AFP: Deux journalistes tunisiens portés disparus en Libye
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Sélim Jeddi: Salon du livre de Paris : « Modernité et révolution tunisienne »
REVUE DE PRESSE
Deux journalistes tunisiens portés disparus en Libye
AFP le 22/03/2011
TUNIS – Deux journalistes tunisiens , Fatma Ben Dhaou du journal tunisien Le Quotidien et Lofti Massoudi travaillant pour la chaîne de télevision du Qatar, Al-Jazira, sont portés disparus depuis plusieurs jours en Libye , selon des sources proches de leur rédaction et officielle.
Tunisie: décès d’un jeune homme qui s’est immolé par le feu
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Débarquements à Lampedusa: près de 6.000 clandestins entassés sur l’île
Tunis et Le Caire en « transition démocratique » soutenue par Alger et Moscou
Les ministres des Affaires étrangères algérien Mourad Medelci et russe Sergueï Lavrov ont estimé ce mardi 22 mars à Alger que la Tunisie et l’Egypte se trouvaient « dans une phase de transition démocratique » que leur deux pays soutenaient. Lors d’une conférence de presse commune après un entretien bilatéral, M. Medelci a indiqué qu’il s’était entretenu avec son homologue russe de la situation en Tunisie et Egypte, où M. Lavrov venait juste de se rendre. Ils se sont « félicité que ces deux pays s’inscrivent dans une phase de transition démocratique. Nous avons renouvelé notre déclaration de soutenir ces deux pays dans cette phase critique de leur histoire », a déclaré Mourad Medelci.
Tous deux, selon M. Lavrov, sont d’accord pour estimer que la politique dans la région doit être « guidée par le droit international, y compris le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes sans intervention extérieure ». « Nous insistons que tous les conflits doivent être réglés par des moyens pacifiques basés sur la recherche d’un large consensus national sur les changements qu’il faut entreprendre dans tel ou tel pays », a-t-il déclaré. « C’est justement sur la base de ces principes que le processus démocratique en Algérie se développe et la Russie le soutient », a encore affirmé M. Lavrov.
L’Algérie est secouée ces dernières semaines par des protestations sociales et politiques à tous les échelons de sa société, notamment à la suite d’émeutes sanglantes contre la cherté de la vie début janvier qui ont fait 5 morts et quelque 800 blessés. Samedi, le président Abdelaziz Bouteflika a profité du 49e anniversaire du cessez-le-feu de la guerre de libération contre la France pour annoncer dans un message lu par un de ses conseillers de prochaines réformes « globales » y compris « politiques ».
Deuxième lettre à
MONSIEUR LE MINISTRE DES FINANCES
Salon du livre de Paris : « Modernité et révolution tunisienne »
El Mouwaten a participé au Salon du Livre de Paris ce dimanche 21 mars. Une table ronde consacrée au thème de la modernité dans les révolutions tunisiennes et égyptienne a réuni Abdelaziz Belkhodja (Parti Républicain), Youssef Ben Ismaïl (El Mouwaten), Ali Mahjoubi (Historien), Boujemaa Remili (économiste, auteur du premier livre sur la révolution) et Ahmed El Keiy, (Egyptien, journaliste chez France 24 en arabe et spécialiste de politique égyptienne). Etait également présente dans l’assistance la bloggeuse tunisienne Lina Ben Mhenni (A tunisan girl). Nous revenons ici sur les interventions les plus marquantes.
Abdelaziz Belkhodja, qui représentait le parti Républicain a commencé par décrire la peur qui régnait à l’époque de Ben Ali. Il a ensuite évoqué une ambiance « crétinisante » qui aurait saisi la Tunisie à cette époque. Enfin, il a mis en relief le rôle des réseaux sociaux dans le succès de la Révolution. Selon lui, et après cette phase révolutionnaire salutaire, il est temps de passer à la reconstruction de la Tunisie. Comme souvent, il a fait appel au mythe d’Elissa Didon pour mieux présenter son projet politique. Pour lui, l’immolation de Mohamed Bouazizi doit ouvrir une ère de prospérité semblable à celle connue par Carthage pendant six siècles.
Se raccrochant aux termes du sujet, Youssef Ben Ismaïl qui intervenait en tant que membre d’El Mouwaten a évoqué deux éléments de modernité qui ont, selon lui, émergé le temps de cette révolution. Les Tunisiens se sont d’abord réapproprié leur langue, le Tunisien (eddarja) et ont délaissé l’arabe classique lorsqu’il a été nécessaire de parler de politique dans une langue familière à tous les Tunisiens. Toutefois, la modernité s’est surtout exprimée lorsque les Tunisiens ont enfin pu réaliser des choix en tant que citoyens. Le premier de ces choix a été le refus du régime de Ben Ali. Après s’être accordé sur ce qu’ils ne souhaitaient pas pour leur pays, les Tunisiens doivent maintenant parvenir à définir un projet commun. Or, certains clivages apparaissent de plus en plus nettement. Il a ainsi cité la nature du régime politique à mettre en place (parlementaire ou présidentiel) ou la place de la religion dans la société et son lien avec l’Etat. Pour Youssef Ben Ismaïl, cette révolution nous invite à redéfinir la citoyenneté tunisienne. Ainsi, à l’occasion de certains événements ayant eu lieu après la chute de Ben Ali, les juifs de Tunisie d’abord, les binationaux ensuite ont vu leur fidélité à la Tunisie questionnée. Pour Youssef Ben Ismaïl, ce débat doit nous inviter à redéfinir l’identité tunisienne autour de notre désir de vivre ensemble et de nos idéaux plutôt que du fait du seul facteur religieux. Il a ensuite conclu sur le fait que la modernité avait malheureusement été un outil trop largement utilisé par le régime de Ben Ali. Il l’a été dans le cadre de la propagande d’un régime qui n’avait de cesse de mettre en avant le développement économique de la Tunisie ou la place de la femme dans la société tunisienne. La modernité en est presque devenue suspecte aux yeux des Tunisiens. Il importe maintenant de réhabiliter ce concept.
L’historien Ali Mahjoubi s’est ensuite lancé dans une grande fresque historique pour mettre en évidence les éléments annonciateurs de la Révolution tunisienne. Ainsi, l’abolition précoce de l’esclavage en Tunisie en 1846, la mise en place d’une constitution dès 1861, puis les politiques réformistes de Kheireddine Pacha ont été selon lui précurseurs de ce mouvement démocratique. Selon Ali Mahjoubi, les Tunisiens ont très tôt perçu que la modernité était un bloc non négociable dont il fallait adopter les aspects éducatifs, économiques mais aussi politiques afin de réussir le développement du pays. Le mouvement national, que ce soit au travers du Destour de Thâalbi ou du Néo-Destour de Bourguiba a très tôt adopté les valeurs d’émancipation et de démocratie du colonisateur pour mieux le combattre. Pourtant, à l’indépendance, le projet modernisateur n’a été adopté qu’en partie. Il l’a été en ce qui concerne la réforme de l’éducation, la mise en place des structures économiques ou lors de la rédaction du Code du statut personnel. Pourtant, parce que Bourguiba n’étant pas démocrate et en raison du contexte international de Guerre froide, les Tunisiens ont été sevrés de démocratie. En 1987, Ben Ali a bien compris ce besoin lorsqu’il a pris le pouvoir. Cela l’a mené à proposer le Pacte national qui promettait le pluralisme. Pourtant, le virage autoritaire fut vite engagé. Ainsi, Ali Mahjoubi estime que la Révolution s’inscrit dans une continuité évidente dans un pays qui a fait siennes les valeurs modernes depuis bien longtemps. Il a ensuite prédit un affrontement entre les « forces rétrogrades » et les « forces progressistes ». Selon lui, le camp progressiste ne pourra pas triompher s’il ne s’allie pas à l’UGTT qui dispose d’un réseau régional précieux et qui a toujours conservé un fort lien avec le peuple
Boujemaa Remili a insisté sur l’importance de la jeunesse dans cette Révolution qui n’a ni direction ni programme politique. Ses objectifs devront donc être réalisés par des personnes n’ayant pas forcément joué un rôle moteur dans la Révolution elle-même. Il y aura bien des incertitudes pour les mois à venir puisque les partis qui existaient à l’époque de Ben Ali n’arrivent pas à prendre en main les aspirations des Tunisiens tandis que les partis nouvellement créés n’ont pas encore l’expérience politique nécessaire pour parvenir à mobiliser les citoyens autours de leurs idées.
Ahmed El Keiy a, quant à lui, insisté sur les différences structurelles entre les Etats égyptien et tunisien. Le premier, délabré, repose exclusivement sur l’armée et demeure largement tribal. Le second, est incontestablement plus abouti et plus moderne. El Keiy a ensuite évoqué la place des Frères Musulmans dans le paysage politique égyptien. En revenant sur le rôle historique que les frères ont joué dans le domaine social, notamment après le séisme du Caire de 1973, il a illustré le poids important que ceux-ci vont être amené à jouer dans le jeu politique des mois à venir.
L’échange s’est ensuite longuement poursuivi autour de questions posées par le public venu assister à cette conférence.
Sélim Jeddi
http://www.elmouwaten.com/modules.php?name=News&file=article&sid=83
Kamel el-Taïef
Tunisie: « Tout passait par Leïla Trabelsi »
Conseiller de l’ombre, Kamel el-Taïef avait joué un rôle clef lors de la prise du pouvoir de l’ex-président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali, avant de se brouiller avec lui. Voici son récit.
La politique est la passion préférée de Kamel el-Taïef. Ce chef d’entreprise, qui a hérité de son père une société de BTP, est avant tout un homme de réseaux et un conseiller de l’ombre. Il est à l’origine de l’ascension de l’ex-président Zine el-Abidine Ben Ali, comme lui originaire de Hammam Sousse, et fut l’un des instigateurs du « coup d’Etat médical » du 7 novembre 1987, puis de la politique d’ouverture des débuts, à la fin des années 1980. Il est tombé en disgrâce lorsque Ben Ali a choisi de divorcer pour épouser Leïla Trabelsi, contre laquelle il l’avait mis en garde. L’interview qui suit constitue un témoignage direct notamment sur les conditions dans lesquelles Ben Ali a renversé Habib Bourguiba en 1987. Proche du Premier ministre Béji Caïd Essebsi, Kamel el-Taïef a retrouvé depuis peu les effluves de la politique.
Comment avez-vous fait la connaissance de Ben Ali ?
Je l’ai rencontré en 1978 par l’intermédiaire d’un ami qui était alors le chef d’état-major de l’armée, Abdelhamid Escheikh. Il me l’a présenté. Nous sommes tous les deux originaires de la même ville, Hammam Sousse.
Pourquoi avez-vous choisi de le parrainer ?
Dans les années 1980, le principal problème de la Tunisie était celui de la sécurité. Ben Ali était un homme sérieux, gros travailleur. Et surtout un bon professionnel de la sécurité. Au moment de la « révolte du pain », en 1984, il était en poste à l’ambassade de Tunisie à Varsovie. Je suis allé voir le Premier ministre de l’époque, Mohamed Mzali, que je connaissais bien, et je lui ai dit qu’il lui fallait quelqu’un qui soit capable de gérer la situation. Je lui ai suggéré de rappeler Ben Ali, ce qu’il a fait. Il l’a nommé chef de la Sûreté nationale. Par la suite, il est devenu secrétaire d’Etat puis ministre de l’Intérieur, et Premier ministre, le 2 octobre 1987.
Avait-il les qualités politiques requises ?
Non. Sur ce plan, il était limité.
Comment avez-vous décidé de renverser Bourguiba ?
Quelques jours seulement après la nomination de Ben Ali à la tête du gouvernement, l’entourage de Bourguiba est entré en conflit avec lui. Ils ont réussi à convaincre le vieux président de nommer Mohamed Sayah à sa place. Un soir, la nièce de Bourguiba, Saïda Sassi, qui s’occupait de son oncle depuis le départ de son épouse, Wassila, est passée chez Ben Ali. Elle lui a révélé qu’il allait être limogé. Dès qu’elle est partie, Ben Ali m’a téléphoné. Il a aussi appelé Hédi Baccouche, alors ministre des Affaires sociales, ainsi que Mohamed Choukri, qui était à l’époque, au ministère de l’Intérieur, chargé de suivre pour son compte les activités de Saïda Sassi, et Habib Ammar, le commandant de la garde nationale. Nous nous sommes tous retrouvés chez Ben Ali un peu avant minuit. Je lui ai dit ce que je pensais, à savoir que Bourguiba n’était plus en mesure d’assurer ses fonctions de chef de l’Etat, que le pouvoir était à ramasser et qu’il fallait le prendre. La situation était grave. Il était Premier ministre et ministre de l’Intérieur, il était donc l’homme idoine. Habib Ammar était prêt à faire ce qu’il fallait sur le terrain. Hédi Baccouche était hésitant. Le lendemain, Ben Ali, qui avait rendez-vous avec Bourguiba, est allé le voir. Il a été très mal reçu : Bourguiba l’a insulté et même giflé. Il m’a appelé immédiatement, et nous nous sommes revus chez lui, en tête à tête. Je lui ai dit qu’il ne fallait plus attendre, qu’il fallait passer à l’acte. Je connaissais très bien l’ambassadeur américain de l’époque, Robert Pelletreau, et je savais qu’il devait voir Bourguiba le lendemain en compagnie du représentant des Etats-Unis auprès de l’ONU, Vernon Walters, et d’une délégation de sénateurs américains. J’ai organisé avant cette rencontre un rendez-vous entre lui et Ben Ali. L’idée était de convaincre les Américains de glisser un mot à Bourguiba en faveur de Ben Ali, en leur faisant croire que l’entourage du président voulait l’éliminer parce qu’il était proaméricain. Nous espérions ainsi gagner du temps et pouvoir intervenir avant la nomination de Sayah, qui se profilait. C’est ce qui a été fait. En plus, au cours de cette audience, Bourguiba a dit aux Américains qu’il voulait la condamnation à mort de Rached Ghannouchi, le chef du mouvement islamiste Ennahda. Ils ont été atterrés… Ensuite, nous avons commencé à travailler sur les modalités. Les détails techniques ont été mis au point par Habib Ammar et Ben Ali. Mais Ben Ali tergiversait. Il avait peur, en fait. Je suis revenu plusieurs fois à la charge. Hédi Baccouche s’est rallié sur le tard. C’est lui qui a rédigé, dans la soirée du 6 novembre, au ministère de l’Intérieur, ce qui allait devenir le « discours du 7 novembre », le texte dans lequel Ben Ali promettait aux Tunisiens l’instauration de la démocratie…
On dit que vous avez prévenu les Algériens, et eux seuls. Est-ce vrai ?
Le hasard a voulu que le ministre de l’Intérieur algérien, Hédi Khédiri, soit en visite à Tunis alors que nous préparions le renversement de Bourguiba. J’ai en effet suggéré à Ben Ali de le mettre dans la confidence afin que le président Chadli Bendjedid soit informé de notre projet. Le chef de l’Etat algérien a donné son feu vert, en y mettant une condition : que Bourguiba soit bien traité.
Vous avez poussé un homme à prendre le pouvoir alors que vous saviez qu’il n’avait ni l’intelligence ni la hauteur de vue d’un chef d’Etat…
Bourguiba était malade et sénile. La Tunisie était dans une situation dramatique. Le changement s’imposait, et il fallait le faire dans le respect de la Constitution. Or, Ben Ali était Premier ministre. Constitutionnellement, il était le seul à pouvoir remplacer Bourguiba. D’ailleurs, au début, cela a bien fonctionné. La déclaration du 7 novembre avait promis la démocratie. Grâce à mes conseils et à mes réseaux, le nouveau président a pu s’entretenir avec l’ensemble de la classe politique et de la société civile : les indépendants, les dissidents, les militants des droits de l’homme, dont plusieurs sont devenus ministres… Tout le monde était alors persuadé qu’une nouvelle page de l’histoire de la Tunisie allait s’ouvrir.
A qui faut-il imputer l’échec des élections de 1989 ?
A Hédi Baccouche, qui ne croyait pas au multipartisme. Mais aussi à Abdallah Kallel, qui était ministre de la Défense, à Chedli Neffati, ministre de l’Intérieur, et à Abderrahim Zouari, qui était à l’époque secrétaire général du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), qui avait succédé au Parti socialiste destourien.
Et vous, avez-vous été membre du RCD ?
Non, jamais. Ni du RCD ni d’aucun autre parti politique.
Rapidement, au début des années 1990, les arrestations se multiplient. Elles visent d’abord les islamistes, puis les défenseurs des droits de l’homme, puis tous ceux qui tentent d’exprimer leur différence…
Oui. Ce tournant remonte à 1991 et correspond à la nomination d’Abdallah Kallel au ministère de l’Intérieur. Il a fait croire à Ben Ali qu’il y avait une menace terroriste. Il est aussi, l’année suivante, à l’origine d’une nouvelle loi sur les associations, qui visait directement l’indépendance de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH). Il a même essayé d’obtenir le limogeage de l’Assemblée nationale de l’ancien ministre des Affaires étrangères Béji Caïd Essebsi, connu et respecté de tous pour son patriotisme (NDLR : nommé Premier ministre le 27 février). Il a fait croire à Ben Ali qu’il était profrançais parce que la sécurité avait intercepté un courrier qui lui était adressé dans lequel il y avait un livre écrit par un homme politique français et traitant de la démocratie ! Pour la loi contre la Ligue, je suis intervenu auprès de Ben Ali. Je me souviens avoir dit au président que cette loi était absurde, qu’il ne pouvait pas avoir promis la démocratie et avaliser un texte qui risquait de faire tomber la Ligue sous la coupe du RCD ! La loi a été abrogée. Mais elle a été réintroduite peu après, lorsque je suis tombé en disgrâce.
En effet, vous vous brouillez ensuite avec Ben Ali. A cause de Leïla Trabelsi ?
Oui. Elle était sa maîtresse depuis 1984. A l’époque où il l’a rencontrée, elle travaillait comme secrétaire dans une société de BTP. C’était une femme légère qui aimait l’argent. Il était très amoureux d’elle. En 1992, lorsqu’il a décidé de divorcer pour l’épouser, je lui ai dit qu’il faisait une grave erreur. Ce n’était pas une femme pour un chef d’Etat. Je connaissais aussi la famille. Ses frères étaient des voyous. Tout cela, je le lui ai dit. Il n’a pas apprécié. Il l’a épousée et il lui a dit que je l’avais mis en garde contre elle. Elle m’en a bien sûr voulu.
Que vous est-il arrivé ? Sans poste officiel, vous ne pouviez être limogé…
Non, mais j’ai été soumis à un harcèlement constant orchestré par le ministre de l’Intérieur, Abdallah Kallel. Il y mettait d’autant plus de zèle qu’il m’en voulait par ailleurs personnellement à cause de cette loi sur les associations. J’ai été suivi et mis sur écoute. Il y avait des policiers devant mon bureau, les gens qui venaient me voir étaient placés sous surveillance… Il y a eu aussi quelques incidents plus graves. En juillet 1992, j’avais convié de nombreuses personnalités, comme cela se fait chez nous, à l’occasion de la circoncision de mon fils. Plusieurs de ces invités avaient des postes ministériels. Le lendemain, ils ont tous été limogés… En 1996, mes bureaux ont été incendiés. Cinq ans plus tard, alors que j’étais chez le coiffeur, deux motards cagoulés ont détruit ma voiture. Cette fois-là, il s’agissait de me faire payer un dîner, la veille, chez l’ambassadeur des Etats-Unis. A la suite de cela, j’ai été arrêté et emprisonné. Il cherchait à m’isoler, à me dissuader de voir des personnalités politiques ou des diplomates. En même temps, au palais, Leïla prenait de plus en plus d’importance. A la fin, c’était elle qui commandait.
A partir de quand a-t-elle réellement pris le pouvoir ?
Dès le début, elle a mis certains des conseillers de son mari dans sa poche, notamment Abdelwaheb Abdallah, qui était alors au palais de Carthage et avait déjà la haute main sur l’information, ainsi qu’Abdelaziz ben Dhia. Abdallah Kallel s’est mis aussi à son service. Voyant le président amoureux, ils ont estimé qu’ils auraient d’autant plus d’influence qu’ils plairaient à son épouse… Dès 1992, elle a obtenu de faire tomber des têtes. Dès le début des années 2000, tout passait par elle : personne ne pouvait directement accéder au président car elle filtrait toutes les visites. Cela n’a fait qu’empirer lorsque la santé de Ben Ali s’est dégradée.
Sa nombreuse fratrie a mis la main sur des pans entiers de l’économie tunisienne. Mais, avant qu’apparaisse le clan des Trabelsi, le frère du président avait déjà sévi, ainsi que ses nombreux gendres, les Slim Zarrouk, Slim Chiboub, Marwan Ben Mabrouk…
Oui, et Ben Ali laissait faire. En 1991, je me souviens de l’avoir mis en garde contre l’appétit de l’un de ses gendres, en lui conseillant de le freiner. Il m’a répondu que si ce n’était pas lui ce serait un autre… Mais avec l’arrivée des Trabelsi on a changé de braquet. Ils étaient nombreux, sans aucun scrupule, rien ne les arrêtait. Et pas seulement les frères de Leïla. La mère aussi, les cousins, les amis, tout le monde. Ils ont bâti d’immenses fortunes, à partir de rien. Ils demandaient à Ben Ali d’intervenir en leur faveur, et le président s’exécutait.
A ce propos, qu’en est-il d’Aziz Miled, l’homme d’affaires qui a accompagné Michèle Alliot-Marie et son compagnon lors de leurs vacances tunisiennes ? Etait-il proche des Trabelsi ?
En fait, au départ, il était surtout proche de Slim Chiboub. Il faisait des affaires avec lui. Puis, après la mise à l’écart de celui-ci, il s’est rapproché du clan des Trabelsi. Dernièrement, on le voyait surtout avec le dernier gendre de Ben Ali, Sakher el-Materi.
On ne peut donc pas dire qu’il a été une « victime » des Trabelsi ?
En aucun cas. Il faisait partie du cercle.
Le 14 janvier 2011, qui a décidé Ben Ali à partir ?
Je ne peux en être sûr car je n’étais pas sur place, mais tout indique que c’est Ali Seriati, le patron de la garde présidentielle. Il l’a convaincu de partir en lui expliquant qu’il valait mieux qu’il s’éloigne, le temps pour lui de reprendre la situation en main.
Etait-ce pour faire revenir Ben Ali ou pour son propre compte ?
A mon avis, pour son propre compte. Il semble bien qu’il s’agissait d’une tentative de coup d’Etat.
Tunisie : Les manifestations et les tentatives d’immolation continuent
Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a été accueilli par une centaine de manifestants mardi à Tunis. A Sidi Bouzid, berceau de la Révolution de jasmin, un jeune homme a tenté de s’immoler.
Plus de deux mois après le renversement de l’ancien dirigeant tunisien Ben Ali, la Tunisie revit un tragique événement et voit aujourd’hui un nouveau genre de manifestations. À l’heure où le pays doit organiser une nouvelle constitution, des protestations en faveur de l’annulation de la dette tunisienne voient le jour (photo), puis contre la venue de la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton à Tunis, alors qu’elle avait déjà été malmenée au Caire… Mardi, c’est Ban Ki-moon qui n’est pas le bienvenu dans le pays et contre lequel a eu lieu un rassemblement dans la capitale tunisienne mardi.
Mouvement rejeté par les autorités
Ce sont, en effet, une centaine d’islamistes tunisiens qui ont manifesté sans incident dans le centre de Tunis contre la visite du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon. « Ban Ki-moon go home ! », « Ban Ki-moon valet du sionisme », ont scandé les manifestants à l’appel du mouvement islamiste Hizb At-Tahrir. Ce mouvement est également en colère depuis que sa demande de légalisation en vue de former un parti politique a été rejetée par les autorités tunisiennes. Durant sa visite d’une journée à Tunis, Ban Ki-moon – qui a fait un détour par l’Europe pour éviter la zone de conflit dans la Libye voisine – doit rencontrer le président par intérim, le Premier ministre du gouvernement provisoire, et le ministre des Affaires étrangères. Il doit encore s’entretenir avec la Haute commission chargée de préparer un nouveau code électoral en vue de l’élection d’une assemblée constituante le 24 juillet.
« Plus de huit tentatives d’immolation depuis janvier 2011 »
Dans la région de Sidi Bouzi – berceau de la révolution tunisienne – un jeune homme a tenté de s’immoler. Un de plus… Alors qu’un drame semble se répéter dans le pays, et ce même plus de deux mois après le renversement du régime de Ben Ali, le secrétaire général de l’ONU recontrera, hasard ou non, la mère de Mohamed Bouazizi dans la capitale tunisienne. Celui-ci, mort des suites de son immolation, survenue le 17 décembre 2010 dans la région de Sidi Bouzid, est devenu un martyr pour beaucoup de jeunes dans le pays et de Tunisiens aussi. Car son acte a déclenché la révolution du Jasmin et mené à la chute de Ben Ali le 14 janvier 2011. Mais ces récents évènements et changements ne semblent pas suffire. « La colère qui anime plusieurs jeunes tunisiens, un peu partout à travers le pays, ne semble pas se calmer depuis les événements qui ont conduit à la fuite de Ben Ali », affirme le site « indépendant » Webdo. Composé essentiellement de journalistes ayant travaillé pour la page Webdo du magazine papier Tunis-Hebdo et « voulant participer à un meilleur Web tunisien », ce site internet explique son propos : « Ainsi, plus de huit tentatives d’immolation ont été enregistrées, depuis janvier 2011, dans les régions défavorisées de la Tunisie, dont notamment celui d’un jeune gafsien, dimanche dernier. »
Source : « France Soir » Le 22-03-2011
Un homme décède après s’être immolé par le feu
Un homme de 33 ans a tenté de s’immoler par le feu ce matin à Sidi Bouzid, en Tunisie. Transféré dans un état grave à l’hôpital, il a fini par succomber à ses brûlures.
Un Tunisien est décédé à l’hôpital de Sfax après avoir tenté de s’immoler par le feu, ce matin à Sidi Bouzid, berceau de la révolution tunisienne. Au même moment, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, arrivait en Tunisie. Il devait s’entretenir cet après-midi avec la mère de Mohamed Bouazizi, jeune homme qui s’était lui aussi immolé par le feu le 17 décembre dernier, et par qui le mouvement était parti.
Brûlé au troisième degré, Khaled Ezzafouri, le jeune Tunisien de 33 ans a été transporté à l’hôpital régional de Sidi Bouzid dans un état grave puis transféré à l’hôpital de Sfax, où il est décédé un peu plus tard, selon une source hospitalière. Aucune indication n’a été donnée sur les motivations du geste du jeune homme.
Source : « Le Telegramme » Le 22-03-2011
Les entrepreneurs français ne voient pas d’un mauvais œil les négociations sociales
Les entreprises françaises montrent une volonté forte d’investir en Tunisie, a déclaré Dino Cinieri, député UMP et président du groupe d’amitié France – Tunisie au parlement français. Accompagnant Axel Poniatowski, député UMP et président de la commission des affaires étrangères à l’Assemblée nationale française et les députés Chantal Bourragué (UMP) et François Loncle (PS) dans une mission en Tunisie, M. Cinieri, en réponse à une question de Business News, a révélé, sans vouloir s’exprimer au nom des entrepreneurs français, que ceux-ci ne voyaient pas d’un mauvais œil les négociations sociales actuelles et qu’ils ont consenti des augmentations salariales de l’ordre de 11 à 15% jusqu’à présent. La rencontre avec la presse qui s’est déroulée mardi 22 mars 2011 a été l’occasion de revenir sur les impressions des membres de cette mission suite à leurs rencontres avec des partis politiques, des syndicalistes et des représentants de la société civile.
Après quelques « vaguelettes » suite aux déclarations de Michèle Alliot-Marie au moment où Ben Ali réprimait brutalement la contestation, les relations franco-tunisiennes sont revenues au beau fixe, estime Axel Poniatowski. Un nouveau « vent de liberté et de libre expression » souffle sur la Tunisie, mais dans une « relative modération », ajoute-t-il encore.
Les attentes des Tunisiens lui semblent claires : relance de l’investissement, renforcement de l’aide au développement… François Loncle confirme. La question économique et sociale est la priorité absolue, selon la quasi-majorité des témoignages qu’il a recueillis. Les débats institutionnels et la construction de la démocratie ne devront pas occulter cette question, poursuit-il.
Les échanges avec les journalistes se sont focalisés sur l’intervention militaire de la coalition internationale en Libye. M. Poniatowski estime que cette intervention a été bien comprise par les Tunisiens et qu’elle faisait la quasi-unanimité. Encore faut-il qu’elle ne dure pas trop longtemps ajoute M. Loncle.
D’autres sujets ont été survolés en vrac : présence des jeunes dans le nouvel échiquier politique, la place de la femme dans le processus de transition démocratique, le parti islamique Ennahdha… Sur ce dernier point, sans vouloir se prononcer vraiment sur les réelles motivations et les intentions politiques des islamistes ou ce qu’il a cru deviner, M. Poniatowski dit avoir trouvé ses interlocuteurs « modérés dans leurs expressions ».
Source: “Business News” Le 22-03-2011
Tunisie : Faut-il renoncer au projet de la centrale nucléaire en Tunisie?
Après les évènements ayant touché les réacteurs de la centrale nucléaire de Fukushima depuis le séisme et le tsunami qui ont frappé le Japon, la polémique n’a pas tardé au sujet de l’utilité de ces centrales et leur risque sur la santé publique et environnementale à l’échelle internationale, note almasdar.com.
Cet accident de la centrale nucléaire de Fukushima renvoie inévitablement à Tchernobyl, pourtant les scénarios diffèrent pour le moment, et laisse encore craindre à l’efficacité des mesures de sécurité des installations des centrales nucléaires, se trouvant en particulier en Europe, soit 58 centrales, où cet accident a remis aux devants de la scène le débat sur le nucléaire.
A l’instar des partis verts d’Europe, notamment de France, qui pressent leurs gouvernements de revoir leurs choix nucléaires, certaines associations ont demandé au gouvernement de transition tunisien de renoncer au projet de construction d’une centrale nucléaire d’une puissance de 1.000 MW (en Tunisie) pour la production de l’électricité à l’horizon 2020 et qui devrait couvrir environ 15% de nos besoins en électricité, souligne la même source.
almasdar.com rappelle dans ce contexte qu’un accord d’énergie nucléaire civile a été signé entre la Tunisie et la France en 2008 à l’occasion de la visite du président Nicolas Sarkozy dans notre pays. Par ailleurs, l’étude de l’efficacité économique et technique de la centrale sera prête en 2012 afin de lancer un appel d’offres international pour choisir le concepteur et le constructeur de la future centrale nucléaire tunisienne et qui sera fixé a priori en 2016.
Dans cette psychose anti-nucléaire, le gouvernement provisoire a-t-il vocation à décider de revenir sur un projet de ce type? Sera-t-il mieux de s’orienter vers les énergies propres afin d’éviter le risque d’une catastrophe nucléaire?, s’interroge notre source.
Ce jeune de 33 ans aurait donc voulu imiter Mohamed Bouazizi, en tentant de s’immoler par le feu, ce mardi matin. Transporté d’urgence à l’hôpital régional de la ville, il est actuellement dans un état grave et vient d’être transféré à l’hôpital de Sfax.
Source : « wmc » Le 22-03-2011
Pourquoi la Suisse a-t-elle été la première à bloquer les avoirs de Ben Ali, Moubarak et Kadhafi ?
Peu de personnes avaient pressenti l’ampleur des conséquences des semaines de soulèvement populaire en Tunisie. Le 14 janvier 2011, l’ancien président tunisien Ben Ali a dû fuir son pays. Cinq jours plus tard seulement, le 19 janvier 2011, la Suisse bloquait ses avoirs éventuels en Suisse, tout comme ceux de sa famille et de ses proches. Au soir du 11 février 2011, le gouvernement suisse a pris la même décision à peine de 30 minutes après la chute du président Moubarak en Egypte. Enfin, le 24 février 2011, alors que les dirigeants libyens s’en prenaient violemment à la population de leur pays, la Suisse a décidé de bloquer avec effet immédiat les éventuels avoirs en Suisse de Mouammar Kadhafi et de son entourage. Pourquoi le gouvernement suisse a-t-il pris la décision de bloquer les avoirs de ces despotes ? Pourquoi la Suisse a-t-elle été, dans les trois cas, la première à réagir, montrant ainsi la voie à de nombreux autres États ?
La réponse est simple : c’est parce la politique que nous poursuivons est claire. Depuis 20 ans, le gouvernement suisse s’attache à écarter systématiquement les avoirs d’origine illégale de la place financière suisse. Les milieux financiers ont pris note de cette politique depuis longtemps. Les experts de renommée internationale reconnaissent que peu de pays ont fourni autant d’efforts dans ce sens ces dernières années. Un spécialiste de la Banque mondiale constatait récemment « la Suisse, refuge de l’argent sale, est une réalité qui appartient au passé ou qui convient, tout au plus, aux romans policiers ».
Bien que la place financière suisse ne se positionne qu’au septième rang mondial, notre pays tient le devant de la scène en matière de restitution d’avoirs volés. Ces dernières années, aucun pays n’a égalé un tant soit peu la Suisse dans ce domaine : la somme des fonds rendus à leur pays d’origine s’élève à 1,7 milliard de dollars américains.
Mais si la Suisse a restitué autant d’argent, serait-ce parce qu’elle accepte davantage d’argent sale que les autres places financières ? Aujourd’hui, la concurrence entre places financières est globale. La réputation et la crédibilité d’une place financière constituent des critères toujours plus importants en matière de concurrence sur le long terme. Il serait donc naïf de penser que les banques suisses peuvent se permettre de fixer des standards plus laxistes que ceux de leurs concurrents. Nos succès, nous les devons bien plus aux réformes de la politique suisse. Au cours des dernières années, le gouvernement et le Parlement ont renforcé les lois existantes et en ont créé de nouvelles ; les lacunes ont été identifiées et les lois ont été améliorées en fonction. À bien des égards, les dispositions suisses actuelles vont plus loin que la législation d’autres pays et font office de modèle. Le dernier exemple en date est la loi sur la restitution des avoirs illicites de personnes politiquement exposées, connue sous le nom de « Lex Duvalier ». Les États considérés comme fragiles, généralement gangrénés par la corruption, sont peu protégés contre les agissements de leurs dirigeants. La loi suisse est une première mondiale dans ce domaine. Elle permet de restituer des avoirs à des États dont l’arsenal juridique ne permet pas d’effectuer les procédures nécessaires pour exiger le retour des biens détournés par un dictateur.
Toutefois, je reste convaincue qu’il faut en premier lieu lutter contre la corruption là où elle sévit. Le gouvernement helvétique a ainsi décidé de bloquer les comptes suisses de Ben Ali et de Moubarak pour aider les États concernés à récupérer leurs biens présumés volés par la voie juridique, dans les meilleurs délais.
Depuis le gel des avoirs tunisiens et égyptiens, ces deux pays ont déposé une demande d’entraide judiciaire auprès de la Suisse. Le travail du gouvernement helvétique a ainsi porté ses fruits et nous pouvons en être fiers.
Source:”Le Monde.fr” Le 22-03.2011
Le nuage Radioactif de Fukushima devrait passer par la Tunisie
11 jours après le violent séisme et le Tsunami qui ont dévasté l’archipel Japonais, la situation reste toujours inquiétante.
Le Tsunami ravageur qui a frappé les cotes a causé le dysfonctionnement des pompes de refroidissements de la centrale Nucléaire de Fukushima. Des jours difficiles se sont alors suivies: plusieurs explosions au niveau des réacteurs, des fumées inquiétantes s’échappent à ce jour des réacteurs sous pression, évacuation des habitants dans un rayon de plus de 30 kilomètres de la centrale, tentatives de refroidissement des réacteur gravement touché par des jets d’eau de mer…
La situation reste encore très tendue, en effet malgré le rétablissement du courant électrique permettant ainsi l’automatisation du refroidissement des réacteurs, ces derniers sont toujours soumis a une énorme pression. Ceci a causé des fuites radioactives qui ont entraînées un nuage radioactif qui est entrain de faire le tour du monde comme le montre la vidéo. Un nuage qui est prévu d’atteindre l’autre rive de l’océan Atlantique en outre l’Europe et l’Afrique du nord ce Mercredi. Selon les experts ce nuage « serait » sans risque pour la santé et les quantités de particules radioactives devraient être limitée chez nous.
Source: “webdo” Le 22-03-2011
Lien: http://www.webdo.tn/2011/03/22/le-nuage-radioactif-de-fukushima-devrait-passer-par-la-tunisie/
Tunisie : la société civile appelle à la laïcité !
L’indépendance de la sphère publique par rapport à la norme religieuse », est réclamée par les participants au séminaire sur la transition démocratique en Tunisie, tenu dimanche et lundi a permis de montrer la nécessité « d’une prééminence des valeurs universelles », a expliqué M. Kamel Jendoubi, président du réseau euro-méditérranéen des droits de l’homme (REMDH).
Il s’agit d’un ensemble de valeurs parmi lesquelles, « le respect de la liberté absolue de conscience », précisent la FIDH et le REMDH dans un communiqué.
Mokhtar Trifi, président de la LTDH a appelé à une séparation entre la religion et l’Etat et à tenir les mosquées « qui sont un espace citoyen » loin de toute campagne électorale.
« Il est nécessaire de mieux expliciter la notion de la laïcité », a souligné Mme Khedija Cherif, Secrétaire générale de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH).
Sur un autre plan, une rupture totale entre les régions côtières et celles de l’intérieur est constatée par l’ensemble des intervenants. Il s’agit d’une rupture « grave et historique », affirme Mme Sana Ben Achour, présidente de l’Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD).
Une opinion partagée par M.Abdejalil Bedoui, membre du Conseil National pour les Libertés (CNLT), pour qui « cette rupture existe toujours même après la révolution du 14 janvier », d’où la nécessité, a-t-il soutenu, « d’inscrire les droits économiques et sociaux dans la future constitution ».
Le débat engagé, pendant deux jours, dans le cadre du séminaire sur la transition démocratique en Tunisie, est l’une des premières initiatives organisées par les composantes de la société civile tunisienne, en collaboration avec les réseaux actifs dans le domaine des droits de l’Homme établis à l’étranger.
Il s’agit de la FIDH, du REMDH et leurs organisations membres en Tunisie (LTDH, CNLT, ATFD et le collectif Maghreb Egalité).
Source : « Investir en Tunisie » Le 22-03-2011
Tunisie. Les conditions d’une transition démocratique réussie
La société civile est un acteur majeur de la transition démocratique en Tunisie, souligne un communiqué de Fidh consacré au séminaire international sur la transition démocratique, organisé à Tunis du 17 au 20 mars.
La Fédération internationale des droits de l’homme (Fidh), le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’homme (Remdh) et leurs organisations membres en Tunisie, la Ligue tunisienne des droits de l’homme (Ltdh), le Conseil national des libertés en Tunisie (Cnlt), l’Association tunisienne des femmes démocrates (Atfd) et Collectif Maghreb Egalité, ont organisé du 17 au 20 mars 2011, à Tunis, un séminaire international sur la transition démocratique, suivi d’ateliers sur la place et les besoins de la société civile tunisienne durant cette période. Depuis la chute du régime Ben Ali, c’est la première fois qu’une telle manifestation accueille plusieurs centaines de personnes: invités étrangers (Espagne, Belarus, Russie, Egypte, Maroc, Pérou, etc.), experts internationaux, représentants officiels du gouvernement tunisien et des institutions européennes, membres des organisations de la société civile tunisienne, ont débattu pendant deux jours des conditions d’une transition démocratique réussie.
La prééminence des normes internationales Les objectifs de ces deux manifestations étaient triples: confronter les expériences vécues à l’étranger lors des transitions démocratiques, définir le cadre de cette transition en Tunisie et, enfin, évaluer et préciser le rôle et les besoins de la société civile de Tunisie. Les travaux qui se sont déroulés montrent l’adhésion sans réserve à quelques principes qui réunissent l’humanité tout entière et qui ne sont pas différents selon les continents ou les rives dela Méditerranée. Ces principes sont essentiellement: – la prééminence constitutionnelle des normes internationales qui doivent recevoir une application directe dans le droit interne; – une loi électorale qui permette un scrutin loyal et sincère et qui autorise à la fois la formation d’une majorité et la représentation des minorités politiques; – une constitution qui assure la protection de toutes les libertés, et une égalité réelle entre les individus et entre les sexes, y compris en prenant en ce dernier domaine des mesures de rééquilibrage; – le respect de la liberté absolue de conscience, ce qui implique l’indépendance de la sphère publique à l’égard de la norme religieuse sans pour autant nier l’existence du fait religieux lui-même; – une justice indépendante et égale pour tous; – une presse libre de rapporter les faits et d’exprimer des opinions, et indépendante des groupes d’intérêts notamment financiers; – une organisation économique et sociale qui assure l’accès de tous aux besoins fondamentaux et à la justice sociale.
Diversité et richesse du peuple tunisien Pour aller vers ces objectifs, la société civile tunisienne ne prétend pas être le seul acteur de cette transition. Parce qu’elle a mené, avec d’autres, la résistance contre la dictature, parce qu’elle exprime la diversité et la richesse du peuple tunisien, elle occupe une place essentielle. Elle entend participer au processus en cours et y porter ses valeurs d’indépendance, de démocratie, de liberté, d’égalité et de justice sociale. Mais elle n’a pas pour but de se substituer aux partis politiques qui ont, eux, vocation à construire des projets politiques entre lesquels le peuple devra arbitrer. Pour jouer pleinement son rôle, la société civile tunisienne a des besoins matériels à la mesure des attaques dont elle a été victime sous le régime précédent. C’est pourquoi un appel a été lancé aux contributions de la communauté internationale, notamment de l’Union européenne (UE). Cette aide doit s’inscrire dans les choix de la société civile tunisienne et non les dicter, et avoir une ampleur suffisante pour permettre un réel travail en profondeur. Il faut en effet reconstruire un tissu social fait de dialogue, de fermeté sur les principes, mais aussi d’ouverture. La société civile tunisienne doit s’ouvrir aux hommes et aux femmes de toutes les conditions sociales, de toutes les régions du pays et de toutes les générations, notamment la jeunesse d’aujourd’hui qui a su spontanément exprimer son désir de liberté et de dignité. Ce séminaire et ces ateliers sont le début d’un mouvement qui se veut plus large et plus fort. Il devra donner à chacun les moyens d’exercer pleinement sa citoyenneté. Il devra faire en sorte que personne ne se sente jamais plus rejeté, et que tous trouvent dans le processus en cours l’espoir d’une société démocratique toujours plus juste, plus libre et fraternelle.
Source : « Kapitalis » Le 22-03-2011
Tunisie : démocratie, année zéro
En optant pour l’élection d’une Constituante, le président par intérim et le gouvernement tunisien provisoire enterrent de facto la Constitution de 1959. Et scellent la fin de l’ancien régime.
Au siège de la Ligue tunisienne de défense des droits de l’homme (LTDH), dans le quartier d’El-Omrane, près du parc du Belvédère, à Tunis, l’émotion est à son comble en ce lundi 7 mars. Les dirigeants de la Ligue se réunissent pour la première fois au grand complet depuis plus de six ans, la police politique de triste mémoire n’étant plus là pour les en empêcher. Mokhtar Trifi, président de la LTDH, annonce la décision historique que vient de prendre le ministère de l’Intérieur et dont les Tunisiens rêvaient secrètement depuis des lustres : « la rupture définitive avec toute forme d’organisation s’apparentant à la “police politique”, aussi bien au niveau de la structure, des missions ou des pratiques », ainsi que la dissolution de la direction de la sûreté de l’État. Aussitôt, les défenseurs des droits de l’homme, des vétérans pour la plupart, se lèvent pour entonner l’hymne national. Plusieurs d’entre eux ont les larmes aux yeux. « J’étais constamment surveillée, à mon domicile comme au travail », rappelle Emna Dridi, enfin délivrée. Car il ne saurait y avoir de parole libérée tant que ce corps de police anachronique, et par nature liberticide, continue de harceler les opposants et leurs proches, et de « terroriser » les Tunisiens, individuellement ou collectivement.
C’est ce qu’a compris le troisième gouvernement provisoire, formé le même jour par Béji Caïd Essebsi, le nouveau Premier ministre de transition, nommé le 27 février par Fouad Mebazaa, le président par intérim. Issu de l’école de Habib Bourguiba, le fondateur de l’État moderne tunisien, Caïd Essebsi ne pouvait choisir meilleur geste pour marquer le large consensus national auquel il était parvenu, à la faveur d’un compromis avec les principales composantes du Comité pour la sauvegarde de la révolution, constitué autour de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT).
C’est ce large consensus autour d’un « programme » tenant lieu de feuille de route, élaboré par Fouad Mebazaa et le gouvernement de Caïd Essebsi, qui a conduit à opter pour « la légitimité révolutionnaire », du moins par défaut, plutôt que pour « la légitimité constitutionnelle ». Il fallait sortir d’une situation institutionnelle inextricable dans laquelle le précédent gouvernement provisoire de Mohamed Ghannouchi s’était empêtré du fait de calculs politiques contradictoires en son sein. La Constitution de 1959, libérale au départ, avant d’être taillée sur mesure au fil des années pour asseoir le pouvoir personnel de Ben Ali et la toute-puissance de l’ex-parti unique, s’est révélée verrouillée et minée. Elle ne pouvait donc servir de base à la rupture avec le passé et à l’instauration d’une véritable démocratie. En outre, aux termes de la Constitution actuelle, l’élection présidentielle aurait dû intervenir au maximum soixante jours après le départ de Ben Ali, soit le 15 mars. Un délai impossible à tenir, compte tenu de l’impréparation des partis politiques, laminés sous l’ancien régime, et de la nécessité de réviser la loi électorale. Par calcul politique, certains, comme Néjib Chebbi, s’étaient prononcés en faveur de la tenue rapide d’une élection présidentielle, moyennant un amendement électoral. Ces voix exceptées, le consensus s’est dégagé autour de la suspension de la Constitution et, partant, de la dissolution de facto de la Chambre des députés et de la Chambre des conseillers.
Système transitoire inédit
Pour pallier le vide constitutionnel et la non-représentativité des deux chambres, c’est un système transitoire inédit de salut public qui a été mis en place sous l’appellation d’Organisation provisoire des pouvoirs publics. Elle est composée de Fouad Mebazaa et du gouvernement transitoire, qui compte actuellement vingt-deux personnalités compétentes, sans aucun lien avec Ben Ali et qui se sont engagées à ne pas se présenter aux prochaines élections. Les décisions seront prises après consultation avec les représentants des partis politiques et de la société civile, notamment au sein de la nouvelle Commission pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique, fusion de la Commission supérieure de la réforme politique présidée par Yadh Ben Achour et du Comité pour la sauvegarde de la révolution. L’Organisation provisoire restera en place jusqu’à la dernière semaine de juillet.
Seconde République
D’ici à la fin du mois de mars, la Commission pour la réalisation des objectifs de la révolution, composée d’experts et de représentants des partis, de la société civile et de l’UGTT, aura mis au point un « système électoral spécial » en vue de l’élection « libre, pluraliste et transparente » d’une Assemblée nationale constituante prévue le 24 juillet. Aussitôt élue, la Constituante désignera (ou maintiendra) le président intérimaire et le gouvernement, votera les lois et entamera l’élaboration d’une nouvelle Constitution et d’un code électoral. Ce sera l’acte de naissance de la Seconde République, qui, selon toute vraisemblance, bannira à jamais le présidentialisme à la mode Ben Ali pour adopter une forme de système parlementaire dont le modèle sera cependant difficile à élaborer en raison de l’ouverture – et donc du morcellement – de l’échiquier politique. Le pays compte en effet désormais pas moins d’une cinquantaine de partis, et d’autres pourraient encore voir le jour. Ce qui risque de compliquer, si le code électoral ne s’y prête pas, l’émergence de majorités permettant à la fois l’alternance et le pluralisme le plus large. Quant à l’ex-parti « benaliste », le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), il est définitivement mort et enterré depuis sa dissolution, le 9 mars, par le tribunal de première instance de Tunis.
Au chantier de l’amendement de la loi électorale s’ajoutent ceux ouverts par les deux autres commissions nationales – celle de l’établissement des faits sur les dépassements commis durant les derniers événements et celle d’investigation sur les affaires de corruption et de malversation. Les trois commissions sont indépendantes du gouvernement, qui n’en souligne pas moins la nécessité pour le pays de faire en sorte qu’il n’y ait pas de retour en arrière possible.
Pour ce qui la concerne, l’équipe de Caïd Essebsi a plusieurs dossiers sensibles qui l’attendent, dont l’engagement de poursuites « au cas par cas, et non collectivement », précise le Premier ministre, contre les membres du clan Ben Ali-Trabelsi et leurs complices au sein de l’appareil d’État et ailleurs. La priorité des priorités reste cependant le rétablissement de la sécurité. « Il s’agit du maintien de l’ordre, ajoute Caïd Essebsi, mais aussi du retour de la sérénité en général, celle du citoyen et des opérateurs économiques, pour que le pays se remette plus vite au travail. » Il faut impérativement, insiste-t-il, créer les conditions d’une reprise économique et du retour des investissements étrangers, nécessaires à la création d’emplois pour les jeunes. La Tunisie, estime Caïd Essebsi, a besoin d’une croissance supérieure à la normale pour atteindre 8 % par an.
Qui sont les « saboteurs » ?
Contrairement à une idée répandue à des fins partisanes, ce sont rarement les manifestations populaires et les sit-in encadrés par l’UGTT et les organisations de la société civile qui ont envenimé la situation sécuritaire – à l’exception de quelques incidents provoqués par des débordements d’ordre social ou de règlements de compte dans certaines entreprises et administrations. Les principaux fauteurs de troubles appartiennent à des groupes liés à l’ancien parti au pouvoir. Dans une sorte de « baroud de déshonneur » après la perte de leurs privilèges, ces groupes, ainsi que de mystérieux commandos mieux organisés et parfois armés, cherchent à semer le chaos dans le pays, comme en témoignent les attaques répétées contre le siège du ministère de l’Intérieur ou contre des bâtiments publics dans les régions de l’intérieur, comme à Kasserine.
L’hypothèse la plus fréquemment évoquée est qu’il faut chercher le mal à l’intérieur du ministère de l’Intérieur, lequel a pourtant été « épuré », avec la mise à l’écart d’une trentaine de hauts responsables. En attendant la réorganisation des structures de la sécurité intérieure annoncée par le ministère, qui précise qu’elle s’inspirera des « réglementations en vigueur dans les États démocratiques », le mystère entourant les opérations de « sabotage » reste entier. Ni le Premier ministre actuel, ni son prédécesseur, ni les deux derniers ministres de l’Intérieur n’ont été en mesure, jusque-là, d’identifier ceux qui sèment le chaos qu’ils sont censés prévenir et combattre. Caïd Essebsi décrit ce travail d’investigation comme « l’art de démêler des fils de soie dans un bosquet d’épines… Nous voulons nous débarrasser définitivement du passé, mais sans être injustes avec qui que ce soit ».
Source : « Jeune Afrique » Le 22-03-2011
Tunisie-Politique: La transition démocratique compte ses premiers rates
depuis la chute de Ben Ali a connu ces derniers jours des ratés préoccupants : la Haute commission chargée de préparer les élections cruciales de juillet a tourné à la foire d’empoigne, a rapporté l’AFP. Alors que la Tunisie a été une pour pousser Zine el Abidine Ben Ali vers la sortie, les querelles de clocher reprennent désormais le dessus, chacun voulant pousser ses pions. Jeudi, la Haute commission, la plus importante «instance démocratique» du pays n’a pas pu terminer sa première réunion et a ajourné ses travaux à ce mardi 22 mars, certains participants jugeant que sa composition même était «incompatible avec les objectifs de la révolution et les aspirations du peuple tunisien».
En clair, pour plusieurs secteurs politiques, cette commission de 70 personnes serait «noyautée» par le pouvoir de transition mis en place après la chute de Ben Ali le 14 janvier.
Composée de représentants de partis politiques, de la Société civile, d’experts en droit constitutionnel, la Haute commission est censée produire un nouveau code électoral et un brouillon de Constitution qui sera présentée à l’assemblée constituante sortie des urnes en juillet prochain. Son rôle est donc pivot.
«Le problème c’est qu’aujourd’hui personne ne peut se prévaloir d’une quelconque légitimité, y compris le gouvernement transitoire. L’équipe actuelle de Béji Caïd Essebsi a fait la même erreur que celle de son prédécesseur Mohammed Ghannouchi en n’intégrant pas des forces qui ont compté pendant la révolution», dit à l’AFP l’analyste politique Larbi Chouikha.
Ce qui peut ne sembler qu’à une querelle d’experts cache en fait un risque beaucoup plus grand pour la démocratie naissante, sous pression permanente de ceux qui, dans la rue et les campagnes, ont fait tomber la dictature.
De ce qui précède, les dirigeants actuels de la Tunisie devront éviter qu’après la fin de la dictature de Ben Ali que la Tunisie ne sombre dans le chaos à cause de la poursuite des intérêts égoïstes.
Source: “Afrique en ligne” Le 22-03-2011
Tunisie, après la révolution … la revolution
Un chemin de mille lieues commence toujours par un premier pas, nous enseigne Lao Tseu. En Tunisie, un premier pas a été franchi avec la destitution de Zinochet et le démantèlement systématique des mécanismes de la haine qu’il a diaboliquement dressés pendant un quart de siècle. La révolution tunisienne est sur la bonne voie, sans doute grâce à ses enfants qui ont fait preuve de détermination rare pour la protéger et sauver ses acquis. Mais la révolution est loin d’être terminée. Elle continuera. Et je suis porté à croire que la bataille de la révolution prendra encore quelques années. Après la révolution, place à la révolution donc. Pas de trêve pour le rêve, disait un rappeur français dont j’ai oublié le nom. Car, Ben-à-vie nous a laissé, un » Waste Land » et des institutions orphelines de sens avec un capital, confiance tendant lamentablement vers moins l’infini. La Tunisie est désormais en chantier et l’euphorie des premières semaines post-dictature ne doit pas nous détourner des défis qui nous attendent. .
Les révolutions sont des moments historiques rares. Elles marquent souvent des ruptures paradigmatiques importantes. Souvent, les populations qui expérimentent de tels évènements affichent une volonté quasi-naturelle de détruire consciemment leurs présupposés centraux et de remettre en cause l’intégralité de la théorie à l’œuvre dans la société. On cherche alors à développer de nouveaux repères, établir de nouvelles bases, former un modèle mental différent et inventer de nouvelles valeurs. Car si ce stade n’est pas atteint, la révolution n’aura été qu’un leurre ayant engendré des milliers de victimes. Les conséquences historiques seraient alors désastreuses avec un nivellement par le bas, des choix médiocres et peu courageux et une dilution dans le temps du moral et de la volonté de la population. En Tunisie, nous avons décidé que nos rêves ne se briseront jamais sur le ressac d’une réalité que nous ne contribuerons pas à forger par nous-mêmes. Les Tunisiens ont brûlé leurs vaisseaux et ils ne s\’arrêteront pas en si beau chemin.
Je suis convaincu que le premier grand chantier serait celui des valeurs. Car c’est là où les sbires de Ben Ali ont le plus fait mal aux Tunisiens et c’est là où le bât blesse. Mon pays a encaissé en silence les pires séquestrations de ses valeurs, sa morale et son éthique. Quelque chose de vraiment grave s’est produite en Tunisie depuis 1987. Doucement, mais sûrement, les théoriciens de l’ère Ben Ali ont mené un travail de destruction méthodique des fondamentaux culturels de la société tunisienne. Le « hall of shame » des inventions Ben Ali est garni de réalisations : le labeur n’est plus l’ascenseur social en Tunisie. Les qualités de détermination et de persévérance cèdent progressivement place au fatalisme et à la paresse chez les jeunes et les moins jeunes. On assiste alors à ce que les sociologues appellent le déclassement intergénérationnel. Déprimant pour une société dont la population est majoritairement jeune.
Autre réalisation, l’éthique n’est plus de mise. Place à la corruption et au clientélisme. Le moral des jeunes est sapé. Je suis enseignant universitaire et j’en sais quelque chose sur ce sentiment. Les horizons étaient bloqués. Etudiants et enseignants étaient incapables d’imaginer par quelle espèce de miracle les choses allaient changer. Constat accablant ! Pour les dizaines de milliers des diplômés qui passent annuellement de l’autre côté de la vie, l’accès à un poste d’emploi passe inéluctablement par les pots-de-vin et la malhonnêteté. Chacun laissera des plumes dans cette traversée dangereuse d’un marché de l’emploi « crocodileux ». Les chefs d’entreprises s’approprient rapidement cette forme de déviance. Les mécanismes d’incitation à l’emploi sont détournés de leurs finalités et servent, contre leur nature même, à fragiliser davantage les jeunes et enrichir les entrepreneurs. Les intellectuels ont été achetés. Leur silence valait de l’or. Ben Ali ne savait pas compter ses sous (les nôtres en réalité) quand il s’agissait de dissuader toute velléité de résistance et d’opposition. Tout le monde a eu droit à la baraka de Sidi Zinou. Et que les jeunes de Kasserine, de Sidi Bouzid, le Kef et Kébili aillent au diable. La corruption et la malhonnêteté sont érigées par Ben Ali en système de management du pays. Rares les personnes qui n’étaient pas affectées par ce fléau dévastateur. Quel gâchis !
C’est sur le terrain des valeurs que nous gagnerons (ou perdrons) la bataille de la révolution, celle qui est à venir. Je suis persuadé que les années de braise ne nous ont pas d’autre choix que de regarder notre vérité en face et agir courageusement. Nous devons réinventer la morale, l’éthique, le labeur, la justice et l’honnêteté. Cela prendra du temps. Beaucoup de temps peut-être. Commençons par nous-mêmes. Chacun dans son rayon d’action immédiat. L’effet d’entrainement ne tardera pas à se mettre en place. Chaque pas serait victoire. Encore la sagesse de ce Lao Tseu !
Source: “GlobalNet” Le 22-03-2011
Tunisie : Sakher El Materi aurait obtenu une résidence permanente au Qatar
Selon des sources consulaires de l’ambassade de Tunisie à Doha au Qatar, Sakher el Materi, l’homme d’affaires ayant fui la Tunisie après la chute du régime corrompu de Ben Ali, aurait obtenu une résidence permanente dans ce pays du golfe arabe, rapporte la chaîne d’information panarabe Al Arabiya.
Selon cette même source, Sakher El Materi résiderait temporairement au luxueux hôtel « The Four Seasons ». C’est son troisième lieu de résidence après de nombreux hôtels tels que le luxueux « Ritz Carlton ». Au « Four Seasons », El Materi est au 23ème étage sous un contrôle strict pour sa sécurité, dit-on.
El Materi aurait transféré l’ensemble de ses biens liquides dans des banques qataries. On ne sait pas encore combien il a réussi à transférer dans ses comptes dans ce pays arabe, notamment ses parts de 25% dans le capital de Tunisiana.
Pour Qtel (Qatar Télécom), qui détient 70% du capital de Tunisiana, et selon l’un de ses responsables « on s’attend à ce que les choses soient plus calmes et stables en Tunisie pour discuter avec le gouvernement tunisien du sort de la participation de Sakher El Materi dans le capital de cet opérateur téléphonique, puisque l’ensemble des biens de la famille du président déchu ont été saisi par les autorités tunisiennes ».
Source : « Investir en Tunisie » Le 22-03-2011
Livre: Lorsque Bouazizi et la révolution tunisienne entrent dans la légende
L’immolation de Mohamed Bouazizi va précipiter le départ du dictateur Ben Ali. C’est sur ce récit que revient la journaliste romancière française Claire Gallois dans un livre court et engagé publié tout récemment -le 17 mars 2011- et qui se veut un hommage à un jeune de 26 ans, marchand ambulant à Sidi Bouzid, d’où tout est parti, un 17 décembre 2010.
Une demie heure voire moins sont nécessaires pour prendre connaissance du contenu du livre que Claire Gallois, journaliste et romancière, vient de consacrer à la révolution tunisienne. “Vivre libre“ de Galois comporte, en effet, 32 pages. Et ressemble plus à ce titre à un opuscule ou à un long article qu’à un livre*.
L’essentiel est, toutefois, peut-être ailleurs. “Vivre libre“ a voulu délivrer au monde un témoignage d’une révolution qui a essaimé dans beaucoup de pays arabes: en Egypte, mais aussi actuellement en cours en Libye, au Yémen, au Bahreïn,…
Le livre de Claire Gallois est dédié à Mohamed Bouazizi, ce héros de la révolution tunisienne, d’où tout est parti. Mme Gallois raconte, d’ailleurs, l’itinéraire de ce jeune tunisien qui a perdu son père, tâcheron agricole, à l’âge de 3 ans.
Elle rapporte, dans le détail, les événements qui l’ont conduit à s’immoler par le feu le 17 décembre 2010: les tracasseries policières, la confiscation de son étal, l’épisode de la femme policière qui l’a giflée et lui a craché au visage. Comme elle raconte son transfert à l’Hôpital des grands brulés de Ben Arous et son enterrement au cimetière de «Garaat Bennou». Et le refus de la police de voir son cercueil passer devant l’endroit où il s’est immolé.
Une police qu’elle ne croit pas toute «cruelle et vendue». Elle le dit, du reste, clairement: «certains policiers, les larmes aux yeux, se sont excusés devant leurs victimes». Comme «ils se sont rangés du côté des protestataires et des réformes qu’ils réclament».
Claire Gallois apporte au passage un éclairage sur les souffrances d’une jeunesse tunisienne qui n’a que trop enduré. Chômage, confiscation de la parole, censure, cela ne pouvait trop durer.
La révolution tunisienne a, du reste, étonné plus d’un. A commencer par le dictateur Ben Ali qui a, lui lui-même, douté lorsque la révolte a pris de l’ampleur gagnant de nombreuses villes. Ce qui ne lui arrive que rarement, semble dire Claude Gallois.
«La faim a permis!»
Les faits marquants de la révolution tunisienne entre le 17 décembre 2010 et le 14 janvier 2011 dont racontés dans le menu détail. Les personnages parmi les plus importants sont également présentés. Le président déchu, son épouse Leïla Ben Ali pour laquelle elle a cette phrase: «l’ex-petite-coiffeuse, devenue la femme cousue d’or du président (qui) a pour habitude de s’emparer sans vergogne de tout ce qui lui plaît, serait-ce de votre charmante maison de famille, et cela sans recours possible, pas même celui de porter plainte». Claire Gallois évoque également le général Ammar, qui a refusé, au plus fort de la révolution de la jeunesse tunisienne, de tirer sur la foule.
Pour l’essentiel, pas de grandes révélations. Mais des instantanés de la révolution tunisienne qui vous obligent à être accroché au texte. Jusqu’au bout. Un texte d’actualité écrit comme un roman.
Ce qui ne veut pas dire qu’aucune «révélation» n’est introduite dans le texte. Ainsi, Gallois évoque, même si elle avoue que cela tient de la rumeur, que la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton aurait téléphoné au président déchu pour lui demander de quitter les lieux. Comme «elle aurait aussi appelé le roi Saoud pour lui suggérer d’accueillir le fuyard, en contrepartie de certains contrats économiques avantageux signés avec les États-Unis».
Une autre histoire qui vaut le détour. La voici: «Dans le richissime palais de Carthage, au-dessus d’un ascenseur destiné à épargner la fatigue de monter dix marches de marbre blanc aux partisans du moindre effort, un petit malin a rayé l’inscription «Dieu a permis cet ascenseur!» pour la remplacer par «La faim a permis!»…
Mais le mérite du livre est aussi peut-être intimement lié à son auteur. Claire Gallois, journaliste et romancière, a, aujourd’hui, 73 ans. Comme quoi la révolution tunisienne n’a laissé personne insensible: les jeunes comme -et c’est le cas de le dire- les moins jeunes.Et bien au-delà des frontières de la Tunisie.
Source: ”wmc” Le 22-03-2011
Tunisie – Des slogans économiques dans une manifestation salafiste
Dans une manifestation, tenue mardi 22 mars 2011à l’avenue Habib Bourguiba à Tunis, des salafistes, notamment des sympathisants du parti « Ettahrir », à qui le ministère de l’Intérieur a refusé l’octroi de visa depuis le 12 mars 2011, des slogans économiques ont été brandis et scandés.
Il s’agit de messages contre le mode d’économie libérale et de marché. Par ailleurs, sur une large banderole, on pouvait lire que la Banque Mondiale est un « danger » qui guette la Tunisie, son indépendance et sa prospérité !
On a évoqué, entre autres, la « menace européenne, l’interventionnisme américain et la mainmise des institutions internationales » sur l’économie tunisienne. « Il faut s’en affranchir », souligne un jeune manifestant.
Et parmi les secteurs les plus critiqués, celui bancaire n’a pas été épargné, notamment la Banque Zitouna, considérée comme « une invention des mécréants pour récupérer l’argent des bons musulmans. Il faut des banques qui répondent aux règles de la chariâ !», ont crié les manifestants.
Peu après, vers midi, une cinquantaine de manifestants, brandissant les fameux drapeaux noirs, a pris place en plein centre–ville, sur l’avenue Bourguiba.
Au début, ils protestaient contre la venue d’Hillary Clinton et la visite du Secrétaire général des Nations Unis, Ban Ki-moon. Toute visite ou contact avec les instances internationales est considéré comme une ingérence. Des curieux se sont attroupés pour regarder le déroulement de la manifestation.
Par contre, du côté des commerçants de l’artère principale de la capitale, la peur des dérapages se faisait sentir. Certains restaurateurs ont débarrassé les terrasses des cafés. D’autres guettaient tout signe alarmant.
Les membres de la Garde nationale (et non police) observaient, sans intervenir, le déroulement de la manifestation.
Source: ”Business News” Le 22-03-2011
Livres : «Arcs-en-ciel» de Jomaâ Sassi : A la Tunisie, à la femme
Le recueil poétique de Jomaâ Sassi «Arcs-en-ciel» est un coup de cœur à la Tunisie et à la femme en général. A travers trois parties qui constituent ce recueil, c’est une poésie simple, métaphorique presque à outrance, qui s’offre à notre lecture. Des gerbes de couleurs et des sentiments en couleurs. Dans «La Tunisie au cœur», le poète personnifie la mère-patrie. Il y dit, en substance: «A toi ma Tunisie, ma mère immortelle, ces mots de lumière en hommage à ton peuple, à tes génies et à ta beauté». Il la voit, telle une belle femme. Son amour fou du pays se confond avec ses souvenirs d’il y a soixante ans. «Je t’aime tout simplement d’un amour grand, fier et immense», ajoute-t-il. Le passé et le présent y sont évoqués, à travers des ballades spirituelles et intellectuelles, qui vont des «cygnes du Belvédère», à Utique, en passant par Raf-Raf. Le futur n’y est pas en reste; dans la mesure où «Carthage fière et puissante, enfantera le génie des siècles futurs», dixit l’auteur. Descriptif, dans le «cœur nomade», seconde partie du recueil, le poète raconte son cœur qui voltige aux rythmes des amours et des passions amoureuses. Rapporte-t-il, ou imagine-t-il ici et là, une conversation avec une femme bien aimée? Ses mots d’amour chantent l’infinie beauté de beaucoup de femmes. Y meurt-il d’amour? Il est, en fait, comme embaumé d’amour. Car, pour lui, la poésie est femme. Eve vient de villes et de villages de la Tunisie profonde. Des chroniques d’un amour éternel suivent. Il est (le poète) enivré par la beauté de la femme. Les poèmes sont, en plus, dédiés et directement à des femmes, à travers leurs prénoms. Jomaâ Sassi est-il à la recherche de la femme? Elle est poésie, elle est… maghrébine! Cela dépasse la Tunisie, car on va même à la province française, partout où la femme est, pour le poète, l’éblouissement. Il est berbère, il est nomade, mais toujours conquérant! Le troisième volet de son recueil, est «Au fil des ans». Des poèmes du souvenir, de l’évocation, aux plus petits détails, offerts à toutes les femmes du monde. Il y a même la ville de Gaza, une autre femme martyrisée, avec un appel aux poètes pour défendre «la mère des arts et des génies». Le poète y va même jusqu’à écrire, à la fin de son recueil, un poème «Testament», sorte de conseils aux siens et à la femme, après sa mort. Un optimisme-pessimisme et un attachement indélébile à la femme. A déguster sans modération.
Source: ”Jetsetmagasine” Le 22-03-2011
Le philistin et le fusil
« La torture ne s’analyse pas ; elle se refuse ». Ainsi, débutait l’un de mes papiers publiés contre l’ignominie des monstres déchaînés. A l’interface des perspectives individuelle et collective, l’institution de la dictature pactise avec l’application de la torture sous la bannière de la censure. Au plan théorique, le champ personnel et le monde social exhibent les deux faces d’une même réalité globale. Pour cette raison, les ordonnateurs, les contrôleurs et les robots de l’horreur appréhendent les réactions ultérieures. |
De là, provient l’omniprésence de la surveillance, l’omnipotence de la police politique et l’hypertrophie, légendaire, des pratiques sécuritaires. Dans cette ambiance délétère, les tueurs de l’honneur affichent l’insouciance, brandissent l’arrogance et cachent leur peur. Un témoignage crucial, illustre l’occultation de la crainte viscérale derrière les outrances des allures triomphales. Propriétaire d’une ferme héritée de son père, dans le Zaghouanais, familier du gouverneur, inscrit au parti notable parmi les notables, Abdelkader Daâlachi, mon cousin germain, me chuchote ceci, au mariage de son fils : « J’étais à l’étage et j’entends crisser des pneus sur le gravier. Par la fenêtre, j’aperçois la voiture de la Garde nationale et j’ai pensé à une invitation venue du gouverneur. Confus, le gradé s’excuse avant de m’expliquer la situation. Demain, le président Ben Ali rend visite au gouvernorat et je dois remettre mon fusil de chasse, comme tout le monde. Il me sera rendu après le départ du président. Il faut être fou. Cela ne m’était encore arrivé du temps de Bourguiba ». Poussées jusqu’à l’obsession quasi psychopathologique, ces précautions du « Führer » satanique payaient le salaire de la peur-panique. Dès l’instant où le tortionnaire quitte son repaire d’archi-millionnaire, sur nos têtes vrombit l’hélicoptère. Tous les trois cent mètres, un policier guette, sur terre, quand le tyran délaisse le ciel et préfère le convoi présidentiel. Averti, Ben Ali savait à quel point il était honni. Adepte, malgré lui, des grands classiques, il applique ce conseil machiavélique : « La nature des peuples est changeante et il est aisé de les persuader d’une chose, mais difficile de les garder dans cette persuasion. Aussi faut-il y donner si bon ordre que lorsqu’ils ne croient plus, on leur puisse faire croire par la force ». Jolie mentalité ! L’usurpateur cultivait l’art de la protection rapprochée. Son entourage parental et médiatique le savait, cet homme, dévoyé, vivait stressé. Outrages… A quoi sert tout l’or accumulé aux dépens des citoyens spoliés, eu égard à cette vie sans qualité ? Avec dix-sept compagnons, avocats et universitaires, j’avais eu l’occasion de parapher une pétition. La protestation dénonçait la torture, infligée pour quelques uns jusqu’à la mort, aux Islamistes opposés à l’homme fort. Avant ma comparution devant le juge d’instruction, et ma défense par Mansour Cheffi, Néjib Chebbi et Sassi Ben Hlima, entre autres, gens au-dessus de tout soupçon, le chef du poste khaldounien m’avais confisqué mon fusil sans commentaire, ni récépissé, ni préavis. En bonne et due forme, les permis d’achat, de port d’arme et de chasse n’ont guère servi. Pourtant, au vu des codifications instituées en matière de propriété privée, rien ne distingue mon fusil, bien aimé, de mes souliers. Mais, pour les tenants du système totalitaire, il s’agissait d’écraser toute prétention à la dignité fondatrice de la citoyenneté. L’arbitraire faisait partie de l’infernale panoplie. La dictature n’est pas qu’un mot. Elle coule d’une source libérée par les salauds. Inféodé au bon vouloir du palais le juge édifie sa prestation sur trois chefs d’accusation ; l’outrage à un corps constitué, la diffusion de fausses nouvelles et la réunion illégale. Cela mérite cinq ans, au total. Le censé veiller au respect des lois me demande »pourquoi je salis avec mes compagnons, l’image de la nation ». Terrifié, au-dedans et professoral, au dehors, je lui réponds, sans façon : « L’image de la Tunisie est salie par celui qui torture et non par celui qui dénonce la torture». La deuxième question fut : « Comment, vous, des gens instruits, osiez enfreindre le droit ? ». Dans ma réponse, j’explique la différence introduite par l’évolution des mœurs entre le droit écrit et le droit réfléchi. A certain moment, j’ai cru subodorer chez cet homme voué, d’une part, à sa conviction, et de l’autre, à sa corvée, une certaine complicité. Néanmoins, le soir, ma tension artérielle bondit de quatorze à dix-neuf et demi sous le regard, ébahi, du médecin Rim Horchani. Informés, des collègues, Pierre Bourdien, Andrée Michel, Jacques Berque, Maxime Rodinson, Pierre George, Paul Vieille et Jean Ziegler adressèrent, chacun son télégramme, pour intervenir, en ma faveur, auprès du dictateur. Jusqu’au départ dérisoire, du fuyard, mes réclamations pour avoir de quoi importuner un canard ou un pigeon butèrent sur le mur du non. Par son audace héroïque, Mohamed Bouazizi mit le feu aux poudres de la révolution démocratique. Durant trois décennies, avant ce geste magnifique, Néjib Chebbi figura, au premier rang des partisans affairés à préparer la poudrière allumée par l’indomptable Bouazizi. Les témoins sont là, nombreux pour infliger un démenti, aux envieux. Le ton de l’analyse et le temps de la reconstruction n’ont que faire des fausses accusations. Face aux insinuations timorées, seuls exultent les nostalgiques du régime tyrannique. A ce pain empoisonné, les épris de liberté ne goûteront jamais. Pour ne citer que ceux-là, parmi tant d’autres, Sihem Ben Sedrine, Radhia Nasraoui, Maya Jribi, Bochra Belhaj Hmida, Souhir Belhassen, Hamma Hammami, Mustapha Ben Jaâfar, Sadok Marzouki, Taïeb Baccouche, Mokhtar Trifi, Khemaïes Chammari, Gilbert Naccache, Rached Ghannouchi, Serge Adda, Salah Zeghidi, Rchid Khechana, Taoufik Ben Brik, Tahar Chagrouch, Moncef Chebbi, Mustapha Ben Tarjem, Noureddine Ben Khedher, Ahmed Smaoui ou Mohamed Charfi apportèrent leur pierre à l’édifice contestataire avec Néjib Chebbi, homme de loi, d’éloquence, d’intelligence de courage et de bonne foi. Ses grèves de la faim, au milieu de fiers copains, ébranlèrent le trône du philistin et contribuèrent à frayer le droit chemin. Dans ces conditions plurielles, ni l’autoflagellation des uns, ni l’autosatisfaction des autres ne sauvegardent le sens du réel. Aujourd’hui, encore, l’opposition d’une Koubba huppée à une Kasbah déshéritée suppute l’hostilité là où fleurit la complémentarité. Une fois retenue l’option afférente à l’assemblée constituante, la priorité revenait au labeur dans la sécurité retrouvée. Dès lors, où commence « la majorité silencieuse » et où finit la minorité tapageuse ? Maintenant, presque cinquante partis, pour un si petit pays, devenu si grand, vouent leur insoutenable subdivision à d’inéluctables coalitions. Capitalisme, socialisme, panachage, islamisme et laïcisme ne semblent guère favoriser, outre mesure, un tel multipartisme. Une fois levée la chape de plomb, partout fuse l’aspiration à une libre expression au nom de la Révolution. Par ce biais, aussi, tombe la cloison arguée entre l’individu et la société. N’en déplaise à Pascal, ce génie englué dans sa mauvaise conscience religieuse, voilà pourquoi « le moi » n’est plus « haïssable ». Biographie et autobiographie campent, aujourd’hui parmi les techniques de recherche déployées dans le domaine des sciences humaines. Source: “Le Temps” Le 22-03-2011 |