe de travail sur la détention arbitraire ;
· ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées ; et les protocoles facultatifs du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Amnesty International demande par ailleurs aux autorités tunisiennes de retirer leurs réserves à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes ;
· demander l’assistance du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCR) et des autres programmes et agences des Nations unies ; organiser avec le HCR la présence d’observateurs des droits humains sur le terrain en Tunisie.
Reporters sans frontières en Tunisie : « Une nouvelle liberté à préserver »
Reporters sans frontières s’est rendue en Tunisie du 2 au 4 février 2011, afin d’évaluer la situation des médias près de deux semaines après la chute du régime du président Ben Ali, d’analyser leurs besoins et de définir la contribution que pourrait apporter l’organisation pendant cette phase de transition.
Les représentants de Reporters sans frontières ont rencontré de nombreux journalistes (opposants ou liés à l’ancien régime, le Syndicat des journalistes tunisiens), et le nouveau secrétaire d’Etat à la Jeunesse et aux Sports. Du matériel technique a également été distribué.
“La Tunisie est en plein bouillonnement. Les journalistes vivent une période historique où leur liberté est, pour la première fois, respectée. Il faut les encourager et les soutenir dans leur démarche. Il faut surtout consolider les acquis de cette jeune révolution. La censure n’a pas totalement disparu et elle peut revenir en force à tout moment. Il faut rapidement s’en prémunir en mettant en place un cadre juridique et institutionnel garantissant de manière durable la liberté d’expression. Ca passe notamment par des réformes législatives et la mise en place de nouvelles structures indépendantes de régulation des médias”, a déclaré Jean-François Julliard, secrétaire général de Reporters sans frontières.
“Après 23 ans de censure, la liberté de la presse est une réalité en Tunisie. C’est inespéré. Nous nous réjouissons notamment pour tous les militants de la liberté d’expression. Pendant toutes ces années, une poignée de personnes se sont battues pour défendre leur liberté. Ils voient enfin leurs efforts et leur ténacité enfin récompensés. Nous pensons à eux et à tous ceux qui vont désormais pratiquer le métier de journaliste dans des conditions plus favorables. Reporters sans frontières restera très présente en Tunisie et continuera de jouer son rôle de défenseur des libertés”, a-t-il ajouté.
Pendant vingt-trois ans, le régime de Ben Ali a verrouillé l’information dans les médias traditionnels, puis sur le Net. Le 14 janvier 2011, après un mois de protestation, la révolution populaire est parvenue à chasser le président tunisien.
Le 17 janvier, le gouvernement provisoire d’union nationale qui prend les rênes du pouvoir supprime le ministère de l’Information. Slim Amamou, blogueur libéré quatre jours auparavant, devient secrétaire d’État à la Jeunesse et aux Sports. Ce gouvernement prône immédiatement la liberté totale d’information et d’expression comme principe fondamental.
Panorama des médias, un mois après la chute de Zine el-Abidine Ben Ali : rupture ou continuité ?
Le panorama : un nombre inchangé de médias
Il faut s’attendre à une explosion prochaine du nombre de titres dans la presse écrite, à la multiplication des stations de radio et des chaînes de télévision.
Pour l’heure, le nombre de médias reste le même. La chaîne Tunisie 7 a changé de nom… devenant la Télévision tunisienne nationale. Aucune nouvelle licence n’a encore été accordée, le gouvernement devant d’abord élaborer un cahier des charges transparent sur l’obtention des licences. En attendant, certains médias qui opéraient jusqu’à présent sans autorisation, n’ayant jamais obtenu de licence du fait de leur ligne éditoriale, ont déposé des demandes. Ils attendent.
Le contenu de l’information : revirement à 180°, mais des lignes rouges persistent Le ton des médias a clairement changé, ainsi que leur manière de traiter l’actualité. Dans la presse des sujets totalement ignorés du temps du Président Ben Ali sont abordés. Même chose à la télévision avec des sujets traitant de problèmes sociaux, jusqu’alors absents des écrans. Même les dépêches de la très officielle agence de presse TAP ont changé de ton !
Les Tunisiens ont également pu suivre, pour la première fois, une interview télévisée du ministre de l’Intérieur, le 1er février dernier, fait historique.
Certains journaux qui avaient l’habitude de faire l’éloge du président et de son épouse, n’hésitant pas à traîner dans la boue ses opposants, demandent aujourd’hui la peine de mort contre les membres de la famille du président déchu (lu dans Koul el-nas ou Al-Ahdath).
De nombreuses personnalités de l’opposition, jusque là bannies des médias nationaux font la Une des journaux et sont régulièrement invitées à des émissions de radio ou télévision.
Les trois journaux anciennement dits « d’opposition », Al-Maouqif, Al-Mouatinoun et Al Tariq al-Jadid, peuvent être imprimés et distribués normalement, sans les traditionnels problèmes « techniques » des imprimeurs.
Toutefois, si la liberté de ton est réelle, de nouvelles lignes rouges semblent se dessiner. Les violences commises par les forces de l’ordre (police et armée), les dossiers de corruption concernant des proches de l’ancien président, qui sont toujours présents en Tunisie, ou les problèmes rencontrés aujourd’hui par le gouvernement restent très peu abordés dans les médias.
La consigne est à la modération, afin d’apaiser les tensions sociales et de « calmer les choses ».
La Télévision tunisienne nationale dans sa couverture des événements de la Casbah, fin janvier 2011, n’a montré qu’un point de vue, celui du ministère de l’Intérieur. D’autres événements ne sont pas couverts, comme la réunion organisée le 2 février dernier par la coalition appelée « Front du 14 janvier », à laquelle la Télévision tunisienne nationale n’a pas assisté. Et si certaines personnalités sont invitées à s’exprimer dans les médias, elles ne sont pas tout à fait libres de dire ce qu’elles veulent. Plusieurs d’entre elles, invitées dans les jours qui ont suivi le départ de Ben Ali, ont depuis disparu des plateaux (ex : l’ancien ministre et leader d’opposition Mostafa Ben Jaffar). La Télévision tunisienne nationale n’a pas souhaité organiser en direct le débat proposé par un de ses reporters rassemblant sur un même plateau des journalistes qui avaient été incarcérés du fait de leur activité professionnelle du temps de Ben Ali.
Les journalistes : on prend les mêmes et on recommence
Certaines têtes ont sauté, comme le directeur du journal La Presse, remplacé par un nouveau PDG élu par un comité de journalistes. D’autres personnalités écartées pendant le règne de Ben Ali reviennent sur le devant de la scène. Dans de nombreux cas, les journalistes ont pris le contrôle des rédactions.
Mais la majorité de la profession est restée en place. Dans la plupart des médias, il n’y a pas eu de changements des équipes de direction et de rédaction. Les anciens défenseurs du régime Ben Ali se sont convertis en révolutionnaires et pionniers du changement. Les caciques de la presse de l’ancien système n’ont pas disparu.
Internet : libéralisation partielle
Si comme l’avait promis le président Ben Ali dans son discours du 13 janvier, la censure sur Internet a été immédiatement levée, le contrôle de la toile n’a pas été totalement levé, comme a pu le confirmer Slim Amamou, nouveau Secrétaire d’Etat à la Jeunesse et aux Sports. Reporters sans frontières a reçu de nombreux témoignages d’internautes et de blogueurs dans ce sens. Ainsi le blog de la Bahreïnie Amira Al Hussaini (Global Voices) est inaccessible depuis la Tunisie (dernière vérification du maintien du blocage, le 5 février 2011 à 03:27 du matin), du fait de sa couverture des événements en Tunisie, notamment des exactions des forces de sécurité.
Les défis d’aujourd’hui et de demain
Pour les autorités
Dès la constitution du gouvernement provisoire, les nouvelles autorités tunisiennes ont décidé la suppression du ministère de l’Information. Toutefois, cette mesure qui constitue une avancée symbolique et ne sera pas suffisante pour réformer l’ensemble du fonctionnement des médias en Tunisie. Elles devront faire face à de nombreux défis.
Le gouvernement provisoire va mettre en place, dans les prochains jours, une Commission des réformes politiques. Cette commission indépendante aura pour tâche d’élaborer des réformes juridiques et institutionnelles, et permettre une réelle transition démocratique. Une partie de son travail sera consacrée aux médias et aux changements apportés au système médiatique.
Les nouvelles autorités tunisiennes devront notamment élaborer : un cadre juridique organisant les médias, avec la création de véritables instances de régulation indépendantes et autonomes (audiovisuel et presse écrite)
un cadre juridique pour l’attribution des licences permettant la création de nouveaux médias
un nouveau code de la presse
Le 30 janvier, le président du Syndicat des journalistes, Neji Bghouri, a rencontré le Premier ministre par intérim, Mohamed Ghannouchi. Le Syndicat des journalistes a entre autres demandé la suppression de l’Agence tunisienne de communication extérieure (ATCE), ou un changement de ses attributions. La même demande a été formulée pour l’Agence tunisienne d’Internet (ATI).
Les autorités seront inévitablement amenées à se pencher sur la question de l’avenir des médias existants, notamment ceux proches du pouvoir qui avaient obtenu des facilités pour l’obtention de leur licence. La question de la formation des journalistes, celle liée à la déontologie et à l’éthique devront également être examinées.
Des dispositions claires doivent mettre un terme à la censure d’Internet, empêchant le ministère de l’Intérieur d’avoir accès aux données des internautes.
Action de Reporters sans frontières
Reporters sans frontières s’engage à accompagner les autorités tunisiennes dans leurs efforts pour réformer l’ensemble du système des médias en Tunisie vers un objectif de pluralisme de l’information des médias. Un nouvel espace doit naître pour des médias jouant pleinement leur rôle de contre-pouvoir.
L’organisation sera aux côtés du Syndicat afin de proposer ensemble des cadres juridiques nouveaux et se tient prête à offrir son expertise pour l’élaboration d’un nouveau code de la presse.
Pour mener à bien ces missions, Reporters sans frontières souhaite ouvrir un bureau dans les mois à venir dans la capitale tunisienne afin d’accompagner les autorités, les journalistes et l’ensemble de la société civile dans cette marche vers une démocratie où la liberté d’expression et la liberté de presse seront deux principes fondamentaux respectés.
Reporters Without Borders in Tunisia : A new freedom that needs protecting
Reporters Without Borders visited Tunisia from 2 to 4 February to evaluate the situation of the media two weeks after the fall of President Zine el-Abidine Ben Ali, to analyze their needs and to determine what contribution it could make during this transition period.
The organization’s representatives met many journalists, including those opposed to the former regime, those linked to it, and members of the Union of Tunisian Journalists. They also met with the new secretary of state for youth and sport (who is a blogger), and distributed technical equipment.
“Tunisia is in full ferment,” Reporters Without Borders secretary-general Jean-François Julliard said. “Its journalists are living a historic period in which their freedom is being respected for the first time. They must be encouraged and supported. This young revolution’s gains must above all be consolidated. Censorship has not totally disappeared and could return in force at any moment. To guard against this, a legal and institutional framework with lasting guarantees for free expression must be put in place quickly. This requires legislative reforms and the creation of independent media regulatory bodies.
“After 23 years of censorship, press freedom is a reality in Tunisia,” Julliard added. “This was unexpected. We are thrilled for all the free speech activists. During all these years, a handful of people fought to defend their freedom. At last their efforts and their tenacity are being rewarded. We are thinking of them and all those who are now going to be able to practice journalism in more favourable conditions. Reporters Without Borders will continue to have a major presence in Tunisia and to play its role as a defender of freedoms.”
For 23 years, the Ben Ali regime kept a tight grip on news and information in the traditional media and then online. After a month of street protests, the people’s revolution succeeded in driving the president into exile on 14 January.
The provisional government of national unity that took over abolished the information ministry on 17 January. Slim Amamou, a blogger who had been released four days earlier, became secretary of state for youth and sport. The new government immediately proclaimed complete freedom of information and expression as a fundamental principle.
Tunisia’s media a month after Ben Ali’s fall : new start or continuity ?
Overview : number of media so far unchanged
An explosion can be expected soon in the number of newspapers and magazines, and the creation of new radio and TV stations.
But so far there has been no change in the number of media. The Tunisie 7 TV station has changed its name to Télévision Tunisienne Nationale. No new TV station licences have yet been issued because the government must first draft a transparent list of criteria for awarding broadcast media licences. Meanwhile, some media that have been operating without a licence (which they failed to obtain because of their editorial policies) have filed requests. They are waiting for a response.
News content turnaround, but red lines persist
The tone of the media has completely changed, along with their way of covering the news. Subjects that were completely ignored by the print media in Ben Ali’s time are now being tackled. It is the same with television. Tunisians never used to see reports on social issues on TV. Now they do. Even the very official news agency TAP has changed its tone.
In a historic development, Tunisians were also able to watch a TV interview with the interior minister for the first time on 1 February.
Some newspapers that used to lavish praise on Ben Ali and his wife and smear his opponents – for example, Koul El-Nas and Al-Ahdath – are now calling for the death penalty for members of the deposed president’s family.
Many opposition figures who were banned from the national media are now on the front pages of the newspapers and are frequent guests on radio and TV programmes.
The three newspapers that used to be described as “opposition” publications – Al-Maouqif, Al-Mouatinoun and Al Tariq al-Jadid – are now being printed and distributed without the “technical” problems they used to keep having with the companies that print them.
While the freedom is real, new red lines seem to be emerging. Violence by the police and army, alleged corruption involving the former president’s friends and relatives who are still in Tunisia, and the problems that the new government is encountering continue to get little coverage in the media.
The watchword is moderation, to defuse social tension and “calm things down.”
Télévision Tunisienne Nationale’s coverage of incidents outside the Casbah (the seat of government) at the end of January reflected only one viewpoint, the interior ministry’s. Other events have not been covered, such as the 2 February meeting organized by the coalition known as the “14 January Front.” Télévision Tunisienne Nationale did not show up.
While some leading figures are invited to express their views in the media, they are not completely free to say what they want. Some who were invited into TV studios during the days immediately after Ben Ali’s departure (such as the former minister and opposition leader Mostafa Ben Jaffar) no longer are. Télévision Tunisienne Nationale ruled out a proposal by one of its reporters for a live debate between journalists who had been jailed in Ben Ali’s time.
Starting over with the same journalists
Some leading media figures have been fired, such as the head of the newspaper La Presse, replaced by a new CEO elected by a committee of journalists. Other media personalities who were eliminated during Ben Ali’s rule are back in prominent positions. In many cases, journalists have taken control of newspapers.
But most journalists have held on to their jobs and there have been no changes at any level in most news media. The Ben Ali regime’s former defenders have turned into revolutionaries and pioneers of change. The old regime’s press bosses have not disappeared.
Partially liberated Internet
Internet censorship was immediately lifted, as President Ben Ali promised in his 13 January address, but some online controls are still in place, as the new secretary of state for youth and sport, Slim Amamou, acknowledged. The accounts Reporters Without Borders received from many Internet users and bloggers confirmed this. The Bahraini Amira Al Hussaini’s Global Voices blog, for example, cannot be accessed from within Tunisia (last verification at 03:27 on 5 February) because of her coverage of events in Tunisia, including abuses by the security forces.
Today’s and tomorrow’s challenges
For the authorities
As soon as the new provisional government was created, it decided to abolish the information ministry. It was a symbolic step forward but it was not enough. The entire way the Tunisian media function needs to be overhauled. They will have to face many challenges.
The provisional government will create a Political Reform Commission in the new few days. This independent commission will have the job of drawing up the legal and institutional reforms that will enable a real democratic transition. Part of its work will focus on the media and the changes that are needed to the media system.
The new Tunisian authorities need to draw up : a legal framework for the media, including the creation of genuinely independent and autonomous regulatory bodies (for the broadcast and print media)
a legal framework for issuing licences that allow new media to be created
a new media code.
The president of the Union of Journalists, Neji Bghouri, met interim Prime Minister Mohamed Ghannouchi on 30 January. Among the requests made by the union was the abolition of the Tunisian Agency for External Communication (ATCE) or at least an overhaul of its mandate. The same request was made for the Tunisian Internet Agency (ATI).
The authorities will sooner or later have to take a decision on the future of the existing media, especially those that supported the Ben Ali government and consequently found it easy to obtain licences. The training of journalists, especially training in journalistic ethics and professional conduct, will also have to be tackled.
Clear directives must be issued to put a stop to Internet censorship and to prevent the interior ministry from being able to access the data of Internet users.
What Reporters Without Borders plans to do
Reporters Without Borders undertakes to assist the Tunisian authorities in their efforts to reform the entire media system in Tunisia with the aim of establishing media diversity. A new freedom must be created that allows the media to fully play their role as independent watchdog.
Reporters Without Borders will work with the Union of Journalists in order to jointly propose new legal frameworks and it stands ready to offer its expertise in the drafting of a new media code.
In order to achieve these goals, Reporters Without Borders hopes to open a bureau in the Tunisian capital in the coming months with the aim of assisting the new government, journalists and civil society in its entirety in their progress towards a democracy in which free speech and media freedom are respected as fundamental principles.
LE MOUVEMENT NAHDHA : DE LA DISPERTION AU RASSEMBLEMENT
Paris le 22/01/2011
Contre courant
Par Anouar KANZARI, ancien Président de l’UGET-France
Une petite voix qui s’exprime à la marge du bouillon de slogans :
A propos de la déclaration du Front 14 janvier :
Le texte du Front 14 janvier mérite une analyse et une lecture approfondie. Qu’on soit d’accord ou pas avec cette initiative c’est quasiment un devoir de l’analyser et de la prendre au sérieux du moment qu’elle émane d’un ensemble d’organisations et de sensibilités politiques qui prétendent se placer au cœur de la « révolution » et s’autoproclament sa direction. Le texte fondateur se veut l’expression des revendications et des objectifs de la révolution. Il s’agit donc d’un front qui se voit capable (si l’on croit le fantasme de ses auteurs) représenter le peuple et le conduire vers la réalisation des (supposés) objectifs de sa révolution.
La constitution de fronts et d’alliances sur la base des revendications et des objectifs communs dans ce contexte est, dans l’absolu, tout a fait légitime. C’est même positif. Il est temps pour les forces politiques de commencer de politiser le peuple au sens large du terme (lequel, est pour une fois, très à l’écoute et intéressé par la politique) après 23 ans de divorce prononcé et imposé injustement par undespote Dictateur. Il est primordial que les partis politiques s’expriment dans cette phase délicate de laquelle dépend tout notre avenir d’autant que, paradoxalement, les acteurs principaux de notre magnifique révolution sont des jeunes qui ne font confiance ni aux partis politiques existants ni aux partis tout court. Il est enfin très important que les partis politiques s’expriment pour expliquer leurs identités et orientations politiques, au-delà des qualifications de l’ancien régime que tout le monde partage actuellement (y compris ceux qui juraient l’infaillibilité pontificale de ce régime jusqu’au dernier quart d’heure de son existence).
Le rassemblement des sensibilités politiques dans des alliances et coalitions autour de projets de gouvernance est tout à fait naturel dans cette phase préélectorale. C’est par rapport à ces projets et ces coalitions que le citoyens choisiront leurs futurs représentants et gouvernants utilisant le plus démocratique et le plus révolutionnaire moyen qu’est le vote. C’est dans ce cadre, et c’est à ce juste titre, que je me permets de saluer cette démarche pour son mérite du déclenchement du débat politique avec ses prises de position publiques affichés et assumés par les partis signataires.
A la lecture du texte fondateur du Front 14 janvier j’apprécie la clarté du discours et de sa parfaite transcription de l’identité de ses auteurs. Les signatures nous apportent aussi une nouvelle prometteuse qui nous laisse penser qu’une famille politique (aussi réduite soit-elle) s’est enfin retrouvée après de longues années de séparation où certaines composantes ont tantôt joué solo et tantôt entré dans des alliances contre-nature avec des forces politiques portant les antipodes de leurs thèses.
Néanmoins, je ne peux pas m’empêcher d’exprimer certaines (voire plusieurs) interrogations et réserves sur la forme et sur le fond du texte fondateur du front. Du titre jusqu’aux signatures du texte, plusieurs clarifications méritent d’être apportées par ses auteurs.
Ce qui suit l’essentiel de ces réserves:
1. Le nom donné au front « Front 14 janvier » : Si je ne me trompe pas il s’agit du jour du départ de Ben Ali donc le jour où le peuple soulevé a réussi à faire tomber l’un des régimes les plus répressifs du monde et qui a régné par la force et par le sang sur le pays pendant 23 ans. C’est donc un événement exceptionnel historique de libération qui mérite d’être commémoré par tous les Tunisiens. Je ne vois donc pas de quel droit les signataires s’accaparent cette date, qui sera très probablement une fête nationale, pour l’identifier à une alliance qui regroupe une partie des forces politiques. D’autres part, jusqu’à quand on continuera-t-on à mettre les dates de l’année au cœur des polémiques à la Libanaise, entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre. Les 18 octobre, 7 novembre, 17 octobres etc.… n’ont pas suffits !!! ?
2. L’objectif du texte fondateur: S’agit-il d’un texte de déclaration de principe qui recadre les revendications et les valeurs communs de forces politiques dans le cadre d’une alliance conjoncturelle pour se démarquer des autres expressions? Ou plutôt un texte qui présente l’axe principal d’une coalition porteuse d’un projet politique et envisageant de se présenter aux élections donc qui a une chance, comme toute autre sensibilité, de gouverner le pays ? En fonction de l’objectif du front notre regard et nos critiques sur le contenu du texte fondateur seront différents.
Il faut juste comprendre qu’il est normal que cet amalgame existe, du moins dans mon esprit, puisqu’on est réellement dans une période où coexistent dans le temps et dans l’espace deux campagnes politiques différentes. La première se traduit par la mobilisation et les manifestations, d’une rue, longtemps, opprimée et obligée au silence forcé, pour s’acharner contre tout symbole de l’ancien régime-tyran. La surenchère et l’excès verbal sont dans ce cas là compréhensibles. Quant à la deuxième, il s’agit bien, si l’on croit ce qu’on nous a dit, d’une période préélectorale sur la base de laquelle le tunisien aura à choisir au bout de 6 mois entre les différents projets en fonction de ses aspirations et ses attentes. Dans ce dernier cas toute formule est importante et tout verbe compte.
Or le contenu du texte fondateur donne des positions claires sur le type de régime à mettre en place et sur les politiques économiques (Nationalisation des secteurs privés, rupture avec la politique libérale et capitaliste) et internationales du pays me laisse supposer (jusqu’à preuve du contraire) qu’il s’agit plutôt d’une alliance électorale. Ceci m’incite à m’interroger sur la crédibilité de ces propositions et à exprimer un doute sur la validité d’une formule préétablie extraite, d’une façon la plus fidèle, des thèses politiques de l’extrême gauche des années 70 sans tenir compte que nous sommes en 2011 et que plein d’événements internationaux ont eu lieu entre temps. Enfin ce front prétend « conduire la révolution de notre peuple pour réaliser ses objectifs » tout en intégrant dans son texte fondateur la nécessité urgente « de nationaliser les secteurs privatisés et rompre radicalement avec le capitalisme et le libéralisme ». Or je crois que tout le monde est d’accord que la révolte qui s’est transformée en soulèvement et qui, à son tour, a participé au départ du Tyran) n’à jamais, jusqu’au 20 janvier, date de la publication de ce texte, prétendu adopter des thèses de lutte des classes. Elle n’a jamais été conduite non plus par tel ou tel courant idéologique, autrement on l’aurait su.
Je crois, avec tous mes respects aux fondateurs du front, qu il s’agit d’une malveillance intellectuelle et de la pure démagogie et récupération politique. Je croyais que faire parler les morts pour leur faire dire ce qu’ils n’ont jamais pensé et transposer ses propres idées et fantasmes sur des événements populaires faisaient partie des anciennes pratiques à l’université. Enfin en se fixant de tels objectifs pour « conduire la révolution » ce front devrait, en cas de réussite, (laissons nous fantasmer nous aussi) ou bien appliquer à la lettre ce qu’il a promis au peuple et dans ce cas instaurer un enferment et un blocage économique dans un pays qui vit du tourisme et de l’import et de l’export ; ou bien il sera amené à vendre un discours à la population et appliquer le contraire. Tout cela annonce bien le degré du sérieux de ce front et de ses fondateurs.
3. La composition du Front: Par mon appartenance à la gauche progressiste tunisienne, quoique je demeure libre et indépendant, je crois, dans le contexte actuel, à la nécessité de la formation d’une alliance large de démocrates et progressistes, regroupant des syndicalistes, des intellectuels, des artistes, des jeunes, des femmes, des associations et des partis politiques démocrates plutôt qu’à un front réduit de l’extrême gauche. Je pense qu’une telle alliance fausse le clivage réel et me laisse sceptique sur l’efficacité de son action et sur le sérieux de sa démarche.
D’une manière simplifiée je crois qu’actuellement le paysage politique tunisien est composé naturellement de trois grandes familles (tenant compte de l’élan de libertés acquis après la chute de l’ancien régime qui à imposé à son tour auparavant un clivage à sa guise):
– Les héritiers politiques de l’ancien régime (dont une partie se fait discrète actuellement et une deuxième partie, qui est la plus dangereuse, s’immisce, dans les manifestations populaires, dans le mouvement de révolution). Ceux là auront à choisir entre une ultime tentative de reprise du pouvoir ou la composition avec les autres forces pour appuyer un tel ou un tel projet. Il est à noter qu’ils disposent d’une capacité formidable de s’adapter avec tous les scénarios pour préserver leurs intérêts (pour être connus par leur soutien, à la veille de 7 novembre, de la présidence à vie de Bourguiba pour se retourner contre lui le lendemain, pour ensuite céder le pouvoir aux policiers du régime et finir comme spectateurs devant la domination de la mafia du président déchu) et ceci quelle que soit la force politique gagnante le lendemain du processus électoral.
– Les démocrates qui rêvent d’une transition pacifique vers une démocratie stable dans laquelle les libertés (au pluriel) seront garanties, l’individu retrouvera sa dignité où les richesses du pays seront justement réparties. Ce sont ceux qui rêvent tout simplement de la construction d’une société moderne, ouverte et juste.
– Enfin les « identito-populistes » (parmi lesquels figurent les islamistes et les nationalistes Arabes) qui veulent faire de l’identité (ou d’une partie) et de l’histoire (ou d’une partie) du pays une référence idéologique principale et une ligne politique axiale pour s’appuyer sur les masses, en les mobilisant contre un supposé ennemi qui menace leur identité, et par delà accéder au pouvoir et appliquer une politique qui restreint d’une manière ou d’une autre les libertés et se ferme très souvent sur sa propre identité.
Plus les périmètres de ces familles sont bien délimités plus les paysage politique sera sain, lisible et plus l’action politique aura un sens. Il est tout à fait naturel qu’au sein même d’une coalition politique large de petits regroupements se constituent et que soit distingué « réformiste » et « radical » ou encore « rupture » et « continuité » du moment que les valeurs qui les unissent ne soient pas mis en cause. Cependant, les jeux d’alliances contre-nature, bien qu’efficaces à court terme puisqu’elles permettent d’intensifier une action politique ponctuelle, donnent généralement des conséquences désastreuses à moyen et à long terme sur l’engagement politique. Ces mêmes alliances induiront des concessions au prix des valeurs fondamentales et les jeunes seront les premiers à déserter la scéne politique parce qu’ils supporteront mal la déchirure entre l’approbation de l’action engagée et le décalage par rapport aux valeurs pour lesquels ils étaient engagés et vice-versa.
4. L’ensemble des revendications affichées : La dissolution du RCD, le changement de la constitution et du régime, l’insatisfaction de la couleur politique du gouvernement provisoire …:Bien que je suis d’accord sur le fond je m’interroge sur l’existence d’un agenda déjà établi et sur les moyens financiers à débloquer pour réaliser tout cela dans une période aussi courte.
– « Le gouvernement provisoire doit tomber et se faire remplacer par un nouveau gouvernement qui a la confiance du peuple et des militants progressistes » : d’abord qui prendra en charge de constituer un tel gouvernement ? et qui a la légitimité de le proposer ? on nous propose un comité représentatif d’associations, d’organisations politiques et de syndicalistes mais les jeunes qui se sont révoltés se reconnaissent-ils dans ce cartel? Quand on parle de gouvernement provisoire disposant de la confiance du peuple et des militants progressistes on oublie que tout le peuple n’est pas forcément militant et n’est pas non plus forcément progressiste. Et qu’est ce qui empêcherait un autre front qui prétend aussi être inscrit dans la révolution de demander « un gouvernement disposant de la confiance du peuple et des Imams » ainsi de suite. Comment on peut parler de la confiance du peuple quand il s’agit d’un gouvernement provisoire qui ne sera pas, de toutes les façons, élu ? quel sera le critère de mesure de la confiance du peuple ? est-ce le thermomètre des manifestations dans la rue ? et ceux qui ne manifestent pas dans la rue on en fait quoi ? leurs avis comptent ou pas ? Les fondateurs de ce front croient-ils réellement que la composition d’un tel gouvernement non élu « ayant la confiance de tout le peuple » est réalisable dans des délais courts avec toutes les contradictions qui traversent les composantes citées? En attendant un accord (peu probablement) sur cet éventuel gouvernement provisoire, qui gère le pays avec son économie, ses institutions et administrations et ses universités et écoles et qui va nourrir le peuple?
– « La dissolution du RCD, la confiscation de ses biens et le jugement des responsables des crimes et des vols commis par l’ancien régime ». C’est formidable et je partages parfaitement ces revendications mais qui va le faire ? Est-ce la justice qui est supposée devenue, ou qui doit avoir les moyens d’être, autonome ou ce sont les Tribunaux populaires qui seront constitués et chargés de le faire ? Que faire des commissions d’enquêtes qui ont été désignées et que faire de leurs futurs rapports ? Sont-elles légitimes ? ou, puisqu’elles ont été désignées par l’actuel gouvernement provisoire, elles n’ont ni la légitimité ni la crédibilité ni encore la confiance du peuple ? Les descentes des comités populaires de protection de la révolution (constitués dans la foulée, suite au départ du Dictateur, dans certaines villes) dans les locaux du RCD et dans les établissements privés désertés par la famille mafieuse de Ben Ali représentent-elles la solution ? Au final qui doit faire la loi en attendant la constitution d’un nouveau gouvernement provisoire et protéger ainsi de la révolution et éviter qu’elle soit volée !!! ???
– Parmi les revendications du front : Des élections d’une constituante doit avoir lieu, une nouvelle constitution doit être établie, un nouveau régime de gouvernance doit être proposé, la nouvelle constitution doit être adoptée (j’imagine, ce qui est logique, par référendum), tous les partis doivent être logiquement dissous et recomposés, de nouvelles élections législatives organisées, un nouveau gouvernement doit être composé. Quand on évoque des élections de l’Assemblée constituante dans un an cela suppose qu’il y aura des élections législatives comme prévu dans un délai de 6 mois ou pas? Qui va élire l’assemblée constituante ? ça sera le code électoral actuel qui sera appliqué lors de l’élection de la constituante ? Pouvons nous comprendre que ces élections vont se substituer aux législatives ? et si la constituante sera élue dans un an aura-t-elle la légitimité de constituer un gouvernement ? Je suppose que non, donc on doit toujours avoir un gouvernement provisoire pendant 2 ans au moins et pas de 6 mois (puisque les travaux de la constituante et le processus qui s’en suivra peut durer au moins un an). Enfin, toujours dans cette éventualité, et si la constituante n’arrive pas à pondre une constitution au terme des délais à cause d’un éventuel blocage entre les composantes (c’est le cas par exemple de la Bolivie) on va prolonger le mandat du gouvernement qui sera bien évidement toujours provisoire et non élu ?
En attendant des réponses à ces questions, j’aimerai savoir pourquoi on veut nous dire qu’il y a un seul chemin de changement ? Le contredire c’est être contre la révolution. Ou bien tout doit changer radicalement et immédiatement ou bien la révolution sera avortée ou volée ? Pourquoi on veut diviser les Tunisiens entre révolutionnaires et contre-révolutionnaires alors que tous le pays (avec tous ses citoyens quelque soit leurs appartenance politique) a fêté sa liberté le lendemain du départ du Tyran ? Pourquoi on veut traîner une population, et particulièrement la jeunesse, surexcitée par cet événement exceptionnel, dans des démarches revanchardes et maximalistes ? La démarche telle qu’on nous l’a proposée correspond-elle à celle d’une révolution démocratique et pacifique ? Enfin pourquoi on veut reproduire coûte que coûte la révolution Bolchevique du 17 octobre avec ses conséquences désastreuses sur les plans politique et humanitaire ?
Je suis d’accord que le gouvernement provisoire en place avec sa composition actuelle ne répond pas aux attentes du peuple révolté, ne serait ce que par son image affichée trop collée à l’ancien Parti au pouvoir. Au premier regard, il apparaît comme un gouvernement du RCD ouvert à certaines figures indépendantes ou de l’opposition. L’attribution des Ministères Régaliens aux symboles de l’ancien régime nous interpelle et nous laisse penser que ces Ministres n’ont pas réalisé que le 14 janvier ne symbolise pas que le départ du Dictateur mais aussi la chute de tout un régime qui a régné grâce à son parti au pouvoir pendant 55 ans. Bien que tout le monde ait l’intime conviction de la nécessité de composer avec une partie de ce Parti pour assurer une transition pacifique et ne pas mettre en péril les affaires courantes de l’Etat, il est inadmissible qu’il apparaisse au final comme un Parti vainqueur. Il était donc logique et primordial qu’une pression soit faite par l’opinion publique (qui vient de se libérer et qui a désormais les moyens de s’exprimer) afin de rééquilibrer la composition politique de ce gouvernement et rassurer le peuple qu’un changement prometteur a bien eu lieu. Il s’agit d’une revendication légitime qui pouvait être portée par les médias, les politique, les associations, la centrale syndicale et aussi la rue qui devait être appelée à s’exprimer quand toutes les autres composantes se retrouvent dans une impasse. C’est une démarche cohérente avec le caractère pacifique du combat dans lequel s’est engagé le peuple tunisien dés son premier jour de sa révolte contre l’ancien régime. Delà à appeler à une mobilisation sans arrêt, limitée exclusivement à la rue et aux manifestations, et bloquer le pays pour faire tomber tout le gouvernement provisoire et opter vers des formules incertaines, la différence est de taille. Pire, faire une campagne sans merci contre les partis d’opposition qui ont participé au gouvernement provisoire, et qui ont courageusement de s’accrocher à un pouvoir civil transitoire à la tête du pays, est complètement irresponsable. Ce sont eux qui ont imposé, se basant sur les revendications de la révolution du peuple, des décisions historiques jamais connues dans notre pays. Le gouvernement provisoire auquel participe une partie de l’opposition n’a-t-il pas décidé de libérer tous les prisonniers politiques et annoncé la législation d’une amnistie générale ? N’a-t-il pas donné la consigne d’accepter et de répondre favorablement à toute demande de légalisation d’un parti politique ? N’a-t-il pas décidé de dissoudre la police universitaire ? N’a-t-il pas décidé la séparation de l’Etat du partit et de récupérer tout les biens publics à la disposition de l’ancien Parti au pouvoir?
La construction d’un nouveau régime démocratique stable et inspiré des aspirations de liberté d’un peuple aussi ouvert sur son environnement et aussi pacifique qu’est le peuple Tunisien, ne mérite-t-elle pas d’être faite dans une démarche graduée, sûre et réfléchie. N’est-il pas plus raisonnable de se préparer sérieusement aux échéances électorales qui doivent avoir lieu aux termes du mandat constitutionnel donné au gouvernement provisoire. Lancer le débat politique entre les différentes sensibilités politiques du pays, projet contre projet, et se faire connaître auprès des Tunisiens qui sont entrain de les découvrir après la chute du mur qui les a séparé durant 23 ans de règne du Despote déchu, ne représente pas une priorité absolue dans ce contexte ? Organiser des élections législatives et présidentielles après la réforme du code électoral, pour assurer les conditions les plus démocratiques à un processus électoral libre et représentatif, ne représente pas l’étape primordiale dans la démarche de réformes politiques radicale et profonde avec l’élection d’une force politique légitimement mandaté par le peuple pour lancer ces réformes. Que la constitution soit discutée dans une constituante ou des comités populaires ou encore des conseils représentatifs et soumis à un référendum devient une question technique du moment qu’elle sera au final choisi par le peuple et qu’elle ne représente pas un handicap devant un exécutif qui doit fonctionner d’une façon parallèle avec une légitimité d’un mandat du peuple. Cette démarche ne représente-t-elle pas l’uns des scénarios démocratique qui peut nous éviter l’arbitraire et l’incertain que veut nous proposer, comme solution unique, ceux qui optent la surenchère comme moyen pour retarder le maximum tout processus électoral en Tunisie.
Je ne comprends pas pourquoi certaines forces veulent continuer à jouer le rôle de contestataires et d’agitateurs alors que la dualité Pouvoir – Opposition n’a pas véritablement sa place dans ce contexte. Pour une fois toutes les sensibilités politiques disposent des même chances pour organiser leurs rencontres avec le peuple et construire leurs alliances afin de mener une bataille électorale la plus libre de notre histoire. Au moment où on dispose réellement de notre destin on nous demande attendre pour finir d’abord notre revanche sur l’ancien régime jusqu’au dernier symbole au risque d’induire une guerre civile. C’est incontestablement irresponsable.
La précipitation spontanée des populations, jadis opprimées, pour régler le compte du régime déchu et en demandant des solutions radicales et rapides, est compréhensible. Cependant, je trouve injustifié que des forces politiques, qui prétendent conduire la « révolution », alimentent les tensions et optent vers des propositions absurdes et irresponsables sachant qu’elles connaissent le sort des révolutions qui ont agi ainsi. Tirent-elles bénéfice d’un éventuel chaos ou ont-elles perdu le sens de l’action politique responsable avec le mélange entre le vécu personnel de certains dirigeants sous l’ancien régime et les positions historiques à prendre dans un moment de victoire.
J’espère que cette révolution portera la relève à une classe politique vieillissante et dérapée et donnera un nouveau souffle sincère et moderne à l’actuel spectre archaïque. L’ère du Dogme est révolue partout dans le monde. La Dictature du Prolétariat est classée dans les archives des expériences chaotiques et la conception de l’Etat religieux a induit un recul difficilement remédiable dans des pays connus par leurs grandes civilisations antérieures. Faisons donc une rupture avec les anciennes pratiques et refusant de consommer les anciennes formules pour créer de nouvelles idées compatibles avec notre contexte, notre ére et notre génération. Nous sommes suffisamment instruits et ouverts sur le monde pour mener notre pays à une véritable démocratie durable où la liberté sera garantie et où l’alternance sera possible.
Tunisie : Des protections troublantes
TUNISIE : LE RCD TENTE DE REBONDIR
Avec la nomination en Tunisie de 19 gouverneurs (sur 24) issus de l’ancien parti au pouvoir, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), celui-ci se réorganise. Le week-end dernier, de nouvelles violences ont éclaté à Sidi Bouzid (qui ont fait deux morts) et au Kef, dans le nord-ouest (quatre morts). Manifestement, le RCD, soutenu par certaines factions du ministère de l’Intérieur, s’emploie à reprendre la situation en main et à propulser l’ancien ministre des Affaires étrangères, Kamel Morjane — un cousin de Ben Ali, issu comme lui de la région du Sahel —, à la présidence de la République (voir TTU n° 677). Les instigateurs de ce plan seraient Hedi Baccouche, ancien Premier ministre, et Habib Ammar, ministre d’Etat chargé de l’Intérieur sous l’ère Ben Ali. Ancien militaire, compagnon de route du président déchu, Ammar avait fourni à ce dernier un soutien décisif lors de sa révolution de palais, le 7 novembre 1987, en prenant le contrôle du palais de Carthage. Des milieux de l’opposition le soupçonnent d’être impliqué dans un certain nombre d’affaires de corruption, notamment à travers son fils Doreid. Ce climat délétère ne facilite pas le processus de normalisation en Tunisie. Selon l’article 25 de la Constitution, Ie président par intérim, Fouad Mbazaa, ne peut pas rester en fonctions plus de deux mois. Et en cas de démission de l’actuel Premier ministre, Mohamed Ghannouchi, il ne peut lui nommer de successeur. Des voix s’élèvent pour réclamer la démission du ministre des Affaires étrangères, Ahmed Ounaies, qui a stigmatisé le chaos en Tunisie et rendu hommage à son homologue française, Michèle Alliot-Marie. Quoi qu’il en soit, les observateurs s’attendent à des jours difficiles pour le pays, compte tenu d’un secteur touristique sinistré. Ce dernier emploie, en effet, près de 400 000 personnes, et 150 hôtels à Djerba ont mis la clé sous la porte. Les vols directs à destination de Djerba, Tozeur et Sfax ont été suspendus. Par ailleurs, le complexe chimique de Gabès, qui emploie 1 500 personnes, est en chômage technique. Enfin, le phosphate ne peut plus être acheminé du bassin minier de Gafsa, car les habitants de la région ont bloqué le transport ferroviaire, ce qui provoque une perte de près de 20 millions de dinars par jour.
Tunisie: le chef de la diplomatie épinglé pour son “déni de révolution”
TUNIS, 09 Fev 2011 (AFP) – “Ahurissement”, “consternation”, “hébètement”: les internautes tunisiens se livrent à une attaque en règle contre le nouveau ministre des Affaires étrangères, Ahmed Abderraouf Ounaïes, cloué au pilori pour ses propos sur la révolution tunisienne et sa “déclaration à MAM”. En visite le 4 février à Paris, dont le ralliement tardif à la révolution populaire a fait grincer des dents à Tunis, M. Ounaïes n’avait pas tari d’éloges sur son hôte, Michèle Alliot-Marie. “J’aime écouter Mme Alliot-Marie en toutes circonstances et dans toutes les tribunes”, avait affirmé cet ambassadeur à la retraite de 75 ans. Il avait salué en elle “avant tout une amie de la Tunisie”, alors que “MAM” était sommée au même moment de s’expliquer en France pour avoir bénéficié des largesses d’un grand patron tunisien lié en affaires avec le clan Ben Ali et pour avoir proposé au régime vacillant de Ben Ali le “savoir-faire” des policiers français, alors que la répression battait son plein. Les dernières déclarations du ministre lundi soir sur la chaîne de télévision privée tunisienne Nesma ont achevé de scandaliser les internautes. Sur le site Gnet.tn, “HJ” a posté un commentaire énervé: “Ahmed Ounaïes: un déni de révolution”. Le bloggeur dénonce le discours “confus” et “moralisateur” du ministre qui a esquivé les questions des journalistes sur ses “déclarations à Mme Alliot-Marie”, préférant évoquer les “médias qui on failli” et faisant “remonter la révolution à 50 ou 60 ans”. Faïçal Abroug, un ancien inspecteur pédagogique, fustige sur Kapitalis.com un “soliloque (…) inepte sur les fondements de la révolution” et un “mépris à l’égard de l’homme de la rue”. Il invite pour finir le ministre “à prendre la décision qui s’impose: démissionner”. “Il y a des petites choses qui ont changé. M. le ministre (…), vous êtes tenu de nous rendre des comptes”, rappelle Motaz Dlimi, simple citoyen dans une “lettre ouverte” postée sur le site Nawaat.org. Comme tous les ministères tunisiens, les Affaires étrangères font face presque quotidiennement à des manifestants qui viennent réclamer embauches et revalorisations salariales. Mais Ahmed Ounaïes est, lui, en plus accusé d’avoir “trahi” l’idéal révolutionnaire. Une caricature s’étalait mardi à la une du quotidien le Temps: sous le titre “le fou d’Alliot-Marie”, on voit un Ounaïes entourés de petits coeurs assis sur un banc à côté de “MAM”. “Enfin mon rêve se réalise”, dit-il ce à quoi la ministre répond: “chouette j’ai encore des partisans en Tunisie”.
Tunisie: les mains libres, le président promet des négociations sociales
Par Kaouther LARBI TUNIS, 09 Fev 2011 (AFP) – Le président tunisien intérimaire, Foued Mebazaa, a annoncé mercredi soir l’ouverture “prochainement” de “négociations sociales à l’échelle nationale”, dans une allocution à la télévision nationale, quelques heures après avoir été investi de pouvoirs de crise par le Parlement. C’est la première fois que le président s’adressait directement aux Tunisiens depuis son entrée en fonction le 15 janvier, au lendemain de la fuite à l’étranger du président Zine El Abidine Ben Ali. “Ces négociations sociales seront le meilleur cadre de dialogue et de concertation pour régler la situation sociale de toutes les catégories du peuple et dans tous les secteurs”, a déclaré M. Mebazaa, qui a appelé ses compatriotes à faire “preuve de patience”. “Vos demandes sont légitimes, mais vous devez comprendre la difficile situation à laquelle le pays est confronté”, a-t-il expliqué, alors que le gouvernement de Mohammed Ghannouchi est confronté depuis deux semaines à de fortes tensions sociales à travers tout le pays. Dans la matinée, le Sénat tunisien avait adopté à l’unanimité une loi autorisant le président intérimaire à gouverner par décrets-lois, contournant ainsi le Parlement bicaméral hérité de l’ère Ben Ali. Le texte, déjà voté à l’Assemblée nationale lundi, a été adopté à main levée par les 86 sénateurs présents, sans aucune abstention, a constaté l’AFP. “Le vote du Sénat est très important. Il va nous permettre de réaliser les aspirations du peuple et de concrétiser les initiatives prises par le gouvernement transitoire, essentiellement la loi d’amnistie générale”, a affirmé Foued Mebazaa. “Nous resterons fidèles aux principes de la révolution et déterminés à répondre aux espoirs de la jeunesse”, a-t-il martelé, estimant que le gouvernement enregistrait “des progrès remarquables en dépit d’un climat difficile”. A l’ouverture du débat mercredi, le Premier ministre Mohammed Ghannouchi avait exhorté la Chambre des conseillers (Sénat) à voter oui “pour permettre au gouvernement de travailler” et demandé du temps à une population qui perd visiblement patience, parlant d'”explosion sociale”. Un jeune homme a été légèrement blessé dans le centre de Tunis par une balle qui a ricoché, alors que des militaires tentaient de canaliser des centaines de personnes devant un bureau d’aide sociale pour toucher de 30 dinars à 150 dinars (15,5 à 78 euros). Déjà mardi, entre 400 et 500 personnes avaient envahi le gouvernorat au coeur de la capitale pour réclamer du travail et des aides. M. Ghannouchi a également annoncé la légalisation “dans quelques jours” des formations interdites sous Ben Ali qui en ont fait la demande, parmi lesquelles figure le mouvement islamiste Ennahda de Rached Ghannouchi. Les autorités ont annoncé des élections présidentielle et législatives dans six mois, sans toutefois donner de date précise, alors que de plus en plus de voix s’élèvent pour juger ce délai intenable. A l’intérieur du pays, son gouvernement reste soumis à une forte pression depuis qu’il a remplacé il y a une semaine les 24 gouverneurs de région. Ces nominations ont rapidement été contestées, 19 des personnes choisies étant des adhérents ou des proches du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti au pouvoir sous Ben Ali. Le nouveau gouverneur de la région de Sousse (150 km au sud de Tunis) a été contraint mardi de quitter ses bureaux par une foule en colère. Ses collègues de Monastir (ville voisine) et de Medenine (sud) ont eu droit aussi à des manifestations sous leurs fenêtres. Une délégation de voyagistes français a affirmé mercredi à Tunis sa volonté de relancer le tourisme, estimant que ce secteur vital pour le pays pouvait “récupérer” dès ce printemps.
Tunisian leader asks restive people to be patient
Le président tunisien demande au peuple d’être patient
TUNIS, 9 février (Reuters) – Le président tunisien par intérim, Fouad Mebazza, a annoncé mercredi l’ouverture d’un dialogue national et demandé à ses compatriotes de faire preuve de patience pour voir s’améliorer leurs conditions de vie. S’exprimant publiquement pour la première fois depuis sa nomination le 15 janvier, au lendemain de la fuite du président Zine ben Ali en Arabie saoudite, Fouad Mebazza a promis l’ouverture prochaine de négociations sociales à l’échelle nationale avec tous les secteurs de la société. La chute de Ben Ali sous la pression de la rue a été suivie d’une vague de protestation et de grèves pour des questions sociales comme les bas salaires ou les conditions de travail. “Je sais que toutes vos requêtes sont légitimes mais il faut se montrer raisonnable et faire preuve de patience dans la situation difficile à laquelle notre pays est confronté”, a déclaré Mebazza, ancien président du parlement et nommé à ce titre chef de l’Etat par intérim. Cinq personnes ont trouvé la mort depuis vendredi lors d’accrochages dans plusieurs villes de province. Plusieurs gouverneurs ont été contraints à la démission par des manifestants. Aucun incident ou manifestation à grande échelle n’a été signalé mercredi.
Vacances d’hiver: ski ou soleil mais loin de la Tunisie et de l’Egypte
Par Dominique AGEORGES PARIS, 10 Fev 2011 (AFP) – Les vacances d’hiver entraîneront les Français à partir dès vendredi au ski, malgré le manque de vraie neige, ou au soleil mais, dans ce cas, aux Canaries ou en République dominicaine faute de Tunisie et d’Egypte, selon les professionnels interrogés par l’AFP. A la montagne, le taux de réservation est de l’ordre de 70% sur la première et la quatrième semaines de vacances. Il grimpe à 80% et 90% en moyenne et certaines stations affichent même complet pour les deuxième et troisième semaines, selon l’Association nationale des maires des stations de montagne. “La fréquentation est dans l’ensemble identique à l’an dernier”, indique son président, Jacques Guillot. “Quant aux conditions de ski, elles sont tout à fait adaptées” entre la neige naturelle et celle des canons, assure-t-il, reconnaissant qu’il manque parfois “l’ambiance blanche”. “Il vaut mieux avoir une neige de culture bien travaillée avec du beau temps qu’un mètre de neige et de la pluie”, fait-il valoir. Président de Savoie-Mont Blanc tourisme, l’organisme touristique gérant les 110 stations des deux Savoie, Vincent Rolland précise que 82% des pistes sont ouvertes contre environ 95% à la même époque l’an dernier. “Le froid de janvier a permis d’entretenir le manteau neigeux”, relève-t-il, en se félicitant par ailleurs que “Météo France annonce un refroidissement pour vendredi et des chutes de neige lundi et mardi”. Pour les autres destinations, le marché est plutôt “bien parti grâce cette année aux offres de réservations de première minute qui ont bien fonctionné et permis aux voyagistes de gagner en visibilité”, selon Laurent Serfaty, rédacteur en chef du portail internet Esasyvoyages.com. Mais les troubles en Tunisie et en Egypte qui ont entraîné une suspension des départs des vacanciers, ont bousculé le marché. Les Français qui avaient déjà réservé ont dû se reporter vers d’autres destinations et les voyagistes réorganiser leurs capacités aériennes et hôtelières vers des cieux plus calmes mais très demandés. “Toute l’Europe a mis ses billes sur les Canaries qui vont probablement assurer la fin de l’hiver puis on va embrayer vers les Baléares et l’Espagne continentale”, affirme M. Serfaty. D’autres destinations devraient profiter de la situation comme la Turquie, la Grèce, la Crète ou Chypre. “On verra bien si, pour profiter de cette manne, le bassin méditerranéen rouvre fin mars/début avril alors que l’an dernier, c’était un mois plus tard”, a ajouté M. Serfaty. Avec à la clé “un risque d’envolée des tarifs”préviennent déjà des professionnels” face à la demande et la concurrence européenne. Déjà, chez Marmara, Majorque la Crète et Rhodes enregistrent des réservations en hausse de 50% pour l’été ou de 30% pour la Turquie. Chez Nouvelles Frontières, “la République dominicaine et le Sénégal” bénéficient d’un coup de pouce plutôt lié à la crise égyptienne. Les réservations vers “l’île Maurice, les Antilles ou le Mexique” marchent bien aussi. Pour les vacances de février, Marmara observe que l’impact des troubles en Tunisie et en Egypte se traduit par des réservations en légère baisse car ces deux pays “représentaient 40% des volumes de départ. Or 50% des reports n’ont pas été faits aux mêmes dates de départ mais plus loin sur la saison”. Pour la suite, les voyagistes français, dont une forte délégation vient de rencontrer le ministre tunisien du Tourisme, tablent sur une levée rapide du couvre-feu et une relance “dès le printemps”, début de la haute saison, de cette destination, l’une des préférées des Français. Pour l’Egypte, la situation est plus complexe car l’hiver est la haute saison. La reprise pourrait attendre l’automne avec la fin des fortes chaleurs.
Immigrazione: nuovo sbarco a Lampedusa, approdati altri 78
LAMPEDUSA (ansa) Non si arresta l’ondata di sbarchi verso le coste siciliane, in coincidenza con la rivolta in Tunisia che ha portato alla deposizione del presidente Ben Ali. Dopo i 221 nordafricani approdati ieri sulle Pelagie, altri 78 extracomunitari sono stati intercettati in serata su un barcone a circa 16 miglia a sud di Lampedusa. L’operazione di soccorso, condotta dalle motovedette della Guardia Costiera e della Guardia di Finanza italiane, si è conclusa in nottata. Anche questo ultimo gruppo di immigrati sarà trasferito a Porto Empedocle, così come avvenuto con gli altri maghrebini giunti in precedenza che non sono stati accompagnati nel centro di prima accoglienza dell’isola. Il ministro dell’Interno, Roberto Maroni, ha infatti ribadito ieri che la struttura non sarà riaperta e che gli extracomunitari continueranno ad essere smistati verso altri centri di accoglienza.
Tunisie: Le principal syndicat veut des négociations sociales “rapides”
Un commentateur arrêté en Libye après avoir appelé à manifester
Les Algériens veulent le changement sans le chaos
* Les Algériens plaident pour un changement en douceur * Ils gardent en tête les années de violences islamistes * Manifestation samedi, sans les salafistes par Lamine Chikhi ALGERS, 10 février (Reuters) – Si de nombreux Algériens estiment que leur pays a besoin d’un changement à la tête de l’Etat, ils mettent en garde contre une transition trop brutale et brandissent le spectre de troubles qui pourraient faire replonger le pays dans le chaos des années 1990. Les Algériens ont observé avec fascination et intérêt les manifestations qui menacent actuellement le régime égyptien d’Hosni Moubarak et ont conduit à la chute du président tunisien Zine Ben Ali à la mi-janvier. Portés par cette vague de mobilisation sans précédent dans le monde arabe, des organisations algériennes de la société civile, des syndicats et des petits partis politiques ont annoncé leur intention de braver l’état d’urgence en vigueur depuis 1992 en organisant un rassemblement samedi. Mais si le pays est confronté aux mêmes problèmes de chômage et de précarité que ses voisins, rien ne semble indiquer jusqu’à présent que la manifestation remportera le même succès et parvienne à mobiliser autant qu’en Tunisie ou en Egypte. “Le changement oui, le chaos non”, a déclaré à Reuters Aïcha Chikoune, une employée d’un bureau de poste du centre de la capitale, résumant bien la position de la population algérienne. “Nous ne devons jamais oublier les années de sang et de larmes des années 1990 après la mort et la décapitation quotidienne de centaines de personnes”, a-t-elle ajouté. Le pays avait sombré dans le chaos en 1992 après l’annulation par le gouvernement du second tour des élections législatives que le parti islamiste était sur le point de remporter. Selon des estimations indépendantes, 200.000 personnes avaient trouvé la mort dans les violences qui ont suivi cette décision. “Il n’y a pas assez de cercueils”, avaient alors l’habitude de dire les Algériens. Bien qu’ayant considérablement diminué en nombre, les attaques et les attentats menés par des insurgés liés à Al Qaïda se sont poursuivis ces dernières années. Le retour d’une certaine stabilité a toutefois permis aux Algériens de prendre conscience de leur niveau de vie et de leur mécontentement grandissant. A l’image de la jeunesse tunisienne et égyptienne, ils dénoncent le chômage, la hausse des prix des produits alimentaires, la corruption, et se demandent pourquoi ils n’ont tiré aucun profit des milliards de dollars des ressources pétrolières et gazières du pays. Afin d’apaiser la colère des manifestants et prévenir tout risque de scénario “à la tunisienne et à l’égyptienne”, le président Abdelaziz Bouteflika a promis la semaine dernière de lever l’état d’urgence et a ordonné à son gouvernement d’adopter des mesures favorables à la création d’emplois. INTERDICTION OFFICIELLE Des mesures jugées insuffisantes par les organisateurs de la manifestation de samedi qui appellent à la démission de Bouteflika. “Nous défilerons parce que c’est notre droit de manifester pacifiquement et c’est au gouvernement de nous protéger”, a déclaré Rachid Malawi, responsable du Syndicat autonome des travailleurs de la fonction publique. Le 22 janvier dernier, une manifestation non autorisée organisée par le parti Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) n’était parvenue à rassembler qu’une poignée d’Algériens sur la place du 1er mai, au centre de la capitale, en raison d’un déploiement important des forces anti-émeutes et du peu d’intérêt de la population. “Nous ne devons jamais oublier qu’il n’y a pas une seule famille algérienne qui n’ait pas été touchée par le chagrin ces 20 dernières années”, a souligné l’avocat et militant des droits de l’homme, Mokrane Ait Larbi au quotidien El Watan. “Nous ferons tout notre possible pour faciliter un changement pacifique et éviter les bains de sang”, a-t-il ajouté. Reflétant l’opinion publique, les islamistes ont fait savoir qu’ils ne participeraient pas au rassemblement de samedi. “Nous sommes opposés à cette marche parce que les organisateurs ne représentent qu’une petite minorité et non le peuple algérien”, a ainsi déclaré le prédicateur salafiste Cheikh Abdelfateh Zeraoui. “Bouteflika, ça va, mais le gouvernement doit partir parce qu’il n’est pas parvenu à créer des emplois et à résoudre les problèmes de la jeunesse algérienne.” Un point de vue partagé par Cheikh El Hachelmi Shahmouni, membre fondateur du Front islamique du Salut (FIS), qui a également indiqué qu’il ne participerait pas au défilé de samedi. “La jeunesse doit éviter la confrontation, c’est inutile. Elle doit nouer un dialogue avec Bouteflika et ce dernier doit écouter les jeunes et résoudre leurs problèmes.”
L’Europe cacophonique et inaudible face au monde arabe
Par Yacine LE FORESTIER BRUXELLES, 10 Fev 2011 (AFP) – Les crises tunisienne et égyptienne mettent avec cruauté en relief les imperfections d’une diplomatie européenne qui loin de parler d’une seule voix, comme elle en proclamait l’intention avec le traité de Lisbonne, le fait en ordre très dispersé et du coup souvent dans le désert. “Nous nous sommes dotés d’une Haute Représentante” de l’UE aux Affaires étrangères, Catherine Ashton, “mais ce sont les Etats membres qui continuent à communiquer” et souvent “en ordre dispersé”, a déploré cette semaine le chef de file de la droite au Parlement européen, sa principale force politique, Joseph Daul. La vague de contestation sur la rive sud de la Méditerranée constitue la première grave crise internationale que l’Europe doit affronter, à sa porte de surcroît, depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne fin 2009. Un texte qui ambitionnait d’accroître sa visibilité sur la scène internationale, grâce notamment à un tout nouveau service diplomatique. Le bilan est peu flatteur. La chef de la diplomatie européenne Catherine Asthon, jugée au mieux inexpérimentée et peu réactive, est fustigée comme jamais. Au Parlement européen, on parle d’une erreur “de casting”, tandis que les gouvernements peinent à dissimuler leur déception à son égard. Ils ne font toutefois rien pour lui faciliter le travail, multipliant déclarations et initiatives sans réelle concertation avec elle. “Il n’y a plus de pilote dans l’avion”, résume un diplomate européen. Face à une Haute représentante très affaiblie, chaque capitale entend jouer sa propre partition. “La conception que j’ai de l’Europe, ce n’est pas que 27 chefs d’Etat et de gouvernement doivent se taire parce que nous avons la chance d’avoir Mme Ashton”, a ironisé le président français Nicolas Sarkozy. La frustration est particulièrement grande parmi les “petits” pays de l’UE. Ils comptaient sur les nouvelles institutions renforcées du traité de Lisbonne pour faire contrepoids aux grandes diplomaties traditionnelles du Vieux continent, française et britannique en particulier, et doivent constater que ces dernières jouent modérément le jeu. “L’Europe doit parler d’une seule voix, la voix de Mme Ashton”, s’est fâché le Premier ministre belge Yves Leterme. Le président de l’Union européenne Herman Van Rompuy, tout autant relégué au second plan, a lui aussi déploré les messages “trop dispersés” envoyés par les Européens sur l’Egypte et la Tunisie. A peine les 27 dirigeants de l’UE avaient-ils décidé vendredi lors de leur sommet d’envoyer mi-février Mme Ashton en visite en Tunisie et en Egypte pour y porter leur parole, que la baronne britannique se faisait griller la politesse par le ministre des Affaires étrangères de son propre pays, William Hague. Il s’est rendu sans attendre dès mardi à Tunis. Plusieurs autres de ses collègues frappent en coulisses à la porte de l’Egypte, pour être les premiers à y aller, souligne un diplomate. “Dans certaines capitales européennes, tout le monde n’a pas encore compris la nouvelle donne” du traité de Lisbonne, regrette un haut responsable européen sous couvert de l’anonymat. “Ce qu’il faudrait c’est que d’autres ministres ne se précipitent pas dans d’autres capitales (de la région) avant elle. Et pour faire quoi d’ailleurs ?”, ajoute-t-il. Dans une étude qu’il vient de publier, le Center for European Policy Studies exhorte l’UE à “se doter d’un corps diplomatique de classe mondiale, capable de devenir un acteur de premier plan sur la scène internationale”, en surmontant le “conservatisme” des chancelleries nationales “qui veulent en rester au statu quo”. A défaut, “on aboutira à un diplomatie européenne de plus en plus inutile et obsolète”, prévient-il.
US intelligence director calls al-Qaida top threat
Tunisie : les défis de la transition
Par Selim
Plus que jamais, la phase de transition que traverse actuellement la Tunisie est décisive pour l’avenir proche et à long terme du pays, et de sa région par extension. L’année 2011 nous dira si la Tunisie aura réussi à consolider les bases d’un nouveau modèle, un modèle qui éviterait aux tunisiens de devoir choisir entre le « bâton » et le « croissant » , qui représentent à ce jour les seuls modes de gouvernance connus dans le monde arabe.
Les informations, les évènements et les décisions du gouvernement actuel, qui ne cessent de s’enchainer à une vitesse phénoménale, rendent difficile toute tentative de prise de recul et d’analyse objective de l’évolution de la situation. Les maladresses et le manque de communication sur certains sujets de la part des intérimaires du gouvernement donnent l’impression qu’ils sont davantage dans l’improvisation que dans le contrôle de la situation. Ceci n’aide pas les tunisiens à avoir plus de visibilité, et créé ainsi une situation de confusion anxiogène.
Les médias et les journalistes, quant à eux, ne représentent toujours pas une source d’informations fiable aux yeux de la majorité, non seulement pour la qualité de leurs prestations qui reste en dessous des attentes, mais également pour la réputation de médias affiliés à l’ancien régime qu’on leur connaît, ou du moins pour leur manque d’indépendance et d’objectivité.
La transition est d’autant plus rude pour la Tunisie que les défis auxquels elle doit faire face durant cette phase sont nombreux, difficiles à relever, mais pas insurmontables.
Réussir la transition démocratique dépendra d’abord de la capacité des nouveaux gouvernants à gérer l’impatience de la rue et à canaliser les manifestations d’un grand nombre de citoyens qui, même s’ils ont des aspirations légitimes dans la majorité des cas, ne peuvent trouver satisfaction immédiate à leurs revendications matérielles, de vengeance, de justice et de réparations de toutes sortes. L’actuel gouvernement n’y arrivera certainement pas seul, et sa capacité à relever ce défi dépendra de son aptitude à travailler en bonne intelligence avec la société civile qui a un véritable rôle d’écoute et d’accompagnement à jouer, le temps que les commissions d’enquête et que la justice jouent leurs rôles respectifs. Il est fort probable que ces phénomènes de surenchère et de déchainement des passions se prolonge dans le temps si les populations ne reçoivent pas de réponses rapides et de nature à les faire patienter.
Le deuxième défi se rapporte à la crise de confiance et de légitimité que rencontre actuellement ce gouvernement de transition, le même qui est sensé entamer le processus de démocratisation du pays par l’organisation d’élections dans les prochains mois. La rue tunisienne a montré à plusieurs reprises, notamment lors de la constitution de la première équipe gouvernementale et de la nomination des nouveaux gouverneurs, qu’elle s’oppose fermement à toute forme de continuité avec l’ancien régime. Pris entre deux impératifs, celui de répondre aux expressions de mécontentement et de relancer la machine étatique pour faire avancer le pays et atteindre son objectif, le gouvernement de transition semble privilégier une approche pragmatique en assumant des décisions qui déplaisent, et qui parfois sont prises un peu trop rapidement pour faire avancer les choses, tout en donnant des gages de confiance par des actions fortes mais qui restent symboliques si elle ne sont pas concrétisées, comme la promesse de dissoudre le RCD ou la ratification de conventions internationales importantes sur le volet des droits de l’homme.
Le troisième défi concerne moins le gouvernement de transition que les (centaines de ?) milliers de personnes qui profitaient d’une façon ou d’une autre de l’ancien régime et qui, du jour au lendemain, se sont retrouvées privées de leur position sociale, de leurs privilèges ou de leur situation de rente. Cette catégorie de personnes, composée de cadres du RCD, de cadres administratifs, d’hommes d’affaires, d’avocats, de juges, de médecins, de cadres associatifs, etc. se tait et fait profil bas pour le moment préférant observer le déroulement des évènements. Ces personnes n’ont à priori rien à gagner d’un changement radical du système politique en Tunisie. La question est de savoir comment vont-ils réagir avec le temps et l’évolution de la situation du pays : vont-ils finir par se «normaliser» ou peuvent-ils resurgir à un moment de crise ou d’instabilité traversé par le pays pour tenter de retrouver leurs avantages perdus? Seul l’avenir nous le dira…
(Source : le blog de « Carpediem » (Tunisie), le 09 février 2011)
Lien :http://carpediem-selim.blogspot.com/
Interview : Questions à Michel Camau, professeur émérite des Universités françaises et grand ami de la Tunisie
“La Révolution tunisienne : une accélération de l’Histoire”
Entretien conduit par Khaled Guezmir –
Q- Vous étiez révolté et même indigné par les atteintes aux droits de l’Homme en Tunisie et la cruauté du général Ben Ali dans sa répression de l’opposition démocratique et islamique en Tunisie… Mais pensiez-vous qu’il était possible de mettre fin au despotisme en Tunisie ? Si vite…
R- J’ai essayé dans mes écrits de traduire cette indignation à travers une analyse de la domination autoritaire, de ses ressorts nationaux et internationaux. L’ouvrage que j’ai publié avec Vincent Geisser en 2003 (Le syndrome autoritaire), ainsi que des articles ultérieurs (comme par exemple, « Vingt après. De quoi Ben Ali est-il le nom ? ») s’inscrivaient dans une telle perspective, où l’approche « scientifique » revêt nécessairement une dimension politique : le travail d’objectivation suppose d’appeler un chat un chat.
Si j’avais cru à l’impossibilité d’une sortie des années noires, je n’aurais pu écrire une seule ligne. Néanmoins, je dois avouer que j’étais loin d’imaginer que le peuple tunisien parvienne en un laps de temps aussi bref à chasser Ben Ali, qui incarnait un régime liberticide et corrompu. L’immolation de Mohamed Bouazizi, le « nous n’avons plus peur ! » des jeunes et moins jeunes exposés à la répression sanglante et la vague déferlante débouchant sur le décisif « dégage ! » ont scandé, en quatre semaines, une accélération de l’histoire. Celle-ci a pris de courte non seulement la coalition dirigeante mais également… les analystes. Sans doute, certains d’entre eux avaient-ils entrevu un champ du possible, notamment depuis la révolte de Gafsa. Mais plutôt que d’entrer dans un tel débat, permettez-moi de donner à cet entretien un tour plus personnel, faisant place à l’émotion. Durant ces semaines, j’ai passé tout mon temps sur l’Internet en quête de nouvelles; j’étais dans l’incapacité de me livrer à une activité routinière et n’avais de cesse que de pouvoir me rendre chez vous en Tunisie. Il me fallait vivre ce moment historique et partager la joie, la fierté et les aspirations de nombreux amis tunisiens.
En effet, j’ai longtemps travaillé dans ce pays ; à un degré infiniment moindre mais néanmoins réel j’ai ressenti, durant les années 1990, ce que les Tunisiens éprouvaient eux-mêmes : l’omniprésence des portraits et de la propagande imposant le silence dans l’espace public, la surveillance policière dans la rue, les hôtels et les réunions, les mises sur écoute… Pour tout dire, lorsque je suis revenu chez moi, en France, j’étais devenu quelque peu paranoïaque, alors même que, contrairement à beaucoup de Tunisiens, je n’avais personnellement encouru aucun risque sérieux.
Q- Pouvez-vous nous situer la Révolution tunisienne du « jasmin » dans le contexte régional et mondial et peut-elle avoir un impact sur les stratégies de l’Occident vis-à-vis du monde arabo-musulman ?
R- J’éprouve quelque réticence à parler de « jasmin», dont il était question en 1987, et qui évoque plus Sidi Bou-Saïd que Sidi-Bouzid. Votre question n’en est pas moins importante : elle comporte d’ailleurs deux volets. La « Révolution de janvier » présente la particularité d’être la première dans la région maghrébine et moyen-orientale à poser la question d’un changement de régime et non pas seulement un aménagement d’un régime existant. D’autre pays, tel le Maroc, ont connu une « ouverture démocratique » par le haut. Ici, c’est un mouvement populaire qui aspire et pousse à une transformation en termes de qui gouverne ? Sur quelles bases ? Et au service de qui ? La situation en Egypte présente quelques similitudes mais s’avère plus complexe compte tenu de la configuration de la coalition au pouvoir et de sa relation organique avec l’armée. Pour autant que l’on puisse en juger, elle semble s’orienter vers une « ouverture démocratique ». En Tunisie, la conjoncture s’avère plus fluide si l’on considère les concessions successives du gouvernement transitoire. Toutefois rien n’est encore joué. La liberté d’expression est déjà une conquête inestimable. Mais elle ne constitue qu’un premier pas. La révolution dans un seul pays ? L’interrogation n’est pas dépourvue de lien avec le second volet de votre question. les USA et les pays européens sont confrontés aux contradictions de leurs stratégies, écartelés entre la promotion de la démocratie et la recherche de la stabilité. En eux-mêmes, les deux termes ne sont pas incompatibles ; bien plus, il est permis de considérer que la stabilité passe par la démocratisation. Tout le problème vient de ce que les puissances sont enclines à considérer que la démocratisation, dans un premier temps, peut menacer la stabilité. Du moins, jouent-elles dans le sens de « l’ouverture démocratique », autrement dit, l’aménagement des régimes et non le changement de régimes. Encore convient-il de distinguer entre l’Egypte et la Tunisie. Dans un cas, les puissances ont pour nom les USA et dans l’autre l’Union européenne ; L’Egypte comme on le sait, est un pivot stratégique dans la politique des USA au Moyen-orient. La relation avec Israël et la Palestine en constitue l’un des principaux enjeux et à ce titre, du point de vue américain, une limite infranchissable par « l’ouverture démocratique ». En la matière, l’Europe se contente de suivre. Il en va différemment pour le Maghreb en général et la Tunisie en particulier, qui constituent une zone de proximité de l’Union européenne. Ainsi, que j’ai déjà eu l’occasion de l’écrire, l’Union n’a cessé de faire prévaloir ses préoccupations sécuritaires liées à l’islamisme politique, au terrorisme et à la pression migratoire subsaharienne. Les coopérations en ces domaines avec la rive sud de la Méditerranée se sont traduites par la mise en place d’un régime transnational de surveillance, propice à la longévité des autoritarismes. C’est toute sa stratégie de voisinage avec le Maghreb que l’Union européenne devra reconsidérer si elle est véritablement désireuse de voir la démocratie s’épanouir en Tunisie et dans les pays limitrophes, dont dépend en partie son approvisionnement énergétique.
Q – Que doivent faire à votre avis la France et l’Europe pour (j’allais dire se racheter) aider la Tunisie dans ces moments si difficiles pour la reprise économique ?
R – L’une des premières choses à faire, et cela semble en bonne voie, est la reconnaissance du « statut avancé » de partenariat que l’Union européenne négociait déjà avec le gouvernement Ben Ali. Simultanément, la Tunisie est en droit d’attendre une aide consistante pour aborder de front les problèmes cruciaux du développement régional et du chômage des jeunes. Une telle aide ne se résume pas à la dimension financière, condition nécessaire mais non suffisante. Elle suppose également une remise en cause d’une conception de la démocratie et de la « gouvernance » qui postule une réduction du rôle de l’Etat. Pour prendre à bras le corps les problèmes la logique du marché a montré ses limites. Une intervention soutenue de l’Etat, d’un Etat démocratique, est indispensable.
Q – Tout le monde parle du danger « islamiste » mais personne par peur d’être taxé d’antisémite ne parle d’Israël et de sa politique agressive d’occupation illégale et illégitime de la Palestine depuis 1947, qui nourrit bien des sentiments de frustration et pousse à l’adhésion des jeunes du monde arabe aux mouvements islamistes… Qu’en pensez-vous ?
R – La question israélo-palestinienne s’avère effectivement le point aveugle de la politique des puissances occidentales. De manière caricaturale, je dirais que l’Union européenne finance des projets en Palestine, que l’aviation israélienne bombarde, sans que les dirigeants européens n’osent élever le ton. Sur cette question, ils sont à la traîne des USA, qui se montrent dans l’incapacité de peser sur la politique israélienne. Les reculs de l’administration Obama sont révélateurs de cette impuissance. Le gouvernement israélien se livre à une mainmise sur Jérusalem, à un mitage du territoire de la Cisjordanie et au siège de la bande de Gaza sans rencontrer de véritable résistance de la part des puissances. Il est certain que cette situation ne peut nourrir le désespoir, l’indignation et la dénonciation du double langage des Etats démocratiques tant chez les Palestiniens que les jeunesses arabes. Comment expliquer ce point aveugle ? Sans doute, le continent européen ne s’est-il pas remis d’avoir été le théâtre du génocide du peuple juif. Plus exactement, ses dirigeants sont sensibles aux amalgames entre toute critique de la politique israélienne et l’antisémitisme. Mais il convient d’éviter toute généralisation. Dans les Etats européens et au sein de leurs diplomaties, la ligne de conduite israélienne n’est pas exempte de critiques. Mais en tout état de cause l’Europe ne pèse que peu de poids au Proche-Orient, s’alignant peu ou prou sur les USA et s’en remettant à ceux-ci pour la prise d’initiatives. Les Etats-Unis ont tout intérêt à un règlement de la question israélo-palestinienne qui entrave leurs relations avec l’ensemble de la région. Mais à bien des égards cette question interfère avec leur politique intérieure. Le président doit compter avec les Congrès où toute inflexion est passible de critiques au nom de la « sécurité » d’Israël. L’accent donné par le gouvernement israélien à la « menace iranienne » n’est pas de nature à y favoriser des avancées.
Q- Israël a-t-il intérêt à faire la paix maintenant?
Très certainement, et ce d’un double point de vue démographique et politique. La démographie joue à l’encontre d’un « Grand Israël ». Si Israël veut conserver son peuplement majoritaire juif, il lui faudra bien renoncer aux Territoires. La seule alternative serait un Etat binational, sauf à cantonner la population palestinienne dans un statut de seconde zone. Bien des Israéliens en sont conscients, qui ont fait de « la paix maintenant » leur mot d’ordre. Si l’on en juge d’après les résultats électoraux, ils ne sont pas majoritaires. Et pourtant, le temps presse, si la politique d’annexion se poursuit, il n’y aura bientôt plus d’espace pour un Etat palestinien viable et vivable. L’idée de « l’encerclement » qui inspire une grande partie de la classe politique israélienne risquera alors de s’avérer une prophétie auto-réalisatrice, lourde de conséquences catastrophiques pour les peuples de la région.
Q- Un mot pour la fin : que conseillez-vous aux Tunisiens pour faire en sorte que la démocratie soit irréversible ?
R – Je ne vois pas au nom de quoi je serais habileté à donner des « conseils » aux Tunisiens. Non seulement, je n’ai aucun titre à faire prévaloir en cette matière mais encore ils n’ont pas besoin de conseils. Tout au plus, puis-je émettre une opinion, qui n’engage que moi. Je pense que la fuite de Ben Ali et autres Trabelsi a été un grand moment plus que salutaire. Le temps de la justice viendra pour décider des qualifications et responsabilités pénales. Mais la focalisation sur les méfaits d’un individu et de ses acolytes pourrait, si l’on n’y prend garde, s’avérer l’arbre qui cache la forêt. Si j’ai bien compris, c’est à un changement de régime qu’aspire la majorité des Tunisiens, au-delà de la mise à l’écart d’un satrape et des acolytes. Une constellation de pouvoirs ne se résume pas à une tête et à des hommes ou femmes mais met également en jeu des formes de relations sociales et politiques, pour ainsi dire des « choses »
K.G
NB : Michel Camau a vécu de près la révolution tunisienne, il vient de participer à une table ronde à l’Institut de Recherche sur le Maghreb Contemporain
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Qui est Michel Camau ?
Michel Camau est professeur émérite des Universités (science politique) françaises
Il a dirigé l’Institut d’Etudes et de Recherches sur le Monde arabe et musulman (IREMAM) d’Aix-en-Provence et l’Institut de Recherche sur le Maghreb Contemporain (IRMC) de Tunis.
Ses travaux portent sur la question de l’autoritarisme et de la démocratie, ainsi que sur ses occurrences dans le monde arabe.
Parmi ses ouvrages :
Michel Camau, Gilles Massardier, dir. Démocraties et autoritarismes. Fragmentation et hybridation des régimes, Paris, Karthala, 2009.
Michel Camau, Vincent Geisser, dir., Habib Bourguiba, La trace et l’héritage, Paris, Karthala, 2004.
Michel Camau, Vincent Geisser, Le Syndrome autoritaire. Politique en Tunisie de Bourguiba à Ben Ali, Paris Presses de Sciences-Pro, 2003.
Michel Camau, dir., Sciences Sociales, Sciences Morales ? Pratiques et itinéraires de recherche. Tunis, IRMC- Alif les Editions de la Méditerranée, 1995
Michel Camau, Hédi Zaïem, Hajer Bahri, Etat de Santé. Besoin médical et enjeux politiques en Tunisie, Paris, Editions du CNRS, 1990 (collection Sociétés arabes et musulmanes).
Michel Camau, La Tunisie- Paris, Presses Universitaires de France, 1989 (Collection Que sais-je ?)
Michel Camau, dir., Tunisie au Présent. Une modernité au-dessus de tout soupçon ?, Paris, Editions du CNRPS, 1987 (collection Connaissance du Monde Arabe)
Michel Camau, Fadila Amrani, Rafaâ Ben Achour, Contrôle Politique et Régulations Electorales en Tunisie, Tunis/Aix-en-provence : CERP/Edisud, 1981.
Michel Camau, Pouvoir et institutions au Maghreb, Tunis, Cérès Editions, 1978 (Collection Horizon Maghrébin).
(Source : « Le Temps » (Quotidien – Tunis), le 10 février 2011)
Tunisie. Ennahdha est-il un ennemi de la démocratie ?
Amel Benammar Elgaaied
Dans cette tribune, Amel Benammar Elgaaied, professeur universitaire, émet des doutes sur les velléités démocratiques du mouvement islamiste Ennahdha et exige de ses leaders plus que des déclarations d’intention.
Je suis une simple citoyenne d’un certain âge et n’appartiens à aucun parti politique. Tout comme chaque tunisien aujourd’hui, j’ai un avis sur la politique sans plus.
Mais l’interview de Rached Ghanouchi, il y a quelques jours, sur la chaîne Nessma TV m’a fait sortir de mes gonds. Je ne sais pas quel jeu joue cette chaîne pour nous faire avaler l’impensable. Ce monsieur s’est présenté comme un démocrate ami de la révolution et respectueux des droits des femmes. Quelle hypocrisie!
Il ne suffit pas de se déclarer islamiste modéré
On se pose la question si le journaliste qui a réalisé l’interview est un sympathisant d’Ennahdha ou d’une grande incompétence. Les questions étaient soft et aucune qui fâche comme le port du voile et de la burqua, la charia, le terrorisme au nom de l’islam, le travail des femmes, l’adoption, bref la conception des islamistes de la vie familiale, sociale et économique, n’a pas été abordée.
Il ne suffisait pas de dire nous voulons un islamisme modéré, il fallait se démarquer et même dénoncer toutes ces atteintes à la liberté, à la dignité humaine et à la vie au nom de l’islam.
Jouer uniquement sur le sentiment religieux sans aborder ces questions est foncièrement malhonnête, parce qu’il y a une volonté de tromper le peuple sur les véritables enjeux et intentions, l’objectif ultime étant d’attirer des sympathisants pour atteindre le pouvoir que le mouvement Ennahdha brigue sans s’en cacher.
Se présenter aussi comme victime, pour se donner une légitimité et récupérer les avantages d’une révolution à laquelle le mouvement islamiste n’a aucunement participé, relève d’un manque de décence évident.
Martyrs ou bourreaux de la liberté?
Bien sûr, nous savons que les islamistes ont été emprisonnés et torturés, et par principe, il faut dénoncer ceci au nom de la liberté d’expression et du droit à la dignité de chacun. Mais si ceci est notre attitude face aux islamistes, il n’est pas dit qu’eux respecteraient ces principes s’ils avaient le moindre pouvoir.
Il est de notre devoir de faire parvenir notre voix pour dire que nous devons considérer les islamistes comme les ennemis de la démocratie. Pour les jeunes qui n’ont pas vécu durant les années 80, nous devons dire que certains islamistes promettaient la mort à ceux qui ne partageaient pas leur idéologie et qu’ils considéraient de gauche ou athées. Nous devons aussi dire que les points essentiels de leur mouvement sont relatifs aux femmes qu’ ils ne voit au fond que comme un objet de plaisir et de désir à un point tel qui relève de l’obsession sexuelle.
C’est parce-que les Tunisiens se sont sentis menacés dans leur droits les plus élémentaires par l’idéologie intégriste qu’ils ont accepté le pouvoir de Ben Ali. Ceux de mon âge, qui étaient un tant soit peu informés, savaient que Ben Ali encore ministre de l’Intérieur était loin d’être un ange. Lorsqu’il a pris le pouvoir, j’ai été de ceux qui disaient que nous allions donner une carte de blanche pour la dictature. Mais c’était ça ou l’intégrisme et les Tunisiens ont préféré accepter une des pires dictatures de ce siècle à l’idéologie intégriste. Et pour cela en tant que Tunisienne, je ne peux vous le pardonner.
Alors, assumez devant l’histoire l’impact néfaste de votre mouvement sur notre peuple et limitez vous maintenant à vos prières. Vous en avez bien besoin pour laver les péchés que vous avez commis l’encontre des Tunisiens et des Tunisiennes et contre le progrès de notre pays.
(Source : « Kapitalis.com » (Tunis), le 10 février 2011)
Tunisie: précisions suite à l’article sur Marouane Mabrouk
Par MOHAMED HAMZA LAKHOUA
Espace Manager a été censuré en Tunisie le 25 décembre 2010 et n’a retrouvé sa liberté que le 13 janvier 2011 vers 21 heures, soit une demi-heure après le dernier discours de l’ancien Président Ben Ali. Depuis le 14 janvier 2011, Espace Manager a non seulement été libéré de la censure mais avait aussi la possibilité d’aller dans le sens de la stigmatisation de la famille régnante (c’était la tendance et ça l’est encore) chose que nous avons refusé, évitant ainsi de nourrir les fantasmes populaires. Seulement voilà, en acceptant de publier un article intitulé «Marouane Mabrouk aurait ramené un conseiller en communication à Ben Ali » je me rends compte que Espace Manager est tombé aussi bas que ceux qui insultent à tort et à travers la famille régnante. Bien que le contenu de l’article soit sans équivoque (tenant sa source de Mediapart) expliquant que Ben Ali fut conseillé par M. Hakim El Karoui pendant les derniers jours de son règne, le titre choisi était provoquant voire même méchant. Pour dire vrai, ce n’était pas du tout notre intention d’être méchant, et peut-être que la course à l’audience y était un peu pour quelque chose, mais ne pouvait en aucun cas justifier ce comportement irresponsable dont j’ai fait preuve en acceptant la publication de ce papier avec un tel titre. Une manchette qui pourrait porter préjudice à M. Marouane Mabrouk ainsi qu’à tout le groupe Mabrouk. En effet, depuis la chute du régime Ben Ali, le groupe Mabrouk, comme un certain nombre d’autres groupes, est attaqué de partout pour la seule et unique raison que l’un de ses actionnaires, en l’occurrence Marouane Mabrouk, est marié à la fille de Ben Ali. A ce propos Je profite de ce papier pour m’excuser auprès de tout le groupe Mabrouk qui, rappelons-le, a fait ses preuves bien avant l’arrivée de Ben Ali au pouvoir. Enfin, je tenais à préciser que je ne me serais jamais excusé si Ben Ali était encore au pouvoir et me serais limité à dépublier l’article. Autre remarque importante, et dans un réflexe d’autocensure auquel nous étions habitué (et sans que personne ne nous fasse pression) nous avons dépublié l’article pendant quelques heures avant de le republier (en changeant le titre provocateur). Quant à ce Mea Culpa, nous rassurons nos chers lecteurs que cette démarche est totalement indépendante et n’a rien avoir avec des éventuels contrats publicitaires avec le groupe Mabrouk. Croyez-moi, JE NE VENDRAI JAMAIS MON AME NI MES VALEURS.
Source : « Espace Manager » Le 10-02-2011
Quel avenir pour la Tunisie ?
INTERVIEW – Mohamed-Chérif Ferjani, politologue, spécialiste de l’Islam et du monde arabe tente de répondre à cette question pour Lyon Capitale. Né en Tunisie, il est professeur à l’Université Lyon 2, chercheur à la Maison de l’Orient et de la Méditerranée. Ancien prisonnier politique en Tunisie de 1975 à 1980, il est membre fondateur de la section tunisienne d’Amnesty International. Lundi 7 février, il donnait une conférence à l’Université Lyon 3 sur le thème : “La Tunisie aujourd’hui et demain ?”.
Lyon Capitale : Quel est votre point de vue sur les événements qui se sont déroulés récemment en Tunisie ?
Pour moi, ce qui se passe en Tunisie est un événement historique important qui suscite beaucoup d’espoir pour les Tunisiens et pour toute la rive Sud de la Méditerranée, voire le reste du monde. C’est d’autant plus important que tout le monde, en Tunisie comme ailleurs, a intégré l’idée que le système de Ben Ali était trop fort pour être renversé. C’est donc un grand soulagement pour le peuple tunisien.
La partie est cependant loin d’être jouée et pour tourner définitivement la page de la dictature et instaurer la démocratie, la Tunisie va devoir affronter d’autres défis. Malgré la fuite de Ben Ali et de beaucoup des membres de sa famille, malgré l’arrestation ou la mise en résidence surveillée de ses proches qui n’ont pas pu quitter le pays à temps, malgré le début du démantèlement du Parti-Etat comme rouage principal de la dictature, le limogeage ou la mise à la retraite de ministres, de gouverneurs, de haut gradés de l’administration et de la police trop liés au système déchu et considérés comme un obstacle à la réalisation des objectifs de la révolution, voire comme une menace à la sécurité de pays, et malgré les différentes mesures prises par le gouvernement de transition, il reste encore des obstacles à franchir pour atteindre les objectifs de cette révolution.
Quel avenir se dessine selon vous pour la Tunisie ?
Le démantèlement des rouages de la dictature, avec la dissolution du RCD (parti de Ben Ali), est bien entamé ; mais l’essentiel reste à faire pour instaurer la démocratie. Les prochaines élections présidentielles , dans 6 mois auront lieu trop tôt selon moi, car beaucoup de partis étaient jusqu’ici muselés comme toutes les expressions autonomes de la société. Il faut que les expressions sociales et politiques aient le temps de s’organiser, d’élaborer des programmes, de confronter leurs projets, de les faire connaître pour que la population sache pour qui et pour quoi elle va voter. La Tunisie est actuellement dans une période de transition où tout reste à faire, que ce soit au niveau des institutions, des programmes politiques ou encore du code électoral sur la base duquel les élections seront organisées.
Quelles sont les revendications de la population tunisienne ?
Le mot d’ordre principal du soulèvement était : Travail/ Liberté/ Dignité. Pour ce qui est de la Liberté, durant cette période de transition, nous assistons à une reconnaissance des partis politiques qui ont demandé à l’être, le pluralisme politique associatif et médiatique est en passe de devenir une réalité. De même, le gouvernement a ratifié des conventions internationales concernant les droits humains (abolition de la peine capitale, de la torture et des traitements dégradant pour la dignité humaine, adhésion à la création du tribunal pénal international), levé les réserves de la Tunisie sur la convention relative à l’élimination des discriminations à l’égard des femmes (comme l’inégalité en matière d’héritage ou l’interdiction du mariage entre une femme musulmane et un homme non-musulman) ; ce genre de mesure donne une orientation démocratique à l’évolution de la situation et est malheureusement peu médiatisé.
En ce qui concerne la dignité, les Tunisiens ne supportent plus l’arrogance de la police et de l’administration dont les attitudes reproduisent celles de l’ancien système. Des personnes sont mortes sous la torture et brûlées dans un commissariat de police. Dans plusieurs endroits, on continue à traiter la population avec mépris. Des émeutes continuent à éclater partout pour dénoncer ces pratiques. Les Tunisiens veulent être traités avec dignité.
Que doit faire le peuple selon vous dans cette période de transition ?
Il était déjà nécessaire avant de virer certains cadres et agents de la police. Les manifestations étaient, au départ, pacifiques, mais elles sont aujourd’hui souvent violentes à cause de l’attitude de la police et de certains responsables de l’ancien Parti-Etat qui continuent à agir comme par le passé. On ne peut pas exclure une part de manipulation de ces responsables envers la population pour engendrer des émeutes afin de créer le chaos. Le but, pour ces opposants à la révolution, étant de restaurer la dictature et de détourner le mouvement de son orientation démocratique. La population a raison de réagir contre les pratiques de la police et des responsables du RCD.
Que doit faire le gouvernement actuel selon vous ?
Le gouvernement de transition n’a pas le droit de prendre prétexte des agissements qui sont à l’origine des émeutes pour restreindre la liberté d’expression. Il doit permettre la libre expression de toutes les opinions, par tous les moyens légaux, y compris par des réunions et des manifestations publiques, et cela pour celles et ceux qui le soutiennent, comme pour celles et ceux qui contestent, à tort ou à raison, sa légitimité. Pour ce qui est du travail, les pouvoirs publics doivent avoir comme priorité de préserver les emplois existants et créer, au plus vite, de nouveaux emplois, notamment pour les jeunes et dans les régions défavorisées d’où est parti le soulèvement qui a conduit à la chute du régime de Ben Ali.
Est-ce que les propositions des politiques tunisiens en place vous semblent cohérentes ?
L’un des ministres reconduit, et réputé pour être intègre et compétent, avait déjà présenté un plan dans lequel se retrouve beaucoup de ces propositions syndicales et de l’opposition. Ce plan a été écarté d’un revers de main car jugé trop coûteux ! On n’a vu que ce plan risquait d’enlever à la mafia son pouvoir sans tenir compte du coût social et politique de ce rejet. L’Etat doit reprendre l’initiative, renoncer à son désengagement, favoriser l’implantation d’entreprises et d’activités économiques pourvoyeuses d’emplois, et donner l’exemple en consacrant une part plus importante de ses investissements à ses objectifs. Mais, en raison des difficultés inhérentes à la conjoncture actuelle, et de l’urgence d’une politique prenant en compte les espoirs de la population, on ne doit pas courir le risque de décevoir encore une fois. Tous ceux qui veulent et qui ont intérêt à voir une démocratie s’instaurer sur la rive sud de la Méditerranée, doivent y contribuer. Que peut faire la France pour aider à la reconstruction économique et sociale de la Tunisie ?
La France et les pays européens, qui ont eu tort de porter à bout de bras la dictature corrompue de Ben Ali, ont là une occasion de se racheter, en apportant leur aide à la réussite de la révolution démocratique en Tunisie. Les états européens ont gelé les avoirs de Ben Ali et de sa famille proche (estimés par Forbes à au moins 5 milliards de dollars, l’équivalent du budget tunisien). C’est une enveloppe assez importante pour garantir une aide substantielle à la Tunisie dans l’effort qui doit être consacré à la création d’emplois. Le manque d’emplois risque en effet d’aggraver la crise sociale et de compromettre les espoirs démocratiques. La France et l’Europe disent vouloir aider la Tunisie ; il faut que les actes suivent le discours. Par comparaison à la Tunisie, pensez-vous que les Marocains respectent leur roi Mohammed VI ? Au Maroc, le système est différent. Les structures traditionnelles n’ont pas été démantelées et continuent à fonctionner. Il existe une certaine forme de liberté d’expression à la différence de la Tunisie. Par exemple, les chômeurs peuvent parler librement et sont rassemblés dans des associations indépendantes du gouvernement. Il n’y a pas un vide entre le pouvoir et la société. Le pluralisme syndical et associatif existe et c’est très important car il permet de faire le relais entre le pouvoir et la population. Le chômage existe ainsi que des disparités socio-économiques importantes, mais contrairement à la Tunisie, les Marocains accèdent à la liberté d’expression, ce qui permet de tempérer la crise. Au contraire, en Tunisie, tout passe par l’Etat et rien ne se fait encore en dehors de l’Etat.
Source : « Lyon Capitale » Le 10-02-2011
Tunisie : le rôle complexe et déterminant de l’armée
Par Pierre Robert Baduel, directeur de recherche honoraire en sociologie politique au CNRS (Tours
C’est la presse qui a mis en exergue le rôle décisif de l’armée dans la chute deBen Ali en Tunisie. Le refus du généralRachid Ammar d’obtempérer aux ordres de Ben Ali a incontestablement été déterminant dans cet aboutissement du mouvement populaire. A partir de ce refus de toute intervention contre la révolte populaire qui, en ajoutant aux moyens de répression de la police et des milices, eut fait des forces armées de simples supplétifs de la police, il était clair que cette division des forces au sommet du pouvoir devait bénéficier provisoirement à la rue mais elle ne s’est pas faite sans calcul.
Quel était ce calcul possible et en quoi peut-on dire que cette dissidence de l’armée a bénéficié à la rue ? En n’obtempérant pas aux ordres du président, la hiérarchie militaire n’est pas devenue pour autant une alliée “subjective” de la rue. Le refus du général Ammar résulte sans doute d’une analyse du champ de bataille et de calculs. Cette dissidence ferme mais feutrée est d’abord une fracture dans l’oligarchie au pouvoir dont un groupe, pas seulement de militaires sans doute, a su intelligemment instrumentaliser la rue pour éliminer la fraction la plus compromise de l’oligarchie et ainsi s’est doté des moyens de faciliter dans l’immédiat la reprise du pouvoir par la fraction la plus présentable de cette même oligarchie (ainsi, si, d’après les révélations de Wikileaks, la diplomatie américaine accusaitAbdelwahab Abdellah, ministre des affaires étrangères pendant trois ans, de blocage dans l’accès au gouvernement, elle appréciait les manières plus conciliantes de son successeur,Kamel Morjane, maintenu dans le premier gouvernement de transition). Est-ce un hasard que la communication de ces informations sur le rôle de l’armée à la presse française et espagnole ait été faite par l’amiral Lanxade, ambassadeur de France en Tunisie sous Mitterrand (ce qui peut laisser croire à des connivences militaires extérieures) ? Mais en complicité “d’ordre”, l’amiral a présenté ce rôle très positivement. L’armée tunisienne serait-elle républicaine d’esprit ou l’a-t-elle été de circonstance ?
Ne faut-il pas faire l’hypothèse que les événements se sont déroulés de façon plus complexe et réaliste que ce qui est relaté, même si les calculs n’ont pas été sur le moment nécessairement clairs mais résultèrent pour une part d’une intuition sûre, ou plus simplement d’un pari ? D’une certaine manière on pourrait penser que la rue a bénéficié collatéralement de la position de l’armée. Parce qu’on peut aussi analyser la situation en estimant que l’armée a facilité la fuite de Ben Ali, voire a été complice de son évasion, en laissant ouvert l’espace aérien jusqu’après l’envol tranquille du président toujours en titre, pendant qu’avec son appui les proches de Ben Ali instrumentalisaient le vide juridique laissé par ce départ de Ben Ali dont l’exercice de la présidence selon le mot de Mohamed Ghannouchi n’était qu'”empêché”. L’invocation de cet empêchement a justifié l’assurance de l’intérim par le premier ministre en exercice puis que, Ben Ali étant en sécurité en Arabie Séoudite et seulement alors (pendant tout ce temps il continuait à bénéficier théoriquement des prérogatives internationales d’un chef d’Etat), selon un scénario bien élaboré, la présidence soit déclarée vacante.
L’ARMÉE S’EST MISE EN POSITION DE RECOURS
Alors, avec la connivence d’un Conseil constitutionnel constitué d’hommes du président en fuite, le président du Parlement, Fouad Moubaza, un vieil homme à la personnalité incertaine, pouvait reprendre constitutionnellement la présidence par interim à Ghannouchi, qui conservait tout aussi constitutionnellement – une fiction juridique utile mais concrètement un ordre strictement benaliste – les fonctions de premier ministre et renommait dans le gouvernement d’union nationale des ministres importants du dernier gouvernement de Ben Ali. Le tout s’est déroulé sous la vigilance, en fait à l’abri de l’armée qui, en refusant d’appuyer la police et les milices, a certes été un allié objectif de la rue mais en même temps a soustrait Ben Ali à toute justice (un procès n’aurait arrangé personne de l’ancienne oligarchie, y compris militaire), permis la conservation du pouvoir par une fraction de l’ancienne oligarchie et aussi réglé ses comptes avec la police dont la prééminence sur l’armée ne date pas de Ben Ali, mais remonte à Bourguiba, dont l’Etat, par-delà de nombreuses qualités, était aussi un système policier, comme s’en souviennent à l’extrême gauche les “perspectivistes” et à l’extrême droite les islamistes.
En jouant ce rôle, l’armée s’est mise aussi en position de recours si un processus crédible de stabilisation politique n’aboutissait pas, si le désordre se poursuivait (le couvre-feu n’a pas semblé une mesure d’opérette), par un de ces retournements familiers dans l’histoire la société civile pouvant imaginer le général Ammar en homme d’ordre providentiel. Certes ce général dont on ne connaît pas grand chose pourrait avoir les qualités d’un Cincinnatus mais il pourrait aussi bien être tenté par l’aventure politique personnelle. Le coup d’Etat légal de Ben Ali ne fut-il pas déjà qualifié de “révolution du jasmin” ?
Tout dépend aujourd’hui des capacités à former des alliances crédibles et durables d’hommes et femmes de l’ancien régime pas corrompus, d’hommes et femmes de la haute administration, républicains marranisants qui ont servi l’intérêt général du pays dans des circonstances difficiles (j’en ai connu de remarquables), des syndicalistes, des hommes et femmes des partis d’opposition en état de marche et des forces civiles (ordre des avocats, association des femmes démocrates, ligue des droits de l’homme…), en sachant que la démocratie n’est pas l’unanimisme mais le débat et le compromis réglés. La course est désormais entre d’un côté l’incertitude et le désordre qui ne peuvent qu’être favorables au recours à un homme ou un corps providentiel et d’autre part les démocrates capables de former une alternative.
On doit espérer que ceux-ci l’emporteront, le destin proche de la Tunisie dépend de leur vertu (au sens de Montesquieu) à servir l’intérêt général et à dépasser leurs passions particulières.
Source: “Le Monde.fr” Le 10-02-2011
La nomination du nouvel ambassadeur de France en Tunisie est choquante
Par Charles Crettien, ancien ambassadeur de France et ancien conseiller culturel et de coopération à Tunis de 1978 à 1981
On ne nomme pas un ambassadeur comme on nomme un préfet. La diplomatie est un dialogue avec un pays étranger, son gouvernement et son chef d’Etat.La nomination de Boris Boillon comme ambassadeur de France en Tunisie par le conseil des ministres du 26 janvier est la négation de ce principe élémentaire, elle est donc choquante voire dangereuse pour les relations à venir entre Paris et Tunis.
Quand le gouvernement français envisage de nommer un nouvel ambassadeur dans un pays donné la première démarche est celle de la demande d’agrément. En clair, l’ambassadeur partant, ou le chargé d’affaires s’il n’y a pas d’ambassadeur en place, propose au ministre des affaires étrangères du pays auprès duquel il est accrédité le nom et le CV du diplomate proposé par Paris pour lui succéder. On attend l’accord des plus hautes autorités du pays étranger avant de proposer au conseil des ministres la nomination du nouvel ambassadeur. J’ai connu des cas où le pays étranger émettait des réserves sur le candidat désigné, on avait alors proposé un autre diplomate en mesure de mener un dialogue utile. Précisons qu’un dialogue ne veut pas dire l’approbation sans nuance de la politique menée dans le pays étranger.
Revenons àBoris Boillon.Il n’y avait pas encore de gouvernement à Tunis, le 26 janvier, puisque le remaniement réclamé par les Tunisiens n’était pas encore intervenu. A qui a-t-on demandé l’agrément pour Boris Boillon ? De plus, personne n’est en mesure de dire qui sera le chef de l’Etat tunisien demain, intérimaire dans un premier temps, définitif après les élections tunisiennes. Et si ce nouveau chef de l’Etat tunisien n’apprécie pas d’avoir comme interlocuteur français un diplomate dont on sait qu’il a défendu l’intervention américaine en Irak ! Passons sur son âge puisque sous M. Sarkozy l’expérience peut être acquise très tôt, surtout quand on a été un collaborateur du dit Nicolas Sarkozy au ministère de l’intérieur ! Et si le nouveau chef de l’Etat tunisien refusait, demain, de recevoir les lettres de créance de M. Boillon ?
La nomination précipitée à Tunis de ce diplomate venant de Bagdad où il n’était en poste que depuis 18 mois est encore une faute. Décidemment nous les accumulons avec ce pays et, surtout, nous mettons en danger les relations entre la France et cette Tunisie nouvelle que l’on devine déja au travers des soubresauts de la révolution du jasmin.
Source: ”Le Monde.fr” Le 10-02-2011
Tunisie: l’UGTT veut négocier vite
La principale centrale syndicale de Tunisie a appelé aujourd’hui le gouvernement à engager “rapidement” des négociations afin de résorber les tensions sociales qui secouent le pays depuis trois semaines, reconnaissant être désormais “débordée” par sa base. “Il est de l’intérêt du gouvernement d’engager rapidement des négociations avec la centrale syndicale car la situation sociale est explosive”, a dit un dirigeant de l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT). Abid Briki réagissait à la déclaration du président intérimaire, Foued Mebazaa, qui a annoncé mercredi soir l’ouverture “prochainement” de “négociations sociales à l’échelle nationale”. Des grèves organisées ou spontanées ont paralysé plusieurs secteurs économiques depuis la fuite du président Zine El Abidine Ben Ali le 14 janvier, et la grogne sociale continue de monter dans les catégories les plus défavorisées de la population. Le gouvernement de transition de Mohamed Ghannouchi a multiplié les appels à la population, avertissant que le pays risquait de “s’écrouler” si les débrayages massifs et manifestations parfois émaillées de violences se poursuivaient. “Il y a des réponses immédiates que le gouvernement peut apporter, à savoir la titularisation des centaines de milliers de contractuels qu’il faut intégrer dans les entreprises”, a dit Abid Briki qui a prôné également une réforme “radicale” de la législation du travail et un examen “sérieux” d’une vieille demande de la centrale syndicale pour la création d’une caisse de chômage. “Nous n’encadrons pas tous les mouvements de grèves”, a-t-il reconnu, interrogé sur l’ampleur de la contestation sociale auquel le pays est confronté.
Source : « Le Figaro » Le 10-02-2011
Tunisie- économie : difficile retour à la normale
Le gouvernement de transition Tunisien essaie de reprendre les choses en main pour accélérer le retour à la normale dans le pays. Si les réformes politiques et constitutionnelles en vue d’élections démocratiques doivent prendre du temps, il n’en est pas de même pour l’activité économique. La pression sociale se fait d’ores et déjà sentir avec les attroupements répétés de centaines de personnes à Tunis et dans d’autres régions pour réclamer du travail et des aides.
Le gouvernement offre aux personnes en situation précaire des aides de 30 à 150 dinars (15,5 à 78 euros). L’arrêt de l’activité économique et notamment touristique pèse de tout son poids sur les finances publiques. Le ministre du Développement régional, Nejib Chebbi évalue les pertes consécutives à la révolution du Jasmin à 4 % de PIB (environ 2,58 milliards d’euros). Toutefois, l’annonce le 9 février par le président intérimaire, Foued Mebazaa, de la prochaine ouverture de « négociations sociales à l’échelle nationale », quelques heures après avoir été investi de pouvoirs de crise, a permis de rassurer les partenaires européens. William Hague, le ministre britannique des affaires étrangères, s’est ainsi rendu à Tunis où il a promis un appui financier au pays. De son côté, le commissaire européen chargé de l’Elargissement et de la politique de voisinage, Stefan Füle, en visite au Maroc les 7 et 8 février, a parlé d’un plan d’aide destiné à permettre à la Tunisie de « faire face à ses nouveaux besoins ». Dans ce dispositif, la relance de l’activité touristique paraît être l’objectif le plus urgent. Ainsi responsables et professionnels tunisiens ont lancé des messages rassurants en direction des partenaires européens. Les voyagistes français, principaux pourvoyeurs de touristes vers la Tunisie hésitent encore. Cependant, les grands opérateurs britanniques (Thomas Cook, First Choice, notamment) ont répondu à l’appel en décidant de reprogrammer la Tunisie dès la fin février.
Source: “La letter Med” Le 10-02-2011
L’opposant Nejib Chebbi en tete d’un sondage d’opinions
Avec 8% d’intentions de vote, le chef historique du principal parti d’opposition tunisien, Ahmed Néjib Chebbi, arrive en tête d’un sondage d’opinions politiques, le premier du genre en Tunisie, réalisé par l’institut spécialisé “Sigma Conseil”. Mais près d’un mois après la chute du régime Ben Ali, “les trois-quarts des Tunisiens ne savent pas pour qui ils iraient voter”, relève les analystes du sondage.
Fondateur du parti démocratique progressiste (PDP), Ahmed Néjib Chebbi, un avocat de 64 ans, a un long parcours politique au cours duquel il a été emprisonné à plusieurs reprises. Sa candidature à la présidentielle avait été invalidée sous l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali.
M. Chebbi, ministre du développement régional et local dans le gouvernement de transition, recueille 8% d’intentions de vote, suivi du général Rachid Ammar, chef d’état-major de l’armée de terre (4,4. La popularité de ce général revient au “rôle majeur” qui lui est prêté dans “la révolution tunisienne” qui a conduit à la chute du président Zine El Abidine Ben Ali. Il avait été limogé pour avoir refusé de donner l’ordre à l’armée d’ouvrir le feu sur les manifestants.
L’actuel premier ministre Mohamed Ghannouchi vient en troisième position (3,7, tandis que le leader du mouvement islamiste “Ennahdha”, Rached Ghannouchi, rentré en Tunisie le 30 janvier 2011, après 23 ans d’exil en Angleterre, recueille, quant à lui, 1,6% d’intentions de vote.
L’opposant Moncef Marzouki qui envisage de se porter candidat à la présidentielle n’a recueilli que peu d’intentions de vote. Ancien président de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, il a dû s’absenter de la scène tunisienne depuis le milieu des années 90 pour fuir le harcèlement policier dont il faisait l’objet.
Cette enquête a été réalisée par téléphone du 30 janvier au 3 février 2011, sur un échantillon de 1.250 Tunisiens dans 24 des 26 gouvernorats (préfectures) que compte la Tunisie, “y compris Sidi Bouzid”, d’où est partie l’étincelle de la révolution, note le président de Sigma Conseil, Hassen Zargouni.
Des élections présidentielle et législatives doivent avoir lieu en Tunisie dans les six mois à venir, mais aucune date précise n’a été fixée jusqu’à présent pour ce scrutin censé être le premier réellement démocratique dans l’histoire du pays.
Par ailleurs, les deux tiers des sondés (68,7 font confiance au gouvernement de transition actuel, et 62,5% à son chef Mohammed Ghannouchi.
Concernant “les acquis de la révolution”, 81,8% des sondés déclarent qu’il existe aujourd’hui une vraie liberté d’expression et de manifestation, tandis que 54,9% pensent qu’il y a maintenant une vraie liberté d’association.
Mais le tiers des sondés ne se sentent pas en sécurité et 41,5% d’entre eux n’ont pas confiance en la police. Ce chiffre monte à 60% chez les 18-25 ans. Par ailleurs, 79,1% ont plus confiance en l’armée qu’en la police.
Sur un autre plan, 97,6% se déclarent optimistes quant à l’avenir de la Tunisie, même si les perspectives économiques pour 2011 ne sont pas perçues comme étant favorables.
Enfin, 90% des sondés estiment qu’Internet a été un acteur important dans la révolution, alors que 78,4% estiment que le rôle des médias étrangers a été “important”
Source: “Le Nouvel Observateur” Le 09-02-2011
Ben Ali : récit d’une fin de règne pathétique
À partir de témoignages, le Nouvel Observateur a reconstitué les dernières heures du dictateur déchu sur le sol tunisien. Scènes surréalistes d’un ancien puissant bousculé par sa femme haineuse et poussé à l’exil par les subterfuges de son entourage.
«Monte imbécile, toute ma vie il aura fallu que je supporte tes conneries !» Propos tirés d’une vulgaire scène de ménage au sein d’un vieux couple qui se déchire. Sauf que l’auteur de ces propos n’est autre que Leïla Trabelsi, et le vieux couple celui des Ben Ali, qui a présidé aux destinées de la Tunisie pendant plus de vingt ans. On savait que leur départ du pays, le 14 janvier en pleine révolte populaire,avait été précipité et peu glorieux. Les détails qu’en révèle cette semaine le Nouvel Observateur en brossent un tableau pitoyable et grotesque.
Un vieil homme hagard, gémissant, supplie sur le tarmac de l’aéroport de Tunis : «Laissez-moi, je ne veux pas y aller, je veux mourir ici dans mon pays». C’est Zine el-Abidine Ben Ali, le raïs déchu après avoir régné d’une main de fer sur la Tunisie pendant 23 ans. Ce vendredi 14 janvier, le roi est nu, il a perdu son royaume et c’est poussé par son chef de la police politique, le terrible Ali Seriati, qu’il monte dans un avion pour l’exil. «Bordel de Dieu, tu vas monter !», lui lance en le bousculant son compagnon de trente ans. Leïla Trablesi, qui ne pardonne pas à son mari d’avoir perdu un pays à la tête duquel elle se voyait lui succéder, ne retient plus le mépris qu’il lui inspire. Sur la passerelle menant à l’avion, la fille du couple Ben Ali, Halima, parachève le pathétique tableau d’un «Lâchez mon père, sinon je descend tous vous tuer».
«Tu vas me ramener en Tunisie après ?»
Ces détails d’une fin de règne, la journaliste du Nouvel Observateur les tient en partie d’un officier de l’armée convoqué pour escorter le président jusqu’à son avion. L’homme, écrit la journaliste, «a les larmes aux yeux quand il se rappelle ce moment d’histoire (…) Comme s’il était plus difficile d’accepter d’avoir vécu pendant toutes ces années sous le joug d’un lâche».
Comme les premiers témoignages l’avaient déjà révélé, le tyran ne voulait pas quitter son pays. Il ne l’a fait qu’à la faveur d’un subterfuge inventé par son entourage, lui promettant un retour triomphal, en sauveur, dans un pays à feu et à sang. Dans l’avion qui l’emporte vers une destination inconnue, le vieux tyran ne cesse, selon le témoignage du pilote, de se rendre dans le cockpit pour inlassablement répéter la même question : «Mon fils, n’est-ce pas que tu vas me ramener en Tunisie après ?». «Bien sûr», ment le commandant de bord. La suite de l’histoire, on la connaît, c’est un vagabondage aérien d’«Oscar Oscar», le nom donné à l’avion présidentiel. Annoncé pour Malte puis pour la France, il sera finalement dirigé vers Djedda, en Arabie saoudite,où Ben Ali s’est réfugié.
Quant à Leïla, conclut l’hebdomadaire, le rêve de l’ancienne «régente de Carthage» «est devenu un cauchemar qui a pris le visage d’un vieux despote aux cheveux teints, au visage botoxé, celui-là même qu’elle voulait évincer et dont il lui faut désormais, à jamais, partager l’exil».
Source: ”Le Figaro” Le 10-02-2011
Tunisie: arrestation d’un groupe armé dans le nord-ouest
Les forces de sécurité tunisiennes ont arrêté dans la nuit de mercredi à jeudi “un dangereux groupe de criminels armés” au Kef, à 160m de Tunis, a rapporté jeudi l’agence de presse officielle TAP.
Selon les premiers éléments d’enquête, le groupe a été arrêté par des agents des unités de sécurité avec l’aide de l’armée nationale, à la lumière de son implication présumée dans les troubles sanglants qui avaient fait deux morts la semaine dernière dans cette ville du nord-ouest tunisien.
Cette flambée de violence avait créé un climat de chaos et de terreur marqué par des incendies volontaires des biens publics et privés et des actes de pillage à grande échelle, notamment les postes de police de la ville.
Elle avait pour origine une version controversée selon laquelle le chef du district de police aurait giflé une femme. D’aucuns avancent que les bruits sur cet abus présumé auraient été propagés par des personnes suspectes infiltrées dans la foule.
Les personnes arrêtées sont soupçonnées également de s’être livrées à des opérations de contrebande et de corruption en complicité avec des membres de la famille du président déchu Zine el Abidine ben Ali, ajoute la TAP.
Des armes ont été saisies par les unités des forces de sécurité et de l’armée chez ces éléments qui ont été traduits devant la justice pour être jugés et répondre de leurs actes criminels présumés, précise l’agence
Source: “Le nouvel ocservateur” Le 10-02-2011
Tunisie : le «pays le plus stable du Maghreb» selon la France
Plusieurs ministres laissent croire que des hommes de main du Rassemblement constitutionnel démocratique, interdit de toutes activités depuis dimanche en attendant une dissolution programmée par voie de justice, «complotent» contre la révolution.
La Tunisie, le «pays le plus stable du Maghreb» selon la France, dixit un câble de WikiLeaks révélé hier par «20 Minutes.fr.», un site d’information, est confrontée à des dangers.
«Il y a des personnes qui veulent faire revenir la Tunisie en arrière, reconnaît le Premier ministre Mohammed Ghannouchi après avoir obtenu «des pouvoirs spéciaux nécessaires pour permettre à l’exécutif de relever les défis
auxquels il est confronté».
Signes de la persistance de la tension et de la contestation d’abord à Tunis puis dans tout le pays : l’assassinat de six Tunisiens après le limogeage de 42 responsables de la police, l’arrestation en flagrant délit de policiers restés fidèles à Rafik Belhaj Kacem, l’ex-ministre de l’Intérieur, mis en garde à vue depuis l’entrée sur scène de l’armée à chaque poussée de fièvre, pour rétablir l’ordre. Comme à Kasserine (centre), au Kef (nord-ouest) ou Gafsa (centre sud). La raison ? Les policiers en proie à des désertions en série, sont invisibles. Même si l’Intérieur les presse de reprendre leur mission s’ils ne veulent pas être jugés pour «abandon de poste».
Plusieurs ministres laissent croire que des hommes de main du Rassemblement constitutionnel démocratique, interdit de toutes activités depuis dimanche en attendant une dissolution programmée par voie de justice, «complotent» contre la révolution. Comme pour «sauver» la révolution, l’armée, la «garante de la Révolution», qui sait que ses 45.000 hommes ne pourront pas faire le poids devant les 100.000 hommes des forces de sécurité et de police de Ben Ali, décrète la mobilisation.
Les réservistes partis à la retraite entre 2006 et 2010 et les conscrits de «fin 2008 et tout 2009» doivent, selon un communiqué de la Défense, se présenter «dans les centres régionaux de conscription et de mobilisation les plus proches de leurs lieux de résidence» à partir du 16 février.
Ghannouchi qui passera aujourd’hui devant le Sénat pour obtenir pour le président Mebazaa un «feu vert» pour la promulgation de décrets-lois, sait que le temps lui est compté aussi économiquement. Néjib Chebbi, son ministre du Développement régional, évalue le manque à gagner à 5 milliards de dinars (2,58 milliards d’euros). De retour de Tunis, des députés européens ont appelé hier à Bruxelles à une conférence de donateurs qui permettra de «mettre en place une division du travail entre l’UE, les Nations unies, le Conseil de l’Europe.
Selon la présidente de la sous-commission du Parlement aux droits de l’homme, la Finlandaise Heidi Hautala, cette «aide», en particulier pour la tenue d’élections libres, doit être coordonnée».
Source: ”Afrique Hebdo” Le 09-02-2011
Où va la Tunisie ?
ParCatherine Nay
On oublierait presque que la chute du président Ben Ali, il y a quatre semaines, est à l’origine de tous les chamboulements du Moyen-Orient. Le gouvernement de transition remanié est à l’œuvre.
Vendredi dernier, le nouveau ministre des Affaires étrangères, Ahmed Abderraouf Ounaïs, était à Paris où il était l’hôte de Michèle Alliot-Marie.
Jamais dans ses rêves les plus fous ce diplomate retraité depuis dix-sept ans, qui a été ambassadeur à l’Onu, en Inde, à Moscou… n’aurait imaginé être propulsé à 75 ans à la tête de la diplomatie tunisienne, lui qui était sur une liste noire du clan Trabelsi dont il recevait des lettres d’injures « ignominieuses, sans pouvoir porter plainte ».
On rencontre un homme comme ressuscité des ténèbres, volubile, s’exprimant dans le français le plus châtié. Il a fait ses études à la Sorbonne. Il est licencié en lettres. Rappelle que ses maîtres s’appelaient Raymond Aron, Paul Ricoeur, Vladimir Jankélévitch. Il irradie du bonheur d’être l’un des acteurs de la transition démocratique de son pays.
Une issue dont il ne doute pas : « Nous avons lancé un programme social d’urgence pour les jeunes diplômés sans travail, un plan de relance économique. Internet est rebranché, les prisonniers politiques ont été libérés, la presse est libre. Toutes les associations et les partis sont autorisés. La rupture a été faite entre l’État et l’ancien parti hégémonique de Ben Ali, le RCD, qui a été suspendu. Les locaux et la logistique dont il bénéficiait lui ont été retirés ; 2 000 fonctionnaires ont été mis à pied. »
Des élections législatives « libres et loyales » seront organisées dans les six mois, après quoi la commission indépendante qui réfléchit sur la réforme constitutionnelle fera ses propositions. « Ce sont les nouveaux élus du Parlement renouvelé qui décideront de l’avenir institutionnel de la Tunisie », précise le ministre qui ne craint pas l’avènement d’un Parlement à majorité islamiste : « Nous sommes le pays le plus immunisé contre ce risque car nous sommes la société civile la plus évoluée du monde arabe, la plus instruite aussi, avec une égalité hommes-femmes ins – taurée par Bourguiba et que Ben Ali, il faut le reconnaître, a plutôt renforcée. Seulement, déplore-t-il, le pays était aliéné par un pouvoir despotique et corrompu. »
C’est ce pouvoir qui a poussé Ben Ali au départ… mais dans l’espoir d’un retour possible. Avec un scénario : le chaos, la violence, la peur. En clair, une politique de la terre brûlée pour faire revenir le “sauveur”. Raté.
Ben Ali sera-t-il jugé un jour ? « Nous ne voulons pas de justice expéditive, ni de tribunaux d’exception. Nous ne voulons pas de lynchage. S’il devait y avoir un procès, ce serait, espère le ministre, devant une justice sereine. »
Évidemment, on l’interroge sur son homologue Michèle Alliot-Marie. Comment juge-t-il ses déboires tunisiens ? Il répond : « J’ai beaucoup de respect pour Michèle Alliot-Marie. » Un jugement sans appel.
Monsieur Ounaïs est un homme optimiste, inspiré d’une foi quasi mystique en l’avenir démocratique de son pays. D’ailleurs, il lâche avec un sourire : « Sans une part d’utopie, on ne ferait rien. »
Source: ”Valeurs Actuelles” Le 10-02-2011
Tunisie/Kaïs Saïd : “Nous sommes face à une mascarade constitutionnelle
Kaïs Saïd, professeur de droit constitutionnel, trouve la loi habilitant le Président de la République par intérim à légiférer par décrets-loi, “d’une constitutionnalité douteuse”. A ses yeux, il est aujourd’hui nécessaire, voire vital pour la continuité de l’Etat tunisien, de repenser d’une manière fondamentale l’organisation provisoire des pouvoirs constitutionnels. Ce constitutionnaliste qui fait circulerune pétition “En vue d’une nouvelle constitution pour la Tunisie”, pense que le rôle du gouvernement provisoire n’est pas de préparer l’échéance électorale présidentielle, mais l’élection d’une nouvelle Assemblée constituante, pour l’élaboration et l’adoption d’une nouvelle constitution. Pourriez-vous nous expliquer la portée du projet de loi, voté par les deux Chambres des Députés et des Conseillers, habilitant le Président de la République par intérim à légiférer par décrets-loi ? C’est le paragraphe cinq de l’article 28 qui donne le pouvoir au Parlement composé de deux chambres d’habiliter le Président de la République à prendre des décrets-loi pour un délai limité en vue d’un objet déterminé. Il s’agit donc d’une délégation de la part du pouvoir législatif au profit du chef de l’Etat à légiférer en son lieu et place. Il y a en effet, trois sortes de décrets-loi. Ceux prévus par l’article 28, comme c’est le cas maintenant, et c’est la première fois que ça arrive en Tunisie. La deuxième catégorie a trait aux décrets-loi prévus en cas de vacances parlementaires, tel que le stipule l’article 31. Habib Bourguiba y a eu recours, à plusieurs reprises. Dans ce cas de figure, les décrets-loi doivent-être soumis à l’approbation du pouvoir législatif. Or, ceux pris par Bourguiba notamment pendant les années 60 n’ont jamais été ratifiés par l’assemblée nationale. La troisième catégorie est prévue par l’article 63 de la constitution, et n’intervient qu’en cas de dissolution de la chambre des Députés. Dans le cas d’espèce, quelles sont les raisons qui ont motivé le recours à l’article 28 ? Dans cette période transitoire et assez délicate, le gouvernement s’est trouvé acculé à recourir à l’article 28. L’actuel gouvernement a besoin de légiférer dans les matières qui relèvent du domaine de la loi, parce qu’il considère que la procédure législative normale est assez longue, et qu’il y a urgence de légiférer par décrets-loi. Mais, en fait la raison principale de ce recours est que les deux chambres qui constituent le parlement n’ont plus de légitimité, et ne sont plus représentatives. Il y a deux problèmes : l’un est purement juridique, et l’autre est politique. La possibilité de légiférer par décrets-loi repose sur l’idée que le pouvoir législatif censé représenter la volonté générale délègue pour une période déterminée au pouvoir exécutif censé également être légitime. Or, actuellement, ni le pouvoir législatif n’est légitime, ni le chef de l’Etat intérimaire, n’a une légitimité populaire. L’article 28 en question permet cette délégation au profit du président de la République, et non au Président de la République par intérim. Par ailleurs, la loi de promulgation votée par les deux chambres ne délègue pas au chef de l’Etat par intérim pour un délai limité, or la période doit-être déterminée. Cette loi est-elle, de ce fait, anticonstitutionnelle ? Elle est d’une constitutionnalité douteuse. Le président de la République par intérim qui a pris ses fonctions le 15 janvier, dispose d’un délai pour exercer ses fonctions qui ne doit pas dépasser le 13 mars. Ce délai n’a pas été fixé d’une manière définitive et précise. Le véritable problème ne se situe pas au niveau de cette légalité très douteuse, mais à un niveau plus profond et grave, c’est qu’un pouvoir, même s’il se considère encore comme légal, n’est plus légitime. Un pouvoir qui n’est pas représentatif peut-il déléguer ses fonctions législatives, alors qu’il n’a pratiquement plus aucune représentativité, et aucune légitimité. Il est aujourd’hui nécessaire, voire vital pour la continuité de l’Etat tunisien, de repenser d’une manière fondamentale l’organisation provisoire des pouvoirs constitutionnels. L’Etat tunisien doit continuer, mais le régime politique antérieur à la révolution doit cesser d’exister. Quelle est la solution que vous estimez la meilleure pour assurer la continuité de l’Etat, tout en rompant avec le passé ? Il faut s’inspirer de notre expérience constitutionnelle très riche, celle de la période ayant suivi la proclamation de la République par l’Assemblée nationale constituante. A cette époque, le Président Bourguiba a eu recours à un texte qui date du 21 septembre 1955, relatif à l’organisation provisoire des pouvoirs publics et l’a modifié au lendemain du 25 juillet 1957 par l’adoption d’un nouveau régime républicain. Aujourd’hui, il faut adapter notre organisation des pouvoirs constitutionnels à la Tunisie après le 14 janvier. L’actuel gouvernement provisoire doit préparer non pas l’échéance électorale présidentielle, mais l’élection d’une nouvelle Assemblée Nationale constituante. Une révolution ne peut pas être mêlée dans un texte constitutionnel qui s’effondre de jour en jour. Si on continue dans les mêmes choix du gouvernement à savoir préparer des présidentielles, celui qui sera élu comme président de la République, exercera ses fonctions dans le cadre du même texte constitutionnel, et aura les mêmes fonctions que le chef de l’Etat déchu, Ben Ali. Et si le parlement envisage de réviser la constitution après les élections, cette révision sera certainement proposée par le chef de l’Etat élu, elle sera son œuvre, reflètera sa manière de faire et ses choix. Il s’agira très probablement d’une réforme du même texte constitutionnel, et non d’une nouvelle constitution. Pourquoi ne pas permettre au peuple souverain de choisir librement une nouvelle constitution, adoptée par une Assemblée constituante librement élue au suffrage universel direct, libre et secret. Qu’en est-il des aspects organisationnel et juridique d’une éventuelle élection de cette nouvelle constituante ? Le gouvernement transitoire doit préparer tous les textes relatifs aux élections de l’Assemblée constituante, de manière à permettre à tous les partis, mais également aux personnalités indépendantes, de s’y présenter. Le choix revient au peuple souverain, et à lui seul. Doit-on partir de l’actuel texte constitutionnel pour élaborer la nouvelle constitution, ou le laisser de côté et repartir à zéro ? Il faut laisser la constitution actuelle de côté, et reprendre tout dès le départ. Le texte actuel contient des dispositions qui peuvent-être maintenues, mais encore une fois, c’est au peuple de choisir, dire que le peuple n’est pas apte à choisir, n’est en fait qu’une manière de ne pas lui reconnaître sa souveraineté, a fortiori qu’il l’a été en 1956, il ne peut pas, ne pas l’être en 2011. Il faut faire appel à des constitutionnalistes pour élaborer la nouvelle constitution ? Il faut faire appel à des experts, mais après l’élection des membres de cette constituante, et non avant. Cette opération va nécessiter beaucoup de temps Il ne faut pas avoir peur de l’expérience constitutionnelle entre 1956 et 1959. Le texte du 25 mars 1956 n’a été promulgué que le 1er juin 1959. C’est par la volonté de Bourguiba qui a voulu asseoir son pouvoir.La constituante en 1956 a consacré la plupart de ses travaux à une œuvre non constituante en matière budgétaire et autres. Bourguiba a voulu après la proclamation de la République consolider son pouvoir avant l’adoption du texte final de la constitution. La préparation d’un texte constitutionnel ne prend pas beaucoup de temps. Quelques mois suffisent pour préparer un nouveau texte et l’adopter. C’est seulement avec l’adoption d’une nouvelle constitution que le futur président de la République, et les futurs membres du pouvoir législatif élus, auront une légitimité constitutionnelle nouvelle, outre la légitimité que leur confèrera, les élections, sur la base de ce nouveau texte constitutionnel. Mais, on parle maintenant de décréter la loi d’amnistie générale, de réviser les codes de la presse, le code électoral, etc. Le code électoral, la loi sur les partis, le code de la presse… constituent autant de textes importants, mais tout sera fait sur les bases de la constitution du 1er juin 1959. Il faut revoir les priorités ; malgré le caractère déterminant de tous ces textes, ils n’ont pas l’importance du texte fondamental qu’est la constitution. Le gouvernement actuel n’aura pas une légitimité réelle, s’il ne prend pas cette décision de couper avec l’ancien texte constitutionnel, et s’il ne déclare pas que la prochaine échéance électorale sera celle de l’élection d’une constituante. Avec la promulgation du projet de loi habilitant le recours par le chef de l’Etat par intérim aux décrets-loi, les deux chambres se sont sabordées, c’est dire qu’elles ont mis fin, de facto, à leurs missions… Non, les deux chambres existent encore, et le président intérimaire n’a pas le droit de les dissoudre. Mais, ces deux chambres n’ont aucune légitimité. Sous l’ancien régime, les membres de la Chambre des conseillers étaient désignés par Ben Ali, ou en fonction de leur loyauté au régime. Est-il possible qu’ils continuent à être les représentants du peuple. Par ailleurs, les membres de la chambre des Députés ont le droit de proposer des projets de loi au moins dans les domaines qui n’ont pas été attribués par cette loi d’habilitation. Nous sommes face à un blocage, voire une mascarade constitutionnelle, même si certains veulent rester à tout prix dans le sillage de la constitution actuelle. Plus grave encore s’il y a vacance de la présidence de la République, personnellement je ne le souhaiterai pas, nous serons face à un vide constitutionnel. Il faut voir les choses objectivement, il faut être patriote, responsable, il faut laisser de côté les luttes partisanes, les calculs des politiciens et voir l’avenir de notre pays, c’est notre devoir à tous. Il s’agit avant tout d’une question de morale, nous vivons aujourd’hui, une véritable crise de valeurs. Le peuple tunisien a besoin de gouvernants honnêtes, intègres et capables d’exprimer la volonté du peuple. Quels seront les principaux contours de l’éventuelle future constitution ? Elle sera l’expression des choix du peuple tunisien. S’il veut maintenir quelques dispositions de l’actuelle constitution comme l’article premier, c’est son choix. S’il veut un régime parlementaire, rationnalisé ou tempéré, ce sera son choix. D’aucuns ont peur pour les acquis de la Tunisie, tel que le CSP, et veulent les intégrer dans la constitution. Qu’en dites-vous ? La Tunisie a une histoire d’ouverture. C’est un peuple ouvert, il y a des acquis que tout le monde est d’accord à les reconnaître comme irréversibles. Si les gens qui font la prière se tournent vers la Mecque, ils n’oublieront jamais également qu’ils sont proches de l’Europe. Et n’importe quel pouvoir ne peut gouverner, sans voir la position qu’a toujours occupée la Tunisie, tout au long de son histoire, comme un pays arabe, musulman, mais également méditerranéen proche de l’Europe. Le peuple tunisien après le 14 Janvier, est un véritable rempart contre les excès et les extrémismes. Ceci étant, les 3 à 4 générations des droits de l’Homme, et les acquis de la société tunisienne en matière de statut personnel qui font pratiquement l’unanimité de tous aujourd’hui doivent-être intégrés dans le prochain texte de la constitution. Celui-ci doit également aménager les pouvoirs pour éviter tous les excès, pour qu’il y ait séparation et équilibre entre les pouvoirs. Encore une fois, c’est toute la société tunisienne avec toute son histoire d’ouverture et de modernité qui sera le véritable garant de la liberté. La société tunisienne ne sera plus comme avant, et le peuple tunisien qui a fait cette révolution du 14 janvier 2011 n’acceptera jamais une nouvelle dictature, quelque soit sa couleur politique. Etes-vous pour le maintien en Tunisie d’un parlement bicaméral, avec deux chambres ? Une deuxième chambre peut éventuellement être maintenue, pour représenter les collectivités locales à l’échelle nationale, dans une sorte de démocratie participative. Mais, l’actuelle chambre des Conseillers n’a plus aucune raison d’être. Il faut revoir sa composition et ses attributions.
Source:”GlobalNet” Le 10-02-2011
Clan Ben Ali
Le luxe et la corruption
Près d’un mois après la chute du régime, l’identification complète de l’ensemble du patrimoine immobilier parisien du clan Ben Ali, de ses proches et de leurs associés continue à défrayer la chronique. Il ne se passe pas une semaine sans que les gazettes locales du bord de Seine n’apportent leur lot de nouvelles révélations sur un appartement ou un immeuble acquis par les membres de l’ancien pouvoir grâce à de malicieux tours résultant de jongleries financières et à l’usage systématique et complaisant de prête-noms via des sociétés civiles immobilières propres à masquer efficacement les noms des véritables bénéficiaries de ces opérations de blanchiment. A ce jour, près d’une demi-douzaine d’adresses sises dans les beaux quartiers de Paris ont été mises à jour par les médias. Moncef Mzabi a élu domicile place Victor Hugo dans le très chic XVIe arrondissement, Nesrine Ben Ali et Sakhr El-Materi se sont logés en mars 2010 dans un immeuble à cinq niveaux à l’angle de la rue Le Sueur et de la rue du Bois de Boulogne, à deux pas de la prestigieuse avenue Foch près de l’Arc de Triomphe; les frères Mabrouk habitent place des Etats-Unis depuis 2005, mais détiennent aussi un appartement rue de Galilée ainsi qu’un autre pied-à-terre boulevard Saint-Germain; Moncef El-Materi a acquis deux appartements mitoyens rue d’Odessa à Montparnasse; Slim Chiboub et Dorsaf Ben Ali ont établi leurs pénates avenue Kléber en 2007; et, pour finir, ce qui pourrait être le clou de cet impressionnant florilège patrimonial si l’enquête diligentée par la justice tunisienne auprès des services antiblanchiment français le confirme, un hôtel particulier dans le quartier du Marais estimé à 38 millions d’euros que Leïla Trabelsi se serait offert en octobre dernier! Cette longue traque a commencé à la fin du mois dernier suite à l’action enterprise par trois ONG : Transparency International, Sherpa et la Commission arabe des droits humains. Ces trois organisations ont déclenché une action pénale pour “corruption, détournement de fonds publics et blanchiment aggravé”. Peu après, le parquet de Paris a saisi d’une enquête préliminaire l’Office central pour la répression de la grande délinquance financière et le service anti-blanchiment du Tracfin. Puis, au début du mois de février, l’Union européenne décidait le gel des avoirs de l’ex-président Ben Ali et de Leïla Trabelsi ainsi que de 46 personnes considérées comme membres du premier cercle de leur entourage immédiat.
Source: “La Presse” Le 10-02-2011
Le syndrome des sit-in
Ca n’en finit pas avec les sit-in de contestations et surtout de revendications. Partant de réclamations sociales, puis politiques, la révolution connaît, depuis quelques jours, une orientation nouvelle des revendications portant sur le volet socioprofessionnel et même sécuritaire. Hier matin, plusieurs centaines de manifestants ont entamé un sit-in devant le ministère du Commerce et du Tourisme, brandissant des banderoles et autres supports de leurs slogans exigeant la régularisation de leur situation professionnelle, la titularisation, la justice sociale, et autres doléances concernant l’éviction des responsables appartenant à l’ancien régime. Vers midi, la foule grandissante à l’avenue Kheireddine Pacha s’est dispersée pour former des foules distinctes selon leurs revendications. Celle qui a choisi de bloquer l’issue au siège du ministère réclamait la titularisation des agents et des cadres temporaires et contractuels «dont certains cadres ont le statut de temporaire depuis 1995 ! s’exclame Atef Ayari, agent de contrôle. La deuxième revendication est d’établir un statut interne clair, puisque depuis 1992, on a essayé d’en faire un mais à chaque fois ça tombe dans l’eau». «Aussi, ajoute-t-il, nous n’avons pas de syndicat pour nous défendre alors que notre situation financière est encore lamentable. Les responsables malhonnêtes désignés par l’ancien régime sont encore à leurs postes et ce sont eux qui ont semé la pagaille dans le système de travail du contrôle économique. Imaginez un simple ouvrier qui effectue la tâche d’un contrôleur ! C’est l’un des dépassements qui se produisent dans le secteur jusque-là mal géré. Autrement, pour passer d’un grade à l’autre nous devons passer du statut de titulaire à celui de temporaire pour que nous puissions passer un concours de passage de grade. Nous avons des cadres qui disposent de doctorat et de licence en droit et qui sont payés en tant que bacheliers…C’est inadmissible !». SOS «corruption et abus de pouvoir» Pour sa part, Afef Jertila, agent d’administration, confirme que plusieurs responsables et hauts cadres sont «impliqués dans des circuits de corruption et des abus de pouvoir. Mohsen Aroui, ancien secrétaire d’Etat, affirme Afef, Khelifa Tounakti, directeur général de la concurrence et des enquêtes économiques, et Ali Gharbi, directeur général de la Société des viandes, sont les symboles de la corruption au ministère du Commerce et devraient être jugés pour leurs abus de pouvoir». Quant à Brahim Tarhouni, cadre du contrôle économique, il évoque le danger que représentent plusieurs abus de pouvoir et dépassements de la part des directeurs «qui ne cessent de prendre des décisions en leur faveur aux dépens des agents. Il y a des agents non formés, non habilités pour effectuer le contrôle économique et encore contractuels qui disposent des attributions de la police judiciaire, ce qui est grave. Ceci facilite la corruption au sein du corps et affecte la relation avec les commerçants, de plus en plus tendue. Au niveau régional aussi, on note des dépassements notamment dans la désignation des directeurs et des responsables qui n’ont aucune notion du droit et des réglementations du secteur», souligne-t-il. L’accès au ministère était impossible pour recueillir des réponses auprès des responsables et du ministre. Ce dernier a fait une courte parution vers 13h00 avant de rejoindre la foule des protestataires venus du marché de gros de Bir El Kassaâ. Les ouvriers et les mandataires dudit marché sont venus revendiquer une sécurité perdue. En effet, des agents de la coopérative avaient assiégé tôt le matin le carré 4 du marché interdisant l’accès des mandataires et des ouvriers. Un geste qui a poussé ces derniers à aller protester devant le ministère. Il a fallu que le nouveau ministre, M. Mehdi Houas, vienne rassurer les mandataires et les ouvriers qu’il va intervenir pour sécuriser le marché de gros. Salem Abidi, mandataire, affirme que les ouvriers de la coopérative, dirigée par Hmed Bou Oun, n’ont pas agi de la sorte de leur propre gré et qu’il y a des gens qui les ont poussés à bloquer le carré 4 du marché. «L’intention de ces gens, souligne-t-il, est d’entraver notre travail alors que nous sommes en pourparlers avec les ouvriers pour régulariser leur situation. Nous sommes des investisseurs dans ce domaine et notre productivité est nettement meilleure que celle de la coopérative en dépit du contexte de plus en plus contraignant». Par ailleurs, de l’autre côté de l’avenue Kheireddine Pacha, on a remarqué un autre sit-in conduit par les agents et les cadres administratifs de la délégation régionale de l’éducation de Tunis 1. Ils entament ce sit-in revendiquant entre autres la régularisation de leur situation et la titularisation des agents temporaires.
Source: “La Presse” Le 10-02-2011
Al Zawahiri y Ghoneim frente a frente Al Qaeda juega su supervivencia en Egipto
Cada día se hace más acuciante el temor a un atentado terrorista en Egipto protagonizado por la nebulosa de Al Qaeda. La organización fundada sobre la ideología del doctor egipcio Ayman el Zawahiri juega su supervivencia en lo que ocurra en Egipto. Si el movimiento de la Plaza Tahrir triunfa, quedará demostrado que es posible una transición pacífica en el mundo árabe para derrotar las tiranías, y se desmoronará el fundamento mismo de Al Qaeda.
Por Pedro Canales. Corresponsal en el Magreb
10-02-2011
El temor a un atentado ha crecido cuando el vicepresidente egipcio Omar Suleiman ha declarado este martes que “activistas de Al Qaeda” figuran entre los miles de detenidos que se han evadido de las prisiones tras las protestas multitudinarias contra Hosni Mubarak. No ha especificado ni cuántos, ni si pertenecen a la Gamaa Islamiyya. Pero ha añadido que será muy difícil volverlos a detener.
Como para preparar el clima propicio al efecto devastador de un atentado, que traería como consecuencia la irrupción del Ejército en la escena pública e incluso la Ley marcial, el movimiento iraquí conocido como “Estado islámico de Irak”, al que se considera afiliado a la nebulosa de Al Qaeda, llamó este martes a los egipcios “a la guerra santa y a instaurar un gobierno basado en la Chariaa coránica”, según ha divulgado el Centro americano de control de las páginas web islamistas (SITE). Un llamamiento sin embargo que suscita algunas sorpresas ya que los yihadistas iraquíes tienen poca o ninguna relación con el pueblo egipcio.
La atribución que se hace en algunos círculos de que este grupo terrorista iraquí ha sido el inspirador del atentado contra la iglesia copta en Alejandría el pasado 1 de enero que se saldó con 23 muertos y un centenar de heridos, deja mucho escepticismo. Y más bien se sospecha de algunas “oficinas negra” del propio régimen de Mubarak, en las que estaría el ex-ministro del Interior Habib Al Adly destituido en el cambio de gobierno de finales de enero. Según esta versión el objetivo del atentado era diáfano: enfrentar a las comunidades musulmana y copta. El clima de fraternidad que se ha vivido estos días en la plaza Tahrir ha echado por tierra este propósito, en el que extrañamente coinciden los sectores más represores del régimen y los yihadistas islámicos.
En las dos semanas de manifestaciones populares en Egipto no se ha visto en ningún momento a la gente pedir la instauración de un Estado islámico, de la Chariaa, o enarbolar banderas verdes o negras, según la tendencia islámica de que se trate, sino tan sólo egipcias. En lugar del mítico “califato”, los manifestantes pedían democracia y libertad; en lugar de ensalzar a los líderes del yihadismo mundial, exigen elecciones libres y transparentes ; todos ellos conceptos que chocan con los fundamentos de Al Qaeda.
El pueblo egipcio se ha pronunciado estentóreamente por una transición pacífica hacia la democracia. La cofradía de los Hermanos Musulmanes se ha reiterado en contra del recurso a la violencia, que está en la base misma del yihadismo. Por el contrario, Al Zawahiry, afirma que “sólo la lucha armada y el yihad podrán destruir el Estado impío, sostenido por Israel y estados Unidos”.
El llamamiento a la Yihad hecho por el grupo iraquí ha sido respondido de inmediato por los Hermanos Musulmanes egipcios. Jaled Hamza, responsable de la página web de la cofradía ha vuelto a martillar que “los Hermanos Musulmanes siempre han rechazado y rechazarán cualquier llamamiento a la violencia”.
Si la transición pacífica triunfa en Egipto, las tesis del doctor Zawahiry se vendrán abajo. En su libro Hassad el Murrakor (Cosecha amarga), el ideólogo de Al Qaeda describe el método para triunfar: minar el estado desde el interior, destruyendo sus bases económicas, culturales y políticas. No cree en la acción de las masas. Sólo en la eficacia de sus comandos terroristas, sean o no suicidas.
La sombra del Ejército El Ejército egipcio sigue siendo la columna vertebral del país. Pero no es sólo una fuerza militar sino que está anclado profundamente en la sociedad, de la que controla una buena parte de la economía, grandes obras, fabricación de armamento, suministros militares y todo lo relacionado con la intendencia que conlleva una armada de medio millón de soldados.
Algo muy importante para las Fuerzas Armadas es que la continuidad del régimen con Omar Suleiman, un escenario preparado por los aliados occidentales pero que cada vez está más contestado en el interior, le garantice los 1.300 millones de dólares anuales que le otorgan los Estados Unidos en concepto de asistencia militar. Una ayuda sin embargo que está sujeta a la continuidad de los Acuerdos de paz con Israel y al mantenimiento del equilibrio geopolítico en la región medio-oriental.
En gran parte por esta razón, la cúpula militar tiene una profunda aversión a los islamistas de la cofradía Hermanos Musulmanes que mantienen su posición hostil a la paz firmada en Camp David en 1978 “a expensas de la causa palestina”. Aunque por el momento la cofradía no pone esta cuestión al orden del día, ya se sabe que su posición es que “es imposible un acuerdo de paz sin el reconocimiento de Hamás”, el grupo palestino que controla la franja de Gaza fronteriza con Egipto. Los Hermanos Musulmanes quieren dejar el asunto para resolver en un futuro referéndum en el que el pueblo egipcio se pronuncie.
El estado mayor del Ejército siempre ha dado carta blanca a las actividades de los Servicios de inteligencia dirigidos por el general Omar Suleiman contra el terrorismo de la Gamaa Islamiyya autora de los atentados al World Trade Center en 1993 y del asesinato de turistas en Luxor en 1997; lo mismo que a la persecución de la Yihad Islámica, seguidora de Ayman el Zawahiri. El Ejército observa y espera.
Paradójicamente en Egipto en estos momentos se enfrentan dos símbolos, el de Al Zawahiry que representa al extremismo y el yihadismo islámico, y el joven ciberactivista Wael Ghoneim, que representa un amplio sector de la juventud egipcia que ansía la libertad. Del triunfo de este último depende la supervivencia del primero, y el inicio del fin de una época oscura de opresión y corrupción.
(Source: “El Imparcial” (Quotidien – Espagne) le 10 fevrier 2011)