|    TUNISNEWS    6 ème année,          N° 2088 du 08.02.2006 
 
 
 AP: Le consulat honoraire du Danemark à Tunis fermé à la suite d’une menace téléphoniqueAFP: Caricatures: l’Occident ne doit pas céder (intellectuel musulman) Le Monde: En France, « Charlie Hebdo » s’engage dans la polémique sur les caricatures de Mahomet Le Monde: Caricatures : vers une politisation de la crise ? Le Monde: Mahomet caricaturé, planète tourneboulée, Gwladys Fouché: Danish paper rejected Jesus cartoons Balha Boujadi: Deux mot à Mr. Abdehamid  Nouvelles           De Tunisie: Une délégation américaine « La Tunisie est le miracle de           l’Afrique, comme Singapour est le miracle de l’Asie »            
 JA/L’Intelligent: Triste scène tunisienne
  JA/L’Intelligent: Embellie touristique         
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Le consulat honoraire du Danemark à Tunis fermé à la suite d’une menace téléphonique
          8 février 20:04       TUNIS (AP) – Le consulat général honoraire du Danemark à Tunis a été fermé «provisoirement»     à la suite d’un appel téléphonique anonyme menaçant, a-t-on appris mercredi     auprès de la chef de cette représentation diplomatique.     Cette menace intervient dans le contexte des manifestations dans plusieurs     pays musulmans contre la publication de caricatures du prophète Mahomet     d’abord dans un journal danois, puis dans divers titres de la presse     européenne.     »Un de mes collaborateurs tunisiens a reçu un appel d’un inconnu lui     conseillant de ne plus rester au bureau», a déclaré à l’Associated Press la     consule générale Ingercise Ennabli. Selon elle, l’auteur de l’appel parlait     «mal l’arabe».     »J’ai alors décidé de fermer le local provisoirement et à titre préventif»,     a ajouté Mme Ennabli qui s’attend à ce que le consulat »soit bientôt rouvert,     peut-être dans une semaine, une fois que les choses se seront tassées».     La diplomate a tenu à saluer «la réaction instantanée des autorités qui ont     aussitôt pris les mesures nécessaires pour assurer la protection du consulat»,     faisant remarquer que «notre maigre budget ne nous permet pas de recruter     nos propre agents de sécurité».     Située au centre-ville, la mission consulaire compte, outre la diplomate     danoise, deux employés locaux. Elle est depuis protégée par une unité de     sécurité renforcée.     Mme Ennabli a jugé «tout à fait sécurisante» la situation en Tunisie où elle     réside depuis plus de 35 ans.     »Nous n’avons jamais eu de problèmes depuis que nous sommes ici et je ne     pense qu’à cause d’un idiot cela va changer», a opiné Mme Ennabli.     Elle a, par ailleurs, fait état d’un groupe de quelque 200 touristes danois     qui poursuivent leur séjour en Tunisie où ils viennent d’effectuer une     randonnée dans le désert du sud tunisien.     La communauté danoise en Tunisie compte une cinquantaine de personnes pour     la plupart des Danoises, comme elle, mariées à des Tunisiens, a-t-elle noté.     AP  
Caricatures: l’Occident ne doit pas céder (intellectuel musulman)
  AFP, le 08.02.2006 à 11h28               ROME, 8 fév 2006 (AFP) –  Un intellectuel musulman a invité    mercredi les occidentaux à ne pas céder sur la liberté de critique  dans   l’affaire des caricatures de Mahomet jugée offensantes pour  l’Islam et a   dénoncé une tentative d’imposer la loi islamique au  monde entier.                « Vous ne devez pas renoncer à la liberté religieuse et à la  libre   critique. Si vous cédez, c’en sera fini. Tous les prétextes  seront alors   invoqués. Il n’y aura pas de limite », a affirmé Hamadi  Redissi,   professeur de sciences politiques à l’Université de Tunis,  dans un entretien   publié par le quotidien italien Il Giornale.                « Qu’il soit interdit aux musulmans d’offenser le prophète est    compréhensible. Mais dans ce cas, on cherche à étendre cet interdit  à vous,   occidentaux. C’est une tentative d’imposer la Charia, la loi  islamique au   monde », a-t-il ajouté.                Le professeur Redissi s’est dit « surpris par l’ampleur de la    réaction » à ces caricatures « qui ont été publiées le 25 septembre »  2005.                « Il ne s’agit pas seulement des imams extrémistes et de quelque    milliers de personnes qui descendent dans la rue pour protester,  mais aussi   de gouvernements et d’institutions islamiques qui  fomentent l’indignation »,   a-t-il souligné.                « Les manifestations violentes ne devraient pas durer longtemps,    parce que les gouvernements et les dirigeants religieux commencent à    s’effrayer des mouvements qu’ils ont déclenchés, ou tolérés », a-t-il    toutefois estimé.                « Certains, comme l’Arabie saoudite, ont mis le feu aux poudres.    D’autres ont manipulé les foules à des fins politiques. La plupart  ont pris   la vague. Mais aujourd’hui, ils ont peur de perdre le  contrôle de la   situation », a-t-il expliqué.        AFP    
  —————————————————————————————————————   Et voici pour nos lecteurs le texte intégral de   l’article publié à la page 4 du journal italien « Il Giornale » du 8 février   2006       «Vogliono imporre la legge islamica Se   l’Occidente cede per voi è la fine»       
«Non rinunciate alla libertà religiosa o non ci sarà limite alle loro pretese»
     Marcello Foa   marcello.foa@ilgiornale.it        «Sono molto preoccupato. La protesta del mondo islamico contro le caricature   lascerà tracce durature sia nelle relazioni internazionali, sia nel confronto   tra le culture». È inusuale che Hamadi Redissi sia così cupo. Docente di   Scienze politiche all’Università di Tunisi, è un intellettuale che non ha mai   risparmiato critiche, talvolta durissime, nei confronti dell’Islam e dei   fondamentalisti, ma che ha sempre mantenuto una visione fiduciosa del futuro   dei Paesi musulmani; perlomeno una speranza.       Professor Redissi, perché oggi è tanto inquieto?   «Perché sono meravigliato dall’ampiezza della reazione islamica. Non sono solo   gli imam oltranizisti e qualche migliaio di persone per strada a protestare   contro le vignette, ma anche governi e istituzioni islamiche, che fomentano   l’indignazione».       Un caso montato?   «Sì. Le vignette sono state pubblicate il 25 settembre, e da allora alcuni   imam danesi si sono prodigati per suscitare la protesta dei musulmani,   compiendo viaggi nei Paesi islamici e avvalendosi di Internet. Io non credo   che le proteste violente siano state pianificate da un “grande vecchio”, ma,   da musulmano, ho l’impressione che ci sia qualcuno che verifica quel che viene   scritto sull’Islam ovunque nel mondo, e arbitrariamente riesce a creare un   caso, anche a distanza di mesi».       Che conseguenze ci saranno sulla libertà religiosa?   «Molto serie, soprattutto per voi occidentali. Che ai musulmani sia vietato   offendere il Profeta è in fondo comprensibile, ma in questo caso si cerca di   estendere questa proibizione anche a voi. È questa la differenza tra il caso   Rushdie e quello delle vignette: Salman Rushdie, lo scrittore condannato a   morte dagli iraniani per apostasia, è un musulmano, ma il giornale danese che   ha pubblicato le caricature no. È come se stessero tentando di imporre una   Shaaria (la legge islamica, ndr) al mondo».       E l’Occidente che cosa deve fare?   «Non dovete rinunciare alla libertà religiosa e di critica. Se cedete è   finita: qualunque pretesa diventerà plausibile. Non ci sarà più alcun limite».       Insomma, lei teme una spaccatura ancora più marcata tra Islam e   Occidente…   «Sì. L’immagine dell’Islam che si propaga nel mondo in questi giorni non fa   che rafforzare la diffidenza e il rancore. È come se ci fossero due mondi:   quello islamico continua a non capire che cosa significhi la libertà religiosa,   e questo nonostante la tv e i film americani ed europei, che sono visti anche   qui, ce lo illustrino ogni giorno. Pretendono che un governo, quello danese,   censuri un giornale, come si fa nei Paesi musulmani. Non capiscono che i   quotidiani europei scrivono quel che pensano, non quel che il governo comanda   loro».       Questo equivale a uno scontro di civiltà?   «No, perché non si può ridurre l’Islam a questo. Oggi in realtà c’è un   confronto tra una realtà islamica dove sono marcate le tendenze oscurantiste e   la parte più progredita del mondo, che invece ha superato questa fase grazie   all’Illuminismo. È questa la chiave di lettura più appropriata».       Quando finiranno le proteste violente?   «Credo tra non molto, perché i governi e i leader religiosi cominciano a   essere spaventati dalle pulsioni che loro stessi hanno incoraggiato, o che   perlomeno hanno tollerato. I governi hanno affrontato questa crisi in modo   diverso: alcuni, come l’Arabia Saudita, hanno dato fuoco alle polveri; altri   hanno manipolato le folle con fini politici; la maggior parte ha cavalcato   l’onda. Ma ora i regimi temono di perdere il controllo della situazione e   tenderanno perlomeno a mettere a freno le folle. Loro sanno come fare. Le   violenze cesseranno, non i danni provocati da questa vicenda».       Perché si stenta a udire la voce dell’Islam moderato?   «Perché l’Islam moderato è rappresentato da ricercatori e intellettuali che   non hanno la possibilità di influire sull’opinione pubblica araba, che invece   è condizionata dagli imam e dai governi. Il peso dell’ignoranza è enorme,   incide molto di più qui che in Occidente».       (Source : « Il Giornale » (Italie) du 8 février   2006)   URL : http://www.ilgiornale.it/a.pic1?ID=63330
En France, « Charlie Hebdo » s’engage dans la polémique sur les caricatures de Mahomet
     LEMONDE.FR | 08.02.06 | 10h57  •  Mis à jour le 08.02.06 | 11h30       L’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo publie, mercredi 8 février, un numéro   spécial qui accorde une large place à l’affaire des caricatures du prophète   Mahomet. Parues en septembre 2005 dans un quotidien danois, le   Jyllands-Posten, elles ont été, ces dernières semaines, à l’origine de vifs   débats et parfois de violences dans de nombreux pays.       L’hebdomadaire a décidé, à son tour, de reprendre les douze caricatures. Il   les publie en petit format en pages intérieures, y compris le plus controversé   représentant Mahomet coiffé d’un turban en forme de bombe à la mèche allumée.       « LE CRAYON ET LA PLUME » CONTRE « LE POIGNARD ET   LA CEINTURE D’EXPLOSIFS »       En « une », un dessin de Cabu, titré « Mahomet débordé par les intégristes »,   représente le Prophète se voilant la face et soupirant : « C’est dur d’être   aimé par des cons. »  Onze des seize pages du journal sont consacrées aux   caricatures : outre les douze dessins du Jyllands-Posten, le journal propose   d’autres caricatures des dessinateurs maison figurant Mahomet mais aussi des   représentants d’autres religions, ainsi que plusieurs textes d’analyse et de   débat.       Gérard Biard, rédacteur en chef de Charlie Hebdo, explique cette démarche en   page 2 du numéro : « Il ne faut pas blesser les croyants dans leur foi, nous   disent les gens raisonnables et les négociants en yaourt qui craignent le   boycott. Nous sommes ouverts au débat. Mais, pour que le débat ait lieu, il   faudrait auparavant que certains croyants arrêtent de blesser tout court ceux   qui n’épousent pas strictement les mêmes convictions qu’eux. Et cessent de   répondre au crayon et à la plume par le poignard et la ceinture d’explosifs. »         Gérard Biard met sur le même plan les intégrismes de toutes religions : « Si la   foi soulève des montagnes, ce sont des montagnes de cadavres. » Il s’interroge   : « Combien de livres et de journaux devrons-nous brûler pour que la soif des   fanatiques religieux soit enfin étanchée ? »  « Charlie tente d’analyser la   polémique et ses conséquences. Histoire de montrer que la liberté   d’_expression doit être plus forte que l’intimidation », écrit l’hebdomadaire.   « La tolérance n’est pas l’indifférence », assure plus loin un de ses   journalistes.       Le journal publie aussi en page 2 un texte intitulé « Pour la liberté   d’_expression ! » signé de Tewfik Allal pour l’Association du manifeste des   libertés, une association qui, selon Charlie Hebdo, « rassemble des hommes et   des femmes de culture musulmane qui portent des valeurs de laïcité et de   partage ».       DES ASSOCIATIONS MUSULMANES ANNONCENT DES   POURSUITES JUDICIAIRES       Des organisations musulmanes avaient demandé en référé la saisie de ce numéro   de Charlie Hebdo, considérant la publication des caricatures comme une « injure   raciale et religieuse ». Elles ont été déboutées par la justice, mardi 7   février, pour vice de forme.       Les juges n’ont pas statué sur le fond mais sanctionné des vices de forme dans   la demande présentée conjointement par le Conseil français du culte musulman (CFCM),   les mosquées de Paris et Lyon, l’Union des organisations islamiques de France   (UOIF) et la Fédération nationale des musulmans de France (FNMF).       Les associations musulmanes ont annoncé qu’elles engageraient, jeudi  9   février, de nouvelles poursuites. Celles-ci devraient viser Charlie Hebdo mais   aussi France Soir, premier quotidien français à avoir publié les caricatures,   mercredi 1er février. « On aurait aimé que la volonté d’apaisement règne.    Charlie Hebdo veut mettre de l’huile sur le feu, les musulmans de France   disent ‘non’. On ne peut pas permettre dans nos sociétés d’encourager   l’insulte », a dit à la presse Fouad Alaoui, secrétaire général de l’UOIF.       (Source : Le Monde.fr, le 8 février 2006)
Caricatures : vers une politisation de la crise ?
     LEMONDE.FR | 06.02.06 | 15h43  •  Mis à jour le 07.02.06 | 14h15       L’intégralité du débat avec François Burgat,   chercheur au CNRS et spécialiste de l’islam, mardi 7 février, à 11 h.       anaxav: Quelle est votre opinion personnelle sur les caricatures   incriminées ? Une telle réaction était-elle prévisible ?       François Burgat : Peut-être faut-il préciser la notion de « caricature ». Une   chose est de représenter par l’image le prophète des musulmans et d’enfreindre   supposément ainsi un précepte, qui s’applique aux adeptes de la religion   musulmane et à eux seuls ; une autre est de donner de ce symbole d’une   communauté religieuse une représentation humoristique ou irrévérencieuse. Une   troisième est de publier une représentation clairement stigmatisante, voire   criminalisante, ce qui était bien le cas pour l’assimilation « Mahomet =   terrorisme ».        Cette « caricature » cautionnait une explication essentialiste et unilatérale de   la violence dans le monde, elle avait valeur d’accusation, les réactions   étaient prévisibles. Ce distinguo n’a pas été fait assez systématiquement. Il   est par exemple occulté, et c’est très regrettable, par le dessin de Plantu   sur la couverture du Monde daté du 3 février.       Pierre-Olivier : Sans faire référence directement à la thèse de   Huntington, est-il possible d’affirmer que cette crise se positionne sur un   fond de crise préexistante entre l’Occident et les pays arabes, le monde   musulman dans une plus large mesure ?       François Burgat : Oui, cela me paraît une évidence. Cet épisode est la « cerise   sur le gâteau » d’une longue tension dont les racines plongent à l’évidence   jusque dans notre histoire coloniale partagée.       Croumie : Y a-t-il une législation sur le respect des cultes ? Quelles   sont les limites à ne pas dépasser ?       François Burgat : Disons qu’il existe à tout le moins un exemple historique   essentiel. Il va de soi que les caricatures qui stigmatisaient dans les années   1930 le judaïsme et la judaïté n’ont jamais été qualifiées, fort heureusement,   de témoignages de la liberté d’_expression. C’est en fait cette géométrie   variable de la protection des marqueurs identitaires des différentes   communautés du monde qui doit être aujourd’hui soulignée et, bien évidemment,   dénoncée.       Zorlak : Ne fait-on pas une redondance lors de l’emploi du terme « politisation »   – de la crise, l’islam étant déjà de fait une croyance à caractère   politico-religieux ? Dès lors, ne s’enlève-t-on pas les moyens de comprendre   la crise par des vues prenant pour référence ce que nous considérons être une   religion en Occident ? Ne péchons-nous pas par optimisme ?       François Burgat : Oui, bien évidemment, cette affaire est politisée. Elle est   politisée à cause de cette vieille proximité entre le religieux et le   politique que vous rappelez à juste titre, même si elle ne caractérise pas   seulement l’aire musulmane.       Elle est politisée également du fait du rôle évident d’un certain nombre   d’acteurs étatiques dans cette tempête dite « religieuse ». Plus surprenant   peut-être, il faudra également décrypter le rôle que pourraient avoir joué   d’autres acteurs étatiques majeurs, tels les Etats-Unis, dans une crise dont   les effets vont surtout affecter les relations entre le monde musulman et   l’Europe. De toute évidence, il est inefficace d’aborder les tensions du monde   avec les instruments de la théologie des différents acteurs. Derrière le voile   du religieux, partout et toujours, pas seulement en terre d’islam, nous   trouvons bien le politique.       UNE CRISE PRÉMÉDITÉE ?        Ali : On parle beaucoup de la manipulation de la « rue arabe  » pour   expliquer les réactions observées ici et là, mais ne pensez-vous pas que les   médias occidentaux (et donc la « rue occidentale ») aient eux-même été manipulés   ?       Zaou: Selon vous, quel est le but recherché par certains Etats arabes    en envenimant la crise ?       François Burgat : Plusieurs indices accréditent la thèse que ce sont des   acteurs étatiques, et non les « rues », qui ont relancé cette crise, qui était   déjà ancienne. Du côté des régimes arabes, à un moment où le camouflet des   urnes palestiniennes était tout particulièrement déstabilisant, il n’est pas   invraisemblable du tout qu’ils aient voulu se faire à bon compte une provision   des dividendes religieux de leurs opposants islamistes. Il est manifeste que   les ministres de l’intérieur de toute une série de pays arabes ont   littéralement anticipé la colère de leur rue.       Dans le cas de la Syrie, dont le régime est menacé par les pressions   occidentales, le message de ces manifestations encouragées était également : « prenez   garde, si vous nous poussez vers la sortie, il faut que vous soyez conscients   que ce sont les ‘hordes islamistes’ qui prendront notre suite ».       Pour les acteurs occidentaux, il n’est pas impossible que ce retour à une   lecture strictement théologique des tensions au Proche-Orient soit une façon   de masquer une fois de plus la matrice strictement politique d’un vieux   conflit qui entre plus logiquement dans les catégories d’une guerre de type   colonial que d’une guerre des religions.       Pascale : Pensez-vous que l’ensemble de la crise est prémédité par les   mouvements islamistes radicaux ?       François Burgat : Je ne puis que confirmer ma réponse précédente. La relance   de cette crise s’est opérée d’une façon tout particulièrement suspecte.   L’importance du rôle d’acteurs proches des régimes nous incite à l’évidence à   la plus grande prudence. Les informations sont convergentes pour montrer que   les groupes radicaux n’ont aucunement été liés à cet épisode de la montée en   puissance de la tension entre le monde « musulman » et le monde « occidental ».       Senta : Quels sont les indices qui font dire que ce sont les Etats du   Moyen-Orient qui ont relancé la crise ? Quel est leur intérêt véritable ?       François Burgat : Le principal indice, c’est le rôle des acteurs   institutionnels : ministres de l’intérieur, hommes d’affaires proches du   pouvoir, relais habituels des milieux gouvernementaux. Quel était leur intérêt   ? Il était d’aider à faire passer la pilule du message monté des urnes   palestiniennes. Ce message était double : aucun régime ne pourrait sans doute   survivre à un scrutin organisé dans des conditions satisfaisantes de   régularité. Ce sont les courants dits « islamistes » qui supplanteraient les   régimes plus naturellement que leurs concurrents issus de la gauche laïque.       Les régimes arabes pourraient ainsi avoir voulu « botter en touche » en créant   artificiellement une crise bilatérale qui allait leur permettre de puiser dans   le plus profond des réservoirs de ressources politiques dans cette région du   monde, à savoir le réservoir du nationalisme.       Diarry : Quelle raison, selon vous, a poussé les journalistes à   publier ces caricatures ?       François Burgat : Je ne dispose pas d’informations privilégiées sur les   circonstances de la publication initiale. On connaît en revanche assez bien   l’imaginaire politique de ceux qui ont publié et republié ces caricatures en   affirmant vouloir défendre la liberté de la presse. J’accepte la nécessité de   « briser les tabous ».        Toutefois, à mes yeux, en matière de liberté de presse, le tabou le plus   dangereux n’est certainement pas le respect du prophète des dominés, mais plus   vraisemblablement la force du mur d’argent des dominants. Or force est de   constater que ce tabou-là laisse le courage de nos défenseurs de la liberté   d’_expression bien vacillant.       LES « EFFETS PERVERS DE LA CONCENTRATION DE LA   PRESSE »       Chantal : Est-ce que l’Europe doit se mobiliser pour garder son droit   à la liberté d’_expression, afin de faire face aux acteurs étatiques, et en   a-t-elle la possibilité ?       François Burgat : Oui, bien sûr, l’Europe doit se mobiliser pour garder sa   liberté d’_expression. Encore faut-il, quitte à me répéter, identifier   soigneusement les vraies limites actuelles à la liberté d’_expression des   Européens.       J’ai pour ma part tendance à les voir dans les effets extrêmement pervers du   processus de concentration de la presse, qui fait que les groupes industriels   s’approprient de plus en plus systématiquement la capacité de toutes les   familles politiques, de toutes les sensibilités, de toutes les tribus de la   nation ou du monde à exprimer leur pluralisme et leurs différences. C’est ce   déséquilibre de la répartition de la parole publique, chaque jour plus   flagrant, qui entretient à mon sens les pires frustrations et nourrit toutes   les radicalisations. Pourquoi nos « impertinents briseurs de tabous »   n’exercent-ils jamais leurs talents contre ce scandale-là ?       Marie : Les droits à la liberté de la presse et à la liberté   d’_expression revendiqués par les journalistes ne sont-ils pas une simple   façade pour s’innocenter ?       François Burgat : Vous me donnez l’occasion de redire que la liberté de presse   et d’_expression, ce bien qui justifie tous les combats, ne saurait se résumer   au droit de stigmatiser une partie de la communauté nationale ou mondiale. Il   réside plus largement dans la garantie accordée à tous d’exprimer, dans le   respect des autres, leurs ambitions et leurs différences.       Rembrandt : Avez-vous entendu parler du concours des caricatures sur   l’Holocauste organisé par un journal iranien ? Pensez-vous que l’Occident aura   la même réaction que pour les caricatures sur le prophète Mahomet ? Dans une   plus large mesure, pensez-vous que s’il y avait une caricature contre   l’homosexualité ou sur le sionisme les tenant de la liberté d’expressions   auraient la même réaction avec les mêmes arguments ?       François Burgat : Si ce n’était pas le cas, si l’Occident ne se mobilisait pas   unanimement pour condamner les débordements anti-humanistes de l’autre, sa   capacité à fabriquer de l’universel pourrait être mise en doute.       Permettez-moi tout de même de constater que les dérives, bien réelles et qu’il   ne s’agit pas de nier ou de minimiser, de certaines fractions de l’opinion   publique musulmane, font l’objet d’une surveillance et d’une vigilance   auxquelles il me paraît pour l’heure difficile d’apporter quelque chose. Si   cette vigilance venait à faire défaut, comptez sur moi pour renforcer les   rangs de ceux qui feront tout pour lui redonner le niveau requis.       Redsmith : J’ai du mal à croire que « France Soir », journal en grande   difficulté financière, ait publié ces caricatures uniquement en signe de   solidarité avec les journalistes danois. Le limogeage du directeur de la   publication qui a suivi a également choqué. Pensez-vous que ce limogeage soit   lié à la nationalité du propriétaire du journal. En clair, pensez-vous que M.   Lakah ait fait cela pour se protéger ?       François Burgat : Les dérapages récents de l’institution judiciaire française   m’ont au moins appris quelque chose : on ne juge pas sans une enquête   approfondie. N’ayant pas les moyens de connaître le fond de la pensée du   directeur de « France Soir », je me garderai de commenter le sens de ses   décisions récentes.       Marc Aurèle : J’ai lu, cet été, un grand dossier dans l’hebdomadaire   brésilien « Vejà », qui recensait, pays par pays, l’origine religieuse des   victimes du terrorisme. Pas de surprise pour vous, j’imagine, la religion la   « plus touchée » était bien sûr l’islam. Ne vous semble-t-il pas étonnant   qu’aucun grand groupe de presse européen n’ait fait ni publié l’étude ?   L’opinion publique n’oublie-t-elle pas trop facilement que le terrorisme   islamique tue en premier lieu des musulmans ? Caricaturer Mahomet comme un   poseur de bombes ne participe-t-il pas de cette amnésie collective au service   d’un prétendu choc des civilisations ?       François Burgat : Revenons à l' »essence » de l’analyse. La violence politique   dans le monde n’est pas explicable par le vocabulaire (« islamique ») qu’emploie   une partie des acteurs de la confrontation. L’explication de cette violence   peut être rapportée à trois grands dysfonctionnements politiques ou à trois   niveaux de « déni de représentation » dont seraient victimes ceux qui arrivent à   la conclusion que seule la violence peut leur rendre justice.        Le premier dysfonctionnement est celui de l’ordre mondial né en 1990 de   l’effondrement de l’URSS et l’espace sans limite qu’il donne à   l’interventionnisme et à l’unilatéralisme des Etats-Unis d’Amérique. Le   deuxième grand échec du politique est le conflit israélo-arabe et la   persistance du camp dominant à vouloir à la fois la paix et la terre. Le   troisième déni de représentation, la troisième filière de fabrication de la   radicalisation politique, ce sont ces régimes que je qualifie de « Pinochet   arabes » pour exprimer l’idée que l’environnement occidental leur permet de   s’abstenir de toutes les règles les plus élémentaires de respect des droits de   l’homme, à charge pour eux de contenir, y compris par la plus extrême violence,   les protestations montantes de la périphérie contre les méthodes qu’emploie le   centre pour maintenir son hégémonie.       COMMENT LA CRISE SE RÉSOUDRA-T-ELLE ?         Jacques : Connaissez-vous l’orientation politique du journal danois et de   l’auteur des dessins ? Car tout cela a un relent d’extrême droite qui a tout à   gagner dans cette affaire.       Steph : Bonjour, pensez-vous que l’extrême droite européenne va   bénéficier de ces évènements ?       François Burgat : Je ne suis pas spécialiste de la presse danoise. J’ai lu,   comme vous sans doute, que ce journal était placé sur l’échiquier politique   quelque part entre droite musclée et extrême droite. Il est absolument évident   que les progrès fulgurants de nos « briseurs de tabous », en libérant la parole   stigmatisante, font faire des progrès au pire de ce que contiennent nos tripes,   au détriment du plus noble de ce que contiennent nos cerveaux.       Khettaoui : Ne sommes-nous pas arrivés à un moment charnière (où tout   peut basculer dans le pire) de la relation entre certains Etats arabes et   l’Occident ?       Zaou : Comment voyez-vous la fin de cette crise ? Renversement des   régimes arabes par une montée islamique ? Vague de terrorisme en Europe ?   Crise mondiale ? ou bien… crise de nerf passagère et apaisement rapide ?       François Burgat : J’aimerais pouvoir vous dire que je suis optimiste. Disons   que je le suis sans réserve s’agissant de la capacité des sociétés du monde   musulman à évoluer vers des modes de fonctionnement politique et des formes   d’organisation sociale en parfaite compatibilité avec ce que nous considérons   présentement comme la « modernité » au sens universel du terme.       Je suis en revanche très franchement pessimiste sur notre capacité   d' »Occidentaux » à gérer calmement cette phase difficile de notre histoire, où   nous devons apprendre à jouer le rôle plus modeste et plus réaliste qui est   celui de l’une des tribus du monde, et non du producteur monopolistique de   l’universel.       J’ai peur que les performances de nos « briseurs de tabous à géométrie   variable », qui stigmatisent de façon inacceptable cette partie du monde dont   on peut dire qu’elle n’est pas aujourd’hui la plus influente, ait valeur de ce   que les Anglais appellent des « self fulfilling prophecies », des prophéties   autoréalisatrices.       J’espère toutefois très sincèrement être sur ce terrain-là dans l’erreur, et   que ce sont les cerveaux de la raison et non les tripes de la peur et de la   haine qui, à court ou moyen terme, vont l’emporter.       Chat modéré par Stéphane Mazzorato et Edouard   Pflimlin       (Source : Le Monde.fr, le 7 février 2006)
 Chronique   
Mahomet caricaturé, planète tourneboulée,
     par Dominique Dhombres       LE MONDE | 07.02.06 | 13h23  •  Mis à jour le 07.02.06 | 13h23       La querelle du portrait n’a pas fini de nous occuper. La bombe dessinée dans   le turban de Mahomet n’était que de crayon et de papier.       Elle a déjà réussi à incendier et à tuer. Un incendiaire particulièrement   idiot ou maladroit, l’un n’empêchant d’ailleurs pas l’autre, a réussi, à   Beyrouth, à mourir asphyxié dans le consulat du Danemark qu’il était venu   brûler. En Afghanistan, il y a déjà quatre tués. Et, comme pour l’affaire   Rushdie qui a duré des années, ce n’est certainement pas fini. Avec   philosophie, votre serviteur se prépare donc à subir des heures de discussion   sur cette dispute devenue planétaire.           Dans le débat d’idées télévisé, il y a le haut et le bas de gamme. Celui   organisé lundi 6 février sur France 2 dans « Mots croisés » relevait de la   première catégorie. On ne s’y endormait pas, en tout cas. Tous les genres sont   bons hormis le genre ennuyeux, disait déjà Voltaire. Les invités de « Mots   croisés » s’engueulaient, certes, mais ils avaient le mérite de le faire en   agitant des idées et non des invectives. Il y avait bien de-ci, de-là, de   petites piques privées.       Mais, au total, il s’agissait, sous la houlette avisée d’Yves Calvi, qui a   définitivement gagné lundi soir son fanion de chef scout en remplacement de la   cheftaine Chabot, d’un vrai débat et de vraies idées. Cela valait d’abord pour   celle qui était venue sur le plateau toute de blanc vêtue. Saïda Kada ne   pouvait passer inaperçue dans cette tenue. Elle ne le souhaitait pas non plus.       Elle a co-écrit un bouquin là-dessus qui est nettement moins drôle que   L’Affaire du voile de Pétillon. Voilée comme une ursuline et pugnace comme une   catcheuse, Saïda Kada s’estime offensée par cette caricature de Mahomet. Et   qu’on ne vienne pas lui parler de la liberté d’_expression. Elle connaît !   Elle en use d’ailleurs à merveille. « Comment un amalgame aussi grossier, aussi   dangereux que d’associer le visage du Prophète au terrorisme peut-il être   assimilé à la liberté d’_expression ? », demandait-elle.       Pas mal, non ? Philippe Tesson parvenait à lui faire dire, sans la violer   beaucoup, que quitte à choisir, elle préférait le principe du respect des   croyances à celui de la liberté d’_expression. Cela semblait aussi le cas   d’Hubert Védrine et de Mouloud Aounit. L’ancien ministre socialiste des   affaires étrangères et le président du MRAP se retrouvaient ainsi dans le même   camp que George Bush. La planète est décidément cul par-dessus tête.        Dominique Dhombres       (Source : Article paru dans l’édition du journal   « Le Monde » du 08.02.06)
Les réactions des abonnés du Monde.fr à la lecture de l’article « Mahomet caricaturé, planète tourneboulée », par Dominique Dhombres
     LE MONDE | 07.02.06 | 13h23  •  Mis à jour le 07.02.06 | 13h23             ombu   08.02.06 | 08h44   Un rescapé du naufrage en Egypte se réjouit en criant « Dieu m’a sauvé ». Le   pauvre bougre qui est mort dans le consulat du Danemark n’a pas pu le crier.   Il fut un temps où les croisés saccageaient des villes, exterminaient des   populations aux cris de « Dieu le veut ». Moi qui m’interroge depuis ma   naissance sur l’existence ou la non existence du Créateur, je me demande si   vraiment Il couvre autant d’actes contradictoires. Et je suis mal à l’aise   quand je vois mourir et souffrir autour de moi.       Louise Colet    08.02.06 | 07h26   Et si cet embrasement n’était que le désespoir d’une amante ou d’un amant   délaissé, d’une muse déchue après avoir séduit par son exotisme, d’une haine   de soi lié au désamour de l’autre, d’une région immolée sur l’autel du confort   et de la tranquillité occidentale, sur le dos de laquelle tout le monde se   réconcilie d’accord pour en faire la source de tous les maux après en avoir   fait sa muse. Le cri de déception en fait d’une ex muse relèguée au ban du   monde au nom de la tranquillité.       maurice b.   08.02.06 | 05h55   quelques remarques sur les commentaires : Voltaire, Montesquieu, Nietzche,   Malraux et les autres, on voit bien qu’on touche ici à l’essentiel de nos   valeurs et de notre culture. Ajouterai-je Churchill pour son allusion à propos   de Munich : « vous croyez éviter la guerre avec le déshonneur, vous aurez la   guerre avec le déshonneur ». Attention au déshonneur, messieurs les politiques.   L’emploi du mot « violer » est à la fois une clause de style et totalement   français dans le sens, Françoise.       Luisella+S   08.02.06 | 05h46   We are not amused « La bombe…n’était que de crayon et de papier. ». A croire   que ces bombes là ne sont pas les plus puissantes, et les plus délicates à   manier! « …sans la violer beaucoup »: une _expression tout à fait offensante.   Sans doute l’auteur voulaitil « caricaturer » Saïda Kada, pour ne pas avoir à la   prendre au sérieux.        Princesse   08.02.06 | 02h01   Depuis que Dieudonné a fait un communiqué de presse (passé inaperçu ?) http://dieudo.net/2007/article.php3?id_article=38   pour saluer la victoire de l’Hamas, plus rien ne me surprend vraiment !!        simplex   08.02.06 | 01h47   mon Dieu, que de sottises proférées en ton nom! moi aussi je cours acheter le   charlie hebdo, avec son sous-titre rafraîchissant. Prendre des caricatures   pour des crimes à punir, on se croirait revenus au temps du malheureux   chevalier de La Barre, torturé et exécuté pour n’avoir pas retiré son chapeau   au passage d’une procession religieuse… Quant aux tartuffes qui caressent   les imbéciles fanatiques dans le sens du poil, ils sont aussi ridicules que   chez Molière!        LaFoudre69 liberté d’_expression   08.02.06 | 00h37   Concernant le Mrap, M. Mouloud Aounit, qui porte plainte contre nos dangereux   terroristes en porte-plume, venus droit du Danemark, soutient dans le même   temps, à l’aide d’une tapageuse pétition, des rappeurs qui passent au tribunal   pour avoir insulté la France de manière ordurière dans leurs textes. M. Aounit   (voir le site du Mrap) explique, sans rire, que dans une démocratie, il faut   laisser s’exprimer… la liberté artistique. Vous avez dit « Bizarre » ?       fee-carabosse   08.02.06 | 00h12   Comment débattre sereinement de respect (et autres broutilles sans importance   probablement), quand monsieur Dhombres se permet, pour stigmatiser une invitée   à une émission télévisée (et si contestables que puissent être ses propos, là   n’est pas le problème), d’employer une image nauséabonde : « sans la violer   beaucoup » (et renforcée par le rapprochement « voilée/ violer ») ? Si c’est là   la « liberté d’_expression » que revendique ce monsieur, je sens qu’il va me   faire aimer la censure …       Clairville   07.02.06 | 23h10   Sans la liberté d’_expression qui inclut, bien entendu, la liberté d’exprimer   ses croyances, et de se moquer de celles des autres, il n’y aurait que des   dictatures. Et bcoup regrettent qu’il n’en soit pas ainsi.       condorcet   07.02.06 | 22h56   « l’erreur, tout comme la vérité, a droit à la vérité »       Oups!   07.02.06 | 22h49   Les interventions de Lelouche furent les plus éclairantes. Son livre « les   illusions gauloises » est indispensable pour comprendre ce qui se passe ici et   dans le monde musulman.       Patrick L.   07.02.06 | 22h48   Vas y, coco, mais je n’achèterai plus Charlie. Si tu veux défendre la liberté   d’_expression, regarde d’abord notre presse locale, gavée de subventions,   faire de la com, mais plus jamais de l’info. Que les fanatiques soient blessés,   ce n’est pas grave, mais cette provocation va les renforcer. Ces caricatures   aggravent l’intolérance qu’elle prétendent combattre, et tuent des innocents.   Mais augmentent les tirages de Charlie Hebdo.        ALBERT F.   07.02.06 | 22h27   Je voudrais attirer l’attention sur 2 articles, intéressants à mon avis, en   rapport avec le sujet: une page de J-François Clément dans le Monde papier   d’hier 6/02, relatant la « mentalité de victimisation » des musulmans, et « Y   aurait-il en Islam deux poids deux mesures dans l’indignation? » de Renaud   Girard, dans le Figaro du 7/02. Et Bravo à Charlie Hebdo qui reste fidèle à sa   vocation satirique dans un contexte très difficile.Il convient en effet de   résister à l’agression politico-religieuse.       Kindi+   07.02.06 | 22h11   Il existe dans le monde arabe des forces sincérement démocratiques, beaucoup   plus importantes qu’on le pense, qui essayent tant bien que mal de faire   avancer les choses dans un contexte difficile. Merci d’avoir détruit leurs   efforts. Merci d’avoir poussé les masses arabes vers le radicalisme avec des   provocations gratuites. Merci d’hypothequer l’avenir pour vendre 5000 numéros   de plus Merci à la liberté irresponsable        Mahomet_Flaubert   07.02.06 | 22h09   Je comprends tout à fait les questions et interrogations de certains   internautes:plus qu’un malaise,vis à vis d’une certaine _expression de l’Islam   dans le monde,que de nombreux musulmans déplorent!mais comprenez s’il vous   plait que de simples orants et fidèles,ou tout simplement des individus   culturellement différents de vous se sentent floués,sans aucune forme de   detestation!ils ne demandent que vivre en paix sans se faire insulter d’une   manière ou d’une autre!il y a autre chose à se dire           07.02.06 | 22h00   Quand je vois Saîda Kada…j’éteins le poste: d’après vos commentaires, j’ai   bien fait; je le regrette car je suis une fan de P. Tesson, qu’on voit trop   peu et je suis M. Calvi tous les jours à C dans l’air; Quant au MRAP il est   complètement déconsidéré…       SÉNÈQUE   07.02.06 | 21h57   Il faudrait que l’on m’explique : en quoi une satire de l’islam serait-elle un   délit de racisme ? Les mots ne veulent plus rien dire, le MRAP est pitoyable.   J’attends avec impatience la suite de cette plainte : quels arguments de   Mouloud Aounit va-t-il pouvoir mettre en avant pour démontrer qu’elle est   recevable ?       yetto   07.02.06 | 21h57   Les rancoeurs et frustrations longtemps restés cachés explosent brutalement à   l’occasions de quelques caricatures avec un retard de 4 mois mis à profit par   les réseaux islamistes pour faire courir les bruits les plus absurdes comme la   destruction de corans par des »infidèles ». Tous les coups bas et réglements de   compte deviennent permis pour les services secrets syriens et   iraniens.Etait-ce évitable? non on trouvera toujours des pretextes,l’usage de   la victimisation a encore de beaux jours.       Fawzi H.   07.02.06 | 21h56   je relisais des actes d’un colloque sur le declin culturel dans l’histoire de   l’Islam (1977/Maisonnneuve/Larose) et il est question de Montesquieu et   Voltaire:le deux déplorent le [facheux despotisme qui régne en   Orient:accaparement des terres,voire du commerce, au profit des princes],et   Voltaire bien qu’ayant eu des mots détestables sut les populations,avoue que   ce [n’est point leur faute mais leur gouvernement detestable]des peuples mal   gouvernés!nous le crions fort depuis longtemps!pétro-dollar       ALBERT F.   07.02.06 | 21h14   « Tuons Dieu, respectons l’Homme »dites vous. Mais Nietzsche croyait déjà avoir   tué Dieu.Son cadavre bouge encore. il se porte très bien.Ou plutôt très mal.   Car l’idée de ce Dieu qu’on est en train de répandre est celle d’un pervers,   qui confond le bien et le mal, tourne la tête de ses dévôts pour en faire des   assassins. On tue partout beaucoup en son nom.Que d’insanités recouvre le   prétendu « sacré ».Il est vrai que ce Dieu a une histoire tellement humaine:   comme son créateur,il est très imparfait.       RENE M.   07.02.06 | 21h05   Croire en Dieu, peu importe son nom, c’est savoir faire la part entre   l’essentiel et les foutaises. Je me demande s’il existe de par le monde   beaucoup de vrais croyants. Prendre des caricatures pour autre chose que des   caricatures, c’est faire peu de cas de la solidité de sa foi. Dieu est Dieu   nom de Dieu. Ce ne sont pas les caricatures qui l’offensent, mais le manque de   foi et le mésusage de son nom.        Philippe P.   07.02.06 | 20h31   Ne pas tolérer les atteintes à la croyance d’autrui serait un juste pendant à   notre intransigeance vis à vis des atteintes portées à la laïcité. Ce serait   une preuve de tolérance, et de logique envers nous mêmes, non une capitulation   de notre liberté de pensée qui finit par s’user à force de s’en servir un peu   trop, surtout lorsque l’on sait qu’elle va heurter.        Merci Val   07.02.06 | 20h22   Le charlie hebdo est sorti, je cours l’acheter.       françoise bernhardt   07.02.06 | 20h15   Etonnante cette _expression en fin d’article  » sans la violer beaucoup »… je   sais que même les chroniqueurs du monde ont le droit d’avoir un inconscient   mais l’_expression est d’une maladresse insigne dans un tel contexte et pour   parler d’une jeune femme habitée par des croyances religieuses. En tant que   lectrice et en tant que femme permettez moi de vous dire que c’est minable,   nul, blessant ( pour la jeune femme et pour toutes les femmes).       Gustave A.   07.02.06 | 20h14   Attention! Le moyen âge frappe à nos portes! Ou l’Occident est capable de   faire preuve de toute l’agressivité nécessaire pour défendre ses valeurs de   liberté, ou nous replongeons dans un monde dominé par le religieux le plus   rétrograde qui soit! Occident, où es-tu?       JEAN MARC E.   07.02.06 | 20h05   Voile qui fache, Turban explosif, Burka hermétique, Bannières   lapidées..étoffes qu’on agite et rage furieuse …quand cesserons nous de   parler chiffons?       desfrontières   07.02.06 | 19h55   N’est-ce pas Mahomet qui est allé à l’assaut des « twins towers » peuplées d’une   ruche active d’êtres humains évolués? Non, je me trompe, c’est Jules Ferry! Le   religieux est dangereux (inquisition, colonisation, racisme, ignorance   confortable et cruelle): que ne relit-on les pages de Donatien de Sade sur les   religions révélées? Qu’on remette ces imposteurs à leur place et qu’on   s’occupe de la misère humaine et animale!       amistat   07.02.06 | 18h57   J’aimerais répondre à ce lecteur qui parle des inscriptions sur les tombes et   de négationnisme. Cela n’a rien à voir avec la liberté d’_expression. Celle-ci   s’exerce avant tout dans une presse libre.Caricaturer, même si ce n’est pas de   très bon goût, c’est autre chose que profaner des tombes ou des édifices   religieux.       francoisalex   07.02.06 | 18h54   De Mahometis non curat praetor ! 😉       equadiff   07.02.06 | 18h45   un cap a bien tenir : soutenir les femmes musulmanes qui veulent en finir avec   l’intégrisme. elles au moins elles soutiennent Charlie-hebdo ! Le changement   viendra par les femmes, ne l’oublions pas.       GAELLE   07.02.06 | 18h33   « Le XXIème siècle sera religieux ou ne sera pas »…. avait annoncé le   visionnaire Malraux ! J’espère que Charlie Hebdo aura la bonne idée de tourner   en folle dérision l’ensemble des religions et de leurs figures symboliques (Jésus,   Buddha, Abraham, le Pape, etc) et pas seulement celles de l’Islam. Les   autorités ont certes le devoir de calmer les esprits, mais les journaux   indépendants et satiriques français, le devoir de continuer leurs irrévérences.   Tuons Dieu, respectons l’Homme.        Mahomet_Flaubert   07.02.06 | 18h31   La palice n’aurait pas mieux dit cher Dhombres:[La bombe dessinée dans le   turban de Mahomet n’était que de crayon et de papier].Faut-il le redire que   l’embarsement que nous voyons se passent:en Syrie,en Iraq,en Palestine,en   Afghanistan…Là,où les USA pensent faire des alternances démocratiques en   installant les religieux!C’est inoui!il faut renvoyer le boomerang à Bush qui   s’offusque du caractère offensant des caricatures!une blague!les pyromanes   sément le trouble en Europe.Sagesse au fond!       jcg   07.02.06 | 18h31   Concernant « Mots croisés », la liste des invités ne laisse pas de   m’impressionner. Que la fine fleur de la pensée mondiale ! Quelle panachage,   entre les politiques archi-vus et entendus, des « représentants » partiaux et   singuliers des musulmans ! L’affaire est d’une telle gravité, profondeur qu’il   serait dramatique que les médias de masse continuent dans cette logique du   commentaire réservé aux « élus ». Car jusqu’ici, je n’ai pas entendu une seule   fois un politique dire quelque chose de profond…       Majid B.   07.02.06 | 18h16   Il me semble que le problème n’est pas vraiment religieux. L’explosion dans le   monde musulman est un symptome. D’abord d’un raz le bol du deux poids deux   mesures des Etats Unis (Cf. Israel, Palestine..) . Ensuite du jeux dangereux   pratiqué par l’occident qui maintient au pouvoir des tyrans qui le servent au   detrimens de leur peuple. Dès lors, la religion est tout ce qui reste aux   peuples pour préserver une partie de leur dignité.       vorslov   07.02.06 | 17h57   Sans doute,je mélange tout mais il me semble que si des photos du prophète de   l’islam existaient, les zombies qui se font explosé les mettraient dans les   pages de leur coran avant d’actionner le détonateur, ou alors avant de   s’anéantir renient-ils leur religion pour permettre aux musulmans ordinaires   de dormir tranquilles.Quelque chose m’échappe, mais pas de penser que Assad de   Syrie,président par succession,futur mis en examen pour assassinats a organisé   les troubles à Beyrouth.       canardulac   07.02.06 | 17h52   Les caricatures vis à vis de l’islam, c’est comme le brouillard vis à vis des   accidents de la route. Il ne s’agit pas de « la cause », mais seulement d’une   circonstance, d’un déclencheur. Les manifestations récentes sont la…   manifestation de rancoeurs accumulées, de conflits séculaires qui ont besoin   d’une toute petite étincelle pour éclater. S’il n’y avait pas eu ces dessins,   d’autres étincelles auraient suffi (suffiront !) à (re)mettre le feu aux   poudres.        gwenael l.   07.02.06 | 17h51   Cette affaire m’inquiète beaucoup, et la thèse du « choc des civilisations » que   je rejetais au nom du politiquement correct trouve aujourd’hui, hélas, un   certain sens. Je me trompe ? Quant au MRAP, quelle déception ! Semblent plus   très laïcs, dites-moi !       Thérèse Daisy B.   07.02.06 | 17h41   Quand on commmet des attentats « terroristes  » commis par des kamikazes   ilsmamistes( métro parisiens, à Madrid, à Bali, à Londres, à New York etc..)   tuant des milliers de « mécréants », au nom d’Allah, revendiqués ensuite par Ben   Laden, il me semble logique que l’on finit par assimiler Mahomet au terrorisme.   Les VRAIS musulmans pacifistes, auraient dû ALORS se rebeller contre cet usage   abusif de leur religion et de son prophète.       Kindi+   07.02.06 | 17h38   Les caricatures de Mahomet avec une bombe stigmatisaient aussi une race        christophe d.   07.02.06 | 17h25   Le MRAP a t’il porté plainte quand les manifestants lycééns d’avril dernier   ont été tabassés à Paris aux cris de « mort aux « blancs  » ??       christophe d.   07.02.06 | 17h18   Que la madonne enfoulardée de service vienne , à grands envoilées rhétoriques,   nous infliger sa conception théocratique chiite de notre Répubique , rien là   de bien neuf .Mais que le président du MRAP dont on pourrait s’attendre à ce   qu’il sache distinguer blasphème et racisme (les caricatures nazies dont il a   fait mention étaient antisémites parce que stigmatisant une « RACE » , non une   religion )dévoile une …mauvaise foi partisane indigne de sa fonction .       EVELYNE N.   07.02.06 | 17h13   d’un côté des caricatures dans un journal, de l’autre des tueries : et on « débat »   pour savoir qui a tort qui a raison !… c’est vraiment le monde à l’envers et   cette dame blanche (je n’ai pas vu l’émission) offusquée par un dessin ne   s’offusquerait pas des réactions sanglantes et follement démesurées des   croyants offusqués : est-ce un débat ou une débâcle, cette inquiétante   confusion des valeurs ?       M F.   07.02.06 | 16h50   Pourquoi des non musulmans devraient suivre les interdits des musulmans ? Les   religions chretiennes n’interdisent pas les représentations de Dieu, de Jesus   et des prophètes. Quand aux caricatures, elle me touche plus, en tant que   chrétienne, quand elles viennent de chrétiens, que de non chrétiens, qui n’ont   pas les mêmes raisons que moi de respecter les symboles religieux. Pourquoi   s’attaquer aux minorités chrétiennes des pays arabes, sinon par gout de la   violence. Vive la liberté la tolérance !       SERGE C.   07.02.06 | 16h50   Comment sait-on que c’est Mahomet qui était caricaturé ? Le turban ? Mahomey   portait-il le turban ? La bombe ? Les explosifs existaient-ils en Arabie du   VIIième siècle ? Le nez juif ? La barbe exotique ?L’aveu du caricaturiste ?   Mais peut-on faire confiance à un « infidèle » ? Ce n’est pas clair.       Michel B.   07.02.06 | 16h47   Cette imbécillité va-t-elle nous occoper encore longtemps ? En tout cas elle   occupe intensément des gens qui feraient mieux de s’occuper de leurs propres   affaires.       launi   07.02.06 | 16h21   Formidable émission en effet, mais une question n’a pas trouvé de réponses au   cours des débats. Pourquoi les Musulmans ne défilent-ils pas en masse dans les   rues des capitales du monde entier pour dénoncer l’utilisation qui est faite   de leur religion et du Prophète par le terrorisme international ? Le fossé ne   se réduirait-il pas ainsi, au lieu de se creuser, entre l’Occident et le Monde   arabe ou musulman (même sur la syntaxe, le sujet semblait hier si délicat…)       RENE M.   07.02.06 | 15h23   Je suis sidéré par l’hystérie qui s’empare d’un certain nombre de personnes,   comme si des caricatures pouvaient atteindre le message du Prophète Mahomet.   Je me demande comment il réagirait s’il était là pour assister à la réaction   folle de ceux qui se réclament de lui. Je ne parle même pas de ceux qui osent   se réclamer de lui pour comettre des crimes, pour inciter des jeunes   malheureux au suicide. Le Coran est une religion de la paix, de la sagesse, de   la bonté, pas de la passion ou pis du crime       JEAN C C.   07.02.06 | 14h57   Faut-il rappeler que le respect des croyances consiste avant tout a avoir la   liberte de pratiquer sa religion, quelle qu’elle soit; que nos intellectuels   bavards des plateaux de TV aillent donc essayer de se livrer a cet exercice en   arabie seoudite par exemple, juste pour avoir matiere a discussion…       Louis G.   07.02.06 | 14h30   « elle préférait le principe du respect des croyances à celui de la liberté   d’_expression ». Je crois qu’elle a dit « respect des croyants ». Ce n’est pas la   même chose. M.Dhombres, les tags sur les tombes des Israëlites, des Musulmans   ou autres, sur les murs des mosquées, synagogues, … relèvent-ils de la   liberté d’_expression? Où commence et où s’arrète la liberté d’_expression?   L’apologie du négationisme relève-t-il de cette liberté?        (Source : lemonde.fr, le 08.02.06)
Maxime Rodinson face aux caricaturistes Danois
     Par François-Charles JOURDANER       Ce n’est pas la première fois que l’inconséquence des citoyens chanceux de la   rive prospère du monde encolère des masses musulmanes, et les gens de bon sens   que nous tentons d’être ont trop coutume de voguer entre les paranoïas pour   trouver neuve l’empoignade planétaire qui résulte de l’ignorance et de la   goujaterie de crayonneurs septentrionaux en mal de turlupinade islamophobe. Le   fait est pourtant que l’inquiétude nous gagne lorsque nous mesurons ici que ce   ne sont pas des civilisations qui s’affrontent, mais bien au fond des états de   nature.       D’un côté celui du farceur avide d’exercer à n’importe quel prix sa liberté   d’_expression, sans considération de sensibilités qu’il ne veut même pas   connaître, sans considération non plus, puisque nous sommes en deçà de la   civilité, du fait qu’une liberté humaine, faute de devenir un abus destructeur,   ne s’exerce jamais sans discernement ni respect de l’humain et de sa dignité.       De l’autre, l’état de nature de populations qu’exaspèrent l’injustice   internationale et que les multiples échanges inégaux entretiennent dans une   permanente sujétion, face au monde développé qui leur prend leurs matières   premières, exploite leurs travailleurs, entretient leurs despotes et va   bronzer sur leurs plages, tout en pourchassant leurs émigrés clandestins et   donnant des leçons de démocratie et d’aggiornamento religieux aux rares   intellectuels qu’elles secrètent.       Alors, pour sortir de l’état de nature et rappeler à quoi peuvent ressembler   du savoir vivre, de la courtoisie, du tact et de l’urbanité sans complaisance   ni flatterie, pour nous consoler des ignares et des rustauds à crayons,   relisons les dernières pages du Mahomet de Maxime Rodinson. Nul ne peut le   soupçonner ni de mysticisme aveugle, ni d’inclination abusive, il s’agit de   civilité rigoureuse et humaine, tout simplement, de lucidité mêlée à quelque   chose qui pourrait passer pour une rude tendresse. Avec lui, nous serons alors   revenus à la civilisation et les néo illuministes pourront-ils sourire,   puisqu’ils ont de l’humour, à l’usage que l’on fit parfois, au XVIIIe siècle,   de la figure du prophète de l’islam.       François-Charles JOURDANER       « Tandis que la Chrétienté voyait en lui (Mahomet) l’archi-ennemi, malfaisant   et lubrique, tandis que l’Islam célébrait en lui « la meilleure des créatures   », des hommes venaient qui, concevant mal la foi religieuse et surtout cette   foi-là, cherchaient à retrouver en lui un homme pensant et agissant sur le   même plan qu’eux. Le Comte de Boulainvilliers, au début du XVIIIe siècle,   célébrait en lui un libre penseur qui créa une religion raisonnable. Voltaire,   pour attaquer le christianisme, en fait un cynique imposteur, menant pourtant   à l’aide de fables son peuple à la conquête de la gloire. Tout le siècle voit   en lui le prédicateur de la religion naturelle et rationnelle, bien éloignée   de la Folie de la Croix. Les Académies le célèbrent. Gœthe lui consacre un   magnifique poème où, type même de l’homme de génie, il est comparé à un fleuve   puissant. Les fleuves et les ruisseaux, ses frères, crient vers lui, demandent   son aide pour les amener vers l’Océan qui les attend. Irrésistible, triomphant,   majestueux, il les entraîne.       Und so trägt er seine Brüder,       Seine Schätz, seine Kinder       Dem erwartenden Erzeuger       Freudebrausend an das Herz.       Carlyle place parmi les héros de l’humanité cette grande âme en laquelle il   reconnaît quelque chose de divin. Puis les savants viennent, vont aux sources,   reconstruisent sa biographie d’après les historiens arabes de plus en plus   profondément scrutés. A la fin du XIXe siècle, l’arabisant Hubert Grimme voit   en lui un socialiste qui a imposé une réforme fiscale et sociale à l’aide   d’une « mythologie », très réduite d’ailleurs, délibérément inventée pour   effrayer les riches et emporter leur adhésion. Tandis que la plupart des   orientalistes essayent de nuancer leur jugement et mettent au premier plan sa   ferveur religieuse, haineusement le jésuite belge Henri Lammens, grand   connaisseur des sources, nie encore sa sincérité. Les savants soviétiques   discutent s’il fut réactionnaire ou progressiste. Les nationalistes, les   socialistes, les communistes mêmes des pays musulmans s’en réclament comme   d’un précurseur.       Ainsi chacun a cherché en lui le reflet de ses inquiétudes et de ses problèmes   ou de ceux de son siècle, chacun l’a amputé de ce qu’il ne comprenait pas,   chacun l’a modelé selon ses passions, ses idées ou ses phantasmes. Je ne   prétends pas avoir échappé à cette loi. Mais, si l’objectivité pure est   impossible à atteindre, c’est un sophisme que de poser qu’il faut, en   conséquence, être délibérément partial. Cet homme dont la pensée et l’action   ont ébranlé le monde, nous savons bien peu de choses certaines sur lui. Mais,   comme pour Jésus, à travers récits suspects et traditions boiteuses, on peut   percevoir quelque chose qui est le reflet d’une personnalité singulière,   étonnante pour les hommes ordinaires qui se réunirent autour d’elle. C’est ce   reflet tel que j’ai cru l’apercevoir que j’ai essayé de fixer dans ce livre.   Ce n’est pas une image simple. Ni le monstre satanique des uns, ni la «   meilleure des créatures » des autres, ni le froid imposteur, ni, le théoricien   politique, ni le mystique exclusivement épris de Dieu. Si nous le comprenons   bien, Mohammad était un homme complexe, contradictoire. Il aimait le plaisir   et se livrait à l’ascèse, il fut souvent compatissant et quelquefois cruel.   C’était un Croyant dévoré d’amour et de crainte pour son Dieu et un politique   prêt à tous les compromis. Doué de peu d’éloquence dans la vie ordinaire, son   inconscient pendant une courte période fabriqua des textes d’une poésie   déconcertante. Il fut calme et nerveux, courageux et craintif, plein de   duplicité et de franchise, oublieux des offenses et atrocement vindicatif,   orgueilleux et modeste, chaste et voluptueux, intelligent et, sur certains   points, étrangement borné. Mais il y avait en lui une force qui, avec l’aide   des circonstances, devait en faire un des quelques hommes qui ont bouleversé   le monde.       Faut-il s’étonner de ces complexités et de ces contradictions, de ces   faiblesses et de cette force ? Après tout c’était un homme d’entre les hommes,   soumis à nos défaillances, disposant de nos pouvoirs, Mohammad ibn ’Abdallâh   de la tribu de Qoraysh, notre frère.        Maxime Rodinson       François-Charles JOURDANER       (Source : Oumma.com, le 3 février 2006)
Danish paper rejected Jesus cartoons
 Gwladys Fouché     Monday February 6, 2006            Jyllands-Posten, the Danish newspaper that first published the cartoons of     the prophet Muhammad that have caused a storm of protest throughout the     Islamic world, refused to run drawings lampooning Jesus Christ, it has     emerged today.           The Danish daily turned down the cartoons of Christ three years ago, on the     grounds that they could be offensive to readers and were not funny.           In April 2003, Danish illustrator Christoffer Zieler submitted a series of     unsolicited cartoons dealing with the resurrection of Christ to     Jyllands-Posten.           Zieler received an email back from the paper’s Sunday editor, Jens Kaiser,     which said: « I don’t think Jyllands-Posten’s readers will enjoy the drawings.     As a matter of fact, I think that they will provoke an outcry. Therefore, I     will not use them. »     The illustrator said: « I see the cartoons as an innocent joke, of the type     that my Christian grandfather would enjoy. »           « I showed them to a few pastors and they thought they were funny. »           But the Jyllands-Posten editor in question, Mr Kaiser, said that the case     was « ridiculous to bring forward now. It has nothing to do with the Muhammad     cartoons.           « In the Muhammad drawings case, we asked the illustrators to do it. I did     not ask for these cartoons. That’s the difference, » he said.           « The illustrator thought his cartoons were funny. I did not think so. It     would offend some readers, not much but some. »           The decision smacks of « double-standards », said Ahmed Akkari, spokesman for     the Danish-based European Committee for Prophet Honouring, the umbrella     group that represents 27 Muslim organisations that are campaigning for a     full apology from Jyllands-Posten.     « How can Jyllands-Posten distinguish the two cases? Surely they must     understand, » Mr Akkari added.           Meanwhile, the editor of a Malaysian newspaper resigned over the weekend     after printing one of the Muhammad cartoons that have unleashed a storm of     protest across the Islamic world.           Malaysia’s Sunday Tribune, based in the remote state of Sarawak, on Borneo     island, ran one of the Danish cartoons on Saturday. It is unclear which one     of the 12 drawings was reprinted.           Printed on page 12 of the paper, the cartoon illustrated an article about     the lack of impact of the controversy in Malaysia, a country with a majority     Muslim population.           The newspaper apologised and expressed « profound regret over the     unauthorised publication », in a front page statement on Sunday.           « Our internal inquiry revealed that the editor on duty, who was responsible     for the same publication, had done it all alone by himself without authority     in compliance with the prescribed procedures as required for such news, » the     statement said.           The editor, who has not been named, regretted his mistake, apologised and     tendered his resignation, according to the statement.           (Source : « The Guardian » (Grande Bretagne),     le 6 février 2006)     URL :        http://www.guardian.co.uk/cartoonprotests/story/0,,1703552,00.html 
 KARIKATUR-PROTESTE          
Dänische Veranstalter sagen Reisen nach Nordafrika ab
             Die meisten dänischen Reiseveranstalter haben wegen einer Reisewarnung       ihrer Regierung alle Reisen nach Ägypten, Tunesien und Marokko abgesagt.       Dagegen sehen große deutsche Reiseveranstalter bisher keinen Anlass, die       nordafrikanischen Länder zu meiden.               Source: http://www.spiegel.de/reise/aktuell/0,1518,399341,00.html       
DEUX MOTS À Mr. ABDELHAMID
 Balha Boujadi       Votre article d’hier (Tunisnews nº 2087), m’a fait découvrir que vous vivez au   Danemark, chez ces mauvais mécréants qui caricaturent notre prophète et qu’on   doit saccager, aujourd’hui, leurs ambassades et boycotter leurs produits. Je   vous plains, personnellement, car je ne vois pas comment vous pouvez boycotter   le pain et le sel de ces gentils vikings, alors qu’on vous donne refuge et on   vous paie une bonne pension pour vous consacrer à votre sport favori :   Injurier les occidentaux et les diaboliser. La vie est dure pour les réfugiés,   ça se voit.       Laissons à part les considérations personnelles et allons parler de cet   occident. Vous dites tout le temps que j’admire ce monde, que je répète ses   dires,  et que je ne raisonne qu’à travers ses critères idéologiques. C’est   vrai, car je suis démocrate, fou dingue de la démocratie et de la liberté,   c’est mon seul et unique vice, c’est ma drogue. Et quand je regarde à droite   et à gauche, je ne vois la liberté et la démocratie que chez eux, vous devez   en savoir quelque chose. Si la liberté était en Arabie Saoudite ou en Iran, je   serai un grand admirateur de ces peuples et ces sociétés, malheureusement je   ne vois là bas que la misère intellectuelle et culturelle, alors, ce n’est pas   ma faute, je suis désolé.       Ce méchant Occident, d’après vous, est le responsable de tous nos malheurs,    il a implanté Israël, il a attaqué l’Irak, il est en train de juger Saddam… Un   grand amalgame et une mentalité de victime que les islamistes utilisent pour   enflammer les foules… Moi, je suis « boujadi » en politique, mais j’observe et   j’analyse d’après un point de vue simpliste, et je vois que l’occident peut   être responsable de quelque chose mais jamais de tout nos malheurs :       1-       Israël est là, depuis 1948, et malheureusement pour nous, elle est   devenue une puissance nucléaire, elle peut raser de la carte n’importe quel   pays de la région et elle peut le faire réellement et non pas par des menaces   proférées comme celles de Ahmadi Najad… Alors qu’est-ce qu’on fait ? Est-ce   qu’on va continuer à écrire des poèmes et des discours, ou faut-il agir comme   des gens responsables, réalistes et pragmatiques ? Il est temps de résoudre ce   problème en utilisant la tète et non pas les sentiments.       2-       Ce méchant Occident veut affamer les Palestiniens pour avoir voter   Hamas. Une simple question : Est-ce que l’Occident est obligé d’aider les   Palestiniens plus que les saoudiens ou les Iraniens? Est-ce qu’il leur doit   quelque chose ? Pourquoi devrait-il le faire avec des gens qui le haïssent et   qui passent la journée à brûler ses drapeaux et à prendre en otage ses   ressortissants ? Quand quelqu’un veut donner son argent à un autre, n’a-t-il   pas le droit de savoir où va-t-on dépenser son argent ? On est en train de   parler ici des centaines de millions d’euros. Les conditions existent dans la   vie et dans les rapports entre les peuples, seulement les idiots donnent leur   argent sans savoir pourquoi. L’Occident a été surpris, comme tout le monde,   par les résultats des votes, mais il a respecté la volonté des électeurs, sauf   qu’il ne veut pas investir son argent dans la guerre, mais plutôt dans la paix,   un point c’est tout. Quand Hamas enterre la hache de guerre et s’assoit à la   table pour négocier la paix, ça sera une autre histoire.        3-       Quant à la liberté d’_expression, je persiste et signe, elle doit   être complète ou rien de tout. J’ai adoré tout ce que vous avez dit à propos   de prophète, car je suis musulman, mais ce discours ne veut rien dire pour un   non musulman, donc n’allons pas le punir parce qu’il n’a pas des sentiments   aussi mystiques que vous, ça passe la même chose pour nous, rappelez-vous vos   amis Talibans qui ont bombardé la statue de Bouddha, un symbole sacré d’une   religion de plus d’un milliard des fidèles. Ça a été un crime contre   l’Humanité pour les autres. Tout est relatif dans la vie, même et surtout   quand il s’agit de foi.       BALHA BOUJADI, le 8 février 2006   balhaboujadi@yahoo.es
Une délégation américaine à la Chambre des Conseillers
« La Tunisie est le miracle de l’Afrique, comme Singapour est le miracle de l’Asie »
               « La Tunisie est le miracle de l’Afrique, comme Singapour est le miracle de     l’Asie », ont affirmé les membres d’une délégation américaine représentant     « Les conseils des Affaires internationales des Etats-Unis d’Amérique ».            Ils ont aussi, salué le bond qualitatif réalisé par la Tunisie en dix-huit     ans grâce à la conduite clairvoyante du Président Zine El Abidine Ben Ali,     malgré des ressources naturelles limitées et en comptant uniquement sur la     compétence de ses ressources humaines.            Les membres de la délégation américaine ont fait cette déclaration en     visitant, mercredi matin, la Chambre des Conseillers où ils ont été     accueillis par M. Abdallah Kallel, président de la Chambre.            Ils ont, également, exprimé leur admiration pour l’ampleur des réalisations     avant-gardistes et des acquis engrangés par la Tunisie dans tous les     secteurs économiques et au profit de toutes les catégories sociales, sans     exception.            Ils ont affirmé que cela traduit la volonté politique du Président Zine El     Abidine Ben Ali de faire de la Tunisie un exemple à suivre pour les pays     arabes et africains et de hisser le pays au rang des Etats développé.            Au cours d’une réunion, présidée par M. Abdallah Kallel, en présence des     deux vice-présidents de la Chambre et de plusieurs Conseillers, les membres     de la délégation américaine ont expliqué que leur visite en Tunisie, du 5 au     12 février, répond au souci de mieux connaître l’expérience tunisienne dans     le domaine du développement et de s’informer de l’approche réformatrice dans     les différents secteurs. Ils ont souligné la nécessité de renforcer et de     diversifier les relations de coopération entre les deux pays amis, au     service des intérêts communs.            Le président de la Chambre des conseillers avait, auparavant, passé en revue     les résultats et les indicateurs de développement les plus saillants     réalisés, malgré une conjoncture mondiale instable, par la Tunisie, en     particulier, dans les domaines de l’enseignement, de la santé, de     l’émancipation de la femme et de l’amélioration du niveau de vie du citoyen.     Il a mis en relief que le climat politique qui prévaut dans le pays se fonde     sur les principes de démocratie, de pluralisme et d’une paix sociale     instaurée grâce à la consécration des valeurs de solidarité, d’égalité et de     justice sociale.            Il a, en outre, évoqué les défis que la Tunisie s’emploie à relever,     notamment, au niveau d’une plus grande impulsion de l’emploi, de la     consolidation de la position du pays dans le domaine des nouvelles     technologies de la communication, notamment après le succès de la seconde     phase du Sommet mondial sur la société de l’information, et des efforts     déployés pour gagner le pari de l’intégration effective dans la     mondialisation.            M. Kallel a aussi, fait état de la contribution de la Chambre des     Conseillers à l’enrichissement de la vie politique du pays et au     renforcement de l’action législative, en consécration du processus     démocratique et pluraliste.            Les conseils des Affaires internationales des Etats-Unis d’Amérique comptent     parmi les organisations non-gouvernementales (ONG) les plus importantes qui     s’intéressent aux affaires internationales. Cette ONG compte prés d’un     demi-million de membres et dispose de représentations dans tous les Etats     américains et dans plusieurs pays.            (Source : www.infotunisie.com, le 8 février     2006)
Rumsfeld à Alger
Donald Rumsfeld, le secrétaire américain à la Défense, se rendra le 12 février à Alger, où il s’entretiendra avec le président Abdelaziz Bouteflika et plusieurs militaires de haut rang. Au-delà du renforcement de la coopération militaire entre les deux pays, l’administration Bush souhaite que l’Algérie s’implique davantage au Moyen-Orient, dans la perspective d’un futur retrait des troupes américaines d’Irak. Les 17 et 18 décembre 2005, le général James L. Jones, commandant suprême des forces alliées et commandant en chef des forces américaines en Europe, avait lui aussi séjourné à Alger. (Source : JA/L’Intelligent N° 2352 du 5 au 11février 2006)LIBYE – Un visa pour les Arabes ?
Lors d’une récente réunion à huis clos des ministres arabes de l’Intérieur (Tunis, 30-31 janvier), le Libyen Nasr Mabrouk Abdallah a proposé que les ressortissants des pays arabes désireux de se rendre dans la Jamahiriya soient désormais soumis à la délivrance d’un visa. Une telle mesure, qu’il a justifiée par la nécessité de renforcer la lutte contre le terrorisme et le crime organisé, aurait nécessairement pour effet de ralentir les flux de population entre les pays d’Afrique du Nord. Et donc les échanges commerciaux et touristiques. (Source : JA/L’Intelligent N° 2352 du 5 au 11 février 2006)Lu dans « Le Courrier de l’ACAT », Mensuel chrétien des droits de l’homme
             janvier-février 2006 – N°261-262, P. 9               Actions suivies               TUNISIE : l’ACAT-France a proposé aux groupes concernés par cette « Action       suivie » de demander au secrétaire général des Télécommunications (UMI) et       du Sommet Mondial de la Société de l’Information (SMSI), la libération des       jeunes de Zarzis, condamnés, le 6 juillet 2004, à treize ans de prison       pour « utilisation d’Internet à des fins d’activités terroristes » ; et de       soutenir huit responsables politiques tunsiens en grève de la faim dont       l’état de santé est inquiétant (L. du 8 novembre) »               (Alerte de la part de Mme Luisa Toscane       reçue le 8 février 2006)
Tunisie : raffinerie stratégique
par ABDELAZIZ BARROUHI Des investisseurs originaires d’une trentaine de pays étaient à Tunis, le 27 janvier, pour étudier le projet de construction de la première raffinerie privée en Tunisie. Cause de cet engouement : un positionnement stratégique près du marché européen et des grands producteurs de pétrole comme l’Algérie et la Libye. Le site est en effet celui de la zone portuaire de la Skhira, comprenant le terminal pétrolier du même nom. C’est là qu’aboutit le pipeline de la Trapsa pour l’évacuation du pétrole produit dans le Sud tunisien et sur le champ d’Aïn Amenas, en Algérie. C’est là aussi que se trouvent les plus grandes capacités de stockage de brut dans le pays. La raffinerie, d’une capacité minimale de 120 000 barils par jour (b/j), nécessiterait un investissement estimé à 1,5 milliard de dollars. L’opérateur pourra vendre une partie de sa production sur le marché local, qui a importé 60 000 b/j de produits raffinés en 2005 et dont les besoins s’élèveront à 100 000 b/j à l’horizon 2020. La concession de trente ans renouvelable et sous le régime offshore fonctionnerait sous le régime du Build, Own, Operate (construire, posséder et exploiter) ou l’une de ses variantes, a indiqué Afif Chelbi, ministre de l’Industrie et de l’Énergie. Date limite de dépôt des candidatures : le 31 mars. À la suite de quoi les adjudicataires sélectionnés auront à présenter leurs offres à une date qui reste à fixer. Les travaux démarreraient fin 2007. (Source : JA/L’Intelligent N° 2352 du 5 au 11février 2006)Triste scène tunisienne
     par FAWZIA ZOUARI        Malgré un passé brillant et des noms prestigieux, le théâtre national   sombre dans la crise. Comment le sauver ?        La dernière édition des Journées théâtrales de Carthage, qui s’est déroulée du   24 novembre au 3 décembre 2005, a mis en exergue la crise que traverse la   scène tunisienne : peu de créations, relève incertaine, absence du public.    Pourtant, la Tunisie fut le phare du théâtre arabe et son grand foyer d’idées   durant la seconde moitié du siècle dernier. L’ébullition du théâtre scolaire   dès l’indépendance, les expériences dans les régions, les grandes figures   dramaturgiques telles que Ali Ben Ayad, Moncef Souissi ou Ezzeddine Madani,   les créations d’avant-garde du Théâtre de la Terre ou du Nouveau Théâtre,   l’enthousiasme, enfin, d’un public qui n’hésitait pas à courir les salles   jusque dans les bourgades les plus reculées du pays, tout témoignait d’une   créativité unique sur la scène arabe. Aujourd’hui, « le paysage du théâtre   tunisien erre, désorienté, ne sachant quoi dire et quoi proposer, écrit le   critique Mohamed Moumen, à part les one-man shows, les spectacles de comédie   faciles et les pièces où la réflexion ne semble pas l’emporter » (La Presse du   2 décembre 2005).        Les aventures isolées ont succédé à l’enthousiasme collectif. Fadhel Jaïbi   fait cavalier seul, Moncef Souissi tente de refaire surface, Ezzeddine Gannoun   s’oriente vers la formation, Fadhel Jaziri vers le cinéma, tandis que Taoufik   Jebali sauve les meubles grâce à la dernière scène qui réussit encore à   titiller la censure.        Fini le temps où l’art dramatique était la vocation d’une vie. Les jeunes   diplômés de l’Institut supérieur d’art dramatique (Isad) n’hésitent pas à   partager les planches avec le petit écran, voire avec la gestion de sociétés   commerciales. Le public n’est plus au rendez-vous, « débauché » qu’il est par   la télévision.        Cette crise ne s’explique pas par un manque de moyens financiers, car l’État   tunisien achète et subventionne les spectacles depuis 1962. Elle est liée,   selon le critique Abdelhalim Messaoudi, à la conception même de la mission du   théâtre dans la Tunisie actuelle : « L’ancienne génération avait une relation   particulière avec la société : il y avait un vrai projet pour changer les   mentalités. Cette génération tient toujours le théâtre, mais elle s’est   éloignée des problèmes sociaux, renonçant à réfléchir sur des concepts   fondamentaux comme la liberté ou la citoyenneté. »        Autre problème, l’absence flagrante de textes dramatiques. Des auteurs aussi   prolifiques dans les années 1960 que Ezzeddine Madani et Samir Ayadi n’ont pas   fait d’émules. L’autorité étatique soutient les troupes, mais ne fait pas la   promotion de l’écriture dramaturgique, ni ne tente de susciter de nouveaux   talents. Très peu d’études sont publiées, la dernière en date, Les Obstacles   du théâtre tunisien, d’Ahmed Hadheq El-Ourf, remontant au début des années   1990. La revue Fadhaiyyat masrahiyya a disparu à la même période. Les   recherches universitaires sont rares, et la critique n’a pas le cœur à   l’ouvrage : Mohamed Moumen, Hamed Lahmaïdi et El-Ourf ne daignent plus exercer   une profession mal comprise, voire dénigrée.        L’absence d’espaces est une autre plaie du théâtre tunisien. En dehors des   scènes privées (El-Hamra, El-Teatro, l’Étoile du Nord, le 4e Art) et du   Théâtre municipal, il n’y a que des « abris » pour des « artistes vagabonds »   à la recherche de lieux pour répéter. Ni Jaïbi ni Jaziri n’ont disposé de   salles à eux. Gannoun a dû retaper lui-même El-Hamra alors que Jebali a   bénéficié de l’aide des Koweïtiens pour trouver refuge dans une salle de   l’hôtel El-Mechtel. Quant à Moncef Saïm et Raja Ben Ammar, c’est seulement   grâce à une intervention présidentielle qu’ils ont réussi à conserver El-Madar   à Carthage, convoité par les promoteurs immobiliers.        Enfin, les JTT, qui auraient pu être l’occasion de mettre sur le tapis ces   difficultés et de relancer la profession, souffrent d’une mauvaise   organisation et d’un manque de médiatisation internationale.        La mission urge donc : elle consiste à redonner à la scène tunisienne des   moyens structurels, des espaces scéniques, et à susciter une vraie réflexion   sur la relation du public au théâtre grâce à une réelle stratégie de   communication. Faute de quoi la fin du théâtre tunisien est programmée et   signifiera l’effondrement d’un pan entier de la culture nationale.        (Source : JA/L’Intelligent N° 2352 du 5 au 11   février 2006) 
 TUNISIE    Embellie touristique 
 par ABDELAZIZ BARROUHI        Les principaux indicateurs du secteur ont enfin dépassé leur niveau de 2001.   La crise post-11 Septembre n’est plus qu’un mauvais souvenir.        Les résultats de la Tunisie pour 2005 le confirment : les effets de la crise   du tourisme mondial consécutive au 11 septembre 2001 ne sont plus qu’un   mauvais souvenir. Pendant trois ans, entre 2002 et 2004, les performances du   pays ont été nettement inférieures à celles de 2001, que ce soit en termes de   recettes en devises, d’arrivées de touristes ou de nuitées dans les hôtels.   Fin 2005, ces trois indicateurs ont pour la première fois dépassé leur niveau   de fin 2001 : les recettes en devises ont progressé de 9,5 %, le nombre de   visiteurs de 18 % et les nuités de 5 %.    Autre bonne nouvelle : les Européens ont représenté 61 % des entrées de   touristes. Jamais la Tunisie n’avait accueilli autant de visiteurs français.   Leur nombre a bondi à 1,170 million, soit une hausse de presque 15 % par   rapport à 2004. La seule préoccupation majeure est que le marché allemand,   bien que stable (+ 0,4 %) avec 571 938 visiteurs, n’a pas retrouvé son niveau   de 1999 et 2000 (plus de 1 million). Les marchés britannique (+ 9 %) et   italien (+ 6 %) se sont comportés bien mieux, tandis que les Scandinaves sont   en nette progression (+ 39 %). Au total, les marchés européens ont crû de 11   %, tandis que le marché maghrébin (37 % des entrées) est resté stable par   rapport à 2004.        Si les autorités affichent leur satisfaction, les hôteliers sont encore loin   d’avoir retrouvé le moral. Le taux d’occupation annuel moyen des unités   hôtelières demeure relativement bas avec 52 % en 2005, contre 55 % en 2001, et   ce taux n’est que de 34 % dans la zone touristique de Tabarka-Aïn Draham, 35 %   dans la région de Tunis, 31 % à Tozeur et 24 % dans la zone de Bizerte. Et les   bas prix arrachés par les tour-opérateurs durant les années de vaches maigres   2002-2003 sont pour la plupart encore en vigueur. Les hôteliers se consolent   tout de même avec le programme de mise à niveau élaboré par le gouvernement   qui, grâce à des incitations financières, va leur permettre de moderniser   leurs unités pour les rendre plus compétitives sur le plan qualité.        La France, premier marché émetteur à destination de la Tunisie depuis trois   ans, est précisément en train de se positionner comme premier soutien à la   modernisation du secteur touristique tunisien. C’est le sens de la visite à   Tunis, les 19 et 20 janvier, du ministre français délégué au Tourisme, Léon   Bertrand, qui a annoncé l’octroi par l’Agence française de développement (AFD)   d’un prêt concessionnel de 50 millions d’euros destiné à contribuer au   financement de la modernisation d’une quinzaine d’hôtels. Ce projet pilote   fait partie d’un programme de mise à niveau de l’hôtellerie tunisienne dont la   mise en œuvre doit démarrer cette année sous l’égide du ministre du Tourisme,   Tijani Haddad. Trois cents hôtels (sur les huit cents que compte le pays) sont   concernés. Montant du programme : 1,2 milliard d’euros au total. Venus avec   Léon Bertrand, des bureaux d’études français ainsi que des représentants de   tour-opérateurs et gestionnaires d’hôtels et de villages de vacances français   ont participé à un séminaire avec leurs homologues tunisiens pour identifier   les possibilités de partenariat pour la mise en œuvre du programme.        Parallèlement, des cabinets d’experts privés travaillent sur le développement   des créneaux de la thalassothérapie et de la plaisance que Tunis veut   développer. Creocéan, société française de services et conseil en   environnement marin et océanographique, a remis à Haddad, à cette occasion,   une étude visant à établir un schéma directeur d’aménagement du littoral   tunisien pour les activités de plaisance et de croisière. D’autres experts   français ont travaillé sur un projet visant à mettre en place une démarche   qualité dans la filière thalassothérapie, qui compte actuellement une   trentaine de centres assidûment fréquentés par des touristes français. À la   fin de sa visite, Léon Bertrand a déclaré que les services du ministère   français du Tourisme étaient à la disposition de leurs homologues tunisiens   pour leur apporter l’appui nécessaire à la réussite du programme de mise à   niveau.        (Source : JA/L’Intelligent N° 2352 du 5 au   11février 2006)

