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   TUNISNEWS  
 7 ème année,       N° 2521 du 18.04.2007
  
 
 
    
   
L’Observatoire Pour la             Protection des Défenseurs des Droits de l’Homme: APPEL URGENT             Agression à l’encontre de M. Abderraouf Ayadi             AFP: Tunisie: un parti d’opposition accuse le             pouvoir d’entraver son action             AP: Tunisie: un parti d’opposition menacé d’expulsion de son siège             Slim Bagga: Incurie             Houcine Ghali: Droles d’élections des membres du CC à Jebeniana!!             Réalités:Sept ans après sa disparition : Que             reste-t-il de Bourguiba ? Interviwe de Béji Caïd Essebsi             Réalités: Bourguiba restera Bourguiba… Les Beys ne sont plus beys             Réalités:La menace d’Al Qaïda au Maghreb :             Savoir raison garder
  
 
  
 
  
 
  
 
 L’Observatoire       Pour la Protection des Défenseurs des Droits de l’Homme 
APPEL URGENT – L’OBSERVATOIRE
 
Agression / Harcèlement       Tunisie 
18 avril 2007
 
       
             L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme,       programme conjoint de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et       de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH),       vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en       Tunisie.              
Description de la situation :              L’Observatoire a été informé par le Conseil national pour les libertés en       Tunisie (CNLT) de l’agression dont a été victime 
 
M. Abderraouf Ayadi,
 avocat, ancien       membre du Conseil de l’Ordre des avocats et ancien secrétaire général du       CNLT, au sein du Palais de justice à Tunis.              Selon les informations reçues, le 14 avril 2007, M. Abderraouf Ayadi a été       agressé par un officier de la police politique devant la salle d’audience       du tribunal de première instance à Tunis, où il se préparait à plaider       dans une affaire où comparaissaient des prévenus en vertu de la loi       anti-terroriste. Me Ayadi a été frappé à coup de pieds par un agent de       police tandis que d’autres agents ont formé un barrage devant la porte       pour l’empêcher d’entrer dans la salle d’audience.               Auparavant, Me Ayadi avait été témoin de l’expulsion par la police       politique de M. Ali Ben Salem, vice-président de l’Association de lutte       contre la torture en Tunisie (ALTT) et président de la section de Bizerte       de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH), de la salle       d’audience, afin de l’empêcher d’observer le procès.              La défense a protesté contre cette agression et a demandé au juge Tarek       Brahem d’user de ses prérogatives pour intervenir et protéger l’immunité       du palais de justice. Toutefois, ce dernier a indiqué que ce qui se       produit en dehors de la salle d’audience ne relevait pas de sa compétence.       Par la suite, le bâtonnier Abdessattar Ben Moussa est arrivé sur les lieux       et a fait un constat de l’incident. La défense s’est alors retirée de       l’audience pour protester contre ces violations graves à l’encontre d’un       avocat dans l’exercice de ses fonctions.               L’Observatoire exprime sa profonde préoccupation à l’égard de ces faits,       qui s’inscrivent dans le cadre plus général de représailles des défenseurs       des droits de l’Homme en Tunisie, et notamment des avocats engagés dans la       défense des droits de l’Homme. L’Observatoire rappelle que ces derniers       font l’objet d’un harcèlement permanent dans leur vie quotidienne, visant       également les membres de leur familles, qu’ils sont également souvent       l’objet de graves actes de violence et qu’enfin leur clientèle fait       fréquemment l’objet de pressions pour les dissuader d’avoir recours à leur       conseil (Cf. rapport annuel 2006 de l’Observatoire).               
Actions demandées :              Merci de bien vouloir écrire aux autorités tunisiennes en leur demandant       de :              i. garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique       de M. Abderraouf Ayadi et de M. Ali Ben Salem, ainsi que de l’ensemble des       défenseurs des droits de l’Homme en Tunisie ;              ii. Mener une enquête indépendante sur les faits décrits ci-dessus, afin       que leurs auteurs soient identifiés et dûment jugés et sanctionnés       conformément à la loi en vigueur ;              iii. mettre un terme à toute forme de harcèlement à l’encontre de tous les       défenseurs des droits de l’Homme en Tunisie, afin qu’ils puissent exercer       leur profession et mener leur activité de défense des droits de l’Homme       librement et sans entrave ;              iv. se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des       droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9       décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui dispose que       “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de       promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des       libertés fondamentales aux niveaux national et international”, son article       9.3.C qui dispose que « chacun a le droit, individuellement ou en       association avec d’autres d’offrir et prêter une assistance juridique       professionnelle qualifiée ou tout autre conseil et appui pertinents pour       la défense des droits de l’Homme et des libertés fondamentales », et son       article 12.2, qui dispose que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires       pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne,       individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence,       menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou       autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits       visés dans la présente Déclaration” ;              v. plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration       universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et       internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la Tunisie.               
Adresses :              ·        
 M. Zine el-Abidine Ben Ali, Président de       la République, Palais de Carthage, 2016 Carthage, Tunisie, Fax: +216 71       744 721 ou +216 71 731 009       ·         M. Mohamed Ghannouchi, Premier Ministre, Secrétariat Général du       Gouvernement, Rue de la Kasbah, 1008 Tunis, Tunisie, Fax: +216 71 562 378       ·         M. Rafik Belhaj Kacem, Ministère de l’Intérieur et du       Développement local, Avenue Habib Bourguiba, 1001 Tunis, Tunisie, Fax: ++       216 71 340 888; Email : mint@ministeres.tn       ·         M. Kamel Morjane, Ministère de la Défense Nationale, Avenue Bab       Mnara, La Kasbah, 1008 Tunis, Tunisie, Fax: +216 71 561 804       ·         M. Bechir Tekkari, Ministère de la Justice et des Droits de       l’homme, 57, Boulevard Bab Benat, 1006 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 568       106 ; Email : mju@ministeres.tn       ·         Ambassadeur, S.E M. Samir Labidi, Mission permanente de la       Tunisie auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, 58 Rue Moillebeau,       Case postale 272, 1211 Genève 19, Suisse, Fax : +41 22 734 06 63 ; Email :       mission.tunisia@ties.itu.int       ·         Ambassadeur M. Mehrez Benrhouma, Ambassade de la Tunisie à       Bruxelles, 278 avenue de Tervueren, 1150 Woluwe-Saint-Pierre, Belgique,       Fax : + 32 2 771 94 33; Email : amb.detenusie@brutele.be              ***       Genève – Paris, le 18 avril 2007              Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions       entreprises en indiquant le code de cet appel.              L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger       les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur       apporter une aide aussi concrète que possible.              L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la       République Française.              
Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne       d’Urgence :       E-mail : Appeals@fidh-omct.org       Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80       Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29 
Tunisie: un parti d’opposition accuse     le pouvoir d’entraver son action
     
      AFP, mardi 17 avril 2007    
           
          TUNIS – Une formation politique tunisienne d’opposition, le Parti           démocratique progressiste (PDP) et son organe hebdomadaire Al-Mawquif           ont dénoncé mardi « une manoeuvre politique » destinée à paralyser leur           action en tentant de les déloger de leurs locaux à Tunis.          
                         
              Le directeur d’Al-Mawqif Ahmed Néjib Chebbi, ancien secrétaire               général du PDP a indiqué lors d’une conférence de presse, avoir               reçu « un avis légal l’obligeant à quitter » le siège du journal, au               centre de la capitale pour usage abusif du bail de location.              
                                 
                  « Cet avis exprime une volonté délibrée du gouvernement de                   supprimer le dernier carré de liberté d’expression et de                   réunion dans notre pays », a affirmé M. Chebbi.                  
                                         
                      La secrétaire générale du PDP, Maya Jribi, a dénoncé « une                       manipulation, qui ne menace pas seulement le PDP, mais                       vise à priver les Tunisiens du dernier espace d’expression                       libre et de leur droit légitime à une participation                       politique ».                      
                        M. Chebbi et Mme Jribi ont indiqué qu’ils s’opposeraient                         « à la tentative d’expulsion par tous les moyens                         pacifiques » et envisagé d’entamer « une grève de la faim                         illimitée pour défendre la liberté d’expression et de                         réunion ».                        
                                                     
                            L’avis d’évacuation, ont-ils ajouté, est motivé par                             le fait que le bail établi il y a treize ans au nom                             de l’organe du PDP « Al Mawquif » devait être limité                             au seul usage des activités du journal, à                             l’exclusion de celles du parti.                            
                                                             
                                Mme Jribi, qui vient de succéder à l’avocat                                 Chebbi à la tête du PDP, a ajouté que la menace                                 d’expulsion de son siège central coïncidait avec                                 des entraves et harcèlements visant à paralyser                                 une dizaine de représentations régionales du                                 parti, l’une des huit formations d’opposition                                 légales de Tunisie.                                
                                   
                                  Interrogées par l’AFP, les autorités ont                                   démenti « les allégations » des dirigeants du                                   PDP et de son organe, affirmant que l’affaire                                   est « un contentieux civil immobilier entre                                   propriétaire et locataire (que) seule la                                   justice est habilitée à trancher ».
 
 
 
 
 
 
 
  
 
 
 
Tunisie: un parti d’opposition menacé     d’expulsion de son siège
     
    Associated Press, le 17 avril 2007 à 18h39      TUNIS (AP) — Les dirigeants d’un parti de     l’opposition tunisienne ont annoncé mardi leur intention d’entamer une « grève     de la faim illimitée » à la suite d’une menace visant à les déloger du siège     central qu’ils occupent depuis 13 ans à Tunis.  Lors d’une conférence de     presse, la cheffe du Parti démocratique progressiste (PDP), Maya Jribi, et     le directeur de l’organe de cette formation légale, Néjib Chebbi, ont     dénoncé les « harcèlements » dont leurs institutions font l’objet.  Ils ont     fait état d’un avis adressé par le propriétaire des locaux arguant d’une     enfreinte aux dispositions du bail destiné à abriter uniquement les bureaux     du journal « Al Mawkef » du PDP, sous réserve d’effacer le contrat de location     dans les 15 jours.  Ils accusent le gouvernement de « manoeuvres dilatoires     visant à étouffer les opinions divergentes et les activités des partis     d’opposition et des associations de la société civile indépendantes ».      Selon Maya Jribi, cette injonction qui coïncide avec « une campagne     nationale » ciblant les sièges de plusieurs fédérations régionales de     l’intérieur du pays, tend à « venir à bout du dernier carré de la liberté     d’expression et d’activité politique » dans le pays.  De leur côté, les     autorités réfutent ces allégations, faisant valoir que le problème relève     d’un « litige civil immobilier entre bailleur et locataire ».  « La justice est     seule habilitée à trancher de tels litiges », ajoute-t-on de mêmes sources.      
 Incurie
       
  par Slim Bagga              Ils « passent leur vie à dire merci », clame la chanson. Pourtant, rien dans       le comportement passé ni actuel du régime ne le justifie. Depuis 20 ans,       cette dictature confisque la liberté, emprisonne arbitrairement, torture       impunément etc  Mais aussi paradoxal que cela puisse paraitre, elle trouve       encore des âmes polies jusqu’à l’allégeance pour lui dire « merci » à       l’occasion d’un recouvrement de passeport, par exemple.              Ainsi, la lecture de l’un des derniers communiqués de la Ligue tunisienne       des droits de l’homme ne peut que scandaliser tous les défenseurs des       droits humains. Son Président, Me Mokhtar Trifi, vient de récupérer son       passeport. Cela aurait-il mérité que la Ligue adresse ses remerciements « à       celui qui en a pris la décision »? Le passeport n’est-il pas un droit dont       doit bénéficier tout citoyen et dont des centaines sont privés le plus       arbitrairement du monde?              Et puis qui remercie-t-on au juste? D’autant que cette même Ligue et son       même Comité directeur n’avaient-ils pas dénoncé le plus énergiquement le       2ème coup d’Etat commis par Ben Ali avec le referendum du 26 mai 2002, en       tordant le cou à la Constitution, instituant l’impunité et rétablissant la       présidence à vie, faisant de ce chef d’Etat et de son régime des       institutions illégitimes et hors-la-loi?               Est ce donc ce même bourreau et ce même dictateur maintes fois épinglé par       la communauté internationale auquel la Ligue des droits de l’homme est       reconnaissante pour avoir « rendu » un document de voyage? Et même si la       diplomatie exigeait cette révérence aux fins de pousser à débloquer les       avoirs bancaires de la Ligue, personne ne comprendrait cette attitude       empreinte d’obséquiosité au moment où la torture a repris de plus belle en       Tunisie et où le président Zine UBU ne respecte aucune règle.              Hélàs, le dernier communiqué d’Anouar Kousri au nom de la LTDH ne peut       permettre de contredire les détracteurs de l’opposition selon lesquels la       majorité des opposants tunisiens font de la politique pour accéder à la       notoriété et non pour défendre des convictions.              Malheureusement, il n’y a pas que la péripétie Trifi. D’ex-responsables,       officiellement éloignés de la politique ont pour le moins surpris par       leurs récents comportements.               Au lendemain de décembre et janvier derniers, attribués à un Groupe       salafiste , l’ancien ministre de l’Intérieur de Bourguiba, Tahar Belkhoja,       a adressé une lettre au Général Ben Ali pour condamner ces « actes       terroristes ». Cette lettre a été publié par un quotidien progouvernemental       de la place. A croire que c’est Ben Ali lui-même qui a ordonné sa       publication pour mieux « gratifier » son expéditeur. D’autant que l’auteur       se dit disponible pour apporter son concours contre le terrorisme.              Emanant d’un Bourguibiste convaincu, qui sait au demeurant tout ce que Ben       Ali a fait subir à Bourguiba, à son oeuvre et à ses fidèles, cela ne peut       que susciter des questions. Et en tout cas au moins celle-ci: quelle       mouche a piqué Tahar Belkhoja pour qu’à 80 ans environ, il fasse une offre       de service à un régime sanguinaire et à bout de souffle? 
DROLES D’ ELECTIONS         DES MEMBRES DU CCI A JEBENIANA!!
         
        Le dimanche dernier, 15 avril, les commerçants, industriels, artisans et         prestateurs de service ont élu len 280 membres des comités des Chambres         de Commerce et de l’Industrie ( CCI ) dans l’ensemble des délégations du         pays.
        A Jebeniana, délégation du gouvernorat de Sfax sur la route sahélienne         de Mahdia, qui se caractérise par l’absence totale d’unités         industrielles mais se distingue par 50% de chômage de sa popultion         active, ces élections ont eu lieu directement dans le bureau de la         délégation et sous l’égide du délégué. Deux listes ont fait semblant de         s’affronter : celle dressée par le gouverneur de Sfax ert Hédi Jilani,         patron de l’UTICA et puis une autre paufinée par le RCD, parti au         pouvoir, avec des fidèles au régime et à leur tête Mounir Nôomane,         surnommé Wild Ennagouss, commerçant jouissant des largesses de l’Etat et         longtemps membre du conseil municipal.
         
        L e secrétaire général du Comité de coordination du RCD, Brahim Ellam (         le rasoir ) a fait le tour du village sur sa bicyclette pour appeler les         commerçants et les patrons des petits métiers pour venir au bureau du         délégué représantant l’Etat-Parti de Ben Ali afin d’ accomplir leur         devoir électoral!! Et le tour est joué avec, trois jours après, des         articles sur les medias tunisiens qui parlent de transparence,         d’élections déroulées dans le stricte respect de la démocratie, eouvre         du changement.
        C’est ainsi que M. Mohamed Laouini, directeur général du commerce         intérieur  » a mis l’accent sur la neutralité totale observée par         l’administration au cours de ces élections, et son souci de veiller à         l’application stricte de la loi afin d’assurer le déroulement de la         consultation dans la transparence totale, ce qui a pu être réalisé,         comme l’atteste l’absence de toute contestation de quelque nature ou de         quelque origine que ce soit  » ( Le Temps du 18 avril 2007 ).
         
        Ainsi donc le pouvoir tunisien, par l’intermédiaire de ses représentants         dans les régions et au sein de l’administration continue à user de la         mauvaise fois et de la langue de bois pour légitimer son emprise sur la         population depuis le  » changement  » du 7 novembre 1987. Car, parler de         transparence totale, dans un pays où le président exerce un pouvoir         monolitique et personnel sans égal, où l’opposition n’a nullement droit         au chapitre, où toute organisation doit obéir aux injonction de l’Etat,         où le parti RCD, qui se confond totalement avec le pouvoir en place,         domine toute la vie sociale, politique et snydicale, constitue un leurre         et une mascarade sans égale.
        Oser parler de l’absence de toute contestation pour donner à ces         élections une quelconque liberté est un comble puisque tout le monde         sait qu’effectivement toute contestation, la plus paisible et léagale         soit elle se trouve tout de suite réprimée férocement par la police et         ses organisateurs poursuivis sans relâche et harcelés jusque dans leur         vie privée.
         
        Il ya des moments où on se demande si les dirigeants du pays jouissent         d’un minimum de conscience, s’ils sont en paix avec eux-mêmes et s’ils         s’apprécient lorsqu’ils se regardent le matin dans un miroir. Mais il         parait que l’habitude de mentir, de bleuffer, de déréaliser la réalité         objective, pour des intérêts matériaux, finit par blaser ses pratiquants         et devient même une antidote dont ils ne peuvemnt plus sa’en passer.
         
 Houcine Ghali, Genève
 
       
 
 
 
Sept   ans après sa disparition : Que reste-t-il de Bourguiba ?
Interviwe de Béji Caïd Essebsi, ancien ministre   des Affaires étrangères
 
   
     En cinquante ans de politique et trente ans de pouvoir, Bourguiba a marqué de   son empreinte la Tunisie moderne.      Entre les deux moments de la mémoire et de l’histoire, Béji Caïd Essebsi,   ancien ministre des Affaires étrangères de Bourguiba à la fin de son règne,   analyse et commente pour nous des moments forts de l’épopée Bourguiba. Sept ans après sa disparition et vingt ans après qu’il   ait quitté le pouvoir, quel bilan faites-vous de l’œuvre de Bourguiba ?      L’œuvre d’Habib Bourguiba, à laquelle il a consacré soixante ans de sa vie, ne   peut être résumée en quelques lignes.      Dès le milieu des années 20 du siècle dernier, alors jeune avocat inscrit au   barreau de Tunis, Habib Bourguiba s’était engagé dans le combat politique pour   la libération de son pays du joug colonial. Un engagement total au mépris de   sa vie professionnelle, de sa vie familiale, de sa santé et très souvent de sa   liberté.      Sous son leadership et celui de son parti, le néo-Destour, qu’il a fondé en   1934, le mouvement de libération nationale a mené la lutte contre le régime du   protectorat français, jusqu’à son terme : l’Indépendance de la Tunisie.      Mais l’Indépendance n’était qu’une première étape qui devait être suivie par   d’autres. D’abord l’édification d’un Etat moderne doté d’une Constitution qui   proclame que la Tunisie est un état libre, indépendant et souverain ; sa   religion est l’Islam, sa langue l’arabe et son régime la République.      Ensuite, et c’est là l’ambition de Bourguiba : la promotion de l’homme dans   une société moderne, dégagée des archaïsmes du passé.      Une action de longue haleine jalonnée par des réformes en profondeur, qui ont   fondamentalement transformé le paysage politique, social et économique et   marqué la société tunisienne d’une empreinte indélébile.      Il a également su élever la Tunisie au rang d’un Etat sérieux, respecté et   crédible dont le rayonnement dans la politique internationale a dépassé   largement ses modestes dimensions.      Une telle position est le fruit d’une politique raisonnée, fondée sur des   choix qui se sont avérés justes, et sur un art politique qui n’est pas pure   tactique, mais qui était le fruit de la maturité, du courage intellectuel et   d’une certaine vision du monde. La Tunisie s’était alors distinguée par ses   valeurs et son engagement pour la défense des causes justes.      Quelles sont les réformes qui ont marqué le plus son   action politique ?      Deux grandes réformes, parmi d’autres, seront les réalisations marquantes de   l’œuvre de Bourguiba :       – la généralisation de l’enseignement, un enseignement moderne et d’ouverture,   dispensé gratuitement aux garçons et aux filles, toutes conditions sociales   confondues,      – ensuite la promulgation du Code du Statut Personnel, réforme unique dans le   Monde musulman, qui par une interprétation audacieuse et intelligente des   versets coraniques, a permis l’émancipation de la femme tunisienne et sa   libération des pesanteurs de pratiques révolues.      La femme tunisienne est aujourd’hui en situation de quasi égalité avec l’homme:   elle est électrice et éligible, occupe les plus hautes fonctions politiques,   administratives et judiciaires et a une place de choix dans les professions   libérales.      La mise en application de ces réformes depuis un demi-siècle a   fondamentalement transformé les mentalités des Tunisiens et la société   tunisienne elle-même, de sorte que l’on peut parler aujourd’hui de la   naissance d’une Tunisie nouvelle, maîtresse de ses destinées et témoin de son   temps.      Y a-t-il des ombres à ce tableau ?      J’en retiens deux :      -un déficit démocratique dans l’exercice du pouvoir, ce qui n’a pas favorisé   l’émergence de réels contre-pouvoirs, seuls à même de prémunir contre les   dérapages et le glissement vers la personnalisation,       – ensuite une longévité au pouvoir qui n’a pas favorisé l’alternance et a fini   par aboutir à la proclamation de la présidence à vie.      Il est vrai que l’alternance du pouvoir n’est pas une pratique courante dans   les pays du Tiers-Monde. A l’exception de quelques rares cas de départ   volontaire, qui se comptent sur deux doigts d’une main —au Sénégal et tout   dernièrement en Mauritanie— dans la plupart des autres, les chefs d’Etat se   maintiennent au pouvoir au-delà du terme constitutionnel de leur mandat.      Vous qui l’avez connu et avez servi sous ses ordres, que   retenez-vous de l’homme Bourguiba ?      Aujourd’hui Habib Bourguiba n’est plus de ce monde, il appartient à l’Histoire   et ses actes répondent de son mérite. Il restera un exemple quasi-unique parmi   les chefs d’Etat du Tiers-Monde et même de ceux des pays plus avancés. Il a   quitté le pouvoir (nu comme Job) sans que nul ne puisse lui reprocher d’avoir   mis un sou dans sa poche, ni d’avoir cherché à s’enrichir en profitant de   l’autorité que lui conférait l’exercice de la magistrature suprême durant une   trentaine d’années.      Habib Bourguiba n’en était pas moins homme, il avait ses passions et a subi   les fatigues et le poids des ans. Il reste cependant un exemple exceptionnel   d’homme politique car, dans la lutte, il n’a jamais hésité à sacrifier sa   liberté ; dans l’exercice du pouvoir, il n’a jamais cherché l’enrichissement   personnel, et dans la vie il n’a jamais cessé le combat pour la dignité.      A ce titre, la Nation doit au Président Habib Bourguiba une reconnaissance qui   aujourd’hui nous incombe à tous.      La mémoire collective du peuple tunisien retiendra qu’Habib Bourguiba a été le   Combattant Suprême, père de l’Indépendance, le fondateur de la République et   de la Tunisie moderne, le libérateur de la femme et l’architecte de la société   moderne : une société solidaire du juste milieu, une société d’ouverture et de   progrès qui, sans renier ses valeurs arabo-musulmanes, est résolument tournée   vers l’avenir.       Quelle était sa vision du monde et des rapports   internationaux ?      Depuis qu’il a commencé le combat politique, Bourguiba a donné à la dimension   internationale une importance capitale. Il était conscient de la modestie de   son pays et du décalage important qu’on avait vis-à-vis de la France. C’est un   combat inégal qui ne peut être mené à bien que lorsqu’on peut instaurer un   certain équilibre.      Après la deuxième guerre mondiale, il y a eu les Accords de Yalta qui ont   marqué le nouvel ordre international de l’époque. Deux grandes puissances à la   tête de deux grands ensembles géo-politique : l’Est et l’Ouest.      Dans son combat contre la France, Bourguiba a estimé qu’il lui fallait un   allié de poids. C’est pour cela qu’il a fait le choix des Etats-Unis   d’Amérique. Bourguiba n’était pas un pro-américain comme le croyaient certains   de ses contemporains. Il a choisi l’Amérique uniquement pour contrer la   France. Pour Bourguiba, seuls les USA, leader du “Monde libre”, étaient   capables de peser sur la politique coloniale française. Ensuite les USA   n’avaient pas de passé colonial.      Beaucoup de militants nationalistes ont vu dans l’Union   Soviétique un allié de taille contre les empires coloniaux de l’Ouest.   Pourquoi Bourguiba n’a-t-il pas fait cette analyse ?      Bourguiba ne s’est pas inscrit dans le camp des adversaires du “Monde libre”   parce que cela ne servait en rien, selon lui, la question nationale. Le combat   de Bourguiba n’était pas idéologique. Il avait un seul but : libérer son pays.      D’ailleurs chaque fois que la Tunisie était dans une impasse face à la   puissance coloniale française, les Etats-Unis, ou ses alliés, sont intervenus   pour lui apporter leur aide. On peut citer à titre d’exemple le soutien   américain suite à l’agression française à Sakiet Sidi Youssef, l’aide   économique à la Tunisie et l’armement de nos forces nationales contre l’avis   de la France.      Comment les dirigeants destouriens ont-ils vécu le   soutien aux USA apporté par Bourguiba lors de la guerre du Vietnam ?      C’est un soutien à double sens. Bourguiba estimait qu’il y avait entre les USA   et la Tunisie un contrat moral. Ils nous ont soutenus lors de notre lutte   nationale, nous devions les soutenir dans les conflits sans renier nos   principes.      Mais la guerre du Vietnam n’était-elle pas une guerre   néocoloniale ?      Oui, c’est vrai, mais pas au début. Pour Bourguiba il y avait un conflit entre   l’Union Soviétique et le Monde libre. La première guerre entre ces deux blocs   était d’abord celle de Corée (1950-1953). Bourguiba avait déjà là-dessus une   position très nette. Pour lui c’était une tentative de l’Est pour mettre à   l’épreuve la solidarité du camp occidental. Bourguiba disait : “Si les USA   n’intervenaient pas, ce serait le début de la fin de l’Ouest”.      Ensuite Bourguiba a toujours cru dans la légalité internationale. Il faut   reconnaître que les Nations Unies, le cadre par excellence de la légalité   internationale, ont longuement contribué au mouvement de décolonisation. C’est   là où l’Organisation des Nations Unies a le mieux joué son rôle.      Cette vision du monde était-elle contestée au sein de la   direction destourienne?      Les dirigeants du Mouvement national n’avaient pas tous les mêmes convictions.   Il ne faut pas oublier que l’un des membres du Bureau Politique du Néo-Destour   les plus importants, Slimane Ben Slimane, n’était pas à proprement parler un   partisan du camp de l’Est, mais ce qu’on appelait à l’époque “les amis de la   paix” et qui estimaient que l’Union soviétique était le meilleur allié des   mouvements de libération nationale.      Slimane Ben Slimane a été écarté par Bourguiba. Il y a eu aussi toute une   jeunesse qui contestait la position de Bourguiba, surtout quand les Américains   ont mené une guerre totale contre le Vietnam.      Qu’est-ce qui a poussé Bourguiba à faire son fameux   discours de Ariha où il a prôné l’acceptation par les Arabes de la résolution   du partage de la Palestine ?      Bourguiba était dès 1947 pour une solution négociée dans le conflit   israélo-palestinien.      La résolution du partage de la Palestine a été votée le 29 novembre 1947.   Bourguiba était un intellectuel. Il a toujours cru qu’on ne pouvait pas aller   à l’affrontement direct entre deux forces d’inégale puissance. Il a vite   compris qu’Israël était supérieur militairement à toutes les armées arabes   réunies. Bourguiba voulait aider à trouver une solution à ce conflit. Il   n’était pas d’accord avec la prose pan-arabiste d’Abdennasser. Bourguiba,   contrairement à beaucoup de dirigeants arabes, ne s’est jamais substitué aux   Palestiniens. Il n’a fait que donner son avis en se basant sur sa propre   expérience. Il fallait amener l’adversaire à composer, c’est-à-dire à choisir,   pour ses propres intérêts, le moindre mal en maintenant une pression militaire   non conventionnelle. Ensuite cette solution va mettre Israël en difficulté.   D’ailleurs, la réaction des principaux dirigeants de l’Etat hébreu de l’époque   l’atteste. Pour Golda Meïr, Bourguiba est le plus dangereux des dirigeants   arabes. Ben Gourion lui-même a rassuré les Israéliens en leur disant que les   Arabes refuseraient la proposition de Bourguiba.      Le discours de Ariha était-il prémédité?      Avant Ariha il y avait eu des discussions au Caire avec Abdennasser en février   1956. Bourguiba s’est enquis de la position de Abdennasser. Le dirigeant   égyptien n’a pas paru très éloigné de la position de Bourguiba. Il a même   encouragé Bourguiba à développer publiquement sa position. Ce n’est que devant   la misère des camps palestiniens d’Ariha, à l’époque sous autorité jordanienne,   que Bourguiba a improvisé son fameux discours. Il voulait aider à mettre fin à   cette tragédie humaine.      Bourguiba n’a jamais voulu s’immiscer dans les affaires internes des   Palestiniens. Arafat, avant de se rendre aux Nations Unies pour prononcer son   fameux discours, le pistolet dans une main et le rameau d’olivier dans l’autre,   a rendu visite à Bourguiba et l’a mis au parfum de ce qu’il allait dire.   Bourguiba lui a dit très clairement : “On ne va pas aux Nations Unies avec un   pistolet. Dites leur seulement que nous voulons que les résolutions des   Nations Unies soient appliquées”. Arafat a demandé à Bourguiba de prononcer   lui-même un discours dans ce sens. Bourguiba lui rétorqua qu’il n’était pas le   leader des Palestiniens.      Le bombardement de Hammam Chott par les Israéliens en   octobre 1985 a-t-il ébranlé la confiance de Bourguiba dans les Américains ?      Le 30 septembre 1985, j’étais à New York pour prononcer un discours devant   l’Assemblée générale des Nations Unies. Le lendemain il y a eu le bombardement   israélien contre Hammam Chott. Mon sentiment immédiat était que les Etats-Unis   étaient dans le coup. En effet, le jour même de l’agression, la présidence du   Conseil de Sécurité revenait aux USA. Cela ne pouvait pas être fortuit. Je   connaissais très bien le représentant des USA au Conseil de Sécurité, le   Général Vernon Walters.      Le Président Reagan, dans une déclaration publique, a soutenu l’agression   israélienne. A Tunis, Bourguiba a convoqué l’ambassadeur américain et lui a   tenu des propos très durs, laissant même supposer que la Tunisie romprait ses   relations diplomatiques avec les USA.      Dans la foulée j’ai boycotté un déjeuner offert par le secrétaire d’Etat   américain. Deux jours plus tard j’ai reçu au siège de l’Ambassade le   sous-secrétaire d’Etat américain. Je lui ai exprimé la colère de mon pays et   mon incrédulité devant le manque de réaction américaine devant la mort de   dizaines d’êtres humains suite à une agression militaire.      Le point capital était l’intervention publique du secrétaire à la Défense   Wenberger. Israël a utilisé un matériel militaire américain qui ne devait   servir que d’une manière défensive.      Il faut dire aussi que la France a joué un rôle très positif par le biais de   son ambassadeur Claude de Kamoularia. Il est venu me voir et m’a dit qu’il   avait des instructions du Président Mitterrand pour se mettre à notre   disposition, à telle enseigne que lorsqu’on a eu des difficultés avec les   non-alignés pour la rédaction d’une résolution que nous voulions politique et   non d’invectives, il m’a dit que la France pouvait présenter une résolution au   Conseil.      Alors que le représentant de la France était chez nous à l’Ambassade de   Tunisie, j’ai reçu une visite du Général Walters m’informant que les USA   étaient dans l’obligation d’opposer leur veto à la résolution condamnant   Israël. Kamoularia, qui était présent à l’entretien suite à mon insistance, a   dit au représentant américain que le projet de résolution était très équilibré.   Le Général Walters nous a dit que les USA ne pouvaient pas accepter qu’Israël   soit qualifié d’Etat terroriste.      La nuit je reçus un coup de téléphone de Bourguiba où, très ému, il me disait   qu’il allait rompre les relations diplomatiques avec les USA. Je lui ai   répondu : “Celui qui vous a conseillé cela ne veut pas votre bien et il n’y a   pas encore de veto américain”. Il m’a promis de ne rien faire avant mon retour   à Tunis.      Je me suis dit : que va ajouter le mot “terrorisme d’Etat” ? J’ai repris le   texte de la Résolution, J’ai encore renforcé la condamnation de l’agression   israélienne et j’ai enlevé le mot “terrorisme d’Etat”. Le jour de la réunion   du Conseil de Sécurité, on a imprimé cette nouvelle mouture chez nos amis de   Madagascar et on l’a présentée pour le vote. Le Général Walters est venu me   voir pour me demander de surseoir au vote. J’ai refusé. Il m’a demandé une   vingtaine de minutes. J’ai accepté. Une demi-heure plus tard la résolution   était passé au vote : quatorze voix pour le oui et les Etats-Unis se sont   abstenus. Benyamin Netanyahu, qui était le représentant d’Israël aux Nations   Unies, fou de rage, a poursuivi le Général Walters dans les couloirs du   Conseil de Sécurité. C’est comme cela qu’on a pu passer la résolution la plus   dure condamnant Israël sans veto américain.       Je pense que l’estime qu’avait les dirigeants américains pour Bourguiba   n’était pas non plus étrangère à ce succès diplomatique.      Zyed Krichen (Source: “Réalités”, (Magazine hebdomadaire –   Tunis), N° 1111 du 12 avril 2007)
Bourguiba restera Bourguiba… Les Beys   ne sont plus beys
   
     Réalités n’a jamais cessé depuis de longues années d’instaurer des débats sur   tous les sujets concernant «L’Histoire de la Tunisie».      Cette année, une série «Le Devoir de mémoire plus fort que la censure» et   l’Edito de Si Taïeb Terminé en conclusion (page 8 du numéro 1101 du 1er   février) rend tout militant fier d’avoir été bourguibiste.      Ce n’est pas dans mes habitudes de critiquer les faux historiens. L’histoire,   m’a-ton appris, ne pardonnera jamais.      M. Béchir Turki a dans trois articles évoqué le Président Bourguiba et le   traitement qu’il a infligé aux Beys après la proclamation de la République.      Que d’erreurs pour ne pas dire mensonges ! Le Directeur de Réalités a proposé   à toute personne d’apporter sa contribution à ce grand débat. Voici la mienne.      Contrairement à ce que nous relate M. Turki, le Président Bourguiba n’a rien   fait de mal à Lamine Bey quant à sa personne privée et sa famille.      Le régime beylical avait été aboli dans les règles de l’art et les députés de   la Constituante ont voté à l’unanimité le 25 juillet 1957 cette abolition,   conformément au désir tant exprimé par le peuple tunisien.      Ce fut bien sûr une révolution dans l’histoire de notre pays. Mais une   révolution qui n’a engendré ni bain de sang, ni haine, comme on l’a constaté   dans d’autres pays.      Ce jour du 25 juillet, les Beys sont devenus des sujets comme tous les   Tunisiens et n’étaient plus des «hors la loi».      Personnellement, j’ai assisté au mois de mars 1965 à la nomination d’ingénieur   du fils de Lamine Bey, Salaheddine, sur recommandation du Président Bourguiba   (voir article paru dans le journal Le Petit Matin) suite à une visite qu’il a   effectuée dans la délégation que je dirigeais en tant que délégué.      Un autre témoignage démontrant la bonté de Bourguiba : M. Mohsen Hammami,   demeurant à Sidi Bou Saïd et administrateur à la Présidence de la   République-et dont je puis attester de sa vivacité-m’a rappelé que   l’ex-Président remettait mensuellement la somme de cinq cents dinars et le   mouton à chaque fête de l’Aïd El Kebir à Lamine Bey et sa famille pour ne   citer que ces quelques exemples choisis.      D’autres membres de la famille beylicale furent intégrés dans l’administration   tunisienne selon leur compétence. C’est ainsi que le fils de Lamine Bey,   Chedly, a pris sa retraite de la Compagnie Tunisienne de navigation comme   employé.      Plus encore, l’Armée tunisienne a permis à l’un des membres de la famille   beylicale, en l’occurrence Si Ismaïl Bey, d’accéder à l’Armée tunisienne et   d’y terminer sa carrière comme colonel-major.      Monsieur Rachid Bey, universitaire, après la proclamation de la République,   fut un des plus hauts cadres bancaires de notre pays et a rendu plusieurs   services à d’autres pays dans le cadre de ses compétences. M. Turki prétend   que tous les Beys étaient nationalistes. NON, il faut nuancer pour tenir   compte de l’exception de Sidi Moncef Bey dont le dernier vœu était de se faire   enterrer au cimentière populaire du Jellaz et non au mausolée de Tourbet El   Bey.      En voici quelques exemples :       – lors de la proclamation du protectorat français en 1881, mon grand-père,   Mohamed El Arbi Zarrouk, a failli passer de vie à trépas, à l’instar de son   grand-père Sidi El Arbi, grand Vizir du règne de Mahmoud Bey. Lui aussi a été   victime d’une injustice décriée et innommable en matière procédurale, après   avoir été enfermé dans une geôle durant trois jours dans l’attente d’un   accusateur bénévole, mais ce fut en vain ;      – alors que le sang coulait au cours des derniers évènements pour   l’indépendance (1952-1954), Lamine Bey a signé les réformes de Voizard du 4   mars. Ces réformes avaient été auparavant rejetées par l’Assemblée des 40,   composée de patriotes tunisiens de toutes tendances ;      – Ezzedine Bey, en 1953, défilait avec le Résident général De Hautecloque pour   la cérémonie du 14 juillet, fête de la République française. Il fut assassiné   par la suite par un grand patriote tunisien condamné à mort et exécuté à   Sedjoumi.      Voilà la réalité, M. Turki. Alors laissons Bourguiba dormir en paix.      Etant un fidèle du Prophète Mohamed, ma religion m’a appris une maxime   fondamentale de l’Islam : «Bénir les disparus et non pas les calomnier. Dans   le cas contraire mieux vaut s’abstenir».      Enfin, et lors d’un récent entretien à Zurich avec l’ex-chancelier Gerhard   Schröder, ce dernier a fait pendant un long moment l’éloge de l’œuvre du Grand   Leader arabe et musulman qu’était Habib Bourguiba.      (Source: “Réalités”, (Magazine hebdomadaire –   Tunis), N° 1111 du 12 avril 2007)
La menace d’Al Qaïda au Maghreb :   Savoir raison garder
   
 Par Pascal Boniface      A vingt-quatre heures d’intervalle, des attentats suicide ont frappé le Maroc   et l’Algérie. Il y a trois mois, c’est en Tunisie qu’avaient lieu des   affrontements armés entre la police et des islamistes. Dès lors une question,   source de grande anxiété, s’empare des esprits. Le terrorisme est-il en train   d’imposer son agenda au Maghreb ? Les groupes islamistes armés peuvent-ils à   terme y établir leur pouvoir par des actions concertées? Cette zone   ultra-sensible risque-t-elle de devenir une base arrière d’Al Qaïda aux portes   de l’Europe, fragilisant encore un peu plus la sécurité du continent ?       Face à cette situation, il y a deux erreurs d’analyse à éviter : nier la   réalité de la menace en serait une. Oui, la situation est préoccupante,   l’inquiétude est légitime. La Tunisie est présentée comme un modèle de   stabilité et de victoire policière et politique contre les islamistes. Mais   l’inquiétude des responsables grandit. Le Maroc va voter en septembre et   chacun s’en félicite. Le pays est considéré comme stable et paisible en   transition démocratique. Mais il y a des zones d’extrême pauvreté qui sont une   source de recrutement pour des aventures extrémistes. Casablanca avait été   durement touchée en mai 2003 et un attentat avait eu lieu en mars 2007.   L’Algérie, où des élections législatives auront lieu en mai, semblait sortir   progressivement des horreurs de la guerre civile. Le pays pansait ses plaies,   semblait se projeter de nouveau vers l’avenir bénéficiant de revenus   pétroliers à la hausse, de nature à permettre de satisfaire des besoins   sociaux. En frappant le siège du gouvernement au cœur d’Alger et en faisant 33   morts et 222 blessés, les terroristes ont voulu démontrer qu’ils conservaient   une grande capacité de nuisance.       Mais sombrer dans le catastrophisme n’est pas de mise. Le scénario d’un   déchaînement de la violence et d’un effet domino qui ferait tomber les uns   après les autres les régimes est largement exagéré. Pour autant, il n’y a pas   en effet une coordination stratégique des mouvements terroristes. Certes le   Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC) s’est rebaptisé en   septembre dernier « mouvement Al Qaïda au Maghreb». Mais il s’agit plus   d’échanges de service entre les deux organisations que d’amplification de la   menace. Le GSPC bénéficie du prestige de la « marque » Al Qaïda, mondialement   connue. Cela donne une plus grande visibilité à son action. Al Qaïda, de son   côté, s’attribue des coups d’éclats d’un groupe déjà existant au Maghreb et   donne ainsi l’impression d’élargir son champ d’action. Les groupes armés en   Algérie se cachent dans les montagnes et sont constitués de combattants   aguerris et établis de longue date. Il n’y a pas une apparition soudaine du   terrorisme en Algérie, mais une prolongation atténuée d’une onde de choc   ancienne. Accompagnée d’une modification des formes opératoires : aux   massacres massifs de civils se sont substitués des attentats suicides avec des   voitures, comme en Irak. Depuis quinze ans qu’ils mènent des actions armées,   ils ont certes créé des dégâts terribles en Algérie, mais ils n’ont jamais   fait vaciller le pouvoir. Au Maroc, les salafistes recrutent dans les   quartiers déshérités et laissés à l’abandon par l’Etat et de ce fait les liens   d’allégeance avec lui sont de plus en plus distendus. Mais les terroristes ont   préféré se suicider en dehors de la foule, plutôt que de faire des victimes   marocaines civiles. L’appel à un Djihad global est donc la couverture   d’actions de groupes différents et dont les racines et le fonctionnement sont   purement nationales, au-delà de références idéologiques communes.      Face au terrorisme, le risque zéro ne peut pas exister. Les services de   sécurité des pays du Maghreb sont loin d’être inefficaces mais ne doivent pas   relâcher leurs efforts. L’appel à une meilleure coordination des efforts de la   police et des services de sécurité des pays du Maghreb est pertinent. A ce   titre, il n’est pas sûr que le renforcement du commandement militaire   américain, que le Président Bush vient de créer pour l’Afrique, constitue une   réponse efficace. On peut, au contraire, penser que cela peut avoir pour   conséquence, par effet de réaction et du fait du rejet de la politique   extérieure des Etats-Unis, qu’elle attise plus le feu et non qu’elle aide à   son extinction. Mais surtout, les régimes de la région commettraient une grave   erreur en concluant que l’élévation de la menace terroriste doit les conduire   à stopper les réformes en cours, dans le domaine politique et social. Il leur   faut au contraire, au nom même de la lutte contre le terrorisme, accélérer les   ouvertures démocratiques et renforcer très nettement la lutte contre la   pauvreté. Afin de détruire l’un des terreaux dont se nourrit le terrorisme.      (Source: “Réalités”, (Magazine hebdomadaire –   Tunis), N° 1112 du 19 avril 2007)
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