17 mars 2008

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TUNISNEWS
 8 ème année, N°  2854 du 17.03.2008

 archives : www.tunisnews.net

 


Déclaration du Comité National de Soutien aux Habitants du Bassin Minier de Gafsa Le Comité de Soutien aux Habitants du Bassin Minier de Gafsa- Paris:  Communiqué de presse AFP: Vienne redouble d’efforts pour la libération des deux otages d’Al-Qaïda AFP: L’Autriche demande à la Libye de « participer à la libération des otages » (diplomate) AFP: The Us State Department Issued A Warning To Travellers To Tunisia Le site Come4news, censuré en Tunisie par les autorités Elyès GHANMI: Les chantiers de l’opposition démocratique Sana Ben Achour: Sur le vif de l’actualité juridique française : La « détention pour dangerosité » Le Temps Lundi: Interview de Moncef Chebbi AFP: Berlin critique une demande d’interdiction du parti au pouvoir en Turquie AFP: Turquie: la justice examine une demande d’interdiction du parti au pouvoir

AFP: Les Danois critiquent la reparution des caricatures de Mahomet (sondage)

 


Déclaration du Comité National de Soutien aux Habitants du Bassin Minier de Gafsa

 

Tunis, le 15/03/2008 Le mouvement de protestation dans le bassin minier de Gafsa se poursuit depuis maintenant plus de deux mois au cours desquels il s’est étendu jusqu’à toucher l’ensemble des villes minières de la région. La cause immédiate des manifestations en question est le résultat du processus de recrutement engagé cette année par la Société des Phosphates de Gafsa. Il est considéré par la population comme étant dépourvu de transparence et marqué par des manipulations frauduleuses déterminées par les connivences personnelles et le clientélisme, aux dépens de la considération des compétences ou des critères sociaux de priorité. Mais bien au-delà de cela, c’est rapidement la situation sociale très dégradée de la région dans sa globalité qui a été en question. Marquée par un niveau de chômage très élevé, par une absence de politiques de développement et d’investissement effectives, par un fort niveau de pauvreté et par un degré de pollution perceptible alarmant, la situation de la région voit se renforcer les tensions sociales et s’approfondir un sentiment diffus d’injustice. C’est tout cela qui s’est exprimé lors des manifestations pacifiques qui se sont multipliées ces deux derniers mois : rassemblements et cortèges populaires, occupation des places publiques devant des bâtiments officiels, installations de tentes permanentes dans les villes de Redeyef, Oumm Laarayes, Metlaoui et El-Mdhilla… Le but de ces initiatives étant d’attirer l’attention sur une condition critique devenue insupportable. Face à cela, les autorités n’ont fait montre d’aucune disponibilité à dialoguer avec les populations, ni n’ont entrepris de mesures urgentes à même de résoudre les problèmes les plus pressants. Au contraire, il semble que même les quelques canaux de négociation qui ont pu être ouvert et qui ont suscité quelque espoir dans la population aient été vite interrompus, laissant place à un regain de tension déterminé par le renforcement de la présence des forces de sécurité, par le siège policier des foyers de protestation et par un traitement du mouvement par la tergiversation comme toute réponse aux demandes de dialogue. Pour toutes ces raisons, les militant-e-s de la société civile soussignés, convaincus de la légitimité des revendications des habitants du bassin minier et de la nécessité de réponses urgentes aux situations sociales critiques dans la région, annoncent la création d’un Comité National se donnant les objectifs suivants :  Soutenir les mouvements des citoyens pour leurs revendications légitimes, notamment le droit au développent, au travail et aux conditions d’une vie digne. Faire connaître les problèmes et luttes de la région à l’opinion publique nationale afin d’en briser l’isolement et déverrouiller le blocus médiatique appliqué par les média officiels Exiger des autorités d’assumer ses responsabilités par le déblocage de mesures urgentes à même de résoudre les problèmes les plus pressants que connaît la région, et en s’abstenant de toute réponse sécuritaire qui ne ferait qu’aggraver la crise.
Signataires :
Mmes :Khédija Chérif, Ahlem Belhaj, Belkis Mechri, Saiida Guerrache, Mrs : Khémaies Chamari, Abdeljelil Bédoui, Naceur El Ajlani, Mohamed Jmour, Khélil Zaouia, Mouhieddine Cherbib, Rachid Chemli, Sami Souhli, Ahmed Gaalï, Anouar Kousri, Choukri Belaid, Maher Hanin, Mohamed El khemili, Abderrahman Hédhili, Messaoud Romdhani.
Pour le Comité National Messoud Romdhani 

Le Comité de Soutien aux Habitants du Bassin Minier de Gafsa- Paris Paris, le 15 mars 2008

Communiqué de presse

Tunisie : Les forces de l’ordre évacuent de force les occupants de l’Union locale de Redeyef Les forces de l’ordre ont procédé le soir du jeudi 13 mars 2008 à l’évacuation des chômeurs qui occupaient le siège de l’union locale de Redeyef de l’UGTT en les menaçant de recourir à la force. Le même scénario s’est reproduit le lendemain, vendredi 14 mars, pour obliger les militants à lever la tente qu’ils ont dressée face au même local afin de continuer leur mouvement de protestation. Cette fuite en avant répressive s’inscrit dans la continuité du durcissement d’attitude adopté par les autorités vis-à-vis des revendications des habitants du bassin minier, durcissement qui s’est manifesté au début de la semaine par la rupture des négociations engagées avec le comité représentant les chômeurs de Redeyef. Cela signifie manifestement que les autorités reviennent sur les engagements qu’elles ont pris lors des discussions avec le comité à la fin de la semaine précédente. Lors de ces négociations, elles se sont engagées à recruter 46 personnes parmi les familles de victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles qui étaient employées par la compagnie des Phosphates de Gafsa, à confier quatre contrats de sous-traitance de la compagnie à des diplômés chômeurs, l’emploi d’un certain nombre de diplômés chômeurs dans l’administration publique. Le Comité de Soutien aux Habitants du Bassin Minier de Gafsa réitère sa solidarité totale avec les revendications légitimes des protestataires, il dénonce le recours des autorités aux mesures sécuritaires pour y répondre. Il exige des autorités : – L’arrêt des harcèlements et intimidations dont sont victimes les militants du mouvement des chômeurs et la levée du siège policier appliqué à la ville de Redeyef et l’ensemble du bassin minier. – Le retour à la table des négociations et la proposition de solution concrètes au fléau du chômage et à la dégradation des conditions de vie dont souffre la région. Le comité appelle toutes les militantes et tous les militants syndicaux, politiques et associatifs à apporter le soutien et la solidarité nécessaires aux habitants du bassin minier dans leurs luttes pour le droit au travail et à la dignité. Le Comité de Soutien aux Habitants du Bassin Minier de Gafsa- Paris

 


Vienne redouble d’efforts pour la libération des deux otages d’Al-Qaïda  

AFP, le 17 mars 2008 à 13h28  Par Par Gabrielle GRENZ VIENNE (AFP) – Les dirigeants autrichiens redoublaient leurs efforts lundi pour faire libérer leurs deux ressortissants enlevés le 22 février en Tunisie par l’organisation islamiste terroriste Al-Qaïda, après la prolongation de l’ultimatum dimanche pour une durée non précisée.   « Le chancelier Alfred Gusenbauer a tenu une nouvelle réunion de crise lundi matin avec son vice-chancelier Wilhelm Moleterer, la responsable de la diplomatie Ursula Plassnik, le ministre de la Défense Norbert Darabos et celui de l’Intérieur Günther Platter », a indiqué à l’AFP, son porte-parole Stefan Pöttler. « Un état-major de crise est sur la brèche en permanence », selon Martin Gärtner, porte-parole du ministère des Affaires étrangères. Ce ministère travaille, avec l’aide des services de renseignements notamment français (DGSE) et allemand et du service de sécurité algérien, à la libération des deux otages. Le porte-parole du chancelier n’a pas voulu confirmer un contact téléphonique entre M. Gusenbauer et le dirigeant libyen Mouammar Khadafi, révélée par les médias algériens, autrichiens et l’agence de presse libyenne Jana. Il a tout juste indiqué que les autorités avaient « pris des contacts avec de nombreux hommes politiques internationaux, y compris ceux de la région » où se déroule la prise d’otages. M. Gärtner a, lui, confirmé des contacts entre Vienne et Tripoli mais sans préciser entre quelles personnalités. L’appel à l’aide de la Libye s’explique, selon les médias autrichiens, par le rôle joué en 2003 par la fondation du fils du colonel Khadafi, Saif, dans la libération d’un groupe d’otages européens capturés dans le Sahara algérien et relâchés après versement par l’Allemagne d’une rançon de près de 5.000 euros, des informations jamais confirmées officiellement. Mais lundi aucune source officielle ne parlait de négocier le versement d’une rançon. Seul le journal autrichien Kurier a avancé la somme de 5.000 euros en contrepartie de la libération de Wolfgang Ebner, 51 ans, et de sa compagne Andrea Kloiber, 44 ans. Ces habitués des randonnées dans le désert ont été enlevés le 22 février par des membres de l’organisation islamiste Al-Qaïda, alors qu’ils circulaient dans le sud tunisien. Ils seraient retenus actuellement à 150 km au nord de la capitale malienne Bamako dans la région de Kidal proche de l’Algérie, sans confirmation officielle. Parallèlement l’envoyé spécial du gouvernement autrichien, l’ancien ambassadeur à Paris jusqu’en 2007, Anton Prohaska, a multiplié les démarches à Bamako, y compris auprès du président malien Amadou Toumani Touré. L’extension dimanche soir de l’ultimatum initialement fixé à minuit par les ravisseurs a été accueilli comme un « encouragement » par les familles des deux otages qui y voient « une amélioration des chances pour la libération ». Cependant, les autorités sont restées évasives sur les détails des négociations, les nouveaux délais imposés par les ravisseurs et leurs véritables revendications. La prolongation de l’ultimatum « nous laisse le temps de négocier » la libération, s’est contenté d’indiquer le porte-parole du ministère des Affaires Etrangères à Vienne. Le quotidien algérien indépendant Annahar a révélé samedi que les ravisseurs avaient remis à l’ambassade d’Autriche à Alger les noms de cinq terroristes emprisonnés, dont Amar Saïfi, dit « El Para » (« le parachutiste »). Cet ancien militaire est l’un des principaux chefs du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) rallié à Al-Qaïda depuis 2006. Il avait été l’instigateur de l’enlèvement en 2003 des touristes européens dans le Sahara algérien et est actuellement en détention en Algérie dans l’attente d’un procès plusieurs fois reporté.


 
L’Autriche demande à la Libye de « participer à la libération des otages » (diplomate)
AFP 17.03.08 | 15h58 ‘Autriche a demandé à la Libye de « participer à la libération » de deux de ses ressortissants enlevés le 22 février en Tunisie par la branche d’Al-Qaïda au Maghreb, a indiqué lundi à l’AFP un diplomate libyen en poste à Bamako. « Mon pays a été sollicité par l’Autriche pour participer à la libération des deux otages et nous ferons tout notre possible pour que les otages retrouvent la liberté », a-t-il indiqué sous couvert de l’anonymat. Selon plusieurs sources proches du dossier, la Libye a déjà établi un contact avec les ravisseurs de otages « dans le vaste Sahara ». Selon certaines informations, les ravisseurs et leurs otages se trouvent au nord du Mali mais les autorités de Bamako n’ont officiellement pas confirmé leur présence. La fondation Kadhafi est en charge du dossier, selon ces mêmes sources proches du dossier. C’est grâce à la fondation Kadhafi que 15 des 22 derniers otages, des militaires maliens, détenus par un groupe de touareg armé avaient été libérés le 7 mars. Les sept autres otages avaient été libéré après une intervention des notables et cadres de la région de Kidal (nord-est). La présidence malienne avait alors exprimé sa « reconnaissance au guide libyen pour son action fraternelle qui a largement contribué à cette sortie de crise ». Les autorités autrichiennes n’ont pas voulu confirmer lundi une prise de contact téléphonique entre le chancelier Alfred Gusenbauer et le dirigeant libyen Mouammar Khadafi, révélée par les médias autrichiens et l’agence de presse libyenne Jana. L’envoyé spécial du gouvernement autrichien, l’ancien ambassadeur à Paris jusqu’en 2007, Anton Prohaska, a de son côté entamé des contacts à Bamako. Selon le ministère autrichien des Affaires étrangères, il a « personnellement rencontré (dimanche) le président Amadou Toumani Touré pour l’informer du cas » des deux touristes enlevés.  


The Us State Department Issued A Warning To Travellers To Tunisia

 
 
AFP, le 13 mars 2008   WASHINGTON (AFP) – Al-Qaeda’s North Africa branch Thursday called for the release of prisoners in Tunisia and Algeria in exchange for freeing two Austrian tourists it claims to have kidnapped, a US monitoring group said.   The group gave Austrian authorities three days to comply starting at midnight Thursday, according to the SITE Intelligence Group, which monitors Islamist websites.   The Al-Qaeda Organization in the Islamic Maghreb (AQIM) — an Algerian-based off-shoot of Al-Qaeda — said it had abducted the pair in Tunisia on February 22 and warned Western tourists to stay away from northern Africa.   « Consequently, the state of Austria is responsible for the lives of the two hostages in the event of the expiration of the time period and not responding to our demands, » the organization said in communique issued to jihadist forums, according to SITE.   « We call on Western tourists to avoid visiting the lands of the Islamic Maghreb, and he who was warned will not be excused, » it said.   The message and Austrian press reports have named the two as Wolfgang Ebner, 51, and Andrea Kloiber, 44.   Ebner, a veteran desert expert, on February 18 phoned his son Bernhard Ebner from Tataouine in southeast Tunisia and was due to call again on February 25, but never did.   The family then alerted authorities who took the case to Interpol.   The message from AQIM included several images of Ebner and a woman, according to SITE.   In the images, Ebner and the woman, her face obscured, are surrounded by a group of armed men at an unidentified desert locations.   On Tuesday the Arabic daily Annahar said the two Austrians had been taken by their captors to northern Mali.   « The kidnappers have managed to get into the Sahel, crossing Algeria and Libya to get back to their rear base in Mali, » Annahar reported on its website, citing several unnamed Algerian sources.   Annahar chief Anis Rahmani told AFP that according to his sources, Algeria’s army had « channelled the kidnappers towards Libya and Mali, where the possibility of negotiations with the Austrian authorities for an eventual release of the hostages is greater. »   Meanwhile the US State Department issued a warning to travellers to Tunisia in the wake of the kidnappings.   « The Department of State advises US citizens to exercise extreme caution if traveling in this area.   « AQIM is designated as a terrorist organization by the United States, and the presence of AQIM in North Africa presents potential dangers to travelers. »   AFP  


Le site Come4news, censuré en Tunisie par les autorités

par Blaise medal

 

Le site de journalisme « citoyen », Come4news, devenu l’un des 3000 sites les plus fréquentés de Tunisie, s’est trouvé censuré par les autorités la semaine dernière. En conséquence, naturellement, les citoyens de ce pays n’y ont plus accès.

 

 Manifestation à la fois du succès grandissant de ce support médiatique citoyen, et de sa liberté de ton, la nouvelle de cette censure, si elle fait vivement réagir le président du site, est un très bon signe de sa bonne santé et de sa vitalité.

 

C’est précisément ce qui rend la demande de levée de l’interdiction nécessaire. Selon wikipédia, la Tunisie est listée parmi les « dix pires ennemis de la presse » pour le comité pour la protection des journalistes et RSF qualifie le pays de « prédateur de la liberté de la presse ». La censure n’y serait pas rare : elle y a été rétabli en 1952…

 

Les journaux en langue française de la grande presse seraient régulièrement censurés, Le Monde, le Figaro, Libération notamment, et les journaux satiriques comme Charlie Hebdo ou le Canard enchaîné y sont totalement interdits de publication.

 

Sur internet, toujours selon Wikipédia , les serveurs du site « Wikimédia foundation » sont censurés et selon de nombreuses organisations, le pays disposerait de « procédés de censure sur internet parmi les plus stricts du monde.

 

Une journaliste, Sihem bensedrine, qui se bat dans le pays pour la liberté de la presse, a connu la prison durant sept semaines et a été qualifiée de « créature du diable », vipère haineuse » ou encore de « vendue aux sionistes et aux francs-maçons » dans le journal Al Chourouk.

 

Selon RSF  « Mohammed Abbou, avocat auprès de la cour d’appel de Tunis, est emprisonné depuis le 1er mars 2005 suite à la publication sur le site Tunisnews d’un article dans lequel il comparait les tortures infligées en Tunisie à des prisonniers politiques aux exactions des soldats américains à Abou Ghraib, en Irak. »

 

Il existe également une liste de sites censurés dans le pays, le premier d’entre eux étant naturellement celui de Reporter Sans Frontière, mais aussi les sites des opposants au régime ou encore des blogs.

Come4news pourrait avoir rejoint cette liste et, que le directeur du site me pardonne, c’est tout à son honneur. Cela prouve que la participation de chacun à son élaboration permet de développer par l’échange, la prise de conscience de  chacun, y compris dans des pays un peu lointains, à travers la francophonie.

 

Est-il possible de faire rétablir l’accès au site pour les Tunisiens? Quoi qu’il en soit, l’appel du directeur, Fabien Bardoux, doit être relayé : « Nous avons besoin de votre soutien pour communiquer cette information sur vos blogs, vos sites et vers vos proches: la liberté d’expression est en danger dans certains pays et c’est fort préjudiciable, et nous devons réclamer la levée de cette restriction. « 

 

Si cela peut-être utile, chaque visiteur de ce billet a la possibilité de le copier et de le diffuser, sans restriction. ce ne sera pas seulement utile pour Come4news, le problème est plus général. La liberté de diffuser de l’information, si elle semble être un droit, a parfois besoin d’être rappelée et défendue, aussi il n’est pas inutile de dénoncer certains pays qui ne l’appliquent pas, cette situation étant surtout préjudiciable pour les populations.

 

(Source : le site « Come4news », le 16 mars 2008)

Lien :http://www.come4news.com/le-site-come4news-censure-en-tunisie-par-les-autorites-392492.html

 

 


Les chantiers de l’opposition démocratique

 L’année 2009 sera un moment important de notre vie politique. Les élections présidentielle et législatives auront lieu vingt ans après celles qui ont élu pour la première fois le Président Ben Ali. Et pourtant, ces vingt dernières années ont vu s’installer une vie politique morose marquée par une lassitude croissante de nos concitoyens vis-à-vis de la politique. Jusque-là, les critiques ont toujours privilégié une cible claire et bien identifiée : le pouvoir en place. Jugé frileux dans un premier temps au moment de l’émergence de listes indépendantes aux élections législatives de 1989, tacticien et manipulateur au début de la décennie 1990 dans sa lutte contre la «menace islamiste», le pouvoir a fini par s’embourber dans une logique autoritaire. Dès lors qu’on a conclu à son incapacité d’impulser un véritable processus de réforme, que pourrait-on espérer de lui ? Logiquement, rien. Mais comme la politique est aussi affaire de volonté et de contingences, rien n’est inscrit dans le marbre. Des voix réformatrices dans ses propres rangs peuvent toujours s’élever pour convaincre de la nécessité de l’ouverture. Car sans libéralisation du champ politique à travers un cadre électoral non exclusif, une liberté de réunion et d’association garantie, un accès libre à Internet, un financement public équitable pour tous les partis politiques, le travail d’opposition que le citoyen est en droit d’exiger des partis politiques restera sans effet et surtout sans intérêt. De potentiels signes d’ouverture auront un impact non négligeable sur la vie politique. Ils répondront aux aspirations réelles et légitimes de la société sans oublier leur effet sur l’image de notre pays dans le monde. Mais cela ne doit pas dispenser l’opposition démocratique de faire son aggiornamento programmatique et stratégique, afin de créer le lien manquant avec le citoyen. Les échéances électorales à venir pourraient offrir cette occasion tant attendue par nos concitoyens pour vivre réellement ce qu’ils ont vécu par procuration, lors de débats sur les chaînes de télévision à l’occasion de la dernière élection présidentielle française. Ainsi une transformation profonde de la politique s’impose au moins à quatre niveaux, afin que l’opposition démocratique puisse réhabiliter son image et retrouver la place qui lui revient au sein de notre société : Premièrement, la re-politisation la société devient plus que jamais une urgence compte tenu des ravages du consumérisme et de la normalisation rampante de l’autoritarisme. Les trois principaux partis de l’opposition démocratique (Ettajdid, FDTL et PDP) doivent s’atteler à ce travail en impulsant un mouvement de renouveau citoyen par la base (Grassroots Movement), visant à irriguer la société d’idées et de projets novateurs. Dans ce cadre, les contacts avec le monde associatif et syndical doivent être renforcés en dépit du verrouillage imposé par le pouvoir. L’enjeu de cette re-politisation consiste à retrouver une citoyenneté active et participative qui permettra de donner du sens au débat public et de consolider la culture démocratique. Deuxièmement, les partis démocratiques doivent combiner une opposition ferme dans les convictions avec une modération dans le discours. Car la radicalisation de l’expression politique reste un fait mal perçu dans une société travaillée plutôt par la modération. Il suffit d’être à l’écoute de l’homme de la rue pour se rendre compte de ce type d’attentes vis-à-vis de l’opposition. On pourrait parcourir aussi les épisodes marquants de notre histoire contemporaine pour conclure au fait que les pages du réformisme tunisien – en dépit d’un bilan jugé largement insuffisant et décevant – ont puisé dans le registre de la modération. Troisièmement, l’opposition est invitée à dépasser un discours incantatoire et généraliste, réduit au seul champ des libertés publiques – même si ces revendications sont nobles en elles-mêmes et indispensables à la transition démocratique – pour formuler des propositions claires et concrètes. Celles-ci doivent s’articuler autour de projets de société et de programmes mettant le citoyen au cœur des préoccupations. Certaines formations politiques ont déjà commencé ce travail difficile mais beaucoup reste à faire. L’opposition doit être à la fois positive et proactive : s’opposer dans la proposition et reprendre la main en termes d’initiative dans le rapport de forces avec le pouvoir. Aucun thème ne doit être épargné tant les politiques publiques qui touchent à la vie quotidienne de nos concitoyens couvrent un spectre assez large de domaines : services publics, pouvoir d’achat, retraites, réforme de l’université, réforme de l’Etat et de l’administration, cohésion régionale, agriculture, politique économique, démocratie sociale, égalité entre les sexes, développement durable et environnement, identité, intégration maghrébine et relations euro-méditerranéennes, politique étrangère et de défense, lutte anti-terroriste, etc. Quatrièmement, la question du leadership ou de son absence au sein de l’opposition démocratique ne doit pas être considérée comme une entrave à l’action collective. Il faut savoir retourner la difficulté en un avantage, et éviter les pièges de la division inutile. Ainsi, la diversité qui pourrait s’exprimer à travers une multitude de candidatures à la prochaine élection présidentielle au sein de l’opposition devrait être considérée comme une manifestation de son pluralisme. Autrement, comment peut-on continuer à fustiger l’unanimisme qui prévaut du côté du pouvoir en empêchant en même temps le pluralisme dans les rangs de l’opposition démocratique ? Gagner la confiance des concitoyens est une tâche difficile qui passe aussi par là. En revanche, les candidats déclarés ainsi que ceux qui envisagent de leur emboîter le pas pourraient inscrire leur initiative dans une démarche collective sur la base d’un accord conclu ente toutes les parties concernées. Un tel accord pourrait envisager l’organisation de primaires entre les candidats de l’opposition auxquelles prendront part les militants, les adhérents et les sympathisants des trois principales formations politiques de l’opposition démocratique (Ettajdid, FDTL, PDP). Sommes-nous capables de mettre en place un processus de désignation à l’italienne ? A priori, rien ne nous empêche de le faire. C’est une question de volonté politique aussi.   Elyès GHANMI

(Source: « Mouatinoun » (Hebdomadaire – Tunis) organe du  Forum democratique pour le travail et les libertes (FDTL) le 5 mars 2008)

 


 

Sur le vif de l’actualité juridique française : La « détention pour dangerosité »   Ou les dangers d’une dérive sécuritaire

  Sana Ben Achour   La loi sur la «rétention de sûreté et la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental» vient d’être promulguée par le chef de l’Etat français (loi 2008-174 du 25 février 2008), franchissant, non sans de sérieux amendements, la censure du conseil constitutionnel. Le texte autorise le placement des criminels en centres socio-médico-judiciaires à l’expiration de leur peine pour une durée renouvelable indéfiniment lorsqu’ils présentent « une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive. Validant le projet sur la «rétention de sûreté », le conseil constitutionnel en annule toutefois l’application immédiate et les effets rétroactifs, rendant la loi impraticable avant quinze ans (DC. n°2008-562, 21 février 2008). Or, le président de la république, Nicolas Sarkozy, estimant que l’application immédiate aux criminels déjà condamnés est « un objectif légitime pour la protection des victimes », se tourne vers le premier président de la cour de cassation et, défiant le conseil constitutionnel,lui demande « d’examiner la question et de faire toutes les propositions nécessaires ». On comprend sans peine le tollé que cette «saisine intempestive » a provoqué et l’effroi que la loi sur la rétention de sûreté a suscité au regard des fondamentaux de l’Etat de droit dont les principes du droit pénal constitue une des conquêtes.   Gouverner par la peur   Sondages et enquêtes d’opinion font état régulièrement du « sentiment de  la peur » et d’insécurité qui, partout, habite les citoyens face à la montée des violences et de la criminalité : actes terroristes, crimes contre l’humanité, génocides, assassinats, disparitions, tortures, séquestration, mutilations, récidives, viols, vols, incendies, etc., prenant pour cible femmes, hommes et enfants. Il ne s’agit donc ni de minimiser l’horreur de ces actes, ni encore moins, l’impératif de justice. Plus simplement, il s’agit de marquer la menaçante « banalisation» des politiques sécuritaires qui, subrepticement, se mettent en place, jouant du sentiment de la peur et faisant de « l’enferment » l’objectif de toute sécurité. Quelle orientation donner si non à cet amas de  lois portant tantôt adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité avec prolongation de la garde à vue, des perquisitions de nuit, de l’interception des correspondances, de la captation d’images et de sons dans des lieux privés (mars 2004), tantôt la prévention de la délinquance avec notamment le placement en centre éducatif fermé, la surveillance électronique (mars  2007)  ou le traitement de la récidive avec pour les mineurs des « peines planchers » d’emprisonnement  (août 2007), ou encore récemment la « rétention de sûreté » à l’issue de la peine (février 2008). Une limite vient d’être  « allégrement franchie » au mépris des multiples appels à la mesure avec en prime la sanctification constitutionnelle des sages. Ces lois ne peuvent manquer d’être rapprochées d’un autre ensemble législatif, participant des crispations sécuritaires et des replis réactionnaires : loi relative à la sécurité intérieure assouplissant certaines procédures d’enquêtes et renforçant l’efficacité des sanctions (mars 2003),  loi contre le terrorisme portant dispositions diverses relatives à la sécurité et au contrôle des frontières (janvier 2006), loi relative à l’immigration et à l’intégration (avec suppression de la délivrance automatique d’un titre de séjour à l’étranger habituellement en France depuis 10 ans (juillet 2006), loi sur le contrôle de la validité des mariages  (novembre 2006), loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile  introduisant le test ADN (novembre 2007). Autant de lois limitant la liberté au nom de la sécurité.   Une régression juridique : l’éventuelle dangerosité   L’hypothèse retenue est à peine croyable. Comment en est-on venu à valider la « détention pour éventuelle dangerosité » si ouvertement contraire aux principes fondamentaux de la matérialité de l’infraction, de la présomption d’innocence et de nécessité de la peine autour desquels s’est construit le droit pénal moderne ? La rétention de sûreté n’est pas une peine argumente le conseil ! « N’étant pas prononcée par la juridiction de jugement et n’ayant pas une finalité répressive, elle ne réunit aucun des deux critères relatifs à la définition de la peine ». Aussi, rejette-t-il le grief d’inconstitutionnalité tiré de la méconnaissance de l’article 8 de la déclaration de 1789 des droits de l’homme et du citoyen selon lequel « la  Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». En vérité, les anciens présidents du CC, Robert Badinter et Pierre  Mazeaud ne s’y sont pas trompés. Le premier déplore une « période sombre » pour la justice française » (Le monde dimanche 24 et lundi 25 février 2008) et met en garde contre le glissement « d’une justice de responsabilité » vers « une justice de sûreté » (Le monde du 8 septembre 2007), le second, « une mauvaise loi » et « une situation bancale ». « Le Conseil constitutionnel – relève t-il- valide la rétention, en expliquant qu’il ne s’agit pas d’une mesure pénale. Mais en s’opposant à la rétroactivité, il suggère qu’on est quand même dans le pénal: ce n’est qu’en matière pénale que la non-rétroactivité est un principe constitutionnel!  (Le monde jeudi 28 février 2008). Le mal est fait. Le ver de l’« a priori »  est dans le fruit du système pénal.   Le trouble  institutionnel   La réaction du président Sarkozy à la censure partielle du conseil sur la rétroactivité ne manque pas de jeter le trouble sur les principes de fonctionnement des institutions de la République. Sollicitant le président de la cour de cassation sur une éventuelle application immédiate de la loi, il semble méconnaître la règle constitutionnelle selon laquelle : « Les décisions du Conseil constitutionnel (…) s’imposent au pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles » (ali 1 article 62). Il va sans dire que le chef de l’Etat français n’ignore pas l’autorité attachée aux décisions du conseil,  « non seulement à leur dispositif mais aussi aux motifs qui en sont le soutien nécessaire et en constituent le fondement même » (D.C n° 62-18 L du 16 janvier 1962). En réalité le conflit d’interprétation peut même déboucher, dans ce face à face entre légitimité et légalité, sur la révision de la constitution. Ce fut le cas en 1993 après la censure partielle de la réforme du droit d’asile liée à la mise en oeuvre des accords de Schengen ; le cas à nouveau à la suite de la décision interdisant d’introduire des quotas de femmes dans les élections politiques (la révision constitutionnelle sur la parité du 8 juillet 1999) ;  le cas enfin en 2003, avec la décision interdisant le transfert, même à titre expérimental, d’un certain pouvoir législatif à la collectivité de Corse. Or en l’espèce, il s’agit d’un cas très différent, inédit, une dérive présidentielle : la mise en concurrence et la mise en opposition par le chef de l’Etat des deux plus hautes juridictions du pays, la cour de cassation et le conseil constitutionnel. En vain certes, l’autorité de la chose jugée par le Conseil constitutionnel s’imposant à tous, y compris à la cour de cassation, et le bon sens constitutionnel conduisant à s’y tenir. Le plus grave est que, dans cette croisade contre « les monstres » «  au côté des victimes »,  le chef de l’Etat en oublie son devoir d’être le garant du bon fonctionnement  des institutions.   29 février 2008    (Source: « Mouatinoun » (Hebdomadaire – Tunis) organe du  Forum democratique pour le travail et les libertes (FDTL) le 5 mars 2008)
 

 


 

Flou le positionnement réel des forces politiques ?

« Des forces qui échouent chaque fois qu’elles tentent de s’unir : le flou est là ; dans les propagandes tendancieuses et de surenchère en matière d’auto-évaluation »

Interview réalisée par Néjib SASSI

 

*Interview de notre invité de ce lundi ; Moncef Chebbi, membre de la Chambre  des Conseillers et membre du Bureau Politique de l’UDU

 

Notre invité, aujourd’hui, est Moncef Chebbi,  membre de la Chambre  des Conseillers et membre du Bureau  politique de l’Union Démocratique Unioniste (UDU). Il a occupé  ce poste depuis  la fondation  de ce parti en 1989.

 

Chebbi est considéré  par les observateurs comme un vrai connaisseur  de la scène politique nationale. Depuis son jeune âge, il a milité au sein de l’Union Générale  des Etudiants Tunisiens (UGET) et à plusieurs partis  de gauche et  d’autres proches  du nationalisme arabe. Il nous  parle, ici,  de la situation  politique nationale, du parti au pouvoir, de ceux  de l’opposition et  d’autres questions.

 

 

 

• Le Temps : D’après vous, quelles sont, aujourd’hui, les caractéristiques  de la scène politique nationale ?

 

-Moncef Chebbi : Essayer de décrire la scène politique nationale n’est pas une mince affaire. Cela suppose en effet, de choisir au préalable en fonction de quels types de critères, de frontières cette description doit se faire.

 

Il me paraît utile, en tout état de cause, d’attirer l’attention du lecteur sur un certain nombre de facteurs déterminants de la vie politique nationale.

 

Le premier d’entre eux est ce flou concernant le positionnement réel des forces politiques ainsi que la réelle étendue de leur implantation et de leur influence, ce qui rend difficile toute lecture anticipée des interactions possibles dans la perspective de l’année élective 2009 à laquelle le pays se prépare déjà.

 

•A quoi est dû ce flou ?

 

-Ce flou est dû essentiellement aux propagandes tendancieuses qui à force de surenchères en matière d’auto-évaluation d’exagération dans la réduction des adversaires et même des partenaires politiques.

 

Cela aboutit évidemment à la naissance d’une culture partisane égocentrique et narcissique et incapable malgré certaines apparences de concorde de s’élever au niveau de l’exigence nationale et des intérêts suprêmes du pays.

 

Ceci est valable pour toutes les forces politiques sans exception, le discours politique de ces forces en est l’illustration la plus parfaite au sein du parti au pouvoir des tendances et des rouages hésitent encore à se mettre en harmonie avec sa ligne officielle appelant au pluralisme comme moyen de promouvoir le score politique en tant que facteur essentiel de la construction nationale. Certains en sont encore à vouloir préserver la domination sans partage sur la vie politique et l’implication de tous les moyens (officiels ou non) pour rendre impossible la moindre évolution du rapport des forces sur la scène politique ni le moindre changement susceptible d’aboutir à une éventuelle alternance.

 

Mais il est nécessaire de préciser ici qu’il n’est pas aisé de faire évoluer un parti politique de la taille du RCD. Cela exige en effet, beaucoup de temps et beaucoup d’efforts, mais cette évolution est nécessaire pour le pays. D’ailleurs, une polarisation est en train de s’opérer au sein de ce parti qui tourne de plus en plus en faveur des partenaires d’une ligne réformiste et aux dépens des forces les plus conservatrices. Cette évolution se fait sous l’impulsion du sommet de la hiérarchie initiateur de tous les plans de réforme. Elle est vitale pour la Tunisie et aucune force responsable ne doit s’abstenir d’encourager cette dynamique et cela pourrait se traduire par une accélération des changements positifs qu’enregistre le RCD et qui en font un véritable partenaire dans les interactions nécessaires et possibles de la vie politique nationale.

 

• Et en ce qui concerne les autres forces politiques ?

 

-Mais le flou ne vient pas seulement de ce côté-ci de la scène. Il trouve sa source également chez d’autres forces politiques radicales ou non qui proposent à leurs troupes et au pays des objectifs et des programmes sans commune mesure avec leurs tailles réelles, les moyens humains et matériels dont elles disposent sont souvent sans rapport avec la séquence historique que traverse notre pays. Ceux qui ne veulent pas tenir compte des facteurs objectifs se trompent lourdement et leurs erreurs coûtent cher au pays.

 

• Que voulez-vous dire par séquence historique ?

 

-Quand je parle de séquence historique c’est comme si je disais que l’automne est la saison des labours et que la première pluie est propice aux semailles. Il est inutile de fermer les yeux sur le cycle de la nature en matière agricole – en politique il faut d’abord bien lier les évolutions historiques et tenter de deviner avec précision où se situe aujourd’hui la Tunisie, sinon nous aboutirons à des lectures et des initiatives sans rapport avec la réalité, des démarches partisanes, subjectives et peu fructueuses.

 

Ces forces appartiennent en majorité à des écoles très proches et quasi similaires mais qui refusent pour des raisons historiques et souvent personnelles de s’unir ou qui échouent chaque fois qu’elles tentent de s’unir. Nous n’excluons pas que cette balkanisation est en partie au moins due à des facteurs externes.

 

Cette mentalité que j’éviterai volontairement de qualifier négative représente un handicap majeur sur la voie de l’unification de forces qui pourraient offrir au pays un véritable pôle d’agglomération et d’action, la force de renouvellement et d’alternance aujourd’hui malheureusement est absente.

 

Pour cela nous disons que l’alternance n’est pas aujourd’hui à l’ordre du jour et la responsabilité de cette situation incombe aussi bien à ceux qui tentent de bloquer le changement au sein du parti au pouvoir qu’à ceux qui, au sein de l’opposition pratiquent la surenchère.

 

Pour toutes ces raisons le paysage politique se complique chaque jour davantage, et les espoirs de rassemblement des forces constructives sont victimes de subjectivismes et de manipulations internes et externes auxquels aucune scène politique ne peut échapper.

 

A vue d’œil le parti au pouvoir occupe les neuf dixième de la représentation politique, mais dans la vie quotidienne des citoyens ce taux est largement dépassé. Car ce parti cherche, à travers l’accaparement de l’appareil et des moyens de l’Etat et à travers une action où il semble se substituer à l’Etat, dans divers aspects de la vie tunisienne, à démontrer que nul autre que lui n’est en mesure d’assumer ces rôles, ce qui est en flagrante contradiction avec le pluralisme et la démocratie dont il a fait ses principaux mots d’ordre depuis le changement du 7 novembre 1987. Les sphères dirigeantes de ce parti continuent à ce jour pour des raisons évidentes à refuser toutes les invitations au dialogue qui pourrait aboutir à des formules de cohabitation et de participation réelle à l’échelle décisionnelle nationale.

 

Quant aux consultations que le pouvoir organise souvent sur les thèmes nationaux il semblerait qu’elles déplaisent profondément à certains cercles du RCD car elle pourraient ouvrir la voie selon eux à une plus grande participation des forces de l’opposition à la gestion de la chose publique.

 

Mais je ne désespère pas de voir les forces du progrès et du réformisme l’emporter définitivement au sein du parti au pouvoir ce qui aurait une conséquence, positive sur l’évolution du paysage politique tunisien. Cela pourrait déboucher sur des scénarios de dialogue se référant à la raison et au pouvoir de proposition plus qu’à la force du nombre.

 

• Et pour ce qui est de l’opposition ?

 

-Il y a au sein de cette opposition des forces sérieuses et sereines qui se battent pour la mise en place de programmes et de politiques nationales consécutives à des lectures approfondies des changements qui interviennent à l’échelle internationale ainsi qu’aux niveaux, du monde arabe, du monde musulman, de l’Afrique etc… Ces forces construisent leurs propositions de façon claire sous forme de documents, de livres, de journaux dont seuls peuvent nier l’importance, ceux qui refusent de voir la vérité en face et qui craignent les évolutions vers lesquelles s’oriente notre pays et que notre peuple attend impatiemment.

 

En effet, comment peut-on nier que le MDS, le PUP, l’UDU, le Parti Tajdid, à titre d’exemple sont des forces capables de proposer une alternative, des solutions, que ces partis ont les moyens de présenter des propositions qui conviennent à la situation et également les moyens de mobiliser le peuple tunisien et de s’adresser à lui conformément à ses aspirations légitimes, à ses rêves. Qui peut nier que ces forces sont en mesure de prendre en charge la responsabilité directe au plan de la décision officielle et à celui de la gestion.

 

Certaines composantes de cette opposition ont aujourd’hui trente ans d’âge voire plus. Une élite politique et intellectuelle existe en leur sein, une élite d’opposition patriotique enracinée dans l’expérience et la compétence, et personne ne peut mettre en doute la crédibilité, de son engagement ou lui attribuer les qualificatifs d’emprunt qui pour négatifs qu’ils soient ne déprécient que leurs utilisateurs.

 

Différentes élections législatives, municipales et présidentielles ont donné au bon observateur l’occasion de mesurer la clairvoyance de ces élites qui occupent aujourd’hui une partie des assemblées représentatives.

 

Aujourd’hui ces forces politiques et leurs élites s’efforcent de construire contre vents et marées des structures et des idées avec des moyens extrêmement réduits mais avec un moral conquérant, et un esprit de vainqueur.  Je voudrais signaler qu’il existe également des forces dont seuls nous séparent de très petits espaces idéologiques ou politiques, avec lesquelles nous partageons une même compréhension des dossiers brûlants et essentiels tels que l’engagement national, le choix nationaliste arabe et même unitaire, ainsi que des objectifs politique de revendication démocratique, d’exigences sociales en particulier pour une meilleure distribution des fruits de l’effort national et de le richesse nationale.

 

Nous préférons, quant à nous concentrer notre attention sur les zones d’interférences avec ces forces, sur ce qui nous unit malgré leur insistance sur les points de désaccord et leur éternelle mise en exergue pour barrer la route à un éventuel dialogue. Ces forces ont en effet adopté une tactique différente de la nôtre. Elles préfèrent considérer que rien de bon ne peut être attribué au régime en place ou au parti au pouvoir. Elles refusent de voir l’évidence, que le pays a progressé, que des réformes en profondeur ont été réalisées en matière de développement mais également au niveau des mentalités et de la culture politique ambiante pour elles tout est noir, peut-être, d’ailleurs ne pensent-elles pas ainsi, mais c’est ainsi qu’elle s’expriment sous prétexte que le rôle d’une opposition authentique serait de relever les erreurs, les points noirs et rien d’autre.

 

Il est vrai que la réalité présente parfois des aspects sur lesquels une telle démarche peut s’appuyer mais sur le fond cette démarche est fausse.

 

Si nous partageons l’évaluation qu’elles font de certains points sombres nous n’en pensons pas moins qu’il faut avoir la perspicacité qu’exige l’objectif de construction nationale pour voir ce qui a été réalisé.

 

Nous avons choisi de contribuer à la marche forcée pour le relèvement de notre pays et son évolution à l’image des pays qui avancent vite et occupent une place au soleil. Nous avons pour cela abandonné le recours à l’insulte et à la critique pour la critique. Car cela ne mène à aucune évolution positive et surtout pas à la solution des problèmes auxquels font face ces forces en leur propre sein, leur choix leur font perdre beaucoup  de temps et beaucoup d’opportunités politiques. Ils font perdre en même temps au pays énormément d’énergie. Parmi ces forces certaines n’ont pas encore obtenu le visa légalisant leur existence et leur action politique. Je voudrais dire ici que s’il est difficile de douter du rôle historique qu’elles ont joué, du rôle actuel que certaines parmi elles continuent de jouer et malgré ma conviction profonde qu’elles ont le droit de militer dans la légalité et en toute liberté, je ne pense pas qu’elles ajouteront quelque chose d’essentiel au paysage politique tunisien, à l’exception du groupe « La Tunisie verte » qui porte un véritable projet d’avenir au bout du compte il me paraît évident que nous marchons vers les prochaines étapes électives en rangs dispersés. Cela est peut-être utile à court terme de même qu’il serait utile que l’occasion soit donnée aux forces privées de visa de participer sous une forme ou sous une autre aux prochaines échéances pour  qu’apparaisse clairement et définitivement à chacun  le poids qu’elles représentent.

 

Cependant, le choix national nous impose à tous de nous orienter vers une agglomération des forces patriotiques, dans un dessein patriotique car nous sommes un petit pays qui ne peut se permettre d’éparpiller ses forces vives, qui ne peut supporter l’évolution des conflits locaux au-delà d’une certaine limite, d’une limite maîtrisée de façon  claire et décisive, les glissements vers l’inconnu, dont nous voyons quotidiennement les effets néfaste dans de nombreux pays arabes sont très faciles. Mais il est autrement plus difficile de s’en sortir, d’espérer revoir la lumière du jour, il n’y a qu’à voir  ce qui se passe au Liban, en Irak ou le sang coule à flots, en Somalie ou le déchirement se poursuit, pour se convaincre que l’unité est aujourd’hui le premier devoir, l’unité dans la diversité mais l’unité à tout prix.

 

• Mais on dit que certaines de ces forces recourent au témoignage de parties étrangères…

 

– Il est utile de parler sur le recours au témoignage des parties étrangères pour ce qui concerne les questions relatives à notre situation interne, et la référence à ce témoignage – souvent tendancieux – pour alimenter le débat contradictoire avec le parti au pouvoir où l’Etat en place. Cela nous paraît inopportun et dangereux à terme. Car il est bien évident que certains témoins peuvent et espèrent vite se transformer en acteur, ce qui nous mettrait à deux doigts de l’ingérence. Je ne conçois pas  que l’ambassadeur d’un pays puissant et qui en plus il mène une guerre totale  et sanglante contre un peuple frère puisse assister à un événement tel que la proclamation de la candidature d’un citoyen tunisien, à la plus haute marche de l’édifice tunisien.

 

Nous préférons jeter sur la scène, y compris sur ces composantes externes un regard constructif, nous formulons l’espoir  que l’insulte fasse place au dialogue, que nous ayons  les uns et les autres, une autre appréciation que les portes entre nous demeurent ouvertes, que chacun corrige son regard pour mieux apprécier les aspects positifs de l’autre et non de continuer à considérer  que la vérité n’a qu’une seule  source le moi dévastateur, regardez comment les forces s’unissent autour de nous! Pourquoi pas nous ?

 

• Que pensez-vous  de ceux qui se réclament du  courant religieux ?

 

En ce qui concerne le courant islamiste, je voudrais dire qu’en tant que musulman et en tant que partie d’un peuple entièrement musulman, je ne vois pas pourquoi j’accepterais qu’une force quelconque s’attribue le droit d’exprimer mon islamité, mes droits selon les préceptes islamiques (qui soit dit en passant sont en parfaite concordance avec les lois qui régissent notre vie) j’y vois un moyen de prétendre au pouvoir en mon nom et je refuse cela de toutes mes forces.

 

Interview  réalisée par Néjib SASSI

 

(Source : « Le Temps Lundi» (Hebdomadaire – Tunis), le 17 mars 2008)

 

 


Berlin critique une demande d’interdiction du parti au pouvoir en Turquie

 17/03/2008 12:16 8 (AFP) Le gouvernement allemand a vivement critiqué lundi l’appel d’un procureur turc visant à interdire le Parti de la justice et du développement (AKP), au pouvoir à Ankara, estimant que cette demande allait « à l’encontre de la volonté du peuple turc ». La demande faite par le procureur de la Cour de cassation turque devant la Cour constitutionnelle visant à interdire l’AKP et à démettre son chef, le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, en raison d’activités anti-laïques, « est incompréhensible », a affirmé le porte-parole du gouvernement Thomas Steg lors d’un point de presse. « L’AKP est à l’évidence un parti démocratique qui a obtenu la majorité des voix lors d’élections libres, honnêtes et démocratiques de 2007 » et la décision du procureur « va à l’encontre de la volonté du peuple turc », a-t-il ajouté. M. Steg a appuyé les déclarations du commissaire européen à l’Elargissement Olli Rehn qui avait appelé samedi la justice turque à ne « pas se mêler de politique démocratique », estimant que la décision du procureur « n’est pas acceptable » pour un pays qui négocie pour rejoindre l’UE. « Le gouvernement allemand s’attend à ce que la Cour constitutionnelle ne suive pas la demande du procureur », a ajouté le porte-parole. Le procureur Abdurrahman Yalçinkaya a provoqué une crise politique en Turquie en demandant l’interdiction de l’AKP qu’il accuse de vouloir transformer, à terme, le pays en un Etat islamique et de détruire le système démocratique.


Turquie: la justice examine une demande d’interdiction du parti au pouvoir

 
Par Par Hande CULPAN AFP – Lundi 17 mars, 18h40 ANKARA (AFP) – La Cour constitutionnelle turque a entamé lundi l’examen d’une demande d’interdiction du parti au pouvoir pour des « activités allant à l’encontre de la laïcité », initiative qui risque, selon les analystes, de menacer la stabilité politique et économique du pays. « L’acte d’accusation a été distribué à nos membres et nous sommes en train de nommer un rapporteur pour l’étudier », a déclaré à des journalistes le vice-président de la Cour constitutionnelle Alifeyyaz Paksüt, indiquant que cette « étude préliminaire » pourrait durer une dizaine de jours. Les 11 membres de la Cour constitutionnelle doivent d’abord juger de la recevabilité, sur la forme, de l’acte d’accusation déposé vendredi par le procureur de la Cour de cassation, Abdurrahman Yalçinkaya, avant de pouvoir éventuellement examiner l’affaire sur le fond. Un verdict n’est pas attendu avant plusieurs mois. Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a fait savoir qu’il n’appellerait en aucun cas à l’organisation de législatives anticipées. « Les élections auront lieu à leur date normale », a déclaré M. Erdogan. « Il y a en ce moment de la stabilité et de la confiance et nous ne permettrons pas qu’elles soient perturbées (…) Nous continuons d’aller de l’avant d’un pas confiant », a-t-il ajouté. L’Union européenne, avec laquelle la Turquie a entamé des négociations d’adhésion, a appelé le week-end dernier la justice turque a « ne pas se mêler » de politique et l’Allemagne a invité la Cour a déclarer irrecevable la demande, estimant qu’elle pourrait nuire aux ambitions européennes de la Turquie. M. Yalçinkaya accuse le Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir et issu de la mouvance islamiste d’être devenu « un foyer d’activités allant à l’encontre de la laïcité », de vouloir faire de la Turquie un Etat islamique et de vouloir détruire le système démocratique. Outre l’interdiction du parti, il réclame que 71 de ses membres, dont M. Erdogan et le président Abdullah Gül, ancien cadre de l’AKP, soient interdits de politique pendant cinq ans. La démarche du procureur est le dernier épisode d’une lutte sans merci entre l’AKP – qui se définit aujourd’hui comme un parti « démocrate conservateur » ayant rompu ses liens avec l’islam politique – et les milieux favorables à la laïcité, très présents dans l’armée, la magistrature et certaines administrations. L’AKP, arrivé pour la première fois au pouvoir en 2002, a remporté avec près de 47% de voix les élections législatives de juillet 2007 mais n’a pas dissipé les soupçons des milieux défendant la laïcité dans ce pays très majoritairement musulman mais à régime laïc. La controverse a été relancée le mois dernier avec l’adoption d’une réforme autorisant le voile islamique dans les universités. De nombreux analystes voient dans cette querelle les résistances d’une élite urbaine laïque face à la montée en puissance d’une nouvelle classe moyenne conservatrice, représentée par l’AKP. « Le système résiste. La polarisation entre la justice et le gouvernement est une crise politique majeure », a déclaré la politologue Nuray Mert dans le quotidien Vatan. « Personne ne peut dire où cela s’arrêtera. » La Bourse d’Istanbul, déjà confrontée à une conjoncture mondiale défavorable, a chuté de 7,51% à la mi-journée lundi avant de se stabiliser et de terminer à -7,46% tandis que la livre turque perdait 3,3% de sa valeur face au dollar par rapport à vendredi. Cette « baisse est liée à la tentative de faire interdire l’AKP car le gouvernement va devoir utiliser son énergie politique pour régler cette affaire et du coup va ralentir les réformes demandées par l’UE et le Fonds monétaire international », a commenté Özgür Altug, chef économiste chez Raymond James. « Les investisseurs s’inquiètent aussi de ce qui va se passer en terme de stabilité politique si l’AKP est interdit », a-t-il ajouté.  


Les Danois critiquent la reparution des caricatures de Mahomet (sondage)

AFP 17.03.08 | 13h33 Plus d’un Danois sur deux estime que les journaux danois n’auraient pas dû réimprimer les caricatures de Mahomet en février, à l’inverse de la première publication en septembre 2005, selon un sondage publié lundi. Au total, plus de 58% des personnes interrogées ont jugé qu’il était erroné d’avoir à nouveau imprimé les caricatures du prophète, selon cette enquête de l’institut Ramboell Management publiée dans le quotidien Jyllands-Posten. A l’automne 2005 lors de la publication dans ce même journal de 12 caricatures du prophète Mahomet, près de deux Danois sur trois estimaient qu’il était approprié d’avoir fait paraître ces dessins, a rappelé Jyllands-Posten. Les quotidiens danois avaient pris la décision de réimprimer ces caricatures le 13 février pour marquer leur solidarité avec le dessinateur Kurt Westergaard, auteur d’une caricature controversée du prophète Mahomet, au lendemain de l’arrestation par le service de sûreté danois de trois hommes qui avaient prévu de l’assassiner. L’enquête, réalisée par téléphone du 10 au 13 mars, a porté sur 1.049 Danois âgés de plus de 17 ans. La publication des caricatures en 2005 avait provoqué une vague de protestations dans le monde musulman en janvier et février 2006.

 

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